Université Gaston Berger de Saint Louis
UFR des Sciences Juridiques et Politiques
Section de Droit de l'Entreprise
***************
EMOIRE DE MAITRISE
Sujet : LA SECURITE DU PASSAGER DANS LE TRANSPORT ARITIME
AU SENEGAL
|
Présenté par : Sous la direction de
:
M. Abdoulaye DIA M. Papa Banga GUISSE
Etudiant en Droit Chargé d'Enseignement à
Option Droit de l'Entreprise l'UFR de Sciences
Juridiques et Politiques
Remerciements
Après avoir rendu grâce à Allah le
Clément et le Miséricordieux puis s'être incliné
devant Mouhamadou Rassoûloullâh (Paix et Salut sur Lui), je ne
saurai ne pas remercier :
Mes parents : Hamzatou et Zeynabou SY sans qui je n'aurai point
été ;
Mon directeur de Mémoire dont l'apport est incommensurable
;
Monsieur Oumar NDIAYE, Administrateur
Délégué de la LMDG qui m'a permis de faire mon stage dans
ledit service, sachant que stage m'a été d'une importance
cruciale pour la réalisation du présent mémoire ;
Tous ceux qui de prés ou de loin ont contribué
à la réalisation de cette oeuvre...
Abdoulaye !
Introduction
L
a mobilité est très tôt apparue comme un
caractère de l'homme. Ainsi, celui-ci est rapidement allé
à la conquête de son entourage et, pour des raisons très
diverses, partant de la volonté de découvrir les
étendues et limites de son milieu naturel à
celle de « civiliser »1 certains de ses semblables, en
passant surtout par les déplacements pour des raisons économiques
et commerciales. Dans ce besoin de nomadisme, l'homme s'est vite lancé
à la recherche de moyens pour pouvoir franchir les barrières
qu'il rencontrera et pour rendre plus viables et plus rapides ses voyages. Il
empruntera plusieurs voies et les diversifiera au fur et à mesure que
les progrès scientifiques et techniques se feront, et on passera ainsi
par les voies terrestres et ferroviaires, maritimes et fluviales, et enfin par
les voies aériennes selon la destination et les ressources dont on
dispose. « La révolution industrielle a d'abord eu pour
conséquence (...) des progrès fulgurants des transports
»2. Le terme transport (du latin transportare) signifie
l'action d'acheminer des personnes ou des biens d'un lieu à un autre au
moyen d'équipements particuliers. De tous les types de transport, le
transport par la voie maritime est le plus, ou au moins l'un des plus
complexes, tant du point de vue de son organisation que des règles
juridiques qui l'encadrent. Il occupe une place incontournable dans le domaine
des transports pour diverses raisons :
ü D'un point de vue historique, il s'est
avéré être le plus déterminant dans les
conquêtes et explorations et a surtout joué un rôle
particulier dans l'occupation de notre planète par notre espèce
dans le cadre des flux migratoires, ainsi que dans les échanges
économiques et commerciaux.
ü Aujourd'hui son impact se mesure par l'ampleur du
rôle qu'il joue dans l'économie internationale. En effet, le
transit le plus important du point de vue économique se fait par la voie
maritime3.
1 Les missionnaires pensaient civiliser les tribus
indiennes et africaines Collection Microsoft® Encarta® 2005.
2 Fiche collège : « l'âge
industriel : la révolution des transports... »Collection
Microsoft® Encarta® 2005.
3 A l'exception du transport de personnes, la
quasi-totalité du transport international se fait par la voie maritime,
mis à part le transport ferroviaire dans certaines zones inaccessibles
depuis les eaux : c'est ainsi le cas de l'énergie, des marchandises,
etc.
Le transport maritime, ainsi conçu, se définit
comme le déplacement des personnes et des biens qui se fait par la mer.
Et le Législateur sénégalais de préciser que «
la navigation maritime est celle qui s'effectue en mer, dans les ports ou
rades, sur les étangs salés, les canaux y compris dans le domaine
public maritime et dans les parties des fleuves, rivières, en principe
jusqu'au premier obstacle permanent qui s'oppose au passage des navires de
merl. » Il s'y ajoute qu' «est considérée
comme maritime, la navigation qui est effectuée en eaux fluviales
lorsqu'elle est l'accessoire d'une navigation principalement effectuée
en eaux maritimes5. » Et si dans le domaine maritime le
transport de marchandises occupe une place indéniable du fait de son
importance économique, il reste que le transport de personnes est d'une
actualité certaine. En effet au plan international et surtout
européen, on prône aujourd'hui le retour à ce type de
transport6 qui occupe une place importante dans le transport
multimodal ; et du côté de la Manche c'est un transport qui garde
toute son importance. Au niveau national, c'est un transport qui
bénéficie d'une attention particulière du fait de son
poids dans le désenclavement7 de la partie sud du pays. Il
s'agit, en effet de l'une des préoccupations les plus
exaspérantes au vu des difficultés qui sont récurrentes au
niveau du transport par voie terrestre (avec les difficultés
liées au passage par le bac gambien ou au contournement de ce pays en
passant par la région de Tambacounda), et depuis le naufrage du MS
JOOLA8, qui restera pour toujours un drame particulièrement
triste.
Il faut aussi ajouter qu'à côté de cette
importance dont bénéficie le transport maritime de personnes, il
n'en demeure pas moins qu'il est aussi crucial d'insister sur le besoin de
sécurité qui règne dans ce secteur et qui est si souvent
bafoué dans tous les secteurs des transports au
Sénégal.
Le vocable de sécurité est polysémique,
mais renferme toujours un sentiment (situation de celui qui se sent à
l'abri...) ou un état [état qui peut concerner une
4 - Loi n°2002-22 du 16 août 2002 portant
code de la Marine Marchande ; article premier b) ; JORS n°6060 du samedi
17 Août 2002.
5 Loi n°2002-22 du 16 août 2002 portant
code de la Marine Marchande ; article premier b) ; JORS n°6060 du samedi
17 Août 2002.
6 Le transport maritime de personnes
7 Le désenclavement de la Casamance est l'une
des conditions sine qua none d'une paix durable dans cette région.
8 Naufrage survenu dans la nuit du 26 au 27
septembre 2002, au large des côtes gambiennes et ayant fait plus de 1800
morts. Ce naufrage est le plus dramatique de l'histoire ayant fait plus de
victimes que même le Titanic.
personne (sécurité individuelle) ou un groupe
(sécurité publique) ou un bien]. Il sera donc saisi aux sens
où :
ü il exprime la prévention des risques de toute
nature et la protection des personnes, des biens et de l'environnement contre
les accidents, les sinistres et catastrophes ;
ü il désigne aussi l'objectif de sauvegarde de la
société et l'organisation de celle-ci par la préparation
et la mise en oeuvre de moyens d'intervention et de secours dans le cadre de
plan d'organisation ;
ü ainsi que les mesures tendant d'une part à venir
au secours de la victime et d'autre part à compenser, chez elle, la
réalisation de ces risques9.
Le volet sécuritaire, dans le transport maritime de
personnes est très diversifié. Il concerne à la fois la
sécurité de l'environnement (face à la pollution...) de
l'équipage du navire, du transporteur qui peut être le
propriétaire ou l'armateur, des biens et surtout celle du passager. Il
convient dès lors de se focaliser sur la sécurité de ce
dernier. Il s'agit, précisons le, de la personne embarquée, soit
en vertu d'un contrat de transport ou encore contrat de passage, soit sans
billet et sans être en règle avec la police de
sortie10. Le législateur sénégalais, dans le
Code de la Marine Marchande, régissant toute l'activité maritime
sur le territoire sénégalais ou eu égard aux
ressortissants et à la flotte du Sénégal... le
définit comme étant « toute personne qui se trouve à
bord du navire en vue d'effectuer un voyage et qui n'est pas inscrite au
rôle d'équipage.» Il faut donc comprendre, au vu de cette
définition, que la qualification de passager ne dépend que de la
non appartenance à l'équipage en plus de la présence
à bord du navire dans le but de faire le voyage. Le législateur
ne fait donc pas la distinction, au moins en ce qui concerne la qualification,
entre le passager en règle et le passager clandestin qu'il conviendra
d'inclure dans notre étude. Celle-ci ne concernera, tout de même,
pas la navigation de pêche (donnant lieu à la capture de poissons
ou à l'exploitation des ressources halieutiques en
général), ni de servitude (affectée uniquement à un
service publique dans les ports et rades), encore moins à la navigation
auxiliaire (pilotage, lamanage, remorquage, etc.), ou à celle à
but non
9 Vocabulaire juridique Henri Capitant, Gérard
CORNU.
10 Vocabulaire juridique Henri Capitant, Gérard
CORNU.
lucratif (pêche sportive), ni la navigation de
circulation11. Elle se limitera donc à la
sécurité du passager dans la navigation commerciale12.
Ce qui exclut de notre champ de réflexion le transport militaire ; et la
navigation de plaisance pratiquée à bord d'un navire dans un but
d'agrément ; mais nous oblige à considérer les types de
navigation dont la destination aura été, éventuellement,
changé13 pour le simple fait que leur activité sera
considérée comme relevant de la navigation commerciale.
L'étude de ce sujet revêt pas mal
d'intérêts ; ce, tant sur le plan théorique que pratique.
Au titre des premiers, il y a d'abord que cette réflexion sur la
sécurité du passager dans le transport maritime nous permet
d'aborder le type de transport qui, d'un point de vue historique, a joué
le rôle le plus exorbitant dans la pire abomination, ou du moins l'une
des pires, qu'a connues l'espèce humaine dans son évolution
à travers la traite négrière. Ensuite, ce sujet est un
prétexte pour revenir sur la protection dont bénéficie, et
à juste titre, l'être humain, au moment où tous les yeux
sont rivés sur la protection et la préservation de
l'environnement ; même si, sans aucune intention d'en amoindrir la
portée, celle ci contribue très grandement à la protection
de l'être humain lui-même. Enfin, cette étude nous permettra
de revenir sur la spécificité du droit maritime ; cette branche
du droit qui tire toute son originalité de la notion de « risque de
mer »14. Il ne faudrait surtout pas ignorer l'importance de ce
sujet du point de vue de l'application des droits de l'homme en abordant la
question des passagers clandestins dont le nombre ne cesse d'être revu
à la hausse. Enfin cette étude nous permettra d'aborder la
question de l'émigration clandestine par voie maritime.
L'actualité de cette question apparaît à travers le boom
qui est noté du coté des côtes africaines, d'où les
émigrants quittent par centaines en destination des pays
européens. C'est ainsi que des milliers de sénégalais ont
tenté de rejoindre les côtes espagnoles15.
11 Elle a pour but l'exploitation des
propriétés riveraines, agricoles ou industrielles ou des
parcelles concédées sur le Domaine public maritime.
12 « La navigation commerciale a pour objet le
transport de marchandises ou de passagers, de leurs bagages et
éventuellement de leur véhicule » ; Article 13a) de la loi
portant code de la marine marchande.
13 Si le navire se livre à une activité
de transport de personnes à but lucratif.
14 René Rodière, Emmanuel Du Pontavice ;
Précis de Droit Maritime ; 12ème édition ; Dalloz 1553
P.6.
15 Il s'agit d'une grande vague d'émigrants
sénégalais et africains qui par des pirogues tentent vailles que
vailles de rejoindre l'Espagne qu'ils considèrent comme une sorte
d'Eldorado. C'est ainsi que les autorités des pays africains et espagnol
ont combiné leurs efforts avec l'appui de l'Union Européenne pour
lutter contre cet exode.
A coté de ces intérêts théoriques,
il y a une masse d'intérêts qui peuvent être
qualifiés de pratiques. Au titre de celles-ci, il y a d'abord l'impact
de la modernité dans la construction et l'exploitation des navires et
des installations portuaires, comme aussi dans tout ce qui compose le
dispositif de sécurité dans le milieu maritime16.
Alors que le transport maritime de personnes fait l'objet d'une promotion
considérable ; au Sénégal, le législateur fait la
distinction entre « un secteur moderne relativement bien agencé,
et, un secteur interlope dont les acteurs agissent presque toujours en marge de
la réglementation »17. Toutefois, notre sujet fait fi de
cette distinction pour donner toute son ampleur à la
sécurité de la personne humaine dont la
sacralité18 fait que, quelque soit le domaine
d'activité étudié, l'homme bénéficie d'une
protection sans égale. Enfin, cette étude nous permet de relever
le degré d'internationalité des règles dans le domaine
maritime.
Les aspects sécuritaires ne peuvent aucunement
être occultés dans le cadre d'une réflexion sur le
transport maritime, encore moins sur celui des personnes. Pour donc se
focaliser sur cette protection des êtres humains, il convient de se
demander comment est organisée la protection du passager dans le
transport maritime au Sénégal? Autrement dit, il s'agira de
s'intéresser à cet ensemble de mécanismes et de
règles qui sont mis en places pour la sécurité du passager
dans le transport par voie de mer.
La sécurité de la personne embarquée et
ne faisant pas partie de l'équipage est une préoccupation
inscrite au rang des plus importantes et des plus pesantes dans le cadre du
transport de manière générale et encore plus dans le
domaine maritime. En effet, indépendamment du transport lui-même,
la sécurité de l'objet du transport acquiert la valeur d'une
obligation succincte et implicite19. Prise dans cette perspective,
l'obligation de sécurité est cette obligation accessoire en vertu
de laquelle,
16 De la prévention à l'intervention
des secours en cas de réalisation des risques il y a toute une gamme de
nouveautés qui apparaissent et on assiste à l'élaboration
de nouvelles techniques de signalisation universelle de détresse pour le
secours entre les navires. Chaque navire est quasiment sûr de recevoir de
l'aide même s'il n'émet pas les signaux de détresse avec
les nouvelles technologies dont sont dotés les nouveaux navires.
17 Voy. Exposé des motifs de la Loi 2002-22
portant code de la marine marchande.
18 Cette sacralité est
réaffirmée par la nouvelle constitution du Sénégal
votée le 07 janvier 2001 et entrée en vigueur depuis le 22
janvier 2002 en son article 7.
19 Au Sénégal il s'agit d'une
obligation expressément prévue par le COCC, qui en fait une
partie intégrante du contrat de transport. Il s'agit d'une
consécration de la solution donnée par la Cour de Cassation
française en 1511.
dans l'exécution du contrat de transport, supposant
l'utilisation de certaines installations et présentant certains risques,
le professionnel (ici le transporteur) est tenu envers son client (le passager)
soit de garantir, soit de faire simplement tout son possible pour garantir
l'intégrité corporel de celui-ci20. 21
Le destin de l'obligation est, en principe, son
exécution. Mais il faudrait d'abord qu'elle existe et qu'elle soit
identifiable. Il convient, pour bien cerner l'étude de cette obligation
de sécurité qui pèse sur le transporteur maritime, de
rechercher ses fondements. Ceux ci sont tantôt contractuels, tantôt
légaux, et des fois même, proviennent d'organismes internationaux
et s'imposent presque aux Etats... La question des fondements
épuisée, il faut aussi voir comment se manifeste cette obligation
avant d'aborder les garanties qui l'accompagnent à travers l'obligation
de souscription d'assurance d'une part et celle du respect strict des normes
établies ; avec la participation de certains organes de contrôle.
L'étude exhaustive de ces points est possible dans une première
partie dans la mesure où il s'agira de tenter de saisir l'essence de
l'obligation de sécurité. Cette dernière, si elle est
parfaitement exécutée ne pose aucun problème particulier.
D'où l'intérêt de s'attarder dans notre deuxième
partie sur la question du manquement à l'obligation de
sécurité. Il faut alors inclure dans notre étude la faute
et sa place dans l'engagement de la responsabilité, qui sera
tantôt celle du transporteur lui-même et tantôt celle
d'autres personnes, allant du capitaine au constructeur, et passant par celle
du propriétaire, de l'armateur, entre autres. Il ne faudra pas perdre de
vue que l'engagement de la responsabilité va de pair avec des faits qui
peuvent l'exonérer, avec la prise de sanctions qui varient selon la
gravité et la nature des manquements notés. Il s'agit
tantôt de mesures administratives et tantôt de décisions
judiciaires ; mais la possibilité est laissée aux parties
à un litige de recourir à des solutions extrajudiciaires.
20 Selon le cas il s'agira d'une obligation de
résultat ou tout simplement d'une obligation de moyen
21 Voy. Pour cette définition de l'obligation
de sécurité le vocabulaire juridique de Henri Capitant et
Gérard Cornu
Première partie : De l'obligation de
sécurité
E
n matière maritime, la sécurité a
toujours été une priorité. L'homme a très tôt
compris que dans ce secteur des transports, il fallait que le professionnel
veille sur lui et surtout qu'il le protège
face au perpétuel danger que représente la mer.
La sécurité est perçue, dans le contrat de transport,
comme une créance dont bénéficie le voyageur et qui
pèse sur le transporteur. En d'autres termes, le passager est
créancier d'une obligation de sécurité dont est
débiteur le transporteur. Toutefois, il convient de noter que cette
obligation a une portée variable, intrinsèquement liée
à son fondement. Ce dernier obéit à la pyramide des normes
de Hans KELSEN, et l'obligation lie le transporteur à des niveaux qui
dépassent de loin le seul cadre prévu par le contrat de transport
établi, ici, sous forme de titre de voyage. L'obligation de
sécurité se mesurera alors par son importance tirée de sa
naissance par la volonté des parties, d'une part ; mais aussi par son
ampleur qui est liée à la nécessaire protection du
passager, protection qui se fait par la prise en charge de sa
sécurité au-delà de la traversée, et aussi par
l'exigence de garanties tendant à renforcer sa protection, d'autre part.
On précisera dans notre étude les fondements (chapitre premier)
et l'étendue (chapitre second) de l'obligation de
sécurité.
Chapitre premier : Les fondements de l'obligation de
sécurité
Les fondements de l'obligation de sécurité sont
très diversifiés. Ils tiennent tantôt à la loi et
aux règlements, tantôt proviennent de stipulations admises entre
le transporteur et son passager, ou encore sont l'effet de normes
internationales. Et ils obéissent à l'énumération
établie par l'article 39 du code des obligations civiles et
commerciales, ci-après nommé COCC22, sur les sources
des obligations. En tenant compte de la volonté du transporteur et du
lien contractuel qui existe, ou non, entre le voyageur et lui, on classera les
fondements de l'obligation de sécurité selon leur origine
volontaire on non. On distinguera alors le fondement contractuel de
l'obligation de sécurité (Section 1) de ses fondements
extracontractuels (Section 2).
Section1: Le fondement contractuel de l'obligation de
sécurité
Le transport maritime repose, comme les autres types de
transports, sur l'existence d'un contrat. C'est donc sur la base de cet accord
de volontés entre le transporteur et le passager, que naissent les
obligations réciproques. Le contrat de transport maritime est donc un
contrat synallagmatique conclu entre un professionnel, en tout cas pour ce qui
est du transport régulier de passager, et ses clients. Le
législateur sénégalais donne une définition du
contrat de transport maritime de personnes. Il s'agit, au regard du code de la
marine marchande, de « tout contrat par lequel le transporteur s'engage
contre paiement d'un fret à transporter (...) des personnes par mer d'un
port à un autre»23. Il s'y ajoute, selon la même
loi qu'un contrat qui se trouve être l'accessoire du contrat de transport
par mer peut acquérir cette qualification par extension ; en effet
« ...un transport par quelque autre mode n'est considéré
comme un transport par
22 Loi n°63-62 du 10 juillet 1963 entrée
en vigueur le 15 janvier 1967.
23 Loi n°2002-22 portant code de la marine marchande, Livre
I, Titre 1, Article premier b) Définitions hème.
mer que dans la mesure où il se rapporte au transport
par mer»24. Ce contrat ainsi défini a pour substratum le
titre de voyage (paragraphe 1) mais ne produit pas d'effets que pour les
parties ; en effet, un ayant droit du passager pourrait en
bénéficier (paragraphe 2) dans la perspective où
l'obligation de sécurité connaîtrait certains
manquements.
Paragraphe1: Le titre voyage, support du contrat de
transport.
La base fondamentale du bénéfice de l'obligation
de sécurité, ainsi que de toutes les obligations pesantes,
à titre accessoire, sur le transporteur, est le contrat. La loi portant
code de la marine marchande dispose que : « par le contrat de passage le
transporteur s'oblige à transporter, par mer, sur un trajet
défini, un voyageur qui s'oblige à s'acquitter le prix de
passage»25 Ce contrat manifeste la volonté du
transporteur de s'engager et fait peser sur lui toutes les obligations connexes
à celle de transporter le passager ; à titre onéreux, car
obligation est faite à celui-ci de payer le « billet de
passage». Celui-ci représente presque toujours le contrat de
transport dont il faut préciser les caractéristiques (A). Il est
important d'identifier la partie qui, au nom de ce contrat,
bénéficie de l'obligation de sécurité (B) mais on
ne saurait terminer l'étude du titre de transport sans revenir sur son
importance dans le contexte économique de nos états (C).
IL. Les caractéristiques du contrat de transport de
personnes
Le contrat de transport de personne revêt, la plupart du
temps, la forme d'un titre de voyage, et dans certaines situations la forme
plus simple d'un
24 Ibid.
25 Livre V sur le transport maritime..., Titre II
sur l'exploitation Commerciale du Navire, Chapitre III sur le transport de
passagers, article 473 sur la définition du domaine du contrat de
passage.
ticket26. Il s'agit en effet d'un contrat
réel dont la formation est soumise à la condition de l'achat du
billet de passage. Celui-ci manifeste l'acceptation du transporteur qui l'a
vendu à un passager de le transporter ; il manifeste aussi l'acceptation
de ce dernier d'être transporté par le transporteur à qui
il a payé le prix de passage.
Quand le Législateur dispose que le contrat de passage
est le fondement de l'obligation de transporter le passager qui pèse sur
le transporteur, cela s'entend en un sens assez large incluant les obligations
accessoires à celle-ci : c'est ainsi que le passager clandestin n'est
pas protégé au même titre que le passager qui est en
règle (il l'est, cependant, à un autre titre et sur d'autres
bases). Est aussi exclu le passager transporté gratuitement. C'est ce
qu'entend nous faire comprendre le Législateur qui dispose
expressément que : ces « dispositions ne s'appliquent ni au
transport bénévole ni aux passagers clandestins». C'est que
le contrat de transport maritime de personnes ne doit être regardé
que comme un contrat synallagmatique à titre onéreux. Et la
personne transportée bénévolement ne saurait se
prévaloir d'un lien contractuel le liant au transporteur et sur la base
duquel il pourrait se prévaloir d'une quelconque créance de
sécurité ; même si cela n'emporte pas une absence totale de
protection à son égard27. Toutefois le
législateur admet une exception à cette limite en ce que le
transport gratuit, effectué par une entreprise de transport maritime de
personnes, n'est pas exclu du champ d'application des règles valables
pour le transport à titre onéreux28. Il faut
s'attacher à la commercialité du transport effectué. C'est
d'ailleurs ce qui explique que le transport de plaisance ne soit pas soumis, au
même degré que les autres types de transport, ni à la
même rigueur tant dans son exécution, son contrôle, ainsi
que dans toute sa gestion. C'est que c'est la protection du passager ayant
payé son prix de passage qui passe comme une priorité.
26 Article 474 de la même Loi
27 Cette protection existe mais ne repose pas sur le
contrat de transport.
28 Article 473 in fine.
B. Le passager, principal bénéficiaire de
l'obligation contractuelle de sécurité
Le titre de voyage est donc une première29
garantie mise en place pour le passager qui a payé son droit de passage.
Le titre de voyage contient certaines stipulations liant le passager et le
transporteur. Et certaines actions en justice ne peuvent être
intentées que par des passagers ayant leur ticket ou titre de voyage...
Ce document est en effet un moyen de preuve écrit de l'existence du lien
d'obligation entre le transporteur et son détenteur. Le contrat de
transport maritime de personnes est le plus souvent conçu sous la forme
d'un contrat d'adhésion. Le transporteur fixe en amont les règles
qui régissent ses rapports avec le passager : il appartient alors
à ce dernier de les accepter ou de les refuser. L'acceptation des
conditions du transport se fait par la simple acquisition du titre de transport
par le voyageur et non par la présence à bord. Cela ne veut pas
dire que la présence à bord n'est pas importante ; il s'agit d'un
critère fondamental dans la qualification de passager. Pour être
considéré comme étant un passager, il faut au
préalable être présent sur le navire, et que cette
présence soit régulière et enfin il faut être
étranger au rôle d'équipage. C'est le paiement du prix de
passage qui distingue par ailleurs le passager régulier du passager
clandestin. Dans l'élaboration du titre de transport certaines clauses
sont, bien entendu, d'ordre public ; et leur absence ne pourrait aucunement
justifier une absence d'obligation de la part du transporteur. Tel est le cas,
en ce qui concerne, les clauses relatives à la sécurité de
manière générale et à celle du passager en
particulier. C'est que « la personne humaine est
sacrée»30 et cette sacralité sous-tend l'exigence
de toute une armada relative à la sécurité du passager,
dans le contrat maritime. Et cette exigence est accentuée par la place
et la probabilité du danger, ou simplement du risque, en matière
maritime. Ce sentiment a poussé le législateur, dans le but de
protéger le
29 Il existe en effet d'autres garanties qui sont
prévues pour la protection du passager et qui peuvent être mises
en oeuvre.
39 Article 7 de la constitution
sénégalaise du 22 janvier 2002.
passager, à prévoir une impossibilité
pour le transporteur d'insérer dans le contrat de passage des clauses,
qui tendraient à écarter certaines dispositions
légales31 au préjudice du passager. Il ne s'agit donc
pas que de simples dispositions supplétives de volonté mais, au
contraire de dispositions d'ordre public. C'est, par exemple, le cas de
l'obligation de souscription d'assurance ou encore celle de maintenir le navire
en bon état de navigabilité, entre autres, qui pèsent sur
le transporteur.
Il faut signaler au passage l'importance du contrat de
transport dans les litiges opposant les co-contractants, surtout quand il
s'agit d'un aspect de l'obligation de sécurité, en ce qu'il
précise, dans ses clauses, les modes reconnus de règlement des
litiges, même si le passager pourra toujours user des voies du droit
commun. Aussi, c'est en fonction des informations qu'il contient que l'on
détermine la juridiction compétente ou la loi applicable (on se
réfère au lieu et à la date de formation,
d'exécution ... ou à la nationalité des co-contractants,
ou encore aux diverses informations qu'il fournit sur le lieu et la date de
départ, la destination, les escales, etc.).
La délivrance du titre de transport est même
devenue une obligation à part entière pesant sur le transporteur
maritime au profit du passager, et dans certains cas, le manquement à
cette obligation est sanctionné par l'annulation du contrat de
transport. C'est le cas dans les croisières. En effet, le
législateur dispose dans l'article =42 du code de la marine marchande
que : « les organisateurs de croisières maritimes doivent
délivrer à chaque passager ou groupe de passagers, sous peine de
nullité du contrat, un titre de croisière...». Dans cette
catégorie de transport maritime, la délivrance du titre de
transport est donc une formalité obligatoire à la formation du
contrat. C'est, du moins, ce que la loi prévoit. Il faut ainsi chercher
à mesurer la pertinence du titre de transport dans nos Etats en voie de
développement. Il faut juste noter que cette pertinence est de plus en
plus incertaine.
31 « Ces dispositions ne peuvent pas être
écartées au préjudice du passager » Article =31 du
code de la marine marchande ; Livre V, Titre II, Chapitre III : Le transport de
Passagers.
C. La remise en cause de l'importance du titre de transport
dans les Etats en voie de développement
Dans les pays en voie de développement, tel le
Sénégal, il convient de se réinterroger sur la vraie place
du titre de transport en l'absence d'un « contrôle rigoureux »
de l'activité de transport maritime, du moins quand il s'agit de
transport de personnes, surtout dans ce que le législateur appelle
« le secteur interlope dont les acteurs agissent souvent en marge de la
réglementation»32qui accentue l'insécurité
dans le transport de passagers. Tel est le cas dans la capitale du pays et
précisément à l'île de NGOR où l'exemple de
l'accident survenu dans la seconde moitié des années 90 est assez
édifiant.
L'importance du titre de voyage, même dans le domaine
que le législateur qualifie de moderne et relativement bien
agencé, est à revoir. Et la tragédie du joola du 26
septembre 2002 est assez révélatrice des insuffisances dans ce
domaine. Quand on note que, seulement un mois et dix jours après
l'entrée en vigueur du nouveau code de la marine marchande dans lequel
le législateur se fixe pour objectif de pallier à l'«
insécurité » qui caractérisait et caractérise
encore le transport maritime sénégalais, survient le naufrage le
plus meurtrier de l'histoire, sur toute la planète et en temps de
paix33. Et précisons que le nombre de places prévues
ne faisait même pas le tiers du nombre réellement
transporté ; et dire qu'il y a eu plus de tickets vendus que de places
disponibles34.
Aujourd'hui encore ce problème reste
d'actualité. Il est en effet très étonnant que les
sénégalais, ayant retrouvé le « goût » du
transport maritime même clandestinement organisé, se jètent
sans aucune hésitation dans ce qu'ils conçoivent comme
étant l'ultime issu de secours vers un Eldorado très incertain.
De toutes les manières dans ce secteur clandestin de transport
d'émigrants le
32 Exposé des motifs de la loi 2002-22 du 16 Août
2002 portant code de la marine marchande. 33Selon
l'Encyclopédie Wikipedia le record était détenu jusque
là par : Le naufrage du ferry philippin Doha Paz qui a pris feu et
sombré après une collision avec un pétrolier le 20
décembre 1987 et a fait officiellement : 1586 morts,et le naufrage du
Titanic ( avec 1513 morts) alors que le ferry sénégalais a
sombré avec officiellement 1863 victimes.
34 Selon le rapport d'enquête technique ayant
suivi le naufrage il y a eu 809 billets vendus pour 550 places prévues
pour le navire, avec en plus les passagers pour qui le transport était
gratuit (les militaire, leurs familles, les enfants, etc.) et les
resquilleurs
titre de voyage n'a quasiment aucun rôle à jouer. Il
n'y a pas la place qu'il aurait dû y avoir.
Ce titre de voyage, dont la valeur réelle, au
Sénégal, est on ne peut plus controversée, ne produit pas
d'effets qu'à l'égard des parties, surtout en son contenu relatif
à l'obligation de sécurité. Il recèle une sorte de
stipulation pour autrui qui connaît une application assez
spéciale.
Paragraphe2: La stipulation pour autrui dans le contrat de
transport maritime de personnes
La stipulation pour autrui est une clause existante dans un
contrat au profit d'un tiers. Même si pour la plupart du temps elle est
une prévision expresse, dans le contrat de transport maritime de
personnes, elle existe toujours, ne serait-ce, qu'à titre
éventuel, du fait de la permanence du risque. Il faut ainsi en
préciser les fondements ainsi que les bénéficiaires.
A. Les fondements de la stipulation pour autrui dans le
contrat de transport maritime de personnes
Dans ce contrat, l'existence de la stipulation pour autrui est
établie par la déduction logique entre certaines obligations et
certaines clauses. Il s'agit, en effet, d'une conséquence provenant,
d'une part, de l'obligation de sécurité qui subsiste après
la réalisation d'un risque et fonde la réparation d'un
préjudice subi par un passager du fait du contrat de transport et la
transmission de cette créance dont bénéficie le voyageur
à ses ayants droits, et d'autre part de la transmission du
bénéfice de l'assurance souscrite pour le passager dans certains
cas à des tiers.
En droit, il existe un principe général qui
oblige toute personne à réparer le préjudice causé
à autrui par ses agissements ; et le droit maritime qui régit le
transport de personnes par mer ne se soustrait pas à cette règle.
Ainsi quelque soit le fondement sur la base duquel il a été
établi et reconnu qu'un transporteur
est fautif, ce dernier sera tenu de réparer le dommage
qu'il aura causé. C'est ainsi que le décès d'un passager,
s'il lui est imputable, fera peser sur le transporteur fautif une obligation de
réparation dont bénéficieront les ayants droits du
défunt. Et le législateur de préciser que : « les
actions nées du contrat de transport de personnes sont portées
devant les juridictions compétentes selon les règles de droit
commun»35 ; c'est sur la base de cette obligation de
réparation qui pèse sur celui dont la responsabilité a
été reconnue et engagée que les familles de victimes
pourront être indemnisées.
La stipulation pour autrui peut aussi être
relevée dans le contrat de passage par l'existence du rapport
d'assurance. L'assurance est obligatoire dans le transport maritime de
personnes et cette obligation est posée par le législateur dans
le but de protéger le passager36. Tout armateur de navire
à passager est, par conséquent, tenu de souscrire une police
d'assurance pour ses passagers. Même si cette disposition tend plus
à protéger le passager, elle contient, par sa portée une
stipulation pour autrui. Il est nécessaire pour une indemnisation
régulière d'identifier le bénéficiaire de la
stipulation pour autrui.
13. Le bénéficiaire de la stipulation pour
autrui dans le contrat de transport
Il s'agit soit d'un bénéficiaire
désigné, ou d'un ayant droit de la victime en cas de dommage.
Dans la première situation il y a moins de difficulté, alors que
dans la seconde il se pose d'énormes problèmes de preuve. C'est
ainsi que, dans la suite qui a été donnée au naufrage du
ferry le joola, l'Etat du Sénégal, après s'être
déclaré responsable a tenu à indemniser les familles de
victimes. Même si cette tournure qu'ont prise les
événements est peu ou prou favorable aux familles de victime,
elle ne garantit pas un fort degré de juridicité. En effet, une
juridictionnalisation de cette affaire aurait peut être pu
éclairer, un peu plus, les
35 Article 724 du code de la marine marchande sur la
loi applicable et les juridictions compétentes en cas de contentieux
maritime.
36 Article 472 du code de la marine marchande ; Livre
V, Titre II, Chapitre III : Le transport de Passagers.
circonstances de droit et de fait dans lesquels est intervenu
cet « accident». Mais enfin, quelle aura été la chance
pour les familles éplorées de voir leurs actions aboutir, quand
on considère les difficultés liées tant à la preuve
de la perte de membre(s) de leur famille et si celle-ci est
avérée, celle de l'existence d'un lien de droit entre ce dernier
et le transporteur, en l'occurrence l'Etat du Sénégal ? Que de
questions seront restées sans réponses surtout quand il s'agira
de revoir jusqu'à la plus profonde teneur, les causes réelles du
naufrage et les suites juridiquement admises. C'est qu'en droit commun la
charge de la preuve pèse sur le demandeur et si la difficulté
tenant à cette preuve est surmontée, il restera comme obstacle la
lourdeur des procédures tendant à se faire indemniser par l'Etat
et la complexité du régime juridique de cette indemnisation.
Notons que la gestion du joola était des plus
complexes car faisant intervenir pas mal d'organes relevant de régimes
extrêmement contradictoires. Il s'agissait, en effet, d'un navire
appartenant à l'Etat, donc un bien des pouvoirs publics, faisant de la
navigation commerciale, donc intervenant dans une activité de droit
privé, et géré par la marine nationale qui est soumise
dans son organisation et son fonctionnement au régime spécial de
l'armée sénégalaise. Le rapport d'enquête qui a
suivi le naufrage démontrera que pas mal de difficultés sont
nées de la complexité à laquelle a abouti cet amalgame de
régimes...
Dans la stipulation pour autrui contenu dans le contrat
d'assurance on note la coexistence de deux bénéficiaires
différents. En effet cette stipulation pour autrui revêt deux sens
: d'une part il s'agit d'un contrat d'assurance, se rapportant au contrat de
transport, auquel le passager n'est pas partie mais bénéficiaire
et d'autre part en cas de réalisation du risque et dans certaines
conditions ce bénéfice du passager né de son contrat avec
le transporteur est transmis à ses ayants droit qui pourtant ne sont pas
partie au contrat de transport. Dans les deux cas les conditions de la
stipulation pour autrui sont réunies. Toutefois la transmission du
bénéfice de ces stipulations obéit aux règles du
droit commun de la succession que l'on retrouve dans le code
sénégalais de la famille37.
37 Il s'agit de la Loi 32021 du 12 juin 1532 modifiée et
complétée plusieurs fois et entrée en vigueur le
1er janvier 153: en ses Livre VII et VIII sur les Successions,
donations et testament.
A coté de ces fondements de l'obligation de
sécurité tenant au contrat de transport lui-même il existe
d'autres fondements qui tiennent, non de l'existence du lien contractuel a
fortiori mais d'autres catégories de dispositions dépassant le
cadre contractuel.
Section 2 : Les fondements extracontractuels de
l'obligation de sécurité.
La sécurité de la personne ne repose pas que sur
le contrat qui la lie à son transporteur car elle est beaucoup trop
importante pour qu'on la laisse entre les mains des principaux
concernés. C'est ainsi que plusieurs acteurs s'immiscent dans ce rapport
entre créancier(s) et débiteur de l'obligation de
sécurité. Ces acteurs peuvent être considérés
selon leur importance ou, disons, selon la portée des normes qu'ils
posent : d'une part on note l'existence de normes qui vont au- delà d'un
Etat, ou d'un territoire restreint et s'appliquent sur une échelle
supranationale ; et, d'autre part les Etats gardent une certaine
souveraineté quant à la gestion de la sécurité de
l'exploitation maritime surtout en ce qui concerne la protection des
êtres humains sur leur champ de compétence. Il convient alors de
distinguer les fondements supranationaux de la sécurité du
passager (paragraphe 1), qui reste encore une obligation pesant sur le
transporteur, de ses fondements nationaux (paragraphe 2)
Paragraphe1: Les Fondements Supranationaux de l'obligation
de Sécurité
La prise en charge de la sécurité du passager
dans le transport maritime se fait, sur le plan international, principalement
de deux manières. D'abord on constate l'existence d'un grand ensemble de
règles qui font peser sur le transporteur une obligation de
sécurité (A) et à côté de ces règles
on note la
présence d'organismes internationaux participant à
l'amélioration de la sécurité des personnes en mer (B)
IL. Le dispositif international en matière de
sécurité des passagers
Les sources des normes internationales de
sécurité ont varié au cours de l'histoire. On assiste
ainsi à l'émergence d'un véritable corps de règles
au plan international (1) d'une part mais aussi à la diversification de
ces règles (2).
1 . L'émergence d'un corps de règles au plan
international
On est, en effet, passé de la création
coutumière à la sécrétion conventionnelle des
normes. C'est que l'on s'est rendu compte des limites qui peuvent exister dans
les pratiques coutumières internationales. Une règle s'appliquait
dans un port, sur les mêmes eaux, et au plus sur les ports d'un
même océan. Le naufrage du Titanic38 fût aussi
assez révélateur des limites quant aux règles
internationales. C'est suite à l'enquête qui a été
effectuée après le naufrage qu'un certain nombre de dispositions
ont été prises dans le transport maritime. En effet lors de la
première conférence sur la sécurité en mer à
Londres le 12 novembre 1913 certaines règles ont vu le jour: c'est le
cas de la mise en place d'une patrouille internationale de surveillance des
glaces, et de l'obligation pour tout navire de prévoir une place dans un
canot de sauvetage pour chaque personne à bord, de procéder
à des exercices d'embarquement, ainsi
38 Le Titanic appareille le 10 avril 1912 de Southampton, au
sud de l'Angleterre, puis se rend successivement à Cherbourg en France
et à Queenstown en Irlande pour embarquer des passagers avant de prendre
le large en direction des États-Unis. Dans la nuit du 14 au 15 avril, le
Titanic heurte un iceberg au sud des bancs de Terre-Neuve ; l'iceberg
crève cinq des seize compartiments étanches, soit un de plus que
ce qui avait été considéré possible en cas
d'accident, et le bateau déclaré insubmersible sombre en moins de
trois heures. Sur les 2 220 passagers et membres d'équipage, 1513
trouvent la mort dans cette catastrophe. Collection Microsoft ® Encarta
® 2005. (c) 1993-2004 Microsoft Corporation.
que de maintenir une veille radio à plein
temps39. Il s'en suivra un certain nombre de conventions
internationales qui devraient permettre à accentuer la gestion de la
sécurité des personnes en mer.
Aujourd'hui il existe une législation internationale,
en matière de sécurité des personnes notamment, et tout
transporteur est tenu de respecter les normes supranationales
élaborées aux fins de protéger les passagers. Les plus
importantes d'entre elles sont certainement les Conventions SOLAS (pour la
sauvegarde de la vie Humaine en Mer). Une première esquisse de cette
convention fût élaborée juste après le naufrage du
Titan ic4° et la Convention SOLAS connaîtra un certain
nombre de modification dans le sens du perfectionnement. Cette convention
contient des règles obligatoires rassemblées dans le vocable de
normes ; et des directives, tendant à faciliter, tout en
sécurisant, l'exploitation dans les transports maritimes de personnes,
communément appelées pratiques recommandées. Tout ce
dispositif international tend à améliorer la gestion de la
sécurité, que la législation internationale désigne
par le terme sûreté.
L'obligation de sécurité pesant sur le
transporteur ne provient pas que de la convention SOLAS ; il existe aussi
d'autres textes qui concourent à cette fin. Tel est le cas par exemple
du Code ISPS, du Code ISM, de la Convention FAL, entre autres. Et l'OMI publie
très souvent des circulaires, directives et résolutions allant
dans ce sens. L'ONU, à son niveau, a eu à prendre pas mal de
résolutions qui s'inscrivent dans cette perspective : notamment la
Résolution 1373 (en 2001) sur la lutte contre le terrorisme qui a
aboutit par l'adoption par l'OMI, lors de sa 22ème session de
la résolution A.924 (22) en novembre 2001 dans un contexte de peur
généralisée qui justifie la mise en place d'un tout
39Collection Microsoft ® Encarta ® 2005. (c)
1993-2004 Microsoft Corporation
40 Le naufrage du Titanic eut un énorme impact sur la
télégraphie sans fil. Il aboutit à la création de
la First International Conference on the Safety of Life at Sea, à
Londres en Angleterre, le 12 novembre 1913. Le traité, conclu par la
conférence, donna comme résultat la formation du fond
international de l'International Ice Patrol, une agence des US Coast Guard, qui
établit à présent des rapports et des études sur la
localisation des icebergs du nord de l'océan Atlantique qui pourraient
constituer une menace pour le trafic maritime transatlantique.
sécuritaire. Toutefois, en matière internationale
on note aussi une diversité de règles tendant à
protéger les passagers.
2 . La diversification des règles internationales de
protection du passager
A côté de ces normes spéciales qui
régissent l'activité de transport maritime au niveau
international et qui ont aussi vocation à s'appliquer au niveau
national, il y a les textes généraux qui procurent à toute
personne une protection, et qui s'imposent à tous les exploitants de
navire à passagers. Il s'agit principalement de la déclaration
Universelle des Droits de l'Homme et de la Charte Africaine des Droits Humains.
C'est d'ailleurs ces textes qui, à côté de certains textes,
qui existent au niveau national et qui aussi se fondent sur eux, justifient la
protection du passager clandestin. Sur le transport de passagers clandestins il
y a, par exemple, la convention SUA de Rome, signée en 1988. Cette
convention met en place un véritable dispositif de protection des
passagers clandestins mais aussi de lutte contre l'expansion de ce
fléau.
La pertinence de l'unification du Droit maritime au niveau
international est à rechercher dans la facilitation de l'application ou
la mise en oeuvre des mesures et prescriptions d'une part et le
règlement des conflits de lois en matière de transport
international.
Toutefois dans l'encadrement international de l'obligation de
sécurité, notons que l'élaboration du seul dispositif
matériel composé de prescriptions et de proscriptions est loin
d'être suffisant ; c'est ce qui justifie l'intervention de certains
organismes internationaux en la matière.
B. L'assistance des organismes internationaux, acteurs en
matière de sécurité des passagers
Le champ pris en compte pour la gestion de la sûreté
maritime ne se limite pas à la seule élaboration de règles
protégeant le passager. Les acteurs
internationaux participent à la mise en oeuvre des
règles édictées (1) mais aussi interviennent dans la
formation des nationaux et de toutes personnes appelées à
participer à cette mise en oeuvre (2).
1 . La participation des acteurs internationaux dans la
mise en oeuvre des règles édictées.
On note, en effet, une implication pratique, et plus ou moins
technique, de certains organismes spéciaux intervenant en matière
de sécurité de la navigation. Leur profusion se traduit par une
contribution significative au développement de l'ordre maritime
international. De prime abord il peut sembler que la sécurité
maritime ne doit relever que des services de l'OMI, mais l'exploitation
maritime est d'une technicité telle que cet organisme
spécialisé de l'ONU ne peut gérer seul la
sécurité de la navigation et par là celle des passagers.
Il faut donc s'intéresser à ces autres entités qui
prêtent assistance à la fois à l'OMI dans
l'élaboration de ses mesures, aux exploitants étant sur le
terrain et aux acteurs de la vie quotidienne des navires.
L'une des plus importantes est l'organisation mondiale de
météorologie nommée OMM. Elle communique des informations
scientifiques qui font autorité sur les questions d'environnement
atmosphérique, de climat, notamment des prévisions d'ordre
météorologique et climatique. P. de la COCHETIERE41
disait, dans son article : la météorologie au service des
usagers maritimes42, que : «toutes les activités
maritimes dépendent étroitement de la météorologie
; c'est là une évidence et même s'ils en plaisantent
parfois, les gens de mer se gardent de négliger » les
prévisions météorologiques. C'est que le temps qu'il fait
est très important quand il s'agit de navigation. Ce qui donne toute son
importance à cette organisation spécialisée de l'ONU qui
dispose de moyens peu ou prou exorbitants et qui accroît sa force par la
mise en place d'un réseau international
41 C'est un capitaine de vaisseau, Ancien chef de la
section de Météorologie maritime de la Météorologie
Nationale Française, Membre Correspondant de l'Académie de
Marine
42 In Nouveautés Techniques Maritimes 1975
édité par le Journal de la Marine Marchande Française.
et de structures régionales et sous-régionales
pour l'observation du temps et la diffusion des informations
récoltées. Le vieux adage qui disait : « qui veut mentir n'a
qu'à parler de temps»43 est plus que jamais remis en
cause et ce, au bénéfice des usagers du transport maritime.
A côté de cette structure d'autres ont un
rôle non moins essentiel dans l'amélioration de la
sécurité du passager : il y a les services d'hydrographie et de
cartographie (B.H.I.), les services d'océanographie (C.O.I.) par
exemple.
2 . La participation des acteurs internationaux dans la
formation des acteurs nationaux pour la bonne mise en oeuvre des règles
de sécurité : la mise en place d'institutions pour la formation
de spécialistes de la mer
Avec le souci d'amélioration de la
sécurité de la navigation à travers la bonne
compréhension des règles de droit en la matière, l'OMI est
même allé jusqu'à la création en 1983 à
Malmô (Suède) de l'Université Maritime internationale, qui
offre une formation avancée à des administrateurs,
éducateurs, et autres personnes s'occupant de transport maritime
à un niveau élevé. Elle a aussi mis sur pied en 1989
l'institut de droit maritime international à la Valette (Malte) pour
former des avocats spécialistes du droit maritime international.
L'Académie maritime internationale, quant à elle,
créée en 1989 aussi à Trieste en Italie offre des cours
spécialisés sur différents domaines du droit de la mer. Et
en plus de ces institution qui lui permettent de perfectionner le droit de la
navigation et par la même occasion d'augmenter la sécurité
du passager dans le transport maritime l'OMI offre à certains de ses
membres des séminaires de perfectionnement de leurs administrateurs pour
leur permettre de rester au diapason du rythme avancé de la gestion
sécuritaire, des pratiques et normes au niveau international.
43 Dans le « guide du marin » de M. de KERHALLET en
1863, Capitaine de Vaisseau de la marine Impériale française
La législation internationale, quelque pertinente
qu'elle puisse être ne suffit pas. Il faut que les Etats par les normes
internes qu'ils édictent puissent l'accompagner et lui donner une, plus
ou moins, parfaite application. C'est ainsi que l'obligation de
sécurité qui pèse sur le transporteur trouve grandement
ses bases dans la législation nationale.
Paragraphe2: Les Fondements nationaux de l'obligation de
sécurité
Au niveau national tout l'édifice qui tend à
protéger la personne repose sur sa sacralité qui est
consacrée au Sénégal par la Constitution. C'est en effet
celle-ci qui rappelle l'attachement du pays aux textes et principes
internationaux auxquels il adhère. C'est aussi la constitution qui
affirme expressément la sacralité de la personne et de tous ses
attributs. Toutefois il faut d'ores et déjà préciser qu'il
ne sera pas question de se fixer sur la jurisprudence qui semble ne pas, ou
très peu, exister au Sénégal ; et la force de la doctrine
guidera notre interprétation de la règle de droit. Au demeurant,
on pourra se focaliser sur les fondements légaux ou législatifs
(A) et les fondements règlementaires (B) de l'obligation de
sécurité dont est créancier le passager dans le transport
maritime.
IL. Les fondements légaux de l'obligation de
sécurité
Dés son accession à l'indépendance, le
Sénégal a tenu à se munir d'une législation qui lui
est propre et le domaine maritime faisait partie des priorités qu'il
fallait réguler du fait du poids qu'il devrait avoir dans la politique
économique du pays. C'est ainsi que dès 1962, le 22 mars, il se
dota d'un Code de la Marine Marchande par la loi n°62-32 qui resta en
vigueur pendant une quarantaine d'années et jusqu'à
l'élaboration et la promulgation de la Loi n°2002-22 du 16
Août 2002 portant Code de la Marine Marchande et abrogeant celle de 1962
devenue obsolète en grande partie du fait de la ratification de la
plupart des conventions internationales44. La loi
garde donc toute sa force face à cette internationalisation des normes
d'exploitation dans le commerce maritime.
C'est que même si la préférence est pour
le droit international en matière maritime, et pour bien des raisons,
« la volonté des Etats (...) est indispensable pour que celui-ci
puisse naître : les traités ne peuvent entrer en vigueur
qu'après signature, ratification ou adhésion et publication. Les
lois ont donc, au moins médiatement, leur place en droit international
et l'on peut dire que s'agissant du droit de la mer, cette place est de choix
avec les notions nouvelles de plateau continental et de zone économique
exclusive (ZEE) »45.
Aussi faudra t-il relever que le législateur
sénégalais à préférer fixer lui- même
un certain nombre de règles qui font peser sur le transporteur une
obligation de sécurité dont bénéficient les
passager. Il en est ainsi avec l'obligation de souscription d'assurance qu'il
impose à tout transporteur. Et il s'agit d'une police d'assurance qui
vient renforcer les garanties de sécurité pour mieux
protéger les voyageurs. La réglementation par le code de la
marine marchande du régime des passagers clandestins est aussi un moyen
pour le législateur sénégalais de prendre en compte
l'exigence d'une protection de cette catégorie de voyageurs même
si leur présence à bord n'est pas encouragée. La loi pose
aussi l'exigence de veiller à la sécurité du navire,
à sa stabilité, ..., ainsi qu'à l'hygiène des
infrastructures d'exploitation et de transport ; et ces mesures sont à
ranger au nombre de celles qui fondent l'obligation de sécurité
dont est créancier le passager. Le code de la marine marchande exige un
minimum de sécurité avant de prendre la mer et cette exigence est
mise en oeuvre par la fixation d'un certain nombre de conditions avant de
pouvoir participer à l'activité commerciale maritime.
Cependant la loi ne règlemente pas tout jusqu'au
détail, elle renvoie certains aspects de cette réglementation au
domaine règlementaire.
44 Exposé des motifs de la 2002-22 portant code
de la marine marchande.
45 Droit de la mer, Tome 1 : la mer et son droit :
Laurent LUCCHINI & Michel VOELCKEL ; Chapitre II : Formation et Mise en
oeuvre des normes ; Section 1 : Les Sources, 1-A : Les Sources nationales ; Ed.
PEDONE ; PARIS, 1990.
B. Les fondements réglementaires de l'obligation de
sécurité
Le code de la marine marchande est censé prendre en
charge toute l'activité maritime mais pour bien pallier à
l'éventualité de toutes les spécificités qui
peuvent apparaître elle laisse une certaine marge de manoeuvre à
l'autorité maritime administrative. Dans bien des dispositions du code,
le législateur fait état de l'expression « autorité
maritime compétente », il s'empresse de nous livrer le sens dans
lequel il emploie ces termes. Il s'agit «du ministre chargé de la
marine marchande et des fonctionnaires auxquels il est susceptible de
déléguer tout ou partie de ses pouvoirs. A l'étranger
cette autorité désigne l'ambassade ou l'autorité
consulaire. Cependant dans les ports étrangers où il n'existe pas
d'ambassade ou de consulat du Sénégal, l'Autorité Maritime
locale, après accord du gouvernement dont elle relève, peut se
voir déléguer les pouvoirs dévolus en la matière
aux ambassades et consulats du Sénégal » et à
coté de cette compétence de l'autorité maritime l'article
2 du code fait état de l'existence d'un Conseil Supérieur de la
Marine marchande qui contribue aussi à l'élaboration des normes
de sécurité.
Le rôle de l'autorité maritime en matière
sécuritaire est très étendu. Et elle a une
compétence exclusive en matière d'interdiction de la navigation
dans certaines zones. C'est ainsi qu'aux termes des dispositions de l'article
13 du code, in fine, « l'autorité maritime peut interdire la
navigation dans les ports et dans les chenaux d'accès ainsi que
l'entrée et la sortie des navires lorsque les conditions
météorologiques et hydrographiques sont défavorables,
lorsqu'il existe des obstacles à la navigation, ou pour des raisons
d'ordre public ». Et le second et le dernier alinéa de l'article 14
ajoute qu'elle « a le droit d'interdire la navigation dans un port ainsi
que l'entrée et la sortie de ce port à tout navire dont
l'état de navigabilité est défectueux et susceptible de
constituer un danger pour la sécurité des personnes se trouvant
à bord et pour celle des tiers ainsi que pour toute infraction à
la législation et à la réglementation maritime ».
Dans ces situations l'autorité maritime exerce une véritable
mission de contrôle de l'activité de
navigation maritime. Mais notons que cette mission, si elle
n'est pas exécutée avec la rigueur nécessaire, peut
être fatale aux passagers. C'est ce qui ressort des propos de
l'enquête technique qui a suivi le naufrage du joola
car l'autorité maritime qui reconnaît avoir
remarqué les conditions dans lesquels l'exploitation de ce navire se
faisait, n'a nullement songé à interdire à ce navire
d'appareiller. Pourtant toutes les raisons de retenir ce navire au port
étaient réunies, mais enfin on n'est pas encore à
l'époque où les administrations de nos Etats seront conscientes
qu'une simple tolérance voire négligence dans l'accomplissement
de notre mission, qu'elle soit peu ou prou conséquente, peut être
la cause d'un désastre.
Il faut aussi considérer le rôle non moins
important des commissions de contrôle qui doivent vérifier la
conformité entre les installations des navires et la
nécessité d'une sécurité à bord. Encore que
ces commissions soient en mesure d'exercer avec la rigueur nécessaire
leurs prérogatives !!!
L'obligation de sécurité tient donc beaucoup du
contrat de transport mais cette relation entre transporteur et voyageur n'est
pas laissée à la discrétion de l'autonomie des
volontés. Pas mal d'acteurs interviennent en amont comme en aval mais
tous dans le but de préserver la sécurité de cet inconnu
qui n'est pas toujours conscient de tous les risques du voyage qu'il
entreprend. L'obligation de sécurité que l'on fait peser sur le
transporteur, qui est présumé être un professionnel,
revêt donc tantôt un caractère contractuel tantôt un
caractère extracontractuel ; et dans ce dernier cas elle tient son
fondement de la coutume, des traités (au niveau international) ou encore
de la loi et des règlements au niveau national et local. Il faudrait
tout de même, quand on note l'importance des bases sur lesquelles elle
repose, pouvoir en mesurer l'étendue.
Chapitre second : L'étendue de l'obligation de
sécurité
Si l'étude de la question de l'existence de
l'obligation de sécurité a révélé que ses
sources étaient très diversifiées, il reste que, pour une
bonne appréciation de son exécution, il demeure important d'en
sonder les tenants et les aboutissants. Il est nécessaire de s'avoir
jusqu'où va cette obligation dont est bénéficiaire le
passager. Pour cela il faut revenir à la définition de la
sécurité, elle-même, qui nous permettra d'en mesurer
l'étendue. La sécurité désigne la prévention
des risques de toute nature et la protection des personnes contre les
accidents, les sinistres et catastrophes ; l'objectif de sauvegarde de la
société et l'organisation de celle-ci par la préparation
et la mise en oeuvre de moyens d'intervention et de secours dans le cadre de
plan d'organisation ; ainsi que les mesures tendant d'une part à venir
au secours de la victime et d'autre part à compenser, chez elle, la
réalisation de ces risques. De cette définition il découle
que l'obligation de sécurité s'étend pendant toute la
durée de la traversée. Mais si par malheur un dommage se
réalisait, l'obligation de transporter la personne en
sécurité se transforme en une obligation de réparation du
préjudice causé. L'obligation de sécurité est
inhérente au contrat de transport et pendant toute la durée de
celui-ci, le passager bénéficie d'une protection. Et pour bien en
mesurer l'ampleur il convient d'en étudier les moyens et
mécanismes (section 1) avant de s'intéresser aux garanties
prévues pour son efficacité (section 2).
Sectioni Les mécanismes de protection du
passager
La prise en charge de la sécurité du passager
est très particulière en ce qu'elle varie en fonction de
l'étape et du degré d'exécution de la prestation de
transport. Et ce particularisme se note encore plus dans le cadre du transport
maritime. Il se manifeste dans l'obligation de protéger le passager
à la fois sur le navire et dans les zones d'exploitation de celui-ci
d'une part et la présence de dispositif de prévention et
d'intervention en cas de réalisation des risques d'autre part.
Paragraphe 1 : La protection de la personne à bord
du navire et
dans les zones d'embarquement et de débarquement
L'obligation de sécurité est
intrinsèquement liée à celle de transporter la personne et
l'exécution de ces deux obligations est simultanée46
(A) aussi elle est étendue aujourd'hui aux moments connexes au voyage
(B).
IL. La confusion entre l'obligation de
transporter le passager et celle de le transporter en sécurité
La dissociation de ces deux obligations ne saurait se faire,
c'est ce qui explique que la protection de la personne se fasse pendant toute
la durée de la traversée. On ne pourrait nier que le
déplacement est le principal objet du contrat, mais il est admis que le
passager cherche à être transporté sain et
sauf47 et ce, jusqu'à sa destination. Pour la prise en charge
de sa sécurité le moment du début ne correspond pas au
départ du navire mais à celui de l'accomplissement des
formalités relatives à son départ et dès lors que
le passager se met à la disposition du transporteur. C'est pour cette
raison que l'obligation de sécurité couvre aussi bien la
traversée que l'embarquement et le séjour du passager dans le
hall d'embarquement et court non seulement jusqu'à l'arrivée du
navire mais aussi jusqu'à ce que le passager soit remis à
lui-même. Ce qui explique cette extension c'est que le transporteur se
caractérise par la maîtrise qu'il a sur l'outil de transport. Dans
le transport, le passager se caractérise par sa passivité. C'est
l'interdépendance qu'il y a entre l'obligation de transporter et celle
de le faire en toute sécurité qui justifie la tendance des juges
à condamner le transporteur en engageant sa responsabilité
contractuelle. C'est donc sur la base du contrat de transport que
s'établit le plus souvent la sanction du défaut de
sécurité. C'est ainsi que le régime de la
responsabilité du transporteur varie en fonction des cas. On distingue
ainsi les accidents survenus à un passager, qui
46 Le 21 novembre 1911 la Cour de Cassation, pour
admettre que la responsabilité du transporteur est contractuelle juge
que l'exécution du contrat de transport comporte l'obligation de
conduire le voyageur sain et sauf à destination (D.P. 1913, I, 249, note
Sarrut).
47 C'est du moins ce que prévoit l'article 645
du COCC qui reste le droit commun en matière de transport de
personnes
s'aventure dans une zone qui lui est interdite, des naufrages.
Dans le premier cas de figure le juge est moins enclin à sanctionner
sévèrement le transporteur que dans le second cas où il
est posé une présomption de responsabilité48.
C'est ainsi qu'en France la loi du 18 juin 1966 fait la distinction entre les
sinistres collectifs et les accidents individuels. L'importance de cette
distinction est à recherchée dans l'étendue du rôle
que peut jouer le passager dans la réalisation des accidents. Il peut
ainsi se blesser en courant à bord ou en se penchant par un hublot, mais
il a très peu de chance de provoquer un naufrage. Toutefois il faut
noter que le champ d'application de l'obligation contractuelle de
sécurité a connu une évolution notable. Une certaine
tendance de la doctrine, à laquelle adhère d'ailleurs le doyen
Rodière, voudrait qu'elle ait pour critère d'application le
contact pris par le passager avec l'instrument de transport : elle commencerait
donc à partir de l'embarquement et le capitaine a ainsi une obligation
de superviser l'embarquement des passagers. Et si on suit ce raisonnement
l'obligation contractuelle de sécurité aurait pour fin la
séparation entre le passager et le navire. Mais, qu'adviendrait-il du
passager s'il venait à avoir un accident sur le quai ? Dans ce cas le
juge vérifiera le rôle que le transporteur aura joué et la
protection du passager se fera sur le champ de la responsabilité
délictuelle. Toutefois à bien analyser certaines règles
internationales on note un souci d'étendre l'obligation de
sécurité.
B. L'extension du champ de l'obligation de
sécurité.
Une bonne analyse des dispositions du code ISPS montre un
souci des autorités supranationales d'assurer une protection du passager
dans les zones d'exploitation connexes à celle d'exécution du
contrat de transport. En effet, ce code suggère une prise en charge de
la sécurité par une bonne tenue du navire et aussi des
installations portuaires. Il faut tout de même préciser que les
situations ne sont pas pareilles si c'est l'exploitant des installations
portuaires qui assure le transport ou s'il n'est qu'un prestataire de services
devant le transporteur. Cette organisation de la sécurité
s'inscrit dans la même perspective que le code sénégalais
de la marine
48 Le contrat de transport p. 51; Martine
Rémond-Gouilloud ; Coll. Connaissance du droit ; Dalloz ; Paris,
1993.
marchande qui fait peser une obligation sur le transporteur de
prendre toutes les précautions nécessaires à un bon
déroulement de la traversée en l'obligeant à maintenir un
bon état de navigabilité du navire et en y assurant de bonnes
conditions d'hygiène et de santé.
Il faut en définitive retenir que le passager
bénéficie d'une protection tant sur le navire que dans les
moments connexes au voyage. Mais le souci de la sécurité du
passager fait que le transporteur n'est pas tenu que de son exécution,
bien au contraire, il en tient compte pendant toute son activité. La
sécurité de la personne transportée est certes une
finalité du transport et se manifeste alors comme une obligation de
résultat (le passager doit arriver sain et sauf) ; mais elle
recèle bien des aspects d'une obligation de moyens. En effet comme
l'indique le vieux proverbe « mieux vaut prévenir qu'essayer de
guérir », le transporteur est tenu de se prémunir contre la
réalisation du risque et par conséquent bien des voies sont
prévues pour la prévention et l'intervention en cas de danger
menaçant la sécurité du passager.
Paragraphe 2 : L'existence de plan et de dispositif
préventifs
d'intervention en cas de réalisation des risques
En matière maritime l'exigence de
sécurité dans le transport est telle que le transporteur est tenu
d'avoir une certaine organisation à la fois matérielle et
technique qui n'a pour finalité qu'une optimisation de la
sûreté des instruments utilisés et l'efficacité de
la protection des personnes à bord. C'est ainsi que, pour une bonne
prise en charge de la gestion sécuritaire du transport maritime, la
protection des passagers ressort des plans d'intervention prévus en cas
de réalisation des risques de mer. Toutefois faudra t-il préciser
que cette gestion de la sécurité passe par un certain nombre de
préalables qu'il nécessite de soulever. Pour cela on peut
procéder de la même manière que les organisations
internationales qui fondent toutes leurs actions sur la connaissance, en amont,
des menaces potentielles à la sécurité (A) avant d'en
apprécier les modalités d'annihilation, ou, au moins,
d'amoindrissement des effets (B).
IL. L'identification des différentes menaces
humaines à la sécurité du passager
Le meilleur moyen de bannir l'insécurité c'est
de la combattre à la source. Et pour cela il convient de l'identifier en
en appréhendant les tenants et les aboutissants. C'est ainsi que l'OMI a
identifié un certain nombre de formes que la menace peut revêtir.
Il faut tout de même relever la présence de la main de l'homme
comme principale cause de ces différentes menaces. Cet
élément nous permet de les distinguer des
évènements qui ne relèvent pas du « pouvoir » de
l'homme et qui seront inclus dans la catégorie de la force majeure.
Cette catégorie contient les faits dommageables qui sont le
résultat des agissements de l'homme et celles qui sont une
conséquence du mauvais temps ou de faits extérieurs à
l'homme souvent provenant « d'une mauvaise humeur de la nature qui
s'acharne, dans bien des situations, contre l'homme ».
Les faits qui ont une source humaine sont rangés dans
ce que l'OMI appelle les menaces à la sûreté
maritime49. L'expression de sûreté maritime se
définit comme étant « l'ensemble des mesures que les
propriétaires, exploitants et administrateurs de navires,
d'installations portuaires, d'installations au large et autres organisations et
établissements marins utilisent pour se prémunir contre le
terrorisme, le sabotage, les passagers clandestins, immigrants illégaux
ou demandeurs d'asile, les actes de piraterie à l'encontre des navires,
la capture, la nuisance ou l'attaque par surprise. » De cette
définition, il ressort que l'OMI considère certaines menaces, du
fait de leur récurrence et de leur gravité, comme étant
les plus à envisager. C'est que selon cette organisation internationale
ces menaces pèsent sur la sûreté maritime et ; tous les
ports et tous les navires y sont exposés, à des degrés
divers. Il est toutefois nécessaire de comprendre que nul ne peut jamais
atteindre une sûreté parfaite. Il n'existe donc aucun port, aucun
navire, ni aucune installation qui puisse jouir d'une protection parfaitement
infaillible et qui ne puisse être touché, endommagé ou
détruit. La sûreté maritime vise donc à rendre
l'accès à la cible si difficile que toute tentative est
découragée et, en cas de tentative, à en limiter autant
que possible le dommage. Pour
49 Il s'agit du thème du troisième
exposé du séminaire atelier organisé par l'OMI pour le
compte de exploitants maritimes de ses états membres.
y parvenir, on devrait d'abord comprendre la menace, et
ensuite mettre au point une réaction appropriée.
La connaissance des menaces est donc primordiale pour
l'évaluation de leur imminence et l'organisation, en conséquence,
de stratégies. Et le plan de prévention ou de lutte varie selon
la menace à laquelle on risque d'être confrontée. Cependant
une étude exhaustive de chacune de ces menaces ne parait pas opportune,
nous nous en limiterons à éclairer certaines notions. Mais pour
chacune de ces menaces il convient de distinguer la sûreté
physique de la sûreté matérielle : la sûreté
physique a trait aux moyens proprement matériels utilisés
à l'intérieur et aux abords d'une installation portuaire d'un
navire ou d'une installation au large, notamment les clôtures,
éclairages, alarmes, serrures, système de surveillance,
mécanismes de détection des intrusions, etc. alors que la
sûreté de l'exploitation vise les mesures telles que les
enquêtes sur les antécédents, la production, le traitement
et le contrôle des documents, les mesures de contrôle des
accès (par exemples les systèmes de badges et d'identification
personnelle), les procédures de surveillance et de contrôle des
visiteurs, le contrôle de la circulation interne, etc.
n Par la résolution A.871 (20), l'OMI se penche sur la
question des migrants illégaux et des passagers clandestins et pose un
certain nombre de principes de base50 tendant d'une part à la
protection de ceux-ci et en même temps à la lutte contre ce
fléau, ainsi qu'à la résolution des questions de
responsabilité nées de ce phénomène d'autre
part.
n Les actes de piraterie demeurent aussi une menace à
la fois historique et dangereuse pour les passagers et leurs biens. La
piraterie est définie à l'article 101 de la Convention des
Nations Unies sur le Droit de la Mer (UNCLOS) de 1982. Elle suppose, au moins,
un acte illicite de violence ou de dépravation contre un navire ou
aéronef, en haute mer ou dans un lieu ne relevant d'aucune juridiction
d'un Etat... il peut s'agir de la participation volontaire à l'acte, de
l'incitation à l'acte ou de sa simple facilitation. Il s'agit d'une
infraction pénale.
n Il faut distinguer la piraterie du sabotage qui est
l'endommagement ou la destruction, délibérés d'un port,
d'une installation portuaire, ou d'un navire, etc. il est
50 Par exemple : même si les pays
concernés décident de la manière dont on doit traiter les
passagers clandestins et les migrants illégaux, un certain nombre de
textes régissant la protection internationale s'appliquent d'office.
le moyen le plus efficace dont un terroriste dispose car il
est de moindre coût et d'une grande possibilité de succès.
Il présente une certaine ressemblance au terrorisme maritime qui
l'englobe dans ses facettes.
Le terrorisme maritime est un concept sur lequel a
insisté l'Organisation des Nations Unies lors de son Assemblée
Générale ayant suivi les attentats du 11 septembre 2001. Il n'y
en a pas une définition internationalement acceptée. Cependant
l'article 3 de la Convention SUA l'incrimine pénalement et en donne une
énumération, non exhaustive certes, mais, assez édifiante.
Aux termes de cette disposition, «commet une infraction pénale
toute personne qui illicitement et intentionnellement :
a- s'empare d'un navire ou en exerce le contrôle par
violence ou menace de violence ; ou
b- accomplit un acte de violence à l'encontre d'une
personne se trouvant à bord d'un navire ; si cet acte est de nature
à compromettre la sécurité de la navigation du navire ;
ou
c- détruit un navire, ou cause à un navire ou
à sa cargaison un dommage de nature à compromettre la
sécurité de la navigation de ce navire ; ou
d- place ou fait placer sur un navire, par quelque moyen que
ce soit, un dispositif ou une substance propre à détruire le
navire ou à causer au navire ou à sa cargaison un dommage qui
compromet ou est de nature à compromettre la sécurité de
la navigation du navire ; ou
e- détruit ou endommage gravement des installations ou
services de navigation maritime ou en perturbe gravement le fonctionnement ; si
l'un de ces actes est de nature à compromettre la sécurité
de la navigation d'un navire ; ou
f- communique une information qu'elle sait être fausse et,
de ce fait, compromet la sécurité de la navigation d'un navire ;
ou
g- blesse ou tue toute personne, lorsque ces faits
présentent un lien de connexité avec l'une des infractions
prévues aux alinéas a- à f- que celle-ci ait
été commise ou simplement tentée. »
Il apparaît nettement la volonté de
protéger les personnes, et par delà les passagers, dans la
prohibition de tous ces actes ci-dessus identifiés. Enfin notons la
grande préoccupation qu'a l'OMI devant certains actes de terrorisme
présentant un
degré de gravité plus élevé pour
les passagers : il s'agit des détournements et prises d'otages et ce,
depuis le détournement du navire de croisière Achille
Lauro51, en 1985 qui fut à la base de pas mal
d'interrogations.
En fonction de ces différentes menaces l'OMI a
élaboré un certain nombre de plans qui, ajoutés à
ceux prévus dans chaque Etat en fonction de ces moyens, devraient
permettre autant que faire se peut de prévenir et de lutter contre les
menaces à la sûreté maritime pour la protection du
passager.
B. L'élaboration de plans et les mécanismes
tendant à l'amélioration de la prise en charge de la
sécurité.
L'organisation Maritime Internationale a prévu des
moyens de lutte spécifiques à chaque type de menace. Selon la
gravité de la menace et sa probabilité chaque exploitant organise
son service dans le sens de l'amélioration de la sécurité
pour mieux protéger ses passagers. Il faut noter au passage que ces
différents dispositifs sont presque tous interconnectés. Mais
pour bien les appréhender, on peut les saisir dans une succession
chronologique liée à la probabilité de leur mise en oeuvre
et à leur moment d'intervention.
D'abord nous nous intéresserons au dispositif
préventif. Cette phase préventive est régie par la partie
A du code ISPS, code pour la sûreté des navires et des
installations portuaires qui est d'application obligatoire pour les Etats
membres de l'OMI. Ce code, il convient de le préciser, est
complété par une partie B qui contient un ensemble de
recommandations en vue de faciliter et d'optimiser son application. La partie A
du code précité met à la charge des Etats et des
gouvernements certains aspects de la préparation matérielle du
dispositif préventif. Il règle les questions de formalités
et fixe les niveaux de sûreté requis pour une exploitation. Les
mesures préventives se retrouvent dans ce que le code ISPS appelle
51 L'Achille Lauro est probablement le cas de
détournement le plus célèbre de l'histoire malgré
le fait qu'il n'ait pas pu, par la suite, constituer un précédent
en matière de terrorisme maritime : 4 palestiniens surpris par hasard
par un garçon de cabine entrain de nettoyer leurs armes furent
contraints de passer à l'action alors que prés de 600 passagers
étaient à terre pour visiter les sites égyptiens. Ils ne
prirent alors en otage que les 150 passagers restés à bord avec
les 300 membres de l'équipage. Et ils n'ont pas pu se rendre au port
d'Ashod en Israël où ils avaient l'intention d'attaquer certaines
installations. Le paquebot resta sous leur contrôle pendant prés
de 72 heures avant qu'ils ne se rendent aux autorités
égyptiennes.
le plan de sûreté des navires et des
installations portuaires. Il s'agit d'une organisation préétablie
qui prend en compte les menaces probables et qui s'articule autour d'un
dispatching des rôles pour chaque membre de l'équipage en cas
d'imminence ou de réalisation des menaces à la
sécurité des personnes ou du navire lui-même. Ces mesures
impliquent la présence à bord d'un certain type
d'équipement et sa disposition dans des lieux précis permettant
leur usage optimal en cas de survenance d'un événement de nature
à compromettre la sécurité des gens présents sur le
navire. Ces mesures connaîtront une application efficace si elles sont
mises en rapport avec le rôle d'équipage. Aussi une formation du
personnel de bord à la lutte contre ces menaces s'avère
très pratique. C'est ainsi qu'un personnel bien formé et bien
entraîné est à mieux de lutter contre les menaces à
la sûreté maritime. Des exercices périodiques peuvent en
effet permettre à un équipage d'avoir un comportement
éclairé et efficient en cas de réalisation d'un
risque52. Ce type d'exercices permet, d'une part, à un
équipage de s'habituer à certaines situations de périls
qui peuvent menacer la sécurité du navire et donne, d'autre part,
une certaine information aux passagers qui auront une attitude plus
éclairée et plus propice au moment de réalisation desdits
menaces. Il faut aussi ranger au titre des dispositions préventives
tendant à l'accentuation de la sécurité des passagers
l'exigence d'une certaine qualification du personnel de bord. Les gens de mer
doivent, en effet, avoir un certain degré de qualification. Cela
contribue aussi très grandement à la sécurité des
passagers. Il faut d'ailleurs préciser que cette catégorie
d'employés est soumise plus ou moins à un régime
particulier qui est d'une rigueur aigue et d'une technicité assez
exceptionnelle.
A côté des normes préventives, il faut
relever les mesures de lutte et les mesures curatives. Au titre de celles-ci on
peut citer les plans de réaction attachés aux mesures
préventives, et les mesures de sauvetage et d'assistance dont la
relation est à faire avec la spécificité du milieu
maritime et en dernière instance avec le plan d'organisation de secours
(ORSEC) qui est prévu par les autorités
sénégalaise.
L'utilité du plan de sûreté d'un navire
est d'optimiser la réaction face à une menace. Ainsi le code ISPS
a donné un ensemble de recommandations aux
52 C'est ainsi que la LMDG, qui a en charge la liaison
entre la ville de Dakar et l'île de Gorée fait une ou deux fois
par an des exercices de simulation d'abandon de navire.
compagnies d'exploitation des navires et des installations
portuaires afin de parvenir à avoir un comportement adéquat face
à une menace. Ces recommandations vont tant du point de vue des
équipements installés sur les navires que des comportements
prescrits au moment de la réalisation des menaces. Les
équipements devant figurer sur le navire permettent tantôt une
bonne information et tantôt une bonne communication avec les autres
navires sur qui il pèse une obligation d'assistance envers les navires
en danger s'il n'y va pas de leur péril53. Cette obligation
d'assistance est, si elle n'est pas exécutée, une sorte
d'équivalence par rapport à l'infraction de non assistance
à une personne en danger. On pourrait peut être parler de non
assistance à un navire en danger
En plus de ce dispositif, on note que presque dans tous les
pays du monde on retrouve une organisation des secours qui manifeste la
solidarité entre les concitoyens qui est dans ce cas pris en charge par
les autorités publiques54. C'est ainsi que suite au naufrage
du joola, ce plan a été déclenché le vendredi 27
septembre dans la matinée, et a joué un rôle, peu ou prou,
déterminant dans la mise en oeuvre des secours par l'armée. Ceci
a permis la réquisition, entre autres, d'hôpitaux et de moyens
matériels tels des ambulances et les moyens de la marine, ceux de
certaines compagnies (telles MARITALIA, URD, TTSM, OCEANIUM, SOPASEN,
AFRICAMER, etc.,) ainsi que des remorqueurs de la SN/PAD pour
l'évacuation des rescapés et des cadavres
retrouvés55. Les opérations du plan ORSEC vont de pair
avec celles du Centre de Coordination des Secours (CCS) et du SAR. Il faut
remarquer la solidarité quand il s'agit de secourir des personnes en
matière maritime. Mais le souhait est que l'on n'en arrive pas à
ce stade et que l'on n'est pas à secourir des passagers. Et pour y
parvenir un certain nombre de garanties est requis pour mieux protéger
les personnes transportées.
53 L'article 233 pose l'obligation d'assistance et de
sauvetage et les articles 234 et s. posent le principe de sa
rémunération.
54 En France il appartient au préfet de
déclencher le plan ORSEC en cas de catastrophe. Ce plan permet de
mobiliser tous les moyens publics et privés pour le secours des
victimes.
55 Ces informations sont tirées du rapport de
la commission d'enquête instaurée suite au naufrage du joola pour
en établir les causes.
Section2 : Les garanties de la sécurité
du passager
Au nombre des garanties que l'on a pour la
sécurité on a d'une part l'exigence d'un degré
élevé de sécurité dans les navires qui permet de
prévenir la réalisation de plupart des menaces à la vie
des passagers et l'optimisation de la réaction si ces menaces venaient,
malgré tout, à se réaliser. Aussi dans ce dernier cas de
figure les compagnies d'assurances sont, le plus souvent, les seules à
même de prendre en charge les victimes. C'est ainsi que ces deux aspects
de la protection de la personne transportée ont vu leur
consécration en obligation pleine et entière pesant sur le
transporteur et ayant la qualité de condition sine qua none pour la
licéité de l'exploitation d'un navire et l'exercice de
l'activité de transport maritime de personnes. Le législateur
pose, à cet effet une obligation de conformité aux nomes de
sécurité d'une part (paragraphe 1) et une obligation de
souscription d'assurance (paragraphe 2) d'autre part.
Paragraphe 1 L'obligation de conformité aux normes
de sécurité
Le législateur sénégalais pose une
obligation générale de sécurité pesant sur tous les
navires. Aux termes de l'article 57 du code de la marine
marchande56, « tout navire qui entreprend la navigation en mer
doit être en bon état de navigabilité convenablement
armé, équipé et apte à l'emploi auquel il est
destiné ». La clarté de cette disposition est assez
édifiante. Elle implique la prise en charge des normes de
sécurité depuis la construction du navire et pendant toute la
durée de l'exploitation (A). Toutefois, cette conformité ne
saurait être laissée sans contrôle (B).
IL. la conformité aux normes de
sécurité depuis la construction du navire et pendant toute la
durée de l'exploitation
La navigation maritime est un privilège auquel n'ont
accès que les navires présentant un degré satisfaisant de
sécurité. L'article 58 de la loi 2002-22 ne dit pas autre chose
en disposant qu' : «un navire ne peut être utilisé dans la
navigation
56 il est fait allusion au code de 2002 qui a
abrogé celui de 1962.
maritime s'il ne remplit pas les conditions de
sécurité prescrites en ce qui concerne notamment :
- la construction, les agrès et apparaux, les
instruments et installation du bord, la signalisation, la prévention et
l'extinction des incendies, les moyens d'assèchement ainsi que
l'hygiène et l'habitabilité du bord ;
- la stabilité, la flottabilité et les lignes de
charge ;
- les organes de propulsion et de direction ;
- les effectifs et la qualification professionnelle des membres
de l'équipage ;
- toutes autres conditions requises en ce qui concerne la
sécurité de la navigation et le sauvetage de la vie humaine en
mer. » Il découle de ces dispositions que le respect et la
conformité aux normes de sécurité s'étend de la
construction à la durée entière de l'exploitation et
concerne tous les aspects du navire. et toute cette réglementation est
établie dans le but de garantir aux passagers une sécurité
implacable. Ces normes de sécurité sont complétées
par d'autres établies par voie règlementaire57 en plus
des normes établies par la loi elle-même ; mais force est de
constatée que ce domaine relève plus de la compétence des
organismes internationaux qui disposent de plus d'experts et donc sont plus en
mesure d'en déterminer les tenants et les aboutissants. C'est ainsi que
l'essentiel des normes de sécurité sont retrouvées dans le
code ISM et dans les normes ISO. C'est dire que la normalisation qui est un
concept de plus en plus en vogue n'a pas épargné le domaine de la
navigation maritime. Par exemple, il est très souhaitable, pour la
construction d'un navire de faire référence à la norme ISO
14001 qui est établie en cette matière. Cette norme exige, depuis
la conception du navire, la prise en compte de certains paramètres.
Ainsi l'architecture navale prend en compte beaucoup de considération et
de normes pour la définition de la forme du navire et de ses
caractéristiques. L'architecture navale prise dans le sens où le
définit Dominique Paulet privilégie le côté
conception avec le choix des matériaux, l'évaluation des
contraintes, des équilibres, des poids, le choix et la disposition des
équipements, plutôt que la forme et
57 Les articles 59 et 60 de la loi 2002-22
disposent respectivement que « les prescriptions relatives à la
sécurité de la navigation sont précisées par
arrêté du ministre chargé de la marine marchande, et que
« le ministère chargé de la marine marchande peut rendre
obligatoire les prescriptions techniques découlant du règlement
d'une société de classification agréée et relatives
à la construction, à l'armement et à l'équipement
des navires »
le style58. Le développement de la
technologie est, pour cela, mis à la disposition de la navigation. Et on
obtient aujourd'hui des navires plus grands, plus rapides, plus confortables et
présentant plus de garanties de sécurité59. La
conformité des navires en exploitation aux normes de
sécurité ne saurait être édictée sans la mise
en place d'un système de contrôle.
B. Le contrôle de la conformité des
navires aux normes de sécurité
Il est tout de même aberrant de croire que la simple
édiction de ces règles implique leur respect. Leur mise en oeuvre
suppose en effet la mise en place d'un certain nombre de mécanismes et
de structures qui veilleront, ou du moins auront pour vocation de veiller, sur
leur strict respect. Il s'agit à cet effet de mettre en oeuvre un
contrôle et il peut s'avérer pertinent de relever le rôle
joué en cela par les sociétés de classification et autres
autorités administratives nationales.
Le contrôle de la conformité des navires aux
normes de sécurité peut revêtir plusieurs formes et
intervenir de diverses manières en usant de moyens spéciaux. En
matière maritime pour éviter la réalisation des risques,
le législateur sénégalais a cru bon de poser comme
principe un contrôle a priori. Pour parvenir à l'efficacité
de ce contrôle il pose la nécessité d'une autorisation
d'exercice de la navigation maritime à travers l'exigence des titres de
navigation60. Ceux-ci, aux termes de l'article 32 du code de la
marine marchande, ont pour objet d'autoriser le navire à exercer la
navigation maritime à laquelle il est affecté, à condition
qu'il ait par ailleurs satisfait
58 Dominique Paulet, un des spécialistes
français de ce thème l'introduit ainsi dans son livre
Architecture Navale -- Connaissances et Pratiques
59 On trouve désormais sur les navires de
transport de passagers et de croisière un développement des
caractéristiques suivantes :
· Confort du passager avec plus d'habitabilité et de
confort à la mer, l'offre de service peut inclure : restaurant, bar,
solarium, espace jeux ... ;
· plus rapide et plus grand, mixte passagers et
marchandises. Par exemple, le navire de transport de passagers le plus rapide
est actuellement le " NGV Aliso " qui peut atteindre 38 noeuds et avec une
capacité de 566 passagers et de 600 voiture ; le " Napoléon
Bonaparte " peut transporter 2690 passagers et 708 de voitures ;
· engagement de la sécurité des passagers :
les normes ISO ; l'application des réglementations nationale et
internationale.
60 Le principe de l'exigence des titres de navigation est
posé par l'article 37 de la 2002-22 portant code de la marine
marchande.
à toutes les prescriptions contenues dans le
présent code et les textes pris pour son application. Pour
l'évaluation de la satisfaction aux exigences de sécurité
la loi prévoit divers types d'inspections qui s'échelonnent dans
le temps ; commencent à la construction du navire et s'étendent
à toute la durée de son exploitation. Ces inspections sont
régies par les articles 62 à 71 de la loi 2002-22 portant code de
la marine marchande. L'autorité maritime peut être soutenue dans
l'exercice de cette compétence par les sociétés de
classification agréées. En plus de ces inspections, l'article 48
prévoit la possibilité d'un contrôle des navires battant
pavillon sénégalais. L'efficacité de ces contrôles
est à rechercher dans la gamme de sanctions offerte à
l'autorité maritime, qui peut, entre autres, retenir le navire en cause
au port et lui interdire d'appareiller61.
Cependant l'effectivité de ces contrôles et des
sanctions prévues en cas de non respect de l'obligation de
conformité aux normes de sécurité et aux normes
d'exploitation en générale reste incertaine. Aujourd'hui on note
que des navires sous normes passent à travers les mailles du filet de la
législation nationale comme internationale et entretiennent une
concurrence déloyale et génératrice de sinistre maritime ;
et que, des états de Pavillon ont plus de considération pour le
revenu de leur registre que pour la qualité de la sécurité
des navires qu'ils immatriculent62. Et peu de gens se soucient
encore de la norme ISO 9014 intégrée sur le risque pour l'image
de marque de l'affréteur. Au niveau national, le comportement des
transporteurs du milieu maritime ne s'écarte pas de celui des
transporteurs des autres domaines et fait révérence à des
vices et avatars inacceptables tels que la surcharge de passagers, le non
respect des normes de sécurité, etc. ; sur cette question
n'importe quel exemple, dans le transport interne pourra nous édifier
mais celui du naufrage du joola est plus significatif. En effet l'absence de
réaction ferme de la part des autorités a fortement
contribué à l'accentuation des conséquences de ce
naufrage. Aussi la non conduite des inspections dans le respect des
règles ne favorise pas une bonne prise en charge de tous les aspects de
la sécurité des navires pour la protection de leurs passagers.
Toutefois, on pourrait fonder un timide espoir sur les
compagnies d'assurance qui pourraient jouer un rôle de régulateur
pour le respect des normes de sécurité. En
61 C'est le sens des articles 13 in fine, 14 in fine, 49, 61, 68
et 69 du code de la marine marchande.
62 « Sécurité en mer : tous
acteurs, tous coupables ! »
effet la souscription d'assurance est un préalable
à l'exercice d'une activité de transport maritime et les
assureurs n'acceptent pas de couvrir n'importe quel risque. Cette exigence
pourrait peut être venir à la rescousse des passagers.
Paragraphe 2 L'obligation de souscription d'assurance pour
les passagers
L'article 472 du code de la marine marchande dispose que :
«tout armateur de navire à passagers est tenu de souscrire une
police d'assurance pour les passagers ». Il s'agit ainsi d'une autre
garantie offerte aux passagers pour leur sécurité. D'abord en ce
que les assureurs n'acceptent de couvrir les risques de mer que si le navire
présente un degré minimum de sûreté, ce qui oblige
les exploitants des navires à se conformer tant soit peu à la
réglementation en matière de sécurité ; aussi
l'assurance souscrite pour le passager lui permet de voir son préjudice
peu ou prou réparé en cas de réalisation du risque
couvert. Il est nécessaire d'identifier le débiteur de cette
obligation de souscription d'assurance (A) ainsi que les caractères de
cette assurance souscrite (B).
IL. Le débiteur de l'obligation de
souscription d'assurance
Dans tous les cas l'obligation de souscription d'assurance
pour les passagers pèse sur l'armateur. Celui-ci, aux termes de
l'article premier de la loi portant code de la marine marchande, désigne
toute personne physique ou morale pour le compte de laquelle un navire est
armé, exploité ou simplement utilisé. Les
propriétaires ou copropriétaires d'un navire sont
présumés en être l'armateur ; en cas d'affrètement
(contrat par lequel le fréteur s'engage moyennant le paiement d'un
certain fret, à mettre à la disposition de l'affréteur un
navire en bon état de navigabilité), l'affréteur devient
l'armateur du navire si le contrat d'affrètement le prévoit et a
été régulièrement publié. Une fois le
débiteur de l'obligation de souscription d'assurance identifié,
il convient de préciser les caractères de l'assurance
souscrite.
B. Les caractères de l'assurance
souscrite par l'armateur.
Au Sénégal, depuis le mois de février
1983, une disposition législative exige que tous les navires battant
pavillon sénégalais soient assurés auprès d'une
compagnie d'assurance sénégalaise63.Et cette loi est
une disposition de police, ce qui la rend d'exécution obligatoire sans
aucune possibilité de s'y soustraire pour tout armateur. Tel
était le cas de l'Etat du Sénégal qui, dans l'exploitation
du ferry Le joola, n'a fait que se comporter en armateur et doit donc à
tout point de vue être soumis au droit commun des transports
maritimes64. Il est aussi aberrant de penser, comme certains ont eu
à le faire au moment des faits qui ont succédé au
naufrage, que l'assurance du navire était souscrite auprès de
l'agent judiciaire de l'Etat. Celui-ci n'est chargé que de la
défense des intérêts pécuniaires de l'Etat devant
les tribunaux. L'armateur est libre de souscrire, en plus de l'assurance
obligatoire, d'autres polices d'assurance pour se prémunir des risques.
Il faut noter qu'en matière maritime on assiste souvent à une
coassurance. C'est que les assurances en matière maritime sont si
exorbitantes qu'une compagnie d'assurance sérieuse n'accepterait pas de
couvrir seule les risques maritimes tant les sommes en jeu sont faramineuses.
C'est ainsi qu'en cette matière les compagnies optent presque toujours
pour la coassurance et n'hésitent pas à se réfugier
derrière la réassurance.
Le bénéficiaire de l'assurance est le passager,
et celui-ci verra son risque couvert jusqu'à un certain seuil. C'est une
garantie lui permettant de se prémunir contre l'insolvabilité du
transporteur si le risque venait à se réaliser. Le code de la
marine marchande, pour la fixation du taux de l'indemnité, renvoie aux
dispositions des conventions internationales. Même si le
Sénégal n'a pas ratifié la convention de Londres de 1974
qui règlemente les régimes de responsabilités et les
indemnités en cas d'accident dans le transport maritime, celle-ci garde
une grande possibilité d'applicabilité65.
En gros, le passager bénéficie d'une assez
grande protection tant sur le plan juridique que technique, mais il est assez
surréaliste de penser que dès lors que
63 L'épineuse question de l'assurance du navire
Le joola, par le professeur Ibrahima Khalil DIALLO, in Africajuris n°70 du
03 au 09 juillet 2003, p.10.
64 Ibid, ibidem.
65 Telle est la pensée du professeur Ibrahima
Khalil Diallo.
l'obligation de sécurité est établie,
elle sera exécutée. Il faut alors envisager la prise en charge du
manquement de cette obligation pour augmenter les chances du passager
d'être couvert, même si cette couverture n'intervient dans ce cas
qu'a posteriori. C'est d'ailleurs l'esprit du vieil adage qui dit mieux vaut
tard que jamais.
Seconde Partie Du manquement à l'obligation de
sécurité.
Le destin normal de toute obligation est sa bonne
exécution, c'est dire que dans la grande majorité des cas,
celle-ci devrait se dénouer par sa réalisation spontanée
et surtout scrupuleuse. Dans cette hypothèse elle s'éteint et se
consomme sans heurt, ni difficulté. Pourtant, il arrive que
l'exécution de bien des obligations pose problème « soit que
le débiteur de l'obligation se montre récalcitrant ou
déloyal ; soit qu'il éprouve, en toute bonne foi, du mal à
honorer son engagement ; soit encore que des circonstances de force majeure
viennent perturber le cours normal des choses... »66. Pour une
raison ou pour une autre l'obligation peut donc ne pas connaître une
issue heureuse : il peut s'agir d'une inexécution de la part du
débiteur, ou simplement d'une mauvaise exécution. L'application
de cette réalité dans le lien qu'il y a entre le transporteur et
le passager montre toute l'utilité qu'il y a à pousser la
protection dont bénéficie ce dernier jusqu'à
l'exécution de l'obligation de sécurité. La simple
édiction de cette obligation ne suffit donc pas à assurer une
protection au passager, il faut alors veiller à sa bonne
exécution. Celle-ci, au cas où elle connaîtrait une fin
heureuse, donc qu'elle serait parfaitement exécutée, ne pose pas
problème. C'est ce qui faisait dire à un auteur que les
conventions bien exécutées n'ont pas d'histoire67. Ce
qui nous pousse à nous intéresser au cas de manquements qui
pourraient affecter l'obligation et à leur régime juridique. Ce
manquement est sanctionné par l'engagement de la responsabilité,
dans les cas où on est en présence d'une faute, tel que
définie par l'article 118 du Code des obligations civiles et
commerciales68 et l'absence de celle-ci entraîne certaines
atténuations dans la sanction. Il convient alors de voir d'abord la
place de la faute dans l'engagement de la responsabilité (chapitre1)
avant d'en venir à la nature des sanctions qui peuvent en
découler (chapitre2).
66 Professeur Didier Martin, in Droit Civil et
Commercial Sénégalais, Le dénouement de l'obligation...,
p.83.
67 Ibid, ibidem.
68 Cet article ne fait pas la distinction entre la
faute d'origine contractuelle et celle d'origine délictuelle, dans sa
définition.
Chapitre Premier: La place de la faute dans
l'engagement
de la responsabilité.
La faute est un manquement à une obligation
préexistante, elle exprime donc tout fait ou tout comportement imputable
à un individu et qui cause un préjudice à autrui. La faute
est donc un préalable à l'engagement de la responsabilité,
sauf dans les cas particuliers où la responsabilité est
engagée en son absence même. C'est ainsi qu'en matière
maritime la responsabilité du transporteur peut être
engagée, tant pour sa propre faute ou que pour la faute de ses
préposés (Section 1). Mais dans certaines situations l'auteur de
la faute peut être un autre acteur intervenant ou ayant eu à
intervenir d'une manière ou d'une autre dans soit la création de
l'outil de transport soit dans sa remise en état (Section 2). On
distinguera alors l'engagement de la responsabilité du transporteur et
la sanction par l'engagement de la responsabilité de personnes qui sont
étrangères au contrat de transport.
Section 1 : L'engagement de la responsabilité du
transporteur
Dans les mécanismes de protection du passager il est
prévu que le transporteur ainsi que les personnes agissant pour son
compte veillent, chacun en ce qui le concerne, sur la sécurité du
passager. Toutefois, en justice cette distinction entre le transporteur et ses
préposés disparaît presque; en effet c'est le transporteur
qui, la plupart du temps, est sanctionné pour la faute qu'il a commise,
mais aussi pour celles commises par ses préposés (Paragraphe 2),
dans tous les cas c'est la qualification de la faute qui est à la base
de cette sanction (paragraphel).
Paragraphe 1 : La qualification de faute
Conformément au droit positif, il est tout à
fait normal que l'auteur d'une faute soit sanctionné. Définie
comme un manquement à une obligation préexistante, la faute est
tantôt nautique (A) tantôt commerciale (B).
La faute nautique
Le manquement à l'obligation de sécurité
est dit faute nautique s'il est relatif à l'armement du navire. Il est
admis qu'il pèse sur le transporteur-armateur une obligation de
maintenir un bon état de navigabilité du navire. La simple
insuffisance des matériaux nécessaires à une bonne
exploitation du navire peut ainsi, être constitutive d'une faute. C'est
pour cette raison que la conformité aux normes de sécurité
a été érigée en obligation. Le défaut de
conformité du navire, ou des installations qui lui sont accessoires, aux
normes minimales de sécurité est ainsi constitutif d'une faute.
C'est que l'obligation de sécurité est à la fois une
obligation de moyen et de résultat. L'obligation de
sécurité, dans ses aspects relatifs à l'armement
pèse sur l'armateur pendant toute la durée de l'exploitation. Nul
n'a le droit d'exploiter un navire qui ne respecterait pas les normes
suffisantes de sécurité établies par les organes de l'OMI.
Si on admet que l'accomplissement de cette obligation se manifeste, en
principe, par la détention régulière de son permis de
navigabilité, on reconnaît alors que l'inexistence de ce permis
coïncide dans la plupart des cas avec le défaut de
conformité ; même si la seule détention du dit permis ne
signifie pas que le navire est et demeure en bon état de
navigabilité. Il s'agit d'une présomption simple de
conformité dont bénéficie ledit navire détenteur
dudit permis. L'appréciation de la faute nautique donne toute leur
importance aux contrôles de conformité ainsi qu'à
l'expertise maritime, qui permettent d'apprécier, même
après coup, par une enquête technique ou une expertise, la
conformité d'un navire à la réglementation
sécuritaire. Tel fut le cas suite au naufrage du joola69.
L'appréciation de la faute nautique peut se faire en amont comme en
aval. Dans la première situation, elle entraîne une interdiction
de naviguer, qui peut intervenir par un retrait du permis ou par un maintien
à quai...et dans la seconde, elle entraîne une condamnation,
judiciaire pour la plus part du temps. Cette faute peut consister en
l'inexistence d'un élément ou matériel nécessaire
à une navigation, ou au secours ; ou en la défaillance de ce
matériel. La conformité d'un navire à la
législation sécuritaire en matière maritime
s'apprécie selon des règles spécifiques à chaque
forme de
69 Décret n°2002-931 du 30 Septembre
2002.portant création d'une commission d'enquête approfondie sur
les causes du naufrage du joola
navigation. Ainsi un navire peut être suffisamment
armé pour un cabotage interne mais ne pas être apte à
effectuer un transport international. La faute nautique s'apprécie par
conséquent presque au cas par cas. Mais quelque soit sa forme, elle
pèse toujours sur l'armateur contrairement à la faute commerciale
qui elle pèse sur l'affréteur-transporteur. C'est pour cette
raison qu'il est aussi fait obligation au premier de se couvrir auprès
des compagnies d'assurance par la souscription d'une police pour ses passagers.
Cette distinction entre la faute nautique et la faute commerciale vient
à la suite de la distinction apparue dans la pratique entre l'armateur
et l'affréteur. Il est donc aussi nécessaire d'éclaircir
les contours de cette faute dite commerciale.
B-- La faute commerciale
A l'inverse de la faute nautique, la faute commerciale est
celle qui n'est pas relative à l'armement du navire mais qui est le fait
du transporteur dans l'exploitation du navire. Le transport demande une
certaine minutie pour la protection des passagers. Il s'agit, en effet, d'une
activité qui demande un grand degré de professionnalisme. Et
c'est ce qui justifie qu'elle soit soumise à une réglementation
on ne peut plus particulière, mais enfin cela semble n'être
qu'à titre théorique... Dans la navigation commerciale, le
législateur est très protectionniste des intérêts du
passager et c'est ce qui est à la base du souci de rigueur dans
l'exploitation et dans l'exercice de cette activité. Et la sanction de
la faute commerciale va dans le sens de la protection du passager contre
l'exploitant qui voudrait faire un excès de bénéfice
sacrifiant par la même occasion la sécurité de
l'exploitation. C'est par exemple le cas de la surcharge du navire. On ne
saurait reprocher le non respect du nombre maximum de passager qu'à
celui qui est chargé de l'exploitation commerciale du navire ou de la
partie affrétée à cet effet. Une seule négligence
peut donc suffire pour que le transporteur soit sanctionné. Il peut
s'agir d'un manquement quelconque à la sécurité du
passager car l'obligation de sécurité est ici une obligation de
résultat. Ce qui est établi c'est que le passager doit arriver
sain et sauf à sa destination ; alors la non arrivée du passager
sain et sauf à bon port suffit et le transporteur peut voir sa
responsabilité engagée dès lors que le
dommage qu'a subi le passager a un lien quelconque avec l'exploitation. Et
d'ailleurs en cas de lésion corporelle ou de perte de vie, la
responsabilité du transporteur est engagée d'office sauf si
lui-même apporte la preuve que « ni lui ni ses
préposés ont commis ni une faute ni une négligence. »
On note que le législateur ne fait pas la distinction entre la
commission de la faute ou de la négligence par le transporteur
lui-même ou par ses préposés. En réalité, il
ne s'intéresse qu'à l'existence de la faute elle-même ou de
la négligence et moins l'auteur.
Paragraphe 2 : L'indifférence de la distinction
entre le transporteur et ses préposés
A la lecture des dispositions du code de la marine marchande,
on note que le transporteur répond à la fois des fautes qu'il a
lui-même commises mais aussi de celles commises par ses
préposés (A) car dans tous les deux cas l'exploitation se fait en
son nom et pour son compte (B).
A.- La responsabilité du transporteur pour ses
fautes et pour celles de ses préposés
Le transporteur est responsable des fautes qu'il a
lui-même commises. Ainsi l'armateur qui ne met pas à la
disposition de son affréteur un navire suffisamment armé
répond de cette insuffisance, il doit alors lui-même
exécuter, ou veiller à l'exécution, de toutes les
obligations qui sont à sa charge. Que ce soit l'armateur, pour la faute
nautique, ou l'affréteur, pour la faute commerciale, il s'agit ici d'une
responsabilité du fait personnel. Cette responsabilité est
régie au Sénégal par l'article 118 du COCC et en France
par les articles 1382 et 1383, ainsi que par l'article 489-2 du code civil.
Elle sanctionne ainsi l'armateur qui n'a pas accompli son obligation
d'équiper le navire et l'affréteur qui n'exploite pas le navire
conformément à la réglementation. Le transporteur
répond ainsi non seulement de toutes les fautes qu'il aura commises,
mais encore de celles commises par ses préposés. Dans ce cas de
figure la responsabilité revêt les caractéristiques d'une
responsabilité du fait d'autrui.
Il s'agit du cas particulier prévu à l'article
1384-5 du code civil français et les articles 142 et 14670 du
COCC. Et à l'assemblée plénière de la Cour de
cassation française71 de préciser que : «le
préposé qui agit sans excéder les limites de la mission
qui lui a été impartie par le commettant n'engage pas sa
responsabilité ». Le domaine du transport est l'un des domaines de
prédilection de cette responsabilité et le législateur,
dans le code de la marine marchande, ne semble pas s'écarter de cette
idée. En effet il précise expressément que c'est la
responsabilité du transporteur qui est engagé car le lien de
subordination, qui existe entre ses employés et lui, fait que ceux-ci
agissent en son nom et pour son propre compte.
B- Les fondements de cette responsabilité
: l'exploitation au nom et pour le compte du transporteur
Si l'article 3 de l'Acte Uniforme portant droit commercial
général72 dispose qu'ont le caractère d'acte de
commerce ... les opérations de transport... c'est parce qu'il compte
classer les auteurs de ces actes au rang des commerçants. Il faut alors
pour exercer la profession de commerçant remplir certaines conditions.
Il s'agit d'accomplir ces opérations de transport à titre de
profession habituelle, en son nom et pour son propre compte. Cette condition
n'est ici remplie que par le transporteur ; et ses employés ne sont
regardés que comme ses préposés, envers qui il est un
commettant. L'exploitation se fait en son nom : c'est ce qui ressort de la
subordination qui existe dans les rapports qu'il entretient avec ses
employés. Tout le personnel marin dépend, en effet du capitaine
du navire, qui est seul maître à bord. Le capitaine
représente à la fois l'armateur et l'affréteur. Il
défend leurs intérêts à bord, donc agit pour leur
compte. D'ailleurs il lui est interdit d'agir pour son compte
personnel73. Le capitaine ainsi que toutes les personnes inscrites
au rôle d'équipage agissent au nom et pour le
70 Cet article dispose que « les commettants, ou patrons,
répondent des dommages causés par une personne soumise à
leur autorité, lorsque celle-ci encourt dans l'exercice de ses fonctions
une responsabilité à l'égard d'autrui. Les personnes
agissant pour le compte d'une personne morale engagent dans les mêmes
conditions la responsabilité de celle-ci. »
71 Dans un arrêt du 25 février 2000,
Costedoat (du nom du préposé concerné) publié dans
la plupart des revues juridiques (notamment au Dalloz 2000.673 et à la
Semaine Juridique 2000.11. 10295)
72 Signé à Cotonou le 17 avril 1997 et entré
en vigueur le 1er janvier 1998.
73 C'est ce qui ressort des dispositions de l'article 331 du code
de la marine marchande
compte du transporteur. La qualité de commerçant
est ainsi un critère essentiel pour l'engagement de la
responsabilité du transporteur pour un manquement à l'obligation
de sécurité envers le passager. C'est que c'est le transporteur
qui est créancier de cette obligation et non les membres de
l'équipage, ceux-ci ne sont, en principe, liés que par le contrat
de travail, ou de prestation de services, qui les met en rapport avec leur
employeur, ou le bénéficiaire de ces prestations, selon le cas.
Toutefois il faut faire la part des choses car quand un membre de
l'équipage commet une faute qui est détachable de sa fonction, il
peut voir alors sa responsabilité délictuelle ou quasi-
délictuelle engagée.
Le passager, par le contrat de transport qu'il a conclu, n'est
lié qu'au transporteur et en général il n'agit en justice
que contre ce dernier et c'est à celui-ci de se retourner contre les
personnes qu'il estime fautives pour tenter d'obtenir d'eux le remboursement de
ses frais.
Section 2: L'engagement de la responsabilité de
personnes autres que le transporteur
En général, le passager ayant subi un dommage ou
ses ayants droit dirigent leur action contre le transporteur. Ce dernier s'il
estime que la cause du dommage ne provient pas de son chef, peut se retourner
contre d'autres personnes qui sont des tiers au contrat de transport
(paragraphe 1) et dans certaines situations la loi permet l'engagement de la
personne assurant le commandement du navire (paragraphe 2).
Paragraphel La responsabilité de personnes tierces
au contrat de transport
La notion de tiers s'apprécie ici en rapport avec ou
non le contrat de transport. Il faut alors distinguer selon que c'est la
responsabilité de l'entrepreneur ayant intervenu sur le navire (A) et le
cas où le partage de responsabilité et la limitation de
responsabilité sont envisageables (B).
A.- Le constructeur et le réparateur responsables des
dommages causés par le vice caché du navire.
La responsabilité du transporteur peut se justifier par
le lien qui existe entre la réalisation du dommage et l'état du
navire. S'il s'avère que l'état du navire est la cause du dommage
et que cet état est le fait d'un vice ayant atteint le navire lors de
l'exécution du contrat d'entreprise. En d'autres termes si le dommage
est le résultat d'un vice du navire, il est possible pour le
transporteur de se retourner contre son entrepreneur qui selon le cas est soit
le constructeur soit le réparateur du navire. C'est qu'en matière
contractuelle le maître d'oeuvre est tout à fait dans le droit
d'attendre de son entrepreneur la conformité entre le bien qui lui est
livré et ses attentes légitimes. Et la notion d'attentes
légitimes renvoie à celles de cause et d'objet non du contrat de
transport mais ici, du contrat d'entreprise. Il est exigé dans
l'exécution du contrat une conformité entre l'ouvrage
réalisé et son objet. Dans les deux cas, ici
spécifiés, il s'agit d'une part de la construction d'un navire
conforme à l'usage auquel il est destiné et d'autre part de la
remise en état d'un navire pour son type d'exploitation habituelle. Si
donc l'entrepreneur dans la réalisation de son ouvrage venait à y
laisser des vices susceptibles de causer des dommages, sa responsabilité
serait engageable pour ces dommages. Il faut noter au passage que la
réception sans réserve de l'ouvrage ne signifie pas sa
conformité totale aux attentes légitimes. Pour les vices
apparents du navire, le problème se pose avec moins d'acuité que
pour les vices cachés. Dans la situation d'un vice apparent du navire,
le transporteur ne devrait pas mettre en mer le navire, au moins si ce vice est
de nature à affecter la sûreté du voyage à
entreprendre, ne serait ce que pour l'obligation de n'exploiter que les navires
en bon état de navigabilité. Mais pour le vice caché c'est
les articles 144 et 146 du code de la marine marchande qui règlent la
question. Le premier dispose que : « le constructeur est garant des vices
cachés du navire, malgré la réception du navire sans
réserve par le client ». Et le second précise que «
l'entrepreneur qui a procédé à la réparation d'un
navire est garant des vices cachés résultants de son travail...
» . Il faut tout de même préciser que l'action en garantie
pour les vices cachés est d'une prescription annale et celle-ci ne
commence à courir
qu'à partir de la découverte du vice. L'usage du
terme de «garantie » par le législateur semble, notons le au
passage, être la cause d'une difficulté d'interprétation :
s'agit-il d'une obligation d'assurer au client la possession paisible de
l'article ou s'agit-il d'une responsabilité pleine et entière qui
pèse sur l'entrepreneur ? Cette distinction semble toutefois vaine si
l'on considère la sanction car le manquement à l'obligation de
garantie elle-même est sanctionné par l'engagement de la
responsabilité de l'entrepreneur.
La responsabilité de personnes autre que le
transporteur ne se limite pas à celle de l'entrepreneur. Elle
apparaît aussi dans certaines situations où on note un partage des
responsabilités qui naît de la distinction entre
l'affréteur, l'armateur et même le propriétaire du
navire.
13- La distinction entre le propriétaire,
l'armateur et l'affréteur du navire.
En matière de transport maritime, on note très
souvent une distinction entre l'affréteur, le propriétaire et
l'armateur du navire. Cette distinction ne manque pas d'affecter le
régime des responsabilités. En effet, en la matière, le
transporteur n'exploite que très rarement son navire ; alors que ce
dernier est à la base de l'engagement des responsabilités. Il se
pose très souvent le problème de savoir quelle personne
sanctionnée. Doit-on engager la responsabilité du
propriétaire dont le bien est à la base du dommage, ou celle de
la personne dont dépendait l'équipement du navire qui a
causé le tort au passager ou enfin faut-il se retourner contre la
personne au profit de laquelle se faisait l'exploitation du navire ? Si ces
trois situations ne concernent que la même personne, il y a moins de
difficultés. Mais si toutefois ces trois personnes sont distinctes, il
faudra identifier la nature de la faute. C'est alors que la distinction entre
la faute nautique et la faute commerciale revêt toute son importance. Si
la faute est nautique la responsabilité pèse sur l'armateur et si
elle est commerciale elle entraîne la sanction du transporteur ayant
affrété le navire. La distinction entre le propriétaire et
l'armateur n'est pas aisée dans la pratique. Ces deux se confondent
très souvent mais c'est dans ce domaine que l'on note toute
l'importance de la sous-traitance. En effet le
propriétaire arme très souvent lui-même son navire mais il
arrive qu'il en confie l'équipement à un spécialiste.
Pourtant cette distinction entre l'armateur principal et un armateur secondaire
qui ne s'occupe que de l'équipement d'une partie du navire semble assez
erroné car d'un certain point de vue quand on considère que le
navire ne constitue qu'un seul corps, donc une entité indivisible.
Toutefois, il faudrait préciser que le propriétaire
bénéficie d'une limitation de responsabilité. En effet
l'article 112 du code de la marine marchande précise que : « ...le
propriétaire d'un navire peut, même envers l'Etat ... limiter sa
responsabilité envers ses cocontractants et des tiers si les dommages se
sont produits à bord du navire, ou s'ils sont en relation directe avec
la navigation ou l'état du navire ». Et l'alinéa 2 de la
même disposition de préciser qu'il peut même limiter sa
responsabilité pour des mesures prises afin de prévenir ces
dommages ou pour des dommages causés par ces mesures ». Il faut,
cependant retenir que cette limitation de responsabilité n'est pas
absolue. Le législateur pose lui même deux restrictions : la
première c'est la commission par le propriétaire même d'une
faute dont la preuve est avérée ; et la seconde tient en la
provenance du dommage du fait personnel du propriétaire ou de l'omission
par lui-même témérairement faite, avec l'intention de
provoquer ce dommage ou simplement avec la conscience qu'un tel dommage en
résulterait. Il faut ajouter à cette remarque l'extension faite
par le législateur du bénéfice de la limitation de
responsabilité à l'affréteur, l'armateur, ainsi
qu'à l'armateur-gérant, entre autres. D'ailleurs cette extension
touche aussi le capitaine dont la responsabilité peut aussi être
engagée suivant un régime plus ou moins particulier.
Paragraphe2 La responsabilité de la personne
assurant le commandement du navire
Le code de la marine marchande identifie le capitaine comme
étant toute personne qui exerce régulièrement le
commandement du navire. Il est vrai que la responsabilité personnelle du
capitaine est assez rarement engagée. Il ne faudrait tout de même
pas en déduire que cette responsabilité n'est pas engageable ou
même
qu'elle n'est pas engagée. Tel n'est pas le cas. En
effet même si en matière de responsabilité civile, s'il est
vrai que, dans la pratique, un armateur, après un sinistre maritime,
hésitera toujours à mettre en cause la responsabilité
personnelle d'un capitaine, en craignant que son action ne suscite une
réprobation générale, le capitaine n'en est pas pour
autant intouchable. Il se pose alors la question de savoir dans quelles
situations la responsabilité du capitaine peut-elle être
engagée ? Il est nécessaire, pour apporter une réponse
claire à cette question de revenir sur les conditions d'engagement de la
responsabilité du capitaine (A) avant de préciser le domaine et
le régime de la protection dont il bénéficie face à
l'engagement de sa responsabilité (B).
A.- Les conditions d'engagement de la
responsabilité personnelle du capitaine
Au Sénégal, le législateur prévoit
que le capitaine répond de ses fautes, même légères
dans l'exercice de ses fonctions. Il s'agit d'une responsabilité qui
obéit aux règles du droit commun. Et l'idée selon laquelle
le capitaine n'est pas attaqué en justice est fausse, même si les
passagers sont plutôt prédisposés à attaquer le
transporteur, exploitant du navire, et à celui-ci de se retourner contre
son capitaine. Cependant il y a des passagers qui agissent directement contre
le capitaine. C'est ainsi que dans l'affaire du navire Himalaya, une
passagère britannique, certes particulièrement irascible, avait
personnellement mis en cause le capitaine d'un paquebot après qu'elle
ait été blessée à l'occasion de son
réembarquement suite à une escale. Et le litige est allé
jusqu'à la Court of Appeal britannique, laquelle, dans un arrêt du
21 octobre 1954 a déclaré l'action de la passagère
recevable, et, de surcroît, refusé au capitaine le
bénéfice de la clause d'exonération de
responsabilité figurant au dos du billet de passage (Lloyds Law Reports,
1954.2.267). Aussi en droit français, dans l'affaire de l'Ann Bewa,
soumise à la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 21 février 1979
(Droit Maritime Français 1980.151), c'est le capitaine du navire, et lui
seul (l'armateur et l'affréteur ayant échappé à
toute responsabilité pour des raisons de procédure), qui a
été condamné à indemniser les tiers
lésés par l'incendie du
navire, dû à des fautes d'arrimage, et ce
à hauteur de près de quatre millions de francs français.
Toutefois, il faudrait distinguer sa responsabilité pénale de sa
responsabilité civile. La première pose moins de
difficultés car elle est très liée à l'individu et
ne s'écarte que très peu des règles de droit commun. En
France, par exemple c'est la loi du 10 juillet 2000, insérée dans
l'article 121-3 du Nouveau Code pénal qui règle de façon
simple la question. Ce texte énonce que "les personnes physiques qui
n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé
ou contribué à créer la situation qui a permis la
réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de
l'éviter, sont responsables pénalement. C'est le cas s'il est
établi qu'elles ont soit violé de façon manifestement
délibérée une obligation particulière de prudence
ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement,
soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui
à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne
pouvaient ignorer". La responsabilité civile, par contre, nous met face
à de très complexes situations car dans bien des cas on ne sait
pas qui sanctionner. Le législateur sénégalais pose alors
le principe de l'engagement de la responsabilité du transporteur pour
ses fautes, même légères. La question de la distinction
selon la gravité de la faute ne se pose donc pas en droit
sénégalais. Pourtant en France la distinction entre la faute
simple, la faute lourde et la faute inexcusable du capitaine est à la
base d'une vive controverse sur la question de la limitation de
l'irresponsabilité du capitaine, en tant que préposé du
transporteur. Au Sénégal la question se pose autrement : le
législateur prévoit d'une part que le transporteur est
responsable des fautes de ses préposés74 et d'autre
part que le capitaine répond de ses fautes dans l'exercice de ses
fonctions75. Voila donc une contradiction qui peut mettre les juges
devant une situation on ne peut plus difficile : le capitaine n'est-il pas un
préposé du transporteur ? Il est donc peu compréhensible
que le capitaine soit sanctionné pour des fautes commises dans
l'exercice de ses fonctions. On aurait pu comprendre que ce fût le cas
pour les fautes commises en dehors de l'exercice de sa fonction et que le
transporteur réponde des fautes commises par le capitaine dans
l'exercice de sa fonction. C'est que la disposition de la loi marchande du
Sénégal n'est
74 C'est ce que prévoient les articles 475
à 474 du code de la marine marchande.
75 C'est ce qui ressort de l'article 330 du code de la
marine marchande sur les dispositions spéciale concernant le
capitaine.
qu'une reprise de l'article 221 du Code de Commerce
français ; disposition qui d'ailleurs est aujourd'hui
dépassée. Il y va de la protection du capitaine face à
l'engagement abusif de sa responsabilité.
13- La problématique de la protection du
capitaine face à l'engagement abusif de sa responsabilité.
Les capitaines exerçant dans le champ d'application de
la législation sénégalaise sont très fortement
exposés à la sévérité. Ce fut le cas, en
France pendant une certaine période (de l'Ordonnance de la Marine de
1681 à l'article 221 du code de Commerce et en droit contemporain, avec
l'article 5 de la loi du 3 janvier 1969). Cette sévérité
explique que les règles du droit français aient fait l'objet en
1967 d'une critique approfondi, critique émanant de Robert
Garron76. Le Professeur Pierre Bonassies77 rappelle que :
« Cet auteur avait proposé de distinguer entre le promoteur
d'activités qu'est l'armateur, et le simple réalisateur qu'est le
capitaine, lequel n'agit jamais que dans le cadre des instructions
données par l'armateur, et pour le compte de celui-ci. Et il lui
apparaissait que le responsable des dommages causés par l'exploitation
d'un navire devait demeurer le seul armateur, le capitaine n'engageant sa
responsabilité personnelle que très exceptionnellement, en cas de
faute lourde détachable de son service. Mais le Doyen Rodière,
rédacteur de la loi de 1969 n'a pas cru pouvoir suivre les idées
développées par Robert Garron, idées que cependant il
connaissait fort bien. Cette loi a donc, comme nous l'avons vu, maintenu la
règle classique de la responsabilité du capitaine, sans
distinguer d'ailleurs entre sa responsabilité à l'égard de
l'armateur et sa responsabilité à l'égard des
tiers.»78Aujourd'hui la thèse défendue par le
Professeur Robert Garron semble avoir triomphé. En effet dans un
arrêt du 25 février 2000, publié dans la plupart des
76 Robert Garron était à la fois,
à l'époque capitaine au long cours et docteur en droit, et est
devenu depuis, Professeur des facultés de droit.
77 Pierre Bonassies est membre associé de
L'AFCAN, professeur honoraire à la Faculté de droit
d'AixMarseille, vice-président de l'Institut Méditerranéen
des Transports Maritimes (I.M.T.M.) et Président Honoraire de
l'Association Française du droit maritime - le présent texte
reproduit pour partie une communication faite par l'auteur lors de la
journée Info-Navires organisée par l'I.M.T.M. le 22 octobre
2001.
78 In nouveaux aspects de la responsabilité du
Capitaine.
revues juridiques (notamment au Dalloz 2000.673 et à la
Semaine Juridique 2000.11. 10295), l'Assemblée plénière de
la Cour de Cassation française a posé le principe selon lequel
"le préposé qui agit sans excéder les limites de la
mission qui lui a été impartie par le commettant n'engage pas sa
responsabilité à l'égard des tiers". Et il apparaît
que le capitaine est à juste titre inclus dans cette catégorie
même si cet arrêt (communément appelé l'arrêt
Costedoat, du nom du préposé concerné) ne reprend pas
exactement comme elle est proposée dans le schéma de Robert
Garron, la distinction entre promoteur d'activité et simple
réalisateur. Mais ses conséquences, si tant est qu'on puisse
l'appliquer au capitaine, sont celles là même que souhaitait le
défenseur de la thèse ci-dessus visée pour
l'immunité du capitaine pour le dommage causé par une faute
professionnelle. Selon le Professeur Bonassies rien ne s'oppose à
l'application de l'arrêt Costedoat au capitaine. Certes, la Cour de
Cassation vise dans cet arrêt les articles 1382 et 1384, alinéa 5,
du Code civil, - l'article 1382, texte qui pose le principe de la
responsabilité de chacun pour toute faute, et l'article 1384,
alinéa 5, texte qui pose le principe de la responsabilité du
commettant pour le fait de ses préposés (les "personnes dont on
doit répondre"). Or, la responsabilité de l'armateur et celle du
capitaine reposent sur d'autres dispositions, celles des articles 3 et 5 de la
loi du 3 janvier 1525. Mais l'article 3 de la loi du 3 janvier 1525 renvoie
"aux termes du droit commun", - c'est à dire précisément
à l'article 1384 pour ce qui est de la responsabilité de
l'armateur pour les faits de ses préposés maritimes ou
terrestres. Or, le capitaine entre bien dans la catégorie de tels
préposés, la Cour de Cassation ayant affirmé, dès
1551, que "malgré les pouvoirs de direction dont il dispose, le
capitaine reste le préposé de l'armateur" (arrêt
Lamoricière, 19 juin 1951, Dalloz 1951.1.717). Quant à l'article
5, il ne fait que reprendre, en les appliquant au capitaine, les dispositions
de l'article 1382 du Code civil. Dire, comme il le fait, que le capitaine
"répond de toute faute commise dans l'exercice de ses fonctions", c'est
bien dire que pour reprendre les termes exprès de l'article 1382 - "tout
fait quelconque (du capitaine) qui cause un dommage à autrui oblige
celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".
Cette reformulation faite par le professeur Bonassies nous permet de le suivre
dans sa démonstration pour estimer que la règle posée par
l'arrêt Costedoat peut, et doit être étendue aux capitaines,
et ce pour deux raisons. En premier lieu, même s'ils sont rares, il
existe des exemples où la Cour de cassation
n'a pas hésité à aller contre les termes
exprès de la loi (ainsi, dès 1813, à propos des
dispositions de l'article 531 du Code civil sur la forme des donations). Par
ailleurs, si l'Assemblée plénière a fait prévaloir
l'article 1384, alinéa 5 - avec l'interprétation qu'elle lui a
donnée, comme excluant toute responsabilité du
préposé agissant dans l'exercice de sa mission, sur l'article
1382, on doit pareillement faire prévaloir l'article 3 de la loi de
1525, avec le renvoi qu'il comporte à l'article 1384, alinéa 5 du
Code civil, sur l'article 5 de la même loi, simple copie de l'article
1382. Il faut donc étendre au capitaine, préposé maritime,
l'immunité affirmée, pour les préposés terrestres,
par l'Assemblée plénière. Il reste que, même si l'on
admet que la "doctrine" de l'arrêt Costedoat doive être
étendue au capitaine, l'immunité accordée à
celui-ci ne vaut que pour les actes qui se situent dans "les limites de sa
mission". Se pose, en outre, la question de savoir si cette immunité
aussi extensible qu'elle puisse être au capitaine, court-elle quelque
soit la gravité de la faute commise par le capitaine. La réponse
à cette question sera très nuancée. Si cette
immunité est applicable au capitaine, elle pourra toujours être
admise pour ce qui est de la faute légère, et dans une certaine
mesure pour la faute lourde79. Mais son applicabilité pour
une faute inexcusable ou une faute intentionnelle ne semble pas
envisageable.
Il faut tout de même s'interroger sur la
possibilité de la prise en compte de cette solution dans le droit
sénégalais. L'extension de la responsabilité du commettant
au capitaine n'est envisageable au Sénégal que si l'application
de l'article 330 premièrement est différée ; ou dans une
autre mesure si l'application des dispositions relatives à l'engagement
de la responsabilité du transporteur est étendue aux
capitaines.
De toute façon, une fois les questions de l'engagement
de responsabilité élucidées, il se posera la question de
l'appréciation de la sanction. En effet la commission d'une faute ou
d'une négligence est attachée à une conséquence
très logique, à savoir celle de la sanction de cette faute.
79 Il est possible que la réserve de la
faute lourde - assez traditionnelle en droit français, et que l'on
retrouve dans la décision de la Cour d'appel de Rennes du 16 septembre
1553 - ne l'emporte. Mais, d'autre part, l'Assemblée
plénière n'a assorti l'immunité accordée par sa
décision d'aucune restriction. La seule condition qu'elle mette à
cette immunité est que le préposé - pour nous, le
capitaine - ait agi dans les limites de sa mission. Or, l'Assemblée
plénière était parfaitement informée de la
jurisprudence antérieure et de la réserve de la faute lourde. On
peut penser que c'est sciemment qu'elle n'a pas repris cette réserve.
Chapitre Second : La sanction de l'engagement de la
responsabilité
L'appréciation de la responsabilité du
transporteur dépend grandement de la qualification de l'obligation de
sécurité qui pèse sur lui. Pour engager la
responsabilité du transporteur, il faut savoir d'abord s'il pèse
sur lui une obligation de moyens ou de résultat. En effet l'engagement
de la responsabilité du transporteur n'est effectif que si sa faute est
à l'origine du dommage. Celui-ci pour être réparable doit
être exempt de causes d'exonération (Section 1), c'est alors
seulement que la sanction pourra être effective. Il faudra donc en
préciser les modalités avant de faire ressortir les situations et
circonstances dans lesquels dès le transporteur peut ère
exonéré (Section 2).
Sectionl Les modalités de la sanction de la
faute
L'engagement de la responsabilité du transporteur
entraîne sa sanction mais cette sanction est de nature assez variante
(paragraphe 1) car le législateur a mis en place une large gamme de
sanction parmi lesquelles il faudra choisir selon le mode de règlement
des contentieux qui opposent le transporteur aux passagers dont il doit assurer
le déplacement et principalement sur la question de la
sécurité de ces derniers. Une fois la nature de la sanction
précisée il faudra en apprécier les quanta (paragraphe
2).
Paragraphel La nature de la sanction
La nature de la sanction est très fortement liée
à son origine. Il est nécessaire de distinguer selon que le juge
est intervenu ou non dans son élaboration. On précisera tout
d'abord les sanctions judiciaires (A) avant d'en venir à l'étude
des sanctions extrajudiciaires (B).
A.- Les sanctions judiciaires (civiles ou
pénales)
Les sanctions provenant des juges sont de différents
ordres. On distingue principalement les sanctions civiles des sanctions
pénales. C'est que la nature de la sanction est une conséquence
directe de la nature de la faute qui est à sa base. Les sanctions
civiles viennent donc à la suite de l'engagement de la
responsabilité civile du transporteur. Cette sanction civile est, par
conséquent, un effet direct soit de l'engagement de la
responsabilité civile délictuelle, soit de la
responsabilité civile contractuelle... N'oublions pas que l'obligation
de sécurité est de nature contractuelle80. En France
la cour de cassation a admis la nature contractuelle de l'obligation de
sécurité depuis 1911. Et dans les situations où il est
difficile de démontrer de la nature contractuelle de l'obligation de
sécurité, le passager dispose d'une possibilité de tenter
sa chance au niveau de la responsabilité délictuelle. A
coté de ce régime de responsabilité civile, il existe des
sanctions pénales à l'encontre de personnes ayant commis des
infractions. Il en est ainsi en cas de terrorisme maritime. Et il faut
préciser que le régime pénal en vigueur en matière
maritime est assez dérogatoire et est précisé dans le code
de la marine marchande81 ; même si certaines dispositions du
code pénal sénégalais restent applicables. Toutefois, il
faut préciser que l'engagement de la responsabilité du
transporteur au plan pénal n'implique pas toujours un engagement de la
responsabilité du transporteur au civil. Et toutes les sanctions ne sont
pas d'ordre judiciaire. Il existe en effet des sanctions extrajudiciaires : il
s'agit de sanctions administratives et à coté de celles-ci il
existe les solutions provenant des modes amiables de règlement du
conflit.
13- Les sanctions extrajudiciaires (sanctions
administratives ou conséquences des solutions amiables)
La résolution du contentieux relatif à la gestion
de la sécurité du passager dans le transport maritime n'est pas
toujours l'oeuvre du juge. C'est que dans
80 En tout cas c'est ce qui ressort de l'article 645
du COCC.
81 Le régime pénal est contenu dans les articles
605 à 607 et 619 à 706 du code de la marine marchande de 2002
certaines situations le passage devant les juridictions n'est
pas nécessaire. Tel est le cas si les parties décident de
procéder à un règlement amiable de leur litige. Il est
donc admis pour les parties qu'elles aient recours soit à la transaction
ou soit à l'arbitrage. C'est ainsi que l'article 732 du code de la
marine marchande prévoit le principe selon lequel «les litiges
maritimes nés à l'occasion de l'application du code de la marine
marchande peuvent être soumis à la procédure de l'arbitrage
». Les personnes concernées par un litige qui est relatif à
la question de la sécurité du passager peuvent donc valablement
choisir de régler leur différend par un arrangement conclu
à l'amiable. C'est une résurgence du principe de l'autonomie de
la volonté qui règne dans quasiment tous les domaines du contrat.
Au Sénégal c'est d'ailleurs un mode semblable de règlement
qui a été privilégié suite au naufrage du joola H
le président de la République ayant très tôt
proclamé et reconnu la responsabilité de l'Etat du
Sénégal. L'un des aspects positifs de cette attitude est qu'elle
a permis un gain de temps pour certaines victimes et certains ayants droits de
victimes même si dans une grande part on assiste à la naissance
d'autres difficultés quant à l'identification de ces ayants
droits et leur indemnisation effective. L'originalité dans les solutions
prises à l'amiable est que la partie dont la responsabilité est
engagée, reconnaît elle même cet état de fait et
négocie le quantum de la sanction qui lui sera appliquée...
Toutefois, il est nécessaire de préciser que la solution à
l'amiable n'est pas le seul mode de règlement des manquements à
l'obligation de sécurité. En effet l'autorité
maritime82 est souvent appelée à se prononcer sur le
non respect des prescriptions en matière de sécurité de la
navigation. Il s'agit en effet d'un domaine qui relève exclusivement de
sa compétence83. Il exerce ainsi un contrôle en amont
comme en aval et s'il s'avère qu'un navire ou qu'une navigation n'est
pas conforme aux prescriptions en vigueur, il entre dans ses fonctions de
sanctionner l'auteur de cette non-conformité. La sanction prise à
cet effet est une sanction administrative susceptible de recours devant les
juridictions de l'ordre administratif.
82 Aux fins du code de la marine marchande on
entend par autorité maritime le ministre chargé de la marine
marchande et les fonctionnaires et autorités auxquels il est susceptible
de déléguer tout ou partie de ses pouvoirs.
83 C'est ce qui ressort des articles 13 et 14 du code de la
marine marchande.
La sanction du non respect de l'obligation de
sécurité peut être de différentes natures certes,
mais cette différence de nature n'est pas la seule susceptible
d'exister. En effet cette différence apparaît aussi dans
l'établissement du quantum de la sanction.
Paragraphe2 Les quanta de la sanction
La substance de la sanction varie d'une part selon son origine
et d'autre part selon le manquement pour lequel il est établi. Ainsi on
assiste tantôt à la réparation du préjudice
causé au passager (A) et tantôt à l'interdiction qui
affecte l'exploitation du navire en cause (B) sans pour autant oublier de
rappeler les sanctions liées aux infractions pénales dont le
quantum ne diffère presque pas de celui rencontré dans le droit
commun.
~~ La réparation du préjudice
Le professeur Didier Martin affirme à juste titre que
la responsabilité civile désigne le régime de la sanction
de réparation encourue du fait du dommage causé à autrui.
La sanction en elle même se manifeste par l'octroi de dommages et
intérêts. Ceux-ci sanctionnent une inexécution partielle ou
totale ou une mauvaise exécution du débiteur. En effet la
défaillance du débiteur le met en devoir de réparer le
préjudice éventuellement souffert par le créancier du fait
de l'inexécution. Et l'article 133 du COCC prévoit que «Le
préjudice est en principe réparé par équivalence en
allouant à la victime des dommages et intérêts. » et
l'article 134 ajoute que « Les dommages et intérêts doivent
être fixés de telle sorte qu'ils soient pour la victime la
réparation intégrale du préjudice subi ». Ce principe
est un peu remis en cause en matière maritime. Il s'agit d'un domaine
où la responsabilité est limitée. C'est ainsi que
l'article 479 du code de la marine marchande dispose que : « la
responsabilité du transporteur, en cas de mort ou de lésions
corporelles d'un passager est limitée à un montant fixé
par la convention relative au transport par mer de passagers et de leurs
bagages adoptée le 13 décembre 1974. » il ajoute qu'une
limite de responsabilité per
capita plus élevée peut être fixée
par décret. Le problème avec cette disposition c'est qu'elle
renvoie à une convention qui n'a pas été ratifiée
par le Sénégal. Mais si l'on s'en tient aux propos du professeur
Ibrahima Khalil Diallo cela ne change rien à son applicabilité en
ce qui concerne en tout cas l'indemnisation des victimes du joola, car la loi
ne renvoie pas à toute la convention mais seulement à une
disposition de cette convention84. Si l'on s'en tient aux
barèmes prévus par cette convention chaque victime du joola
devrait recevoir prés de 37 millions de francs CFA or cette même
convention prévoit une limitation des indemnités à un
plafond de 25 millions de francs CFA. Passé ce montant les plafonds ne
s'appliquent plus. Ce qui fait que les sommes prévues deviennent
inopératoires.
La réparation du préjudice subi par le passager
ou par ses ayants droits se fait la plupart du temps par l'octroi de dommages
et intérêts. Et il n'y a pas de distinction selon qu'il s'agisse
de responsabilité d'origine contractuelle ou délictuelle.
Dès lors qu'il s'agit d'une responsabilité civile, la
réparation se fait par l'octroi de dommages et intérêts. Il
en est de même quand la victime se porte partie civile dans le cadre d'un
procès pénal. En dehors de la réparation civile d'autres
sanctions peuvent être prononcées contre le transporteur fautif.
Telle est le cas des sanctions administratives qui se résument quasiment
à une interdiction qui porte d'une manière ou d'une autre sur
l'exploitation du navire.
13- L'interdiction relative à
l'exploitation du navire
La navigation maritime est soumise à des conditions de
sécurité. Cette soumission se manifeste à travers
l'obligation de détenir des titres de sécurité. En effet,
le transporteur n'obtient ces titres que si le navire qu'il exploite
obéit aux normes minimales de sécurité. Par la
délivrance du permis de navigabilité, l'autorité maritime
peut exercer un contrôle a priori sur la conformité du navire. Il
lui est même possible d'exercer, a posteriori, ce contrôle. Au cas
où le transporteur ne respecterait pas son obligation de maintenir le
navire en bon état de navigabilité, ce
84 C'est ce qui ressort de la démonstration
que fait cet auteur sur l'applicabilité de la convention dans son
article « quelle indemnisation pour les victimes du joola ? » In
Africajuris n°70 du 03 au 09 juillet 2003.
qui est le principal fondement à la bonne
exécution de l'obligation de sécurité qui pèse sur
lui, l'autorité maritime peut lui refuser l'obtention du permis de
navigabilité. L'autorité maritime tient cette prérogative
des articles 15 et 32 combinés, et des articles 37 et suivants du code
de la marine marchande. Ce code, par pure logique, met aussi à la
disposition de l'autorité maritime des moyens juridiques pour lui
permettre de retirer les autorisations qu'elle avait délivrées au
transporteur. C'est ce qui ressort du dernier alinéa de l'article 49 du
code précité. Elle peut aussi, hormis la faculté qu'elle a
de refuser le renouvellement des titres de sécurité, «
prendre toutes les mesures en vue d'empêcher le navire de quitter le port
où il se trouve » (article 37, alinéa 1er). En
plus, elle peut « interdire la navigation, ainsi que l'entrée et la
sortie à tout navire dont l'état de navigabilité est
défectueux et susceptible de constituer un danger pour la
sécurité des personnes se trouvant à bord et pour celle
des tiers, ainsi que pour toute infraction à la législation et
à la réglementation maritime. » Malgré la mise
à sa disposition de toutes ces prérogatives pour assurer une
protection efficace aux passagers, il est déplorable que, dans les pays
en voie de développement, l'autorité maritime ne fasse pas usage,
du moins pas avec toute la rigueur qu'il faut, des pouvoirs dont elle dispose
pour assurer une plus grande sécurité dans la navigation
maritime. C'est ainsi que dans le rapport d'enquête technique qui a suivi
le naufrage du Joola, il a été
reproché à l'autorité maritime de n'avoir pas fait usage
de son pouvoir de retenir le navire à quai, alors qu'elle disposait de
tous les moyens nécessaires à cet effet ; pourtant, toutes les
conditions étaient réunies pour que ce navire ne puisse pas
appareiller dans l'intérêt des passagers qui y avaient
embarqués.
L'interdiction qui affecte l'exploitation du navire et la
réparation du préjudice causé, par l'engagement de la
responsabilité civile ne sont pas les seules sanctions susceptibles
d'être appliquées au transporteur malveillant. Cependant, elles
sont les plus fréquentes. Il va sans dire qu'il existe d'autres
sanctions qui peuvent être prononcées à l'encontre du
transporteur fautif. Il en est ainsi des sanctions pénales qui
accompagnent les infractions à la réglementation maritime. Pour
se dégager face à ses créanciers, le transporteur peut se
prémunir contre l'engagement de sa responsabilité en excipant une
exonération.
Section2 Les causes d'exonération de la
responsabilité du transporteur
Elles varient selon la nature du dommage. Et la doctrine ainsi
que la jurisprudence distinguent le dommage individuel du dommage collectif.
Cette distinction suit celle de l'accident individuel qui est opposé
à l'accident collectif ou pour certains le sinistre majeur. Selon le
caractère de l'accident les causes d'exonérations varient. Le
transporteur ne dégage sa responsabilité devant un accident
collectif que si ce dernier provient d'un cas de force majeure (paragraphe 1)
mais il se dégage face à un accident individuel par la faute du
passager (paragraphe 2).
Paragraphel La force majeure
La responsabilité du transporteur est
sévère en cas d'accident collectif ou sinistre majeur (Pour P.
Bonassies « un sinistre majeur est un sinistre qui affecte la
sécurité du navire dans son entier, ou est à tout le moins
susceptible d'affecter cette sécurité (un incendie partiel) et
qui peut toujours se développer et s'étendre à la
totalité du navire ».). L'obligation de sécurité qui
pèse sur le transporteur n'en est pas pour autant, seulement, une
obligation de résultat, faisant peser sur lui une présomption
irréfragable de faute quelque soit l'événement à
l'origine de l'accident. Elle reste une obligation de moyens, mais une
obligation de moyens renforcée par une présomption simple de
faute quelque soit l'événement à l'origine de l'accident
que le transporteur peut renverser en prouvant que ni lui, ni son
équipage n'ont commis de faute ou de négligence à
l'origine du sinistre. Toutefois, Monsieur Bonassies85 se prononcent
en faveur de l'obligation de résultat du transporteur, car si
d'après les textes le débiteur peut s'exonérer en prouvant
qu'il n'a pas commis de faute (présomption simple), en pratique il ne le
peut pas, car les tribunaux appliquent cette cause d'exonération de
manière très restrictive. Ce qui est exigé de lui c'est la
preuve que le dommage provient d'un cas de force majeure. Il faut alors
préciser les
85 Jurisclasseur commercial, Fasc. 1278, n° 34
caractéristiques de cette force majeure (A) avant d'en
venir aux limites posées quant à cette exemption de
responsabilité (B) .
A.- Caractéristiques de la force majeure
Les tribunaux appliquent l'exonération par la force
majeure de manière très restrictive. La simple preuve que la
cause de l'accident reste inconnue ne suffirait pas à le libérer.
Il faudra donc qu'il établisse la cause du sinistre d'abord et qu'il
parvienne à démontrer que ni lui, ni ses préposés
ne sont à l'origine du dommage. Pour cela il faut que la cause du
naufrage remplisse les conditions de droit commun de la force majeure. Ainsi
selon, le professeur Didier Martin : « la responsabilité du
débiteur défaillant doit cesser d'être engagée
chaque fois que l'inexécution définitive apparaît
justifiée par une circonstance invincible. » En effet il estime
raisonnable qu'il n'y ait lieu à aucune réparation lorsque, par
suite de la de force majeure le débiteur a été
empêché de faire ce à quoi il était
obligé.86Et l'article 129 du COCC ajoute que «Il n'y a
pas de responsabilité si le fait dommageable est la conséquence
d'une force majeure ou d'un cas fortuit, c'est-à-dire d'un
événement extérieur, insurmontable et qu'il était
impossible de prévoir ». Il faut donc que l'événement
soit extérieur, insurmontable et imprévisible. La rigueur dont
les tribunaux font preuve dans l'appréciation de la force majeure, qui
est assimilée au cas fortuit s'explique par l'avancée des
technologies. Aujourd'hui en effet, si les nouvelles techniques d'information
et de communication sont à la disposition de tout un chacun, il s'y
ajoute que l'obligation de maintenir le navire en bon état de
navigabilité impose aux transporteurs de se conformer aux normes. De
toutes les façons l'exonération par la force majeure n'est pas
absolue puisque dans certaines conditions elle ne saurait courir. Il s'agit en
effet d'une limitation du champ de cette exonération.
86 Droit civil et commercial sénégalais,
Le dénouement de l'obligation contractuelle,..., b) les cause
exonératoires ; NEA, 1982, Abidjan Lomé Dakar.
13- Les limites au champ de l'exonération
par la force majeure
A coté des conditions exigées pour pouvoir
bénéficier de l'exonération de responsabilité
(conditions relatives à l'événement constitutif de force
majeure), le législateur pose d'autres conditions négatives qui
sont en réalité des limites au bénéfice de
l'exonération pour cause de force majeure. Il s'agit d'abord de la
commission d'une faute par le débiteur. L'article 129 in fine
précise d'ailleurs que : « La faute de l'auteur du dommage annule
l'effet exonératoire du cas fortuit ou de force majeure s'il est
établi que sans elle cet évènement aurait
été sans effet sur l'acte de l'auteur du dommage. » Et
l'article 477 du code de la marine marchande ajoute que l'exonération de
responsabilité ne court pour le transporteur que s'il apporte la preuve
que: l'accident n'est imputable ni à sa faute ni à sa
négligence, ni à celles de ses préposés. Il
apparaît clairement que la commission d'une faute par le transporteur est
de nature à annihiler les effets de la force majeure quant à
l'exonération. A cet effet il convient de préciser qu'une simple
négligence suffit pour que l'exonération ne puisse pas courir. Le
législateur précise que l'auteur de la faute importe peu. L'effet
est le même que la faute ou la négligence proviennent du
transporteur ou de ses préposés.
Il faut voir dans la limitation du champ de
l'exonération pour force majeure, une consécration a contrario du
principe de précaution ou de due diligence qui est une sorte
d'obligation nouvelle pesant sur le transporteur. Ce principe est d'autant plus
important que de nos jours l'état de la technologie est telle que l'on
peut a priori être informé bien à l'avance des conditions
dans lesquelles se fera la navigation. En plus la présence à bord
de certains outils accroît le degré de sécurité dont
bénéficient les passagers. Cela peut expliquer que les tribunaux
soient beaucoup plus enclins à faire preuve d'une plus grande
intransigeance à l'égard du transporteur.
Les causes de l'exonération de la responsabilité
ne se limitent pas à la force majeure ou au cas fortuit, elles vont bien
au-delà et englobent aussi les fautes du passager que l'on cherche
à protéger...
Paragraphe2 La faute du passager
Le transporteur est, en principe, responsable dès lors
qu'il n'exécute pas son obligation de sécurité même
s'il s'agit d'un accident, au moins pour les sinistres collectifs. C'est que
pour les accidents individuels, il n'y a pas de présomption de
responsabilité. Il faut dans ce cas que le passager demandeur devant les
juges fasse la preuve de l'existence d'une faute commise par le transporteur
ou, au moins, d'une faute ou d'une négligence dont celui ci doit
répondre. Il se pose alors le problème de l'appréciation
de la gravité de la faute (A) et de son incidence sur la
libération du transporteur (B).
A.- La gravité de la faute du passager
La gravité de la faute du passager se mesure d'abord
par ses effets, si l'accident est entièrement imputable à la
faute de la victime, le transporteur n'assume aucune responsabilité. Les
passagers doivent être prudents et attentifs aux risques. Par exemple, le
passager est tombé dans l'escalier par inattention87; ou la
passagère qui est tombée de sa couchette en voulant
descendre88 ; ou de la passagère qui s'est blessée en
glissant sur la pont du navire qui venait d'être lavé, alors que
des panneaux avaient été posés en divers endroits du
navire indiquant les heures de lavage des ponts et recommandant de faire
attention, les voyageurs pouvant, d'ailleurs accéder aux restaurants en
empruntant des passages internes89. Ensuite il faut noter que la
faute du passager n'est pas de nature à causer un naufrage ; du moins en
principe pour ce qui est de la faute civile et l'article 644 du COCC ajoute que
« Le voyageur est tenu de respecter les consignes de
sécurité et de discipline
87
Trib. Com Paris 6 Juin 1973, DMF 1973,
p.749.
88 Aix en Provence 5 Décembre 1996 : «
la cour doit constater que Mme ... a chuté lors de la descente de la
couchette alors qu'elle n'avait rencontré aucune difficulté pour
utiliser l'échelle lors de la montée et cela sans avoir de
notice. Il lui appartenait donc d'être aussi attentive avant de descendre
et de positionner correctement l'échelle, ce qu'elle n'a pas fait
».
89 Paris 28 Juin 1995, Jurisdata n° 022887.
imposées par le transporteur pour la bonne
exécution du contrat. » En fonction de la gravité de la
faute du passager, l'effet qui lui est attaché sera différent.
13- L'effet de la faute commise par le passager
sur la réparation de son dommage.
Selon l'étendue du rôle que la faute a
joué, son impact sur la responsabilité du transporteur ne sera
pas le même. On verra donc le transporteur tantôt
exonéré totalement et tantôt partiellement. Si la faute du
passager est la seule cause du dommage, il est tout à fait normal que le
transporteur soit totalement exonéré. C'est que le principe qui
veut que tout dommage causé à autrui soit réparé
par la personne par le chef duquel il est arrivé est tout à fait
compatible avec la situation de non condamnation dans laquelle se trouve le
transporteur, au cas où le passager serait seul à l'origine de
son préjudice. D'ailleurs, à propos de l'effet de la faute de la
victime sur la responsabilité du transporteur, l'article 130 du COCC est
très clair. Il dispose qu'elle peut la faire disparaître si elle
présente, pour l'auteur du dommage, les caractères d'un cas
fortuit ou d'une force majeure. Si par contre la faute du passager ne contribue
que dans une certaine mesure au dommage qu'il a subi et qu'une faute dont doit
répondre le transporteur, a été commise,
l'exonération ne sera que partielle. Et il appartiendra au juge de
déterminer le montant de la somme de nature à libérer le
transporteur. C'est ce qui justifie aussi que l'article 130 du COCC pose le
principe selon lequel la faute de la victime atténue la
responsabilité de l'auteur du dommage dans la mesure où elle a
concouru à le causer. Ce qui sou tend cette idée c'est que la
réparation du dommage causé ne doit se faire qu'à hauteur
du préjudice causé et elle doit être faite par l'auteur du
dommage. Or il est aberrant de penser que le passager puisse s'indemniser lui
même. C'est le même fondement qui justifiait le non cumul des
réparations qui prévaut en la matière en évitant ce
même effet en ce qui concerne l'indemnisation par le transporteur
au-delà du préjudice qu'il a causé.
Conclusion
C'est une vue de l'esprit que de croire qu'il suffit
d'élaborer un bon texte pour que tout le monde s'y conforme. Ainsi il
est clair que l'existence d'un dispositif pertinent ne suffit pas à
assurer au passager la protection qu'il mérite. C'est ainsi que le
législateur a mis en place un certain nombre de dispositions pour
assurer au passager un sentiment de confiance pendant son voyage. Une analyse
de l'essentiel du dispositif de sécurité en matière de
sécurité révèle une organisation de la
sécurité du passager à deux niveaux. D'une part on a un
grand corps de texte hiérarchisé mais ayant pour principal
objectif la préservation de la sécurité de la personne
transportée. D'autre part on a la mise en oeuvre de ces textes qui, si
elle est bien faite, débouche sur une bonne exécution de
l'obligation de sécurité qui pèse sur le transporteur au
bénéfice du passager. Par contre si cette obligation est mal, ou
pas du tout, exécutée, on assiste à l'émergence de
l'autre aspect de la protection du passager qui est une protection par la
répression. En gros il y a dans l'obligation de sécurité
un premier aspect qui porte sur une organisation matérielle des contours
de cette obligation. C'est dans ce premier aspect de cette obligation dont il
est question de montrer la pertinence des fondements, son étendue, ainsi
que les moyens de garantie mises en place pour assurer une protection totale au
passager. Dans cette protection il y a certes des aspects qui ne concernent que
le passager ayant contracté avec le transporteur, mais à
côté de ce privilège dont bénéficie le
voyageur ayant payé son billet, il y a une protection plus large et qui
est étendue même aux passagers clandestins. Cette protection, si
elle n'est pas effective a priori a certains aspects qui, comme des voies de
recours sont à la portée du passager pour lui permettre de
réclamer l'exécution de l'obligation de sécurité.
Et parallèlement à cette possibilité offerte au voyageur,
l'autorité maritime dispose de moyens de pression pour exiger des
transporteurs qu'ils exécutent convenablement leur obligation de
sécurité.
Notons cependant que dans les pays sous
développés, tels que le Sénégal, la mise en oeuvre
des dispositions sécuritaires, surtout en matière de transport
maritime de passager, est comme le talon d'Achille de tout un système
qui éprouve beaucoup de mal à l'effectuer convenablement. En
effet, rien qu'en cinq ans on a assisté à deux désastres
dans ce secteur :
Le premier est intervenu dans la nuit du 26 au 27 septembre
2002. Il s'agit du naufrage du ferry sénégalais le joola qui
assurait la liaison entre Dakar et Ziguinchor qui a coulé au large des
côtes gambiennes. Ce naufrage a l'originalité de présenter
à la fois toutes les insuffisances qu'on peut relever dans une
exploitation. En effet, du défaut dans la construction du navire
à la mauvaise coordination dans l'organisation des secours, en passant
par une gestion désastreuse de l'exploitation à la fois nautique
et commerciale, l'exploitation du joola s'est faite de bout en bout en marge du
minimum de sécurité nécessaire. En plus, le processus
d'indemnisation des victimes et familles de victimes est l'un des plus
chaotiques... Toutefois, l'analyse des causes du naufrage du joola, en plus
d'être révélatrice des faiblesses dans la gestion, par les
sénégalais, d'une entreprise commerciale d'intérêt
générale, nous permet de nous interroger sur la conscience
citoyenne des sénégalais eux-mêmes. En effet, le
résultat de l'introspection à laquelle le peuple a
été exhorté par le Président de la
République nous révèle un comportement inadéquat
stéréotypé dans la plupart des couches sociales, surtout
en matière de transport en commun. D'ailleurs, l'histoire confirme nos
propos. En effet il est d'actualité que des masses de
sénégalais tentent de migrer vers les pays européens.
C'est ce mouvement désespéré vers un « Eldorado
» rempli de risques et de désillusions qui constitue le second
désastre dans le secteur du transport par mer de passagers.
L'appréciation du grand rush d'émigrants
clandestins vers les côtes espagnoles par voie maritime se fait par
l'application à ce phénomène des règles juridiques
en vigueur dans ce domaine. Cette analyse nous pousse à décrier
une exploitation illégale d'une activité à des fins
illégales. En effet l'exploitation d'un navire à des fins
commerciales est soumise à des conditions préalables de
sécurité, qui permettent à tout exploitant en règle
de détenir les titres nécessaires à la conduite licite de
ses activités de transport. En outre ce transport, manifestement
illégal, a un objet totalement illicite car l'émigration elle
même est soumise à des préalables d'autorisation et de
contrôle de la part des pays d'accueil et même de départ.
Toutefois on ne saurait se limiter à une interprétation de ces
événements du seul point de vue du droit.
Que ce soit pour le problème de l'émigration
clandestine vers les côtes espagnoles ou pour le naufrage du joola, une
simple analyse basée sur une
interprétation stricte des règles juridiques ne
nous permet pas de comprendre les agissements des populations
transportées. En effet, si l'on considère, d'une part, le
rôle que jouait le ferry susnommé dans le désenclavement de
la partie sud du Sénégal ; et d'autre part, le désespoir
qui motive la grande vague d'émigrants du fait de la conjoncture
socio-économique des pays subsahariens tel le Sénégal ; on
note un semblant d' « état de nécessité » qui
rendent inadéquates les règles organisant le transport maritime
de passagers. Cette inadéquation provient en grande partie de la non
prise en compte de la réalité par le législateur dans
l'élaboration des lois. Si l'on se réfère à la
notion d'utilité sociale, on serait tenté d'excuser les
agissements dans ces deux catastrophes sociales. En tout cas, cela semble
coïncider avec le point de vue de BERGER Peter et LUCKMANN Thomas quand
ils disent que « la réalité sociale de l'incorrection a
été légitimée »90 . Toutefois, il
n'est pas question de ne se référer qu'à cette seule
interprétation sociologique. La meilleure façon d'éviter
un troisième désastre de ce type est de tendre vers une prise en
compte de ces réalités sociales dans l'élaboration
juridique des normes organisant les rapports sociaux.
Il faut noter, avant de terminer, que le décalage entre
la réalité sociale et la législation n'existe pas que dans
le domaine des transports. Il s'agit, en effet, de l'une des
caractéristiques principales de la réglementation, de
manière générale, au Sénégal. Ce qui nous
pousse à nous demander si ce ne serait pas nécessaire d'accentuer
les réformes de la législation sénégalaise dans
tous les domaines.
9° In La construction sociale de la
réalité, trad. Française, Paris,
Méridiens-Klincksieck, 1986 /1ère éd. 1966).
WEBOGRAPHIE
http://atlas-transmanche.certic.unicaem.fr
http://europa.eu.int/scadplus
/leg/fr
http://fr.wikipedia.org
http://lois.justice.gc.ca
http://www.afcan.org
http://www.canlii.org
http://www.chlayfa.com
http://www.cmdt.droit.u-3mrs.fr
http://www.dakargoree.com
http://www.ddbd.com/codes
http://www.droit.mjustice.dz
http://www.ecomaritime.gouv.sn
http://www.eur-export.com
http://www.forces.gc.ca
http://www.fsa.ulaval.ca
http://www.google.fr
http://www.gouv.sn/textes
http://www.imo.org/imo/french/premiere.htm
http://www.jurisque.com
http://www.kassoumay.com
http://www.lalnx.lu/document/etudes
http://www.legifrance.gouv.fr
http://www.lexalgeria.net
http://www.lexinter.net
http://www.playmendroit.free.fr
http://www.plusdetudes.com
http://www.portdakar.sn
http://www.smn-navigation.fr
http://www.tsb.gc.ca/fr
http://www.un.org/french/law
BIBLIOGRAPHIE
1- Ouvrages :
ü Droit de la Mer, Tome 1 : La mer et son droit, Les
espaces maritimes ; Laurent LUCCHINI/ Michel VOELCKEL ; Editions A. PEDONE ;
Paris, 1990.
ü Droit de la Mer, Tome 2, Volume 2 : Navigation et
Pêche ; Laurent LUCCHINI/ Michel VOELCKEL ; Editions A. PEDONE ; Paris,
1996.
ü Droit Maritime, René RODIERE ; Emmanuel du
PONTAVICE, 12ème édition, Dalloz 1997.
ü Droit Civil et Commercial Sénégalais,
Didier MARTIN, Les Nouvelles Editions Africaines, Dakar-Abidjan-Lomé,
1982
ü CORNU Gérard, Vocabulaire juridique, PUF
ü Le contrat de transport ; Martine REMOND-GOUILLOUD ;
Collection : Connaissance du Droit ; Ed. DALLOZ ; Paris, 1993.
ü Cours de droit des transports de Monsieur Pape Banga
GUISSE, chargé d'enseignement à l'UFR de sciences juridiques et
politique, 2005/2006.
2- Articles :
ü « la tragédie du joola ou le naufrage du
mal sénégalais » par le professeur Abdoullah CISSE,
agrégé de l'UFR de sciences juridiques et politique de
l'Université Gaston BERGER de Saint Louis, in Africajuris n°35 du
03 au 09 octobre 2002, Editorial.
r « Analyse de
l'évolution de la sécurité maritime » Par le
Professeur Jean-Pierre BEURIER, Directeur du Centre de Droit Maritime et
Océanique, Université de Nantes.
r « Endormissement à la
barre » : Traduction libre par J-M BILLOT de " Lloyd's List Asia, Automne
2004 "ex -- " Mededelingen voor de kapitein "(Revue du
T « L'Architecture Navale : Réalisations
actuelles et tendances dans : La construction de navires, la réalisation
de ports, l'urbanisme en mer. » Par : BO LIU, François PLATEL,
Jean-baptiste CURIEN, Julie LANGLAIS, Nicolas TAILLEFER, YI ZHAN.
T « La chronique du clandestin
(05 mars 1999) : y a-t-il du nouveau du côté des clandestins ?
» Par : Cdt J. LOISEAU
T « la
météorologie au service des usagers maritimes » par P. de la
COCHETIERE ; in Nouveautés Techniques Maritimes 1975 ;
édité par le Journal de la Marine Marchande.
T « Propositions pratiques aux
Capitaines et aux Législateurs pour un transport maritime plus sûr
» Traduction par le Cdt J.P. DALBY du texte présenté en
anglais au colloque "SAFER SEAS à Brest par:Cdt Charles CLADEN, Les
Abeilles Internationales, France ; Dr Shoichi HARA, National Maritime
Institute, Japon ; Dr Michel GIRIN, CEDRE, France.
T « Sécurité en mer
: tous acteurs, tous coupables ! »
T « synthèse des travaux de la
journée de réflexion, sur la gestion de la sécurité
dans le domaine portuaire, organisée au salon d'honneur du môle I
le 08 mars 2005 », par Monsieur Alassane SY ; in Sunuport n°68 mars -
avril 2005.
T « victimes du joola : péripéties
et équations d'une indemnisation » par le professeur Abdoullah
CISSE ; in Africajuris n°65 du 08 au 21 mai 2003.
T L'épineuse question de
l'assurance du navire le joola ; par le professeur Ibrahima Khalil DIALLO in
Africajuris n°70 du 03 au 09 juillet 2003 ; page 10.
T Négocier dans le respect
des principes ; par le professeur Ibrahima Khalil DIALLO in Africajuris
n°70 du 03 au 09 juillet 2003 ; Guest Editorial.
T Quelle indemnisation pour les victimes par le
professeur Ibrahima Khalil DIALLO chargé des Cours de Droit Maritime, de
droit des transports et de droit de commerce international à la
faculté des Sciences Juridiques et Politique de l'UCAD, in Africajuris
n°70 du 03 au 09 juillet 2003, pages 06 à 10.
T Retour sur les modalités
d'identification des bénéficiaires « le mort saisit le vif,
son hoir le plus proche » par Mbissane NGOM, Assistant à l'UFR
SJP
de l'Université Gaston Berger de Saint Louis ; in
Africajuris n°70 du 03 au 09 juillet 2003, pages 4 & 5.
3- Législation et autres textes ayant une valeur
réglementaire
T Rapport de séminaire sur la sûreté
maritime organisée par l'OMI en 2002 au Sénégal.
T Rapport d'enquête technique
établi suite au naufrage du MS/ JOOLA.
T Décret n° 68-1274 du 11 décembre
1968 portant organisation du service de recherche et de sauvetage.
T COCC, Code Pénal, Acte
Uniforme portant Droit Commercial Général, etc. T
Convention n° 174 du 17 octobre 1973 confiant la gestion de la Liaison
Maritime Dakar Gorée à la SN/PAD.
T Convention n° 976 du 30 juin
1977 pour l'exploitation du Service de la Sécurité Maritime.
T Loi 87-28 du 18 août 1987
autorisant la création de la Société Nationale du Port
Autonome de Dakar (SN/PAD)
T Loi 2002-22 du 16 Août 2002 portant Code de la
Marine Marchande et abrogeant la loi 62-32 du 22 mars 1962.
T Décret n° 2002-933 du
03 octobre 2002 relatif à la délivrance des titres de formation
professionnelle maritime et aux conditions d'exercice des fonctions à
bord des navires de commerce, de pêche ainsi que des navires de
plaisance.
Table des Matières :
Page
Introduction...............................................................................................................3
Première partie De l'obligation de
sécurité.................................................9
Chapitre premier : Les fondements de l'obligation de
sécurité . .............................10
Section1: Le fondement contractuel de l'obligation de
sécurité..............................10 Paragraphe1: Le
titre voyage, support du contrat de transport..............................11
IL. Les caractéristiques du contrat de transport de
personnes...............................................................................................................11
B. Le passager, principal bénéficiaire de
l'obligation contractuelle de
sécurité.................................................................................................................13
C. La remise en cause de l'importance du titre de transport dans
les Etats en voiede
développement...........................................................................................15
Paragraphe2: La stipulation pour autrui dans le contrat de transport
maritime de
personnes...............................................................................................................16
IL. Les fondements de la stipulation pour autrui dans le
contrat de transport maritimede
personnes...........................................................................................16
B. Le bénéficiaire de la stipulation pour autrui
dans le contrat
de transport...............................................................................................................17
Section 2 : Les fondements extracontractuels de l'obligation de
sécurité..................................................................................................................19
Paragraphe1: Les Fondements Supranationaux de l'obligation de
Sécurité...................................................................................................................19
IL. Le dispositif international en matière de
sécurité
des passagers...............................................................................................................20
1 . L'émergence d'un corps de
règles au plan international..................................20
2 . La diversification des
règles internationales de protection du
passager.................................................................................................................22
B. L'assistance des organismes internationaux, acteurs en
matière de sécurité
despassagers.........................................................................................................22
1. La participation des acteurs internationaux dans la mise en
oeuvre des règles
édictées.................................................................................................................23
2. La participation des acteurs internationaux dans la
formation des acteurs nationaux pour la bonne mise en oeuvre des règles
de sécurité : la mise en place d'institutions pour la formation
de spécialistes de la
mer....................................................................24
Paragraphe2: Les Fondements nationaux de l'obligation
de
sécurité.................................................................................................................25
IL. Les fondements légaux de l'obligation de
sécurité..................................................................................................................25
B. Les fondements règlementaires de l'obligation de
sécurité....................................................................................................................27
Chapitre 2 : L'étendue de l'obligation de
sécurité...................................................29
Section1 Les mécanismes de protection du passager ...............
29 Paragraphe 1 : La protection de la personne à bord du navire et
dans
les zones d'embarquement et de
débarquement.....................................................30
IL. La confusion entre l'obligation de transporter le passager
et l'obligation
desécurité.............................................................................................................30
B. L'extension du champ de l'obligation de
sécurité.................................................................................................................31
Paragraphe 2 : L'existence de plan et de dispositif préventifs
d'intervention en cas de réalisation des
risques.................................................................................32
IL. L'identification des différentes menaces humaines
à la sécurité du
passager.................................................................................................................33
B. L'élaboration de plans et les mécanismes
tendant à l'amélioration de la priseen charge de la
sécurité................................................................................36
Section2 : Les garanties de la sécurité du
passager..............................................39 Paragraphe 1
L'obligation de conformité aux normes de
sécurité...................................................................................................................39
IL. la conformité aux normes de sécurité
depuis la construction du navire et pendant toute la durée de
l'exploitation.................................................................39
13. Le contrôle de la conformité
des navires aux normes de
sécurité.................................................................................................................41
Paragraphe 2 L'obligation de souscription d'assurance pour les
passagers...............................................................................................................43
IL. Le débiteur de l'obligation de souscription
d'assurance...............................43 13. Les
caractères de l'assurance souscrite par
l'armateur...........................44 Seconde Partie Du manquement
à l'obligation de
sécurité..................................................................................................................46
Chapitre Premier: La place de la faute dans l'engagement de la
responsabilité........................................................................................................47
Section 1 : L'engagement de la responsabilité du
transporteur..............................47 Paragraphe 1 : La qualification de
faute .............................. ............................47
IL- La faute
nautique....................................................................................48
13- La faute commerciale
.............................................................................49
Paragraphe 2 : L'indifférence de la distinction entre le
transporteur et ses
préposés.................................................................................................................50
IL- La responsabilité du transporteur pour ses fautes et pour celles de
ses
préposés.................................................................................................................50
13- Les fondements de cette responsabilité : l'exploitation au nom et
pour le comptedu
transporteur.........................................................................................51
Section 2: L'engagement de la responsabilité de personnes autres que
le
transporteur..........................................................................................................52
Paragraphe1 La responsabilité de personnes tierces au contrat de
transport...............................................................................................................52
IL- Le constructeur et le réparateur responsables des dommages
causés par levice caché du navire.
.........................................................................................53
13- La distinction entre le propriétaire, l'armateur et
l'affréteur du
navire.....................................................................................................................54
Paragraphe2 La responsabilité de la personne assurant le commandement
du
navire.....................................................................................................................55
IL- Les conditions d'engagement de la responsabilité personnelle du
capitaine................................................................................................................56
13- La problématique de la protection du capitaine face à
l'engagement abusifde sa
responsabilité.....................................................................................58
Chapitre2 La sanction de l'engagement de la
responsabilitéMMMMMMMMMMM.61 Section1 Les modalités de la
sanction de la fauteMMMMMMMMMMMMMMMM...61 Paragraphe1 La nature de la sanction
MMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM...61 1L-Les sanctions judiciaires (civiles ou
pénales)MMMMMMMMMMMMMMMMM.62 13- Les sanctions extrajudiciaires
(sanctions administratives ou conséquences des solutions
amiables)MMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM.... 62
Paragraphe2 Les quanta de la sanction 64
1L- La réparation du
préjudiceMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM...64
13- L'interdiction relative à l'exploitation du
navireMMMMMMMMMMMMMM..65 Section2 Les causes d'exonération de la
responsabilité du transporteurMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM.67
Paragraphe1 La force majeureMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM..67 1L-
Caractéristiques de la force majeureMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM..68 13- Les
limites au champ de l'exonération par la force
majeureMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM......MMM69 Paragraphe2 La faute du
passager 70
1L- La gravité de la faute du passager 70
13- L'effet de la faute commise par le passager sur la
réparation de son
dommage 71
ConclusionMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM 72
WébographieMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM 75
Bibliographie 76
Table des matièresMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM 79
|