251659264
« La sélection en fonction du sexe en
faveur des garçons est un symptôme des injustices sociales,
culturelles, politiques et économiques omniprésentes auxquelles
sont confrontées les femmes, et une violation manifeste des droits
fondamentaux des femmes »
Déclare l'Agence de l'ONU : ONU Femmes.
DEDICACE
A nos chers parents;
A nos frères;
A nos soeurs ;
A notre grand-mère ;
A tous ceux qui nous sont chers.
REMERCIEMENTS
La réalisation de ce travail a nécessité
l'aide précieuse de plusieurs personnes envers lesquelles nous avons
l'honneur de témoigner notre gratitude.
Nos remerciements vont en premier lieu à l'endroit du
Professeur Paul NKUNZIMANA de la Faculté de Psychologie et des Sciences
de l'Education, pour avoir accepté de guider nos premiers pas de
chercheur. C'est grâce à ses précieux conseils et à
sa rigueur scientifique que nous avons pu aboutir à l'accomplissement de
ce travail.
Nous remercions en deuxième lieu tous nos
éducateurs dès l'Ecole Primaire jusqu'à
l'Université, qu'ils trouvent tous ici l'expression de notre
reconnaissance pour la formation intellectuelle et morale qu'ils nous ont
donné.
Beaucoup de personnes nous ont également soutenu dans
la réalisation de ce travail et méritent ainsi l'expression de
nos sentiments de gratitude. Qu'il nous soit permis de remercier nos parents
qui n'ont ménagé aucun effort pour nous donner une
éducation adéquate dont nous sentons le fruit.Nous devons
beaucoup à la famille de Monsieur BARINZIGO Emmanuel pour son soutien
matériel pour rendre possible la réalisation de ce travail.
Que tous ceux qui nous ont fourni des informations et des
documents pertinents trouvent ici notre profonde gratitude.Enfin, nous
exprimons nos remerciements à toute personne qui, de près ou de
loin, nous a aidé dans la réalisation de ce travail.
Cyriaque CIZEROCIMANA
LISTE DES SIGLES ET
ABREVIATIONS UTILISES
al. : Collaborateurs
CAFOB : Collectif des Associations et ONGs
Féminines du Burundi
CNRS : Centre National de Recherche Scientifique
Ed. : Edition
ESF : Expansion Scientifique Française
FPSE : Faculté de Psychologie et des Sciences
de l'Education
IRIN :Integrated Regional Information Networks (Les
Réseaux
d'Information Régionaux Intégrés)
OCHA : Office for the Coordination of Humanitarian
Affairs (Bureau de la
Coordination des Affaires Humanitaires)
ONU : Organisation des Nations Unies
p : page
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
PUF : Presses Universitaires de France
UB : Université du Burundi
UNICEF : United Nations Children's Fund (Fonds des
Nations Unies pour
l'enfance)
V : Volume
RESUME
Au Burundi, les enfants occupent une place primordiale au sein
de la famille. La place réservée au fils unique dans la famille
comptant une progéniture à majorité féminine
retient une affection particulière des parents.
L'objectif général de notre recherche
visaità « étudier la place du fils unique dans une
famille comptant une progéniture à majorité
féminine. » La structure patriarcale de la
société burundaise fait qu'il y a une préférence
pour le sexe masculin. La recherche que nous avons menée a montré
que le système patriarcal fondé sur la primauté de
l'homme dans la division sociale du travail, amène les parents à
canaliser nombre de sentiments à l'égard du fils pendant que les
filles jouissent d'un traitement moins attentionné. L'héritage de
la richesse familiale et la continuité de la lignée familiale
sont les fonctions importantes pour le fils unique en famille. Ce dernier,
suite à son unicité, subit des traitements affectifs tels que la
tendresse excessive, la surprotection et la satisfaction immédiate deses
besoins. Nous avons constaté que ces traitements peuvent engendrer, chez
le fils unique, de lourdes conséquences comme la solitude, le manque
d'autonomie, le manque de responsabilité et de bonnes manières.La
considération équitable des garçons et des filles, la
non-violence du sexe féminin et l'égalité des enfants en
matière de succession sont des précautions envisagées par
les enquêtés pour éviter les préjugés
fondés sur la discrimination des sexes.A l'issue de cette étude,
il est suggéré aux parents, aux fils uniques et à l'Etat
de cultiver l'esprit d'égalité des droits des sexes dans l'action
éducative des enfants.
TABLE DES MATIERES
DEDICACE
i
REMERCIEMENTS
ii
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS UTILISES
iii
RESUME...............................................................................................................................................
v
TABLE DES MATIERES
i
0. INTRODUCTION GENERALE
1
0.1. Motivation du choix du sujet
2
0.2. Délimitation du sujet
3
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET
METHODOLOGIQUE
5
CHAPITRE I. ELUCIDATION DES CONCEPTS CLES
6
1.1. Famille
6
1.2. Progéniture
7
1.3. Sexe
9
1.4. Fratrie
10
1.5. Fils unique
12
1.6. Education
13
1.7. Relations familiales
14
CHAPITRE II: GENERALITES SUR LA FAMILLE
17
2.1. La famille et ses attentes
17
2.1.1. Attente procréatrice
17
2.1.2. Attente sociale
18
2.2. Le caractère sexiste chez l'être
humain
19
2.2.1. Préférence du sexe masculin
chez les Burundais
19
2.2.2. La sélection du sexe des enfants chez
les Asiatiques et les Européens
20
2.3. La structure patriarcale
21
2.3.1. Le statut social du père
21
2.3.2. Le statut social de la mère
21
2.3.3. Le système patriarcal à la
base des inégalités entre les sexes
22
2.4. La valeur et le rôle de l'enfant dans la
famille
23
2.4.1. L'enfant comme source d'honneur à la
famille
23
2.4.2. L'enfant et le statut définitif de la
mère
24
2.4.3. L'héritage de la richesse
familiale
25
2.5. Le rôle des parents dans
l'éducation des enfants
26
2.5.1. L'autorité paternelle
26
2.5.2. L'amour maternel
27
CHAPITRE III : LE FILS UNIQUE DANS LA
FAMILLE BURUNDAISE
29
3.1. Le fils unique dans la famille
29
3.1.1. L'enfant roi
29
3.1.2. Le jeu du fils unique
30
3.1.3. Le fils unique et sa fratrie
31
3.2. La fratrie et son rôle dans la
socialisation des enfants
32
3.2.1. La rivalité fraternelle
32
3.2.2. L'enfant unique et ses
conséquences
33
3.3. Traitement psychosocial d'un fils unique
34
3.3.1. Tendresse excessive des parents
34
3.3.2. Entourage attentif du fils unique
35
3.4. Conséquences liées à
l'absence ou à l'unicité du fils chez les parents
36
3.4.1. Progéniture uniquement
féminine comme source de mésentente familiale
36
3.4.2. Naissance du fils comme source de
satisfaction chez les parents
37
CHAPITRE IV : PROBLEMATIQUE ET CONSIDERATIONS
METHODOLOGIQUES
38
4.1. Problématique de la recherche
38
4.2. Les objectifs de la recherche
41
4.2.1. L'objectif général
41
4.2.2. Les objectifs spécifiques
41
4.3. Méthode et technique de recherche
42
4.3.1. Méthode qualitative
42
4.3.2. Enquête par l'entretien
semi-directif
42
4.4. Le terrain et population d'enquête
43
4.5. Le travail de terrain
44
4.5.1. La préenqu?te
44
4.5.2. La technique de choix des
enquêtés et déroulement de l'enquête
46
4.5.3. Les difficultés
rencontrées
50
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION DES CAS,
ANALYSE DES DONNEES ET
INTERPRETATION DES RESULTATS
51
CHAPITRE V : PRESENTATION DES CAS
52
5. 1. Cas CAN
52
5.2. Cas ATH
53
5.3. Cas SUZ
54
5.4. Cas MET
56
5.5. Cas NIC
57
5.6. Cas MUJ
59
CHAPITRE VI: LA TRIPLE RELATION ENTRE PARENTS,
FILLES ET FILS
UNIQUE
61
6. 1. Les relations affectives centrées sur
le fils unique
61
6. 2. L'origine de la mésentente entre les
parents et filles
63
6. 3. Les parents démissionnaires de leurs
rôles éducatifs
65
6.4. Le développement harmonieux des
relations entre les membres d'une famille
67
CHAPITRE VII : TRAITEMENTS AFFECTIFS RESERVES
AU FILS UNIQUE
70
7.1. La satisfaction immédiate des besoins
du fils unique
70
7. 2. La place primordiale du fils unique dans une
famille
72
7. 3. La profonde affection entre parents et fils
unique
74
7.4. Les comportements des parents comme source de
rivalités fraternelles
76
7.5. La maltraitance faite au sexe
féminin
76
CHAPITRE VIII : LE FILS UNIQUE, SES PARENTS ET
LES PERSPECTIVES
79
8.1. Les conséquences néfastes
rencontrées par le fils unique dans une famille
79
8.2. Les conséquences pour les parents
à fils unique
82
8.3. Les conseils donnés au fils unique et
aux parents
84
CONCLUSION GENERALE
87
SUGGESTIONS..........................................................................................89
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
91
ANNEXES
96
0. INTRODUCTION GENERALE
Les situations familiales courantes poussent l'observateur
à faire une analyse de l'influence du milieu familial sur la
personnalité de l'enfant. Le développement harmonieux de la
personnalité des enfants dépend du climat social qui règne
au sein d'une famille.A ce propos, disent ALPHANDERLY H. et ZAZZO R. (1970,
p.151), «On doit sans doute attribuer au milieu familial une
importance déterminante parce qu'il est le lieu, et qu'il offre
l'occasion des expériences premières. Toutes les structurations
qui résultent de celles-ci en porteront nécessairement la
marque.» Une intégration dans la famille détermine la
socialisation de l'enfant, qui déterminera par après sa
personnalité. Le couple devient joyeux dès la naissance des
enfants car il arrive quelquefois que le couple ne se reproduit pas. Il est
donc jugé bon d'avoir les enfants, garçons et filles.
Cependant, depuis longtemps, dans la société
burundaise, la naissance des garçons dans une famille comblait celle-ci
de beaucoup plus de joie que celle des filles, d'où une place importante
accordée au sexe masculin engendre une inégalité au niveau
de la fratrie.Par ailleurs, les relations familiales normales s'ordonnent
autour des enfants et de leurs parents. Ainsi, dit POROT M. (1979, p.9) en ces
mots : «Le couple, condition nécessaire du foyer ne
saurait être considéré comme suffisant pour qu'existe une
famille : c'est la venue de l'enfant qui crée la famille, c'est par
conséquent autour de l'enfant que s'ordonnent les relations familiales
normales.»On entend par là que le motif qui pousse les
personnes à s'unir est le besoin de fonder un foyer et d'avoir des
enfants.
Dans la société burundaise, la
progéniture fait partie des buts essentiels du mariage. L'enfant a une
place très importante dans la famille. Sa valeur n'est pas seulement
économique mais aussi l'enfant prolonge la vie des parents dans le
futur. Cependant, la famille burundaise est patrilinéaire. C'est
pourquoi les Burundais attachent une importance marquée aux
garçons par rapport aux filles. Cela se remarque dans le fait que le
père, avant de mourir, lègue généralement tous les
pouvoirs à son fils, lequel est appelé à le remplacer dans
ses rôles. En effet, les inégalités au niveau des sexes
dans la vie sociale, en commençant par la famille, ne seraient-elles pas
la conséquence du système patriarcal au Burundi ?Nous avons
montré dans ce travail la place que peut avoir le fils unique né
dans une famille comptant une progéniture à majorité
féminine. Nous avons pu explorer en long et en large les effets que peut
engendrer la subjectivité des parents dans la considération de
leur fils unique et leurs filles au sein d'une famille.
Le texte que nous avons proposé aux lecteurs
s'articulera autour de quelques points saillants repartis. Pour la
première partie, nous avons parlé entre autre du cadre
théorique et méthodologique qui comprend l'élucidation des
concepts clés, les généralités sur la famille,le
fils unique dans la famille burundaise et enfin la problématique et
les considérations méthodologiques.
Pour la deuxième partie, nous avons
présenté les cas, latriple relation entre parents, filles et fils
unique, les traitements affectifs réservés au fils unique et,
enfin, nous avons exposé les conséquences rencontrées par
le fils unique et ses parents et proposé des perspectives.
0.1. Motivation du choix du
sujet
Les enfants traités différemment dans la famille
et la place accordée à l'un d'eux du fait de son sexe, tels sont
les phénomènes qui nous ontintéressé dans cette
étude. Nous constatons que les parents affichent des attitudes
différentes devant l'enfant de tel sexe, mais il est question de savoir
le sexe le plus souhaité dans la descendance au Burundi et pourquoi
cette préférence.La motivation du choix du sujet est
affirmé par LEON A. (1973, p. 35) en ces termes : «
L'élaboration d'un sujet de recherche suppose d'abord un
intérêt réel pour le thème que l'on se propose
d'exploiter.» Voilà le moment d'expliquer comment le choix
d'un tel sujet nous est venu de l'esprit. Sans doute, bon nombre de lecteurs se
posent la question de savoir pourquoi nous nous sommes intéressé
à la découverte de la place du fils unique dans une famille
comptant une progéniture à majorité féminine.En
effet, ce choix nous est venu suite à une longue réflexion sur
les familles-types surtout sur la manière dont les parents traitent le
fils unique et la place accordée à celui-ci. Alors, nous sommes
conscient du fait qu'avoir un seul fils dans une famille crée une
situation qui pousse les parents à lui accorder une place importante
différente à celle accordée aux filles.
Depuis longtemps, nous savons que, dans la
société burundaise, la progéniture avait une place
importante. Le garçon était considéré en second
lieu comme chef de la famille après ses parents. Etre fils unique dans
une famille pousse les parents à craindre la perte de ce fils parce
qu'ils considèrent et pensent que la mort de leur fils
désagrège la famille, parce que les filles quittent la famille
pour se marier. C'est pour cette raison qu'une certaine subjectivité
était remarquée depuis longtemps jusqu'à nos jours chez
les parents ayant un fils unique. Certains parents laissent libre leur fils
unique, d'autres le fait gâter en satisfaisant immédiatement ses
besoins et en affichant à son égard une faible autorité
et un amour profond ; ce qui aura des conséquences néfastes
sur le fils unique, sur les parents et il y aura détérioration
des relations familiales car les filles se voient justement
maltraitées.
Des recherches ont été faites dans ce domaine
social. Nous citons la recherche faite par NIYUHIRE intitulée «
l'approche psychoaffective de la relation parents-enfant unique et les
incidences possibles sur son éducation»(2009). NIYUHIRE a
trouvé que les relations conjugales entre les parents d'enfant unique se
trouvent compromises du fait que l'existence de ce seul enfant est
perçue comme une déception aux aspirations essentielles du couple
qui souhaiterait avoir plusieurs enfants et cela a une incidence
négative sur l'éducation de celui-ci.Une autre recherche faite
dans le même domaine est celle de BUKEMEintitulée « les
attitudes des parents du milieu rural face à la politique de
l'égalité des genres en matière de
succession»(2008). BUKEME a trouvé que le droit à la
succession des femmes n'est pas pour un proche avenir, car les
mentalités des parents ruraux ne sont pas encore mûres pour
l'égalité des genres.La troisième recherche est celle de
HATUNGIMANA intitulée «le vécu psychosocial des couples
à progéniture uniquement féminine»(2008).
Celui-ci a trouvé que dans leurs relations familiales et sociales, ces
couples rencontrent des difficultés d'ordre psychologique et social.
L'originalité de notre apport est que nous avons
étudié la place du fils unique dans une famille comptant une
progénitureà majoritéféminine. Nous nous limitons
sur les relations que tissent les membres de la famille, les traitements
réservésà ce fils unique et les conséquences que
celui-ci peut avoir suite à son unicité.L'idée d'une telle
recherche nous est venue du souci d'orienter les parents dans la façon
de s'y prendre pour éviter toute tendance de considérer ou de
traiter les enfants différemment selon qu'ils soient fils ou filles.
0.2. Délimitation du
sujet
Comme notre sujet est intitulé « La place du
fils unique dans une famille comptant une progéniture à
majorité féminine»,nous nous sommes limité
à la place du fils unique de façon générale et nous
avons analysé les relations entre tous les membres de la famille, les
traitements et les conséquences subis par ce fils suite à son
unicité. En effet, le fils unique est beaucoup aimé par ses
parents, ce qui implique que les relations entre eux sont
caractérisées par une affection excessive. Par conséquent,
les filles sont délaissées et la carence affective est beaucoup
ressentie par ces dernières. Les traitements du fils unique sont
caractérisés par une satisfaction immédiate de ses besoins
et la liberté totale qui le poussent à manquer d'autonomie et de
sens de responsabilité.
Nous ne pouvions pas parcourir toutes les localités du
pays. Il était même impossible de mener cette recherche sur tous
les cas. D'où une délimitation au niveau du sujet et du terrain
d'enquête a été nécessaire. Nous avons jugé
bon de limiter notre recherche en province MURAMVYA plus
précisément en Commune MBUYE. Nous avons choisi ladite Commune
parce qu'il s'agit d'un milieu où nous avons observé
particulièrement le phénomène que nous avons voulu
étudier, ce qui ne veut dire nullement qu'il serait inexistant
ailleurs.
251656192
PREMIERE PARTIE :
CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE I. ELUCIDATION DES
CONCEPTS CLES
Ce chapitre vise à définir certains
concepts clés dits fondamentaux qui étaient susceptibles de
rendre facile la compréhension de notre travail. En effet, certains
concepts que nous avons utilisé sont ambigus, d'où il
était indispensable de les définir afin de comprendre le contexte
dans lequel nous avons travaillé. Ainsi, notre étude a
été centrée sur les réalités sociales du
milieu familial d'où la définition des termes relatifs à
ce dernier tels que famille, progéniture, sexe, fratrie, fils
unique, éducation et relations familiales s'est imposée.
1.1. Famille
Nombre d'auteurs ont été
intéressés par le terme famille. Nous avons
défini ce concept en le ramenant dans le contexte burundais et en
donnant toutefois les points de vue des auteurs.
POROT M. (1979, p. 8) définit la famille comme
« l'ensemble des personnes d'un même sang vivant sous le
même toit et plus particulièrement le père, la mère
et les enfants.» Nous pouvons dire que la famille existe par le fait
de la coexistence d'individus sous un même toit dont le sang est le lien
qui les unit. La famille définie ainsi est un regroupement restreint ou
famille nucléaire parce qu'elle est constituée par le
père, la mère et les enfants. Cependant, la famille ne reste
pas seulement restreinte, elle est également composée par
d'autres personnes liées entre elles par les liens de parenté par
exemple les grand-pères, les grand-mères, les oncles, les tantes,
les cousins et cousines, etc. Cette famille est dite élargie,
étendue ou composée.
Pour BIGANGARA (1986, p.18), «la famille est une
communauté d'individus réunis par des liens de parenté
existant dans toutes les sociétés humaines.» La famille
est un groupement d'individus, elle est dotée d'un domicile et
crée entre ses membres une obligation de solidarité morale et
matérielle et censée protéger et favoriser leur
développement social, physique et affectif.
BIANCHERI A. (1965, p.310) distingue trois types de familles
à savoir :
-« La famille immédiate,
élémentaire, nucléaire ou restreinte composée par
le père, la mère et les enfants.
-La famille polygénique composée par le
père, plusieurs femmes et les enfants.
- La famille étendue ou composée qui
regroupe sous l'autorité d'un chef un certain nombre de familles
élémentaires. »
L'auteur distingue la famille au sens strict qu'il appelle
famille nucléaire, la famille polygénique et la famille
élargie. Au Burundi, il existe des termes qui désignent chaque
échelon du système parental. En effet, BIGANGARA J.B. (1986,
p.18) distingue trois types de familles au Burundi :
-« La famille-ménage ou famille nucléaire est
l'institution de base de la parenté. Ce groupe de base est
composé du père, de la mère et des enfants, habitant
encore dans la même maison c'est-à-dire non mariés.»
-«La famille parentèle est une
société naturelle groupant plusieurs familles nucléaires
coordonnées par une même autorité et se réclamant
d'un même ancêtre. Font strictement partie de cette
communauté seuls les hommes et leurs descendants.»
-«Le clan est constitué de plusieurs familles
parentèles descendant d'un même ancêtre très
lointain dont ils portent le nom. Par exemple le clan des
Abanyakarama.» La famille-ménage correspond à la
famille restreinte. C'est la famille au sens strict.La famille
parentèle correspond à la famille élargie.
Le clan est le dernier échelon des groupements
familiaux et se caractérise par la descendance de mâle à
mâle comme l'écrit ainsi SIMONS cité par BIGANGARA (1986,
p.23) :«Le sang, la parenté, ne se transmettent pas par
les femmes, mais uniquement par les mâles.» Selon lui, les
femmes font théoriquement partie du clan de leurs parents mais,
pratiquement elles font partie de celui de leurs maris. Le clan est l'ensemble
des descendants des mâles à savoir les parents, les enfants, les
enfants de leurs fils et de leurs petits-fils. BIGANGARA (1986, p. 136), a
aussi distingué deux autres types de familles qu'il a appelé
famille polygamique et famillepolyandrique :
« La polygamie est l'union conjugale d'un homme avec plusieurs femmes.
La polyandrie, union conjugale d'une femme avec plusieurs hommes.» Le
terme «polygamie» est employé particulièrement
au Burundi sinon le vrai terme est « la polygynie.» Nous
avons utilisé le concept «famille» dans le sens
strict et selon ses composantes à savoir le père, la mère
et les enfants. Ainsi, la place occupée par le fils unique ainsi que
les relations que celui-ci tisse avec ses parents et ses soeurs ne peuvent
être étudiées qu'en tenant compte de la signification de la
famille nucléaire.
1.2.
Progéniture
Nous ne pouvons pas parler de la famille sans toutefois
évoquer de ses composantes dont la progéniture est d'une
importance primordiale. En effet, comme nous avons déjà
défini le sens dans lequel nous avons utilisé le concept
famille; le terme progéniture, à son tour a
été utilisé comme une des composantes de la famille. La
progéniture, dans notre contexte, est l'ensemble des enfants
mis au monde par un couple conjugal. Celle-ci est constituée par les
filles et les fils. Que veut dire le terme
« progéniture » ? Du latin
« genitura » qui veut dire
« engendrer », le terme est explicité dans
l'Encyclopædia Universalis (1975, p.1013) comme :
« l'ensemble des enfants d'un homme ou d'une femme ; c'est
le nombre d'enfants que possède un homme ou une femme exclus ceux
adoptés. » En nous référant à cette
définition, nous pouvons dire que la progéniture est la
descendance directe des parents. La progéniture s'ajoute au couple et
constitue, dans ce cas, une famille restreinte et, si la descendance continue,
on arrive à une parentèle.
Le désir de procréer, dans la
société burundaise, est un aspect fondamental du couple. L'enfant
qui est le produit et le résultat du mariage constituent pratiquement un
triomphe sur la mort, il est une projection en dehors de soi. Comme le souligne
A. NTABONA (1986, p.114): « mettre au monde des
enfants, c'est se multiplier, s'élargir, projeter sa personnalité
en dehors et au-delà de soi. » Notons cependant que dans
cette société burundaise les fils sont les seuls à garder
le nom de leur père à travers le clan. Quant aux filles, elles
vont appartenir au clan de leur mari. D'où les drames en famille en cas
d'une progéniture uniquement féminine. C'est ce qu'affirme
BIGANGARA J.B. (1986, p.23) de cette manière: « Feront
partie du même clan les descendants des mâles et
théoriquement la fille fait partie du clan de ses parents mais
pratiquement elle fait partie du clan de son mari.» Selon la
mentalité traditionnelle burundaise, les enfants n'ont pas la même
valeur. La fille est moins considérée du fait qu'elle quittera sa
famille pour s'intégrer une autre famille.
La descendance du couple, fruit de son union, est prise ici
comme progéniture au sens général. C'est donc l'une des
attentes du fondement d'un foyer. Cette attente procréatrice est
quelquefois absente chez certains couples lorsqu'on n'obtient pas d'enfants. Au
Burundi, le résultat de cette absence d'enfants est souvent une
dissociation familiale car chacun des conjoints accuse la
stérilité à son partenaire. BIGANGARA J.B. (1986, p.113)
indique que « l'enfant offre un plaisir pour la famille, tandis que
son absence constitue une pomme de discorde, voire même l'origine de la
dislocation de la famille.» Ainsi, dans la vie du couple, l'enfant
est souhaité et est considéré comme un facteur de sa
cohésion. La progéniture est donc constituée de filles et
fils en nombre égal ou inégal. Dans notre étude, nous nous
sommes penché sur la famille dans laquelle l'inégalité
entre les filles et les garçons est considérable,
c'est-à-dire le cas du fils unique dans une progéniture quasiment
féminine. Nous avons utilisé le concept de
progéniture comme l'ensemble des frères et soeurs issus
d'une même famille restreinte.
1.3. Sexe
Tout être humain naît sexué, mâle ou
femelle, avec des caractères physiologiques en continuelle
évolution, même s'il existe des erreurs. Pendant le stade
phallique, l'enfant sait qu'il est un garçon ou une fille
c'est-à-dire qu'il sait son sexe. Selon FRAURE-OPPENHEIMER A. (1980,
p.146), « lesexe est un élément objectif, un objet de
savoir ou de connaissance dont la détermination est biologique. Son
caractère est anatomique.» Selon cet auteur, nous n'entendons
exactement que le sexe désigne l'appareil reproducteur de l'homme ou de
la femme.
Le mot «genre» apparaît souvent comme
synonyme du mot «sexe» mais ces deux mots sont
différents même si l'un découle de l'autre. Il faut alors
distinguer le concept «sexe» et le concept
«genre» afin de dissiper la confusion entretenue par le
terme de sexualité qui renvoie aussi bien au corps qu'au plaisir.
FRAURE-OPPENHEIMER A. (1980, p.6), montre ainsi la différence entre le
sexe et le genre : « Le sexe dont les
connotations sont biologiques, englobe les chromosomes, les gonades et
l'appareil génital : il est mâle ou femelle. Le genre est
réservé au domaine purement psychologique de la sexualité.
Il désigne les sentiments, les rôles, les attitudes et les
tendances : il est masculin ou féminin.» Selon ces
théories nous pouvons dire sans nous tromper que le sexe est
d'ordre physiologique et le genre d'ordre psychologique. Ainsi, le
genre est exploité idéologiquement tandis que le
sexe reste le somatique.
Dans notre étude, le fils unique est plongé dans
une communauté féminine et pourra avoir tendance à se
comporter comme une fille. Cela est dû lorsqu'il s'agit d'un fils qui
termine une série de filles, car le comportement est acquis. Cette
idée est appuyée par FRAURE-OPPENHEIMER A. (1980, p.6) qui
signale que «l'enfant a la conviction d'appartenir au sexe qui lui a
été assigné et dans lequel il a été
élevé même s'il ne correspond pas au sexe
"scientifique".» Ainsi, le sexe est inné et le genre est
acquis.
Le fils unique a tendance à changer son genre
parce qu'il se trouve élevé au milieu des filles et par
conséquent aura le genre féminin et vice-versa. Selon
le même auteur (1980, p.91), «le sexe se développe d'un
coté et le genre de l'autre coté, auquel cas le psychisme est
totalement séparé du corps. Ainsi, l'esprit peut être
indépendant du corps.» Pour qu'il y ait un
développement normal, il faut qu'un garçon possède l'air
d'un garçon et qu'une fille ressemble à une fille.
Dans la culture burundaise, suite à la division du
travail dans le cadre du patriarcat, l'homme occupe une place de premier plan.
Le point de départ de l'identité de genre est l'anatomie
qui permet l'assignation du sexe, mais le facteur déterminant est
l'attitude des parents qui ne traitent pas de la même façon un
garçon et une fille. Nous avons utilisé les deux concepts
sexe et genre pour étudier la place d'un seul fils
dans une famille comptant une progéniture à majorité
féminine.
1.4. Fratrie
Pour élucider le sens du terme
« fratrie », qui est censé être utile
pour comprendre notre contexte, nous sommes parti de différentes
théories des différents auteurs. Dans
l'EncyclopædiaUniversalis, (1980, p.86), nous lisons ceci : «
Lafratrie est le lieu dela rencontre d'autrui avec ses
discordances et ses oscillations entre accord et jalousie.» L'enfant
apprend à vivre en harmonie avec les autres, avec ses semblables, il
apprend à partager avec ses frères et soeurs l'amour et les soins
des parents. L'enfant, à l'origine, ne faisait qu'un avec sa
mère. Sa naissance substitue le duel au singulier. Ce sera le rôle
de la fratrie de mettre ces relations au pluriel, c'est-à-dire de les
rendre plus semblables à celles que l'enfant, devenu adulte, aura
à établir avec la société. Selon le
Dictionnaire encyclopédique de l'éducation et de la
formation (1994, p.458), « La fratrie est définie comme un
groupe d'hommes reliés par un ancêtre commun.» Selon cet
ouvrage, la fratrie est considérée comme les descendants d'un
homme.
CHOMBART DE LAUWE (1980 p.63) et ses collaborateurs montrent
le rôle de la fratrie de cette manière : « La
fratrie permet l'établissement des rapport pluridimensionnels qui sont
une préparation aux véritables rapports
familiaux. » Les rapports entre les enfants sont la
répétition des rôles qu'ils joueront plus tard dans la
comédie humaine. Le fils unique lie ses relations avec ses soeurs et ses
parents. Puisqu'il est fils unique, il voit que sa fratrie est
incomplète du fait qu'il n'a pas de frères.
D'autres significations ont été données
au concept «fratrie». Celle qui nous paraît
importante est celle donnée par le Dictionnaire
Encyclopédique de l'Éducation et de la Formation (1994,
p.458) selon laquelle : « La fratrie est l'ensemble des
frères et soeurs d'une même famille.»Nous
entendons par là que les enfants descendants d'un même couple
constituent ensemble une fratrie.
Un enfant unique qui ne joue pas dans la fratrie connait
certainement des difficultés d'intégration, parce qu'il manque
les qualités de la fratrie: tout d'abord, la prise de conscience du
« moi », l'autonomisation par rapport au monde
extérieur qui s'établit aux alentours de trois ans, se fait plus
facilement par opposition à autrui et cela grâce aux contacts
fraternels de tous les instants. L'accession au
« nous » est également facilitée.
Ensuite, l'égocentrisme normal de l'enfant doit, pour satisfaire aux
exigences de la vie en société, céder progressivement la
place sinon à un altruisme total du moins à une charité.
Enfin, par multiples renoncements nécessaires, les petites injustices,
les menues ingratitudes, les légères vexations, l'enfant
apprendra à les connaître grâce à des contacts avec
ses frères et soeurs
La fonction essentielle des frères et soeurs est donc
de permettre la meilleure socialisation de l'enfant. Cette adaptation sociale
sera obtenue par le passage de la rivalité à l'amitié ou
à la coopération. Ces deux dernières attitudes sont le
terme habituel des relations entre frères et soeurs ayant subi une
évolution normale. La rivalité fraternelle dont l'utilité
est méconnue par beaucoup de parents est donc nécessaire. Selon
BOUTONIER J., « quand deux enfants se battent, le combat
établit entre eux un lien qui peut être considéré
comme social.» L'apparition de la haine, de l'amour est liée
aux relations fraternelles marquant d'un sceau profond, la vie affective et
future de l'enfant.
Cependant, la présence de la haine entre les
frères ne signifie pas mésentente permanente. Celle-ci est
passagère car les frères sont des amis. Ceux-ci lient une
relation de fraternité. C'est ce qu'affirme CAHN P. (1962 p. 165) en
définissant la fraternité comme « liaison
étroite de ceux qui, sans être frères, se traitent comme
des frères », ce qui revient à considérer
les frères comme des amis.
Le terme fratrie a été utilisé
dans ce travail comme liaison ou relation étroite entre les filles et
fils issus d'un seul couple conjugal. Ainsi, on emploi le mot
frère pour designer le garçon et soeur pour designer une
fille par relation de parenté, c'est-à-dire que le garçon
et la fille en question sont des mêmes parents. En fait, la fratrie
constitue, pour l'enfant, une transition entre le milieu restreint de la
famille et la société proprement dite, une sorte d'apprentissage
social dont l'efficacité est fonction de l'attitude des parents. C'est
dans cette optique que nous avons utilisé ce concept à cause de
l'influence positive que la fratrie exerce sur le développement social
et affectif de l'enfant. Pour cette étude, ce concept a
été utilisé comme un groupe d'enfants, fils et filles d'un
seul couple parental.
1.5. Fils unique
Toute personne se différencie de l'autre par la
présence des caractères physiques différents tels que les
sexes masculin et féminin. Le sexe masculin est pris comme
caractéristique d'un garçon tandis que le sexe féminin
caractérise une fille. On utilise le terme garçon pour
désigner un jeune homme de sexe masculin. Par relation de
parenté, on préfère dire un fils au lieu de
garçon.
L'expression « fils unique »
désigne un seul fils dans une famille. Cette expression est
différente de l'expression « enfant
unique » car selon WINNICOTT D.W, « l'enfant
unique est un enfant qui, bien que vivantdans un foyer normal n'a ni
frère ni soeur. »Dans une famille, on peut avoir un seul
enfant, et, ce dernier peut être un fils ou une fille. On parlera dans ce
cas d'un fils unique ou d'une fille unique. En effet, le fils unique dans sa
famille est entouré par des personnes qui l'aiment ; mais puisqu'il
demeure plongé au milieu des filles et d'autres adultes (parents) et
qu'il n'y a pas près de lui d'autres fils (ses frères), il reste
seul. Dans le cas contraire, l'enfant unique subit plus pleinement l'emprise
de son entourage essentiellement adulte parce qu'il constitue la principale,
parfois l'unique préoccupation des parents qui lui prodiguent soins et
affection avec une générosité non mesurée car non
partagée puisqu'il est unique. Un tel enfant donc se trouve dans une
situation privilégiée pour son développement intellectuel
même moteur. En revanche, il est défavorisé quant à
sa maturation affective.
Dans notre travail, le fils unique est défini comme un
seul fils qui vit dans une famille normale comptant une progéniture
féminine. Le fils unique n'a pas de frères. Pour notre
étude, le fils unique est un fils qui vit dans une famille qui ne compte
pas d'autres fils mais qui compte plusieurs filles.
1.6. Education
Le concept d'éducation est fondamental pour
notre étude. C'est pourquoi nous avons essayé de le
définir en nous inspirant des approches de bon nombre d'auteurs parce
qu'il est vaste et complexe. Régulièrement, dans les
écrits de différents auteurs, apparaissent deux conceptions
à savoir l'éducation comme processus de transmission des valeurs
culturelles et sociales d'une génération à l'autre ,d'une
part ,et l'éducation comme processus de socialisation d'une nouvelle
génération pour l'adapter à la société dans
laquelle elle est appelée à vivre, d'autre part.
Comme processus de transmission des valeurs culturelles et
sociales, ERNY P. (1973, p .16) explique ceci :
« l'éducation est une expression d'une culture. Elle est
d'abord transmission d'un patrimoine ou d'un héritage d'une
génération à l'autre. Elle vise à assurer une
continuité, à être l'instrument par lequel les
civilisations se perpétuent et grâce auquel les membres d'une
société qui sont aussi les porteurs d'une culture, assurent que
les conduites nécessaires à la survie de celle-ci sont apprises.
L'éducation apparait en quelque sorte comme la culture se transmettant,
se perpétuant, s'actualisant dans une nouvelle
génération. » Toute communauté tend
à sauvegarder et à transmettre ses caractères culturels et
intellectuels à sa descendance. Dans cette perspective, les parents
s'efforcent de transmettre à leurs enfants la culture et les conduites
nécessaires à leur survie.
Pour ce qui est de l'éducation comme processus de
socialisation, DURKHEIM E. (1957, p.153) trouve
que « l'éducation est l'action exercée par les
générations adultes sur celles qui ne sont pas mûres pour
la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez
l'enfant un certain nombre d'états physiques, intellectuels et moraux
que réclament de lui et la société politique dans
l'ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement
destiné. » De ce deuxième sens, nous pouvons dire
que les adultes ne doivent ménager aucun effort pour que les jeunes
acquièrent des comportements acceptables par les autres membres de la
société en général et de la famille, en
particulier.
Pour DURNING P. (1995, p.36) l'éducation est
« l'action d'élever et d'éduquer un ou des enfants
mise en oeuvre, le plus souvent dans les groupes familiaux par les adultes, les
parents des enfants concernés. » L'éducation est
une formation lente et continue, une formation au niveau professionnel, au
niveau des habitudes, de la pensée ; elle permet à l'homme
de tenir sa place au cours de son existence et d'assurer les
responsabilités personnelles et sociales dans le milieu où il
vit.
Dans la famille, les parents sont les responsables de
l'éducation qui doivent exercer sur leurs enfants, une éducation
qui les conduit d'étapes en étapes vers l'autonomie de l'adulte.
C'est pourquoi nous avons emprunté la définition du
Dictionnaire encyclopédique de pédagogie moderne (1994,
p.217) qui dit que « l'éducation est l'ensemble des moyens
par lesquels l'enfant est aidé dans son épanouissement et dans
l'acquisition des capacités, des modes de comportements, de valeurs
considérées comme essentielles par le milieu humain où il
est appelé à vivre.» Loin de contraindre l'enfant
à suivre une ligne tracée, l'éducateur doit plutôt
l'aider à s'épanouir et développer ses
potentialités. Cet épanouissement et développement doivent
être orientés et contrôlés par les parents.
Les contacts parents-enfants sont nécessaires dans la
famille pour qui ces derniers puissent copier le bon modèle et recevoir
une affection parentale suffisante afin d'être mieux
développés moralement, intellectuellement et être utiles
à la société. Ainsi, les parents doivent être
là pour guider l'enfant, et ne pas lui permettre de céder
à certains désirs fantaisistes. L'éducation est une
transmission des connaissances dans le but de préparer l'enfant à
pouvoir prendre plus tard sa vie en main, à gérer convenablement
ses biens, à être respecté dans la société,
à faire honneur à ses parents età transmettre à son
tour son éducation à ses enfants.
1.7. Relations
familiales
L'étude des relations familiales est complexe
de façon qu'on ne puisse pas ignorer l'éclaircissement de ce
concept dans ledit travail. Les relations familiales sont indépendantes
de l'éducation des enfants puisque le rôle de la famille est avant
tout éducatif. C'est pour cette raison que l'éclaircissement du
concept «relations familiales » a
été nécessaire. Pour définir ce concept, il
convient de partir du sens de chaque terme qui le compose. La relation
veut dire lien, rapport entre des choses ou des personnes. Le lien c'est ce qui
sert à attacher, ce qui unit des personnes. La famille, ensuite
c'est l'ensemble des personnes d'un même sang vivant sous le même
toit et plus particulièrement le père, la mère et les
enfants. Il y a donc deux critères précis du lien familial:
même sang et toit commun. En fait, c'est la coexistence de deux groupes
d'êtres humains (les parents et les enfants) ayant entre eux un rapport
de géniteurs à descendants qui définit le mieux ce groupe
social si particulier qu'est la famille. La coexistence sous le même toit
et le lien du sang qui définissent la famille ne suffit pas à en
unir les membres. Le véritable ciment de toute cellule familiale c'est
l'amour réciproque de ceux qui sont appelés à vivre
ensemble. C'est à partir alors de cet amour réciproque que vont
naitre les relations familiales.
On peut, en gros, comme nous venons de le faire en haut,
distinguer deux groupes dans la famille : les parents et les enfants,
c'est la structure des relations qui s'établissent entre eux et à
l'intérieur de chacun d'eux, entre les éléments qui les
constituent que nous avons étudiée ici. Cette structure et la
qualité des relations familiales varient en fonction du caractère
et de l'équilibre de ces éléments constituants. Cette
idée est soutenue par POROT M. (1979, p.9) pour
qui : « que l'un de ces deux groupes ne soit pas
équilibré, parce qu'un ou plusieurs de ceux qui le composent en
fausse l'harmonie interne, et tout sera troublé. »La
complexité des actions, des réactions et des interactions
à l'intérieur d'une cellule familiale interdit d'envisager des
relations familiales-types, idéales ou parfaites, que l'on pourrait
étudier dans l'absolu, disséquer pour ensuite en étudier
de façon quasi expérimentale les variations possibles.
Selon POROT M. (1979, p. 10), c'est dans les relations
familiales que l'enfant va construire sa personnalité à partir
des échecs et des succès. En plus, « les
petites blessures subies en familles, les renoncements nécessaires
à des exigences affectives excessives, les minimes injustices, les
limitations obligatoires de son égoïsme, prépareront
l'enfant aux exigences analogues et moins tempérées de sa vie
d'adulte.» En réalité, le drame familial semble se
jouer entre trois personnages essentiels : le père, la mère
et l'enfant et quelques figures comme les grands-parents, les domestiques, les
oncles, les tantes, etc. Mais un quatrième personnage n'en a pas moins
d'importance que les trois premiers : c'est le foyer. Selon
également POROT M. (1979, p.11), le foyer est explicité comme
suit : « Le foyer, avant tout fondé sur le
couple parental est un être spirituel, vivant avec le passé, le
présent et un avenir qui influencent profondément les relations
qui s'établissent entre seséléments
constituants. » Il reste à préciser le rôle
joué par chacun des quatre personnages qui composent la
société familiale, donc les relations qui les unissent. Comme il
n'y a pas de société viable sans équilibre permanent entre
l'amour et l'autorité, entre la rivalitéet la solidarité,
ces quatre rôles sont respectivement tenus par ces quatre
personnages : la mère, le père, les enfants et le foyer. En
effet, le père doit incarner l'autorité, la mère incarne
l'affection (amour), les frères et soeurs la rivalité et le foyer
la solidarité.
Cependant, le rôle essentiel de chacun n'est pas un
rôle exclusif. La mère doit avoir aussi autorité sur ses
enfants et le père les aimer. Mais les enfants n'ont pas
l'autorité sur leurs parents, ils doivent seulement leur obéir et
les respecter. Nous avons insisté sur le rôle essentiel et
primordial de chacun des membres de la société familiale parce
que, souvent, les problèmes affectifs et familiaux trouvent leurs
sources dans la méconnaissance des rôles joués par chacun
des membres de la famille.
A la base de beaucoup de troubles affectifs infantiles ou
adultes, il n'y a souvent pas autre chose que l'insuffisance, l'excès
ou la méconnaissance des rôles de chacun, dont les
conséquences sont plus ou moins bien tolérées et
compensées par les enfants. Ceci est affirmé par POROT M (1979,
p.11) de cette manière :« Quand la mère doit
prendre dans la famille des décisions désagréables devant
lesquelles recule la veulerie du père, quand le père doit
consoler en secret l'enfant désespéré par
l'indifférence d'une mère qu'il aime, quand le foyer
dissocié se révèle à l'enfant, non plus comme
l'école de la solidarité affectueuse, mais celle de la haine
larvée ou ouverte, quand la rivalité des frères et soeurs
devient tyrannie et injustice, avec ou sans complicité parentale, alors
on peut dire que les rôles étant intervertis, personne ne remplit
le sien et chacun remplit mal celui de l'autre. »
Parler des relations humaines, c'est évoquer des
rapports au sein d'un groupe. Il existe alors des relations dites horizontales,
d'échanges, de dialogues ou de réciprocités. Retenons,
à toutes fins utiles, que dans ce genre de relations, tout le monde est
sur le même pied d'égalité et que chacun des membres
amène sa contribution pour la mise en commun. Selon POROT M (1954,
p.235), «la qualité des relations familiales détermine
pratiquement l'avenir de l'enfant. Saines, elles atténuent les
traumatismes psychologiques les plus douloureux ; médiocres, elles
amplifient les minimes entre eux.» Ce sont des relations de
collaboration et d'aide qui s'avèrent fondamentales dans
l'intégration psychoaffective des enfants en général et du
fils unique en particulier.
En gros, nous avons utilisé ce concept pour mieux
caractériser la famille aux relations normales et harmonieuses, en
tenant compte d'une unicité du fils dans une famille comptant une
progéniture à majorité féminine et en prenant
d'office les rôles joués par chacun des membres de la
société familiale.
En définitive, les concepts, une fois
élucidés permettent au chercheur et aux lecteurs de comprendre le
travail. En effet, les concepts sont tous élucidés en donnant des
significations appropriées à chacun d'eux. Ainsi, des
définitions opérationnelles ont été données
à ceux-ci pour montrer le sens dans lequel nous les avons
utilisés. Puisque ces concepts tournent autour de la famille, il s'est
avéré nécessaire d'évoquer quelques
généralités sur la famille burundaise telles que ses
attentes, sa structure, les rôles de l'enfant et ceux des parents.
CHAPITRE II: GENERALITES
SUR LA FAMILLE
Au Burundi, la famille est fondée dans le but
d'atteindre quelques attentes telles que l'attente procréatrice et
l'attente sociale. Dans le système patriarcal, les hommes jouent des
rôles différents de ceux qui sont remplis par les femmes. Dans la
famille, l'enfant est attendu par le couple et son arrivée apporte
l'honneur à la famille ; il donnera le statut définitif de
la mère et héritera la richesse familiale. Les parents sont,
à leur tour chargés d'éduquer leurs enfants en incarnant
l'autorité et l'amour paternels et maternels.
2.1. La famille et ses
attentes
Traditionnellement, la famille est le résultat du
mariage fait par deux individus de sexes différents dans le but de
procréer. Cependant, il existe aujourd'hui des couples homosexuels qui
s'unissent pour le plaisir et non pour la procréation. La naissance des
enfants, chaleureusement attendus par les parents et l'entourage assure
l'intégration du couple dans la société. Ainsi, le
mariage est acte social et son résultat est aussi attendu dans la
société.
2.1.1. Attente
procréatrice
La mort emporte inévitablement les êtres
humains, mais l'humanité se perpétue parce que les enfants
naissent chaque jour. Au-delà des seules exigences de survie de
l'espèce, l'amour conjugal voit dans l'enfant à mettre au monde
et à élever la première oeuvre commune. C'est ce qui a
été exprimé par BIGANGARA J.B. dans cette
définition du mariage (1986, p.113) :«C'est la
cohabitation volontaire et stable de deux personnes de sexes différents
après accord et entente de leurs familles en vue de la
procréation et de l'éducation des enfants, d'un
épanouissement dans l'amour et dans l'aide mutuelle.» Parmi
les objectifs visés par le mariage, selon cette définition, le
plus important, c'est la procréation dans laquelle découle
l'éducation des enfants. Tel est l'avis de NAVAS J. et son équipe
(1977, p.84) qui affirment qu'«au Burundi, le but du mariage reste la
procréation, non seulement pour des raisons économiques et
sociales, mais aussi pour se perpétuer dans la descendance.»La
stérilité reste une des causes du divorce dans bon nombre de
sociétés.
Au Burundi, lors des cérémonies du mariage,
des souhaits sont adressés aux époux pour se procréer.
Ainsi «urakagira inka n'ibibondo» c'est-à-dire «
Que tu aies des vaches et des enfants» est un des souhaits le
plus beau qu'on adresse à un Burundais. Traditionnellement, les
Burundais pensent que la première richesse est celle d'avoir les enfants
comme l'a souligné BIGANGARA J.B. (1986, p.92) quand il dit que
«l'enfant est le trésor, le plus précieux mais aussi
délicat». Pour les Burundais, il est heureux le couple qui a
des enfants, car selon eux, le couple est honoré et respecté par
l'entourage grâce à sa progéniture.
2.1.2. Attente sociale
Les besoins économiques et les contraintes
socio-familiales sont parmi les facteurs poussant l'homme Burundais à se
marier. Après le mariage, les deux partenaires sont appelés
à être solidaires dans une situation où ils font face
à plusieurs épreuves à savoir : assurer le pain
quotidien de sa descendance, garantir l'intégrité du groupe, etc.
Nous trouvons une illustration de nos propos dans l'encyclopedia Universalis
(1975, p.1011) qui l'exprime ainsi : « Le mariage qui fonde la
famille et engage l'avenir en intégrant le passé, reste un acte
décisif où l'individu n'est pas le seul en cause mais où
s'expriment les mobiles profonds du groupe.» Le mariage est un
contrat solidement cimenté et fortement étayé par un
ensemble de pressions socioculturelles.
D'une façon particulière, chacun a une
motivation qui le pousse à se marier mais celle-ci varie d'une
société à l'autre, puisque le mariage remplit une attente
sociale, comme le suggèrent, ainsi, les propos de BOUDON R. et
LAZARSFELD P. (1965, p. 98) :«La famille est le premier lieu
où se développent les relations sociales et où se
transmettent les connaissances et le savoir-faire social lié à
chaque genre. C'est au sein de la famille que les enfants acquièrent
leur identité, une identité qui détermine ce qui est
socialement acceptable ou non.» La famille est
considérée comme une source de connaissances sociales de base.
Parmi les attentes sociales remplies par la famille, nous pouvons signaler le
rôle des figures parentales dans la construction de la
personnalité de l'enfant et dans sa socialisation.
En milieu rural, la majorité des familles vivent de
l'agriculture et utilisent des techniques de production traditionnelles et les
tâches sont réparties par référence à la
tradition et aux préjugés qui ont influencé la division du
travail entre sexes. Pour BAWIN B. (1996, p.34), «le mariage entraine
une division du travail entre les hommes et les femmes.» A travers
ses propos, nous remarquons que le système familial tend à
différencier les rôles sur la base de la
complémentarité. Cette structure bipolaire des rôles en
fonction du sexe joue un rôle déterminant dans la formation de la
personnalité chez l'enfant et dans sa socialisation.
2.2. Le caractère
sexiste chez l'être humain
Le désir de choisir le sexe de l'enfant est
pratiqué depuis longtemps. De tout temps, les êtres humains ont eu
recours à des méthodes variées et quelquefois à des
croyances pour choisir le sexe de leur descendance, avec plus de
préférence du sexe masculin.
2.2.1. Préférence
du sexe masculin chez les Burundais
Même si les Burundais préfèrent une
progéniture nombreuse, ils ne sont pas très heureux lorsque leur
descendance est du même sexe. Chaque Burundais désire une
progéniture variée, c'est-à-dire les garçons et les
filles. Dans certaines sociétés comme au Burundi, il existe des
croyances mises en place pour sélectionner le sexe des enfants. C'est la
raison pour laquelle on interdit aux jeunes non encore mariés et aux
mariés qui n'ont pas encore d'enfants de deux sexes de manger la rate.
Par exemple, «kirazira kurya inyama y'impindura utaragira imiziha
yose», c'est-à-dire «il est interdit de manger la
rate sans qu'on n'ait encore des enfants des deux sexes». En Kirundi,
la rate est appelée «impindura» du verbe
«guhindura» qui veut dire changer. On croit que celui ou
celle qui en mangerait sans qu'il ait encore des enfants de deux sexes aurait
uniquement des enfants du même sexe.
Même si les Burundais préfèrent avoir les
enfants de deux sexes, ils ont une préférence plus marquée
pour les garçons. Dans ce cas, on peut dire que la solidarité
familiale dépend non seulement de la fécondité de la femme
mais aussi de la naissance des garçons. Le garçon se mariera et
multipliera la famille, ce qui n'est pas le cas pour la fille qui doit
plutôt partir s'installer dans la famille de son mari. Ainsi, certains
adages de la langue burundaise qualifient, la puissance du garçon comme
«umuhungu ni igikingi c'irembo», qui veut dire « le
garçon est un pilier de la maison» qui signifie que c'est le
garçon qui assure la sécurité de la maison; et une moindre
importance accordée aux filles comme «Umukobwa ni akarago
k'abaraye», c'est-à-dire, «la fille est une natte
pour le logement des visiteurs», pour dire que la fille n'a pas un
domicile fixe, elle peut déménager d'un moment à
l'autre. La défense et la protection de la famille sont
assurées par les parents de sexe masculin. Traditionnellement,
lorsqu'une femme venait de mettre au monde; pour annoncer qu'il naissait un
garçon, on s'exclamait : «Nibamukamire»,
c'est-à-dire, «Qu'on traie pour lui». Quand il
s'agissait d'une fille, on ne disait rien, pour signifier qu'on était
désolé.
2.2.2. La sélection du
sexe des enfants chez les Asiatiques et les Européens
Cette préférence pour les garçons se
retrouve au Burundi comme ailleurs dans d'autres pays. Ceci s'observe à
partir des procédés magiques qui ont été
utilisés pour exprimer le sexe de l'enfant souhaité. Les
procédés mis en place sont liés à des croyances
minimisant le sexe féminin et rendant la fille inférieure au
garçon suite à la division du travail. Ainsi, selon ANTHONY E.J.
et KOUPERNICK C. (1970, p. 160), «il semble que les Arabes se
désolent quand une femme donne le jour à une fille. Les Juifs
orthodoxes de leur coté remercient Dieu dans leur prière de
n'être pas nés femmes.» Selon les divers proverbes de la
sagesse asiatique tirés dans une publication de l'ONU (2007, p.11),
«avoir un filsest de bonne économie et de bonne politique, et
serait aussi essentielle que se nourrir au moins une fois par jour».
Comparée à «un lever du soleil dans la demeure des
dieux», la naissance d'un garçon donne lieu à de
nombreuses célébrations. Selon la même source, pour les
filles, en revanche, les axiomes sont bien différents : en arabe,
Abu-banat (père de filles) est une insulte. De même selon
un adage indien, «élever une fille c'est arroser le jardin du
voisin.»
Le concept de préférence pour les garçons
existe sous différentes formes et dans de nombreuses cultures. Il
incombe souvent aux fils de prendre soin de ses parents vieillissants et de les
soutenir durant leurs derniers jours. Cette préférence pousse
les êtres humains à avoir recours à des
procédés magiques pour exprimer le sexe souhaité de
l'enfant à moitié. Selon SPENCER C. et al. (2006, p.187), «
dans l'Europe médiévale, les futurs parents devaient placer
un marteau sous leur lit pour les aider à concevoir un garçon ou
une paire de ciseaux pour concevoir une fille.» Les pratiques
basées sur la croyance ancienne que le sperme du testicule droit
engendre une descendance mâle alors que celui du testicule gauche
engendre des femelles étaient aussi efficaces. Selon également
SPENCER C. et al. (2006, p.187), « dansla Grèce
ancienne, les hommes devaient s'allonger sur le coté droit
pendant les rapports sexuels pour concevoir un garçon. Jusqu'au 18e
siècle, les hommes européens devaient éliminer leur
testicule gauche pour augmenter leurs chances d'avoir un héritier
mâle».
Dans certaines cultures, les efforts pour contrôler le
sexe de la descendance prennent un aspect plus sordide : l'infanticide
des filles. Plus récemment, selon SPENCER C. et al. (2006, p.187),
« l'avortement en fonction du sexe a remplacé bon nombre de
filles. L'amniocentèse et l'échographie sont devenues des
entreprises lucratives qui permettent une détermination prénatale
du sexe.» Selon la même source, les études
réalisées en Inde montrent que des centaines de milliers de
foetus seraient avortés chaque année en raison de leur sexe
féminin.
2.3. La structure
patriarcale
Le patriarcat est une organisation familiale et sociale
basée sur l'autorité du père. Il est un système
social dans lequel l'homme, en tant que père, est dépositaire de
l'autorité au sein de la famille ou plus largement au sein du clan.
Ainsi, le statut social du père diffère de celui de la
mère dans une société patriarcale.
2.3.1. Le statut social du
père
En tant que système de structure et de relations
sociales, le patriarcat fait que le travail soit subdivisé entre les
hommes et les femmes. Le pouvoir est détenu par le père au sein
d'une famille. Tout le trésor familial est aux mains du père car
il est le chef de la famille. C'est lui qui détient la parole dans
toutes les cérémonies familiales. Certaines expressions montrent
sa puissance par rapport aux autres membres de la famille. Par exemple, on dit
que « Inkokokazi ntibika isake iriho» pour dire que la
femme ne peut pas prendre la parole en présence de son mari.
Le père de la famille est aussi souverain, celui qui
assure la sécurité et le développement familial. Ainsi,
les Burundais disent que « Urugo rutagira umugabo
ntakitarukengera», pour dire que seuls les hommes luttent contre le
mépris et garantissentl'honneur à la famille. Dans la
société patriarcale, les enfants, fils et filles, ne
reçoivent pas la même éducation. L'éducation des
fils est surtout à la charge du père, qui les prépare
à être des hommes honnêtes, courageux, fidèles, les
hommes de conseil, de parole, qui savent acquérir honnêtement des
richesses. L'éducation des filles est assurée par la mère
qui les prépare surtout à respecter leurs futurs maris. A ce
moment-là, à partir des travaux de chacun des parents, le fils
s'identifie à son père, la fille à sa mère.
2.3.2. Le statut social de la
mère
Certaines pratiques liées à la tradition
patriarcale discriminent la femme au Burundi comme ailleurs. Considérant
la réalité burundaise, quelques exemples montrent combien la
femme est victime des préjugés sociaux entretenus par le
système patriarcal. Ainsi, selon le dicton burundais, on dit que la
fille ne siffle pas, car c'est porter malheur à son père. Il est
interdit aux hommes de coucher avec leurs femmes la veille de la pêche,
de la culture des abeilles car ils n'y réussiraient pas. D'autres
expressions dévalorisantes sont utilisées dans le but de salir
l'identité de la femme. Quand on dit, par exemple, «umugore
ntabanga», pour dire qu'on ne peut entretenir un secret avec une
femme. La société patriarcale a mis en place tout un ensemble
d'attributs sociaux qui favorisent l'homme en discriminant la femme. Pour
assurer le respect de la femme envers l'homme par exemple, selon le dicton
burundais, la culture interdit à la femme burundaise d'appeler le mari
par son nom, de le fixer du regard, d'utiliser certains instruments comme
Inanga, Intahe qui signifient respectivement la cithare, la baguette
des notables qui symbolisent la puissance de l'homme en famille.
Cette discrimination faite aux femmes se retrouve aussi dans
d'autres pays du système patriarcal. En effet, une étude
réalisée au Kenya (1998, p.24) indique que «les
femmes sont des mineures tout au long de leur vie, elles changent de tuteur en
passant de leurs pères à leurs maris et elles sont des
perpétuelles déshéritées.» Les femmes ont
été discriminées depuis longtemps même si elles
cherchent à s'émanciper aujourd'hui. Selon MILL J.S.(1975,p15),
«s'il y a un mot de vrai dans l'histoire, les femmes ont
été de tout temps sur presque toute la surface du globe d'humbles
compagnes, des jouets, des captives, des servantes, des bêtes en somme
sauf dans quelques sociétés heureuses et très
civilisées où elles sont littéralement réduites
à l'état d'esclaves même dans les pays où elles sont
le mieux traitées, les lois leur sont en général
défavorables sur presque toutes les questions qui les concernent au plus
haut point.» Selon la division des tâches, les hommes se
considèrent comme les seuls responsables des biens familiaux mais en
réalité les femmes contribuent beaucoup au développement
de l'économie familiale.
2.3.3. Le système
patriarcal à la base des inégalités entre les sexes
La société burundaise est patriarcale, la fille
est appelée à fonder un foyer ailleurs, elle est donc
étrangère à sa propre famille. Le droit aux biens de la
famille reste gérer par les fils, seuls qui sont appelés à
élargir la famille. Concernant le droit à la
propriété foncière, seuls les fils en ont le droit, car
la vocation successorale est patrilinéaire au Burundi et met en avant le
sexe masculin. Voici ce qu'affirme, ici, HAVUGIYAREMYE C. (1999,
p.46) :« Le patriarcat est la forme d'organisation familiale
fondée sur la parenté par les mâles et sur la puissance
paternelle. Dans une telle famille, les moeurs sont patriarcales,
l'autorité du père est illimitée et sa parole est
souveraine. La tradition veut que la femme soit soumise à
l'autorité du mari et seul le garçon est considéré
comme pouvant assurer la descendance familiale, qui commande et dirige. Bref,
son autorité est le pivot des relations au sein du groupe
familial.» Cette puissance que la tradition patriarcale
confère à l'homme lui permet d'être le commandant
suprême au sein de la famille. Jusqu'aujourd'hui, les hommes restent les
seuls détenteurs du pouvoir familial.
Selon D'EAUBONNE F. (1977, p.14), «les auteurs qui
utilisent le masculin, quand il s'agit d'une découverte féminine,
se conforment à la règle grammaticale du sujet collectif au
masculin : 300.000 femmes avec un petit garçon s'accordent au
masculin pluriel.» Pour montrer la puissance du masculin au
féminin, les auteurs préfèrent utiliser le masculin. Tout
cela montre combien la division des tâches est à la base des
inégalités entre les sexes dans les sociétés
à système patriarcal. En effet, les femmes sont moins nombreuses
sur le terrain de travail et rares dans les organes de décision.Apartir
des théories de MILL J.S ci-haut cité, nous comprenons que les
femmes et les hommes sont inégaux. Une autre forme
d'inégalité se trouve au niveau des salaires. L'exemple est celui
de la Corée du Sud où les femmes salariées du secteur
manufacturier gagnent 57% du salaire de leurs collègues masculins.
2.4. La valeur et le
rôle de l'enfant dans la famille
Dans la littérature burundaise, on entend chanter et
dire les berceuses et les mots en s'adressant à une femme qui a mis au
monde.D'abord l'enfant est considéré comme une source d'honneur
à la famille. Ensuite, c'est lui qui donne le statut définitif de
la mère et qui la fait respecter. Il est enfin celui qui
héritera, après la mort de ses parents, la richesse familiale.
2.4.1. L'enfant comme source
d'honneur à la famille
L'enfant est une source de joie dans la famille. Son absence
peut parfois être à l'origine de mésententes entre les
conjoints et toutes leurs familles en général. Ainsi, BIGANGARA
J. B. (1986, p.143) explique les conséquences de cette absence :
«L'enfant offre un plaisir pour la famille, tandis que son absence
constitue une pomme de discorde, voire même l'origine de la dislocation
de la famille.» L'enfant est en outre porteur du bonheur familial car
celui-ci crée un climat de gaité dans la famille. C'est pour
cette raison qu'un couple sans enfant paraît comme un couple malheureux,
sans joie. Mais la valeur que les Burundais traditionnels accordaient à
l'enfant était sociale et économique. S'ils souhaitaient
beaucoup d'enfants, c'est parce qu'ils savaient que ceux-ci les aideraient une
fois devenus adultes et ils voulaient être honorés par les autres
parce que le nombre élevé d'enfants était parmi les
facteurs de prestige. C'est ce qui a été affirmé par
BIGANGARA J.B. (1986, p.92) quand il écrit
ceci : «L'enfant est un don donné dans
l'intimité de l'amour conjugal, il est conçu dans le sein
maternel. Ce don est le trésor, le plus précieux mais aussi
délicat.» Un homme heureux était celui qui avait
beaucoup d'enfants et plusieurs vaches. Pour NOTHOMB D. cité par
NIYIBIZI S. (2003, p.12), «les hommes ne sont pas vraiment dignes
d'honneur et de respect que dans la mesure de l'abondance de
progéniture.» Le nombre d'enfants dans la famille burundaise
est un aspect qui préoccupait beaucoup de gens car on attachait trop
d'honneur à une famille nombreuse qu'à une famille
réduite.
Malgré les changements observés tant au niveau
de la mentalité des gens qu'au niveau de l'économie, l'enfant
garde une place de choix dans la famille burundaise. Par ailleurs, les enfants
sont objets de prestige et d'orgueil pour les parents. Pour ERNY P. (1968,
p.84) « être sans enfant, c'est comme être nu, sans
défense ni prestige.» Traditionnellement comme aujourd'hui, le
but primordial de se marier, pour les Burundais, reste la procréation.
Les Burundais considèrent que le riche sans descendance travaille pour
les autres, et celui qui travaille pour les autres n'a pas d'honneur.
2.4.2. L'enfant et le statut
définitif de la mère
Une fonction importante de l'enfant est que celui-ci donne un
statut définitif à la mère. C'est pour cela d'ailleurs que
le premier enfant est impatiemment attendu. Au Burundi, l'une des attentes d'un
couple conjugal était la procréation. A ce sujet ERNY P. (1968,
p.84) explique ce qui suit : « Une femme enceinte est une femme
heureuse. La naissance du premier enfant est un événement capital
plus important que l'établissement de la vie conjugale.» La
femme est considérée grâce à sa
fécondité. Lorsqu'une femme est sans enfant, elle n'est pas
considérée dans la société burundaise. ERNY P.
(1968, p.84) décrit la situation d'une femme africaine stérile en
ces termes : « Elle deviendra jalouse du bonheur des autres et
sera bientôt perçue comme un être malfaisant.»
Dans le Burundi traditionnel, la femme stérile n'a aucune raison
d'être chez son mari. La stérilité constitue presque
toujours un cas de divorce. Donc, avoir un enfant pour la femme burundaise
garantit son installation dans la famille de son mari. Pour ROZIER R. (1975,
p.93) «la femme tant qu'elle n'a pas encore procrée est
considérée comme quelque chose de peu d'importance, ou
plutôt d'inachevée. Par la suite, plus elle a des enfants, plus
son importance sociale croîtra.» Grâce à l'enfant
qui naît, la femme réalise pleinement son intégration
sociale au sein de sa belle-famille.
Dans le Burundi traditionnel, non seulement l'enfant
intègre officiellement la mère dans la société,
mais aussi et surtout la femme acquiert le droit à l'honneur
réservé à d'autres mères. La femme est
honorée à partir de sa descendance. C'est pourquoi dans les
différentes berceuses, la mère évoque souvent des
sentiments de profonde reconnaissance envers l'enfant qui l'a hissée au
rang des mères. Selon RODEGEM F.M. (1973, p.176), en berçant son
bébé, la femme burundaise dira: « Hora se ndakwinginge,
wanshize mu bavyeyi, kera narabatinya» qui signifie
«Calme-toi, toi qui m'a hissée au rang des mères, jadis
j'avais peur de les approcher». Toutefois, l'intégration
devient plus réelle lorsque la femme met au monde des enfants de sexe
masculin. Le motif de cette assurance est que lorsqu'elle a des fils, ces
derniers prendront le nom de la famille et la mère qui est liée
fortement à sa progéniture est véritablement
intégrée dans sa belle-famille.
2.4.3. L'héritage de la
richesse familiale
Le rôle de l'enfant ne se limite pas
à la seule source d'honneur à la famille et au statut
définitif de la mère, il sert également comme
héritier de la famille. Dans la société burundaise,
personne ne souhaite qu'après sa mort ses richesses tombent dans les
mains d'autres enfants que ceux de sa descendance. Cela explique pourquoi les
filles ne sont pas considérées comme des enfants de leur propre
famille mais de la famille de leur mari. Le sexe masculin est beaucoup
apprécié par les Burundais. Selon NAVAS J. et al. (1977, p.52),
« le garçon unique héritera de la
propriété familiale et pourra engendrer des garçons et
filles que son père n'a pas eu, assurant ainsi la continuité de
la lignée». Ces auteurs trouvent que certains parents
préfèrent une famille pauvre avec un enfant mâle
qu'à une famille riche avec des filles seulement.
D'après SABIMBONA S. (1989, p.32), on distingue deux
types d'héritiers: «Traditionnellement, il existe deux
catégories d'héritiers : les héritiers
légitimes et les héritiers irréguliers. Les
héritiers légitimes sont ceux qui sont unis au défunt par
un lien de parenté légitime. Les héritiers
irréguliers sont des successeurs qui ne sont pas unis au défunt
par un lien de parenté.» En analysant ces deux
catégories d'héritiers, nous constatons que les fils constituent
les héritiers légitimes. Ce système de succession
émane de la tradition patriarcale qui attribue au garçon
uniquement le droit à la succession en minimisant la valeur de la fille.
Comme le souligne le PNUD (1999, p.21) l'homme et la femme burundais n'ont pas
les mêmes droits : « Juridiquement, sous certains aspects,
les femmes burundaises ne jouissent pas pleinement des mêmes droits que
les hommes.» Par exemple, les filles burundaises ne sont pas
envoyées à l'école au même rythme que les
garçons; car certains parents pensent que même si les filles
fréquentent l'école, il n'y aura pas d'intérêt pour
eux. Par conséquent, les droits d'accéder aux différentes
fonctions publiques ou privées deviennent limités. La vocation
successorale est patrilinéaire et consacre le privilège de la
masculinité. En définitive, c'est la structure sociale qui est
à la base de cette inégalité. Ainsi, le patriarcat
favorise le sexe masculin.
2.5. Le rôle des
parents dans l'éducation des enfants
Les responsables de l'éducation restent en premier lieu
les parents en vue de préparer leurs enfants à leur vie future.
Par ailleurs, LAFON R. (1979, p.603) montre le rôle de chacun des membres
de la famille de la manière suivante: «On ne peut pas
concevoir les parents en famille sans placer dans la totalité plurale
qu'elle représente, à coté du père qui incarne
l'autorité et la force et la mère qui représente l'amour
et la faiblesse, la fratrie qui symbolise la rivalité et
l'amitié.» En effet, le père doit incarner
l'autorité, la mère à son tour incarnera l'amour.
Cependant, il faut retenir que le rôle de chacun n'est pas un rôle
exclusif.
2.5.1. L'autorité
paternelle
Dans les sociétés à
système patriarcal, le rôle du père de la famille reste
prépondérant. Les enfants attendent de lui l'autorité et
l'incarnation de la loi. Les enfants restent tranquilles lorsqu'il est
à la maison. Même si leurs rôles sont tous valables en
importance, le rôle du père diffère de celui de la
mère en qualité. Le rôle du père reste essentiel
dans la vie de ses enfants. Il apparaît en outre comme le modèle
à imiter. DODSON F. (1976, p.123) affirme que: «le petit
garçon d'âge préscolaire a besoin de contacts avec son
père afin de pouvoir imiter et assurer son identification au genre
masculin. La petite fille d'âge préscolaire a besoin de contacts
avec son père pour former l'image de son futur mari. Elle a besoin de
savoir que le premier homme de sa vie l'aime, pense à elle et
apprécie sa féminité de petite fille.» Les
contacts paternels aident le petit garçon à renforcer ses
qualités masculines et l'amour paternel assure l'espoir d'un meilleur
avenir pour la petite fille.
Aussi, cette autorité paternelle doit être
modulée. Pour POROT M. (1979, p. 158), «l'autorité du
père est sans doute le pivot de l'harmonie familiale. Mais quel
délicat réglage elle exige ! Les uns tiennent la main de
fer, les autres pour l'indulgence et la faiblesse et je crois que personne n'a
tout à fait raison. Au lieu de diriger l'enfant en lui imposant sa
manière de penser, de sentir, le père soucieux d'éducation
intelligente devrait faire abnégation de sa personnalité et
pénétrer dans les sentiments de son enfant comme s'ils
étaient les siens propres.»
Cependant, le père ne doit pas imposer brutalement ses
valeurs qu'il veut transmettre à ses enfants. Non plus l'autorité
du père ne se confond pas avec l'agression et la tyrannie. Le
père doit éviter la rigidité car autorité n'exclut
pas tendresse à l'égard des enfants. Aussi, MICHAUX L. (1972,
p.7) souligne l'importance de l'autorité: «Sans elle, ni la vie
sociale, ni la vie humaine ne seraient possibles.»Le rôle de
l'autorité est de régler les conflits, établir un ordre
propre et assurer la paix générale à l'intérieur
d'un système dans la vie des personnes. Enfin, son rôle est aussi
la formation de la personnalité comme le souligne, ici, ERNY P. (1973,
p.7) :«C'est la fonction paternelle qui a sur la formation de la
personnalité une incidence déterminante.» Pour assurer
le développement harmonieux de l'enfant, seule l'autorité du
père ne suffit pas, l'amour maternel doit aussi contribuer à
l'éducation de l'enfant.
2.5.2. L'amour maternel
Pour que l'enfant ait un développement harmonieux, la
mère doit s'y impliquer beaucoup. Elle doit donner une affection
à l'enfant si elle l'a reçue de la part de sa propre mère.
POROT M. (1979, p.155) indique qu'«une femme aimée et heureuse,
sans soucis majeurs pour son foyer a toutes les chances de donner à son
enfant une affection saine, sereine, équilibrée, sans
excès, ce que ne peut offrir celle qui soufre de la brutalité, de
l'indifférence, les mauvais maris font aussi les mères
abusives.» Il faut donc que la mère ait été bien
traitée pour qu'elle puisse donner à son tour cet amour à
son enfant.
L'amour maternel est nécessaire dans une famille car il
apporte une affection et crée un climat d'ambiance. Pour POROT M. (1973,
p.69), «l'amour maternel est à la fois bienveillance, tendresse
et compréhension, c'est-à-dire amour d'intuition, de
manifestation et d'acceptation...Cet amour n'est pas une fin en soi
destinée à la seule satisfaction maternelle. De sa
qualité dépendra l'affectivité future de l'enfant qui est
modelée par sa mère et cette influence persistera
indéfiniment dans le psychisme de l'enfant.» L'amour maternel
joue, pour l'enfant, un rôle sécurisant ce qui est indispensable
pour son développement psychoaffectif. L'amour et la personnalité
de la mère auront une influence déterminante sur l'avenir de
l'enfant.
L'absence ou l'insuffisance affective de la mère
représente, pour l'enfant, une véritable catastrophe en raison de
cette carence dont il est victime. L'excès d'amour maternel a
également des effets néfastes sur le développement de
l'enfant. Ceci est affirmé par MUCCHIELLI R. (1976, p.124) qui indique
que « l'enfant gâté au même titre que
l'enfant martyr, quoique dans une situation diamétralement
opposée aura plus tard un moi anormal, insuffisant ou perturbé,
générateur d'une existence malheureuse.» L'amour
maternel excessif gâtera l'enfant tandis que son insuffisance ou son
absence le rendra perturbé ou à être anormal. Si nous
disons que le père et la mère occupent une place capitale dans le
développement affectif de leurs enfants, il s'agit des parents qui
savent bien se comporter et qui se donnent corps et âme pour
éduquer leurs enfants.
La famille burundaise, dans sa structure, est fondée
sur le patriarcat. Ainsi, le rôle et le comportement de chaque membre
dépendent de cette structure sociale. Les attitudes affichées par
les parents au niveau de l'éducation des enfants diffèrent selon
le sexe de l'enfant. Au Burundi, lorsqu'il s'agit d'un seul fils dans une
famille comptant une progéniture à majorité
féminine, les parents traitent différemment les enfants. Ainsi,
le fils unique, lorsque sa fratrie est seulement constituée par les
filles, est beaucoup aimé, c'est un enfant roi et cher pour la
famille.
CHAPITRE III : LE
FILS UNIQUE DANS LA FAMILLE BURUNDAISE
Au Burundi, la famille est heureuse si elle a beaucoup
d'enfant, filles et garçons. Selon les enquêtés de NAVAS
J.et al. (1977, p.52), « avoir un seul enfant, c'est comme avoir un
seul oeil : s'il se ferme, vous devenez aveugle». Comme les
couples possédant un seul enfant, les couples à fils unique ne
peuvent pas être tranquilles. Le fils unique est un objet à la
fois de joie et d'angoisse en raison de la mortalité infantile. Sa
fratrie reste les filles. Les parents affichent alors une tendresse excessive
et l'entourage reste aussi attentif à l'égard de celui-ci.
3.1. Le fils unique dans
la famille
Le phénomène «fils unique»
dans une famille peut se produire et entraîner des attitudes nouvelles
entre les membres de cette famille. Le fils unique est pris dans le
réseau familial comme un enfant roi, qui gardera et qui héritera
toute la richesse familiale. Il bénéficie des soins et des
cadeaux particuliers et il est continuellement surprotégé par ses
parents. Sa fratrie est faite de ses soeurs et celles-ci l'aideront à
développer sa personnalité, il jouera avec elles et aura
l'occasion d'apprendre à vivre en harmonie avec les autres.
3.1.1. L'enfant roi
L'arrivée d'un enfant dans une famille est un honneur.
Les enfants sont souhaités mais le garçon est beaucoup plus
souhaité que la fille dans la société burundaise. ERNY P.
(1968, p.119) soutient cette idée : « L'homme qui a
procréé des fils ressemble au bananier qui a donné ses
fruits. Il peut mourir, par le truchement de l'enfant, le nom du parent
revivra, qui nommera l'enfant nommera les parents.» Un couple qui n'a
mis au monde que des filles n'est pas heureux car le couple est satisfait s'il
a procréé des fils et filles. La naissance du fils dans cette
famille apporte une joie intense aux parents, et celui-ci est beaucoup plus
aimé que ses soeurs. Il est traité, par conséquent, comme
un roi, car «Ubwiza bw'inka ni ukuba imwe»
c'est-à-dire «la beauté d'une vache est
d'être unique», disent les Burundais.
Tous les parents savent bien qu'il faut faire preuve
d'autorité si on ne veut pas faire de son enfant un petit roi exigeant
et trop gâté. L'enfant roi devient dominateur,
bénéficiaire du laxisme éducatif; il est celui que l'on
décrit habituellement comme le résultat d'un enfant impulsif,
opposé à toute autorité et sans aucun sens de discipline
et d'effort. L'enfant roi dominateur se conduit alors comme il a envie de faire
et sans aucune restriction, au gré de ses désirs et caprices qui
deviennent aisément confondus avec les besoins. L'enfant roi peut
être anxieux, davantage fragile, il affiche plutôt de fortes
tendances à l'anxiété et une insécurité
parfois chronique qui le conduisent à un important besoin vital
d'encadrement. Selon SILLAMY N. (1980, p.39) «sans autorité,
l'éducation se fait mal, la personnalité reste faible, le sujet
vit dans l'insécurité et
l'anxiété».L'autorité des parents envers les
enfants permet à ces derniers de bien se comporter, d'avoir une forte
personnalité en se sentant à la fois sécurisés et
sûrs d'eux-mêmes. La sécurité est assurée par
ses parents ou ses substituts. Comme le souligne BERNARD P. (1979, p.10),
«ce besoin de sécurité presque aussi vital que la
nourriture(...) est assurée par les deux parents ou un
substitut». L'enfant roi anxieux est donc celui qui souffre du
laxisme. L'enfant roi dominateur est caractérisé par
l'impulsivité et un égocentrisme. S'imposant comme roi et
maître dans tout, il veut que les membres de la famille lui doivent
obéissance et vénération.
Il faut toutefois retenir que peu importe ce degré
d'impulsivité, l'enfant roi conserve toujours les tendances au plaisir
et à la facilité. Plus l'intensité de l'impulsivité
devient élevée, plus l'enfant roi risque d'augmenter la
déviance de sa conduite et de se rapprocher ainsi de la
délinquance. Pour ce qui est de l'éducation de cet enfant, on
remarque une compétition entre ses parents pour devenir aux yeux de ce
dernier le parent le plus sympathique.
3.1.2. Le jeu du fils
unique
Etant donné que le jeu est un instrument qui permet
à l'individu de se divertir et de se détendre, il aide l'enfant
à développer en particulier son intelligence, son aptitude
physique, son affectivité et, de façon générale,
toute la personnalité est impliquée. Un enfant qui joue acquiert
des connaissances sociales comme le souligne TAP P. (1985,
p.57) :« Le jouet est le support d'apprentissages sociaux
multiples tout autant que le catalyseur des conduites de communication et de
fantasmes. Par lui, l'enfant s'approprie, intériorise les rôles
adultes, les modalités d'interaction entre les personnes, les
systèmes de règles instituées, les normes et les
valeurs.»Le rôle d'un jeu est de permettre la socialisation de
l'enfant et l'adaptation aux règles que celui-ci doit respecter pour
gagner la vie.
Concernant le cas du fils unique, ses compagnons sont les
filles et ses parents dans sa famille. Comme il ne parvient pas à jouer
avec ses parents, il doit jouer avec ses soeurs, c'est avec elles qu'il
établit des relations de tout genre. Or, dans les yeux de l'enfant, il
existe des jeux destinés aux filles et d'autres aux garçons. Le
fils unique est alors obligé de s'adapter aux jeux féminins et
ceux-ci peuvent comme conséquences modifier le genre masculin dufils.
Plus il joue avec ses soeurs, plus il a tendance à avoir le genre
féminin. Ainsi dit TAP P. (1985, p.57) :« Le jouet serait
ainsi un moule, un instrument de conformité, grâce auquel
s'opérerait, entre autre, la prise en compte des modèles de
comportements appropriés à chaque sexe.» Donc, les jeux
offrent à l'enfant les modèles de vivre. Les petites filles y
apprennent à être des femmes, les garçons à
être des hommes.
Le jeu facilite également l'ouverture au monde
extérieur. Etant donné qu'il joue avec ses soeurs, les jeux
féminins ne lui font pas totalement plaisir. Par conséquent, ce
fils éprouve une solitude pendant que ses soeurs jouent. Egalement, ses
soeurs l'ignorent du fait qu'il n'est pas adapté à leurs jeux.
Quelquefois, le fils unique est obligé de quitter sa propre famille
pour chercher les autres garçons afin de jouer avec eux.
3.1.3. Le fils unique et sa
fratrie
Le fils unique possède une fratrie qui est
constituée par les filles. Ces filles forment ensemble la fratrie du
garçon. Connaissant le rôle de la fratrie, ces filles facilitent
la socialisation du fils. Comme le souligne POROT M. (1979, p.
203), «la fonction essentielle des frères et soeurs est
donc de permettre la meilleurs socialisation possible de l'enfant. Cette
adaptation sociale sera obtenue par le passage de la rivalité à
l'amitié et à la coopération. Ces deux dernières
attitudes sont le terme habituel des relations entre frères et soeurs
ayant subi une évolution normale.»
Dans notre cas où la fratrie du fils unique est
constituée des filles, la rivalité naît de la part du
mépris que le fils affiche à l'égard de ses soeurs et de
la jalousie que les filles affichent à leur frère. Nous savons
avec POROT M. (1979, p. 221) que « (...) qu'il est bon ton pour les
garçons de mépriser les filles, êtres inférieurs,
tout en cherchant à leur plaire, et pour les filles de tenir les
garçons pour des brutes malpropres, tout en admirant et en jalousant
secrètement leur force.» Le fils unique se voit
intéressant au niveau de sa fratrie à cause de la satisfaction
immédiate de ses besoins ou tout simplement de l'amour profond des
parents. Mais, lorsqu'il termine une série de filles, la fille
ainée peut se sentir à la fois supérieure et
inférieure, et le garçon peut aussi éprouver un sentiment
d'infériorité. C'est ce qu'affirme POROT M. (1979, p.221) de
cette manière : « Une fille aînée, peut se
sentir à la fois supérieure parce qu'ainée, et
inférieure parce que fille. Un garçon peut développer un
sentiment d'infériorité réel du fait des remarques acides
et sans pitié de sa chipie de soeur.»
Selon le rang dans la famille, lorsqu'un garçon unique
précède plusieurs filles, il est satisfait de lui-même. Au
contraire, lorsqu'il est le benjamin, il risque d'être mou et
dévirilisé. Comme l'indique POROT M. (1979, p.221), «il
y a des familles où un garçon unique précède
plusieurs soeurs ; il est souvent satisfait de lui-même, parfois
insupportable car adulé sans cesse. Celui qui termine une série
de filles risque au contraire d'être mou, amorphe,
dévirilisé, faute d'avoir pu bénéficier de la
rivalité tonique et vivifiante d'un ou de plusieurs frères.
» Il est bon alors, dans une telle famille, que le garçon
unique soit l'aîné de la famille pour qu'il puisse être
satisfait. Les relations du fils avec ses soeurs préparent, dans une
certaine mesure, les futures relations sociales des hommes avec les femmes. La
vie quotidienne auprès de ses soeurs donnera au fils unique à la
fois une certaine aisance avec la femme qu'il épousera et du respect
pour elle. Le rôle primordial de la fratrie reste, en
général, la socialisation des enfants.
3.2. La fratrie et son
rôle dans la socialisation des enfants
Toutes les relations familiales s'établissent entre les
parents et les enfants. Plus le nombre d'enfants croît, plus les
relations entre eux deviennent, en quelque sorte, multiples. La
rivalité, l'égocentrisme, la haine, etc. sont les
caractéristiques essentielles des relations fraternelles. Ces
caractéristiques aboutiront à la naissance de la
solidarité, de l'affection et de l'amitié dont la fonction
essentielle est de permettre la meilleure socialisation de l'enfant.
3.2.1. La rivalité
fraternelle
Dans l'éducation des enfants, les parents
revêtent des qualités différentes. Les enfants
eux-mêmes jouent, entre eux, un rôle important dans la
socialisation. A ce propos, POROT M. (1979, p.69) note que « la
fonction essentielle des frères et des soeurs est de permettre une
meilleure socialisation possible de l'enfant. Cette adaptation sociale sera
obtenue par le passage de la rivalité à l'amitié et
à la coopération.» En peu de mots, les rapports entre
les enfants restent les rôles qu'ils joueront dans leur avenir. La
fratrie occupe alors une place primordiale dans l'éducation familiale.
Cependant, la fratrie incarne la coopération et la rivalité entre
les enfants en même temps. Les théories de MIALARET G. (1967,
p.209) font comprendre que « la rivalité est paradoxalement
l'élément central de la fratrie.»
La rivalité, la solidarité et d'autres relations
caractérisent les enfants dans une même famille. En tenant compte
du sexe des enfants, la différence attenue les rivalités
fraternelles excessives. A ce sujet, nous partageons l'avis de POROT M. (1979,
p. 220) selon lequel « la différence des sexes tempère
ce que pouvait avoir d'un peu excessives les relations fraternelles. Le
garçon sera toujours un peu jaloux d'un privilège accordé
à son frère parce qu'il est petit, alors qu'il acceptera beaucoup
mieux pour sa soeur parce que c'est une fille.» La présence
des garçons et des filles a un effet modérateur sur les
rivalités fraternelles.
La rivalité fraternelle est induite par la jalousie,
l'envie et le sentiment de compétition. La jalousie est un
sentiment qui se réfère à la peur de perdre, à
cause de quelqu'un, quelque chose qui a été gagné. ANGEL
S. (1996, p. 100) explique la jalousie comme suit : « C'est une
chose compliquée et qu'on ne peut occulter ; elle fait partie de
nous, même lorsqu'elle est fortement refoulée,
déplacée, sublimée,
intellectualisée.» : Par exemple, le cadet est un intrus
aux yeux de l'aîné qui va lui voler l'amour parental. Le cadet
aura comme envie le désir de bénéficier des biens de
l'aîné. Lorsque l'enfant est unique, il connaît des
conséquences suite à l'absence des frères.
3.2.2. L'enfant unique et ses
conséquences
L'enfant unique désigne le seul enfant né dans
une famille. Qu'il soit garçon ou fille, l'absence de frères et
soeurs engendre quelques conséquences pour un enfant. L'enfant unique
est un enfant privé de relations fraternelles et par conséquent,
son intégration sociale devient difficile ; car le rôle de la
fratrie est d'élargir le champ d'interactions et d'échanges dans
la famille et préparer l'enfant à affronter encore d'autres
relations avec le monde extérieur. Les relations qu'un enfant tisse avec
ses frères et soeurs lui aident à élaborer des attitudes
de sociabilité qui lui permettront plus tard de s'adapter dans la
société.
Traditionnellement, dans la société burundaise,
presque toutes les initiations se faisaient entre frères et soeurs.
L'absence de ceux-ci rendra l'enfant déséquilibré comme le
souligne NDIMURUKUNDO N. cité par NKESHIMANA G. (2005, p. 113) de cette
manière: «S'il n'y avait pas de fratrie, tous les enfants
burundais seraient des déséquilibrés.» Donc,
l'enfant, pour mieux se développer, a besoin d'être entouré
par d'autres enfants en particulier ses frères et ses soeurs.
La fratrie met en place la rivalité fraternelle qui est
un fait important dans la vie d'un enfant. En effet, les petites injustices,
les multiples renoncements, les légères vexations qui se font au
contact des frères et soeurs seront l'origine de la rivalité
fraternelle. Ainsi, par le passage de la rivalité à
l'amitié et à la coopération, l'enfant évolue vers
une meilleure adaptation sociale. L'absence d'autres enfants rencontrée
chez l'enfant unique prive celui-ci de l'expérience de découvrir
la haine survenant lors de la naissance d'un autre enfant et qui se
transformera plus tard en amour. C'est ce qu'affirme WINNICOTT D.W. (1978, p.
156) en ces mots : « En fait, les parents devraient se sentir
soulagés d'entendre, à la naissance d'un nouvel enfant,
l'expression directe d'un recule conscient et même d'une haine violente.
Cette haine se transformera peu à peu en amour lorsque le nouveau
bébé deviendra un être humain avec lequel on peut jouer et
de qui on peut être fier.» Une grande difficulté est
l'expression de la haine pour l'enfant unique.
L'égocentrisme de l'enfant doit ensuite céder
progressivement la place à une charité pour satisfaire aux
exigences de la vie en société. Au contraire, l'enfant unique
reste égoïste car il manque quelqu'un avec qui il va partager
l'amour. Ainsi, POROT M. (1979, p. 226) nous décrit la situation d'un
enfant unique en ces mots : « C'est un isolé, c'est un
enfant couvé parce qu'il est le plus souvent un enfant
égoïste et l'idéal parental qu'il intériorisera ne
pourra être qu'un idéal d'égoïste.»
La fonction essentielle des frères et soeurs reste la
socialisation, une adaptation sociale obtenue par le passage de la
rivalité à l'amitié et à la coopération.
Cette socialisation n'aura lieu qu'à la présence de la fratrie,
car l'enfant unique est un isolé, un égoïste. Il reste
solitaire et rien ne lui permet de développer un esprit communautaire,
le sens de la réalité sociale forgé au feu de la
rivalité fraternelle.
3.3. Traitement
psychosocial d'un fils unique
Comme l'enfant unique, le fils unique est aussi mis au centre
de toutes les attentions des parents. Il est souvent surprotégé,
ce qui lui confère un profond sentiment de sécurité et une
impression de toute puissance. Ses parents lui donnent un amour excessif suite
à son unicité. Egalement comme l'enfant unique, l'entourage du
fils unique est attentif pour son éducation. Ce dernier est l'objet
d'une attention particulière et d'une tendresse excessive mais celles-ci
peuvent avoir des conséquences pour sa vie. Ainsi, il peut être un
enfant gâté, paresseux et égoïste.
3.3.1. Tendresse excessive des
parents
Dans une famille comptant une progéniture à
majorité féminine, l'attention des parents ne porte pas sur la
majorité mais sur l'unicité. Ainsi, le cas du fils unique
devient un cas particulier pour les parents. Ceux-ci deviennent
hyperprotecteurs, leur autorité sur le fils unique devient faible et ils
affichent une trop grande sollicitude envers celui-ci. Tous ces
caractères affichés par les parents envers l'enfant peuvent se
résumer comme tendresse excessive des parents. En effet, le fils unique
est surprotégé et ne connaît pas de frustration. Lorsqu'il
termine une série de filles, les parents affichent une sollicitude plus
remarquée. Ils veulent que leur fils reste toujours dans leur vue par le
fait qu'il leur procure plus de joie; de son absence, ils restent anxieux
comme le signale, ici, LERICHE A.M. (1975, p.74) :« Les parents
hyperprotecteurs sont eux-mêmes très anxieux et malheureux ;
ils se sentent souvent inconsciemment coupables à l'égard de
leurs enfants et c'est pour réparer ou expier cette faute, imaginaire la
plupart du temps et inconsciente, qu'ils donnent trop ou sont angoissés
et surprotègent leurs enfants.»
L'autorité parentale sur le fils unique est faible. Le
respect et la discipline sont relâchés et le fils risque de
dévier dans ses comportements. A ce sujet, voici ce que dit LESCURE M.
(1978, p.110) :«Elever l'enfant sans contrainte aucune sous le
fallacieux prétexte de respecter la liberté, c'est le livrer
à sa propre fantaisie à un âge où celle-ci risque
d'être tyrannique et mal le préparer aux contraintes de la vie
scolaire d'abord, puis à celles de la vie sociale.»Les parents
donnent une affection excessive en oubliant que l'autorité est aussi
nécessaire que l'affection. L'unicité du fils pousse l'entourage
de ce dernier à être attentif en le protégeant comme ses
parents.
3.3.2. Entourage attentif du
fils unique
Les parents ayant un fils unique pensent toujours que celui-ci
est exposé aux dangers; ils le limitent dans ses fréquentations
en le suivant régulièrement dans tout et cela le prive de
liberté même de choix de ses amis. L'idée de POROT M.
(1979, p.106) nous complète : « Parfois un petit camarade
jugé acceptable par le tamisage maternel lui permettra de satisfaire
tant bien que mal son désir de contact social.» Pour les
parents du fils unique, l'entourage n'est pas sécurisant. Ils pensent
qu'il y a des malfaiteurs qui peuvent faire du mal à leur fils. Par
ailleurs, le fils est aimé par ses camarades et par les adultes comme
ses grands-parents, ses oncles et autres membres de sa famille élargie.
Les membres de sa famille élargie sont aussi anxieux de lui; ils le
voient comme la seule richesse que possèdent son père et sa
mère. Ils le sécurisent physiquement en essayant de
réduire au maximum les risques. Aussi, le fils unique est
sécurisé de façon affective grâce à la
régularité des soins qu'on lui apporte et à la
présence stable des adultes autour de lui.
La littérature orale burundaise associe richesse et
fécondité, et la première richesse y est la
fécondité. Le garçon est placé en première
position et la fille occupe une place secondaire dans la famille
traditionnelle ; et aujourd'hui, cette place est maintenue par ces enfants
suite à la structure patriarcale de la société burundaise.
Ainsi, il n'est pas rare d'entendre dire que « la fille n'est
pas un enfant de la famille» ou encore «la famille qui
n'a pas engendré de garçon n'est pas une vraie
famille». Le fils unique est comme l'or à sécuriser car
sa mort fait disparaître la famille.
3.4. Conséquences
liées à l'absence ou à l'unicité du fils chez les
parents
Le vécu social d'une personne et ses attentes
déterminent sa vie psychologique. La progéniture au Burundi est
très considérée à tel point que son absence
provoque la dislocation du couple. Ainsi, la progéniture masculine
était, traditionnellement comme aujourd'hui très souhaité.
Des problèmes socio-affectifs peuvent survenir dans un couple à
progéniture uniquement féminine ou à fils unique. Il
s'agit entre autre de l'insatisfaction dans la progéniture qui engendre
la culpabilité de chacun des parents d'être à l'origine de
ce manque de fils, d'une mésentente dans le couple, orientation
d'affection parentale à l'unique fils, manque d'affection chez les
enfants « non souhaités ».
3.4.1. Progéniture
uniquement féminine comme source de mésentente familiale
Au Burundi, les parents souhaitent avoir une descendance de
tous les sexes. S'il s'agit des enfants du même sexe, les parents
deviennent mécontents. Ce sera le pire s'il s'agirait d'une
progéniture uniquement féminine. Ainsi, dit NTAMWANA M.T. (1983,
p.47), « pour les Burundais, il n'y a pas de souhait plus profond que
celui d'avoir une descendance, mais avec une nuance que les parents deviennent
mécontents lorsqu'ils s'aperçoivent que tous les enfants sont de
même sexe. S'il ne naît que des filles, le mari sera
déçu, il fera des reproches à sa femme en ces
termes :"uramponeje" c'est-à-dire :«Tu me prives de la
descendance.» Sous une mentalité traditionnelle qui disait que
seuls les garçons sont aptes à continuer la lignée, la
descendance féminine était considérée comme une
malédiction dans la mesure où la famille sans descendants
mâles risquait de s'éteindre. L'absence d'une descendance
mâle laisse une blessure chez le couple.
La présence d'un fils unique dans la famille diminue
les blessures des parents lorsque celui-ci naît après une longue
attente. Avant la naissance d'un garçon, lorsque la femme met au monde
uniquement les filles, le mari se lamente. Dans ce cas, tous les parents sont
angoissés du fait qu'ils sont incapables de procréer des enfants
qui répondent à leur préférence. Les filles dans ce
cas sont insécurisées du fait des disputes des parents, coupables
d'être à la base des conflits entre les parents et, par
conséquent, elles ne bénéficient pas l'affection
parentale.
3.4.2. Naissance du fils comme
source de satisfaction chez les parents
L'arrivée alors d'un fils pousse les parents à
adopter un autre comportement ; celui d'un amour profond chez le fils
parce qu'il est chaleureusement attendu. Pour eux, c'est une réussite,
un triomphe comme le souligne BIGANGARA J.B. (1986, p.102) :« Si
la procréation d'un enfant donne à l'homme la preuve
reconfirmable de sa virilité, la naissance d'un fils est ressentie comme
l'expression complète, parfaite, suprême de sa propre
puissance.» L'affection parentale qui devrait être
bénéficiée par tous les enfants est reçue par le
fils unique. Ces parents deviennent dans ce cas hyperprotecteurs, ils
l'épargnent de tout effort. Ils veulent, en effet, le faire vivre dans
un univers où tout est rassurant et facile. Ce qui conduit l'enfant
à être gâté parce qu'il ne connaît pas de
frustration et ses demandes sont obtenues immédiatement.
A part cette hyperprotection, l'autorité parentale sur
le fils unique devient très faible, les parents affichent une trop
grande sollicitude envers lui. S'il est menacé par quelqu'un d'autre, le
recours sur lui est urgent. Conséquemment aux filles, elles restent
moins considérées et deviennent jalouses. La place
accordée au fils devient primordiale.
Pour clore, les parents garderont la peur pour le fils unique,
qui d'un moment à l'autre peut être perdu, à cause d'une
maladie ou d'un accident. Chaque fois que le fils est absent à la
maison, ses parents restent angoissés. Dans ce cas, la place du fils
unique dans une famille comptant une progéniture à
majorité féminine devient une question problématique qui
mérite une recherche.
CHAPITREIV:PROBLEMATIQUE ET
CONSIDERATIONS
METHODOLOGIQUES
Dans toute étude, le chercheur doit donner à son
travail une orientation et des objectifs précis. Toute recherche qui se
veut scientifique devrait apporter des solutions à un problème
constaté.Dans le souci d'atteindre nos ambitions, nous avons
défini et éclairci la position du problème à
l'étude pour pouvoir y apporter des solutions adéquates. L'objet
du présent chapitre comporte le descriptif de la problématique,
de la méthodologie utilisée et du travail de terrain.
4.1. Problématique
de la recherche
Généralement, la famille est
considérée comme le premier milieu de développement
affectif de l'être humain et des relations entre les parents, les enfants
et le milieu environnant. Dans les conditions normales, le fondement d'un foyer
se fait entre un mari et une femme qui s'entendent dans le but de permettre
l'épanouissement de la famille. L'interposition des nouveaux êtres
(enfants) qui sont le fruit de l'union de ces derniers est nécessaire,
parce que cette interposition assure la stabilité du couple dans le
ménage.
Au Burundi, le bien suprême pour une famille reste
l'enfant. Les Burundais pensent que la richesse se trouve dans le fait d'avoir
un enfant car, pour eux, la mission de l'enfant est celle de l'aide
économique ou financière et sociale. Et aussi, les parents
trouvent fierté, prestige et orgueil dans le fait d'avoir beaucoup
d'enfants. Les Burundais considèrent l'enfant comme trésor.
Ainsi, voici les propos de BIGANGARA J.B. (1986, p.92) à ce
sujet:«L'enfant est un don donné dans l'intimité de
l'amour conjugal, il est conçu dans le sein maternel. Ce don est le
trésor, le plus précieux mais aussi délicat ; il faut
veiller sur lui, car, s'il est perdu personne ne peut le rétablir.»
Pour les Burundais, la progéniture masculine et féminine
nombreuse procure la joie au couple.
Parmi les attentes familiales telles que l'attente
procréatrice et l'attente sociale, cette première reste la
principale motivation du mariage. Selon NAVAS J. et ses collaborateurs (1977,
p.23), la fécondité est « la valeur fondamentale de
la cellule familiale. L'enfant apparaît comme la pierre angulaire de tout
l'édifice familial burundais. Le motif profond qui pousse les burundais
à s'unir est avant toute chose le besoin de fonder un foyer et d'avoir
des enfants. » Dans la culture burundaise, le mariage implique
le fait d'avoir des enfants à la fois des fils et filles. L'homme et la
femme sans enfant paraissent sans importance aux yeux des burundais.
Cependant, on observe des couples qui ont mis au monde
seulement des garçons, d'autres des filles ou même d'autres
couples qui n'ont qu'un seul enfant ou pas d'enfant. La progéniture peut
être à majorité masculine avec une seule fille ou à
majorité féminine avec un seul fils dans une famille. Ce
déséquilibre dans la progéniture pousse les parents
à avoir une attitude particulière à leurs enfants. Dans
toutes les familles, les parents devraient veiller à ce que chaque
enfant obtienne sa part d'affection en quantité suffisante et
égale. Qu'en est-il alors lorsqu'il s'agit d'un seul fils et de
plusieurs filles? On comprend certainement que les attitudes deviennent
particulières et cela ne manque sûrement pas d'influences sur le
fils unique et sur les filles, en général sur toute la
famille.
Au Burundi, notre société étant
patriarcale, la fille appelée à fonder un foyer ailleurs est
considérée comme étrangère à la famille
d'origine, le droit à la propriété foncière
appartient à l'homme seul car la vocation successorale est
patrilinéaire et consacre la primauté à la
masculinité. Voici ce qu'affirme HAVUGIYAREMYE C. (1999, p.46) :
« Le patriarcat est la forme d'organisation familiale
fondée sur la parenté par les mâles et sur la puissance
paternelle. Dans une telle famille, les moeurs sont patriarcales,
l'autorité du père est illimitée et sa parole est
souveraine. La tradition veut que la femme soit soumise à
l'autorité du mari et seul le garçon considéré
comme pouvant assurer la descendance familiale, qui commande et dirige. Bref,
son autorité est le pivot des relations au sein du groupe
familial.» Cette puissance que la tradition patriarcale
confère à l'homme lui permet de prendre toutes les
décisions au détriment de la femme.
Depuis la tradition à nos jours la place
accordée à l'un des sexes n'est pas égale à celle
qui est accordée à l'autre sexe. L'attitude sexiste des parents
liée à la structure patriarcale de la société, fait
que le sexe masculin a une certaine supériorité par rapport au
sexe féminin. Par conséquent, les excès de tendresse ou de
sévérité sont deux attitudes extrêmes que les
parents peuvent afficher à l'égard de leurs enfants et qui auront
une part extrêmement considérable dans le développement
affectif des enfants.
Ceci est affirmé par MUCCHIELLI R. qui indique
que « l'enfant gâté au même titre que
l'enfant martyr, quoique dans une situation diamétralement
opposée aura plus tard un moi anormal, insuffisant ou perturbé,
générateur d'une existence malheureuse.» La
satisfaction immédiate dès que la demande de l'enfant est faite,
autrement-dit l'absence totale de frustration et également le fait de se
soumettre au caprice de l'enfant sont eux aussi considérés comme
des facteurs pathogènes aussi graves que la frustration
excessive ; donc, il faut nécessairement une certaine frustration
parce qu'elle fournit une certaine force à l'enfant dans la prise de
conscience du réel et dans l'acquisition de l'autonomie, du sens de
responsabilité et de la confiance en soi . De ce fait, il devient
difficile d'acquérir son autonomie et d'être responsable. Il ne
bénéficie dans ce cas d'aucune expérience et ce manque
d'initiative se fera sentir plus tard.
De plus, cette considération différente entre
fils et filles engendre relativement une certaine mésentente entre
ceux-ci. Lorsque le fils est bien traité par rapport aux filles, ces
dernières auront une jalousie envers celui-ci et par conséquent
elles vont l'ignorer de leur groupe. Autrement-dit, une autre sorte de
mésentente peut être remarquée au niveau des relations
entre les parents et leurs filles. En effet,les parents ayant un fils unique
affichent un comportement d'hyperprotection vis-à-vis de ce dernier, ils
le protègent contre tout danger, toute contrariété et le
défendent lorsqu'il se dispute avec ses soeurs.
Cependant, même si ce fils est entouré de
beaucoup de soins et d'attention, des problèmes s'observent dans sa vie.
D'une part, une sorte de solitude s'observe dans ses comportements parce qu'il
se voit unique du fait qu'il n'a pas de frères. Voilà que quelque
chose de très important dans sa vie affective lui manque : les
relations fraternelles. D'autre part, le fils unique est gâté, ce
qui aura comme conséquences le manque de responsabilité et le
manque d'autonomie dans sa vie future.
Après cette problématique d'être fils
unique, notre préoccupation était de connaître la place
qu'occupe le fils unique au sein de sa famille et les conséquences
rencontrées par celui-ci en tenant compte des attitudes qu'adoptent les
parents actuels ayant un fils unique. De ce fait découle la question
problématique de recherche: « Quelle est la place du
fils unique dans une famille comptant une progéniture à
majorité féminine ? »
De cette question problématique générale,
nous avons dégagé les questions spécifiques
suivantes :
v Quelles sont les relations unissant les parents, les
filles et le fils unique ?
-Qu'est-ce qui est à l'origine de
lamésententeentre les parents et leurs filles dans une telle
famille ?
-Pourquoi y a-t-il une affection profonde entre les parents et
leur fils unique ?
-Qu'est-ce qui est à l'origine des relations d'entente
entre le fils unique et ses soeurs ?
- Qu'est-ce qui est à l'origine des relations de
mésentente entre le fils unique et ses soeurs ?
-Qu'est-ce qui fait que les relations soient bien
organisées au sein d'une famille ?
v Quels sont les traitements affectifs
réservés au fils unique contrairement aux filles ?
-Comment les parents traitent-ils leur fils unique ?
-Comment les filles traitent-elles leur
frère ?
-Comment le fils se sent-il suite aux traitements qu'il
subit ?
v Quelles sont les conséquences pour le fils
unique et pour sa famille ?
-Quels sont les problèmes rencontrés par le fils
unique dans sa famille ?
-Quels sont les mauvais comportements résultant de son
unicité ?
v Quelles précautions faut-il envisager dans une
telle famille pour éviter le préjugéfondé sur
la discrimination des sexes?
-Quelles sont les mesures proposées aux
parents pour éviter le préjugé fondé sur la
discrimination des sexes?
-Que doivent faire les parents pour réussir à
l'éducation de leurs enfants en général et du fils unique
en particulier ?
-Quels sont les conseils donnés au fils unique pour
qu'il puisse bien préparer sa vie future?
4.2. Les objectifs de la
recherche
En commençant tout travail, il convient de se proposer
des objectifs. D'où notre travail de recherche exige qu'on se fixe des
objectifs à atteindre.
4.2.1. L'objectif
général
L'objectif général de notre recherche est
d'étudier la place du fils unique dans une famille comptant une
progéniture à majorité féminine
4.2.2. Les objectifs
spécifiques
-Cerner les types de relations unissant les parents, les
filles et le fils unique
-Découvrir les traitements affectifs
réservés au fils à cause de son unicité.
-Montrer les conséquences pour le fils unique et
pour sa famille
-Proposer les précautions à envisager dans
une telle famille pour éviter le préjugéfondé sur
la discrimination des sexes?
4.3. Méthode et
technique de recherche
Le choix d'une méthode et d'une technique
appropriée est nécessaire pour une meilleure réalisation
du travail de recherche. En ce qui concerne notre recherche, nous avons
opté pour la méthode qualitative et l'enquête par
l'entretien semi-directif.
4.3.1. Méthode
qualitative
En sciences sociales, il existe deux principales
méthodes d'approche des phénomènes. Il s'agit de la
méthode qualitative et de la méthode quantitative. Notre
étude n'avait pas l'intention de privilégier la quantité
d'informations matérialisées par les résultats
chiffrés. Puisque notre travail était centré sur les faits
sociaux ne pouvant pas être quantifiés, nous avons
privilégié la méthode qualitative qui est
appropriée pour l'analyse et la compréhension desfaits. Cette
méthode privilégie l'étude monographique d'un
phénomène. Selon PINTO R. et GRAWITZ M. (1964, p.51),
«dans l'analyse quantitative, ce qui est important, c'est ce qui
apparaît souvent et le nombre de fois est le critère alors que,
dans l'analyse qualitative, la notion d'importance implique la
nouveauté, l'intérêt et la valeurd'un thème, le
dernier critère demeura subjectif.» Ainsi, étant
donné que notre travail est fondé sur des objectifs à
atteindre, il privilégie l'information à analyser d'un point de
vue psychologique contrairement à la méthode quantitative
liée aux données statistiques.
En nous référant à OSSIPOW V. (1983, p.
312), qui relève que « l'analyse du discours est (...)
qualitative en ce sens que les différences de sens peuvent être
affirmées de manières multiples et non statistiques »,
nous avons donc privilégié l'analyse des données de
recherche se rapportant au seul fils dans une famille comptant une
progéniture à majorité féminine. En matière
de recherche des sciences sociales, il convient de cerner le mieux des
techniques basées sur des précautions selon le
phénomène à étudier. Comme l'affirme LEON A. (1977,
p.380), « Le choix des techniques de collecte des données est
étroitement lié ou solidaire à la nature du
phénomène à étudier.» Puisque
notreétude s'inscrit dans le cadre des recherchesde type qualitatif,
nous avons utilisé l'enquête par l'entretien semi-directif.
4.3.2. Enquête par
l'entretien semi-directif
La technique de récolte des informations est
exigée dans toutes les recherches en sciences humaines et sociales.
Puisque notre travail était de type qualitatif, il nous a fallu utiliser
une technique pouvant fournir des informations de type qualitatif. Ainsi, nous
avons utilisé la technique de l'enquête par entretien
semi-directif dans le but de recueillir des informations fiables eu
égard au sujet de recherche. Selon PINTO R. et GRAWITZ M. (1964, p.604),
« l'entretien semi-directif est un procédé
d'investigation scientifique utilisant un processus de communication verbale
pour recueillir des informations en relation avec le but
fixé.» De cette technique découlent nombre
d'avantages : d'abord l'enquêteur doit intervenir pour orienter
l'entretien. Ensuite, une question mal comprise par l'enquêté peut
être reformulée par le chercheur et adaptée au
répondant. Enfin, à partir de la réponse fournie par
l'enquêté, l'enquêteur peut poser des sous-questions tout en
évitant d'aller en dehors du cadre de la recherche.
Pour comprendre un phénomène, on doit s'informer
auprès des gens qui ont vécu ou qui vivent le
phénomène. Ces propos de FESTINGER et KATZ (1959, p. 385)
confirment cette pensée : « (...) La science
sociale fait de plus en plus appel à des faits que seuls peuvent
rapporter les individus qui en ont fait l'expérience
personnelle.» Donc, c'est par des contacts directs avec nos
enquêtés que nous avons procédé pour atteindre nos
objectifs. Nous avons choisi l'entretien semi-directif dans le but de favoriser
la libre expression de nos enquêtés tout en centrant le discours
autour des thèmes définis et énoncés dans le guide
d'entretien.
Dans le but de mettre en oeuvre notre enquête, nous
avons utilisé un guide d'entretien qui comprenait les questions
largement ouvertes auxquelles les enquêtés ont répondu
librement et personnellement selon la manière dont chacun perçoit
les questions qui lui sont posées. Dans ce guide d'entretien, l'ordre
des questions importe peu pourvu que tous les thèmes soient
exploités. Enfin, nous avons utilisé un outil comme appareil
enregistreur pour enregistrer les réponses des enquêtés et
éviter qu'il y aurait des informations oubliées.
4.4. Terrain et population
d'enquête
Nous avons choisi comme terrain d'enquête la Commune de
MBUYE qui est l'une des Communes de la Province de MURAMVYA. Elle est
située au nord-est de ladite province. Nous avons opté pour cette
Commune parce que le milieu nous est familier et que nous connaissons
suffisamment les situations géographique, socio-économique et
socioculturelle, ainsi que certaines mentalités des gens, celles de
mettre l'importance à la descendance. Il faut parler de cette Commune
parce qu'on a remarqué qu'il y a des familles où le fils est
unique dans une famille comptant une progéniture à
majorité féminine, ce qui apportera certains comportements chez
les parents qui souhaitent une descendance masculine. Quant à la
population d'enquête, nous savons que le chercheur doit décrire
à l'avance lescaractéristiquesdessujets possédant les
informations nécessaires à la réalisation de sa
recherche. Nous avons effectué l'enquête auprès de
couples,possédant les caractéristiques suivantes :
-Etre de la Commune de MBUYE ;
-Vivre en famille ayant plus de trois enfants dont un seul
fils ;
-Vivant en famille où la femme a atteint la
ménopause ou arrêté les naissances (absence de nouvelles
naissances).
4.5. Travail de terrain
4.5.1. Préenqu?te
Dans une recherche comme celle-ci, la préenqu?te est
une étape nécessaire et très importante dans la mesure
où elle permet de recueillir des informations préliminaires sur
le thème de recherche et d'éprouver la valeur de l'instrument de
recherche. Ainsi, PINTO R. et GRAWITZ M.(1964, p.604) ont affirmé cette
importance en ces termes :«Il convient d'insister sur la
nécessité d'une préenquête, c'est-à-dire un
essai d'enquête sur un petit nombre de sujets permettant de roder le
guide d'enquête et de mieux se rendre compte des
difficultés.»Notre préenquête s'est
déroulée dans la Commune MBUYE sur deux cas de familles
remplissant les critères tenus en considération. En effet, les
deux sujets de la préenquête étaient connus de nous. Nous
nous sommes rencontrés à leur domicile après avoir
fixé un rendez-vous. Les sujets ont été choisis selon le
nombre d'enfants et selon le sexe du sujet, ceci pour vérifier si le
nombre d'enfants ou le sexe du sujet a une influence sur les réponses
données.
Le premier sujet nommé LAZ, mère de famille,
vit en couple sur la colline de MBUYE et a au total sept enfants. Le second
nommé REM est père de cinq enfants et vit en couple sur la
colline de MWEGERA.Cette phase nous a permis de voir que LAZ et REM
répondaient à l'aise à nos questions sauf la
première question qui a nécessité de faire objet de
reformulation. Elle était libellée ainsi :
«Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu, abakobwa banyu
n'umuhungu wanyu yifashe ? »
Ce qui se traduit ainsi: «Parlez-nous comment
sont les relations entre vous, vos filles et votre fils unique?»
LAZ et REM ont insisté sur les relations entre les parents que celles se
trouvant entre enfants. LAZ et REM avaient tendance à se limiter
uniquement aux relations parentales et à parler uniquement de celles-ci
sans montrer leur place dans les relations que tissent les enfants. Cela
était dû au fait qu'elle était une question triplement
posée. REM a répondu ainsi : « Ni mpore
twebwe ngaha iwacu tubanye neza, umugore wanje turumvikana, erega umuntu
mubanye imyaka irenga 30 ntaco muba mugipfa muba mushaje.»
Ce qui signifie : « Chez nous
ça va, nous vivons dans l'entente, je m'entends avec ma femme,
d'ailleurs, il n'y a plus de cause de conflits avec une personne que vous vivez
ensemble il y a plus de 30 ans.»
En réaction à cette réponse, nous lui
avons demandé : « Wewe ubanye gute n'abana bawe
b'abakobwa ? » REM a
répondu : « Ntangorane nyinshi zihari, wewe
urakuze, urazi ko abana bagoye ariko turabahanura iyo bakoze amakosa,
kanatsinda barakuze ntibagikubitwa (...).» Ce qui veut
dire : « Il n'y a pas beaucoup de problèmes,
vous êtes adulte, vous savez que les enfants sont difficiles, mais nous
leur donnons des conseils quand ils commettent des fautes, ce sont d'ailleurs
des adultes, personne ne les bat (...). »
Quand
nous avons vu que REM voulait terminer sans parler de la relation entre fils et
filles, nous lui avons posé la question
suivante : « Hagati y'umuhungu n'abakobwa ho
imigenderanire yifashe gute ? » REM a
répondu : « Abana bo urazi ko batabura ivyo
bapfa, ariko nabone mbona ari sawa. Bose nyene ni uguhanura.»
Pour
dire : «Les enfants ne manquent pas de causes conflictuelles,
mais pour eux aussi ça va. Tous sont à
conseiller.»
LAZ
que nous avons interviewée pendant la préenquête, a aussi
parlé des relations entre les parents et leur fils après notre
deuxième demande, elle s'était limitée uniquement aux
relations qui l'unissent à son mari. Voilà comment LAZ a
répondu : «Twebwe tubanye neza n'uwo twubakanye,
umugabo wanje ntakunda kunshwanira, kiretse iyo yasomye akagwa. »
Ce qui
se traduit ainsi : « Je m'entends bien avec mon
époux, il n'aime pas se disputer avec moi, sauf quand il a bu de la
bière. » En réaction à cette
réponse, nous lui avons
demandé : « Mwotubwira muri make uko mubanye
n'umuhungu wanyu ? »
Pour
dire : « Pouvez-vous nous parler en peu de mots de vos
relations avec votre fils ? » C'est ainsi que LAZ nous a
répondu : «Umwana w'umuhungu ari umwe aragoye,
utegerezwa kumwitaho cane. Ukamuhanura kuko na wene arakora amakosa rimwe
na rimwe. »
Ce qui
se traduit de cette manière : « Un fils unique est
difficile, on doit s'intéresser beaucoup à lui. On le conseille
car lui aussi commet des fautes quelquefois. »
Pour permettre alors à REM et à LAZ de
s'impliquer davantage et de parler des trois relations sans notre insistance,
nous avons fractionné la première question en trois, parce que
celle-ci était posée en bloc et compliquait nos
préenquêtés. Nous l'avons reformulée ainsi :
- Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu
n'abakobwa yifashe?
- Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu
n'umuhungu yifashe?
- Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati y'abakobwa
n'umuhungu yifashe?
Ce qui se traduit respectivement de cette
manière :
- Pouvez-vous nous parler de vos relations avec vos
filles?
- Pouvez-vous nous parler de vos relations avec votre
fils?
- Pouvez-vous nous parler des relations entre votre fils
et vos filles?
Cette phase de préenquête nous a aidé
à nous familiariser avec le terrain d'enquête et à nous
assurer de l'intelligibilité de notre guide d'entretien. Ainsi, dit
BOUDON R. (1979, p.33), «la préenquête consiste en une
reconnaissance du terrain en essayant de se (le chercheur)
débarrasser des idées préconçues ou comme le dit
Bacon, de ses prénotions, de manière à faire apparaitre
des facteurs ou des variables explicatives qu'il cherche.» Ici, c'est
le chercheur ou l'enquêteur lui-même qui essaie de se
débarrasser des idées préétablies pendant la
préenquête. Au moment de cette préenquête, le
chercheur découvre de nouvelles réalités en rapport avec
son étude. Il importe, par exemple quand le chercheur constate qu'un
item doit être modifié de procéder à la
rectification comme nous l'avons fait pour la première question.
4.5.2. Technique du choix des
enquêtés et déroulement de l'enquête
Lorsque le chercheur met en évidence la méthode,
les techniques, le terrain et la population d'enquête qui lui serviront
d'aboutir aux résultats de sa recherche, il lui reste à
décrire comment choisir les enquêtés.Pour choisir nos
sujets d'enquête, nous avons utilisé la technique «boule
de neige.» Ainsi, contrairement à la méthode
probabiliste qui s'inspire directement de la théorie mathématique
des probabilités, nous avons opté pour une technique non
probabiliste ou empirique.
Dans les sciences sociales en
général, on doit souvent avoir recours à cette
méthode, particulièrement lorsque la démarche de recherche
privilégiée est de type qualitatif. L'essentiel recherché
dans l'étude était la nouveauté de l'information. Notre
étude exigeait la méthode non probabiliste, donc une
méthode dont le choix des sujets n'est pas fait selon un tirage
aléatoire. MAYER R. et OUELLET F.(1991, p.387) sont plus explicites
à ce sujet quand ils disent que « Dans les sciences
sociales en général et dans le travail social en particulier, on
doit souvent avoir recours à cette méthode,
particulièrement lorsque la démarche de recherche est de type
qualitatif. »
Parmi les techniques d'échantillonnage non
probabiliste, pour le choix de nos sujets d'enquête, nous avons
privilégié celle que MAYER R. et OUELLET F. (1991, p.390)
appellent échantillon « boule de neige »
qui « (...) est particulièrement utile au chercheur
intéresséàétudier la
problématiquevécue par une population spéciale, de taille
limitée et connue d'une minorité de personnes. Ce sont celles qui
peuvent donner des infos sur d'autres qui, àleur tour feront la
même chose, (...), jusqu'à ce qu'un échantillon suffisant
soit constitué. L'échantillon croît en taille comme une
boule de neige que l'on roule au fur et à mesure que le cycle se
répète.»C'est ainsi que nous avons effectué
notre échantillon à l'aide de cette technique dite
«boule de neige» qui nous a été utile pour
comprendre la place propre d'un fils unique dans une famille comptant une
progéniture à majorité féminine. En effet, cette
technique s'explique par le fait que l'échantillon croît au fur et
à mesure que le(s) premier(s) indique(nt) des informations nouvelles sur
d'autres qui, à leur tour font la même chose jusqu'à ce
qu'un échantillon suffisant soit constitué. L'échantillon
croit alors en taille comme une boule de neige que l'on roule au fur et
à mesure que le cycle se répète.Pratiquement, notre
premier enquêté nous donnait des informations sur d'autres sujets
remplissant les critères établis à l'avance et ces
derniers faisaient la même chose à leur tour et notre
échantillon croissait comme une boule de neige.
Après la préenquête, il nous restait
à faire une enquête. Ainsi, au cours de cette enquête, nous
avons eu recours à l'entretien semi-directif. Avant de nous plonger sur
le terrain de l'enquête nous avons élaboré un guide
d'entretien qui pouvait nous aider à mener notre recherche. La recherche
avait commencé par le choix des enquêtés qui nous
informaient sur les cas connus des familles ayant un seul fils et une
progéniture à majorité féminine. C'est ainsi que
nous avons eu trois familles types à enquêter et en faisant
recours à la technique dite boule de neige, chaque famille a pu
nous orienter sur d'autres familles de mêmes caractéristiques
qu'elle-même. Nous avons alors abouti à six cas,
c'est-à-dire six familles qui faisaient objet de l'enquête.
Avant d'entamer l'entretien, nous commencions par nous
présenter à nos enquêtés et leur préciser
l'objet de notre recherche. Les contacts se passaient de façon simple
dans le but de gagner leur confiance et leur collaboration. S'agissant de
l'entretien avec nos enquêtés, nous les avons rencontré
à leur domicile. Nous avons par après introduit nos thèmes
du guide d'entretien tout en laissant le sujet s'exprimer librement, sans
l'interrompre ni l'influencer par nos comportements verbaux ou non verbaux.
Nous avons donc respecté ces conseils de PINTO R.et GRAWITZ M. (1971,
p.819) :« A partir du moment où l'enquêté
commence à parler, l'enquêteur ne doit pas l'interrompre ou le
questionner mais demeure dans une attitude de compréhension.»
En ce qui concerne la conduite de l'interview, nous avons
préféré nous entretenir avec l'un des parents s'il s'agit
d'un couple parental. Nous tenions en considération la
disponibilité de nos enquêtés, et chaque fois nous nous
fixions un rendez-vous avec nos sujets car les entretiens se déroulaient
à leur domicile.Chaque entretien prenait une durée moyenne
légèrement supérieure à une heure. L'enquête
a duré trois semaines, c'est-à-dire du 23/11/2014 au 13/12/2014.
Le premier sujet nommé CAN a été
enquêté le 23/11/2014 à 16heures. Celle-ci est une veuve
qui a été reconnue sous l'intermédiaire de REM de la
préenquête. CAN vit sur la colline de MWEGERA de la Commune MBUYE.
CAN a répondu sur les thèmes concernant les relations entre les
membres de la famille, les conséquences de l'unicité de son fils
pour celui-ci et sa famille et a pu proposer ses mesures pour avoir une famille
heureuse. CAN nous a aidéà trouver un autre sujet nommé
MUJ.
Le 25/11/2014 à midi, nous nous sommes rendu à
la colline de BUHANGURA, làoù un enquêténommé
ATH vit. Nous avons reconnu ATH grâceà LAZ de la
préenquête, celui qui nous a conduitjusqu'à son domicile.
C'est ainsi que nous avons rencontré ATH chez lui. Celui-ci a surtout
insisté sur les qualités de son fils. ATH a indiqué que
ses filles sont jalouses du fils et s'estime heureux devant son fils qui
continuera la lignée familiale.
Le troisième sujet est nommé SUZ et
enquêtéle 26/11/2014 vers 15heures. SUZ est une femme que nous
connaissons depuis et qui vit sur la colline de MBUYE de la même Commune,
ce qui veut dire que nous l'avons trouvée sans faire recours à
aucun intermédiaire. Les thèmes relatifs aux traitements du fils
unique, aux relations familiales et aux conséquences du fils unique ont
été abordés pendant l'entretien. SUZ accorde une place
importanteà son fils dans tout. Malgré les bons comportements du
fils, SUZ relève que ce dernier s'isole. Après l'entretien avec
SUZ, celle-ci nous aorienté vers deux autres sujets que nous avons
nommés NIC de la colline MBUYE et MET de la colline RWUYA.
Le 29/11/2014 à 14heures, nous avons
enquêté MET vers 15heures. Celui-ci a évoqué les
traitements réservés au fils unique et a indiqué qu'il
entretient bien son fils et que ce dernier est en bons termes avec les autres
membres de la famille. MET prévoit un bon avenir pour son fils
mais,à partir de ses propos, on constate que ses filles sont
discriminées par lui-même.
L'autre sujet NIC que nous avons rencontré par
l'intermédiaire de SUZ a été enquêté le
4/12/2014 à 16heures. L'enquêté a abordé les
relations familiales, les traitements réservés aux enfants et les
comportements du fils unique. NIC a égalementdonné des conseils
aux parents et à l'Etat dans le but d'éviter la
discriminationfondée sur le sexe. En général, pour NIC,
tous les enfants sontégaux et doivent être, par
conséquent,traités de la même manière.
MUJ a été enquêté le 13/12/2014
à 17heures. Le jour de l'entretien avec MUJ, nous avons trouvé ce
dernier chez lui le soir, après le travail du champ. MUJ était
très fatigué. Avant même d'entamer l'interview, il nous a
demandé une bouteille de bière de banane pour qu'il puisse nous
dire tout sans rien nous cacher. Nous l'avons calmé en lui promettant
que nous allions repasser un autre jour. Pendant l'entretien, MUJ a
évoqué les mauvaises relations que son fils tisse avec les autres
membres de la famille et l'entourage à cause de ses mauvais
comportements. MUJ et sa femme n'affichent pas actuellement aucune affection
à leur fils car ils sont désolés de ses comportements
anormaux comme la délinquance et le banditisme. MUJ a fini par donner
des conseils à son fils et aux parents du fils unique.
L'entretien avec MUJ a été clôturé
dans un climat d'entente mais il affichait un visage
désespéré pour ce qui est de l'avenir de son fils en
particulier et de sa famille en général. MUJ nous a
orientéà deux autres cas que nous avons enquêté le
15/12/2014 et le 16/12/2014 et qui ne nous apportaient aucune idée
nouvelle.
Nous avions constaté une certaine saturation des
données de l'enquête. A ce sujet, MAYER R. et OUELLET F. (1991,
p.40) précisent que « (...) dans le cas ou le chercheur
utilise une méthode qualitative de recherche comme l'analyse du contenu,
observation, etc., un autre principe de constitution de l'échantillon
s'applique : celui de saturation (...),l'échantillon est
constitué de façon finale lorsque la collecte d'informations
n'apporte plus aucune idée nouvelle comparativement à celles qui
ont déjà été trouvées.»
C'est ainsi que les deux cas n'ont pas été
enregistrés ici compte tenu des informations fournies. En effet, dans
leurs propos, nous n'avons pas senti aucune nouveauté, il s'agissait des
répétitions, des informations déjà
évoquées par les six premiers enquêtés. Et, à
partir de cette répétition, nous avons constaté qu'il y
avait saturation de données et qu'il fallait mieux arrêter
l'enquête.C'est la raison pour laquelle nous nous sommes
arrêté à six cas d'enquête que nous avons
nommé CAN de la colline de MWEGERA, ATH de la colline de BUHANGURA, SUZ,
NIC et MUJ de la colline de MBUYE et MET de la colline de RWUYA. Ces sujets ont
été trouvés à l'aide d'une technique dite boule de
neige. Cependant, la récolte des informations au cours de notre
recherche s'est déroulée en connaissant l'un ou l'autre obstacle.
C'est ainsi que nous allons les exposer dans le point suivant.
4.5.3. Les difficultés
rencontrées
Il est rare qu'un travail de recherche en sciences sociales se
réalise sans difficultés. La première difficulté
que nous avons rencontrée était liée à la
détermination des familles à fils unique avec plus de trois
enfants. En effet, nous savons qu'avoir plus de trois enfants dont un seul fils
ne signifie pas finalement que le fils restera unique. Peut être que le
couple continue à mettre au monde d'autres enfants. Il nous a fallu
alors entrer en contacts avec les parents ayant arrêté les
naissances pour nous rendre compte que ceux-ci n'ont pas l'espoir d'avoir un
autre enfant. Ceux qui nous révélaient le contraire
n'étaient pas choisis et nous étions obligés de les
ignorer.L'utilisation d'un appareil enregistreur nous a fait aussi nous heurter
à des résistances de nos enquêtés. Il nous fallait
prendre un temps pour leur faire comprendre que l'appareil nous permet
d'éviter la perte, l'oubli ou la déformation des informations
livrées par les enquêtés.
La problématique et la démarche
méthodologique ont été évoquées dans ce
chapitre où nous avons présenté les objectifs de recherche
et éclairci la méthode utilisée. Nous avons montré
la population d'enquête et rapporté le déroulement du
travail de terrain. La technique de choix des enquêtés et les
difficultés rencontrées ont été exposées.
C'est ainsi que la partie suivante a été consacrée
à la présentation des cas, l'analyse des données et
l'interprétation des résultats de recherche.
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DEUXIEME PARTIE :
PRESENTATION DES CAS, ANALYSE DES DONNEES ETINTERPRETATION DES RESULTATS
CHAPITRE V :
PRESENTATION DES CAS
Nous avons fait une brève présentation des
sujets sur lesquels a porté notre enquête avant de passer à
l'analyse du contenu des informations recueillies. D'abord, les propos ont
été présentés intégralement en Kirundi et
traduit en Français. Ensuite, la présentation de chaque propos
est suivie d'un commentaire. Rappelons que chaque cas interviewé a
été baptisé d'un nom de trois lettres de l'alphabet dans
le souci de sauvegarder l'anonymat des enquêtés.
5. 1. Cas CAN
CAN est une veuve de 49 ans qui habite à la Colline
MWEGERA de la commune MBUYE. Elle a quatre enfants dont un seul fils est le
cadet de 17 ans.
CAN a affirmé qu'elle est en bons termes avec les
enfants, et qu'il lui arrive de penser à son fils unique. CAN a dit que
ceci la met dans une insécurité totale lorsqu'elle se souvient
que son mari était lui aussi un fils unique dans la famille. CAN
s'intéresse beaucoup à son fils comme réponse à son
insécurité. Ainsi, elle le déclare ainsi: «Jewe
iyo nibutse ko umugabo wanje yivukana, hanyuma nkabona nanje mfise agahungu
kamwe, numva mfise ubwoba ko umwanya n'umwanya gashobora gupfa, kuko
uwumuryango urahona cane ntugwira, nico gituma nca ndamwiyegereza
cane.»
Ce qui se traduit de la suite : « Quand je me
souviens que mon époux était un fils unique, et que je constate
que j'ai un seul fils, je me retrouve dans l'insécurité, de peur
que d'un moment à l'autre, il peut mourir, parce que ce clan est plus
vulnérable, il ne se multiplie pas, c'est pour cette raison que je
m'intéresse beaucoup à lui.» La crainte de perdre
l'enfant à tout moment peut pousser les parents à
s'intéresser à lui. Lorsque c'est un enfant unique, ses parents
se trouvent toujours dans l'insécurité.
Dans un premier temps, pendant l'entretien, CAN voulait se
réserver dans ses propos en disant qu'elle n'a aucun fils : «
Ntimumbaze ivy'abahungu kuko ntabo mfise. Nivyariye abakobwa gusa. Ko
nagize aho novyaye abahungu umugabo agaca yitaba Imana. Karya gahungu
kamwe ! Oya umwana umwe nta mwana.»
Ce qui veut dire : « Ne me posez pas des
questions en rapport avec les fils car je n'en ai pas. J'ai
procréé les filles seulement. Mon époux a rendu
l'âme alors qu'il était temps de les procréer. Cet unique
fils ! Non, un seul enfant n'est pas un enfant.» Mais au fur et
à mesure que nous nous entretenions, CAN était ouverte dans ses
propos.CAN,SUZ et ATH sont insatisfaits de la descendance constituée
d'un seul fils avec plusieurs filles. A partir de leurs propos, on voit que ces
cas veulent une progéniture nombreuse de filles et fils.
Concernant les relations fraternelles, nous avons
constaté qu'il y a collaboration et entente, car CAN a
révélé dans les propos suivants que tous les enfants
s'entraident dans toutes les activités : «Abana banje
barumvikana, nta mishwano, ntavyo kwifyinisha. Barafashanya kuko barazi neza
ko ari impfuvyi. Badakoze jewe sinoshobora kubatunga ndi umwe.»
Ce qui veut dire : «Mes enfants s'entendent, pas
de conflits, ils ne sont pas distraits. Ils s'entraident car ils savent bien
que'ils sont des orphelins. S'ils ne travaillent pas, je ne parviendrais pas
à les nourrir étant seule.»
Nous constatons également que la situation d'un seul
fils avait un effet important sur la vie de CAN et sur sa vie car CAN a dit que
son fils est trop calme et à l'absence de ce fils, CAN est dans
l'insécurité, craignant de le perdre. Voici ce qu'elle a
dit : « Ndabona ko umuhungu wanje afise ingorane kuko kenshi
aguma ahoze. Sinzi ko ari kubera abura abo bikina, sindamukundira kuja kuyerera
ku bwoba bw'uko ashobora guhura n'ingorane.»
Ce qui se traduit : « Je vois que mon fils
possède des problèmes car il reste souvent calme. Je ne sais si
c'est parce qu'il manque d'autres avec qui il peut jouer. Car, je ne lui
permets pas de vagabonder, de crainte qu'il peut avoir un accident.»
Il faut donc constater ici que le fils unique de la veuve CAN a
été bien entretenu malgré sa solitude. L'unicité
d'un enfant peut entraîner chez lui des comportements de repli sur soi.
Il faut que l'enfant collabore avec les autres pour s'épanouir.
5.2. Cas ATH
ATH est un homme âgé de 58 ans et sa femme de 52
ans. Il est le père d'une famille de 6 enfants. Il habite sur la colline
BUHANGURAde la commune MBUYE. Il a un seul fils et cinq filles dont le fils
unique âgé de 15 ans.
ATH nous a répondu facilement aux questions du guide
d'entretien. Fortement penché sur les qualités du fils, ATH a dit
que, depuis longtemps, le fils était très important dans la
famille. Voici ses propos : « Umuhungu ni kirumara mu muryango.
N'aho yogaba gute, ntabura ico amarira umuryango. Kuva kera, niwe yamye yoza
ubwato bwa se. Utavyaye umuhungu rero n'uguhomba, ni ko guhona ku
muryango.»
Ce qui se traduit ainsi : « Le fils est
très important dans la famille. Même si il est gâté,
il ne manque pas de quoi faire pour la famille. Depuis longtemps, c'est le fils
qui remplaçait valablement son père. Ce serait une perte alors
pour celui qui n'engendrait pas un fils. C'est l'origine de la disparition de
la famille.» Le fils est attendu comme celui qui va continuer la
lignée familiale. La famille burundaise est régie par un
système patriarcal et compte sur la descendance masculine.Nous
remarquons que pour ce cas, le fils occupe une place primordiale. C'est ainsi
que ATH nous révèle que toute la richesse familiale appartient
à son fils unique et non à ses filles : «Imana
yakampaye ari agahungu kamwe, ndetse ko ndamubungabunga, ntakindi ndamugirira
kuko ivyo mfise vyose ni ivyiwe,abakobwa bobo bazoja kwubaka
ntangorane.»
Ce qui veut dire :« Dieu m'a donné un
seul fils, à part que je l'entretiens comme il faut, toute ma richesse
lui appartient, il n'y a pas de problèmes pour les filles car celles-ci
vont se marier ailleurs.» Le fils unique est perçu comme le
seul héritier de la richesse familiale. Le système patriarcal
burundais ne considère pas les filles comme membres de la famille.
Celles-ci vont se marier ailleurs et feront partie des familles de leurs
époux. C'est un système qui exclut les filles en matière
de succession.
Concernant l'avenir du fils unique ATH dit qu'il n'y a pas de
problèmes. Pour ATH, les problèmes résident dans la
jalousie entre les filles et le fils unique. Il explique ceci: «
Abakobwa baridoga iyo mvuze ko ariwe mwana mfise kandi ivyo biragaragara.
Ndazi ko bagiye kwubaka bizoba biheze.Ingorane ni uko baca bagirira ishari uwo
muhungu.»
Ce qui ce traduit de cette manière : «
Les filles se lamentent quand je dis que le fils est le seul enfant que j'ai
alors que c'est clair. Je sais que lorsqu'elles se marieront, ce sera fini. Le
problème est qu'elles affichent une jalousie envers ce
garçon.»Comme constat, lorsqu'on accorde une grande importance
à un seul enfant choisi parmi les autres, on sème directement la
zizanie dans la descendance, ce qui peut engendrer une mésentente
familiale et une jalousie entre frère et soeurs.
5.3. Cas SUZ
SUZ est une femme âgée de 51 ans et son mari est
âgé de 59 ans. Le couple a 5 enfants dont le fils unique qui est
né en troisième position dans la descendance est âgé
de 21 ans. SUZ et son mari sont tous des enseignants à l'école
primaire et habitent la colline MBUYE.SUZ répondait sans réserve
à toutes les questions. Elle a dit que, dans ses relations avec ses
enfants, le couple aime beaucoup plus le fils unique que les filles. Ainsi, SUZ
dit : «Hagati yacu abavyeyi n'umuhungu, hari urukundo rwinshi
gusumba hagati yacu n'abakobwa. Umuhungu tumukunda kubera ari umwe kandi hari
hakenewe n'abandi. Erega ubwiza bw'inka ni ukuba imwe.»
Ce qui veut dire que : «Entre nous les parents
et notre fils unique se trouve une affection beaucoup plus profonde qu'entre
nous et les filles. Et d'ailleurs, la beauté d'une vache est
d'être unique.» Chez SUZ, nous constatons que l'affection
augmente en fonction de la diminution de la descendance de tel ou tel autre
à ce sexe.
Le fils unique est celui qui doit être entretenu avec
beaucoup de soins, en évitant tout risque qui peut perturber sa vie.
Ceci à été évoqué par SUZ de cette
manière : «Twebwe ngaha umuhungu turamufata neza kuko
ntitumuruhisha,ntakintu na kimwe abura tugifise, mbere iyo agiye kw'ishure
ndamuha amafaranga yo kwiryohera asumba ayompa abakobwa.»
C'est-à-dire: «Ici, chez nous, le fils est
bien entretenu car on ne le fatigue pas, il ne lui manque pas ce que nous
avons, et d'ailleurs quand il va à l'école, je lui donne de
l'argent de poche plus que les filles pour les loisirs.»Dans cette
famille, on comprend bien que le fils unique occupe une place primordiale. Tous
les caprices du fils sont satisfaits comme si ce dernier était un
enfant unique. L'inégalité au niveau du traitement des enfants se
remarque chez SUZ.Suite à son unicité, les comportements du fils
unique de SUZ ont été agréables en famille et dans
l'entourage. Le fait d'être unique a créé chez le fils une
solitude et un souhait des frères comme SUZ le dit : «
Umuhungu wacu nta nyifato mbi afise kuko arubaha. Ingorane afise ni irungu kuko
ahora ambwira ko nari kuvyara abandi bahungu.»
Ce qui se traduit ainsi : «Notre fils unique n'a
pas de mauvais comportements, il est courtois. Le seul problème qu'il a
c'est la solitude car, quelquefois, il me dit que je devais engendrer d'autres
garçons.» Parmi les conséquences dues à
l'unicité, la solitude vient en premier lieu. Ici, nous voyons que le
fils unique est insatisfait dans sa fratrie car il veut avoir des
frères. Ce fils unique est gâté chaque fois que tous ses
besoins sont satisfaits sans, de sa part, fournir d'efforts. Il est
également, dans ce cas, frappé par la solitude à cause de
son unicité.
5.4. Cas MET
MET est un homme âgé de 61 ans vivant avec sa
femme de 56 ans. MET habite la colline RWUYA de la Commune MBUYE. MET a une
progéniture composée de 7 enfants dont l'unique
filsâgé de 20 ans et un élève au lycée de
MURAMVYA. Le couple vit avec 4filles seulement car les deux autres se sont
déjà mariées. Cette famille vit de
l'agriculture.Apparemment, MET est en bon termes avec son épouse mais il
y a quelque chose qu'il n'a pas voulu révéler et qui pousse
à ne plus s'entendre car, dit MET : «Mu bisanzwe umugore
turahuza, mugabo hari ibintu bimwe bimwe ashaka kugira nanje ntabishaka. Ivyo
rero bituma tudahuza rimwe na rimwe, erega abashaka kuntegeka. Abana bo
ntangorane, kuko ako mfise kari mw'ishure. Abo bakobwa nabo nyina
arababona.»
C'est-à-dire :«En général,
je m'entends avec ma femme, mais il y a quelque chose qu'elle voudrait mais
dont je ne veux pas. Ceci fait alors que nous nous n'entendons pas quelquefois,
en fait, elle veut me dominer. Pour les enfants, il n'y a pas de
problèmes car celui que j'ai se trouve à l'école. Ces
filles sont à la charge de leur mère.»MET
considère donc les filles comme la charge pour son épouse et le
fils unique pour sa charge. On entend bel et bien qu'il y a division au niveau
de l'éducation des enfants et qu'il y a beaucoup d'affection entre le
fils unique et son père comme le prouve MET : « Atavyo
kubesha, umuhungu niwe aza imbere mu bandi bana, kuko niwe azosigara asanze
urugo. Iyo Imana itamuduha, ibara ryoguye, we ntubona ko urugo rwociye
ruhona?»
Ce qui se traduit ainsi: « Sans mentir, le fils
vient en premier lieu parmi les autres enfants, car c'est lui qui restera pour
la sécurité de la famille. Si Dieu ne nous l'avait pas
donné, ce serait catastrophique. Ne vois-tu pas que la famille serait
détruite ?»MET voit toujours l'avenir de sa famille dans
son unique fils. Les filles n'ont pas la même importance que le fils car
d'un moment à l'autre elles vont se marier. MET a également
exposé la raison qui le pousse à aimer davantage son fils. Il
dit : «Mu bisanzwe uruvyaro rwiza, ni ururimwo abahungu benshi
n'abakobwa. Kubera ngaha dufise umwe, dutegerezwa kumukunda, tukamufata neza,
nk'akarorero agiye kw'ishure ndamuha amahera yo kurya kuko kw'ishure
babagaburira nabi. Atashe naho mu buruhuko, nta bikorwa
ndamutuma.»
Ce qui veut dire : « En général,
une bonne progéniture est celle qui est constituée de plusieurs
fils et filles. Parce qu'ici nous avons un seul fils, nous devons l'aimer, le
traiter bien ; par exemple quand il va à l'école, je le lui
donnais de l'argent de poche car ils sont mal nourris à l'école.
Et quand il revient en vacances, je ne le surcharge pas de travail.»
Les traitements réservés aux fils uniques diffèrent de
ceux qui sont réservés aux filles. Le fils unique est
aimé, bien traité et peu surchargé de travail
contrairement aux filles qui, au lieu d'être envoyées à
l'école, sont surchargées de travaux domestiques et
champêtres.Quand nous lui avons demandé pourquoi ses filles n'ont
pas été envoyées à l'école, MET a
répondu ceci : « Hize umuhungu, abakobwa n'aho batokwiga,
ntaco.»
Ce qui signifie: « Le fils étant
scolarisé, même si les filles ne sont pas à l'école,
il n'y aurait pas de problèmes.»MET sème la jalousie
dans la fratrie. Il voit, dans son fils, l'avenir de la famille. On comprend
que les enfants n'ont pas la même valeur pour MET. Aussi, les filles de
MET sont plutôt délaissées. Tout cela montre combien MET
minimise les filles en plaçant au premier rang son fils unique.
MET n'a pas évoqué les problèmes de son
fils unique, il a dit que son avenir est assuré car, dit-il :
« Nta kazoza kabi azogira kuko ntawundi ndonderera atariwe. Ahejeje
ishure, azoca arongora, nzomwubakira inzu, nongere ndamukwere.»
Ce qui veut dire : « Il n'y a pas de
problèmes pour son avenir car je travaille pour son propre gain. Quand
il terminera ses études, il va se marier. Je le construirai une maison
et je payerai la dot pour lui.» Les parents ayant un fils unique ne
remarquent souvent pas que leur fils unique peut avoir des problèmes
liés à son unicité. Les parents préparent
convenablement l'avenir du fils sans préparer psychologiquement le fils.
Remarquons que le fils unique vivra sous la dépendance de ses parents et
cela de façon continuelle.En analysant l'entretien effectué avec
MET, nous avons constaté qu'il s'est donné à la vie de son
fils toute en discriminant ses filles.
5.5.Cas NIC
NIC est une femme vivant sur la colline MBUYE de la commune
MBUYE. Elle est âgée de 51 ans et son époux avait 56 ans.
Le couple a quatre enfants, la cadette a 8 ans et son fils unique est
l'aîné de la famille avec 26 ans. NIC a dit que les relations
familiales entre les parents et les enfants sont normales même si des
difficultés ne manquent pas, ils se donnent des conseils.Concernant
l'affection entre parents et fils unique, NIC indique qu'ils l'aiment comme
leurs filles. Pour NIC, il n'y a pas de supériorité entre les
enfants. Ainsi, dit-elle : « Abana bose barangana, nkunze umwe
gusumba uwundi noba mbivye urwanko mu muryango.»
C'est-à-dire :« Tous les enfants sont
égaux, si j'aime l'un plus que l'autre, je risque de semer la
mésentente dans la famille.»Pour NIC, il n'y a pas de
traitements affectifs réservés au fils unique, tous les enfants
sont traités de la même manière. NIC comprend bien que les
enfants sont égaux et que les différences liées aux sexes
ne sont pas valables. Tous les parents devraient comprendre que l'affection est
nécessaire à tout enfant, qu'il soit garçon ou fille.Pour
ce qui est de la place réservée au fils unique, NIC indique
ceci : « Narirya ari we mfura, n'aha mu muryango aguma ariwe aza
imbere. Mugabo ni uko nyene abakobwa kuva kera bamye bakumirwa, ahandi ho
nabone bogabuye n'umuhungu ivyo dufise vyose.»
Ce qui se traduit par : « Puisqu'il est
l'aîné, il garde la première place ici dans cette famille.
Mais c'est parce que les filles sont marginalisées depuis longtemps,
sinon, celles-ci partageraient avec le fils toute la richesse
familiale.» NIC n'affiche pas dans ses attitudes de différents
traitements pour ses enfants. Mais, elle garde en lui-même une exclusion
faite à l'égard des filles. NIC sait que le fils occupe la
première place en famille car elle lui attribue la richesse
familiale.Pour ce qui est des comportements du fils unique, en tenant compte
des traitements subis de la part de ses parents et de ses soeurs, NIC a
révélé que son fils est très actif, qu'il n'est pas
gâté. Il travaille sans toutefois tenir compte de ses
petites-soeurs. Il n'affiche pas de mauvais comportements comme la
délinquance, l'alcoolisme, le banditisme, etc. seulement, il est
très calme.
Pour NIC, lorsque le fils est unique, il faut lui donner des
conseils comme ceux d'étudier, d'éviter la méconduite,
d'être responsable dans sa vie et plus particulièrement de ne pas
s'exposer aux dangers. NIC a également proposé des conseils
envers les parents qui maltraitent les filles en disant : «
Biva k'ukutamenya, ahandi ho abavyeyi bofata kumwe abana, kuko umwana ni
umwana.»
Ce qui se traduit ainsi : « Cela vient de
l'ignorance, sinon les parents devraient traiter leurs enfants de la même
façon, car un enfant est un enfant.» La culture burundaise
basée sur le système patriarcal guide la majorité des
parents au niveau de leurs attitudes. Les parents se montrent souvent ignorants
de l'importance des filles en famille, alors que les enfants sont de même
importance. NIC a proposé aussi quelques perspectives à l'Etat
car elle voit bien que les filles sont discriminées à cause de
l'absence de lois qui les régissent en matière de succession.
Ainsi dit-elle : « Hakwiye kuba amategeko akingira abigeme na
cane cane kubijanye no gutorana, kuko abakobwa baracinyijwe muri
vyose.»
Cela veut dire : «Il est nécessaire
d'élaborer la loi protégeant les filles plus
particulièrement en matière de succession, car les filles ont
été discriminées dans tout.»Nous avons
constaté que pour NIC, il n'y a pas de différence entre les
enfants. Pour elle, le fils et la fille, tous ont la même valeur. Pour
NIC, la place du fils unique reste la même que celle de la fille au sein
de la famille. Par conséquent, il n'y aura ni jalousie ni
mésentente entre les membres de la famille.
5.6. Cas MUJ
MUJ est un homme de la collineMBUYE de la Commune MBUYE
âgé de 58 ans, il a une femme de 52ans et une progéniture
de huit enfants dont le fils unique est néà la troisième
naissance. Celui-ci est âgé de 23 ans. Cette famille vit de
l'agriculture. MUJ nous a donné une information très importante
que les autres n'ont pas pu révéler. Concernant les relations
entre les enfants. MUJ a dit que son fils unique n'est pas en bons termes avec
ses soeurs et ses parents. Souvent, son fils entre en conflit avec les membres
de la famille. Voici ses propos à ce sujet : « Jewe
ntakubesha, ntako mfise umuhungu umwe, aragoye cane. Yama arashwana na
bashikiwe, mbere hari aho bishika na twebwe tugashwana. »
Ce qui se traduit de la sorte:« Sans vous mentir,
même si j'ai un seul fils, celui-ci se comporte mal, il entre souvent en
conflit avec ses soeurs, quelquefois, il arrive que nous disputions avec
lui.»Les mauvais comportements dus au fils unique affectent toute la
famille et l'entourage. Le fils unique «mal éduqué» ne
peut être en bon terme avec ses soeurs et ses parents. Sa
délinquance et son vagabondage le poussent à adopter des
comportements néfastes.MUJ se montrait désolé par la
situation éducative de son fils. Pour lui, son fils est un
délinquant, il boit trop et souvent il rentre pendant la nuit
étant ivre. Voilà comment MUJ le révèle:
«Umuhungu wanje ntampesha icubahiro ndavye ukuntu yifata. Yama
arayerera, yirirwa mu birabo, mbere kenshi, ataha mw'ijoro
yaborewe.»
Ce qui signifie : « En considérant ses
comportements, mon fils ne m'honore pas. Toujours il vagabonde dans la rue,
passe toute la journée au cabaret, et souvent même, il rentre la
nuit étant ivre.»MUJ était désolé de la
situation de son fils parce que, pour lui, le fils unique devrait bien se
comporter pour préparer sa vie et pour assurer le développement
de la famille.
Concernant l'amour que les parents affichent à leur
fils, MUJ a répondu que son fils pense que ses parents ne l'aiment pas.
MUJ ne fait et ne prépare rien de spécifique pour son fils par la
simple raison qu'il est unique. Contrairement aux autres enquêtés,
MUJ donne des cadeaux aux filles, car elles sont très actives et
courageuses. MUJ dit qu'un jour, si son fils le voulait, il construirait pour
ce dernier une maison dans le but de se marier. Ainsi dit-il : «
Nta co ngirira umuhungu ngo ni uko ari umwe, kandi nta n'ico ntegura
kuzomugirira. Ahubwo nopfuma nshimira abakobwa bobo bamfasha gukora. Umuhungu
nawe niyiyumvira kwubaka, nzomwubakira inzu.»
Traduisons:« Je ne fais et je ne prévois rien
pour mon fils à cause de son unicité. Je préfère
offrir des cadeaux à mes filles qui m'aident à travailler. Et le
fils, s'il le veut se marier, je construirais une maison pour lui et pour son
mariage.»D'une manière générale, les
comportements du fils unique de MUJ sont défavorables pour toute la
famille. MUJ a lui-même dit que son fils est un bandit, qu'il pille les
produits récoltés comme le haricot et qu'il le vend pour s'amuser
en buvant et en fumant.
Le fils unique est un enfant exposé aux dangers comme
MUJ le révèle ainsi: «Sinobabesha aragowe, adahevye
ingeso mbi afise z'akaborerwe n'ubusuma, nta kazoza kiwe mbona.»
Ce qui signifie: « Sans vous mentir, il est
malheureux, s'il n'arrête pas ses inconduites d'ivresse et de banditisme,
je ne vois pas son avenir.» Les conseils ont été
donnés au fils unique par ses parents mais en vain comme le
précise MUJ. Depuis son enfance, le fils de MUJ avait un
caractère d'instabilité et d'insatisfaction. MUJ conseille
à son fils de se conformer au bon modèle des autres
garçons de l'entourage.A l'égard des parents ayant un fils
unique, MUJ propose chaque fois qu'il faut donner des conseils aux enfants tant
qu'ils sont jeunes car, dit-il : « Igiti kigororwa kikiri
gito.»
C'est à-dire : « Il faut battre le fer
tant qu'il est chaud.» Tout enfant doit subir des traitements
affectifs de la part de ses parents et cela en bas âge en vue de
préparer son avenir. Il serait difficile de ramener en marge de
tolérance un adulte devenu délinquant.
Nous avons exposé dans ce chapitre des données
de recherche. Chaque sujet a été interviewé et les propos
commentés. Nous avons parcouru les thèmes et les
sous-thèmes comme les relations entre les parents et les enfants, les
traitements réservés aux fils uniques et leurs
conséquences ainsi que les mesures à entreprendre. Il est aussi
nécessaire d'analyser et d'interpréter les propos en les
regroupant dans les thèmes et les sous-thèmes et en s'appuyant
sur les théories des auteurs. C'est ainsi que les relations entre les
parents, les filles et le fils unique ont été traités dans
les lignes suivantes.
CHAPITRE VI: LA TRIPLE
RELATION ENTRE PARENTS, FILLES ET FILS
UNIQUE
Les parents tissent des relations étroites entre eux
et avec leurs enfants. Lorsqu'il s'agit d'un seul fils, l'affection parentale
est orientée vers celui-ci. Par conséquent, il survient une
mésentente entre les parents et leurs filles. Ceci est dû au fait
que certains parents, à partir de leurs préjugés, ont
démissionné dans leur rôle éducatif. Il faudrait
alors, pour aboutir à une entente familiale, développer
harmonieusement les relations entre les membres de la famille.
6. 1. Les relations
affectives centrées sur le fils unique
La naissance des enfants est accompagnée par une grande
joie pour les parents et ces derniers donnent une affection à leur
descendance. Cette affection se manifeste à partir des relations que les
parents tissent avec leurs enfants. Dans une famille à fils unique,
certains parents surinvestissent sur leur fils en mettant à
l'écart les filles.Au sujet des relations des parents avec leurs enfants
dans une famille à fils unique, les parents ne voulaient pas montrer
qu'ils aimaient particulièrement leur fils. Dans le but de ne pas
créer la jalousie fraternelle, SUZ et CAN aiment secrètement leur
fils. Ecoutons les propos de SUZ à ce sujet : «
N'abakobwa turabakunda, ariko bisanzwe atari ku rugero rumwe
n'umuhungu.»
Ce qui veut dire : « Nous aimons
également les filles, mais pas au même degré que le
fils.» En fait, les parents aiment tous les enfants. La seule
différence réside dans le degré d'affection qu'ils
affichent vis-à-vis de chacun des enfants.Les parents sont, en effet, au
courant du danger qui survient quand un parent oppose sa descendance.
Rappelons ici les propos de NIC qui montrent que, dans sa famille, les filles
et le fils unique sont au même pied d'égalité. Cette
attitude de NIC de prendre au même pied d'égalité tous les
enfants apaise les conflits fraternels si l'ambiance entre les enfants n'est
pas bonne car, les filles qui ont déjà acquis la capacité
de jugement gardent un air jaloux à l'endroit de leur petit-frère
à cause de l'attitude de leur mère ou père. Par contre,ATH
souligne ceci: « Umuhungu ari umwe, bashikiwe baramugirira ishari
kubera urukundo uba umufitiye.»
Ce qui veut dire: « Si le fils est unique,
ses soeurs sont jalouses à cause de l'affection qu'on lui
donne.» Les filles sont jalouses de la façon dont les parents
privilégient le frère, ce qui est à la base de divers
conflits qui peuvent surgir dans la fratrie.
La présence des enfants de deux sexes dans la famille
peut alléger certaines difficultés relationnelles entre les
conjoints pouvant, à leur tour, engendrer les conséquences
telles que la polygamie, la répudiation de la femme,
l'insécurité chez les enfants et la culpabilité chez la
mère. L'on peut dire que ces difficultés peuvent survenir dans
la famille ayant les enfants de même sexe surtout de sexe féminin.
Les données recueillies chez MET l'affirment lorsqu'il dit qu'une bonne
progéniture est constituée de plusieurs garçons et filles.
En fait, la présence des garçons dans la fratrie, même si
ceux-ci sont minoritaires contribue beaucoup au maintien de bonnes relations
dans la famille, malgré que la plupart des parents accordent une
importance particulière à ces garçons.Il arrive aussi que
les parents cachent aux enfants les problèmes relationnels qu'ils
connaissent. Mais finalement, ces enfants finissent par les découvrir
eux-mêmes et réagissent généralement de façon
négative. Voici les propos de ATH à ce sujet : «
Abakobwa barabona ko dukunda uwo muhungu gusumba, ntivyokunda ko
tubibahisha kuko umwana iyo akuze aramenya amabanga yo mu nzu
yose.»
Ce qui signifie : «Les filles constatent que
nous aimons particulièrement ce fils, il est impossible de cacher cet
amour car l'enfant, devenu adulte, connaît tous les secrets
familiaux.» Les enfants découvrent eux-mêmes les faits
familiaux et les gardent secrètement en eux-mêmes. Ils
réagissent positivement ou négativement selon le fait. Par
exemple les difficultés économiques ou l'atmosphère
familiale exercent une influence sur les enfants lorsqu'ils les
découvrent. Ainsi, écrit BICHTER H.E. (1971, p.36), «
les enfants en savent bien plus sur les parents et leurs difficultés que
ceux-ci n'oseraient soupçonner. Souvent, ils prévoient les
difficultés que connaît le père dans l'exercice de sa
profession. Ils pressentent les angoisses financières ou les
problèmes de rivalité qui pèsent sur l'atmosphère
familiale. Souvent les parents ne cachent leurs problèmes aux enfants
que par crainte d'être jugés par ces derniers.» Les
parents croient que leurs enfants ne savent pas ou ne perçoivent pas ce
qui se passe dans le ménage alors que ce sont des observateurs
avisés surtout quand ce sont ces derniers qui sont au centre du
conflit.Dans la société burundaise, ceux qui se marient veulent
en premier lieu avoir des enfants. En plus, la majorité de couples
préfèrent la présence de deux sexes dans la descendance
comme le dit CAN : « Kuvyara abakobwa gusa canke abahungu gusa si
vyiza. Uruvyaro rwiza ni urucanze.»
Ce qui se traduit ainsi : « Il n'est pas bon de
procréer seulement les filles ou les garçons. Une bonne
progéniture est celle qui est constituée de deux
sexes.» La présence des garçons et des filles dans la
descendance se présente alors comme nécessaire pour garder
l'harmonie familiale. Dans le cas contraire, l'absence de l'un ou de l'autre
sexe peut occasionner des conflits relationnels au niveau de la famille. Ces
conflits vont commencer au niveau du couple conjugal pour affecter plus tard
les relations entre parents et leurs enfants.
Ainsi, comme le disait POROT M. (1979, p.14) :«
La stabilité et pourtant la sécurité dépendent
avant tout de la conduite des parents.» Ainsi, si les relations
parentales ne sont pas harmonieuses, les enfants ne seront pas non plus
stables. La présence des filles seulement a été à
la base de conflits relationnels entre les conjoints.
6. 2. L'origine de la
mésentente entre les parents et filles
Dans la société burundaise, la naissance du
fils en famille qui n'a que des filles n'est pas accueillie de la même
manière que celle d'une fille. En effet, les Burundais se
réjouissent beaucoup à la naissance d'un garçon. L'absence
de celui-ci dans la descendance peut être à la base des conflits
entre les parents et les filles.L'absence de garçons dans la descendance
est beaucoup plus ressentie par le père que par la mère. Avec
l'importance capitale que les hommes attachent à la naissance des
garçons, l'absence de ces derniers laisse une grande blessure chez le
père. Celui-ci se lamente toujours qu'il périt pour toujours. Il
garde en lui la nostalgie de voir un jour un fils naître dans sa
descendance. A cause de cette insatisfaction remarquable du père, les
relations familiales subissent de grandes perturbations. Voici les propos de
MET : « Nagiye kuronka amahoro mbonye havutse umuhungu. Abakobwa
bane bose atamuhungu aravuka, sinari mpimbawe ni ukuri. Nabona ko ngiye
guhona.»
Ce qui se traduit : « J'ai eu la paix quand j'ai
eu un fils. Avec quatre filles sans fils, je ne me sentais pas bien à
l'aise. Je voyais que j'allais périr.» MET est insatisfait de
la naissance des filles et ne va pas tisser de bonnes relations avec ces
dernières. Comme ces filles constatent que leur maman est elle aussi
maltraitée parce qu'elle n'a mis au monde que des filles, elles vont
rester attachées à leur maman. Ainsi, leur père les
maltraite au même titre que leur mère. De cette manière,
les relations entre père et filles deviennent totalement mauvaises. En
effet, le père ne considère pas ses filles comme ses vrais
enfants. Il agit comme s'il n'avait pas d'enfants.
La naissance d'un seul fils est une levée de
l'insécurité d'une part, pour la mère et, d'autre part,
pour les filles. Le père change ses lamentations en amour envers le fils
et la mère est aussi attachée à son fils car ce dernier
est sécurisant pour la mère. Ces propos d'ATH soutiennent cette
idée : « Umuhungu yavutse ubugira gatanu. Imbere y'ico
gihe ntamahoro nari mfise. Aho avukiye wamengo ni igitangaro kibaye, numva
amahoro mu nzu. Ahandi ho, yaba umugore canke abo bakobwa ntaco nababonamwo.
»
Ce qui veut dire : « Le fils est apparu à
la cinquième naissance. Avant cette dernière, je n'étais
pas en sécurité.A sa naissance, c'était comme un miracle
et la paix régnait dans notre famille. Sinon avant, ma femme et mes
filles étaient sans valeur pour moi.»Comme les filles ne sont
pas aimées par leur père, celles-ci restent toujours en
état de culpabilité. Elles s'attendent aux menaces de la part de
leur père. Cet état de culpabilité est aggravé par
le fait que leur père les maltraite comme si elles n'étaient pas
ses enfants. L'idéed'ATHmentionnée ci-haut montre qu'un
père sans fils menace chaque fois son épouse et ses filles. A
cela s'ajoute l'idée de NIC qui dit : « Iyo abana
badafashwe kumwe n'abavyeyi, abafashwe nabi baca bamera
nk'impfuvyi. »
Ce qui veut dire : « Si les enfants
sont traités différemment par leurs parents, ceux qui sont
maltraités se comportent comme des orphelins. »Lesfilles
se considèrent comme des orphelines de père à cause de
l'attitude de ce dernier. Ceci se remarque par un malaise continuel chez les
filles si elles ne sont pas avec le parent qui les aime.
Les conflits relationnels entre les conjoints affectent les
relations entre eux et leurs enfants surtout si ces conflits sont dus au fait
qu'ils ne convergent pas sur la façon dont ils considèrent les
filles et le fils unique. Dans une famille comptant un seul fils, la femme
attache une importance particulière à son fils comme son mari.A
ce sujet, voici les propos de la femme nommée SUZ : «
Hagati yacu n'umuhungu hari urukundo rwinshi gusumba hagati yacu
n'abakobwa.»
Cela signifie : « Entre moi-même et notre
fils se trouve la plus profonde affection qu'avec les filles.»Chez
SUZ, le fils unique est beaucoup plus aimé. On comprend alors que les
filles moins aimées par les parents développent des attitudes
négatives dans cette famille. Rappelons ici les propos d'ATH qui dit que
les filles sont jalouses envers le fils à cause de l'affection de la
part des parents. Nous remarquons qu'à travers les propos
d'ATH, le fait de s'occuper du fils unique dans la descendance a suscité
la jalousie chez les filles et cela crée un climat de mésentente
entre les membres de la famille.
Pour réussir à l'éducation des enfants,
il faudrait que chaque parent joue son rôle. Le rôle primordial de
la mère dans l'éducation des enfants ne serait donc pas
joué convenablement s'il y avait des conflits qui l'opposent à
ses filles. A ce sujet, nous nous référons à la
théorie de MANNONI M. (1964, p.20) selon laquelle, « la
mère est conçue par les enfants non seulement comme dispensatrice
des biens mais aussi comme source de protection. L'amour maternel
sécurise l'enfant. Et cet autour de cet amour que s'ordonnent les
relations de l'enfant avec les autres membres de la famille d'abord et puis
avec l'entourage.»Ici, nous voyons la prépondérance du
rôle joué par la mère dans l'éducation des enfants.
Pour que les parents puissent jouer convenablement ce rôle, ils doivent
manifester de l'affection envers leurs enfants sans tenir compte de leur
sexe.
6. 3. Parents
démissionnaires de leurs rôles éducatifs
Les parents ont la mission d'éduquer leurs enfants sans
tenir compte de leur sexe. L'amour maternel et l'autorité paternelle
doivent être partagés entre tous les enfants. Si l'un des parents
démissionne de son rôle, l'enfant peut se sentir
abandonné.Les parents doivent suivre l'évolution de leurs
enfants. Et avec les carences éducatives, l'enfant est
négligé comme le souligne MUJ : « Jewe nari
namufashe neza akiri muto, ntaco namutuma, yirirwa arayerera, ariko yaciye yiga
ingeso mbi, ubu rero ntagihanurwa, naramuhevye.»
Pour dire : « Depuis son enfance, il
était gâté, je ne lui confiais aucun travail, il passe
toute la journée en errance Mais, il a adopté de mauvais
comportements. Maintenant, il ne peut être conseillé, et je l'ai
délaissé.» Une affection profonde affichée par
les parents engendre de mauvaises conséquences chez l'enfant. Comme MUJ
le dit, son fils est gâté, et ne fait rien,ce qui l'a
poussé à devenir insupportable pour les parents. Parmi les
enfants insupportables, certains sont délaissés par leurs
parents ; l'exemple est celui du fils de MUJ. La famille serait la
première source de mauvais traitements infligés aux enfants.
Il arrive souvent que, si l'enfant est privé d'une
présence parentale compréhensive, bienveillante, clairvoyante et
ferme, il adopte un comportement asocial. Une autorité parentale absente
ou insuffisante paraît être un facteur important tant dans la
déviation des conduites chez la plupart des enfants comme le souligne,
ici, DAHAL J. (2000, p. 53) :« L'enfant, pour
l'épanouissement harmonieux de sa personnalité, a besoin d'amour
et de compréhension. Il doit autant que possible grandir sous la
sauvegarde et sous la responsabilité de ses parents, et en tout
état de cause, dans une atmosphère d'affection et de
sécurité morale et matérielle.» Il en ressort
que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être le
guide de ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de
son orientation. Cette responsabilité incombe en priorité
à ses parents. Les ménages qui vivent dans l'instabilité,
la mésentente dans le couple, des ménages disloqués
à cause du divorce sont parfois source de la maltraitance qui occasionne
directement l'insatisfaction affective et matérielle chez l'enfant.
Rappelons que ATHdévalorise sa femme parce qu'elle n'a pas mis au monde
que des filles. La mésententedans le couple avant la naissance du fils a
touché les filles d'ATH qui s'attendent toujours aux menaces de leur
père.
Un enfant qui ne bénéficie pas de la
satisfaction des besoins auprès de ses parents peut ressentir un manque
d'amour qui lui est nécessaire. Comme le souligne GLOTON R. (1974,
p.85), « l'enfant a besoin d'amour, il a besoin qu'on l'aime et qu'on
le lui montre, parce que l'amour est l'antidote de la solitude et que tout
être humain refuse la solitude alors qu'il la porte en lui comme une
fatalité de nature. Pour l'enfant le témoignage d'amour c'est la
preuve qu'il est protégé.» L'amour ne joue qu'un
rôle de sécurité lorsque l'enfant se sent accepté
dans sa famille.
Si par hasard, l'enfant éprouve un sentiment d'abandon,
le risque de se sentir seul au monde est grand. Par conséquent, son
développement affectif vis-à-vis de son milieu est
handicapé et peut être agressif ou irritable. C'est ce qui arrive
chez MET, le père qui a démissionné de l'éducation
de ses filles et qui s'occupe exclusivement de son unique fils. MET attribue
l'éducation féminine à sa femme alors qu'il est
appelé à contribuer pour la bonne éducation de ses
filles.Nous constatons que, quelque soit le degré de participation du
père dans la vie de la famille, l'éducation de la fille est
généralement à la charge de la mère. Lerôle
du père de la famille est souvent lâche, alors que son rôle
est irremplaçable pour la bonne éducation des enfants.
Selon l'Univers de psychologie (1978, p.165), «
l'enfant, avant sa naissance, est porté par sa mère mais il
ne lui appartient pas. Il est l'enfant du couple et le père ne saurait
échapper à sa responsabilité dans toute décision
à prendre, y compris celle qui consiste à le
sacrifier.» Une question qui peut être posée est
celle-ci : si le père de famille a failli à sa mission, la
mère va-t-elle jouer un rôle double? Celui du père et en
plus de son propre rôle. Même si la confusion des rôles peut
se présenter, on peut affirmer aussi que chacun des deux parents a une
part individuelle et spécifique dans l'éducation des enfants et
dans la résolution des problèmes qui se posent entre ces
derniers.
L'enfant, qu'il soit fille ou garçon, a besoin d'un
modèle de vie couvert par la complémentarité des deux
partenaires du couple parental pour l'intégrité et le
développement de la personnalité. Ici, nous partageons l'avis de
DODSON F. (1979, p.48) selon lequel « un enfant, en grandissant,
a besoin d'un modèle de conduite féminine et masculine. Un seul
parent ne peut absolument jouer les deux rôles.» Le père
et la mère ont donc besoin de se compléter dans la façon
d'agir face à toutes les situations familiales.
6.4. Développement
harmonieux des relations entre les membres d'une famille
Dans une famille, les rapports entre les parents et les
enfants sont caractérisés par des relations interindividuelles,
par exemple du père et du fils, de la mère et de sa fille, du
frère et de la soeur, de la mère et du fils, et enfin du
père et de sa fille.Dans la famille nombreuse et
hétérogène, cette richesse de relations donne un climat
familial nettement différent de celui d'une famille réduite et
plus particulièrement pour une famille nombreuse à fils unique.
C'est ainsi que les parents à fils unique sont appelés à
modifier leurs propres relations du fait de cette situation
évoquée par MET d'attribuer aux femmes seules le rôle
d'éduquer les filles. Le père qui laisse sa femme s'occuper,
seule, de l'éducation des filles, va être considéré
par ces dernières comme absent. Par conséquent, celles-ci vont
développer un mépris à l'égard de leur père.
Quant à la mère avec qui elles sont toujours en contact
permanent, les filles peuvent l'accuser de les surcharger en leur imposant
notamment des tâches culturellement masculines. Cependant, LAFON R.
(1979,p.603) montre la structure des interrelations entre les membres de la
famille :« On ne peut concevoir les parents en famille sans
placer dans la totalité plurale qu'elle représente, à
côté du père qui incarne l'autorité et la force et
de la mère qui représente l'amour et la faiblesse, la fratrie qui
symbolise la rivalité et l'amitié.» Le père est
nécessaire, à la vue de ses enfants, pour soutenir la mère
dans son autorité. Il doit se montrer disponible souvent pour que
l'enfant puisse s'affirmer.
Chaque enfant, garçon ou fille, a toujours besoin d'un
modèle de force et de stabilité à traversson père.
C'est ce que propose NIC dans ces termes: « Abana bose bofatwa kumwe
kugira ntihagire uwushavura. Kandi, umureze nabi aragira ingeso mbi. Abavyeyi
bakwiye gutanga akarorero keza ku bana babo.»
Ce qui veut dire : « Tous les enfants sont
traités de la même façon pour que aucun d'eux ne soit pas
fâché. Aussi, s'il est mal éduqué, il adopte de
mauvais comportements. Les parents devraient donner un bon modèle
à leurs enfants.» En effet, chaque parent possède des
qualités spécifiques que l'enfant ne peut trouver chez l'autre.
L'autorité paternelle est spécifique au père comme le
modèle de puissance à imiter. L'amour maternel est
spécifique pour la mère. Chaque parent doit transmettre ses
qualités à chaque enfant. Ainsi, comme le souligne DEBRE R.
(1970, p.415),« il faut que le père permette à l'enfant
de faire cette éducation sentimentale et sociale dans une
atmosphère d'affection et de sécurité sans
l'écraser par conséquent de sa supériorité, mais
sans lui donner pour autant une impression d'effacement ou de faiblesse car
l'enfant a besoin que son père ne cède pas à ses coups et
reste toujours pour lui un modèle de force et de
stabilité.» Par la puissance de sa personnalité, il
doit être suffisamment énergique pour faire face aux
difficultés avec certitude et courage.
Cependant, CAN s'intéresse beaucoup à ses
enfants sans tenir compte du sexe. CAN renforce donc l'idée de NIC en
affirmant que les enfants sont tous nécessaires dans la famille et que
l'important serait ce qu'on attend de chaque enfant. Cette idée est
aussi soutenue par MUJ qui s'intéresse beaucoup plus à ses filles
car son unique fils est un délinquant. Il propose une étroite
communication au sein d'une famille. Une collaboration avisée du
père avec son épouse est nécessaire pour renforcer le
rôle du père. La mère doit donc aimer ses enfants pour
créer une bonne ambiance familiale.
Soulignons donc que c'est déplorable de rencontrer une
mère qui peut refuser de tisser certaines relations avec ses enfants
à cause de leur sexe ou par simple raison de se sentir coupable.
Rappelons que SUZ déclare aimer beaucoup plus son fils par le fait que
celui-ci est fils unique. SUZ noue avec son fils une relation
sécurisante, d'amour qu'elle ne noue pas avec ses filles. Ici, le
problème est que certains parents confondent compensation et affection.
Ainsi, dit DAVIDO R. (1976, p. 73), « parfois, «la mauvaise
mère» qui n'aimera pas son enfant autant qu'elle le devrait se
sentira coupable; sa mauvaise conscience la fera agir par compensation,
c'est-à-dire qu'elle camouflera cette carence d'affection maternelle par
des actes : l'enfant, faute d'être choyé, sera
gâté, on ne lui refusera rien, ses jouets s'accumuleront au
détriment de l'affection, ce don unique et irremplaçable des
parents.» Il est difficile pour un enfant de nouer une relation
sécurisante d'amour, de tendresse, de compréhension avec une
mère ou un père tendu(e), nerveux(e) ou indifférent(e).
C'est ce que nous constatons chez ATH, père de la famille qui s'est
désintéressé de sa progéniture féminine en
se donnant corps et âme à son unique fils.
En définitive, l'enfant évolue d'une
manière différente selon que c'est un garçon ou une fille.
Il a besoin, quoiqu'il en soit, d'une image masculine et d'une image
féminine bien différenciées pour son identification. Les
parents sont là pour réaliser ces deux images. Une inversion des
rôles ou l'absence de l'un d'eux ne va pas sans difficultés car il
est nécessaire que la fille puisse s'identifier à l'image
féminine et le garçon à l'image paternelle.
Cependant,quelques traitements sont réservés aux fils uniques par
les parents qui préfèrent beaucoup une descendance masculine que
féminine. Ces traitements affectifs se remarquent dans les relations que
tissent les parents et leur fils.
CHAPITRE VII :
TRAITEMENTS AFFECTIFS RESERVES AU FILS UNIQUE
Le fils unique dans une famille comptant une
progéniture à majorité féminine est
élevé avec douceur et gentillesse. Celui-ci est beaucoup
capricieux et ses besoins sont immédiatement satisfaits par ses parents
dans le but d'éviter toute frustration que peut connaître le fils
unique. Dans cette famille, le fils unique occupe la première place
dans la descendance. Par conséquent, le fils unique
bénéficie d'une profonde affection de la part de ses parents, car
ces derniers voient, dans leur fils, l'avenir de la famille. Les attitudes
affichées par les parents dans le traitement de leur fils unique
causent la rivalité fraternelle.
7.1. La satisfaction
immédiate des besoins du fils unique
L'enfant possède en lui-même des besoins comme
tout autre adulte. Chaque besoin est satisfait soit par ses parents, soit par
lui-même. Pour le cas du fils unique, ses besoins sont pris en charge par
ses parents. Ces derniers veulent satisfaire chaque besoin afin que le fils
unique ne soit pas frustré. C'est ce qu'affirment SUZ et ATH dans leurs
propos quand ils disent que le fils est très important, qu'il
mérite un entretien jour au jour.CAN et METattribuent toute la richesse
familiale à leur fils et disent que le fils unique ne manquent rien en
leur présence. Pour que l'enfant se développe harmonieusement, il
a besoin d'être satisfait dans ses besoins mais également
d'être responsable de la satisfaction de ses propres besoins.Un enfant
normal, pour devenir un adulte bien constitué, évolue sur trois
plans essentiels à savoir les plans physique, intellectuel, et affectif.
A ce sujet, POROT M. (1979, p.14) nous explique bien ceci : « Le
libre jeu des grandes fonctions et la satisfaction des besoins organiques
permettent son épanouissement physique. L'éducation et
l'instruction au sens large du mot favorisent son développement
intellectuel. C'est de ses relations avec l'ambiance et presque exclusivement
avec sa famille, surtout dans son jeune âge, que dépend
l'équilibre et l'évolution normale de son
affectivité.»
Dans notre travail, le fils unique est à l'aise dans sa
famille parce qu'il est entouré par des personnes auxquelles il est
attaché et qui l'aiment bien. Cette situation que nous venons de
décrire est valable pour tous les enfants beaucoup souhaités par
leurs parents et plusparticulièrement pour le cas du fils unique car,
celui-ci mène une vie différente de celle de ses soeurs.Le fils
unique est perçu comme un objet unique au monde pour ses parents et ses
derniers s'invertissent beaucoup dans leurs relations avec lui et nombreux sont
ceux qui préfèrent satisfaire tous ses besoins.Ainsi, dit
SUZ : « Twebwe ngaha umuhungu turamufata neza, kuko
ntitumuruhisha, nta na kimwe abura tugifise.Tumufungurira neza, mbere iyo agiye
kw'ishure ndamuha amahera asumba ayompa abakobwa.»
Ce qui se traduit ainsi : « Ici chez nous, le
fils est bien entretenu car, nous ne le fatiguons pas, il ne lui manque de
rien. Nous le nourrissons bien, et d'ailleurs, quand il va à
l'école, je lui donne plus d'argent de poche qu'aux filles.»
SUZ essaie de satisfaire tous les besoins de son fils. Celui-ci est un
élève et a les mêmes besoins que ses soeurs, mais SUZ
s'occupe beaucoup plus des besoins du fils. De cette façon, le fils
unique est le point de toutes les attentions et de toutes les tendresses des
parents.
DANA J. (1978, p. 42) indique que, pour un enfant
élevé avec tant de soins, « il se sent tellement le
centre du monde qu'il peut quitter le centre de la terre ou bien il emporte la
terre avec lui.» L'ambiance chaleureuse dans laquelle le fils unique
est élevé détermine son développement affectif.
Ainsi, la situation dans laquelle se trouve le fils unique ne le laisse pas
sans problèmes.D'une part, il est toujours satisfait dans ses besoins
et, par conséquent, il est gâté. D'autre part, il adopte un
comportement de va-et-vient en demandant à l'un des parents ce que
l'autre lui refuse. Voici les propos d'ATH à ce sujet : «
Umuhungu arakenewe mu muryango. Nico gituma tugerageza kumuha ibikenewe vyose.
Kandi ntaco abura hagati yacu. Nyina aramuha nanje nkamuha.»
Ce qui se traduit ainsi : « Le fils est
nécessaire dans la famille. C'est pour cette raison que nous essayons de
lui donner tout le nécessaire. Il ne lui manque de rien, nous
satisfaisons tous ses besoins.» Il est bien entendu que ce fils
unique est considéré comme unique enfant de la famille
placé au centre des préoccupations des parents. Il est satisfait
dans tous ses besoins. Cependant, la conséquence de cette satisfaction
juvénile du fils deviendra plus tard l'insatisfaction lorsque ses
parents ne seront plus là ou laisseront le fils indépendant et
responsable de ses besoins. MUJ affirme cette idée : «
Akiri muto ntaco yabura, ariko rero aho amariye gukura, aguma ashaka kurya
yicaye. Umwanya wose ngo mpa iki, kuko ataronka ico ashaka cose, yaciye
yadukana ingeso mbi z'ubusuma.»
C'est-à-dire :« Il ne lui manquait rien
dans sa jeunesse. Mais dès son âge adulte, il ne voulait que
manger sans travailler. A chaque instant, il nous demande ceci et cela. Parce
qu'il n'est pas satisfait dans ses besoins, il a commencé à
commettre des vols.» L'enfant gâté n'a pas d'esprit de
créativité. A l'âge adulte, ses parents ne continuent pas
à satisfaire ses besoins en totalité. En revanche, pour
satisfaire ses besoins, l'enfant peut développer des comportements
asociaux. Le fils unique, qu'on satisfait dès sa naissance, devient un
petit tyran jamais satisfait. Dans l'Encyclopédie de la psychologie
(1970, p.355), il est dit que « pour peu que les parents tentent
obscurément de conquérir ses faveurs, l'enfant unique va avec
astuces jouer sur les tableaux. Il demande à l'un ce que l'autre refuse.
S'il ne se heurte pas à un bloc indissoluble, on comprend qu'il se livre
avec complaisance à ce sujet de va-et-vient, petit tyran jamais
satisfait, assistant à cette lutte dont il est l'enjeu.»
En définitive, le fils unique est
privilégié par ses parents par rapport aux autres. Cependant,
cela ne veut pas dire qu'il aura un bon avenir par rapport à ses soeurs
lorsqu'on tient compte des mauvais comportements qu'il peut adopter. A ceci
s'ajoutent des mauvais traitements qu'il peut subir de la part de ses soeurs
lorsque ses parents sont absents à la maison. A ce moment, il se trouve
écarté par ses soeurs, que ce soit dans les jeux ou dansd'autres
travaux en commun.
7. 2. La place primordiale
du fils unique dans une famille
Le sexe des enfants est l'un des principaux facteurs de
dislocation des foyers dans le Burundi traditionnel et même moderne. En
effet, les Burundais appréciaient beaucoup le sexe masculin. La
naissance d'une fille n'est pas accompagnée d'une grande joie comme
celle du garçon. On dit qu'une fille n'est pas un enfant de la famille.
Les Burundais préfèrent les garçons aux filles car, ce
sont eux qui assurent la continuité de la famille. Par contre, la fille,
par le mariage, quitte sa famille pour élargir une autre famille qui
n'est pas la sienne. Ainsi, affirme ATH : « Iyo mvuze ko umuhungu
ariwe mwana mfise, abakobwa ndumva bidoga ariko bigaragara. Ndazi ko bagiye
kwubaka bizoba biheze.»
C'est-à-dire :« Les filles se lamentent
quand je dis que le fils est le seul enfant que je possède, alors que
c'est clair. Je sais que lorsqu'elles iront se marier, ce sera
fini.»On constate par là que la raison qui pousse les parents
à accorder peu d'importance aux filles est que ces dernières
quittent leur propre famille en allant se marier. D'autres cas ont
affirmé des raisons de mieux placer le fils unique dans leur famille.
D'abord MET, père de la famille, dit ceci : «Atavyo
kubesha, umuhungu ni we aza imbere mu bandi bana, kuko niwe azosigara asanze
urugo.»
Ce qui se traduit ainsi : « Sans mentir, le fils
vient en premier lieu parmi les autres enfants, car c'est lui qui restera pour
la sécurité de la famille.» Le fils est le plus
aimé parce que c'est lui qui remplace valablement son père dans
la famille. Le rôle du père est celui d'assurer la
sécurité familiale et le fils unique le jouera plus tard et sera
le responsable de la famille après la mort de ses parents. Ensuite,
à part que MET évoquait la raison culturelle fondée sur le
patriarcat, SUZ mère dans le couple a parlé de la question
d'héritage comme raison économique de cette manière :
« Uwo muhungu tumukunda kuko ariwe samuragwa.»
Ce qui veut dire : « Nous aimons ce fils parce
que c'est l'héritier des biens familiaux.»A partir des propos
d'ATH, SUZ, MET, CAN et MUJ, on comprend que si un homme meurt sans laisser
d'héritier mâle, il trouve que son groupe familial s'éteint
et c'est là une contrainte pour son avenir. Donc, l'enfant a non
seulement une valeur économique (aider les parents dans
l'exécution de multiples travaux par exemple), mais aussi, il assure la
continuité de la lignée familiale.En s'appuyant sur une
théorie, dans leur enquête sur la famille et la
fécondité au Burundi, NAVAS J. et son équipe (1977, p.52)
trouvent que certains de leurs enquêtés préfèrent
une famille pauvre avec un enfant unique mâle à une famille riche
avec des filles seulement. Et selon eux, « ce garçon unique
héritera la propriété familiale et pourra engendrer des
garçons et des filles que son père n'a pas eus, assurant ainsi la
continuité de la lignée.»
Nous constatons que l'importance qu'on attache au sexe de
l'enfant dans le Burundi traditionnel n'a pas changé. En effet, parmi
les six cas de famille ayant un seul fils, un seul cas a manifesté un
sentiment d'égalité entre enfants. Nous rappelons les propos de
NIC, mère dans la famille qui dit quetous les enfants sont égaux
et que si on aime l'un plus que l'autre, on sème la mésentente
dans la famille.Nous remarquons plus particulièrement que la culture
influence beaucoup dans les familles burundaises. Les parents éduquent
et considèrent les enfants selon le modèle patrilinéaire
comme le montre, ainsi, BIGANGARA J.B. (1986, p.89) :« Le
père de la famille jouit d'une autorité absolue sur sa femme et
ses enfants. Il est obligé d'assurer la survivance de la lignée
patrilinéaire.» L'idée évoquée ici du
rapport « dominateur-dominé» ou tout simplement
«homme- femme» est un préjugé auquel on
continue à adhérer. Ce préjugé met en avant le sexe
masculin comme dominateur pour le sexe féminin.
Rappelons que les propos d'ATH montrent que la lignée
familiale est assurée par le fils. Le fils est éduqué pour
remplacer son père. En effet, tout cela découle du fait que le
Burundi est caractérisé par le système patriarcal. Et si
nous nous référons aux caractéristiques de la
société burundaise données par NTAHOMVUKIYE J. et al.
(2001, p.4), la société burundaise est caractérisée
par:
« -Un système de domination du
mâle ;
-Un système de contrôle culturel,
économique, social, religieux et politique monopolisé par les
hommes ;
-Un système où les responsabilités
reviennent au genre masculin, le sexe féminin est dominé par le
sexe masculin.»
Dans la société burundaise, c'est le père
qui est le chef de la famille. Le fils unique est, par conséquent,
placé au premier rang, mieux formé pour qu'il puisse diriger et
devenir chef de la famille qu'il aura fondée. C'est ainsi que même
pendant son enfance, il occupe la première place dans la descendance.
Ceci se montre également par un profond attachement que les parents
affichent à l'égard de leur fils unique.
7. 3. La profonde
affection entre parents et fils unique
Quand l'homme décide de se marier, il porte en lui des
sentiments de procréation, c'est-à-dire avoir une descendance.
Mais pour les parents, la descendance masculine vient en premier lieu, parce
que c'est le garçon qui est chargé de suivre les biens de sa
famille quand ses parents ne seront plus. Donc, le fils, s'il est unique dans
une fratrie nombreuse, importe beaucoup. Dans ses propos, ATH montre
l'importance du fils dans la famille.Pour ATH, le fils a une valeur comme
celle de son père. En l'absence de ce dernier, on comprend bien que
c'est le fils qui va prendre le pouvoir familial après la mort de son
père. MET a également appuyé l'idée de cette
manière : « Umuhungu ni we atorana, ni we uraga amatungo.
Utavyaye agahungu na kamwe umuryango uca usambuka.»
Ce qui se traduit ainsi : « C'est le fils qui
hérite la richesse familiale, quand on n'a pas procréé au
moins un seul fils, la famille disparaît.» Ceci montre que le
Burundi attache une importance capitale sur la descendance masculine. Celle-ci
perpétue le nom de la famille et garde les biens familiaux selon ATH,
MET, SUZ, et CAN. L'absence des fils peut être à la base de la
mésentente familiale même si cette famille est bien nantie
matériellement.Les attitudes que les parents d'un fils unique adoptent
dépendent de la personnalité de chacun des parents ou des
relations qui les unissent. Il y a des parents hyperprotecteurs qui veulent
surprotéger leur fils unique. Dans ses propos, CAN sécurise son
fils unique comme son unique richesse. Elle a peur de le perdre et le prive de
circuler sans but. Ainsi, dit POROT M. (1979, p.106),« parfois un
petit camarade jugé acceptable par le tamisage maternel lui permet de
satisfaire tant bien que mal son désir de contact social.»
D'autres parents comme SUZ, ATH et MET épargnent leur fils unique de
tout effort. Ils veulent le faire vivre dans un univers où tout est
rassurant et facile. Selon ces parents, le fils unique est
surprotégé et ne connaît pas de frustration. On satisfait
même ses plus petits désirs et quand il demande quelque chose, il
l'obtient immédiatement. Donc, un fils unique suscite trop de soucis
pour ses parents qui s'inquiètent pour lui. A ce moment, il leur devient
difficile d'ignorer ses demandes.
Comme pour les hommes, ne pas avoir de garçon dans une
progéniture est une situation aussi douloureuse pour la femme. Et si,
par chance, il naît un seul fils, il devient précieux pour la
famille. C'est pourquoi on lui donne une affection aussi profonde qu'elle soit.
Ainsi, dit ATH : « Ndetse ko ndamubungabunga, ntakindi
ndamugirira kuko ivyo mfise vyose ni ivyiwe.»
Cequi se traduit de cette manière: « A part
que je l'entretiens, je ne lui offre rien de spécial car tout ce que je
possède lui appartient.» La richesse familiale devrait
être partagée par tous les enfants. Mais, pour ATH, le fils unique
est le seul héritier et les filles bénéficient
l'héritage de leurs époux. A cette idée, ajoute Madame
SUZ : « Iyo ansavye ikintu mba nshaka ko aca akironka. Atakironse
nca numva umengo ni jewe mbabaye. Numva ikigumbagumba bigatuma ntashobora
kwihoza ico ansavye kuko simba nipfuza kumushavuza.»
Cela veut dire : « Quand il me demande une
chose, je souhaite qu'il l'obtienne immédiatement. Lorsqu'il ne
l'obtient, je me sens moi-même touchée. Je ressens
spontanément une profonde affection et cela m'empêche de faire la
sourde oreille car je ne veux pas qu'il se fâche contre moi.»
On comprend que les parents du fils unique ont peur de perdre l'affection de
leur fils et c'est la raison pour laquelle ils affichent une très grande
sollicitude envers ce fils. Ils ne veulent pas le perdre de vue. Cependant, les
comportements affichés par les parents provoqueront, plus tard, une
sorte de rivalité dans la fratrie.
7.4. Les comportements des
parents comme source de rivalités fraternelles
Le sexe des enfants influence toujours les relations
familiales et fraternelles. Suivant que tel parent privilégie les
enfants de tel sexe, ceci peut provoquer des conflits au sein de la fratrie.En
effet, pour notre étude, nous avons constaté que nos
enquêtés privilégient le sexe masculin. Par exemple, MET
privilégiait son fils unique dans tout. Ainsi, il dit : «
Hize umuhungu, abakobwa n'aho batokwiga ntaco.»
Ce qui veut dire : « Si le fils est
scolarisé, alors que les filles ne le sont pas, il n'y aurait pas de
problèmes.»Par conséquent, si le fils unique est
privilégié au détriment des filles, ces dernières
peuvent devenir jalouses à l'égard de ce fils et les conflits
fraternels y trouvent dès lors leur origine. Dans ses propos ATH montre
la jalousie de ses filles envers le fils unique car ce dernier est beaucoup
privilégié.Cette situation montre que les parents doivent tenir
compte des conséquences qui découlent de la façon dont ils
considèrent les enfants. Le but serait ici d'éviter sinon limiter
les conflits entre frères et soeurs pouvant affecter tous les membres de
la famille. Il convient alors ici de donner des conseils aux fils uniques et
aux parents démissionnaires de leurs rôles éducatifs pour
qu'ils puissent eux-mêmes harmoniser les relations familiales et la
réussite éducative de leurs enfants.
7.5. La maltraitance faite
au sexe féminin
Au Burundi, les filles sont négligées et
maltraitées de différentesfaçons. Certaines filles peuvent
êtremaltraitées psychologiquement, c'est-à-dire qu'elles
sont victimes d'une attitude parentale négative. Par exemple, la fille
est dénigrée sans cesse, ridiculisée, ses succès
sont méprisés, elle est privée de contacts sociaux. Une
fille est égalementnégligée psychologiquement et
émotionnellement lorsqu'elle ne reçoit pas assez d'attention,
d'affection et de sécurité. Rappelons que MUJ maltraite les
filles et son épouseparce que celle-ci n'a pas engendré des
garçons. Aux yeux de MUJ, le sexe féminin n'a pas de valeur comme
lui-même l'a révélé. MUJ maltraite sa femme parce
que cette dernière a engendré les filles. La maltraitance a pris
fin avec la naissance du fils. Pour dire que les garçons et les filles
n'ont pas la même valeur chez lui. La maltraitance faite à la
femme de MUJ touche psychologiquement ses filles car elles voient qu'elles
sont la cause de celle-ci. Les filles remarquent,à ce moment-là,
que le sexe féminin occupe la deuxième place en famille et joue
également le rôle secondaire dans la famille car le sexe masculin
domine dans tout. Les filles sont alors angoissées comme le souligne
HAYEZ J.Y. (1982, p. 224) en ces termes : « Il est des
enfants angoissés parce que le parent de leur sexe joue lui-même
un rôle secondaire dans l'économie familiale : plus timide,
plus inconsistant, dominé par son partenaire ; dans ces conditions,
l'enfant ne se sent pas protégé par lui et il est
culpabilisé à l'idée - plus ou moins illusoire - de
triompher de lui et de l'abattre au détour de son mouvement oedipien.
»Lorsque les filles remarquent que leur mère est
limitée dans la prise des décisions, elles sont angoissées
de plus. Elles voient réellement que leur place en famille est
secondaire et acceptent, de ce fait, la domination de leur frère.
La négligence des enfants plus particulièrement
celle des filles peut êtrematérielle. La
négligencematérielleest caractérisée par un manque
de soins des enfants (manque d'habits,de temps de repos, insuffisance des
conditions sanitaires...). Comme le souligne TOURIGNY cité par NDAYISABA
J. et DE GRANDMONT N. (1999, p.347), « la négligence
est le refus de la part de la personne chargée d'éduquer
l'enfant, d'administrer à celui-ci les soins nécessaires
et de répondreà son besoin d'affection. Elle peut
être physique comme refus de nourrir l'enfant, refus de l'habiller ou
affective comme l'enfant rejeté,ignoré, l'enfant traité
comme simple objet. » Les filles sont, à cause de la
tradition culturelle burundaise, moins considérées. Elles ne sont
pas envoyées à l'école au même rythme que les
garçons comme MET le souligne dans ses propos.
Les filles donc sont appelées à se soumettre
aux hommes tout en affichant respect et obéissance. Devenues femmes, les
filles gardent cette même valeur en famille. Ainsi, ATH dit
ceci : « Abakobwa kuva kera ntibigeze batorana,
turabarera kugira bagire indero runtu yo kubaha, kugira ntibazodutukishe nibaja
kubaka, bazokubahe abagabo babo. »
Ce qui veut dire : « Depuis
longtemps, les filles n'héritent pas, on les éduque pour
qu'elles aient une éducation d'obéissance, pour qu'elles ne nous
déshonorent pas après le mariage, pour qu'elles obéissent
à leurs époux. » La tradition est à la
cause de cette problématique de déconsidérer les
filles. Les filles sont éduquées pour la vie à une
autre famille, pour le respect de leurs futurs époux. Les filles sont
privées de l'héritage de leurs parents, elles héritent
chez leurs époux.
En clair, il s'agit d'une injustice commise à
l'égard de la femme comme le souligne, ainsi, le PNUD (1999,
p.21) : « Juridiquement, sous certains aspects, les femmes
burundaises ne jouissent pas pleinement des mêmes droits que les hommes.
Le code des personnes et de la famille accuse encore des insuffisances en
matière d'héritage et de succession. » Nonobstant,
la femme ne devrait pas être écartée lors de la succession
dans la mesure où elle participe beaucoup à la production
familiale et au bien-être familial.Le statut de la femme en
général est en rapport avec le contexte socioculturel. Son image,
aux yeux de la société burundaise, n'a pas encore
évolué bien qu'on prône son émancipation. Etant
donné que les femmes participent à peine aux décisions
politiques, on continue à ignorer de façon
délibérée leurs droits et les aspirations
légitimes.Selon BEAUVOIR S. (1979, p.25),« il est plus
facile d'accuser un sexe que d'excuser l'autre(...). Le code romain, pour
limiter les droits de la femme, invoque l'imbécilité, la
fragilité du sexe. » Même si les femmes n'ont pas
eu cette occasion de participer massivementà toutes les activités
que les hommes, elles sont aussi courageuses que ces derniers quand on les
confie un travail.
Dans cette optique, on peut se poser la question de savoir
dans quelle condition et comment les femmes doivent élaborer des
alternatives susceptibles de leur faire sortir de leur situation
défavorable. Pour promouvoir la condition de la femme, BOURGUIBA M.
(1962, p.73) pense que « la société ne peut
progresser et aspirer à une vie réellement digne que lorsque
l'homme et la femme modifient leur comportement et leur optique l'un
vis-à-vis de l'autre. » Le fils unique est placé
au premier rang dans la famille car il va remplacer son père, chef de
famille après la disparition de ce dernier. Nous pensons que cet
état de choses résulte, dans la société burundaise,
du fait que la domination masculine constituait l'idéal culturel. A ce
sujet, NEWLAND K. (1981, p.160) écrit ceci: «
lorsque la domination masculine constitue l'idéal culturel, un
garçon de douze ans sera qualifié ou se qualifiera même
personnellement de chef de la famille dans un foyer dépourvu d'homme
adulte. »Il faut donc, pour que les femmes sortent de
cetétat de choses, que les hommes sachent bien que les femmes sont aussi
courageuses. Les femmes doivent elles-mêmesparticiper dans toutes les
décisions prises à leur égard et participent dans la vie
socio-politico-économique du pays.
Nous avons évoqué dans ce chapitre les
traitements réservés au fils unique, la place du fils unique dans
la famille, les attitudes des parents comme source de rivalités
fraternelles et la maltraitance faite au sexe féminin. Nous pouvons
conclure toute en disant que les garçons et les filles sont
traitésdifféremment. Mais les traitements réservés
au fils unique comportent de lourdesconséquences pour ce dernier.
CHAPITRE VIII : LE
FILS UNIQUE, SES PARENTS ET LES PERSPECTIVES
Dans ce chapitre, nous avons relevé quelques
conséquences du fait de fils unique sur l'enfant lui-même et sur
ses parents et qui peuvent bloquer une existence équilibrée d'un
fils unique dans une famille. . Les traitements subis par le fils unique
peuvent engendrer chez l'enfant de lourdes conséquences comme le manque
d'autonomie, de responsabilité et autres.Nous avons également
donné quelques perspectives pouvant aider les parents et le fils unique
dans sa conduite vers le développement harmonieux de ses relations et de
sa personnalité.
8.1. Les
conséquences néfastes rencontrées par le fils unique dans
une famille
Chaque enfant a, son hérédité, son
histoire, ses qualités et ses défauts. Il est évident que
la situation qu'il vit dans sa famille est différente de celle des
autres, mais la façon dont le fils unique l'exploitera dépend de
deux grands facteurs à savoir les parents et l'environnement familial.
Toutefois, le fils unique peut avoir des problèmes qui lui sont
spécifiques et qui peuvent avoir des retombées négatives
sur lui et la famille elle-même si les parents n'y prennent pas garde.Les
parents hyper-protecteurs vont à l'encontre du bien-être de leur
fils unique puisqu'ils l'empêchent de devenir autonome. Ceux-ci veulent
agir toujours à sa place. Il n'y a aucun secteur de sa vie dans lequel
ils n'interviennent pas en voulant l'orienter chaque fois, même dans le
choix des amis. Ainsi, dit CAN:« Ntawomureka ngo yigire ivyo
yishakiye. Wewe ntabona ko abangamiwe. Ntegerezwa kumucunga kugira ntagire
ingorane. »
Ce qui se traduit par : « On ne peut pas le
laisser faire tout ce qu'il veut. Lui, il ne voit pas qu'il est exposé
aux dangers. Je dois le surveiller pour qu'il ne rencontre pas de
problèmes.»Pour que l'enfant développe mieux son
autonomie, il faut qu'il ait une certaine liberté dans ses
activités. Le choix des amis ne doit pas être guidé par
quelqu'un d'autre. Cette indépendance va s'accroître au fur et
à mesure qu'il grandit et aura une importance vers l'âge adulte
lorsque l'enfant se détachera de ses parents pour fonder sa propre
famille. Nous nous appuyons sur les propos de WINNICOTT D.W. cité par
KUBWIMANA J.D. (2005, p.3) pour affirmer que « chez l'enfant, le
développement affectif intervient si des conditions suffisamment bonnes
lui sont offertes. Les forces vers la vie, vers l'intégration de la
personnalité, vers l'indépendance, sont extrêmement
puissantes et si les conditions sont suffisamment bonnes, l'enfant progresse.
Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, ces forces sont retenues dans
l'enfant et d'une façon ou d'une autre tendent à le
détruire. »
C'est ainsi que l'absence d'autonomie dès le jeune
âge aura des effets importants à l'âge adulte comme celui de
ne plus satisfaire ses propres besoins sans l'intervention.
Un fils unique élevé avec autant de
précautions ne peut pas manquer de difficultés dans sa vie
ultérieure. Même s'il grandit physiquement, il peut rester
psychologiquement enfant parce qu'il n'a jamais pris de responsabilités.
En voulant trop le protéger, ses parents créent, chez le fils
unique, des attitudes de dépendance. De cette façon, ils peuvent
gâcher sa vie alors qu'ils se croyaient entrain de lui faire du bien.
Dans les familles à fils unique, les parents pensent souvent à sa
liberté. C'est le cas de MUJ qui a fait gâter son fils en lui
privant des travaux dès son enfance, et qui, par après, est
devenu un enfant très difficile. Finalement, MUJ a constaté qu'il
faut battre le fer tant qu'il est chaud.DODSON F. (1979, p.226) suggère
que « si vous donnez à manger à votre
bébé quand il a faim, si vous le cajolez beaucoup, si vous ne le
laissez pas crier sans intervenir, il éprouvera un sentiment de
satisfaction à l'égard de lui-même et du monde qui
l'entoure et pourra acquérir un point de vue résolument optimiste
sur sa vie. » L'enfance est une période la plus
importante de la vie car c'est làoù l'enfant va
acquérir son attitude fondamentale à l'égard de
lui-même et du monde qui l'entoure. Il est nécessaire que l'enfant
obtienne en même temps des moments de frustration et d'ambiance.Lorsque
l'enfant est laissé avec beaucoup de liberté, il est
automatiquement gâté et irresponsable dans tout. Il faut donc que
les parents entraînent leurs enfants dès le bas âge à
exercer des travaux domestiques, en lui confiant plus des
responsabilités.
La solitude est un phénomène où
l'individu se sent seul et éprouve des difficultés de
communication. L'absence de l'un et de l'autre avec qui on peut dialoguer
laisse une blessure chez l'enfant qui évolue jusqu'à sa vie
d'adulte.En effet, la communication s'établit chez l'enfant à
partir de la communication familiale et évolue à travers des
phases très différentes qui continuent d'exiger l'investissement
à la satisfaction des besoins de l'individu. Ces propos de SUZ montre
que le fils unique est beaucoup touché par la solitude : «
Ingorane afise ni irungu kuko ahora ambwira ko nari kuvyara abandi
bahungu.»
Ce qui se traduit ainsi : « Le seul
problème qu'il a c'est la solitude car quelquefois, il me disait que je
devrais engendrer d'autre fils.» Le fils unique reste seul même
s'il est avec ses soeurs. Le fait qu'il se voit comme le seul garçon
dans la famille ne le satisfait pas. Il veut encore établir une
communication avec les garçons. La solitude qui le limite dans ses
interactions le rend associable car la solitude diminue la communication avec
les autres personnes.
En nous référant à cette théorie
de SILLAMY N. (1980, p. 241), nous comprenons l'importance de la communication.
Pour l'auteur, « la communication est un élément
fondamental et complexe de la vie sociale qui rend possible l'interaction des
personnes.» Selon SUZ, le fils unique n'est satisfait dans sa
fratrie. Souvent, il reste calme parce que le dialogue de ses soeurs ne le
satisfait pas. C'est le cas qui est arrivé chez CAN quand il dit ceci:
« Ndabona ko umuhungu wanje afise ingorane kuko kenshi aguma ahoze.
Sinzi ko ari kubera abura abo bikina, na bashikiwe ntibaganira, kuko baba
bibereye muvyabo.»
Ce qui veut dire: « Je vois que mon fils ades
problèmes car il reste souvent impossible. Je ne sais pas si c'est parce
qu'il manque d'autres avec qui il peut jouer. Il ne joue pas avec ses soeurs,
car celles-ci s'occupent de leurs propres affaires.»Il faut toutefois
souligner que la solitude est un comportement qui handicape la vie de chaque
personne. Pour le fils unique, c'est également un handicap
éternel, car le dialogue est nécessaire dans la vie de
l'individu. Ainsi, dit POURTOIS J.P. (2000, p.31), «si l'acte de
communication est essentiel dans le développement social de tout enfant,
il reste d'une extrême importance durant toute la vie d'un
individu.» Ainsi, de nombreux auteurs insistent sur le fait que plus
l'enfant grandit plus le dialogue devient nécessaire. Egalement, plus
l'enfant échange avec ses amis, plus sa personnalité devient
mûre afin de s'adapter à la vie sociale.
Si le fils unique constate que ses parents se montrent
toujours tolérants envers ses manquements, qu'ils se sacrifient pour
répondre favorablement à toutes ses sollicitations et qu'ils se
soumettent à toutes ses caprices, celui-ci peut développer un
caractère bizarre. Nous nous référons aux propos de MUJ
qui, dès l'enfance de son fils, s'est sacrifié en satisfaisant
toutes ses sollicitations. A l'âge adulte, son fils a adopté de
mauvaises attitudes en se livrant dans la délinquance, le banditisme et
l'ivresse.Partout où il se trouve et dans n'importe quelle situation, il
continue à manifester ce type de comportement. Il aime battre d'autres
enfants. Ces parents, en se montrant faibles devant le fils unique, l'exposent
à de nombreux dangers. Au sujet de cette faiblesse d'autorité
parentale, voici ce que dit LERICHE A. M. (1975, p.45) :«
Certains parents, pour épargner à leurs enfants peurs et
complexes, abdiquent toute autorité et font apparemment preuve d'une
compréhension infinie. Ils ne sont pas mécontents de voir leur
progéniture en visite chez les amis, grimper et sauter partout,
déranger toutes les affaires, réclamer sans arrêt à
boire et à manger, vouloir qu'on s'occupe d'eux.»Le fils
unique, élevé avec trop de tolérance, se comporte comme il
veut devant n'importe qui. Comme il est le seul être cher en famille et
vers qui se dirigent toutes les attentions, celui-ciest traité
d'intouchable. Il est adulé et il règne sur son territoire
familial. Ainsi, toutes les bêtises sont acceptées et il continue
à les faire même à l'extérieur de la cellule
familiale.Aux yeux des parents, tout est tolérable. Donc, lorsqu'il y a
relâchement total au niveau de l'éducation d'un fils unique ou
tout simplement de n'importe quel enfant, celui-ci peut en outre
développer des attitudes de domination, ceci parce que ses parents ne
font que s'incliner devant ses exigences, ce qui peut sans doute le rendre
insupportable. Voici les propos de MUJ à ce sujet : « Iyo
umwana utamureze neza hakiri kare, akuze ntaba akigondwa. Abavyeyi bakwiye rero
gukarira abana babo bakabaha indero runtu bakiri bato.»
Ce qui signifie : « Lorsque l'enfant n'est pas
bien élevé dès son bas âge, il devient insupportable
à l'âge adulte. Les parents devraient donc montrer leur
autorité en donnant une éducation civique à leurs enfants
depuis leur jeunesse.»En définitive, il faudrait que les
parents inculquent à leurs enfants le sens du respect dès le
jeune âge ou tout simplement les bonnes manières. A part que les
fils uniques connaissent des conséquences liées à leur
unicité, leurs parents aussi en connaissent.
8.2. Conséquences
pour les parents à fils unique
Le phénomène de fils unique suscite diverses
attitudes chez ses parents. Ces attitudes peuvent avoir des influences sur
l'éducation de ce fils. Les parents pourront également avoir des
difficultés qui découlent de l'unicité du fils telles que
la culpabilité et l'autorité faible. Nous avons donc noté
une sorte de culpabilité chez les parents du fils unique quand celui-ci
n'est pas visible à leur égard. Ainsi, nous rappelons les propos
de CAN qui se trouve dans l'insécurité, de crainte que la mort
puisse emporter son fils unique. Les parents à fils unique sont plus
craintifs car ils prévoient l'avenir de leur famille à leur fils.
Et si, par malheur, la mort emporte ce fils, la famille disparaît. Le
fait que le fils continue la lignée familiale, les parents essayent de
le protéger à toute difficulté.
A propos de la culpabilité que ressentent les parents
hyperprotecteurs, LERICHE A. M. (1975, p. 24) signale que « les
parents sont eux-mêmes très anxieux et malheureux. Ils se sentent,
souvent inconsciemment, coupables à l'égard de leurs enfants et
c'est pour réparer ou expier cette faute imaginaire et
inconsciente.» Parfois les parents d'un seul fils affichent une
anxiété liée au fait que leur fils peut être perdu
d`un moment à l'autre et que ces parents restent avec une
progéniture seulement féminine.
Dans la mentalité burundaise traditionnelle, un seul
fils est considéré comme un seul enfant ne fait pas la famille.
Souvent, on dit : « Umwana umwe ntagira
umuryango », ce qui veut dire: « Avoir un seul enfant
n'est pas encore avoir de la famille.» Et l'enquêté CAN
le confirme aussi en se montrant insatisfait de son unique fils. Au Burundi,
celui qui a un seul enfant est considéré presque comme s'il n'en
avait pas. D'une part, le couple est heureux de l'unique enfant et, d'autre
part, le couple tombe dans l'anxiété, hanté par la peur de
perdre l'enfant. Le fils unique est aussi considéré comme le seul
enfant, car unique garçon dans la famille. Ces propos ont
été également répétés par un
enquêté de NAVAS J. et al. (1977, p.52) en disant que :
« Avoir un seul enfant, c'est comme avoir un seul oeil : s'il se
ferme, on devenait aveugle.»Ces propos montrent que les Burundais
avaient peur de la mort et particulièrement celui qui a un seul fils ne
pouvait pas être tranquille. Le fils unique ne confère pas
à la famille le sentiment de satisfaction. Il restait plus un objet
d'anxiété et d'angoisse que de joie.
Dans le but d'éviter à leur fils unique peines
et frustrations, certains parents abdiquent leurs responsabilités et
font preuve d'une compréhension infinie. A ce moment, les
conséquences au niveau de l'éducation du fils unique ne sont pas
du tout bonnes.En effet, le respect et la discipline semblent être
relâchés et il y a risque de déviation au niveau du
comportement du fils unique. Voici ce qu'a raconté MUJ sur les
comportements de son fils : « Urya muhungu aragoye cane, arakunda
gushwana na bashikiwe. Ugize uravuga hari igihe aca agutuka. Urumva indero
sinziza.»
Ce qui signifie : « Ce fils-là est
très difficile, il aime disputer avec ses soeurs. Si nous essayons de
lui donner des conseils, il arrive qu'il nous insulte. Donc, on comprend bien
qu'il n'est pas bien éduqué.»Depuis son enfance, le
fils de MUJ a été bien traité. Ses demandes ont
été immédiatement fournies. Il n'est pas puni dans son
enfance, ce qui l'a poussé à avoir un comportement asocial. C'est
ce que dit encore MUJ en ces mots : « Umwana umureze adahanwa ni
bibi, kuko aca akura ari umunyamafuti. Ubu twararengewe yarabaye umuhimbiri
ntakivayo.»
Ce qui se traduit ainsi : « Si un enfant est
traité sans subir des punitions, c'est très mauvais, car il
grandit étant fautif. Aujourd'hui, nous sommes dépassés
par sa délinquance, il ne peut plus être
corrigé.» L'absence de l'autorité parentale chez
l'enfant lui permet d'avoir une personnalité faible. Si l'enfant devient
associable, il peut devenir incapable de résoudre les problèmes
qui pourraient lui arriver. MUJ comprend maintenant qu'un seul fils a besoin
d'un traitement un peu sévère dès son enfance, car, comme
l'écrit SILLAMY N. (1980, p.39), «l'autorité est aussi
nécessaire que l'affection. Au moment de l'adolescence, elle devient
plus importante. Sans autorité, l'éducation se fait
mal.»En voulant trop protéger le fils unique, dit MUJ, on
l'expose sans le savoir à de nombreux dangers. A ce sujet, LESCURE M.
(1978, p.110) trouve qu'«élever l'enfant sans contrainte aucune
sous le fallacieux prétexte de respecter la liberté, c'est le
livrer à sa propre fantaisie à un âge où celle-ci
risque d'être tyrannique et mal le préparer aux contraintes de la
vie sociale.» Il faut donc noter que les parents doivent
êtreun peu sévères en équilibrant
sévérité et affection.
8.3. Conseils donnés
au fils unique et aux parents
Nous remarquons qu'il y a des familles où les parents
affichent une affection extrême à leur fils unique et une
affection presque absente à leurs filles. Rappelons que SUZ aime
beaucoup son fils et que MUJ a délaissé ses filles au profit
deson fils. Le fils de MUJ a reçu un amour excessif mais son
éducation n'est pas meilleure. Ce qui implique que l'excès ou
l'absence d'une affection engendre une mauvaise discipline chez l'enfant.Dans
ces conditions, l'enfant sera plus difficile et les relations entre parents et
filles seront de plus en plus détériorées ouabsentes. A ce
sujet,pour PLAQUEVENT J. (1996, p.70), « est artificielle, donc
ennuyeuse et aisément mortelle, toute discipline dont l'amour est absent
ou simplement suffisamment présent. Un amour relatif n'autorise de ce
fait qu'une discipline relative.»Il faut donc que chaque parent donne
à chaque enfant une affection équilibrée. Nous ajoutons
que l'absence des relations chaleureuses entre parents et enfant crée
chez ce dernier un sentiment d'insécurité.
Dans toute éducation, des prescriptions et des
proscriptions établissent des limites au sujet de ce qu'il faut faire
et de ce qu'il ne faut pas faire. Mais il faut que l'amour fasse bon
ménage avec l'autorité. L'amour et l'autorité se
complètent. Certains fils uniques sont victimes de l'absence de
l'autorité du père, ce qui les plonge dans la délinquance.
Les filles sont également dans l'insécurité à cause
de l'absence de l'autorité du père. Ainsi, pour PLAQUEVENT J.
(1996, p. 86) « l'équilibre premier et fondamental de
l'affectivité doit être dès l'origine, une
sécurité totale.» Cette sécurité totale
ne peut se retrouver nulle part, si elle ne s'enracine pas dans la famille.
En effet, pour assurer le développement harmonieux de
l'enfant, le père et la mère doivent exercer des rôles
complémentaires, pour aboutir à une bonne éducation de
chacun de leurs enfants. Cependant, nous remarquons que la cohésion du
couple n'a pas été réalisée pour qu'elle soit
garante de l'affection pour tous les enfants. Ainsi, CAN, ATH, SUZ et MET font
comprendre qu'ils s'intéressent beaucoup à leurs fils. Leurs
filles n'ont pas bénéficié de la même affection que
le fils unique.Il en va de même pour le père, personnage important
dans l'univers de l'enfant, son absence au foyer et sa non-assomption du
rôle paternel entraîne de graves difficultés tant sociales
que psychologiques pour les membres de la famille. Rappelons que MUJ se montre
démissionnaire de son rôle éducatif. Il n'a pas
affiché l'autorité pour son fils. Son fils est aujourd'hui
tombé dans l'incapacité de vivre harmonieusement dans la
société et plus particulièrement dans sa famille.
La famille a des obligations qu'elle doit assurer à
l'endroit de l'enfant, à défaut desquelles ce dernier va
manifester des comportements dits anormaux. Ainsi, la famille a le devoir de
veiller à l'harmonie de la croissance physique de l'enfant. A l'adresse
des parents qui ne manifestent pas d`affection à leurs enfants, qui sont
souvent accablés par le travail, WINNICOTT D.W. (1957, p.10)
écrit : «L'amour et la tendresse maternels sont pour le
psychisme ce que sont les vitamines pour le physiologiste.» Le
psychisme de l'enfant se développeparticulièrement en
présence d'un amour et d'une tendresse moyenne à travers ses
parents. Comme l'excès ou l'absence des vitamines engendre des effets
néfastes sur le corps, l'excès ou l'absence d'affection engendre
des comportements anormaux pou l'enfant.
Effectivement, la mésentente des parents, la
dislocation familiale, l'absence d'un des parents ou la surcharge
professionnelle des parents sont à l'origine des carences affectives
dont souffrent bon nombre d'enfants à comportement difficile. Signalons
que nos enquêtés vivent à majorité en
présence de leurs enfants. Ce qui fait qu'un aucun enfant n'a aucun
problème de carences affectives dû aux surcharges professionnelles
de ses parents.C'est du reste dans le même sens que BERNARD P. (1979,
p.10) écrit ceci : « Le besoin de sécurité
doit être satisfait pour vivre une relation sans angoisse avec les
autres. Ce besoin de sécurité presque aussi vital que la
nourriture est assuré par les deux parents ou par un substitut. Ainsi,
il est essentiel que le nourrisson ou le jeune enfant trouve à
satisfaire ce besoin de sécurité et de protection en vivant des
relations affectueuses intimes et continues.» L'éducation d'un
enfant exige d'efforts de la part des parents, ceux-ci doivent créer un
environnement favorable pour l`épanouissement de celui-ci.
L'éducation d'un fils unique n'a rien de plus particulier que celle des
autres fils issus des familles à plusieurs garçons. Le fils
unique a alors des problèmes spécifiques comme les autres ont les
leurs. Toutefois, une certaine fermeté face à cet enfant est
nécessaire pour le guider vers une meilleure constitution de sa
personnalité.
A partir des propositions de nos enquêtés et en
les confrontant avec celles des spécialistes qui sont
intéressés à l'éducation des enfants, nous sommes
arrivé à établir des perspectives qui pourraient aider
dans l'éducation du fils unique. Ainsi, dans les petites rencontres
fréquentes avec les enfants voisins de sexe masculin, le fils unique
aura l'occasion d'êtresocialisé, et de gagner ce qui lui manque
suite à l'absence des frères dans sa fratrie. L'adhésion
à des mouvements de jeunesse est suggérée comme donnant de
multiples possibilités de socialisation et tire le fils unique de la
solitude dans laquelle il est plongé.Les clubs sportifs, les
associations culturelles, les activités familiales peuvent
également favoriser l'insertion du fils unique dans des groupes. De
cette façon, le fils unique trouvera beaucoup de temps à vivre en
compagnie d'autres garçons. Il faut alors que les parents donnent cette
occasion à leur fils pour qu'il puisse s'épanouir dans le choix
de ses amis. En définitive, les parents qui prennent conscience des
dangers et des avantages de cette situation sauront créer des conditions
favorables à l'exploitation maximale des avantages et compenser les
risques éventuels.
CONCLUSION GENERALE
Au terme de notre travail, il convient de rappeler les
grandes lignes sur lesquelles reposait notre étude. Notre sujet avait
pour but d' « étudierla place du fils unique dans une
famille comptant une progéniture à majorité
féminine». Pour y arriver, il nous a fallu de passer par un
cheminement qu'il est nécessaire de rappeler ici. En effet, cette
recherche était articulée sur deux parties essentielles à
savoir le cadre théorique et méthodologique ainsi que la
présentation des cas, l'analyse des données et
l'interprétation des résultats de recherche.
D'abord, nous avons fait une introduction tout en
délimitant et en justifiant le sujet et en élaborant les
fondements théoriques et méthodologiques de la recherche. Nous
avons élucidé les concepts-clés et dégagé
des généralités sur la famille, le fils unique dans la
famille burundaise et nous avons présenté la problématique
de recherche et la méthodologie que nous avons utilisée. Nous
nous sommes posé des questions de recherche qui nous ont conduit
à la formulation de l'objectif général que nous avons
opérationnalisé. Dans notre travail, nous avons utilisé la
méthode qualitative et l'enquête par entretien semi-directif comme
technique de recherche, nous nous sommes entretenu avec six sujets habitant la
Commune MBUYE de la Province de MURAMVYA.
La deuxième partie de notre recherche consistait en la
présentation des cas, l'analyse des données et
l'interprétation des résultats de recherche. Ainsi, cette partie
nous a conduità dégager les résultats suivants. Concernant
le premier objectif spécifique qui consistait à cerner les
types de relations unissant les parents, les filles et le fils unique,
nous avons pu nous rendre compte qu'une partie de nos enquêtés
entretient de bonnes relations avec leurs filles et fils unique. Ceux-ci vivent
dans une ambiance d'entente et de compréhension, au moment où une
autre partie des enquêtés reste insatisfaite suite à un
phénomène de fils unique parce que ces derniers ne sont pas en
bons termes avec leurs filles.Eu égard donc des résultats
auxquels nous avons abouti en rapport avec cet objectif, nous pouvons dire que
celui-ci a été atteint.
Au sujet du deuxième objectif spécifique qui
consistait à découvrir les traitements affectifs
réservés au fils à cause de son unicité, nous
avons constaté que les parents ont des attitudes variées au plan
du traitement de leur fils unique. Il y aceux qui comprennent que tous les
enfants sont égaux et que ces derniers devraient subir les mêmes
traitements. Les autres parents interviewés ne sont pas du tout contents
de leur progéniture féminine et affichent une sollicitude plus
marquée à l'égard du fils unique. Ainsi, ces parents
donnent une affection profonde à leur fils et délaissent
relativement les filles. En tenant compte de tout cela, nous admettons que cet
objectif a été atteint.
Quant au troisième objectif spécifique, avec
lequel il était question de montrer les conséquences pour le
fils unique et pour sa famille, les résultats auxquels nous avons
abouti montrent que les conséquences pour le fils unique vivant dans une
famille comptant une progéniture à majorité
féminine sont nombreuses. En effet, ces conséquences ont comme
origine principale, l'attitude parentale face à
l'inégalité des sexes. Le sexe des enfants influence beaucoup sur
l'attitude des parents. La culture burundaise fondée sur le
système patriarcal est un facteur aussi influençant les parents
à fils unique.Les parents qui élèvent leur fils unique
avec douceur et surprotection exposent ce dernier à des
difficultés sans le savoir. Nous pouvons citer parmi celles-ci la
solitude, le manque de bonnes manières, le manque de
responsabilité et d'autonomie. Pour éviter cela, il faut que les
parents tiennent au même pied d'égalité leurs enfants, et
plus particulièrement en préparant le fils unique à
être autonome et responsable pour qu'il réussisse dans sa vie
future. Ainsi, avec les éléments ci-haut, nous disons que cet
objectif a été également atteint.
Enfin, s'agissant du quatrième et dernier objectif
spécifique qui consistait à proposer les précautions
à envisager dans une telle famille pour éviter le
préjugéfondé sur la discrimination des sexes, nous
avons relevé que NIC et MUJont donné des conseils aux parents
ayant des préjugés fondés sur la discrimination des sexes.
Disons la considération équitable des garçons et des
filles, la non-violence du sexe féminin et l'égalité des
enfants en matière de succession, etc. Ainsi, cet objectif a
été atteint.
En ce qui concerne l'objectif général qui visait
à étudier la place du fils unique dans une famille
comptant une progéniture à majorité féminine,
après avoir cerné les types de relations qu'entretiennent les
parents et les enfants, la place primordiale que les parents accordent à
leurs fils uniques au niveau familial, nous pouvons conclure que notre objectif
général de recherche a été atteint.Nous ne
prétendons pas avoir mené une étude exhaustive. C'est
pourquoi nous inviterions toute personne intéressée par le
domaine d'éducation dans son ensemble et en particulier en famille de
nous emboiter le pas pour approfondir le sujet et exploiter d'autres aspects
tels que :
Ø La place de la fille unique dans une famille
comptant une progéniture à majorité masculine.
Ø Le vécu psychosocial d'un couple à
progéniture uniquement masculine.
SUGGESTIONS
Au terme de notre travail, il s'avère judicieux de
donner des suggestions pour les différentes composantes de la famille
particulièrement les parents, le fils unique d'une part et, d'autre
part, l'Etat afin que les Burundais puissent placer les filles et les
garçons au même pied d'égalité.
v A l'endroit des Conjoints :
- Savoir que le garçon et la fille sont d'une
importance égale dans la famille. Cela éviterait les lamentations
et les traumatismes faits aux femmes ayant engendré les filles
uniquement.
- Cultiver l'esprit d'égalité des sexes dans
l'action éducative de leurs enfants. Les enfants tenus au même
pied d'égalité entretiennent des relations d'entente avec leurs
parents. Il n'y aura pas des lamentations des filles et favorisera le partage
du patrimoine familial.
- Savoir que les maris sont responsables de la naissance des
garçons et des filles pour qu'ils ne maltraitent pas leurs
épouses. Les maris qui savent bien qu'ils sont responsables du sexe des
enfants ne maltraitent pas leurs femmes. Ils comprennent facilement pourquoi
tel enfant est né avec tel ou tel autre sexe.
- Militer en faveur des droits de la femme dans la
conquête de l'égalité des sexes. Tous les Hommes devraient
êtreégaux,ce qui n'est pas le cas au Burundi.
L'égalité entre les hommes et les femmes devrait
êtreréclamée par ces dernières.
- Rompre avec les mentalités qui
déconsidèrent les filles. Puisque tous les enfants sont
égaux, les parents sensibilisés comprendront l'importance des
filles et, par conséquent, elles seront traitées de la même
manière que les garçons.
-Créer un environnement familial socialisant pour le
fils unique et ses soeurs. L'environnement familial crée un climat
d'entente dans la fratrie et diminue de ce fait la jalousie fraternelle.
- Jouer chacun son rôle en affichant chaque fois amour
et autorité suffisants et équilibrés pour tous les enfants
afin d'harmoniser le développement affectif de ces derniers. Ceci
aidera les parents à vivre en harmonie avec les enfants et ces derniers
auront une affection équilibrée et suffisante.
v Aux fils uniques :
- Ne plus profiter de leur unicité pour se rendre
insupportables et eviter, ainsi, des comportements capricieux.
- Participer à toute activité pour s'adapter
à une vie autonome. Le fils unique n'aura aucune difficulté dans
sa vie future. Il sera capable d'organiser sa vie et de résoudre
lui-même les problèmes rencontrés.
- Prendre des responsabilités et ne plus se comporter
comme un petit roi. La responsabilité est un atout pour l'enfant de se
préparer pour prendre conscience dans l'exercice des travaux. Sinon, le
fils unique qui se comporte comme un petit roi est gâté.
v A l'Etat
-Promouvoir la politique de l'égalité des sexes
pour diminuer les conflits relationnels tenant au sexe. La mise en place d'une
loi régissant l'égalité des sexes diminuera les conflits
souvent évoqués pendant l'héritage. Cette loi aidera les
femmes à réclamer les biens de leurs parents. Peu à peu,
les garçons et les filles comprendront qu'ils sont égaux.
-Sensibiliser la population pour qu'elle puisse attribuer aux
garçons et aux filles la même valeur familiale et qu'elle puisse
éradiquer les mentalités qui visent à considérer
les enfants suivant leurs sexes. La sensibilisation de la population à
partir des sociologues et anthropologues vaincra le traditionalisme qui
discrimine les femmes et, les hommes et les femmes comprendront de ce fait
qu'ils sont égaux.
-Etablir la loi protégeant les femmes qui sont
maltraitées voire répudiées pour avoir mis au monde des
enfants de tel sexe. Les femmes qui ont mis au monde seulement les filles ne
devraient pas être maltraitées par leurs époux. La loi
viendrait protéger ces femmes maltraitées tout en punissant les
auteurs.
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Paris, PUF, 1972.
43. MILL J.S., Asservissement des femmes, Paris,
Payot, 1975.
44. MUCCHIELLI, R., La personnalité de l'enfant,
Paris, ESF, 1976.
45. NAVAS, J., et al. Famille et fécondité au
Burundi, Enquête sociologique, Bujumbura, Presses Lavigerie, 1977.
46. NDAYISABA J. et DE GRANDMONT N., Les enfants
différents, Montréal, Les éditions logiques, 1999.
47. NEWLAND K., Femmes et sociétés,
Paris, Denoël, 1981.
48. PINTO R. et GRAWITZ M., Méthodes des sciences
sociales, T2, Paris, Dalloz, 1964.
49. PLAQUEVENT J., Le premier droit de l'enfant, Paris,
Gallois, 1996.
50. POROT M., L'enfant et les relations familiales,
Paris, P.U.F, 1979.
51. POURTOIS J.P., Blessure d'enfants, Bruxelles, De
Boeck, 2000.
52. RODEGEM F.M., Anthropologie rundi, Paris, Armand
Colin, 1973.
53. ROZIER R., Le Burundi, pays de la vache et du
tambour, Paris, Presses du Palais Royal, 1975.
54. TAP P., Masculin et Féminin chez l'enfant,
Toulouse, Privat, 1985.
55. TOUZARD H., Enquête psychologique sur les
rôles conjugaux et la structure familiale, Paris, CNRS, 1975.
56. WIDMER E., Les relations fraternelles des
adolescents, Paris, PUF, 1999.
57. WINNICOTT D.W., L'enfant et le monde
extérieur : le développement des relations, Paris,
Payot, 1957.
58. WINNICOTT D.W., L'enfant et sa famille : les
premières relations, Paris, Payot, 1978.
II. Dictionnaires
1. Dictionnaire encyclopédique de l'éducation
et de la formation, Paris, Nathan, 1994
2. Encyclopædia Universalis, V5, Paris, Nathan,
1975.
3. Encyclopædia Universalis, V6, Paris, Nathan,
1980.
4. Encyclopédie de la psychologie, Paris,
Nathan, 1970.
5. HOTYAT F. et al. , Dictionnaire encyclopédique
de Pédagogie moderne, Paris, Nathan, 1973.
6. SILLAMY N., Dictionnaire usuel de psychologie, V1,
Paris, Bordas, 1980
7. Univers de psychologie, V5, Paris, Lidis, 1978.
III. Mémoires, Revues et autres
Documents
1. BANDEREMBAKO T., Ubuvyeyi, source d'intégration,
d'harmonie et de personnalisation, in «QVS», Bujumbura, Revue
du cercle St Paul, N°27, 1976.
2. Centre Africain pour la Démocratie et les
Études des droits de l'Homme, Les femmes et le droit successoral en
Afrique : cas du Kenya et du Sénégal, Kairaba, 1998.
3. HAVUGIYAREMYE C., Opinions des étudiants de
l'Université du Burundi sur le droit des femmes à
l'héritage, Mémoire inédit, Bujumbura, UB, FPSE,
1999.
4. KUBWIMANA J.D., Etude des problèmes
rencontrés par les enfants en difficultés relationnelles avec
leurs parents, Mémoire inédit, Bujumbura, UB, FPSE, 2005.
5. NINTUNZE R., Etude psychologique de la veuve de guerre
chef de ménage, Mémoire inédit, Bujumbura, UB, FPSE,
2007.
6. NIYIBIZI S., Le veuvage sans enfants et ses
conséquences sur les relations sociales, Mémoire
inédit, Bujumbura, UB, FPSE, 2003.
7. NKESHIMANA G., Le vécu psychoaffectif des enfants
élevés chez leurs grands parents en milieu rural,
Mémoire inédit, Bujumbura, UB, FPSE, 2005.
8. NTABONA, A., « Les fondements de la
solidarité familiale d'après les proverbes rundi »,
QVES, Bujumbura, N°16, 1986.
9. NTAHOMVUKIYE J. et al.,Rapport de formation sur le
leadership féminin, Bujumbura, CAFOB, 2001.
10. NTAMWANA, M.T., La conception de la
fécondité humaine dégagée des rites et des
interdits relatifs à la femme dans la société burundaise
traditionnelle et contemporaine, Mémoire inédit, Bujumbura,
UB, FPSE, 1983.
11. ONU-OCHA/IRIN, Corps meurtris, rêves
brisés : violence à l'égard des femmes mises à
jour, Malta, Progress Press co.Ltd, 2007.
12. PNUD, Rôle et statut de la femme dans le
processus de développement humain durable, Bujumbura, 1999.
13. SABIMBONA S., «Que préconise la femme en
matière de succession», Revue juridique du Burundi No
23, Bujumbura, juin 1989.
251658240
ANNEXES
ANNEXE I: PRESENTATION ET CONSIGNE EN KIRUNDI
Mwaramutse,
Nitwa Siriyako CIZEROCIMANA, ndi umunyeshure wo mw'ishure
Kaminuza y'Uburundi, ndiko ndakora igikorwa co guheza ivyigwa. Naje
ndabatumbereye mwebwe, abavyeyi canke umuvyeyi, kugira mumbwire ku bijanye
n'umuhungu wanyu w'ikinege, na canecane ikibanza mumuha ngaha mu muryango.
Inkuru muza kumpa zirakenewe cane, n'ico gituma nitwaje aka gakoresho ko gufata
amajwi kugira inyishu muza gutanga kuri ibi bibazo ndazibike neza. Ndabemereye
kandi ko ivyo tuvugana atawuzomenya uwabivuze. Murakoze !
ANNEXE II : GUIDE D'ENTRETIEN EN
KIRUNDI
A.
IDENTIFICATION DE L'ENQUETE
Abavyeyi bose :
Umupfakazi :
Imyaka y'umugabo :
Imyaka y'umugore :
Imyaka y'umuhungu :
Igitigiri c'abana :
Igitigiri c'abakobwa :
B. IBIBAZO
? Ukumenya uko imigenderanire iri hagati y'abavyeyi,
abakobwa n'umuhungu umwe yifashe.
1. Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu n'abakobwa
yifashe?
- Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu
n'umuhungu yifashe?
- Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati y'abakobwa
n'umuhungu yifashe?
2. Kubera iki hari urukundo rwinshi hagati yanyu n'umuhungu
wanyu ?
3. Ni igiki gituma habura umwumvikano hagati yanyu n'abakobwa
banyu?
4. Ni igiki cotuma haba umwumvikano hagati y'abagize umuryango
?
?Kumenya uko umuhungu afashwe bivanye
n'ubunege bwiwe.
5. Dufatiye ku bunege bw'umuhungu, ni iki mumugirira
mutagirira abakobwa ?
6. Bivanye n'uko mufashe umuhungu, mumuha ikibanza ikihe aha
mu muryango?
7. Dufatiye kuvyo mugirira umuhungu, abakobwa bo mubagirira
iki ?
?Kwerekana inkurikizi ku muhungu nomu
muryango.
8. Ni izihe nyifato nziza z'umuhungu bivanye n'ivyo mumugirira
hamwe n'ivyagirirwa n'abashikiwe?
9. Ni izihe ngorane umuhungu wanyu ahura muri uyu muryango?
10. Ni izihe nyifato mbi ziva ku bunege bwiwe no kukuntu
mumufata?
? Ugutanga ingingo ngenderwako mu muryango
kugira hatuzwe ivyiyumviro bifatiye kugacinyizo k'ibitsina.
11. Ni izihe mpanuro mwoha umuhungu wanyu kugira ategure neza
kazoza kiwe?
12. Ku bwanyu, abavyeyi bokora iki kugira indero y'abana itere
imbere na canecane iy'umuhungu umwe?
13. Ni izihe mpanuro mwoha abavyeyi kugira haranduranwe
n'imizi ivyiyumviro bifatiye kugucinyiza igitsinakobwa mu muryango?
14. Ni izihe ngingo mwosaba ko Leta ishira mungiro kugira
ituze agacinyizo kagirirwa igitsinakobwa?
ANNEXE III : PRESENTATION ET CONSIGNE EN
FRANÇAIS.
Bonjour ;
Je réponds au nom de Cyriaque CIZEROCIMANA, je suis
étudiant de 2e cycle à l'Université du Burundi,
je suis en train de faire un travail de fin des études universitaires.
Je m'adresse à vous, parents, pour que vous me parliez de la situation
de votre fils unique et plus particulièrement de la place que vous lui
accordez ici dans votre famille. Ainsi, les informations que vous allez me
livrer sont utiles, c'est pourquoi je me suis muni de cet appareil enregistreur
pour garder les réponses que vous allez donner à mes questions.
Je tiens également à vous garantir l'anonymat de vos propos. Je
vous remercie !
ANNEXEIV :
GUIDED'ENTRETIENENFRANÇAIS
A. IDENTIFICATION DE L'ENQUETE
Couple vivant :
Veuf ou veuve :
Age du mari :
Age de l'épouse:
Age du fils :
Nombre d'enfants :
Effectif de filles :
B. LES QUESTIONS
? Les types de relations entre les parents, les
filles et le fils unique
1) Pouvez-vous nous parler de vos relations avec vos
filles?
-Pouvez-vous nous parler de vos relations avec votre fils?
-Pouvez-vous nous parler des relations entre votre fils et vos
filles?
2)
Pourquoi y a-t-il une affection profonde entre les parents et leur fils
unique ?
3)
Qu'est-ce qui est à l'origine de la mésentente entre les parents
et leurs filles dans une telle famille ?
4)
Qu'est-ce qui fait que les relations soient bien organisées entre les
membres de la famille ?
? Les traitements affectifs réservés au
fils à cause de son unicité.
5) En
tenant compte de l'unicité du fils, quels sont les traitements que vous
lui réservez contrairement aux filles?
6) En
tenant compte des traitements du fils, quelle est la place qu'on lui accorde
ici dans cette famille?
7) A
partir de ce que vous faites pour votre fils, qu'est-ce que vous faites pour
les filles seulement?
?
Les conséquences pour le fils et pour la
famille.
8)
Quels sont les bons comportements du fils résultant de vos traitements
et ceux de ses soeurs?
9)
Quels sont les problèmes rencontrés par le fils unique dans votre
famille ?
10)
Quels sont les mauvais comportements résultant de son
unicité et des traitements qu'il subit?
?
Les précautions à envisager dans une telle famille pour
éviter le préjugé fondé sur la discrimination des
sexes?
11) Quels
sont les conseils donnés à votre fils unique pour qu'il puisse
bien préparer sa vie future?
12)
Selon vous, que doivent faire les parents pour réussir à
l'éducation de leurs enfants en général et du fils unique
en particulier ?
13)
Quelles sont les mesures proposez -vous aux parents pour éviter le
préjugé fondé sur la discrimination du sexe
féminin?
14)Quelles sont les mesures proposez-vous à
l'État pour éviter le préjugé fondé sur la
discrimination du sexe féminin?