0.4.
CADRE CONCEPTUEL ET THÉORIQUE
La présente étude s'inscrit dans le registre du
grand débat ouvert sur le concept de « tourisme et
développement » ou encore de la relation positive et
productive entre le tourisme et le développement dans les pays du
Tiers-Monde. En effet, traiter des performances du tourisme revient à en
identifier les forces et les faiblesses en vue d'y apporter quelques
suggestions. Cela fait, l'activité pourra se développer à
travers l'augmentation des visiteurs avec son cortège d'effets
bénéfiques sur les pays et les peuples.
Le tourisme recouvre diverses significations. D'abord au sens
étymologique, il vient de l'anglais tourism lui-même issu
du français `tour'. Il s'agissait à l'origine (au XIXè)
siècle pour l'aristocratie anglaise d'aller `faire un tour',
généralement sur le continent.
Quant au Dictionnaire Petit Robert, il le définit
comme le fait de voyager, de parcourir pour son plaisir un lieu autre que celui
où l'on vit habituellement (même s'il s'agit d'un petit
déplacement ou si le but principal est autre).
Pour l'OMT, le tourisme est le fait de se rendre dans un
autre pays que celui de son lieu de résidence pour une durée d'au
moins 24 heures et pour toute raison que celle d'y exercer une autre
activité rémunérée.
Le Conseil Supérieur du Tourisme français
considère quant à lui que le tourisme regroupe l'ensemble des
activités de production et de consommation auxquelles donnent lieu des
déplacements assortis d'une nuit au moins passée hors du domicile
habituel, le motif du voyage étant l'agrément, les affaires, la
santé (thermalisme et thalassothérapie) ou la participation
à une réunion professionnelle, sportive ou religieuse, etc. (
Baud et al, 1998).
George (1970) définit le tourisme comme une
«activité liée aux loisirs qui appelle des
déplacements saisonniers de population essentiellement urbaine vers les
régions favorisées par leurs aptitudes naturelles à
répondre à l'attente des touristes, et faisant l'objet des
spéculations diverses quant à leur équipement
adéquat''.
Il apparaît que la définition du tourisme fait
ressortir quatre agrégats : le déplacement, le lieu, la
durée et le motif. En conséquence, nous retenons que le tourisme
est l'ensemble des activités liées au déplacement des
personnes (résidentes ou non) pour un séjour de durée
minimale de 24 heures et 6 mois au plus dans un lieu donné pour un motif
d'agrément, personnel ou professionnel.
0.5.
ARRIERE-PLAN SCIENTIFIQUE ET JUSTIFICATIONS
Le tourisme tel que pratiqué aujourd'hui est un fait
plus ou moins récent. En effet, c'est depuis l'après-guerre
(Deuxième Guerre Mondiale) que cette activité est en pleine
expansion. Au XIXè siècle, elle était la chasse
gardée de quelques grandes familles aristocratiques anglaises dans un
premier temps puis s'est étendue par la suite aux françaises
avant de se généraliser à la bourgeoisie du vieux
continent. Il s'agissait ici essentiellement d'un tourisme balnéaire
complété plus tard par un tourisme de montagne. Dans le
même temps, quelques explorateurs traversaient l'Afrique sans que
l'espace touristique ne s'en agrandisse pour autant. Les visiteurs se rendaient
sur les sites de prédilection tels que la Côte d'Azur, la
Côte Normande... Bref c'est la côte nord
méditerranéenne qui accueillait les touristes de ce
siècle-là.
La première moitié du XXè siècle
ne connaît pas un développement spécial du tourisme.
Toutefois, l'amélioration des conditions de transport, les congés
payés offrent à ceux qui le veulent un accès à la
pratique de cette activité. Mais on retient essentiellement que la
ségrégation sociale marque profondément la qualité
du tourisme effectué. Les sites les plus populeux sont les moins chers
et rigoureusement distincts des stations huppées, seules l'apanage des
touristes cossus.
C'est dans les années 60 que se développe le
tourisme pour tous dans les villes européennes, ce d'autant que le
besoin de re- création se fait de plus en plus présent. En effet,
les populations occupées pour la plupart dans le secteur de l'industrie
n'hésitent pas à sortir du carcan quotidien, de la
répétition quasi-mécanique des gestes que leur travail
exige. Elles ont comme atout la croissance des Trente Glorieuses avec pour
effet l'augmentation de leur pouvoir d'achat, l'allongement des congés
payés (Temps de vacances importants), les infrastructures touristiques
nombreuses et performantes et les politiques étatiques favorables
à l'évasion bon marché. C'est l'ère du tourisme de
dépaysement, de re-constitution après un travail absorbant et
relativement ennuyeux. Le tourisme est donc une activité de loisirs.
D'ailleurs il est étroitement rattaché aux `Four S' (Sea, Sun,
Sand & Sex), toutes choses qui marquent une effective rupture avec le cadre
de vie habituel et procure l'air bienfaisant de la mer, le soleil requinquant
et le plaisir d'entrer en contact direct avec le sable des plages.
De plus en plus aujourd'hui, le tourisme s'inscrit dans le
registre de l'hédonisme, de la jouissance tous azimuts de tous les
plaisirs que la vie peut offrir. Ainsi, le tourisme occupe une place de choix
dans les congrès et autres réunions internationales pour sa
grande capacité à re-créer et à
re-équilibrer l'homme.
On note également un repli des touristes vers la
nature. Ceux-ci aspirent davantage aux randonnées en montagne, à
la visite des parcs, des zones rurales...C'est du tourisme naturel ou de
l'écotourisme.
Mais le débat sur la contribution du tourisme au
développement des peuples et des pays en développement reste
ouvert, car les opinions qui ont fortement divergé tendent aujourd'hui
à s'harmoniser.
Au sortir de la Deuxième Guerre Mondiale, autour des
années 50, le tourisme est considéré comme une baguette
magique qu'il suffit d'agiter pour résoudre tous les problèmes
(Schülter, 1991). On a vite fait de céder à la tentation de
croire que le tourisme peut rapidement permettre le recouvrement des pertes de
l'économie. C'est l'ère pendant laquelle les chercheurs encensent
le tourisme et son rôle moteur dans les pays qui n'ont de ressources de
développement que leur environnement et leurs peuples. D'ailleurs, au
plan économique, le tourisme international contribue directement au
compte courant de la balance des paiements grâce aux rentrées de
devises étrangères dans les pays de destination. De plus, les
hommes d'affaires, les gouvernements investissent une partie de l'argent qu'ils
reçoivent dans l'économie des pays hôtes, ce qui
accroît le volume de l'économie. Quant au tourisme domestique, il
permet de redistribuer ces devises dans les frontières du même
pays (Archer, 1977). Au plan politique, le tourisme est une force majeure de
paix et de concorde entre les peuples en même temps qu'il renforce
l'unité politique d'un pays (WTO, 80, 82). Les effets néfastes
d'une telle promotion ne tardent pas à se faire ressentir. C'est alors
que s'ouvre la seconde ère.
L'évolution historique de la réflexion sur
l'apport du tourisme au développement a tendu ensuite à embrasser
l'autre extrême. Plusieurs chercheurs tournent le dos à la
précédente conception en remettant en cause la participation du
tourisme au développement et estiment au contraire qu'il contribue
à ruiner les pays en développement aux plans économique,
politique, socioculturel et environnemental.
C'est ainsi qu'au plan économique, le tourisme est
présenté comme une nouvelle forme de domination
économique. En effet, l'origine géographique des prestations des
biens consommés et des groupes socio-professionnels qui les fournissent
permet de saisir la pertinence de ce point de vue. De plus cette industrie
nationale a pratiquement tous ses clients à l'extérieur pour ce
qui est du tourisme international (Dieng et al, 1980). Ceci a pour
effet l'extraversion de ce secteur d'activité. Au niveau local, le prix
des terres flambe (Archer et al, 1994) et même très
souvent celui des biens de consommation courante.
Au plan politique, le tourisme peut être compris comme
une nouvelle traite, du néocolonialisme en somme.
Au plan socioculturel, il représente un nouveau mode
d'infériorisation culturelle (Dieng et al, 1980).
L'appréciation que font les visiteurs d'une société, de sa
culture peut avoir une influence durable sur celle-ci. Cette dernière
peut se déformer et progresser vers un certain modèle culturel
recherché. Des fois dans le domaine des arts, la pratique du tourisme
est une invite au pillage. Le touriste est aussi attiré par ce qui est
lui paraît insolite, curieux. Cela l'amène souvent à bien
des égards à profaner ce qui est «sacré» pour le
peuple hôte. Aussi, la prostitution, la consommation des drogues, le
banditisme, l'alcoolisme, la criminalité...sont quelques-uns des
fléaux que le tourisme engendre - quoique pas de façon exclusive
- dans une société.
Depuis les années de crise économique, le
discours semble plus conciliant. Il tend à rapprocher les deux
époques en maximisant les avantages tout en minimisant les travers de la
pratique du tourisme.
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