L'administration publique locale face à la sécurité des personnes et de leurs biens dans la province du Sud Kivu( Télécharger le fichier original )par Jean-Luc Malango Kitungano Université de Kisangani - Graduat en Sciences Politiques et Administratives 2002 |
INTRODUCTION GENERALELa présente étude s'intitule : « L'administration publique locale face à la sécurité des personnes et de leurs biens dans la province du Sud-Kivu (en R.D.Congo) : Cas du territoire de Fizi ». La sécurité des personnes et des biens est parmi les missions fondamentales de l'administration publique de tous les Etats. L'administration publique congolaise se veut, du moins théoriquement, un organe de conception, de commandement et de développement socio-économique en plus de l'exécution des tâches quotidiennes d'intérêt général. Etant plus proche des administrés, elle apparaît comme un service qui est appelé à tous les échelons de la société, à prendre des décisions concernant la sécurité des personnes et de leurs biens. La pratique de la décentralisation prônée par l'Ordonnance loi n°82/006 du 25 février 1982 ne viserait en somme, qu'à donner plus de marges d'actions à l'administration locale mais aussi, à faciliter le rapprochement entre l'administration et les administrés. Pourtant, nous constatons que sur toute l'étendue de la République Démocratique du Congo en général et au Sud Kivu en particulier, l'exécution des lois, des directives et des règlements en matière de sécurité des personnes et de leurs biens se bute à beaucoup de difficultés. I. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESESLa problématique de la sécurité au Sud-Kivu n'est pas neuve : tout au long de l'histoire post-coloniale, la province du Sud-Kivu a été caractérisée par l'insécurité des personnes et de leurs biens, surtout en milieu rural. La plupart des rébellions et résistances armées y prennent racines ou s'y cristallisent. C'est le cas de la rébellion « Muleliste » de 1964, de la rébellion de l'AFDL de 1996 et plus récemment de l'agression du Rwanda et de l'Ouganda d'août 1998 qui s'est muée en rébellion du RCD. Le déclenchement de la guerre en août 1998 par l'armée rwandaise et ougandaise contre le pouvoir de Kinshasa a été à la base de la recrudescence de l'insécurité des personnes et de leurs biens. Au cours de l'année 1998, 1999 et 2000, l'insécurité a prévalu d'une manière particulière dans la province du Sud-Kivu, aussi bien en milieu rural qu'en milieu urbain. En territoire de Fizi, plusieurs milices dont les milices « banyamulenge », les milices « maï-maï » et les éléments de la rébellion burundaise du CNDD/FDD y ont exercé une activité intense. Les armées étrangères - rwandaises et burundaises, d'une part - et l'armée du RCD-Goma , d'autre part, y menèrent des opérations militaires sanglantes. Comme conséquence l'insécurité des personnes et de leurs biens gagna tout le territoire de Fizi: viols des femmes, pillages, destructions des maisons et des infrastructures scolaires ... Les massacres des populations furent l'oeuvre des toutes les forces militaires qui opérèrent dans ce territoire. Parmi les massacres des populations civiles, citons le plus célèbre, celui de MAKOBOLA (1999). L'insécurité croissante a occasionné le déplacement des populations civiles du territoire de Fizi vers d'autres territoires partiellement sécurisés (Uvira, Bukavu...) ou vers des pays étrangers dont la Tanzanie principalement. Pourquoi y a-t-il persistance de l'insécurité dans le territoire de Fizi alors qu'il y a une administration locale dont la mission est de sécuriser les personnes et leurs biens ? Il nous semble que cette persistance de l'insécurité en territoire de Fizi est liée à plusieurs facteurs dont : 1. Les facteurs d'ordre interne caractérisés par la dilution de l'espace administratif. Elle s'explique, d'une part, par le problème d'organisation des pouvoirs au niveau local, à la question de la représentation et de la participation de la population à la gestion de leurs entités, à la politisation1(*) de l'administration locale laquelle accentue son inadaptation au milieu social, suscite des résistances et des contestations influant sur la sécurité des personnes et de leurs biens, d'autre part. Tous les éléments précités entraînent la dispersion des moyens nécessaires à la coordination des actions de maintien de l'ordre public. 2. Les facteurs d'ordre externes caractérisés par la présence des armées étrangères et des milices de tous bords dont celles rwandaises et burundaises. * 1 La politisation est ici négative et doit s'entendre selon Otemikongo Mandefu comme « l'inféodation de l'administration à la politique (...) au lieu d'être pensée comme subordonnée au politique, l'administration est non seulement une de ses composantes mais encore son principe fondateur, don point nodal, l'instrument d'impulsion et de régulation indispensable à son équilibre et à sa survie ». Otemikongo Mandefu, « La problématique de la politisation de l'administration publique zaïroise », in Zaïre Afrique, n°253-254, mars -avril 1991, p.174. |
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