L'administration publique locale face à la sécurité des personnes et de leurs biens dans la province du Sud Kivu( Télécharger le fichier original )par Jean-Luc Malango Kitungano Université de Kisangani - Graduat en Sciences Politiques et Administratives 2002 |
III. 3.2. Les immigrés rwandais dits « Banyamulenge »III.3.2.1 Aperçu historiqueL'origine de Banyamulenge est bien connue : le Rwanda. Le géographe G. Weis cité par Willame43(*)établit la présence des Rwandais qu'il appelle Ruanda dans l'Itombwe à partir de 1881 : « Ils ne sont guère plus de quelques centaines et l'administration coloniale n'a jamais réussi à s'imposer à eux (...) l'isolement particulier du haut versant et le plateau explique-t-il le maintien des traditions politiques chez les Ruanda (...) cette hiérarchie mieux cristallisée travaille à l'encontre de l'Administration qui se plaint encore en 1954 de ne pouvoir gouverner les Ruanda »44(*) A ce peuplement ancien viendra s'ajouter une masse beaucoup plus importante constituée par des réfugiés tutsi qui fuyaient les différents pogroms de 1959-1962 et de 1973-1974 qui avaient eu lieu au Rwanda. Il semble que l'émigration des tutsi Rwandais suivait le schéma suivant : ils s'installaient d'abord à Bwegera ou à Mulenge (dans le territoire d'Uvira) et se dispersaient par la suite sur les hauts plateaux d'Itombwe et de Fizi. Les immigrations tutsies au Sud-Kivu ne peuvent être saisies qu'en les replaçant dans le contexte global des migrations en Afrique centrale. L'historien congolais Birakaheka estime que ces pasteurs ne sont pas arrivés par une seule vague migratoire. Mais par petits groupes, largement échelonnés dans le temps. Ils arrivèrent par infiltration et ce mouvement a continué dans le territoire de l'EIC et fut renforcé par le colonisateur qui, à la recherche de la main d'oeuvre, a organisé la mission d'immigration des Banyarwanda dès 1937 vers le Congo45(*). Plusieurs chercheurs corroborent la thèse de Birakaheka. La plupart des immigrés tutsis au Sud-Kivu seraient arrivés entre 1959 et 1974 fuyant les différentes répressions hutues au Rwanda. Hormis ceux qui sont arrivés en 1881(une centaine citée par Weis) ; il faut reconnaître qu'il existe au sein de ce peuple, une partie dont la nationalité ne devrait pas aujourd'hui être remise en question, si le critère historique était le seul critère déterminant. Il semble qu'actuellement, certains jeunes chercheurs de ce groupe, issus notamment de la génération des réfugiés de 1959, 1962, 1973 et 1974 entretiennent des amalgames et des ombres historiques sur leur origine et surtout sur la date de leur arrivée au Congo pour des fins politiques de réclamation d'une nationalité double et collective. C'est peut-être sous l'influence du « social intériorisé » que certains jeunes chercheurs « Banyamulenge » vont jusqu'à méconnaître les réalités historiques en faisant plus un requisitoire de la nationalité que de la recherche scientifique. Ainsi Willy Mutabazi Mfashingabo46(*) et Félix Iragaba47(*)tentent de contredire les analyses et résultats des chercheurs précités. Le premier, Willy Mutabazi, emet des doutes sur l'origine essentiellement rwandaise des «Banyamulenge ». Il soutient (peut-être par ignorance) que les Bafulero (clan batumba) seraient des Banyamulenge. Le second, Félix Iragaba grossit à volonté le nombre des banyamulenge à 400.000. Il englobe ainsi, de mauvaise foi, tous les Tutsi du Sud-Kivu et du katanga. Il groupe en cinq zones, les territoires occupés par les Banyamulenge (Fizi, Uvira et Mwenga au Sud Kivu ; Kalemie et Moba au katanga). En fait, pour les trois premiers territoires, il existe des poches des immigrés tutsi dits Banyamulenge mais pour ceux du Katanga, il s'agit d'un groupe Tutsi certes, mais distinct du précédent et connu sous le nom de « Benavyura ». Le rapport annuel 2000 du territoire de Minembwe contredit également l'effectif de 400.000. L'effectif de population occupant ce territoire était estimé à 50.00048(*). Il faut noter aussi que l'administration locale ne s'est jamais investie pour le recensement systématique de ceux-ci. Tous les rapports annuels du territoire de Fizi précités demeurent muets quant à l'effectif des immigrés Tutsi dits « Banyamulenge ». Il semble que cet état de chose ait favorisé particulièrement à Fizi, l'infiltration récente. Survolons quelques aspects de l'organisation sociale et culturelle de ce peuple. * 43 Willame , J-C., « Banyarwanda et Banyamulenge, violences ethniques et gestion de l'identitaire au Kivu » in Cahiers Africains, n°25, Bruxelles, Paris, L'Harmattan/ CEDAF. p.79. * 44 Georges Weis, Le pays d'Uvira, étude de géographie régionale sur la bordure du lac Tanganyika, Bruxelles, Académie Royale des sciences coloniales, 1959, p.250. * 45 Birakaheka Njinga, Histoire politique du Congo, Notes de cours, Deuxième année de graduat, FSSAP, CUB-Bukavu, 1999-2000, Inédit. * 46 Mfashingabo, M., Essai d'analyse du problème de la nationalité des banyamulenge dans la province du Sud-Kivu, FSSAP, TFE, CUB/ Bukavu, 1998-1999, Inédit. * 47 Felix Iragaba, La nationalité au Congo, ses problèmes et conséquences, cas de banyamulenge, FSSAP, TFE, CUB-Bukavu, 198-1999 , Inédit. * 48 Territoire de Minembwe, Rapport Annuel 2000, 10 Février 2001. |
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