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Le stress en milieu carcéral


par Coomlan Paul NAKPON
Université d'Abomey-Calavi - Maîtrise 2016
  

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1.5. Revue de littérature

Fragnière (2009), écrit qu'« on est rarement le premier à aborder une question ou, plus précisément, le champ thématique que l'on entreprend d'analyser est déjà balisé par des études voisines ou « cousines » ou bien, il se réfère à des thèmes fondamentaux sur lesquels des bibliothèques entières ont été écrites. Dans ces conditions celui qui entreprend la réalisation d'un mémoire doit faire « l'état de la question ».

Afin de définir comme il se doit, le concept de stress, penchons-nous sur des ouvrages qui traitent cette notion. Sahler (2007 : 10) fait ressortir la problématique devant laquelle nous nous trouvons. En effet, il convient de dire que ce terme de « stress » est un terme générique employé couramment pour définir de manière imprécise un « ensemble disparate de mécanismes biologiques, d'états de santé, de ressentis individuels,... ».

Malgré cela, et malgré l'utilisation populaire de ce concept, la majorité des auteurs spécialistes s'accordent à dire que le stress pourrait être défini de la manière suivante : « état physique et émotionnel que ressent la personne quand elle perçoit un déséquilibre entre la demande de l'environnement et ses propres ressources pour y répondre ». Cette définition, donnée par Bachelard (2008 : 131), est reprise par d'autres auteurs notamment Fontana qui indique dans son ouvrage Gérer le stress que le stress est une demande faite aux capacités d'adaptation de l'esprit et du corps. De ce fait, si, grâce à nos capacités individuelles, nous sommes capables de gérer la demande de l'environnement faite à l'organisme, le stress ne sera pas ressenti comme gênant. Ce ne sont donc pas les éléments extérieurs qui sont eux-mêmes stressants, mais la manière dont nous pouvons y réagir. Chaque individu pourra ainsi répondre de manière différente à un même agent stressant.

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Comme nous venons de le voir, afin que l'on puisse parler du concept de stress, la présence d'un « stresseur », d'une source de stress est obligatoire. C'est dans ce contexte que se trouve toute la différence avec le concept d'anxiété. Dans l'homme stressé, Rivolier donne une définition de cette notion. Pour lui, il s'agit davantage d'une émotion anticipée, d'une peur sans objet. Dans ce type de situation, il n'y a aucun élément responsable de ce comportement.

Il s'agit ainsi d'une inquiétude quant à ce qui pourrait arriver. Maintenant que nous avons défini cette notion et que nous avons expliqué que, pour qu'il y ait stress, il fallait des responsables générateurs de ce stress, penchons-nous sur ces types d'éléments.

1.5.1. Agents stressants et types de stress

Un agent stressant est un élément qui bouleverse l'équilibre de l'organisme, et qui favorise ainsi la production de stress.

Selon Cungi, dans Savoir gérer son stress en toutes circonstances, il existe plusieurs types d'agents stressants. Il y a en effet, ce qu'il appelle les stresseurs aigus et les stresseurs chroniques. Les premiers peuvent être d'une intensité variable et surviennent de manière épisodique (accidents, agressions, mais également des évènements positifs comme des mariages). Quant aux deuxièmes qui sont également nommés stresseurs répétés, ils surviennent, comme leur nom l'indique, de manière répétée et chronique (surcharge professionnelle par exemple).

Ces multiples agents peuvent provoquer du « bon stress » ou du « mauvais stress ». En effet, le stress n'est pas qu'un élément négatif avec des conséquences dangereuses pour l'organisme. Dans Sans stress la vie est impossible, Baumann et Turpin vont même jusqu'à dire que le stress est l'une des conditions de la créativité et de l'accomplissement de l'être humain. L'important est alors de parvenir à un effet de stress sans détresse.

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Effectivement, pour de nombreux auteurs, le « bon » stress permet une amélioration de la performance. Afin de ne pas confondre ces deux types de stress, l'IFAS (Institut Français de l'Anxiété et du Stress) qui dirige un observatoire médical du stress, de l'anxiété et de la dépression a proposé le terme de « surstress » lorsque le niveau de celui-ci pourrait entraîner un risque sur la santé de l'individu.

Les agents stresseurs peuvent découler des situations suivantes :

? Violences entre détenus

Les formes d'agression sont aussi diverses que surprenantes et expriment assez bien le rapport qu'entretiennent les détenus dans le milieu. Pour donner une idée de ces différents types de violences, l'étude réalisée par McCorkle (1992) sur 42 cas d'attaques graves de détenus incarcérés indique dans la majorité des cas que les victimes avaient soit été poignardées, soit reçues des coups de poing ou des coups de pied, soit subies des matraquages, soit été agressées sexuellement, ou encore brûlées. Mais ces données nous permettent-elles d'affirmer que la violence est véritablement importante en prison ? Si l'on s'en tient à une étude canadienne qui a comparé le taux d'homicide annuel entre la population carcérale et la population générale, le risque d'homicide serait 13 fois supérieur à celui de la société (Ouimet, 1999). Les pénitenciers représenteraient donc un plus grand danger que le milieu extérieur. Une autre étude avait également comparé les infractions commises à l'intérieur avec celles de l'extérieur. Elle démontrait que ces infractions étaient deux fois plus nombreuses concernant les vols qualifiés, et 6 fois plus pour les voies de fait (Cooley, 1992). Cependant, le caractère plus contrôlant du système carcéral peut jouer un rôle sur cet écart aussi important. Si le système de surveillance était similaire dans la société, probablement que le nombre de crimes ou de délits constatés augmenterait tout autant.

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Pourtant, O'Donnell (1999) contredit cette idée en affirmant qu'il y aurait malgré tout, une sous-estimation du phénomène en précisant que la plupart des individus emprisonnés auraient été témoins de violence dans le mois antérieur, allant même jusqu'à préciser dans une autre étude que 26 % d'entre eux auraient directement subi cette violence (O'Donnell et al., 1998). La fréquence de cette violence a par ailleurs été étudiée par Ireland et Archer (1996) qui ont évoqué notamment le chiffre de 3 victimes d'intimidation par semaine. Cependant, il faut préciser que malgré le caractère extraordinaire de certaines violences, elles ne représentent pas nécessairement les violences qui ont cours en général dans les institutions carcérales. Cette forme de victimisation serait en réalité bien plus souvent le fait de violences ordinaires (Vacheret, 2004). Parmi ces victimisations, il faut noter la victimisation personnelle (menaces, rackette, agressions) qui est globalement davantage dénoncée que la victimisation contre la propriété (vols en cellule, vandalisme) (Cooley, 1993). La victimisation est en général peu déclarée en prison. Les motifs généralement responsables de ces comportements étaient pour la plupart, soit des affaires de drogue, de dette, ou de détenus intoxiqués, soit ils étaient le fruit d'une vengeance quelconque, soit une victime était au préalable repérée comme étant un délateur ; certains cas concernaient des agressions sexuelles ou encore étaient en lien avec des vols entre détenus.

Le lieu où se déroule l'infraction a également son importance. Pour la plupart, elle se déroule dans une cellule ou dans une rangée. Pour les autres, cela peut se passer dans la cour d'exercice ou dans le gymnase. Le niveau de sécurité n'est pas non plus sans conséquence. Les détenus évoquent généralement plus de violences extraordinaires en maison centrale, alors qu'il y aurait un nombre très important de violences ordinaires en maison d'arrêt et peu de violences en centre de détention. À ce propos, une étude de Bottoms (1999) indique que plus le niveau de sécurité n'est élevé, plus le

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niveau des agressions augmentent. On peut attribuer à ces résultats deux phénomènes. D'une part, l'effet d'une plus grande surveillance dans les milieux à sécurité élevée, ainsi qu'une plus grande concentration d'individus dangereux. Cependant, les actes violents surviennent généralement dans des lieux où la supervision par les surveillants est moindre et dans des secteurs de la prison où les déplacements des hommes incarcérés sont plus libres (Ireland et al., 1996). Le contexte carcéral agit donc pour produire un nombre important de violences. Certaines s'affichent par leurs impacts graves sur le corps de la victime, d'autres plus sournoises, agissent sur le moral. Ainsi, les insultes qui ont généralement cours dans le milieu vont surtout être utilisées pour isoler un détenu ou pour le confirmer dans sa vulnérabilité. Elles peuvent être de nature manipulatrice, diffamatoire ou raciste. Elles agissent pour instituer une relation de domination. À l'intérieur des pénitenciers, la pire insulte que peut recevoir un détenu est de se faire accuser de délinquant sexuel ou de délateur selon Ireland. Ces menaces visent également à ce que le détenu fasse quelque chose contre son gré, pour éventuellement provoquer le conflit physique. Les insultes sont employées pour tenir à l'écart, exclure un délinquant dont le crime, l'apparence physique ou la personnalité est rejeté. Ils sont très dommageables pour l'estime de soi du détenu. Conséquemment, les délinquants sexuels, les détenus souffrant d'une maladie mentale et les détenus physiquement faibles représentent les victimes par excellence visées par cette stigmatisation (Ireland et al., 1996). Les hommes en détention qui n'ont pas payé leurs dettes, qui sont gênés ou introvertis, qui manquent de confiance, qui ne se conforment pas aux normes institutionnelles, qui sont solitaires ou qui ne se lient pas à un groupe sont plus susceptibles de devenir les cibles de violences psychologiques (Harvey & Liebling, 2001). Le racket est également une autre dynamique de violence où sont combinés la menace verbale et le vol et peut parfois s'accompagner d'une agression physique. Le racket peut

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s'amplifier, allant de petits vols ou petites demandes vers des exigences plus dommageables.

Comme le font remarquer Buchanan et ses collègues (1986), l'accentuation de la violence dans les pénitenciers peut découler d'une tendance des détenus à se comporter avec plus d'agressivité et de violence pour répondre à l'image de dureté qui leur est attribuée. L'inverse s'applique aux pénitenciers à sécurité minimum où les hommes emprisonnés démontrent plus de souplesse et d'obéissance. Les caractéristiques physiques ont une place importante dans cette attribution des rôles.

Tewksbury (1989) a montré que la peur des agressions chez les détenus était significativement reliée aux caractéristiques physiques (poids et taille). Et une des agressions qui est indubitablement reliée au physique est celle de l'agression sexuelle. En effet, la sexualité est une composante importante, qui constitue à la fois un besoin physiologique et psychologique et qui est très influencée par la construction de la culture institutionnelle (Tewksbury & West, 2000). Certains, comme Sykes (1958), considéraient la privation sexuelle comme faisant partie de la peine de prison. Les relations sexuelles dans le milieu carcéral prennent la forme soit de relations hétérosexuelles lors des parloirs, ou alors de relations homosexuelles consenties entre les détenus. Eigenberg (1992) distingue deux types d'homosexualité, les "vrais» et les "situationnels». Les "vrais» homosexuels sont décrits comme des hommes ayant une homosexualité déjà orientée avant leur incarcération. Ils sont perçus négativement dans le milieu et parfois considérés comme des anormaux (Sykes, 1958). Ce serait ces détenus le plus souvent victimes des viols.

? Violence auto-infligée

Les violences auto-infligées peuvent correspondre à différents degrés d'intensité, et peuvent aller de la simple automutilation sans risque au suicide.

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Historiquement, la définition du suicide a largement évolué. Durkheim (1897) considérait le suicide comme tous les cas de mort résultant directement ou indirectement d'un acte positif ou négatif de la victime elle-même, bien qu'elle en connaisse les conséquences. Plus récemment Baechler (1980) le considérait comme tout comportement qui cherche et trouve la solution à un problème existentiel en tentant de s'enlever la vie. Le suicide serait donc un acte conscient d'annihilation induite par l'individu, mieux compris comme un malaise multidimensionnel ressenti par l'individu et où le suicide serait perçu comme la meilleure solution (Shneidma, 1985). Plus précisément, la définition du suicide a quatre éléments : le suicide est considéré si la mort se produit ; il doit être la conséquence de son propre acte ; l'agent du suicide peut être actif ou passif ; et il implique l'intentionnalité de mettre fin à sa propre vie (Mayo, 1992).

L'OMS (1998) définira le suicide comme l'acte de se tuer délibérément initié et exécuté par la personne concernée dans la pleine connaissance des conséquences mortelles de l'acte. Cependant, l'acte suicidaire n'est pas nécessairement mortel et doit se comprendre selon différents degrés de létalité (Smith, Conroy, & Ehler, 1984). En effet, le comportement suicidaire qui n'est pas nécessairement fatal peut présenter plusieurs niveaux d'intentionnalité (De Leo, Burgis, Bertolote, Kerkhof, & Bille-Brahe, 2006). L'acte suicidaire peut être ainsi compris soit comme fortement probable ou encore compris comme un comportement suicidaire instrumentalisé (O'Carroll et al., 1996). Le milieu carcéral est largement suicidogène par rapport à la société en général. Le risque de suicide en milieu carcéral serait près de 12 fois plus élevé qu'en milieu extérieur, soit 226 à 240 suicides pour 100.000 détenus contre 17 à 21 décès pour 100.000 habitants (Bourgoin, 1992). Les raisons généralement évoquées pour expliquer ces différences sont l'agglomérat d'individus vulnérables dans un milieu confiné et fermé, les caractéristiques spécifiques de sexe, d'âge, de type de délit

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(plus de suicides dans le cas des meurtres, assassinats, parricides et infanticides), le temps d'incarcération (la grande majorité des suicides sont réalisés durant les trois premiers mois), le nombre d'incarcérations (la majorité des détenus qui se suicident sont incarcérés pour la première fois), les antécédents sociaux, l'architecture contraignante de la prison, les règlements pesants et difficiles à suivre, et les influences parfois néfastes, ségrégatives, de la culture carcérale. D'après d'autres études qui ont dressé un profil type, ce détenu serait un individu âgé entre 20 et 30 ans ; de race blanche; célibataire, ayant commis un délit d'homicide ou de vol, purgeant une sentence vie, placé dans un établissement de haute sécurité à l'admission, ayant peu de qualifications académiques ou professionnelles, ancien fugueur, victime de brutalité en milieu scolaire, provenant d'un milieu familial problématique, ayant un passé criminel, ayant eu un traitement psychiatrique, ayant déjà une histoire d'automutilations avant l'incarcération, des histoires d'abus de drogues et d'alcool, et une absence d'amitié reconnu en prison (Liebling ; 1999 ; Leduc, 2000).

Globalement, le détenu suicidaire serait plus vulnérable et présenterait de plus grandes difficultés d'adaptation. Ainsi, aurait-il peu de capacité à se distraire ; des difficultés à faire face à l'ennui de la détention prolongée en cellule ; des difficultés à vaincre l'isolement ; des conflits avec les autres personnes incarcérées ; peu de visites ; peu de communication avec des gens de l'extérieur ; et serait souvent victime d'ostracisme et d'intimidation (Liebling, 1999).

La nature de la relation, à savoir si le comportement suicidaire apparaît avant la violence ou si la violence déclenche un état d'esprit suicidaire, ne semble pas corrélée. La violence sérieuse (menaces de mort ou de blessures corporelles) serait mieux corrélée au risque de suicide que le faible niveau de violence (insultes, rumeurs, etc.) (Blaauw et al., 2001). Cependant, selon Blaauw et ses collaborateurs (2001), un individu suicidaire, moralement plus

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démuni, aurait peut-être davantage tendance à exagérer les attaques, les percevant plus dommageables que ce qu'elles sont en réalité. Et inversement, les détenus non suicidaires seraient davantage imperméables aux offenses.

Les suicides qui découlent de causes propres aux caractéristiques de l'individu présentent également des composantes environnementales. Ainsi, les suicides surviendraient-ils surtout la nuit, par pendaison, les fins de semaine, durant les mois d'été, en début de détention et dans des secteurs spécifiques de la prison, tels que l'infirmerie et les lieux d'isolement. L'environnement physique restrictif et la crainte constante de la victimisation ne sont donc pas sans répercussion. Ainsi, pour échapper à l'intimidation journalière et au stress engendré par le milieu, certains détenus entrevoient le suicide comme cette ultime solution à leur délivrance. Les tentatives de suicide et les automutilations représentent ainsi le moyen in extremis d'appel à l'aide (Liebling, 1999).

Toutefois, nous pouvons nous questionner sur la capacité effective des détenus suicidaires à demander de l'aide. La culture carcérale peut inciter le refus des hommes emprisonnés à chercher des ressources de soutien, en ne voulant pas être intimidés ou en ne voulant pas se montrer faible. Conséquemment, la violence inhérente à la prison pourrait interagir avec le suicide, les tentatives de suicide ou les gestes d'automutilation.

? Violences des détenus faites aux membres du personnel

Les cas de violence physique envers une personne autre qu'un incarcéré, peuvent être divers et variés. Ces actes sont posés généralement contre des surveillants et plus rarement contre d'autres membres du personnel. Dans le cadre d'une étude sur les prises d'otage (Seidman & Williams, 1999), le personnel impliqué était majoritairement constitué de surveillants, mais également de psychologues, d'instituteurs, de commis ou de bibliothécaires. La durée des incidents pouvait aller de quelques instants à plus de 60 heures.

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Une autre étude (Furr, 1994) a décrit les caractéristiques des détenus ayant agressé sexuellement des employées. Ce sont en général des délinquants sexuels qui avaient déjà agressé sexuellement des femmes, ainsi que des employées et qui voyaient leur situation comme désespérée ou extrêmement pénible. Ils révélaient également un diagnostic de psychopathie (Mailloux & Serin, 2002). Parmi ces cas, il y a rarement des blessures sérieuses. Le plus généralement, la violence a lieu dans des cas où la force est utilisée pour contrôler la personne incarcérée, ou lorsque le détenu a fait des menaces, a frappé un mur, a été agressif ou a invité un surveillant à se battre (Lemire, 1990). Selon Toch, Adams et Grant (1989), les détenus jeunes, célibataires et sans emploi avant l'incarcération sont les plus portés à commettre ce type d'infractions. Le crime commis et la longueur de la sentence ne seraient pas reliés au taux d'infractions disciplinaires. Au contraire, la réduction des infractions au cours d'une sentence prolongée serait due au vieillissement du détenu. L'expérience de la prison atténuerait l'importance des infractions disciplinaires chez les hommes incarcérés depuis une longue durée. Le refus de se conformer aux ordres et le bris des règlements carcéraux sont les deux infractions disciplinaires les plus courantes, et le harcèlement des surveillants venant en troisième position (Toch et al., 1989).

Contrairement à la violence déployée entre les hommes incarcérés, la violence contre les surveillants serait concrétisée dans les endroits supervisés et publics, par exemple les cellules et les unités spéciales de détention (Bottoms, 1999). Elle surviendrait la plupart du temps dans les circonstances suivantes : suite à un ordre donné par un surveillant ; comme marque de protestation à une intervention considérée injuste par le détenu ; lors d'une fouille de cellule ou d'une fouille à nu ; lors des déplacements du détenu, durant une altercation entre hommes emprisonnés ; ou lors d'une suspicion d'un surveillant de la possession de substances illicites par un détenu. La violence contre les surveillants serait plus fréquente à certains moments de la

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journée, tel qu'à l'ouverture des cellules le matin, au commencement de la période de travail en matinée, à la reprise du travail en après-midi, et à la fermeture des cellules en soirée (Bottoms, 1999 ; Toch et al., 1989). Les actes de violence envers les surveillants coïncident généralement avec des temps forts de confrontation entre les deux parties. Comme nous l'avons dit ci-dessus, la violence dirigée vers les surveillants est surtout caractérisée par le harcèlement et les menaces. Selon Bottoms (1999), la combinaison des facteurs âge plus avancé et expérience plus poussée chez les surveillants diminuerait le taux de violence des hommes incarcérés envers ces derniers. Les surveillants plus âgés et plus expérimentés auraient développé de meilleures habiletés interpersonnelles et seraient plus aptes à régler les conflits par la communication. À l'opposé, les surveillants plus jeunes et moins expérimentés émettraient davantage de rapports disciplinaires et ce, pour des actes d'agression moins sérieux, traduisant surtout un manque de confiance dans leur propre autorité (Davies & Burgess, 1988, Cooke, Johnstone, & Gadon, 2004). Aussi, de nombreux auteurs suggèrent-ils de porter une attention spéciale dans le placement et la formation des surveillants (Buchanan et al., 1986; Grant & Luciani, 1998; Rice, Harris, Varney, & Quinsey, 1989).

En réalité, même si la violence des détenus envers les surveillants paraît importante, elle n'en reste pas moins marginale, comparée à celle que les incarcérés se font subir les uns aux autres, et comparativement à d'autres corps professionnels. Concernant ce dernier propos, une étude de Lusignan (1995) révèle que les surveillants de prison ont des taux de victimisation nettement inférieurs à ceux des huissiers, policiers ou travailleurs sociaux. Et ils ont une mortalité professionnelle moins importante que les mineurs, les camionneurs, les ouvriers de la construction ou les policiers. Lusignan explique cela par le fait que les surveillants se rendent rarement vulnérables

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face aux détenus. Ils savent se défendre à mains nues et s'organisent pour qu'un autre surveillant ne soit jamais loin.

Tous ces agissements ou comportements constituent des effets de l'incarcération sur les détenus et par extension, sur les personnels d'encadrement : la privation excessive de la liberté non seulement, change les prisonniers, mais elle change aussi leurs geôliers et par extension, la société qu'il représente (Cormier, Bruno & Williams ; 1966).

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille