CONCLUSION
Les réformes introduites
dans le système public de santé en Afrique, notamment
l'Initiative de Bamako, ont contribué à transférer la part
la plus importante du coût de la santé sur les ménages qui
deviennent ainsi le premier acteur du financement du secteur de la
santé. Si globalement ces réformes ont permis de restaurer une
certaine confiance des usagers dans les services publics de santé par la
production relative de soins de qualité surtout à la base,
l'instauration du système de recouvrement des coûts qui en
constitue un élément central, a entraîné une
désaffection des structures sanitaires par les populations
particulièrement celles à faibles revenus.
Cette situation est encore
très aggravée en RDC suite à la crise multiforme
traversée par le pays qui a contribué à la
dégradation de la situation socio - économique des populations
tel que présenté au premier chapitre de ce travail.
Dans le cadre de réformes
en cours dans le secteur de la santé en RDC, il s'avère important
d'envisager des mesures qui tiennent compte des besoins réels de la
population pour espérer améliorer l'utilisation des services de
santé par ces derniers. Pour comprendre l'importance et la nature des
reformes évoquées, nous avons, dans le deuxième chapitre
de ce travail présenté les généralités sur
l'organisation du secteur sanitaire de la RDC. Ce secteur est
caractérisé par une diminution prononcée de tous les
indicateurs de la santé et plus particulièrement par une faible
utilisation des services de santé.
D'où l'objectif de cette
recherche qui était d'identifier « les déterminants
socio- économiques de l'utilisation des services de santé par les
ménages de la zone de santé de Kadutu ».
La présente étude
est basée sur les données de l'Enquête ménage
réalisée sur un échantillon probabiliste
représentatif de 400 ménages de cette zone de santé.
Avant d'estimer les
déterminants de l'utilisation des services de santé, il
était impérieux de comprendre les conditions dans lesquelles
vivent les ménages de la zone de santé de Kadutu. Raison pour
laquelle dans le troisième chapitre nous avons décrit les
caractéristiques socio - économiques de ces ménages ainsi
que leur comportement face à la maladie. Il ressort de ceci que les
ménages de la zone de santé de Kadutu vivent dans une situation
de pauvreté extrême. Les caractéristiques socio
économiques relevées ne leur prédisposent pas à une
bonne utilisation des services de santé et dans les conditions actuelles
il serait difficile, si pas impossible d'accroître le taux d'utilisation
des services de santé dans cette zone de santé. Les
dépenses de santé engagées par les ménages prennent
une part importante dans le revenu des ménages. Ceci ne fait que
contribuer à maintenir le cercle vicieux de la pauvreté dans la
mesure où les conditions précaires dans lesquelles les gens
vivent leur prédisposent déjà à la maladie,
malheureusement sans détenir de moyens nécessaires pour y faire
face.
Les dépenses à engager pour la santé
constituent donc pour l'essentiel de cette population la principale
barrière à l'utilisation des services de santé avec comme
conséquence, la dégradation de l'état de santé qui
constitue un facteur de sous développement.
Cette situation de pauvreté
laisse peu de choix aux populations de la zone quant à l'utilisation des
services de santé. Il sied donc d'identifier les facteurs socio -
économiques liés à cette population sur lesquelles on peut
agir pour amener les populations à faible revenu d'utiliser les services
de santé. Notre étude relève les facteurs
suivants comme étant plus significatifs pour expliquer
l'utilisation des services de santé dans la zone de santé de
Kadutu : l'état de la maladie (selon que le malade considère son
état comme grave ou pas), l'appartenance de la structure (selon
qu'elle est étatique ou privée), l'âge du malade ainsi que
le revenu du ménage.
Il s'agit donc là des
facteurs sur lesquels une intervention s'avère plus impérieuse si
on veut améliorer l'utilisation des services de santé.
Le coût des soins, la taille
du ménage ainsi que toutes les autres variables liées au chef de
ménage ne sont pas suffisamment significatifs pour expliquer
l'utilisation des services de santé dans la zone de santé de
Kadutu.
La probabilité
d'accès aux soins de santé obtenue est assez significative
(97,48%) et est fortement influencée par le niveau de revenu des
ménage et l'âge de malade dans l'hypothèse d'une maladie
grave et d'un recours à une structure sanitaire étatique.
Le coût des soins ne s'est pas avéré
significatif dans le cadre de cette étude. Il n'est donc pas
déterminant pour expliquer l'utilisation des services de
santé.
SUGGESTIONS
Les résultats de cette
étude, nous amènent à suggérer aux
différents décideurs et acteurs sanitaires à
différents niveaux ce qui suit:
Au niveau central
- Augmenter la part du budget
accordée au secteur santé et le repartir équitablement
dans les provinces du pays jusqu'à atteindre toutes les zones de
santé. Une subvention plus accrue des établissements des soins
par l'Etat et ses partenaires peut permettre de réduire les coûts
des soins et ainsi minimiser les risques d'exclusion financières aux
dépend des plus pauvres. Ceci devra être accompagné d'une
bonne gouvernance et d'un contrôle permettant de s'assurer d'une
utilisation rationnelle des fonds alloués à la santé.
- Accroître le potentiel
financier des ménages en payant régulièrement aux
fonctionnaires un salaire plus ou moins décent et en encourageant
la mise en place des activités génératrices de
revenu : micro - crédits, petit commerce, agriculture,
coopératives.
Au niveau intermédiaire et
périphérique
- Accorder plus d'importance aux
facteurs qui améliorent la qualité des services dans les
structures de santé. Etant donné que cette qualité
constitue le principal motif évoqué pour le choix d'une structure
de santé par les ménages, une attention particulière devra
être porté sur les meilleurs soins, la compétence du
personnel, la notoriété, les équipements et l'accueil des
malades. Le personnel de santé doit en plus être motivé.
- Réduire les
dépenses de santé à charge des patients et faciliter
l'instauration d'une tarification transparente pouvant stimuler le recours aux
soins par les ménages les plus défavorisés. La
participation financière des patients devra être conçue en
tenant compte de conditions socio - économiques de ménages de
manière à ne pas créer une barrière à
l'utilisation des services de santé.
- Porter Une attention
particulière aux plus vulnérables en renforçant pour eux
des mesures de solidarité et d'exonération. Notons que plus de
40% de la population se déclarent ici comme étant pauvre.
Toutefois il faudra beaucoup sensibiliser les chefs de ménage sans
occupation pour les amener à réaliser certaines activités
qui peuvent rapporter au lieu de passer leurs journées à ne rien
faire.
- Stimuler la demande des services
de santé en informant et sensibilisant la population sur les services
offerts par les structures de santé. Faire participer les CODESA pour
faire comprendre aux ménages la nécessité de recourir
à un service de santé dès que la maladie se
présente et ne pas seulement attendre que l'état de santé
s'aggrave. De même pour comprendre l'importance de recourir aux soins
quel que soit l'âge du malade.
- Intégrer au
système des SSP les structures de santé privées viables
pour améliorer l'accès physique aux soins.
- Dans la mesure du possible,
compléter cette étude en intégrant d'autres
éléments qui n'ont pas été pris en compte ici.
La mise en place de ces
recommandations exige une collaboration intersectorielle entre les
différents acteurs de la vie nationale. Etant dans un objectif de
réduction de la pauvreté et de l'atteinte des objectifs du
millénaire, une vision commune sur l'application de celles - ci
permettra d'améliorer tant soit peu l'état de santé de nos
populations et ainsi aller vers le développement économique
auquel on aspire en RDC.
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