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La place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à  majorité féminine. étude menée auprès des parents de la commune Mbuye.


par Cyriaque CIZEROCIMANA
Université du Burundi - Licence 2015
  

Disponible en mode multipage

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    « La sélection en fonction du sexe en faveur des garçons est un symptôme des injustices sociales, culturelles, politiques et économiques omniprésentes auxquelles sont confrontées les femmes, et une violation manifeste des droits fondamentaux des femmes »

    Déclare l'Agence de l'ONU : ONU Femmes.

    DEDICACE

    A nos chers parents;

    A nos frères;

    A nos soeurs ;

    A notre grand-mère ;

    A tous ceux qui nous sont chers.

    REMERCIEMENTS

    La réalisation de ce travail a nécessité l'aide précieuse de plusieurs personnes envers lesquelles nous avons l'honneur de témoigner notre gratitude.

    Nos remerciements vont en premier lieu à l'endroit du Professeur Paul NKUNZIMANA de la Faculté de Psychologie et des Sciences de l'Education, pour avoir accepté de guider nos premiers pas de chercheur. C'est grâce à ses précieux conseils et à sa rigueur scientifique que nous avons pu aboutir à l'accomplissement de ce travail.

    Nous remercions en deuxième lieu tous nos éducateurs dès l'Ecole Primaire jusqu'à l'Université, qu'ils trouvent tous ici l'expression de notre reconnaissance pour la formation intellectuelle et morale qu'ils nous ont donné.

    Beaucoup de personnes nous ont également soutenu dans la réalisation de ce travail et méritent ainsi l'expression de nos sentiments de gratitude. Qu'il nous soit permis de remercier nos parents qui n'ont ménagé aucun effort pour nous donner une éducation adéquate dont nous sentons le fruit.Nous devons beaucoup à la famille de Monsieur BARINZIGO Emmanuel pour son soutien matériel pour rendre possible la réalisation de ce travail.

    Que tous ceux qui nous ont fourni des informations et des documents pertinents trouvent ici notre profonde gratitude.Enfin, nous exprimons nos remerciements à toute personne qui, de près ou de loin, nous a aidé dans la réalisation de ce travail.

    Cyriaque CIZEROCIMANA

    LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS UTILISES

    al.  : Collaborateurs

    CAFOB  : Collectif des Associations et ONGs Féminines du Burundi

    CNRS  : Centre National de Recherche Scientifique

    Ed.  : Edition

    ESF  : Expansion Scientifique Française

    FPSE  : Faculté de Psychologie et des Sciences de l'Education

    IRIN :Integrated Regional Information Networks (Les Réseaux
    d'Information Régionaux Intégrés)

    OCHA  : Office for the Coordination of Humanitarian Affairs (Bureau de la
    Coordination des Affaires Humanitaires)

    ONU  : Organisation des Nations Unies

    p  : page

    PNUD  : Programme des Nations Unies pour le Développement

    PUF  : Presses Universitaires de France

    UB  : Université du Burundi

    UNICEF  : United Nations Children's Fund (Fonds des Nations Unies pour
    l'enfance)

    V  : Volume

    RESUME

    Au Burundi, les enfants occupent une place primordiale au sein de la famille. La place réservée au fils unique dans la famille comptant une progéniture à majorité féminine retient une affection particulière des parents.

    L'objectif général de notre recherche visaità «  étudier la place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine. » La structure patriarcale de la société burundaise fait qu'il y a une préférence pour le sexe masculin. La recherche que nous avons menée a montré que le système patriarcal fondé sur la primauté de l'homme dans la division sociale du travail, amène les parents à canaliser nombre de sentiments à l'égard du fils pendant que les filles jouissent d'un traitement moins attentionné. L'héritage de la richesse familiale et la continuité de la lignée familiale sont les fonctions importantes pour le fils unique en famille. Ce dernier, suite à son unicité, subit des traitements affectifs tels que la tendresse excessive, la surprotection et la satisfaction immédiate deses besoins. Nous avons constaté que ces traitements peuvent engendrer, chez le fils unique, de lourdes conséquences comme la solitude, le manque d'autonomie, le manque de responsabilité et de bonnes manières.La considération équitable des garçons et des filles, la non-violence du sexe féminin et l'égalité des enfants en matière de succession sont des précautions envisagées par les enquêtés pour éviter les préjugés fondés sur la discrimination des sexes.A l'issue de cette étude, il est suggéré aux parents, aux fils uniques et à l'Etat de cultiver l'esprit d'égalité des droits des sexes dans l'action éducative des enfants.

    TABLE DES MATIERES

    DEDICACE i

    REMERCIEMENTS ii

    LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS UTILISES iii

    RESUME............................................................................................................................................... v

    TABLE DES MATIERES i

    0. INTRODUCTION GENERALE 1

    0.1. Motivation du choix du sujet 2

    0.2. Délimitation du sujet 3

    PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE 5

    CHAPITRE I. ELUCIDATION DES CONCEPTS CLES 6

    1.1. Famille 6

    1.2. Progéniture 7

    1.3. Sexe 9

    1.4. Fratrie 10

    1.5. Fils unique 12

    1.6. Education 13

    1.7. Relations familiales 14

    CHAPITRE II: GENERALITES SUR LA FAMILLE 17

    2.1. La famille et ses attentes 17

    2.1.1. Attente procréatrice 17

    2.1.2. Attente sociale 18

    2.2. Le caractère sexiste chez l'être humain 19

    2.2.1. Préférence du sexe masculin chez les Burundais 19

    2.2.2. La sélection du sexe des enfants chez les Asiatiques et les Européens 20

    2.3. La structure patriarcale 21

    2.3.1. Le statut social du père 21

    2.3.2. Le statut social de la mère 21

    2.3.3. Le système patriarcal à la base des inégalités entre les sexes 22

    2.4. La valeur et le rôle de l'enfant dans la famille 23

    2.4.1. L'enfant comme source d'honneur à la famille 23

    2.4.2. L'enfant et le statut définitif de la mère 24

    2.4.3. L'héritage de la richesse familiale 25

    2.5. Le rôle des parents dans l'éducation des enfants 26

    2.5.1. L'autorité paternelle 26

    2.5.2. L'amour maternel 27

    CHAPITRE III : LE FILS UNIQUE DANS LA FAMILLE BURUNDAISE 29

    3.1. Le fils unique dans la famille 29

    3.1.1. L'enfant roi 29

    3.1.2. Le jeu du fils unique 30

    3.1.3. Le fils unique et sa fratrie 31

    3.2. La fratrie et son rôle dans la socialisation des enfants 32

    3.2.1. La rivalité fraternelle 32

    3.2.2. L'enfant unique et ses conséquences 33

    3.3. Traitement psychosocial d'un fils unique 34

    3.3.1. Tendresse excessive des parents 34

    3.3.2. Entourage attentif du fils unique 35

    3.4. Conséquences liées à l'absence ou à l'unicité du fils chez les parents 36

    3.4.1. Progéniture uniquement féminine comme source de mésentente familiale 36

    3.4.2. Naissance du fils comme source de satisfaction chez les parents 37

    CHAPITRE IV : PROBLEMATIQUE ET CONSIDERATIONS
    METHODOLOGIQUES
    38

    4.1. Problématique de la recherche 38

    4.2. Les objectifs de la recherche 41

    4.2.1. L'objectif général 41

    4.2.2. Les objectifs spécifiques 41

    4.3. Méthode et technique de recherche 42

    4.3.1. Méthode qualitative 42

    4.3.2. Enquête par l'entretien semi-directif 42

    4.4. Le terrain et population d'enquête 43

    4.5. Le travail de terrain 44

    4.5.1. La préenqu?te 44

    4.5.2. La technique de choix des enquêtés et déroulement de l'enquête 46

    4.5.3. Les difficultés rencontrées 50

    DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION DES CAS, ANALYSE DES DONNEES ET
    INTERPRETATION DES RESULTATS
    51

    CHAPITRE V : PRESENTATION DES CAS 52

    5. 1. Cas CAN 52

    5.2. Cas ATH 53

    5.3. Cas SUZ 54

    5.4. Cas MET 56

    5.5. Cas NIC 57

    5.6. Cas MUJ 59

    CHAPITRE VI: LA TRIPLE RELATION ENTRE PARENTS, FILLES ET FILS
    UNIQUE
    61

    6. 1. Les relations affectives centrées sur le fils unique 61

    6. 2. L'origine de la mésentente entre les parents et filles 63

    6. 3. Les parents démissionnaires de leurs rôles éducatifs 65

    6.4. Le développement harmonieux des relations entre les membres d'une famille 67

    CHAPITRE VII : TRAITEMENTS AFFECTIFS RESERVES AU FILS UNIQUE 70

    7.1. La satisfaction immédiate des besoins du fils unique 70

    7. 2. La place primordiale du fils unique dans une famille 72

    7. 3. La profonde affection entre parents et fils unique 74

    7.4. Les comportements des parents comme source de rivalités fraternelles 76

    7.5. La maltraitance faite au sexe féminin 76

    CHAPITRE VIII : LE FILS UNIQUE, SES PARENTS ET LES PERSPECTIVES 79

    8.1. Les conséquences néfastes rencontrées par le fils unique dans une famille 79

    8.2. Les conséquences pour les parents à fils unique 82

    8.3. Les conseils donnés au fils unique et aux parents 84

    CONCLUSION GENERALE 87

    SUGGESTIONS..........................................................................................89

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 91

    ANNEXES 96

    0. INTRODUCTION GENERALE

    Les situations familiales courantes poussent l'observateur à faire une analyse de l'influence du milieu familial sur la personnalité de l'enfant. Le développement harmonieux de la personnalité des enfants dépend du climat social qui règne au sein d'une famille.A ce propos, disent ALPHANDERLY H. et ZAZZO R. (1970, p.151), «On doit sans doute attribuer au milieu familial une importance déterminante parce qu'il est le lieu, et qu'il offre l'occasion des expériences premières. Toutes les structurations qui résultent de celles-ci en porteront nécessairement la marque.» Une intégration dans la famille détermine la socialisation de l'enfant, qui déterminera par après sa personnalité. Le couple devient joyeux dès la naissance des enfants car il arrive quelquefois que le couple ne se reproduit pas. Il est donc jugé bon d'avoir les enfants, garçons et filles.

    Cependant, depuis longtemps, dans la société burundaise, la naissance des garçons dans une famille comblait celle-ci de beaucoup plus de joie que celle des filles, d'où une place importante accordée au sexe masculin engendre une inégalité au niveau de la fratrie.Par ailleurs, les relations familiales normales s'ordonnent autour des enfants et de leurs parents. Ainsi, dit POROT M. (1979, p.9) en ces mots : «Le couple, condition nécessaire du foyer ne saurait être considéré comme suffisant pour qu'existe une famille : c'est la venue de l'enfant qui crée la famille, c'est par conséquent autour de l'enfant que s'ordonnent les relations familiales normales.»On entend par là que le motif qui pousse les personnes à s'unir est le besoin de fonder un foyer et d'avoir des enfants.

    Dans la société burundaise, la progéniture fait partie des buts essentiels du mariage. L'enfant a une place très importante dans la famille. Sa valeur n'est pas seulement économique mais aussi l'enfant prolonge la vie des parents dans le futur. Cependant, la famille burundaise est patrilinéaire. C'est pourquoi les Burundais attachent une importance marquée aux garçons par rapport aux filles. Cela se remarque dans le fait que le père, avant de mourir, lègue généralement tous les pouvoirs à son fils, lequel est appelé à le remplacer dans ses rôles. En effet, les inégalités au niveau des sexes dans la vie sociale, en commençant par la famille, ne seraient-elles pas la conséquence du système patriarcal au Burundi ?Nous avons montré dans ce travail la place que peut avoir le fils unique né dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine. Nous avons pu explorer en long et en large les effets que peut engendrer la subjectivité des parents dans la considération de leur fils unique et leurs filles au sein d'une famille.

    Le texte que nous avons proposé aux lecteurs s'articulera autour de quelques points saillants repartis. Pour la première partie, nous avons parlé entre autre du cadre théorique et méthodologique qui comprend l'élucidation des concepts clés, les généralités sur la famille,le fils unique dans la famille burundaise et enfin la problématique et les considérations méthodologiques.

    Pour la deuxième partie, nous avons présenté les cas, latriple relation entre parents, filles et fils unique, les traitements affectifs réservés au fils unique et, enfin, nous avons exposé les conséquences rencontrées par le fils unique et ses parents et proposé des perspectives.

    0.1. Motivation du choix du sujet

    Les enfants traités différemment dans la famille et la place accordée à l'un d'eux du fait de son sexe, tels sont les phénomènes qui nous ontintéressé dans cette étude. Nous constatons que les parents affichent des attitudes différentes devant l'enfant de tel sexe, mais il est question de savoir le sexe le plus souhaité dans la descendance au Burundi et pourquoi cette préférence.La motivation du choix du sujet est affirmé par LEON A. (1973, p. 35) en ces termes : « L'élaboration d'un sujet de recherche suppose d'abord un intérêt réel pour le thème que l'on se propose d'exploiter.» Voilà le moment d'expliquer comment le choix d'un tel sujet nous est venu de l'esprit. Sans doute, bon nombre de lecteurs se posent la question de savoir pourquoi nous nous sommes intéressé à la découverte de la place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine.En effet, ce choix nous est venu suite à une longue réflexion sur les familles-types surtout sur la manière dont les parents traitent le fils unique et la place accordée à celui-ci. Alors, nous sommes conscient du fait qu'avoir un seul fils dans une famille crée une situation qui pousse les parents à lui accorder une place importante différente à celle accordée aux filles.

    Depuis longtemps, nous savons que, dans la société burundaise, la progéniture avait une place importante. Le garçon était considéré en second lieu comme chef de la famille après ses parents. Etre fils unique dans une famille pousse les parents à craindre la perte de ce fils parce qu'ils considèrent et pensent que la mort de leur fils désagrège la famille, parce que les filles quittent la famille pour se marier. C'est pour cette raison qu'une certaine subjectivité était remarquée depuis longtemps jusqu'à nos jours chez les parents ayant un fils unique. Certains parents laissent libre leur fils unique, d'autres le fait gâter en satisfaisant immédiatement ses besoins et en affichant à son égard une faible autorité et un amour profond ; ce qui aura des conséquences néfastes sur le fils unique, sur les parents et il y aura détérioration des relations familiales car les filles se voient justement maltraitées.

    Des recherches ont été faites dans ce domaine social. Nous citons la recherche faite par NIYUHIRE intitulée « l'approche psychoaffective de la relation parents-enfant unique et les incidences possibles sur son éducation»(2009). NIYUHIRE a trouvé que les relations conjugales entre les parents d'enfant unique se trouvent compromises du fait que l'existence de ce seul enfant est perçue comme une déception aux aspirations essentielles du couple qui souhaiterait avoir plusieurs enfants et cela a une incidence négative sur l'éducation de celui-ci.Une autre recherche faite dans le même domaine est celle de BUKEMEintitulée « les attitudes des parents du milieu rural face à la politique de l'égalité des genres en matière de succession»(2008). BUKEME a trouvé que le droit à la succession des femmes n'est pas pour un proche avenir, car les mentalités des parents ruraux ne sont pas encore mûres pour l'égalité des genres.La troisième recherche est celle de HATUNGIMANA intitulée «le vécu psychosocial des couples à progéniture uniquement féminine»(2008). Celui-ci a trouvé que dans leurs relations familiales et sociales, ces couples rencontrent des difficultés d'ordre psychologique et social.

    L'originalité de notre apport est que nous avons étudié la place du fils unique dans une famille comptant une progénitureà majoritéféminine. Nous nous limitons sur les relations que tissent les membres de la famille, les traitements réservésà ce fils unique et les conséquences que celui-ci peut avoir suite à son unicité.L'idée d'une telle recherche nous est venue du souci d'orienter les parents dans la façon de s'y prendre pour éviter toute tendance de considérer ou de traiter les enfants différemment selon qu'ils soient fils ou filles.

    0.2. Délimitation du sujet

    Comme notre sujet est intitulé « La place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine»,nous nous sommes limité à la place du fils unique de façon générale et nous avons analysé les relations entre tous les membres de la famille, les traitements et les conséquences subis par ce fils suite à son unicité. En effet, le fils unique est beaucoup aimé par ses parents, ce qui implique que les relations entre eux sont caractérisées par une affection excessive. Par conséquent, les filles sont délaissées et la carence affective est beaucoup ressentie par ces dernières. Les traitements du fils unique sont caractérisés par une satisfaction immédiate de ses besoins et la liberté totale qui le poussent à manquer d'autonomie et de sens de responsabilité.

    Nous ne pouvions pas parcourir toutes les localités du pays. Il était même impossible de mener cette recherche sur tous les cas. D'où une délimitation au niveau du sujet et du terrain d'enquête a été nécessaire. Nous avons jugé bon de limiter notre recherche en province MURAMVYA plus précisément en Commune MBUYE. Nous avons choisi ladite Commune parce qu'il s'agit d'un milieu où nous avons observé particulièrement le phénomène que nous avons voulu étudier, ce qui ne veut dire nullement qu'il serait inexistant ailleurs.

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    PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE

    CHAPITRE I. ELUCIDATION DES CONCEPTS CLES

    Ce chapitre vise à définir certains concepts clés dits fondamentaux qui étaient susceptibles de rendre facile la compréhension de notre travail. En effet, certains concepts que nous avons utilisé sont ambigus, d'où il était indispensable de les définir afin de comprendre le contexte dans lequel nous avons travaillé. Ainsi, notre étude a été centrée sur les réalités sociales du milieu familial d'où la définition des termes relatifs à ce dernier tels que famille, progéniture, sexe, fratrie, fils unique, éducation et relations familiales s'est imposée.

    1.1. Famille

    Nombre d'auteurs ont été intéressés par le terme famille. Nous avons défini ce concept en le ramenant dans le contexte burundais et en donnant toutefois les points de vue des auteurs.

    POROT M. (1979, p. 8) définit la famille comme « l'ensemble des personnes d'un même sang vivant sous le même toit et plus particulièrement le père, la mère et les enfants.» Nous pouvons dire que la famille existe par le fait de la coexistence d'individus sous un même toit dont le sang est le lien qui les unit. La famille définie ainsi est un regroupement restreint ou famille nucléaire parce qu'elle est constituée par le père, la mère et les enfants. Cependant, la famille ne reste pas seulement restreinte, elle est également composée par d'autres personnes liées entre elles par les liens de parenté par exemple les grand-pères, les grand-mères, les oncles, les tantes, les cousins et cousines, etc. Cette famille est dite élargie, étendue ou composée.

    Pour BIGANGARA (1986, p.18), «la famille est une communauté d'individus réunis par des liens de parenté existant dans toutes les sociétés humaines.» La famille est un groupement d'individus, elle est dotée d'un domicile et crée entre ses membres une obligation de solidarité morale et matérielle et censée protéger et favoriser leur développement social, physique et affectif.

    BIANCHERI A. (1965, p.310) distingue trois types de familles à savoir :

    -« La famille immédiate, élémentaire, nucléaire ou restreinte composée par le père, la mère et les enfants.

    -La famille polygénique composée par le père, plusieurs femmes et les enfants.

    - La famille étendue ou composée qui regroupe sous l'autorité d'un chef un certain nombre de familles élémentaires. »

    L'auteur distingue la famille au sens strict qu'il appelle famille nucléaire, la famille polygénique et la famille élargie. Au Burundi, il existe des termes qui désignent chaque échelon du système parental. En effet, BIGANGARA J.B. (1986, p.18) distingue trois types de familles au Burundi : -« La famille-ménage ou famille nucléaire est l'institution de base de la parenté. Ce groupe de base est composé du père, de la mère et des enfants, habitant encore dans la même maison c'est-à-dire non mariés.»

    La famille parentèle est une société naturelle groupant plusieurs familles nucléaires coordonnées par une même autorité et se réclamant d'un même ancêtre. Font strictement partie de cette communauté seuls les hommes et leurs descendants.» -«Le clan est constitué de plusieurs familles parentèles descendant d'un même ancêtre très lointain dont ils portent le nom. Par exemple le clan des Abanyakarama.» La famille-ménage correspond à la famille restreinte. C'est la famille au sens strict.La famille parentèle correspond à la famille élargie.

    Le clan est le dernier échelon des groupements familiaux et se caractérise par la descendance de mâle à mâle comme l'écrit ainsi SIMONS cité par BIGANGARA (1986, p.23) :«Le sang, la parenté, ne se transmettent pas par les femmes, mais uniquement par les mâles.» Selon lui, les femmes font théoriquement partie du clan de leurs parents mais, pratiquement elles font partie de celui de leurs maris. Le clan est l'ensemble des descendants des mâles à savoir les parents, les enfants, les enfants de leurs fils et de leurs petits-fils. BIGANGARA (1986, p. 136), a aussi distingué deux autres types de familles qu'il a appelé famille polygamique et famillepolyandrique : « La polygamie est l'union conjugale d'un homme avec plusieurs femmes. La polyandrie, union conjugale d'une femme avec plusieurs hommes.» Le terme «polygamie» est employé particulièrement au Burundi sinon le vrai terme est « la polygynie.» Nous avons utilisé le concept «famille» dans le sens strict et selon ses composantes à savoir le père, la mère et les enfants. Ainsi, la place occupée par le fils unique ainsi que les relations que celui-ci tisse avec ses parents et ses soeurs ne peuvent être étudiées qu'en tenant compte de la signification de la famille nucléaire.

    1.2. Progéniture

    Nous ne pouvons pas parler de la famille sans toutefois évoquer de ses composantes dont la progéniture est d'une importance primordiale. En effet, comme nous avons déjà défini le sens dans lequel nous avons utilisé le concept famille; le terme progéniture, à son tour a été utilisé comme une des composantes de la famille. La progéniture, dans notre contexte, est l'ensemble des enfants mis au monde par un couple conjugal. Celle-ci est constituée par les filles et les fils. Que veut dire le terme « progéniture » ? Du latin « genitura » qui veut dire « engendrer », le terme est explicité dans l'Encyclopædia Universalis (1975, p.1013) comme : « l'ensemble des enfants d'un homme ou d'une femme ; c'est le nombre d'enfants que possède un homme ou une femme exclus ceux adoptés. » En nous référant à cette définition, nous pouvons dire que la progéniture est la descendance directe des parents. La progéniture s'ajoute au couple et constitue, dans ce cas, une famille restreinte et, si la descendance continue, on arrive à une parentèle.

    Le désir de procréer, dans la société burundaise, est un aspect fondamental du couple. L'enfant qui est le produit et le résultat du mariage constituent pratiquement un triomphe sur la mort, il est une projection en dehors de soi. Comme le souligne A. NTABONA (1986, p.114): « mettre au monde des enfants, c'est se multiplier, s'élargir, projeter sa personnalité en dehors et au-delà de soi. » Notons cependant que dans cette société burundaise les fils sont les seuls à garder le nom de leur père à travers le clan. Quant aux filles, elles vont appartenir au clan de leur mari. D'où les drames en famille en cas d'une progéniture uniquement féminine. C'est ce qu'affirme BIGANGARA J.B. (1986, p.23)  de cette manière: « Feront partie du même clan les descendants des mâles et théoriquement la fille fait partie du clan de ses parents mais pratiquement elle fait partie du clan de son mari.» Selon la mentalité traditionnelle burundaise, les enfants n'ont pas la même valeur. La fille est moins considérée du fait qu'elle quittera sa famille pour s'intégrer une autre famille.

    La descendance du couple, fruit de son union, est prise ici comme progéniture au sens général. C'est donc l'une des attentes du fondement d'un foyer. Cette attente procréatrice est quelquefois absente chez certains couples lorsqu'on n'obtient pas d'enfants. Au Burundi, le résultat de cette absence d'enfants est souvent une dissociation familiale car chacun des conjoints accuse la stérilité à son partenaire. BIGANGARA J.B. (1986, p.113) indique que « l'enfant offre un plaisir pour la famille, tandis que son absence constitue une pomme de discorde, voire même l'origine de la dislocation de la famille.» Ainsi, dans la vie du couple, l'enfant est souhaité et est considéré comme un facteur de sa cohésion. La progéniture est donc constituée de filles et fils en nombre égal ou inégal. Dans notre étude, nous nous sommes penché sur la famille dans laquelle l'inégalité entre les filles et les garçons est considérable, c'est-à-dire le cas du fils unique dans une progéniture quasiment féminine. Nous avons utilisé le concept de progéniture comme l'ensemble des frères et soeurs issus d'une même famille restreinte.

    1.3. Sexe

    Tout être humain naît sexué, mâle ou femelle, avec des caractères physiologiques en continuelle évolution, même s'il existe des erreurs. Pendant le stade phallique, l'enfant sait qu'il est un garçon ou une fille c'est-à-dire qu'il sait son sexe. Selon FRAURE-OPPENHEIMER A. (1980, p.146), « lesexe est un élément objectif, un objet de savoir ou de connaissance dont la détermination est biologique. Son caractère est anatomique.» Selon cet auteur, nous n'entendons exactement que le sexe désigne l'appareil reproducteur de l'homme ou de la femme.

    Le mot «genre» apparaît souvent comme synonyme du mot «sexe» mais ces deux mots sont différents même si l'un découle de l'autre. Il faut alors distinguer le concept «sexe» et le concept «genre» afin de dissiper la confusion entretenue par le terme de sexualité qui renvoie aussi bien au corps qu'au plaisir. FRAURE-OPPENHEIMER A. (1980, p.6), montre ainsi la différence entre le sexe et le genre : « Le sexe dont les connotations sont biologiques, englobe les chromosomes, les gonades et l'appareil génital : il est mâle ou femelle. Le genre est réservé au domaine purement psychologique de la sexualité. Il désigne les sentiments, les rôles, les attitudes et les tendances : il est masculin ou féminin.» Selon ces théories nous pouvons dire sans nous tromper que le sexe est d'ordre physiologique et le genre d'ordre psychologique. Ainsi, le genre est exploité idéologiquement tandis que le sexe reste le somatique.

    Dans notre étude, le fils unique est plongé dans une communauté féminine et pourra avoir tendance à se comporter comme une fille. Cela est dû lorsqu'il s'agit d'un fils qui termine une série de filles, car le comportement est acquis. Cette idée est appuyée par FRAURE-OPPENHEIMER A. (1980, p.6) qui signale que «l'enfant a la conviction d'appartenir au sexe qui lui a été assigné et dans lequel il a été élevé même s'il ne correspond pas au sexe "scientifique".» Ainsi, le sexe est inné et le genre est acquis.

    Le fils unique a tendance à changer son genre parce qu'il se trouve élevé au milieu des filles et par conséquent aura le genre féminin et vice-versa. Selon le même auteur (1980, p.91), «le sexe se développe d'un coté et le genre de l'autre coté, auquel cas le psychisme est totalement séparé du corps. Ainsi, l'esprit peut être indépendant du corps.» Pour qu'il y ait un développement normal, il faut qu'un garçon possède l'air d'un garçon et qu'une fille ressemble à une fille.

    Dans la culture burundaise, suite à la division du travail dans le cadre du patriarcat, l'homme occupe une place de premier plan. Le point de départ de l'identité de genre est l'anatomie qui permet l'assignation du sexe, mais le facteur déterminant est l'attitude des parents qui ne traitent pas de la même façon un garçon et une fille. Nous avons utilisé les deux concepts sexe et genre pour étudier la place d'un seul fils dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine.

    1.4. Fratrie

    Pour élucider le sens du terme « fratrie », qui est censé être utile pour comprendre notre contexte, nous sommes parti de différentes théories des différents auteurs. Dans l'EncyclopædiaUniversalis, (1980, p.86), nous lisons ceci : « Lafratrie est le lieu dela rencontre d'autrui avec ses discordances et ses oscillations entre accord et jalousie.» L'enfant apprend à vivre en harmonie avec les autres, avec ses semblables, il apprend à partager avec ses frères et soeurs l'amour et les soins des parents. L'enfant, à l'origine, ne faisait qu'un avec sa mère. Sa naissance substitue le duel au singulier. Ce sera le rôle de la fratrie de mettre ces relations au pluriel, c'est-à-dire de les rendre plus semblables à celles que l'enfant, devenu adulte, aura à établir avec la société. Selon le Dictionnaire encyclopédique de l'éducation et de la formation (1994, p.458), « La fratrie est définie comme un groupe d'hommes reliés par un ancêtre commun.» Selon cet ouvrage, la fratrie est considérée comme les descendants d'un homme.

    CHOMBART DE LAUWE (1980 p.63) et ses collaborateurs montrent le rôle de la fratrie de cette manière : « La fratrie permet l'établissement des rapport pluridimensionnels qui sont une préparation aux véritables rapports familiaux. » Les rapports entre les enfants sont la répétition des rôles qu'ils joueront plus tard dans la comédie humaine. Le fils unique lie ses relations avec ses soeurs et ses parents. Puisqu'il est fils unique, il voit que sa fratrie est incomplète du fait qu'il n'a pas de frères.

    D'autres significations ont été données au concept «fratrie». Celle qui nous paraît importante est celle donnée par le Dictionnaire Encyclopédique de l'Éducation et de la Formation (1994, p.458) selon laquelle : « La fratrie est l'ensemble des frères et soeurs d'une même famille.»Nous entendons par là que les enfants descendants d'un même couple constituent ensemble une fratrie.

    Un enfant unique qui ne joue pas dans la fratrie connait certainement des difficultés d'intégration, parce qu'il manque les qualités de la fratrie: tout d'abord, la prise de conscience du « moi », l'autonomisation par rapport au monde extérieur qui s'établit aux alentours de trois ans, se fait plus facilement par opposition à autrui et cela grâce aux contacts fraternels de tous les instants. L'accession au « nous » est également facilitée. Ensuite, l'égocentrisme normal de l'enfant doit, pour satisfaire aux exigences de la vie en société, céder progressivement la place sinon à un altruisme total du moins à une charité. Enfin, par multiples renoncements nécessaires, les petites injustices, les menues ingratitudes, les légères vexations, l'enfant apprendra à les connaître grâce à des contacts avec ses frères et soeurs

    La fonction essentielle des frères et soeurs est donc de permettre la meilleure socialisation de l'enfant. Cette adaptation sociale sera obtenue par le passage de la rivalité à l'amitié ou à la coopération. Ces deux dernières attitudes sont le terme habituel des relations entre frères et soeurs ayant subi une évolution normale. La rivalité fraternelle dont l'utilité est méconnue par beaucoup de parents est donc nécessaire. Selon BOUTONIER J., « quand deux enfants se battent, le combat établit entre eux un lien qui peut être considéré comme social.» L'apparition de la haine, de l'amour est liée aux relations fraternelles marquant d'un sceau profond, la vie affective et future de l'enfant.

    Cependant, la présence de la haine entre les frères ne signifie pas mésentente permanente. Celle-ci est passagère car les frères sont des amis. Ceux-ci lient une relation de fraternité. C'est ce qu'affirme CAHN P. (1962 p. 165) en définissant la fraternité comme « liaison étroite de ceux qui, sans être frères, se traitent comme des frères », ce qui revient à considérer les frères comme des amis.

    Le terme fratrie a été utilisé dans ce travail comme liaison ou relation étroite entre les filles et fils issus d'un seul couple conjugal. Ainsi, on emploi le mot frère pour designer le garçon et soeur pour designer une fille par relation de parenté, c'est-à-dire que le garçon et la fille en question sont des mêmes parents. En fait, la fratrie constitue, pour l'enfant, une transition entre le milieu restreint de la famille et la société proprement dite, une sorte d'apprentissage social dont l'efficacité est fonction de l'attitude des parents. C'est dans cette optique que nous avons utilisé ce concept à cause de l'influence positive que la fratrie exerce sur le développement social et affectif de l'enfant. Pour cette étude, ce concept a été utilisé comme un groupe d'enfants, fils et filles d'un seul couple parental.

    1.5. Fils unique

    Toute personne se différencie de l'autre par la présence des caractères physiques différents tels que les sexes masculin et féminin. Le sexe masculin est pris comme caractéristique d'un garçon tandis que le sexe féminin caractérise une fille. On utilise le terme garçon pour désigner un jeune homme de sexe masculin. Par relation de parenté, on préfère dire un fils au lieu de garçon.

    L'expression « fils unique » désigne un seul fils dans une famille. Cette expression est différente de l'expression « enfant unique » car selon WINNICOTT D.W, « l'enfant unique est un enfant qui, bien que vivantdans un foyer normal n'a ni frère ni soeur. »Dans une famille, on peut avoir un seul enfant, et, ce dernier peut être un fils ou une fille. On parlera dans ce cas d'un fils unique ou d'une fille unique. En effet, le fils unique dans sa famille est entouré par des personnes qui l'aiment ; mais puisqu'il demeure plongé au milieu des filles et d'autres adultes (parents) et qu'il n'y a pas près de lui d'autres fils (ses frères), il reste seul. Dans le cas contraire, l'enfant unique subit plus pleinement l'emprise de son entourage essentiellement adulte parce qu'il constitue la principale, parfois l'unique préoccupation des parents qui lui prodiguent soins et affection avec une générosité non mesurée car non partagée puisqu'il est unique. Un tel enfant donc se trouve dans une situation privilégiée pour son développement intellectuel même moteur. En revanche, il est défavorisé quant à sa maturation affective.

    Dans notre travail, le fils unique est défini comme un seul fils qui vit dans une famille normale comptant une progéniture féminine. Le fils unique n'a pas de frères. Pour notre étude, le fils unique est un fils qui vit dans une famille qui ne compte pas d'autres fils mais qui compte plusieurs filles.

    1.6. Education

    Le concept d'éducation est fondamental pour notre étude. C'est pourquoi nous avons essayé de le définir en nous inspirant des approches de bon nombre d'auteurs parce qu'il est vaste et complexe. Régulièrement, dans les écrits de différents auteurs, apparaissent deux conceptions à savoir l'éducation comme processus de transmission des valeurs culturelles et sociales d'une génération à l'autre ,d'une part ,et l'éducation comme processus de socialisation d'une nouvelle génération pour l'adapter à la société dans laquelle elle est appelée à vivre, d'autre part.

    Comme processus de transmission des valeurs culturelles et sociales, ERNY P. (1973, p .16) explique ceci : « l'éducation est une expression d'une culture. Elle est d'abord transmission d'un patrimoine ou d'un héritage d'une génération à l'autre. Elle vise à assurer une continuité, à être l'instrument par lequel les civilisations se perpétuent et grâce auquel les membres d'une société qui sont aussi les porteurs d'une culture, assurent que les conduites nécessaires à la survie de celle-ci sont apprises. L'éducation apparait en quelque sorte comme la culture se transmettant, se perpétuant, s'actualisant dans une nouvelle génération. » Toute communauté tend à sauvegarder et à transmettre ses caractères culturels et intellectuels à sa descendance. Dans cette perspective, les parents s'efforcent de transmettre à leurs enfants la culture et les conduites nécessaires à leur survie.

    Pour ce qui est de l'éducation comme processus de socialisation, DURKHEIM E. (1957, p.153) trouve que « l'éducation est l'action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l'enfant un certain nombre d'états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans l'ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné. » De ce deuxième sens, nous pouvons dire que les adultes ne doivent ménager aucun effort pour que les jeunes acquièrent des comportements acceptables par les autres membres de la société en général et de la famille, en particulier.

    Pour DURNING P. (1995, p.36) l'éducation est « l'action d'élever et d'éduquer un ou des enfants mise en oeuvre, le plus souvent dans les groupes familiaux par les adultes, les parents des enfants concernés. » L'éducation est une formation lente et continue, une formation au niveau professionnel, au niveau des habitudes, de la pensée ; elle permet à l'homme de tenir sa place au cours de son existence et d'assurer les responsabilités personnelles et sociales dans le milieu où il vit.

    Dans la famille, les parents sont les responsables de l'éducation qui doivent exercer sur leurs enfants, une éducation qui les conduit d'étapes en étapes vers l'autonomie de l'adulte. C'est pourquoi nous avons emprunté la définition du Dictionnaire encyclopédique de pédagogie moderne (1994, p.217) qui dit que « l'éducation est l'ensemble des moyens par lesquels l'enfant est aidé dans son épanouissement et dans l'acquisition des capacités, des modes de comportements, de valeurs considérées comme essentielles par le milieu humain où il est appelé à vivre.» Loin de contraindre l'enfant à suivre une ligne tracée, l'éducateur doit plutôt l'aider à s'épanouir et développer ses potentialités. Cet épanouissement et développement doivent être orientés et contrôlés par les parents.

    Les contacts parents-enfants sont nécessaires dans la famille pour qui ces derniers puissent copier le bon modèle et recevoir une affection parentale suffisante afin d'être mieux développés moralement, intellectuellement et être utiles à la société. Ainsi, les parents doivent être là pour guider l'enfant, et ne pas lui permettre de céder à certains désirs fantaisistes. L'éducation est une transmission des connaissances dans le but de préparer l'enfant à pouvoir prendre plus tard sa vie en main, à gérer convenablement ses biens, à être respecté dans la société, à faire honneur à ses parents età transmettre à son tour son éducation à ses enfants.

    1.7. Relations familiales

    L'étude des relations familiales est complexe de façon qu'on ne puisse pas ignorer l'éclaircissement de ce concept dans ledit travail. Les relations familiales sont indépendantes de l'éducation des enfants puisque le rôle de la famille est avant tout éducatif. C'est pour cette raison que l'éclaircissement du concept «relations familiales » a été nécessaire. Pour définir ce concept, il convient de partir du sens de chaque terme qui le compose. La relation veut dire lien, rapport entre des choses ou des personnes. Le lien c'est ce qui sert à attacher, ce qui unit des personnes. La famille, ensuite c'est l'ensemble des personnes d'un même sang vivant sous le même toit et plus particulièrement le père, la mère et les enfants. Il y a donc deux critères précis du lien familial: même sang et toit commun. En fait, c'est la coexistence de deux groupes d'êtres humains (les parents et les enfants) ayant entre eux un rapport de géniteurs à descendants qui définit le mieux ce groupe social si particulier qu'est la famille. La coexistence sous le même toit et le lien du sang qui définissent la famille ne suffit pas à en unir les membres. Le véritable ciment de toute cellule familiale c'est l'amour réciproque de ceux qui sont appelés à vivre ensemble. C'est à partir alors de cet amour réciproque que vont naitre les relations familiales.

    On peut, en gros, comme nous venons de le faire en haut, distinguer deux groupes dans la famille : les parents et les enfants, c'est la structure des relations qui s'établissent entre eux et à l'intérieur de chacun d'eux, entre les éléments qui les constituent que nous avons étudiée ici. Cette structure et la qualité des relations familiales varient en fonction du caractère et de l'équilibre de ces éléments constituants. Cette idée est soutenue par POROT M. (1979, p.9) pour qui : « que l'un de ces deux groupes ne soit pas équilibré, parce qu'un ou plusieurs de ceux qui le composent en fausse l'harmonie interne, et tout sera troublé. »La complexité des actions, des réactions et des interactions à l'intérieur d'une cellule familiale interdit d'envisager des relations familiales-types, idéales ou parfaites, que l'on pourrait étudier dans l'absolu, disséquer pour ensuite en étudier de façon quasi expérimentale les variations possibles.

    Selon POROT M. (1979, p. 10), c'est dans les relations familiales que l'enfant va construire sa personnalité à partir des échecs et des succès. En plus, «  les petites blessures subies en familles, les renoncements nécessaires à des exigences affectives excessives, les minimes injustices, les limitations obligatoires de son égoïsme, prépareront l'enfant aux exigences analogues et moins tempérées de sa vie d'adulte.» En réalité, le drame familial semble se jouer entre trois personnages essentiels : le père, la mère et l'enfant et quelques figures comme les grands-parents, les domestiques, les oncles, les tantes, etc. Mais un quatrième personnage n'en a pas moins d'importance que les trois premiers : c'est le foyer. Selon également POROT M. (1979, p.11), le foyer est explicité comme suit : «  Le foyer, avant tout fondé sur le couple parental est un être spirituel, vivant avec le passé, le présent et un avenir qui influencent profondément les relations qui s'établissent entre seséléments constituants. » Il reste à préciser le rôle joué par chacun des quatre personnages  qui composent la société familiale, donc les relations qui les unissent. Comme il n'y a pas de société viable sans équilibre permanent entre l'amour et l'autorité, entre la rivalitéet la solidarité, ces quatre rôles sont respectivement tenus par ces quatre personnages : la mère, le père, les enfants et le foyer. En effet, le père doit incarner l'autorité, la mère incarne l'affection (amour), les frères et soeurs la rivalité et le foyer la solidarité.

    Cependant, le rôle essentiel de chacun n'est pas un rôle exclusif. La mère doit avoir aussi autorité sur ses enfants et le père les aimer. Mais les enfants n'ont pas l'autorité sur leurs parents, ils doivent seulement leur obéir et les respecter. Nous avons insisté sur le rôle essentiel et primordial de chacun des membres de la société familiale parce que, souvent, les problèmes affectifs et familiaux trouvent leurs sources dans la méconnaissance des rôles joués par chacun des membres de la famille.

    A la base de beaucoup de troubles affectifs infantiles ou adultes, il n'y a souvent pas autre chose que l'insuffisance, l'excès ou la méconnaissance des rôles de chacun, dont les conséquences sont plus ou moins bien tolérées et compensées par les enfants. Ceci est affirmé par POROT M (1979, p.11) de cette manière  :« Quand la mère doit prendre dans la famille des décisions désagréables devant lesquelles recule la veulerie du père, quand le père doit consoler en secret l'enfant désespéré par l'indifférence d'une mère qu'il aime, quand le foyer dissocié se révèle à l'enfant, non plus comme l'école de la solidarité affectueuse, mais celle de la haine larvée ou ouverte, quand la rivalité des frères et soeurs devient tyrannie et injustice, avec ou sans complicité parentale, alors on peut dire que les rôles étant intervertis, personne ne remplit le sien et chacun remplit mal celui de l'autre. »

    Parler des relations humaines, c'est évoquer des rapports au sein d'un groupe. Il existe alors des relations dites horizontales, d'échanges, de dialogues ou de réciprocités. Retenons, à toutes fins utiles, que dans ce genre de relations, tout le monde est sur le même pied d'égalité et que chacun des membres amène sa contribution pour la mise en commun. Selon POROT M (1954, p.235), «la qualité des relations familiales détermine pratiquement l'avenir de l'enfant. Saines, elles atténuent les traumatismes psychologiques les plus douloureux ; médiocres, elles amplifient les minimes entre eux.» Ce sont des relations de collaboration et d'aide qui s'avèrent fondamentales dans l'intégration psychoaffective des enfants en général et du fils unique en particulier.

    En gros, nous avons utilisé ce concept pour mieux caractériser la famille aux relations normales et harmonieuses, en tenant compte d'une unicité du fils dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine et en prenant d'office les rôles joués par chacun des membres de la société familiale.

    En définitive, les concepts, une fois élucidés permettent au chercheur et aux lecteurs de comprendre le travail. En effet, les concepts sont tous élucidés en donnant des significations appropriées à chacun d'eux. Ainsi, des définitions opérationnelles ont été données à ceux-ci pour montrer le sens dans lequel nous les avons utilisés. Puisque ces concepts tournent autour de la famille, il s'est avéré nécessaire d'évoquer quelques généralités sur la famille burundaise telles que ses attentes, sa structure, les rôles de l'enfant et ceux des parents.

    CHAPITRE II: GENERALITES SUR LA FAMILLE

    Au Burundi, la famille est fondée dans le but d'atteindre quelques attentes telles que l'attente procréatrice et l'attente sociale. Dans le système patriarcal, les hommes jouent des rôles différents de ceux qui sont remplis par les femmes. Dans la famille, l'enfant est attendu par le couple et son arrivée apporte l'honneur à la famille ; il donnera le statut définitif de la mère et héritera la richesse familiale. Les parents sont, à leur tour chargés d'éduquer leurs enfants en incarnant l'autorité et l'amour paternels et maternels.

    2.1. La famille et ses attentes

    Traditionnellement, la famille est le résultat du mariage fait par deux individus de sexes différents dans le but de procréer. Cependant, il existe aujourd'hui des couples homosexuels qui s'unissent pour le plaisir et non pour la procréation. La naissance des enfants, chaleureusement attendus par les parents et l'entourage assure l'intégration du couple dans la société. Ainsi, le mariage est acte social et son résultat est aussi attendu dans la société.

    2.1.1. Attente procréatrice

    La mort emporte inévitablement les êtres humains, mais l'humanité se perpétue parce que les enfants naissent chaque jour. Au-delà des seules exigences de survie de l'espèce, l'amour conjugal voit dans l'enfant à mettre au monde et à élever la première oeuvre commune. C'est ce qui a été exprimé par BIGANGARA J.B. dans cette définition du mariage (1986, p.113) :«C'est la cohabitation volontaire et stable de deux personnes de sexes différents après accord et entente de leurs familles en vue de la procréation et de l'éducation des enfants, d'un épanouissement dans l'amour et dans l'aide mutuelle.» Parmi les objectifs visés par le mariage, selon cette définition, le plus important, c'est la procréation dans laquelle découle l'éducation des enfants. Tel est l'avis de NAVAS J. et son équipe (1977, p.84) qui affirment qu'«au Burundi, le but du mariage reste la procréation, non seulement pour des raisons économiques et sociales, mais aussi pour se perpétuer dans la descendance.»La stérilité reste une des causes du divorce dans bon nombre de sociétés.

    Au Burundi, lors des cérémonies du mariage, des souhaits sont adressés aux époux pour se procréer. Ainsi «urakagira inka n'ibibondo» c'est-à-dire « Que tu aies des vaches et des enfants» est un des souhaits le plus beau qu'on adresse à un Burundais. Traditionnellement, les Burundais pensent que la première richesse est celle d'avoir les enfants comme l'a souligné BIGANGARA J.B. (1986, p.92) quand il dit que «l'enfant est le trésor, le plus précieux mais aussi délicat». Pour les Burundais, il est heureux le couple qui a des enfants, car selon eux, le couple est honoré et respecté par l'entourage grâce à sa progéniture.

    2.1.2. Attente sociale

    Les besoins économiques et les contraintes socio-familiales sont parmi les facteurs poussant l'homme Burundais à se marier. Après le mariage, les deux partenaires sont appelés à être solidaires dans une situation où ils font face à plusieurs épreuves à savoir : assurer le pain quotidien de sa descendance, garantir l'intégrité du groupe, etc. Nous trouvons une illustration de nos propos dans l'encyclopedia Universalis (1975, p.1011) qui l'exprime ainsi : « Le mariage qui fonde la famille et engage l'avenir en intégrant le passé, reste un acte décisif où l'individu n'est pas le seul en cause mais où s'expriment les mobiles profonds du groupe.» Le mariage est un contrat solidement cimenté et fortement étayé par un ensemble de pressions socioculturelles.

    D'une façon particulière, chacun a une motivation qui le pousse à se marier mais celle-ci varie d'une société à l'autre, puisque le mariage remplit une attente sociale, comme le suggèrent, ainsi, les propos de BOUDON R. et LAZARSFELD P. (1965, p. 98) :«La famille est le premier lieu où se développent les relations sociales et où se transmettent les connaissances et le savoir-faire social lié à chaque genre. C'est au sein de la famille que les enfants acquièrent leur identité, une identité qui détermine ce qui est socialement acceptable ou non.» La famille est considérée comme une source de connaissances sociales de base. Parmi les attentes sociales remplies par la famille, nous pouvons signaler le rôle des figures parentales dans la construction de la personnalité de l'enfant et dans sa socialisation.

    En milieu rural, la majorité des familles vivent de l'agriculture et utilisent des techniques de production traditionnelles et les tâches sont réparties par référence à la tradition et aux préjugés qui ont influencé la division du travail entre sexes. Pour BAWIN B. (1996, p.34), «le mariage entraine une division du travail entre les hommes et les femmes.» A travers ses propos, nous remarquons que le système familial tend à différencier les rôles sur la base de la complémentarité. Cette structure bipolaire des rôles en fonction du sexe joue un rôle déterminant dans la formation de la personnalité chez l'enfant et dans sa socialisation.

    2.2. Le caractère sexiste chez l'être humain

    Le désir de choisir le sexe de l'enfant est pratiqué depuis longtemps. De tout temps, les êtres humains ont eu recours à des méthodes variées et quelquefois à des croyances pour choisir le sexe de leur descendance, avec plus de préférence du sexe masculin.

    2.2.1. Préférence du sexe masculin chez les Burundais

    Même si les Burundais préfèrent une progéniture nombreuse, ils ne sont pas très heureux lorsque leur descendance est du même sexe. Chaque Burundais désire une progéniture variée, c'est-à-dire les garçons et les filles. Dans certaines sociétés comme au Burundi, il existe des croyances mises en place pour sélectionner le sexe des enfants. C'est la raison pour laquelle on interdit aux jeunes non encore mariés et aux mariés qui n'ont pas encore d'enfants de deux sexes de manger la rate. Par exemple, «kirazira kurya inyama y'impindura utaragira imiziha yose», c'est-à-dire «il est interdit de manger la rate sans qu'on n'ait encore des enfants des deux sexes». En Kirundi, la rate est appelée «impindura» du verbe «guhindura» qui veut dire changer. On croit que celui ou celle qui en mangerait sans qu'il ait encore des enfants de deux sexes aurait uniquement des enfants du même sexe.

    Même si les Burundais préfèrent avoir les enfants de deux sexes, ils ont une préférence plus marquée pour les garçons. Dans ce cas, on peut dire que la solidarité familiale dépend non seulement de la fécondité de la femme mais aussi de la naissance des garçons. Le garçon se mariera et multipliera la famille, ce qui n'est pas le cas pour la fille qui doit plutôt partir s'installer dans la famille de son mari. Ainsi, certains adages de la langue burundaise qualifient, la puissance du garçon comme «umuhungu ni igikingi c'irembo», qui veut dire « le garçon est un pilier de la maison» qui signifie que c'est le garçon qui assure la sécurité de la maison; et une moindre importance accordée aux filles comme «Umukobwa ni akarago k'abaraye», c'est-à-dire, «la fille est une natte pour le logement des visiteurs», pour dire que la fille n'a pas un domicile fixe, elle peut déménager d'un moment à l'autre. La défense et la protection de la famille sont assurées par les parents de sexe masculin. Traditionnellement, lorsqu'une femme venait de mettre au monde; pour annoncer qu'il naissait un garçon, on s'exclamait : «Nibamukamire», c'est-à-dire, «Qu'on traie pour lui». Quand il s'agissait d'une fille, on ne disait rien, pour signifier qu'on était désolé.

    2.2.2. La sélection du sexe des enfants chez les Asiatiques et les Européens

    Cette préférence pour les garçons se retrouve au Burundi comme ailleurs dans d'autres pays. Ceci s'observe à partir des procédés magiques qui ont été utilisés pour exprimer le sexe de l'enfant souhaité. Les procédés mis en place sont liés à des croyances minimisant le sexe féminin et rendant la fille inférieure au garçon suite à la division du travail. Ainsi, selon ANTHONY E.J. et KOUPERNICK C. (1970, p. 160), «il semble que les Arabes se désolent quand une femme donne le jour à une fille. Les Juifs orthodoxes de leur coté remercient Dieu dans leur prière de n'être pas nés femmes.» Selon les divers proverbes de la sagesse asiatique tirés dans une publication de l'ONU (2007, p.11), «avoir un filsest de bonne économie et de bonne politique, et serait aussi essentielle que se nourrir au moins une fois par jour». Comparée à «un lever du soleil dans la demeure des dieux», la naissance d'un garçon donne lieu à de nombreuses célébrations. Selon la même source, pour les filles, en revanche, les axiomes sont bien différents : en arabe, Abu-banat (père de filles) est une insulte. De même selon un adage indien, «élever une fille c'est arroser le jardin du voisin.»

    Le concept de préférence pour les garçons existe sous différentes formes et dans de nombreuses cultures. Il incombe souvent aux fils de prendre soin de ses parents vieillissants et de les soutenir durant leurs derniers jours. Cette préférence pousse les êtres humains à avoir recours à des procédés magiques pour exprimer le sexe souhaité de l'enfant à moitié. Selon SPENCER C. et al. (2006, p.187), « dans l'Europe médiévale, les futurs parents devaient placer un marteau sous leur lit pour les aider à concevoir un garçon ou une paire de ciseaux pour concevoir une fille.» Les pratiques basées sur la croyance ancienne que le sperme du testicule droit engendre une descendance mâle alors que celui du testicule gauche engendre des femelles étaient aussi efficaces. Selon également SPENCER C. et al. (2006, p.187), « dansla Grèce ancienne, les hommes devaient s'allonger sur le coté droit pendant les rapports sexuels pour concevoir un garçon. Jusqu'au 18e siècle, les hommes européens devaient éliminer leur testicule gauche pour augmenter leurs chances d'avoir un héritier mâle».

    Dans certaines cultures, les efforts pour contrôler le sexe de la descendance prennent un aspect plus sordide : l'infanticide des filles. Plus récemment, selon SPENCER C. et al. (2006, p.187), « l'avortement en fonction du sexe a remplacé bon nombre de filles. L'amniocentèse et l'échographie sont devenues des entreprises lucratives qui permettent une détermination prénatale du sexe.» Selon la même source, les études réalisées en Inde montrent que des centaines de milliers de foetus seraient avortés chaque année en raison de leur sexe féminin.

    2.3. La structure patriarcale

    Le patriarcat est une organisation familiale et sociale basée sur l'autorité du père. Il est un système social dans lequel l'homme, en tant que père, est dépositaire de l'autorité au sein de la famille ou plus largement au sein du clan. Ainsi, le statut social du père diffère de celui de la mère dans une société patriarcale.

    2.3.1. Le statut social du père

    En tant que système de structure et de relations sociales, le patriarcat fait que le travail soit subdivisé entre les hommes et les femmes. Le pouvoir est détenu par le père au sein d'une famille. Tout le trésor familial est aux mains du père car il est le chef de la famille. C'est lui qui détient la parole dans toutes les cérémonies familiales. Certaines expressions montrent sa puissance par rapport aux autres membres de la famille. Par exemple, on dit que « Inkokokazi ntibika isake iriho» pour dire que la femme ne peut pas prendre la parole en présence de son mari.

    Le père de la famille est aussi souverain, celui qui assure la sécurité et le développement familial. Ainsi, les Burundais disent que « Urugo rutagira umugabo ntakitarukengera», pour dire que seuls les hommes luttent contre le mépris et garantissentl'honneur à la famille. Dans la société patriarcale, les enfants, fils et filles, ne reçoivent pas la même éducation. L'éducation des fils est surtout à la charge du père, qui les prépare à être des hommes honnêtes, courageux, fidèles, les hommes de conseil, de parole, qui savent acquérir honnêtement des richesses. L'éducation des filles est assurée par la mère qui les prépare surtout à respecter leurs futurs maris. A ce moment-là, à partir des travaux de chacun des parents, le fils s'identifie à son père, la fille à sa mère.

    2.3.2. Le statut social de la mère

    Certaines pratiques liées à la tradition patriarcale discriminent la femme au Burundi comme ailleurs. Considérant la réalité burundaise, quelques exemples montrent combien la femme est victime des préjugés sociaux entretenus par le système patriarcal. Ainsi, selon le dicton burundais, on dit que la fille ne siffle pas, car c'est porter malheur à son père. Il est interdit aux hommes de coucher avec leurs femmes la veille de la pêche, de la culture des abeilles car ils n'y réussiraient pas. D'autres expressions dévalorisantes sont utilisées dans le but de salir l'identité de la femme. Quand on dit, par exemple, «umugore ntabanga», pour dire qu'on ne peut entretenir un secret avec une femme. La société patriarcale a mis en place tout un ensemble d'attributs sociaux qui favorisent l'homme en discriminant la femme. Pour assurer le respect de la femme envers l'homme par exemple, selon le dicton burundais, la culture interdit à la femme burundaise d'appeler le mari par son nom, de le fixer du regard, d'utiliser certains instruments comme Inanga, Intahe qui signifient respectivement la cithare, la baguette des notables qui symbolisent la puissance de l'homme en famille.

    Cette discrimination faite aux femmes se retrouve aussi dans d'autres pays du système patriarcal. En effet, une étude réalisée au Kenya (1998, p.24) indique que  «les femmes sont des mineures tout au long de leur vie, elles changent de tuteur en passant de leurs pères à leurs maris et elles sont des perpétuelles déshéritées.» Les femmes ont été discriminées depuis longtemps même si elles cherchent à s'émanciper aujourd'hui. Selon MILL J.S.(1975,p15), «s'il y a un mot de vrai dans l'histoire, les femmes ont été de tout temps sur presque toute la surface du globe d'humbles compagnes, des jouets, des captives, des servantes, des bêtes en somme sauf dans quelques sociétés heureuses et très civilisées où elles sont littéralement réduites à l'état d'esclaves même dans les pays où elles sont le mieux traitées, les lois leur sont en général défavorables sur presque toutes les questions qui les concernent au plus haut point.» Selon la division des tâches, les hommes se considèrent comme les seuls responsables des biens familiaux mais en réalité les femmes contribuent beaucoup au développement de l'économie familiale.

    2.3.3. Le système patriarcal à la base des inégalités entre les sexes

    La société burundaise est patriarcale, la fille est appelée à fonder un foyer ailleurs, elle est donc étrangère à sa propre famille. Le droit aux biens de la famille reste gérer par les fils, seuls qui sont appelés à élargir la famille. Concernant le droit à la propriété foncière, seuls les fils en ont le droit, car la vocation successorale est patrilinéaire au Burundi et met en avant le sexe masculin. Voici ce qu'affirme, ici, HAVUGIYAREMYE C. (1999, p.46) :« Le patriarcat est la forme d'organisation familiale fondée sur la parenté par les mâles et sur la puissance paternelle. Dans une telle famille, les moeurs sont patriarcales, l'autorité du père est illimitée et sa parole est souveraine. La tradition veut que la femme soit soumise à l'autorité du mari et seul le garçon est considéré comme pouvant assurer la descendance familiale, qui commande et dirige. Bref, son autorité est le pivot des relations au sein du groupe familial.» Cette puissance que la tradition patriarcale confère à l'homme lui permet d'être le commandant suprême au sein de la famille. Jusqu'aujourd'hui, les hommes restent les seuls détenteurs du pouvoir familial.

    Selon D'EAUBONNE F. (1977, p.14), «les auteurs qui utilisent le masculin, quand il s'agit d'une découverte féminine, se conforment à la règle grammaticale du sujet collectif au masculin : 300.000 femmes avec un petit garçon s'accordent au masculin pluriel.» Pour montrer la puissance du masculin au féminin, les auteurs préfèrent utiliser le masculin. Tout cela montre combien la division des tâches est à la base des inégalités entre les sexes dans les sociétés à système patriarcal. En effet, les femmes sont moins nombreuses sur le terrain de travail et rares dans les organes de décision.Apartir des théories de MILL J.S ci-haut cité, nous comprenons que les femmes et les hommes sont inégaux. Une autre forme d'inégalité se trouve au niveau des salaires. L'exemple est celui de la Corée du Sud où les femmes salariées du secteur manufacturier gagnent 57% du salaire de leurs collègues masculins.

    2.4. La valeur et le rôle de l'enfant dans la famille

    Dans la littérature burundaise, on entend chanter et dire les berceuses et les mots en s'adressant à une femme qui a mis au monde.D'abord l'enfant est considéré comme une source d'honneur à la famille. Ensuite, c'est lui qui donne le statut définitif de la mère et qui la fait respecter. Il est enfin celui qui héritera, après la mort de ses parents, la richesse familiale.

    2.4.1. L'enfant comme source d'honneur à la famille

    L'enfant est une source de joie dans la famille. Son absence peut parfois être à l'origine de mésententes entre les conjoints et toutes leurs familles en général. Ainsi, BIGANGARA J. B. (1986, p.143) explique les conséquences de cette absence : «L'enfant offre un plaisir pour la famille, tandis que son absence constitue une pomme de discorde, voire même l'origine de la dislocation de la famille.» L'enfant est en outre porteur du bonheur familial car celui-ci crée un climat de gaité dans la famille. C'est pour cette raison qu'un couple sans enfant paraît comme un couple malheureux, sans joie. Mais la valeur que les Burundais traditionnels accordaient à l'enfant était sociale et économique. S'ils souhaitaient beaucoup d'enfants, c'est parce qu'ils savaient que ceux-ci les aideraient une fois devenus adultes et ils voulaient être honorés par les autres parce que le nombre élevé d'enfants était parmi les facteurs de prestige. C'est ce qui a été affirmé par BIGANGARA J.B. (1986, p.92) quand il écrit ceci : «L'enfant est un don donné dans l'intimité de l'amour conjugal, il est conçu dans le sein maternel. Ce don est le trésor, le plus précieux mais aussi délicat.» Un homme heureux était celui qui avait beaucoup d'enfants et plusieurs vaches. Pour NOTHOMB D. cité par NIYIBIZI S. (2003, p.12), «les hommes ne sont pas vraiment dignes d'honneur et de respect que dans la mesure de l'abondance de progéniture.» Le nombre d'enfants dans la famille burundaise est un aspect qui préoccupait beaucoup de gens car on attachait trop d'honneur à une famille nombreuse qu'à une famille réduite.

    Malgré les changements observés tant au niveau de la mentalité des gens qu'au niveau de l'économie, l'enfant garde une place de choix dans la famille burundaise. Par ailleurs, les enfants sont objets de prestige et d'orgueil pour les parents. Pour ERNY P. (1968, p.84) « être sans enfant, c'est comme être nu, sans défense ni prestige.» Traditionnellement comme aujourd'hui, le but primordial de se marier, pour les Burundais, reste la procréation. Les Burundais considèrent que le riche sans descendance travaille pour les autres, et celui qui travaille pour les autres n'a pas d'honneur.

    2.4.2. L'enfant et le statut définitif de la mère

    Une fonction importante de l'enfant est que celui-ci donne un statut définitif à la mère. C'est pour cela d'ailleurs que le premier enfant est impatiemment attendu. Au Burundi, l'une des attentes d'un couple conjugal était la procréation. A ce sujet ERNY P. (1968, p.84) explique ce qui suit : « Une femme enceinte est une femme heureuse. La naissance du premier enfant est un événement capital plus important que l'établissement de la vie conjugale.» La femme est considérée grâce à sa fécondité. Lorsqu'une femme est sans enfant, elle n'est pas considérée dans la société burundaise. ERNY P. (1968, p.84) décrit la situation d'une femme africaine stérile en ces termes : « Elle deviendra jalouse du bonheur des autres et sera bientôt perçue comme un être malfaisant.» Dans le Burundi traditionnel, la femme stérile n'a aucune raison d'être chez son mari. La stérilité constitue presque toujours un cas de divorce. Donc, avoir un enfant pour la femme burundaise garantit son installation dans la famille de son mari. Pour ROZIER R. (1975, p.93) «la femme tant qu'elle n'a pas encore procrée est considérée comme quelque chose de peu d'importance, ou plutôt d'inachevée. Par la suite, plus elle a des enfants, plus son importance sociale croîtra.» Grâce à l'enfant qui naît, la femme réalise pleinement son intégration sociale au sein de sa belle-famille.

    Dans le Burundi traditionnel, non seulement l'enfant intègre officiellement la mère dans la société, mais aussi et surtout la femme acquiert le droit à l'honneur réservé à d'autres mères. La femme est honorée à partir de sa descendance. C'est pourquoi dans les différentes berceuses, la mère évoque souvent des sentiments de profonde reconnaissance envers l'enfant qui l'a hissée au rang des mères. Selon RODEGEM F.M. (1973, p.176), en berçant son bébé, la femme burundaise dira: « Hora se ndakwinginge, wanshize mu bavyeyi, kera narabatinya» qui signifie «Calme-toi, toi qui m'a hissée au rang des mères, jadis j'avais peur de les approcher». Toutefois, l'intégration devient plus réelle lorsque la femme met au monde des enfants de sexe masculin. Le motif de cette assurance est que lorsqu'elle a des fils, ces derniers prendront le nom de la famille et la mère qui est liée fortement à sa progéniture est véritablement intégrée dans sa belle-famille.

    2.4.3. L'héritage de la richesse familiale

    Le rôle de l'enfant ne se limite pas à la seule source d'honneur à la famille et au statut définitif de la mère, il sert également comme héritier de la famille. Dans la société burundaise, personne ne souhaite qu'après sa mort ses richesses tombent dans les mains d'autres enfants que ceux de sa descendance. Cela explique pourquoi les filles ne sont pas considérées comme des enfants de leur propre famille mais de la famille de leur mari. Le sexe masculin est beaucoup apprécié par les Burundais. Selon NAVAS J. et al. (1977, p.52), « le garçon unique héritera de la propriété familiale et pourra engendrer des garçons et filles que son père n'a pas eu, assurant ainsi la continuité de la lignée». Ces auteurs trouvent que certains parents préfèrent une famille pauvre avec un enfant mâle qu'à une famille riche avec des filles seulement.

    D'après SABIMBONA S. (1989, p.32), on distingue deux types d'héritiers: «Traditionnellement, il existe deux catégories d'héritiers : les héritiers légitimes et les héritiers irréguliers. Les héritiers légitimes sont ceux qui sont unis au défunt par un lien de parenté légitime. Les héritiers irréguliers sont des successeurs qui ne sont pas unis au défunt par un lien de parenté.» En analysant ces deux catégories d'héritiers, nous constatons que les fils constituent les héritiers légitimes. Ce système de succession émane de la tradition patriarcale qui attribue au garçon uniquement le droit à la succession en minimisant la valeur de la fille. Comme le souligne le PNUD (1999, p.21) l'homme et la femme burundais n'ont pas les mêmes droits : « Juridiquement, sous certains aspects, les femmes burundaises ne jouissent pas pleinement des mêmes droits que les hommes.» Par exemple, les filles burundaises ne sont pas envoyées à l'école au même rythme que les garçons; car certains parents pensent que même si les filles fréquentent l'école, il n'y aura pas d'intérêt pour eux. Par conséquent, les droits d'accéder aux différentes fonctions publiques ou privées deviennent limités. La vocation successorale est patrilinéaire et consacre le privilège de la masculinité. En définitive, c'est la structure sociale qui est à la base de cette inégalité. Ainsi, le patriarcat favorise le sexe masculin.

    2.5. Le rôle des parents dans l'éducation des enfants

    Les responsables de l'éducation restent en premier lieu les parents en vue de préparer leurs enfants à leur vie future. Par ailleurs, LAFON R. (1979, p.603) montre le rôle de chacun des membres de la famille de la manière suivante: «On ne peut pas concevoir les parents en famille sans placer dans la totalité plurale qu'elle représente, à coté du père qui incarne l'autorité et la force et la mère qui représente l'amour et la faiblesse, la fratrie qui symbolise la rivalité et l'amitié.» En effet, le père doit incarner l'autorité, la mère à son tour incarnera l'amour. Cependant, il faut retenir que le rôle de chacun n'est pas un rôle exclusif.

    2.5.1. L'autorité paternelle

    Dans les sociétés à système patriarcal, le rôle du père de la famille reste prépondérant. Les enfants attendent de lui l'autorité et l'incarnation de la loi. Les enfants restent tranquilles lorsqu'il est à la maison. Même si leurs rôles sont tous valables en importance, le rôle du père diffère de celui de la mère en qualité. Le rôle du père reste essentiel dans la vie de ses enfants. Il apparaît en outre comme le modèle à imiter. DODSON F. (1976, p.123) affirme que: «le petit garçon d'âge préscolaire a besoin de contacts avec son père afin de pouvoir imiter et assurer son identification au genre masculin. La petite fille d'âge préscolaire a besoin de contacts avec son père pour former l'image de son futur mari. Elle a besoin de savoir que le premier homme de sa vie l'aime, pense à elle et apprécie sa féminité de petite fille.» Les contacts paternels aident le petit garçon à renforcer ses qualités masculines et l'amour paternel assure l'espoir d'un meilleur avenir pour la petite fille.

    Aussi, cette autorité paternelle doit être modulée. Pour POROT M. (1979, p. 158), «l'autorité du père est sans doute le pivot de l'harmonie familiale. Mais quel délicat réglage elle exige ! Les uns tiennent la main de fer, les autres pour l'indulgence et la faiblesse et je crois que personne n'a tout à fait raison. Au lieu de diriger l'enfant en lui imposant sa manière de penser, de sentir, le père soucieux d'éducation intelligente devrait faire abnégation de sa personnalité et pénétrer dans les sentiments de son enfant comme s'ils étaient les siens propres.»

    Cependant, le père ne doit pas imposer brutalement ses valeurs qu'il veut transmettre à ses enfants. Non plus l'autorité du père ne se confond pas avec l'agression et la tyrannie. Le père doit éviter la rigidité car autorité n'exclut pas tendresse à l'égard des enfants. Aussi, MICHAUX L. (1972, p.7) souligne l'importance de l'autorité: «Sans elle, ni la vie sociale, ni la vie humaine ne seraient possibles.»Le rôle de l'autorité est de régler les conflits, établir un ordre propre et assurer la paix générale à l'intérieur d'un système dans la vie des personnes. Enfin, son rôle est aussi la formation de la personnalité comme le souligne, ici, ERNY P. (1973, p.7) :«C'est la fonction paternelle qui a sur la formation de la personnalité une incidence déterminante.» Pour assurer le développement harmonieux de l'enfant, seule l'autorité du père ne suffit pas, l'amour maternel doit aussi contribuer à l'éducation de l'enfant.

    2.5.2. L'amour maternel

    Pour que l'enfant ait un développement harmonieux, la mère doit s'y impliquer beaucoup. Elle doit donner une affection à l'enfant si elle l'a reçue de la part de sa propre mère. POROT M. (1979, p.155) indique qu'«une femme aimée et heureuse, sans soucis majeurs pour son foyer a toutes les chances de donner à son enfant une affection saine, sereine, équilibrée, sans excès, ce que ne peut offrir celle qui soufre de la brutalité, de l'indifférence, les mauvais maris font aussi les mères abusives.» Il faut donc que la mère ait été bien traitée pour qu'elle puisse donner à son tour cet amour à son enfant.

    L'amour maternel est nécessaire dans une famille car il apporte une affection et crée un climat d'ambiance. Pour POROT M. (1973, p.69), «l'amour maternel est à la fois bienveillance, tendresse et compréhension, c'est-à-dire amour d'intuition, de manifestation et d'acceptation...Cet amour n'est pas une fin en soi destinée à la seule satisfaction maternelle. De sa qualité dépendra l'affectivité future de l'enfant qui est modelée par sa mère et cette influence persistera indéfiniment dans le psychisme de l'enfant.» L'amour maternel joue, pour l'enfant, un rôle sécurisant ce qui est indispensable pour son développement psychoaffectif. L'amour et la personnalité de la mère auront une influence déterminante sur l'avenir de l'enfant.

    L'absence ou l'insuffisance affective de la mère représente, pour l'enfant, une véritable catastrophe en raison de cette carence dont il est victime. L'excès d'amour maternel a également des effets néfastes sur le développement de l'enfant. Ceci est affirmé par MUCCHIELLI R. (1976, p.124) qui indique que « l'enfant gâté au même titre que l'enfant martyr, quoique dans une situation diamétralement opposée aura plus tard un moi anormal, insuffisant ou perturbé, générateur d'une existence malheureuse.» L'amour maternel excessif gâtera l'enfant tandis que son insuffisance ou son absence le rendra perturbé ou à être anormal. Si nous disons que le père et la mère occupent une place capitale dans le développement affectif de leurs enfants, il s'agit des parents qui savent bien se comporter et qui se donnent corps et âme pour éduquer leurs enfants.

    La famille burundaise, dans sa structure, est fondée sur le patriarcat. Ainsi, le rôle et le comportement de chaque membre dépendent de cette structure sociale. Les attitudes affichées par les parents au niveau de l'éducation des enfants diffèrent selon le sexe de l'enfant. Au Burundi, lorsqu'il s'agit d'un seul fils dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine, les parents traitent différemment les enfants. Ainsi, le fils unique, lorsque sa fratrie est seulement constituée par les filles, est beaucoup aimé, c'est un enfant roi et cher pour la famille.

    CHAPITRE III : LE FILS UNIQUE DANS LA FAMILLE BURUNDAISE

    Au Burundi, la famille est heureuse si elle a beaucoup d'enfant, filles et garçons. Selon les enquêtés de NAVAS J.et al. (1977, p.52), « avoir un seul enfant, c'est comme avoir un seul oeil : s'il se ferme, vous devenez aveugle». Comme les couples possédant un seul enfant, les couples à fils unique ne peuvent pas être tranquilles. Le fils unique est un objet à la fois de joie et d'angoisse en raison de la mortalité infantile. Sa fratrie reste les filles. Les parents affichent alors une tendresse excessive et l'entourage reste aussi attentif à l'égard de celui-ci.

    3.1. Le fils unique dans la famille

    Le phénomène «fils unique» dans une famille peut se produire et entraîner des attitudes nouvelles entre les membres de cette famille. Le fils unique est pris dans le réseau familial comme un enfant roi, qui gardera et qui héritera toute la richesse familiale. Il bénéficie des soins et des cadeaux particuliers et il est continuellement surprotégé par ses parents. Sa fratrie est faite de ses soeurs et celles-ci l'aideront à développer sa personnalité, il jouera avec elles et aura l'occasion d'apprendre à vivre en harmonie avec les autres.

    3.1.1. L'enfant roi

    L'arrivée d'un enfant dans une famille est un honneur. Les enfants sont souhaités mais le garçon est beaucoup plus souhaité que la fille dans la société burundaise. ERNY P. (1968, p.119) soutient cette idée : « L'homme qui a procréé des fils ressemble au bananier qui a donné ses fruits. Il peut mourir, par le truchement de l'enfant, le nom du parent revivra, qui nommera l'enfant nommera les parents.» Un couple qui n'a mis au monde que des filles n'est pas heureux car le couple est satisfait s'il a procréé des fils et filles. La naissance du fils dans cette famille apporte une joie intense aux parents, et celui-ci est beaucoup plus aimé que ses soeurs. Il est traité, par conséquent, comme un roi, car «Ubwiza bw'inka ni ukuba imwe» c'est-à-dire «la beauté d'une vache est d'être unique», disent les Burundais.

    Tous les parents savent bien qu'il faut faire preuve d'autorité si on ne veut pas faire de son enfant un petit roi exigeant et trop gâté. L'enfant roi devient dominateur, bénéficiaire du laxisme éducatif; il est celui que l'on décrit habituellement comme le résultat d'un enfant impulsif, opposé à toute autorité et sans aucun sens de discipline et d'effort. L'enfant roi dominateur se conduit alors comme il a envie de faire et sans aucune restriction, au gré de ses désirs et caprices qui deviennent aisément confondus avec les besoins. L'enfant roi peut être anxieux, davantage fragile, il affiche plutôt de fortes tendances à l'anxiété et une insécurité parfois chronique qui le conduisent à un important besoin vital d'encadrement. Selon SILLAMY N. (1980, p.39) «sans autorité, l'éducation se fait mal, la personnalité reste faible, le sujet vit dans l'insécurité et l'anxiété».L'autorité des parents envers les enfants permet à ces derniers de bien se comporter, d'avoir une forte personnalité en se sentant à la fois sécurisés et sûrs d'eux-mêmes. La sécurité est assurée par ses parents ou ses substituts. Comme le souligne BERNARD P. (1979, p.10), «ce besoin de sécurité presque aussi vital que la nourriture(...) est assurée par les deux parents ou un substitut». L'enfant roi anxieux est donc celui qui souffre du laxisme. L'enfant roi dominateur est caractérisé par l'impulsivité et un égocentrisme. S'imposant comme roi et maître dans tout, il veut que les membres de la famille lui doivent obéissance et vénération.

    Il faut toutefois retenir que peu importe ce degré d'impulsivité, l'enfant roi conserve toujours les tendances au plaisir et à la facilité. Plus l'intensité de l'impulsivité devient élevée, plus l'enfant roi risque d'augmenter la déviance de sa conduite et de se rapprocher ainsi de la délinquance. Pour ce qui est de l'éducation de cet enfant, on remarque une compétition entre ses parents pour devenir aux yeux de ce dernier le parent le plus sympathique.

    3.1.2. Le jeu du fils unique

    Etant donné que le jeu est un instrument qui permet à l'individu de se divertir et de se détendre, il aide l'enfant à développer en particulier son intelligence, son aptitude physique, son affectivité et, de façon générale, toute la personnalité est impliquée. Un enfant qui joue acquiert des connaissances sociales comme le souligne TAP P. (1985, p.57) :« Le jouet est le support d'apprentissages sociaux multiples tout autant que le catalyseur des conduites de communication et de fantasmes. Par lui, l'enfant s'approprie, intériorise les rôles adultes, les modalités d'interaction entre les personnes, les systèmes de règles instituées, les normes et les valeurs.»Le rôle d'un jeu est de permettre la socialisation de l'enfant et l'adaptation aux règles que celui-ci doit respecter pour gagner la vie.

    Concernant le cas du fils unique, ses compagnons sont les filles et ses parents dans sa famille. Comme il ne parvient pas à jouer avec ses parents, il doit jouer avec ses soeurs, c'est avec elles qu'il établit des relations de tout genre. Or, dans les yeux de l'enfant, il existe des jeux destinés aux filles et d'autres aux garçons. Le fils unique est alors obligé de s'adapter aux jeux féminins et ceux-ci peuvent comme conséquences modifier le genre masculin dufils. Plus il joue avec ses soeurs, plus il a tendance à avoir le genre féminin. Ainsi dit TAP P. (1985, p.57) :« Le jouet serait ainsi un moule, un instrument de conformité, grâce auquel s'opérerait, entre autre, la prise en compte des modèles de comportements appropriés à chaque sexe.» Donc, les jeux offrent à l'enfant les modèles de vivre. Les petites filles y apprennent à être des femmes, les garçons à être des hommes.

    Le jeu facilite également l'ouverture au monde extérieur. Etant donné qu'il joue avec ses soeurs, les jeux féminins ne lui font pas totalement plaisir. Par conséquent, ce fils éprouve une solitude pendant que ses soeurs jouent. Egalement, ses soeurs l'ignorent du fait qu'il n'est pas adapté à leurs jeux. Quelquefois, le fils unique est obligé de quitter sa propre famille pour chercher les autres garçons afin de jouer avec eux.

    3.1.3. Le fils unique et sa fratrie

    Le fils unique possède une fratrie qui est constituée par les filles. Ces filles forment ensemble la fratrie du garçon. Connaissant le rôle de la fratrie, ces filles facilitent la socialisation du fils. Comme le souligne POROT M. (1979, p. 203), «la fonction essentielle des frères et soeurs est donc de permettre la meilleurs socialisation possible de l'enfant. Cette adaptation sociale sera obtenue par le passage de la rivalité à l'amitié et à la coopération. Ces deux dernières attitudes sont le terme habituel des relations entre frères et soeurs ayant subi une évolution normale.»

    Dans notre cas où la fratrie du fils unique est constituée des filles, la rivalité naît de la part du mépris que le fils affiche à l'égard de ses soeurs et de la jalousie que les filles affichent à leur frère. Nous savons avec POROT M. (1979, p. 221) que « (...) qu'il est bon ton pour les garçons de mépriser les filles, êtres inférieurs, tout en cherchant à leur plaire, et pour les filles de tenir les garçons pour des brutes malpropres, tout en admirant et en jalousant secrètement leur force.» Le fils unique se voit intéressant au niveau de sa fratrie à cause de la satisfaction immédiate de ses besoins ou tout simplement de l'amour profond des parents. Mais, lorsqu'il termine une série de filles, la fille ainée peut se sentir à la fois supérieure et inférieure, et le garçon peut aussi éprouver un sentiment d'infériorité. C'est ce qu'affirme POROT M. (1979, p.221) de cette manière : « Une fille aînée, peut se sentir à la fois supérieure parce qu'ainée, et inférieure parce que fille. Un garçon peut développer un sentiment d'infériorité réel du fait des remarques acides et sans pitié de sa chipie de soeur.»

    Selon le rang dans la famille, lorsqu'un garçon unique précède plusieurs filles, il est satisfait de lui-même. Au contraire, lorsqu'il est le benjamin, il risque d'être mou et dévirilisé. Comme l'indique POROT M. (1979, p.221), «il y a des familles où un garçon unique précède plusieurs soeurs ; il est souvent satisfait de lui-même, parfois insupportable car adulé sans cesse. Celui qui termine une série de filles risque au contraire d'être mou, amorphe, dévirilisé, faute d'avoir pu bénéficier de la rivalité tonique et vivifiante d'un ou de plusieurs frères. » Il est bon alors, dans une telle famille, que le garçon unique soit l'aîné de la famille pour qu'il puisse être satisfait. Les relations du fils avec ses soeurs préparent, dans une certaine mesure, les futures relations sociales des hommes avec les femmes. La vie quotidienne auprès de ses soeurs donnera au fils unique à la fois une certaine aisance avec la femme qu'il épousera et du respect pour elle. Le rôle primordial de la fratrie reste, en général, la socialisation des enfants.

    3.2. La fratrie et son rôle dans la socialisation des enfants

    Toutes les relations familiales s'établissent entre les parents et les enfants. Plus le nombre d'enfants croît, plus les relations entre eux deviennent, en quelque sorte, multiples. La rivalité, l'égocentrisme, la haine, etc. sont les caractéristiques essentielles des relations fraternelles. Ces caractéristiques aboutiront à la naissance de la solidarité, de l'affection et de l'amitié dont la fonction essentielle est de permettre la meilleure socialisation de l'enfant.

    3.2.1. La rivalité fraternelle

    Dans l'éducation des enfants, les parents revêtent des qualités différentes. Les enfants eux-mêmes jouent, entre eux, un rôle important dans la socialisation. A ce propos, POROT M. (1979, p.69) note que « la fonction essentielle des frères et des soeurs est de permettre une meilleure socialisation possible de l'enfant. Cette adaptation sociale sera obtenue par le passage de la rivalité à l'amitié et à la coopération.» En peu de mots, les rapports entre les enfants restent les rôles qu'ils joueront dans leur avenir. La fratrie occupe alors une place primordiale dans l'éducation familiale. Cependant, la fratrie incarne la coopération et la rivalité entre les enfants en même temps. Les théories de MIALARET G. (1967, p.209) font comprendre que « la rivalité est paradoxalement l'élément central de la fratrie.»

    La rivalité, la solidarité et d'autres relations caractérisent les enfants dans une même famille. En tenant compte du sexe des enfants, la différence attenue les rivalités fraternelles excessives. A ce sujet, nous partageons l'avis de POROT M. (1979, p. 220) selon lequel « la différence des sexes tempère ce que pouvait avoir d'un peu excessives les relations fraternelles. Le garçon sera toujours un peu jaloux d'un privilège accordé à son frère parce qu'il est petit, alors qu'il acceptera beaucoup mieux pour sa soeur parce que c'est une fille.» La présence des garçons et des filles a un effet modérateur sur les rivalités fraternelles.

    La rivalité fraternelle est induite par la jalousie, l'envie et le sentiment de compétition. La jalousie est un sentiment qui se réfère à la peur de perdre, à cause de quelqu'un, quelque chose qui a été gagné. ANGEL S. (1996, p. 100) explique la jalousie comme suit : « C'est une chose compliquée et qu'on ne peut occulter ; elle fait partie de nous, même lorsqu'elle est fortement refoulée, déplacée, sublimée, intellectualisée.» : Par exemple, le cadet est un intrus aux yeux de l'aîné qui va lui voler l'amour parental. Le cadet aura comme envie le désir de bénéficier des biens de l'aîné. Lorsque l'enfant est unique, il connaît des conséquences suite à l'absence des frères.

    3.2.2. L'enfant unique et ses conséquences

    L'enfant unique désigne le seul enfant né dans une famille. Qu'il soit garçon ou fille, l'absence de frères et soeurs engendre quelques conséquences pour un enfant. L'enfant unique est un enfant privé de relations fraternelles et par conséquent, son intégration sociale devient difficile ; car le rôle de la fratrie est d'élargir le champ d'interactions et d'échanges dans la famille et préparer l'enfant à affronter encore d'autres relations avec le monde extérieur. Les relations qu'un enfant tisse avec ses frères et soeurs lui aident à élaborer des attitudes de sociabilité qui lui permettront plus tard de s'adapter dans la société.

    Traditionnellement, dans la société burundaise, presque toutes les initiations se faisaient entre frères et soeurs. L'absence de ceux-ci rendra l'enfant déséquilibré comme le souligne NDIMURUKUNDO N. cité par NKESHIMANA G. (2005, p. 113) de cette manière: «S'il n'y avait pas de fratrie, tous les enfants burundais seraient des déséquilibrés.» Donc, l'enfant, pour mieux se développer, a besoin d'être entouré par d'autres enfants en particulier ses frères et ses soeurs.

    La fratrie met en place la rivalité fraternelle qui est un fait important dans la vie d'un enfant. En effet, les petites injustices, les multiples renoncements, les légères vexations qui se font au contact des frères et soeurs seront l'origine de la rivalité fraternelle. Ainsi, par le passage de la rivalité à l'amitié et à la coopération, l'enfant évolue vers une meilleure adaptation sociale. L'absence d'autres enfants rencontrée chez l'enfant unique prive celui-ci de l'expérience de découvrir la haine survenant lors de la naissance d'un autre enfant et qui se transformera plus tard en amour. C'est ce qu'affirme WINNICOTT D.W. (1978, p. 156) en ces mots : « En fait, les parents devraient se sentir soulagés d'entendre, à la naissance d'un nouvel enfant, l'expression directe d'un recule conscient et même d'une haine violente. Cette haine se transformera peu à peu en amour lorsque le nouveau bébé deviendra un être humain avec lequel on peut jouer et de qui on peut être fier.» Une grande difficulté est l'expression de la haine pour l'enfant unique.

    L'égocentrisme de l'enfant doit ensuite céder progressivement la place à une charité pour satisfaire aux exigences de la vie en société. Au contraire, l'enfant unique reste égoïste car il manque quelqu'un avec qui il va partager l'amour. Ainsi, POROT M. (1979, p. 226) nous décrit la situation d'un enfant unique en ces mots : « C'est un isolé, c'est un enfant couvé parce qu'il est le plus souvent un enfant égoïste et l'idéal parental qu'il intériorisera ne pourra être qu'un idéal d'égoïste

    La fonction essentielle des frères et soeurs reste la socialisation, une adaptation sociale obtenue par le passage de la rivalité à l'amitié et à la coopération. Cette socialisation n'aura lieu qu'à la présence de la fratrie, car l'enfant unique est un isolé, un égoïste. Il reste solitaire et rien ne lui permet de développer un esprit communautaire, le sens de la réalité sociale forgé au feu de la rivalité fraternelle.

    3.3. Traitement psychosocial d'un fils unique

    Comme l'enfant unique, le fils unique est aussi mis au centre de toutes les attentions des parents. Il est souvent surprotégé, ce qui lui confère un profond sentiment de sécurité et une impression de toute puissance. Ses parents lui donnent un amour excessif suite à son unicité. Egalement comme l'enfant unique, l'entourage du fils unique est attentif pour son éducation. Ce dernier est l'objet d'une attention particulière et d'une tendresse excessive mais celles-ci peuvent avoir des conséquences pour sa vie. Ainsi, il peut être un enfant gâté, paresseux et égoïste.

    3.3.1. Tendresse excessive des parents

    Dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine, l'attention des parents ne porte pas sur la majorité mais sur l'unicité. Ainsi, le cas du fils unique devient un cas particulier pour les parents. Ceux-ci deviennent hyperprotecteurs, leur autorité sur le fils unique devient faible et ils affichent une trop grande sollicitude envers celui-ci. Tous ces caractères affichés par les parents envers l'enfant peuvent se résumer comme tendresse excessive des parents. En effet, le fils unique est surprotégé et ne connaît pas de frustration. Lorsqu'il termine une série de filles, les parents affichent une sollicitude plus remarquée. Ils veulent que leur fils reste toujours dans leur vue par le fait qu'il leur procure plus de joie; de son absence, ils restent anxieux comme le signale, ici, LERICHE A.M. (1975, p.74) :« Les parents hyperprotecteurs sont eux-mêmes très anxieux et malheureux ; ils se sentent souvent inconsciemment coupables à l'égard de leurs enfants et c'est pour réparer ou expier cette faute, imaginaire la plupart du temps et inconsciente, qu'ils donnent trop ou sont angoissés et surprotègent leurs enfants.»

    L'autorité parentale sur le fils unique est faible. Le respect et la discipline sont relâchés et le fils risque de dévier dans ses comportements. A ce sujet, voici ce que dit LESCURE M. (1978, p.110) :«Elever l'enfant sans contrainte aucune sous le fallacieux prétexte de respecter la liberté, c'est le livrer à sa propre fantaisie à un âge où celle-ci risque d'être tyrannique et mal le préparer aux contraintes de la vie scolaire d'abord, puis à celles de la vie sociale.»Les parents donnent une affection excessive en oubliant que l'autorité est aussi nécessaire que l'affection. L'unicité du fils pousse l'entourage de ce dernier à être attentif en le protégeant comme ses parents.

    3.3.2. Entourage attentif du fils unique

    Les parents ayant un fils unique pensent toujours que celui-ci est exposé aux dangers; ils le limitent dans ses fréquentations en le suivant régulièrement dans tout et cela le prive de liberté même de choix de ses amis. L'idée de POROT M. (1979, p.106) nous complète : « Parfois un petit camarade jugé acceptable par le tamisage maternel lui permettra de satisfaire tant bien que mal son désir de contact social.» Pour les parents du fils unique, l'entourage n'est pas sécurisant. Ils pensent qu'il y a des malfaiteurs qui peuvent faire du mal à leur fils. Par ailleurs, le fils est aimé par ses camarades et par les adultes comme ses grands-parents, ses oncles et autres membres de sa famille élargie. Les membres de sa famille élargie sont aussi anxieux de lui; ils le voient comme la seule richesse que possèdent son père et sa mère. Ils le sécurisent physiquement en essayant de réduire au maximum les risques. Aussi, le fils unique est sécurisé de façon affective grâce à la régularité des soins qu'on lui apporte et à la présence stable des adultes autour de lui.

    La littérature orale burundaise associe richesse et fécondité, et la première richesse y est la fécondité. Le garçon est placé en première position et la fille occupe une place secondaire dans la famille traditionnelle ; et aujourd'hui, cette place est maintenue par ces enfants suite à la structure patriarcale de la société burundaise. Ainsi, il n'est pas rare d'entendre dire  que « la fille n'est pas un enfant de la famille» ou encore  «la famille qui n'a pas engendré de garçon n'est pas une vraie famille». Le fils unique est comme l'or à sécuriser car sa mort fait disparaître la famille.

    3.4. Conséquences liées à l'absence ou à l'unicité du fils chez les parents

    Le vécu social d'une personne et ses attentes déterminent sa vie psychologique. La progéniture au Burundi est très considérée à tel point que son absence provoque la dislocation du couple. Ainsi, la progéniture masculine était, traditionnellement comme aujourd'hui très souhaité. Des problèmes socio-affectifs peuvent survenir dans un couple à progéniture uniquement féminine ou à fils unique. Il s'agit entre autre de l'insatisfaction dans la progéniture qui engendre la culpabilité de chacun des parents d'être à l'origine de ce manque de fils, d'une mésentente dans le couple, orientation d'affection parentale à l'unique fils, manque d'affection chez les enfants « non souhaités ».

    3.4.1. Progéniture uniquement féminine comme source de mésentente familiale

    Au Burundi, les parents souhaitent avoir une descendance de tous les sexes. S'il s'agit des enfants du même sexe, les parents deviennent mécontents. Ce sera le pire s'il s'agirait d'une progéniture uniquement féminine. Ainsi, dit NTAMWANA M.T. (1983, p.47), « pour les Burundais, il n'y a pas de souhait plus profond que celui d'avoir une descendance, mais avec une nuance que les parents deviennent mécontents lorsqu'ils s'aperçoivent que tous les enfants sont de même sexe. S'il ne naît que des filles, le mari sera déçu, il fera des reproches à sa femme en ces termes :"uramponeje" c'est-à-dire :«Tu me prives de la descendance.» Sous une mentalité traditionnelle qui disait que seuls les garçons sont aptes à continuer la lignée, la descendance féminine était considérée comme une malédiction dans la mesure où la famille sans descendants mâles risquait de s'éteindre. L'absence d'une descendance mâle laisse une blessure chez le couple.

    La présence d'un fils unique dans la famille diminue les blessures des parents lorsque celui-ci naît après une longue attente. Avant la naissance d'un garçon, lorsque la femme met au monde uniquement les filles, le mari se lamente. Dans ce cas, tous les parents sont angoissés du fait qu'ils sont incapables de procréer des enfants qui répondent à leur préférence. Les filles dans ce cas sont insécurisées du fait des disputes des parents, coupables d'être à la base des conflits entre les parents et, par conséquent, elles ne bénéficient pas l'affection parentale.

    3.4.2. Naissance du fils comme source de satisfaction chez les parents

    L'arrivée alors d'un fils pousse les parents à adopter un autre comportement ; celui d'un amour profond chez le fils parce qu'il est chaleureusement attendu. Pour eux, c'est une réussite, un triomphe comme le souligne BIGANGARA J.B. (1986, p.102) :« Si la procréation d'un enfant donne à l'homme la preuve reconfirmable de sa virilité, la naissance d'un fils est ressentie comme l'expression complète, parfaite, suprême de sa propre puissance.» L'affection parentale qui devrait être bénéficiée par tous les enfants est reçue par le fils unique. Ces parents deviennent dans ce cas hyperprotecteurs, ils l'épargnent de tout effort. Ils veulent, en effet, le faire vivre dans un univers où tout est rassurant et facile. Ce qui conduit l'enfant à être gâté parce qu'il ne connaît pas de frustration et ses demandes sont obtenues immédiatement.

    A part cette hyperprotection, l'autorité parentale sur le fils unique devient très faible, les parents affichent une trop grande sollicitude envers lui. S'il est menacé par quelqu'un d'autre, le recours sur lui est urgent. Conséquemment aux filles, elles restent moins considérées et deviennent jalouses. La place accordée au fils devient primordiale.

    Pour clore, les parents garderont la peur pour le fils unique, qui d'un moment à l'autre peut être perdu, à cause d'une maladie ou d'un accident. Chaque fois que le fils est absent à la maison, ses parents restent angoissés. Dans ce cas, la place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine devient une question problématique qui mérite une recherche.

    CHAPITREIV:PROBLEMATIQUE ET CONSIDERATIONS
    METHODOLOGIQUES

    Dans toute étude, le chercheur doit donner à son travail une orientation et des objectifs précis. Toute recherche qui se veut scientifique devrait apporter des solutions à un problème constaté.Dans le souci d'atteindre nos ambitions, nous avons défini et éclairci la position du problème à l'étude pour pouvoir y apporter des solutions adéquates. L'objet du présent chapitre comporte le descriptif de la problématique, de la méthodologie utilisée et du travail de terrain.

    4.1. Problématique de la recherche

    Généralement, la famille est considérée comme le premier milieu de développement affectif de l'être humain et des relations entre les parents, les enfants et le milieu environnant. Dans les conditions normales, le fondement d'un foyer se fait entre un mari et une femme qui s'entendent dans le but de permettre l'épanouissement de la famille. L'interposition des nouveaux êtres (enfants) qui sont le fruit de l'union de ces derniers est nécessaire, parce que cette interposition assure la stabilité du couple dans le ménage.

    Au Burundi, le bien suprême pour une famille reste l'enfant. Les Burundais pensent que la richesse se trouve dans le fait d'avoir un enfant car, pour eux, la mission de l'enfant est celle de l'aide économique ou financière et sociale. Et aussi, les parents trouvent fierté, prestige et orgueil dans le fait d'avoir beaucoup d'enfants. Les Burundais considèrent l'enfant comme trésor. Ainsi, voici les propos de BIGANGARA J.B. (1986, p.92) à ce sujet:«L'enfant est un don donné dans l'intimité de l'amour conjugal, il est conçu dans le sein maternel. Ce don est le trésor, le plus précieux mais aussi délicat ; il faut veiller sur lui, car, s'il est perdu personne ne peut le rétablir.» Pour les Burundais, la progéniture masculine et féminine nombreuse procure la joie au couple.

    Parmi les attentes familiales telles que l'attente procréatrice et l'attente sociale, cette première reste la principale motivation du mariage. Selon NAVAS J. et ses collaborateurs (1977, p.23), la fécondité est « la valeur fondamentale de la cellule familiale. L'enfant apparaît comme la pierre angulaire de tout l'édifice familial burundais. Le motif profond qui pousse les burundais à s'unir est avant toute chose le besoin de fonder un foyer et d'avoir des enfants. » Dans la culture burundaise, le mariage implique le fait d'avoir des enfants à la fois des fils et filles. L'homme et la femme sans enfant paraissent sans importance aux yeux des burundais.

    Cependant, on observe des couples qui ont mis au monde seulement des garçons, d'autres des filles ou même d'autres couples qui n'ont qu'un seul enfant ou pas d'enfant. La progéniture peut être à majorité masculine avec une seule fille ou à majorité féminine avec un seul fils dans une famille. Ce déséquilibre dans la progéniture pousse les parents à avoir une attitude particulière à leurs enfants. Dans toutes les familles, les parents devraient veiller à ce que chaque enfant obtienne sa part d'affection en quantité suffisante et égale. Qu'en est-il alors lorsqu'il s'agit d'un seul fils et de plusieurs filles? On comprend certainement que les attitudes deviennent particulières et cela ne manque sûrement pas d'influences sur le fils unique et sur les filles, en général sur toute la famille.

    Au Burundi, notre société étant patriarcale, la fille appelée à fonder un foyer ailleurs est considérée comme étrangère à la famille d'origine, le droit à la propriété foncière appartient à l'homme seul car la vocation successorale est patrilinéaire et consacre la primauté à la masculinité. Voici ce qu'affirme HAVUGIYAREMYE C. (1999, p.46) : « Le patriarcat est la forme d'organisation familiale fondée sur la parenté par les mâles et sur la puissance paternelle. Dans une telle famille, les moeurs sont patriarcales, l'autorité du père est illimitée et sa parole est souveraine. La tradition veut que la femme soit soumise à l'autorité du mari et seul le garçon considéré comme pouvant assurer la descendance familiale, qui commande et dirige. Bref, son autorité est le pivot des relations au sein du groupe familial.» Cette puissance que la tradition patriarcale confère à l'homme lui permet de prendre toutes les décisions au détriment de la femme.

    Depuis la tradition à nos jours la place accordée à l'un des sexes n'est pas égale à celle qui est accordée à l'autre sexe. L'attitude sexiste des parents liée à la structure patriarcale de la société, fait que le sexe masculin a une certaine supériorité par rapport au sexe féminin. Par conséquent, les excès de tendresse ou de sévérité sont deux attitudes extrêmes que les parents peuvent afficher à l'égard de leurs enfants et qui auront une part extrêmement considérable dans le développement affectif des enfants.

    Ceci est affirmé par MUCCHIELLI R. qui indique que « l'enfant gâté au même titre que l'enfant martyr, quoique dans une situation diamétralement opposée aura plus tard un moi anormal, insuffisant ou perturbé, générateur d'une existence malheureuse.» La satisfaction immédiate dès que la demande de l'enfant est faite, autrement-dit l'absence totale de frustration et également le fait de se soumettre au caprice de l'enfant sont eux aussi considérés comme des facteurs pathogènes aussi graves que la frustration excessive ; donc, il faut nécessairement une certaine frustration parce qu'elle fournit une certaine force à l'enfant dans la prise de conscience du réel et dans l'acquisition de l'autonomie, du sens de responsabilité et de la confiance en soi . De ce fait, il devient difficile d'acquérir son autonomie et d'être responsable. Il ne bénéficie dans ce cas d'aucune expérience et ce manque d'initiative se fera sentir plus tard.

    De plus, cette considération différente entre fils et filles engendre relativement une certaine mésentente entre ceux-ci. Lorsque le fils est bien traité par rapport aux filles, ces dernières auront une jalousie envers celui-ci et par conséquent elles vont l'ignorer de leur groupe. Autrement-dit, une autre sorte de mésentente peut être remarquée au niveau des relations entre les parents et leurs filles. En effet,les parents ayant un fils unique affichent un comportement d'hyperprotection vis-à-vis de ce dernier, ils le protègent contre tout danger, toute contrariété et le défendent lorsqu'il se dispute avec ses soeurs.

    Cependant, même si ce fils est entouré de beaucoup de soins et d'attention, des problèmes s'observent dans sa vie. D'une part, une sorte de solitude s'observe dans ses comportements parce qu'il se voit unique du fait qu'il n'a pas de frères. Voilà que quelque chose de très important dans sa vie affective lui manque : les relations fraternelles. D'autre part, le fils unique est gâté, ce qui aura comme conséquences le manque de responsabilité et le manque d'autonomie dans sa vie future.

    Après cette problématique d'être fils unique, notre préoccupation était de connaître la place qu'occupe le fils unique au sein de sa famille et les conséquences rencontrées par celui-ci en tenant compte des attitudes qu'adoptent les parents actuels ayant un fils unique. De ce fait découle la question problématique de recherche: « Quelle est la place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine ? »

    De cette question problématique générale, nous avons dégagé les questions spécifiques suivantes :

    v Quelles sont les relations unissant les parents, les filles et le fils unique ?

    -Qu'est-ce qui est à l'origine de lamésententeentre les parents et leurs filles dans une telle famille ?

    -Pourquoi y a-t-il une affection profonde entre les parents et leur fils unique ?

    -Qu'est-ce qui est à l'origine des relations d'entente entre le fils unique et ses soeurs ?

    - Qu'est-ce qui est à l'origine des relations de mésentente entre le fils unique et ses soeurs ?

    -Qu'est-ce qui fait que les relations soient bien organisées au sein d'une famille ?

    v Quels sont les traitements affectifs réservés au fils unique contrairement aux filles ?

    -Comment les parents traitent-ils leur fils unique ?

    -Comment les filles traitent-elles leur frère ?

    -Comment le fils se sent-il suite aux traitements qu'il subit ?

    v Quelles sont les conséquences pour le fils unique et pour sa famille ?

    -Quels sont les problèmes rencontrés par le fils unique dans sa famille ?

    -Quels sont les mauvais comportements résultant de son unicité ?

    v Quelles précautions faut-il envisager dans une telle famille pour éviter le préjugéfondé sur la discrimination des sexes?

    -Quelles sont les mesures proposées aux parents pour éviter le préjugé fondé sur la discrimination des sexes?

    -Que doivent faire les parents pour réussir à l'éducation de leurs enfants en général et du fils unique en particulier ?

    -Quels sont les conseils donnés au fils unique pour qu'il puisse bien préparer sa vie future?

    4.2. Les objectifs de la recherche

    En commençant tout travail, il convient de se proposer des objectifs. D'où notre travail de recherche exige qu'on se fixe des objectifs à atteindre.

    4.2.1. L'objectif général

    L'objectif général de notre recherche est d'étudier la place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine

    4.2.2. Les objectifs spécifiques

    -Cerner les types de relations unissant les parents, les filles et le fils unique

    -Découvrir les traitements affectifs réservés au fils à cause de son unicité.

    -Montrer les conséquences pour le fils unique et pour sa famille 

    -Proposer les précautions à envisager dans une telle famille pour éviter le préjugéfondé sur la discrimination des sexes?

    4.3. Méthode et technique de recherche

    Le choix d'une méthode et d'une technique appropriée est nécessaire pour une meilleure réalisation du travail de recherche. En ce qui concerne notre recherche, nous avons opté pour la méthode qualitative et l'enquête par l'entretien semi-directif.

    4.3.1. Méthode qualitative

    En sciences sociales, il existe deux principales méthodes d'approche des phénomènes. Il s'agit de la méthode qualitative et de la méthode quantitative.  Notre étude n'avait pas l'intention de privilégier la quantité d'informations matérialisées par les résultats chiffrés. Puisque notre travail était centré sur les faits sociaux ne pouvant pas être quantifiés, nous avons privilégié la méthode qualitative qui est appropriée pour l'analyse et la compréhension desfaits. Cette méthode privilégie l'étude monographique d'un phénomène. Selon PINTO R. et GRAWITZ M. (1964, p.51), «dans l'analyse quantitative, ce qui est important, c'est ce qui apparaît souvent et le nombre de fois est le critère alors que, dans l'analyse qualitative, la notion d'importance implique la nouveauté, l'intérêt et la valeurd'un thème, le dernier critère demeura subjectif.» Ainsi, étant donné que notre travail est fondé sur des objectifs à atteindre, il privilégie l'information à analyser d'un point de vue psychologique contrairement à la méthode quantitative liée aux données statistiques.

    En nous référant à OSSIPOW V. (1983, p. 312), qui relève que « l'analyse du discours est (...) qualitative en ce sens que les différences de sens peuvent être affirmées de manières multiples et non statistiques », nous avons donc privilégié l'analyse des données de recherche se rapportant au seul fils dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine. En matière de recherche des sciences sociales, il convient de cerner le mieux des techniques basées sur des précautions selon le phénomène à étudier. Comme l'affirme LEON A. (1977, p.380), « Le choix des techniques de collecte des données est étroitement lié ou solidaire à la nature du phénomène à étudier.» Puisque notreétude s'inscrit dans le cadre des recherchesde type qualitatif, nous avons utilisé l'enquête par l'entretien semi-directif.

    4.3.2. Enquête par l'entretien semi-directif 

    La technique de récolte des informations est exigée dans toutes les recherches en sciences humaines et sociales. Puisque notre travail était de type qualitatif, il nous a fallu utiliser une technique pouvant fournir des informations de type qualitatif. Ainsi, nous avons utilisé la technique de l'enquête par entretien semi-directif dans le but de recueillir des informations fiables eu égard au sujet de recherche. Selon PINTO R. et GRAWITZ M. (1964, p.604), « l'entretien semi-directif est un procédé d'investigation scientifique utilisant un processus de communication verbale pour recueillir des informations en relation avec le but fixé.» De cette technique découlent nombre d'avantages : d'abord l'enquêteur doit intervenir pour orienter l'entretien. Ensuite, une question mal comprise par l'enquêté peut être reformulée par le chercheur et adaptée au répondant. Enfin, à partir de la réponse fournie par l'enquêté, l'enquêteur peut poser des sous-questions tout en évitant d'aller en dehors du cadre de la recherche.

    Pour comprendre un phénomène, on doit s'informer auprès des gens qui ont vécu ou qui vivent le phénomène. Ces propos de FESTINGER et KATZ (1959, p. 385) confirment cette pensée : « (...) La science sociale fait de plus en plus appel à des faits que seuls peuvent rapporter les individus qui en ont fait l'expérience personnelle.» Donc, c'est par des contacts directs avec nos enquêtés que nous avons procédé pour atteindre nos objectifs. Nous avons choisi l'entretien semi-directif dans le but de favoriser la libre expression de nos enquêtés tout en centrant le discours autour des thèmes définis et énoncés dans le guide d'entretien.

    Dans le but de mettre en oeuvre notre enquête, nous avons utilisé un guide d'entretien qui comprenait les questions largement ouvertes auxquelles les enquêtés ont répondu librement et personnellement selon la manière dont chacun perçoit les questions qui lui sont posées. Dans ce guide d'entretien, l'ordre des questions importe peu pourvu que tous les thèmes soient exploités. Enfin, nous avons utilisé un outil comme appareil enregistreur pour enregistrer les réponses des enquêtés et éviter qu'il y aurait des informations oubliées.

    4.4. Terrain et population d'enquête 

    Nous avons choisi comme terrain d'enquête la Commune de MBUYE qui est l'une des Communes de la Province de MURAMVYA. Elle est située au nord-est de ladite province. Nous avons opté pour cette Commune parce que le milieu nous est familier et que nous connaissons suffisamment les situations géographique, socio-économique et socioculturelle, ainsi que certaines mentalités des gens, celles de mettre l'importance à la descendance. Il faut parler de cette Commune parce qu'on a remarqué qu'il y a des familles où le fils est unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine, ce qui apportera certains comportements chez les parents qui souhaitent une descendance masculine. Quant à la population d'enquête, nous savons que le chercheur doit décrire à l'avance lescaractéristiquesdessujets possédant les informations nécessaires à la réalisation de sa recherche. Nous avons effectué l'enquête auprès de couples,possédant les caractéristiques suivantes :

    -Etre de la Commune de MBUYE ;

    -Vivre en famille ayant plus de trois enfants dont un seul fils ;

    -Vivant en famille où la femme a atteint la ménopause ou arrêté les naissances (absence de nouvelles naissances).

    4.5. Travail de terrain

    4.5.1. Préenqu?te

    Dans une recherche comme celle-ci, la préenqu?te est une étape nécessaire et très importante dans la mesure où elle permet de recueillir des informations préliminaires sur le thème de recherche et d'éprouver la valeur de l'instrument de recherche. Ainsi, PINTO R. et GRAWITZ M.(1964, p.604) ont affirmé cette importance en ces termes :«Il convient d'insister sur la nécessité d'une préenquête, c'est-à-dire un essai d'enquête sur un petit nombre de sujets permettant de roder le guide d'enquête et de mieux se rendre compte des difficultés.»Notre préenquête s'est déroulée dans la Commune MBUYE sur deux cas de familles remplissant les critères tenus en considération. En effet, les deux sujets de la préenquête étaient connus de nous. Nous nous sommes rencontrés à leur domicile après avoir fixé un rendez-vous. Les sujets ont été choisis selon le nombre d'enfants et selon le sexe du sujet, ceci pour vérifier si le nombre d'enfants ou le sexe du sujet a une influence sur les réponses données.

    Le premier sujet nommé LAZ, mère de famille, vit en couple sur la colline de MBUYE et a au total sept enfants. Le second nommé REM est père de cinq enfants et vit en couple sur la colline de MWEGERA.Cette phase nous a permis de voir que LAZ et REM répondaient à l'aise à nos questions sauf la première question qui a nécessité de faire objet de reformulation. Elle était libellée ainsi : «Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu, abakobwa banyu n'umuhungu wanyu yifashe ? »

    Ce qui se traduit ainsi: «Parlez-nous comment sont les relations entre vous, vos filles et votre fils unique?» LAZ et REM ont insisté sur les relations entre les parents que celles se trouvant entre enfants. LAZ et REM avaient tendance à se limiter uniquement aux relations parentales et à parler uniquement de celles-ci sans montrer leur place dans les relations que tissent les enfants. Cela était dû au fait qu'elle était une question triplement posée. REM a répondu ainsi : « Ni mpore twebwe ngaha iwacu tubanye neza, umugore wanje turumvikana, erega umuntu mubanye imyaka irenga 30 ntaco muba mugipfa muba mushaje.»

    Ce qui signifie : « Chez nous ça va, nous vivons dans l'entente, je m'entends avec ma femme, d'ailleurs, il n'y a plus de cause de conflits avec une personne que vous vivez ensemble il y a plus de 30 ans

    En réaction à cette réponse, nous lui avons demandé : « Wewe ubanye gute n'abana bawe b'abakobwa ? » REM a répondu : « Ntangorane nyinshi zihari, wewe urakuze, urazi ko abana bagoye ariko turabahanura iyo bakoze amakosa, kanatsinda barakuze ntibagikubitwa (...).» Ce qui veut dire : « Il n'y a pas beaucoup de problèmes, vous êtes adulte, vous savez que les enfants sont difficiles, mais nous leur donnons des conseils quand ils commettent des fautes, ce sont d'ailleurs des adultes, personne ne les bat (...). »

    Quand nous avons vu que REM voulait terminer sans parler de la relation entre fils et filles, nous lui avons posé la question suivante : « Hagati y'umuhungu n'abakobwa ho imigenderanire yifashe gute ? » REM a répondu : «  Abana bo urazi ko batabura ivyo bapfa, ariko nabone mbona ari sawa. Bose nyene ni uguhanura

    Pour dire : «Les enfants ne manquent pas de causes conflictuelles, mais pour eux aussi ça va. Tous sont à conseiller

    LAZ que nous avons interviewée pendant la préenquête, a aussi parlé des relations entre les parents et leur fils après notre deuxième demande, elle s'était limitée uniquement aux relations qui l'unissent à son mari. Voilà comment LAZ a répondu : «Twebwe tubanye neza n'uwo twubakanye, umugabo wanje ntakunda kunshwanira, kiretse iyo yasomye akagwa. »

    Ce qui se traduit ainsi : « Je m'entends bien avec mon époux, il n'aime pas se disputer avec moi, sauf quand il a bu de la bière. » En réaction à cette réponse, nous lui avons demandé : « Mwotubwira muri make uko mubanye n'umuhungu wanyu ? »

    Pour dire : « Pouvez-vous nous parler en peu de mots de vos relations avec votre fils ? » C'est ainsi que LAZ nous a répondu : «Umwana w'umuhungu ari umwe aragoye, utegerezwa kumwitaho cane. Ukamuhanura kuko na wene arakora amakosa rimwe na rimwe. »

    Ce qui se traduit de cette manière : « Un fils unique est difficile, on doit s'intéresser beaucoup à lui. On le conseille car lui aussi commet des fautes quelquefois. »

    Pour permettre alors à REM et à LAZ de s'impliquer davantage et de parler des trois relations sans notre insistance, nous avons fractionné la première question en trois, parce que celle-ci était posée en bloc et compliquait nos préenquêtés. Nous l'avons reformulée ainsi :

    - Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu n'abakobwa yifashe?

    - Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu n'umuhungu yifashe?

    - Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati y'abakobwa n'umuhungu yifashe?

    Ce qui se traduit respectivement de cette manière :

    - Pouvez-vous nous parler de vos relations avec vos filles?

    - Pouvez-vous nous parler de vos relations avec votre fils?

    - Pouvez-vous nous parler des relations entre votre fils et vos filles?

    Cette phase de préenquête nous a aidé à nous familiariser avec le terrain d'enquête et à nous assurer de l'intelligibilité de notre guide d'entretien. Ainsi, dit BOUDON R. (1979, p.33), «la préenquête consiste en une reconnaissance du terrain en essayant de se (le chercheur) débarrasser des idées préconçues ou comme le dit Bacon, de ses prénotions, de manière à faire apparaitre des facteurs ou des variables explicatives qu'il cherche.» Ici, c'est le chercheur ou l'enquêteur lui-même qui essaie de se débarrasser des idées préétablies pendant la préenquête. Au moment de cette préenquête, le chercheur découvre de nouvelles réalités en rapport avec son étude. Il importe, par exemple quand le chercheur constate qu'un item doit être modifié de procéder à la rectification comme nous l'avons fait pour la première question.

    4.5.2. Technique du choix des enquêtés et déroulement de l'enquête

    Lorsque le chercheur met en évidence la méthode, les techniques, le terrain et la population d'enquête qui lui serviront d'aboutir aux résultats de sa recherche, il lui reste à décrire comment choisir les enquêtés.Pour choisir nos sujets d'enquête, nous avons utilisé la technique «boule de neige.» Ainsi, contrairement à la méthode probabiliste qui s'inspire directement de la théorie mathématique des probabilités, nous avons opté pour une technique non probabiliste ou empirique.

    Dans les sciences sociales en général, on doit souvent avoir recours à cette méthode, particulièrement lorsque la démarche de recherche privilégiée est de type qualitatif. L'essentiel recherché dans l'étude était la nouveauté de l'information. Notre étude exigeait la méthode non probabiliste, donc une méthode dont le choix des sujets n'est pas fait selon un tirage aléatoire. MAYER R. et OUELLET F.(1991, p.387) sont plus explicites à ce sujet quand ils disent que « Dans les sciences sociales en général et dans le travail social en particulier, on doit souvent avoir recours à cette méthode, particulièrement lorsque la démarche de recherche est de type qualitatif. »

    Parmi les techniques d'échantillonnage non probabiliste, pour le choix de nos sujets d'enquête, nous avons privilégié celle que MAYER R. et OUELLET F. (1991, p.390) appellent échantillon « boule de neige » qui « (...) est particulièrement utile au chercheur intéresséàétudier la problématiquevécue par une population spéciale, de taille limitée et connue d'une minorité de personnes. Ce sont celles qui peuvent donner des infos sur d'autres qui, àleur tour feront la même chose, (...), jusqu'à ce qu'un échantillon suffisant soit constitué. L'échantillon croît en taille comme une boule de neige que l'on roule au fur et à mesure que le cycle se répète.»C'est ainsi que nous avons effectué notre échantillon à l'aide de cette technique dite «boule de neige» qui nous a été utile pour comprendre la place propre d'un fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine. En effet, cette technique s'explique par le fait que l'échantillon croît au fur et à mesure que le(s) premier(s) indique(nt) des informations nouvelles sur d'autres qui, à leur tour font la même chose jusqu'à ce qu'un échantillon suffisant soit constitué. L'échantillon croit alors en taille comme une boule de neige que l'on roule au fur et à mesure que le cycle se répète.Pratiquement, notre premier enquêté nous donnait des informations sur d'autres sujets remplissant les critères établis à l'avance et ces derniers faisaient la même chose à leur tour et notre échantillon croissait comme une boule de neige.

    Après la préenquête, il nous restait à faire une enquête. Ainsi, au cours de cette enquête, nous avons eu recours à l'entretien semi-directif. Avant de nous plonger sur le terrain de l'enquête nous avons élaboré un guide d'entretien qui pouvait nous aider à mener notre recherche. La recherche avait commencé par le choix des enquêtés qui nous informaient sur les cas connus des familles ayant un seul fils et une progéniture à majorité féminine. C'est ainsi que nous avons eu trois familles types à enquêter et en faisant recours à la technique dite boule de neige, chaque famille a pu nous orienter sur d'autres familles de mêmes caractéristiques qu'elle-même. Nous avons alors abouti à six cas, c'est-à-dire six familles qui faisaient objet de l'enquête.

    Avant d'entamer l'entretien, nous commencions par nous présenter à nos enquêtés et leur préciser l'objet de notre recherche. Les contacts se passaient de façon simple dans le but de gagner leur confiance et leur collaboration. S'agissant de l'entretien avec nos enquêtés, nous les avons rencontré à leur domicile. Nous avons par après introduit nos thèmes du guide d'entretien tout en laissant le sujet s'exprimer librement, sans l'interrompre ni l'influencer par nos comportements verbaux ou non verbaux. Nous avons donc respecté ces conseils de PINTO R.et GRAWITZ M. (1971, p.819) :« A partir du moment où l'enquêté commence à parler, l'enquêteur ne doit pas l'interrompre ou le questionner mais demeure dans une attitude de compréhension.» En ce qui concerne la conduite de l'interview, nous avons préféré nous entretenir avec l'un des parents s'il s'agit d'un couple parental. Nous tenions en considération la disponibilité de nos enquêtés, et chaque fois nous nous fixions un rendez-vous avec nos sujets car les entretiens se déroulaient à leur domicile.Chaque entretien prenait une durée moyenne légèrement supérieure à une heure. L'enquête a duré trois semaines, c'est-à-dire du 23/11/2014 au 13/12/2014.

    Le premier sujet nommé CAN a été enquêté le 23/11/2014 à 16heures. Celle-ci est une veuve qui a été reconnue sous l'intermédiaire de REM de la préenquête. CAN vit sur la colline de MWEGERA de la Commune MBUYE. CAN a répondu sur les thèmes concernant les relations entre les membres de la famille, les conséquences de l'unicité de son fils pour celui-ci et sa famille et a pu proposer ses mesures pour avoir une famille heureuse. CAN nous a aidéà trouver un autre sujet nommé MUJ.

    Le 25/11/2014 à midi, nous nous sommes rendu à la colline de BUHANGURA, làoù un enquêténommé ATH vit. Nous avons reconnu ATH grâceà LAZ de la préenquête, celui qui nous a conduitjusqu'à son domicile. C'est ainsi que nous avons rencontré ATH chez lui. Celui-ci a surtout insisté sur les qualités de son fils. ATH a indiqué que ses filles sont jalouses du fils et s'estime heureux devant son fils qui continuera la lignée familiale.

    Le troisième sujet est nommé SUZ et enquêtéle 26/11/2014 vers 15heures. SUZ est une femme que nous connaissons depuis et qui vit sur la colline de MBUYE de la même Commune, ce qui veut dire que nous l'avons trouvée sans faire recours à aucun intermédiaire. Les thèmes relatifs aux traitements du fils unique, aux relations familiales et aux conséquences du fils unique ont été abordés pendant l'entretien. SUZ accorde une place importanteà son fils dans tout. Malgré les bons comportements du fils, SUZ relève que ce dernier s'isole. Après l'entretien avec SUZ, celle-ci nous aorienté vers deux autres sujets que nous avons nommés NIC de la colline MBUYE et MET de la colline RWUYA.

    Le 29/11/2014 à 14heures, nous avons enquêté MET vers 15heures. Celui-ci a évoqué les traitements réservés au fils unique et a indiqué qu'il entretient bien son fils et que ce dernier est en bons termes avec les autres membres de la famille. MET prévoit un bon avenir pour son fils mais,à partir de ses propos, on constate que ses filles sont discriminées par lui-même.

    L'autre sujet NIC que nous avons rencontré par l'intermédiaire de SUZ a été enquêté le 4/12/2014 à 16heures. L'enquêté a abordé les relations familiales, les traitements réservés aux enfants et les comportements du fils unique. NIC a égalementdonné des conseils aux parents et à l'Etat dans le but d'éviter la discriminationfondée sur le sexe. En général, pour NIC, tous les enfants sontégaux et doivent être, par conséquent,traités de la même manière.

    MUJ a été enquêté le 13/12/2014 à 17heures. Le jour de l'entretien avec MUJ, nous avons trouvé ce dernier chez lui le soir, après le travail du champ. MUJ était très fatigué. Avant même d'entamer l'interview, il nous a demandé une bouteille de bière de banane pour qu'il puisse nous dire tout sans rien nous cacher. Nous l'avons calmé en lui promettant que nous allions repasser un autre jour. Pendant l'entretien, MUJ a évoqué les mauvaises relations que son fils tisse avec les autres membres de la famille et l'entourage à cause de ses mauvais comportements. MUJ et sa femme n'affichent pas actuellement aucune affection à leur fils car ils sont désolés de ses comportements anormaux comme la délinquance et le banditisme. MUJ a fini par donner des conseils à son fils et aux parents du fils unique.

    L'entretien avec MUJ a été clôturé dans un climat d'entente mais il affichait un visage désespéré pour ce qui est de l'avenir de son fils en particulier et de sa famille en général. MUJ nous a orientéà deux autres cas que nous avons enquêté le 15/12/2014 et le 16/12/2014 et qui ne nous apportaient aucune idée nouvelle.

    Nous avions constaté une certaine saturation des données de l'enquête. A ce sujet, MAYER R. et OUELLET F. (1991, p.40) précisent que « (...) dans le cas ou le chercheur utilise une méthode qualitative de recherche comme l'analyse du contenu, observation, etc., un autre principe de constitution de l'échantillon s'applique : celui de saturation (...),l'échantillon est constitué de façon finale lorsque la collecte d'informations n'apporte plus aucune idée nouvelle comparativement à celles qui ont déjà été trouvées

    C'est ainsi que les deux cas n'ont pas été enregistrés ici compte tenu des informations fournies. En effet, dans leurs propos, nous n'avons pas senti aucune nouveauté, il s'agissait des répétitions, des informations déjà évoquées par les six premiers enquêtés. Et, à partir de cette répétition, nous avons constaté qu'il y avait saturation de données et qu'il fallait mieux arrêter l'enquête.C'est la raison pour laquelle nous nous sommes arrêté à six cas d'enquête que nous avons nommé CAN de la colline de MWEGERA, ATH de la colline de BUHANGURA, SUZ, NIC et MUJ de la colline de MBUYE et MET de la colline de RWUYA. Ces sujets ont été trouvés à l'aide d'une technique dite boule de neige. Cependant, la récolte des informations au cours de notre recherche s'est déroulée en connaissant l'un ou l'autre obstacle. C'est ainsi que nous allons les exposer dans le point suivant.

    4.5.3. Les difficultés rencontrées

    Il est rare qu'un travail de recherche en sciences sociales se réalise sans difficultés. La première difficulté que nous avons rencontrée était liée à la détermination des familles à fils unique avec plus de trois enfants. En effet, nous savons qu'avoir plus de trois enfants dont un seul fils ne signifie pas finalement que le fils restera unique. Peut être que le couple continue à mettre au monde d'autres enfants. Il nous a fallu alors entrer en contacts avec les parents ayant arrêté les naissances pour nous rendre compte que ceux-ci n'ont pas l'espoir d'avoir un autre enfant. Ceux qui nous révélaient le contraire n'étaient pas choisis et nous étions obligés de les ignorer.L'utilisation d'un appareil enregistreur nous a fait aussi nous heurter à des résistances de nos enquêtés. Il nous fallait prendre un temps pour leur faire comprendre que l'appareil nous permet d'éviter la perte, l'oubli ou la déformation des informations livrées par les enquêtés.

    La problématique et la démarche méthodologique ont été évoquées dans ce chapitre où nous avons présenté les objectifs de recherche et éclairci la méthode utilisée. Nous avons montré la population d'enquête et rapporté le déroulement du travail de terrain. La technique de choix des enquêtés et les difficultés rencontrées ont été exposées. C'est ainsi que la partie suivante a été consacrée à la présentation des cas, l'analyse des données et l'interprétation des résultats de recherche.

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    DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION DES CAS, ANALYSE DES DONNEES ETINTERPRETATION DES RESULTATS

    CHAPITRE V : PRESENTATION DES CAS

    Nous avons fait une brève présentation des sujets sur lesquels a porté notre enquête avant de passer à l'analyse du contenu des informations recueillies. D'abord, les propos ont été présentés intégralement en Kirundi et traduit en Français. Ensuite, la présentation de chaque propos est suivie d'un commentaire. Rappelons que chaque cas interviewé a été baptisé d'un nom de trois lettres de l'alphabet dans le souci de sauvegarder l'anonymat des enquêtés.

    5. 1. Cas CAN

    CAN est une veuve de 49 ans qui habite à la Colline MWEGERA de la commune MBUYE. Elle a quatre enfants dont un seul fils est le cadet de 17 ans.

    CAN a affirmé qu'elle est en bons termes avec les enfants, et qu'il lui arrive de penser à son fils unique. CAN a dit que ceci la met dans une insécurité totale lorsqu'elle se souvient que son mari était lui aussi un fils unique dans la famille. CAN s'intéresse beaucoup à son fils comme réponse à son insécurité. Ainsi, elle le déclare ainsi: «Jewe iyo nibutse ko umugabo wanje yivukana, hanyuma nkabona nanje mfise agahungu kamwe, numva mfise ubwoba ko umwanya n'umwanya gashobora gupfa, kuko uwumuryango urahona cane ntugwira, nico gituma nca ndamwiyegereza cane.»

    Ce qui se traduit de la suite : « Quand je me souviens que mon époux était un fils unique, et que je constate que j'ai un seul fils, je me retrouve dans l'insécurité, de peur que d'un moment à l'autre, il peut mourir, parce que ce clan est plus vulnérable, il ne se multiplie pas, c'est pour cette raison que je m'intéresse beaucoup à lui.» La crainte de perdre l'enfant à tout moment peut pousser les parents à s'intéresser à lui. Lorsque c'est un enfant unique, ses parents se trouvent toujours dans l'insécurité.

    Dans un premier temps, pendant l'entretien, CAN voulait se réserver dans ses propos en disant qu'elle n'a aucun fils : « Ntimumbaze ivy'abahungu kuko ntabo mfise. Nivyariye abakobwa gusa. Ko nagize aho novyaye abahungu umugabo agaca yitaba Imana. Karya gahungu kamwe ! Oya umwana umwe nta mwana.»

    Ce qui veut dire : « Ne me posez pas des questions en rapport avec les fils car je n'en ai pas. J'ai procréé les filles seulement. Mon époux a rendu l'âme alors qu'il était temps de les procréer. Cet unique fils ! Non, un seul enfant n'est pas un enfant.» Mais au fur et à mesure que nous nous entretenions, CAN était ouverte dans ses propos.CAN,SUZ et ATH sont insatisfaits de la descendance constituée d'un seul fils avec plusieurs filles. A partir de leurs propos, on voit que ces cas veulent une progéniture nombreuse de filles et fils.

    Concernant les relations fraternelles, nous avons constaté qu'il y a collaboration et entente, car CAN a révélé dans les propos suivants que tous les enfants s'entraident dans toutes les activités : «Abana banje barumvikana, nta mishwano, ntavyo kwifyinisha. Barafashanya kuko barazi neza ko ari impfuvyi. Badakoze jewe sinoshobora kubatunga ndi umwe.»

    Ce qui veut dire : «Mes enfants s'entendent, pas de conflits, ils ne sont pas distraits. Ils s'entraident car ils savent bien que'ils sont des orphelins. S'ils ne travaillent pas, je ne parviendrais pas à les nourrir étant seule.»

    Nous constatons également que la situation d'un seul fils avait un effet important sur la vie de CAN et sur sa vie car CAN a dit que son fils est trop calme et à l'absence de ce fils, CAN est dans l'insécurité, craignant de le perdre. Voici ce qu'elle a dit : « Ndabona ko umuhungu wanje afise ingorane kuko kenshi aguma ahoze. Sinzi ko ari kubera abura abo bikina, sindamukundira kuja kuyerera ku bwoba bw'uko ashobora guhura n'ingorane.»

    Ce qui se traduit : « Je vois que mon fils possède des problèmes car il reste souvent calme. Je ne sais si c'est parce qu'il manque d'autres avec qui il peut jouer. Car, je ne lui permets pas de vagabonder, de crainte qu'il peut avoir un accident.» Il faut donc constater ici que le fils unique de la veuve CAN a été bien entretenu malgré sa solitude. L'unicité d'un enfant peut entraîner chez lui des comportements de repli sur soi. Il faut que l'enfant collabore avec les autres pour s'épanouir.

    5.2. Cas ATH

    ATH est un homme âgé de 58 ans et sa femme de 52 ans. Il est le père d'une famille de 6 enfants. Il habite sur la colline BUHANGURAde la commune MBUYE. Il a un seul fils et cinq filles dont le fils unique âgé de 15 ans.

    ATH nous a répondu facilement aux questions du guide d'entretien. Fortement penché sur les qualités du fils, ATH a dit que, depuis longtemps, le fils était très important dans la famille. Voici ses propos : « Umuhungu ni kirumara mu muryango. N'aho yogaba gute, ntabura ico amarira umuryango. Kuva kera, niwe yamye yoza ubwato bwa se. Utavyaye umuhungu rero n'uguhomba, ni ko guhona ku muryango

    Ce qui se traduit ainsi : « Le fils est très important dans la famille. Même si il est gâté, il ne manque pas de quoi faire pour la famille. Depuis longtemps, c'est le fils qui remplaçait valablement son père. Ce serait une perte alors pour celui qui n'engendrait pas un fils. C'est l'origine de la disparition de la famille.» Le fils est attendu comme celui qui va continuer la lignée familiale. La famille burundaise est régie par un système patriarcal et compte sur la descendance masculine.Nous remarquons que pour ce cas, le fils occupe une place primordiale. C'est ainsi que ATH nous révèle que toute la richesse familiale appartient à son fils unique et non à ses filles : «Imana yakampaye ari agahungu kamwe, ndetse ko ndamubungabunga, ntakindi ndamugirira kuko ivyo mfise vyose ni ivyiwe,abakobwa bobo bazoja kwubaka ntangorane

    Ce qui veut dire :« Dieu m'a donné un seul fils, à part que je l'entretiens comme il faut, toute ma richesse lui appartient, il n'y a pas de problèmes pour les filles car celles-ci vont se marier ailleurs.» Le fils unique est perçu comme le seul héritier de la richesse familiale. Le système patriarcal burundais ne considère pas les filles comme membres de la famille. Celles-ci vont se marier ailleurs et feront partie des familles de leurs époux. C'est un système qui exclut les filles en matière de succession.

    Concernant l'avenir du fils unique ATH dit qu'il n'y a pas de problèmes. Pour ATH, les problèmes résident dans la jalousie entre les filles et le fils unique. Il explique ceci: « Abakobwa baridoga iyo mvuze ko ariwe mwana mfise kandi ivyo biragaragara. Ndazi ko bagiye kwubaka bizoba biheze.Ingorane ni uko baca bagirira ishari uwo muhungu.»

    Ce qui ce traduit de cette manière : « Les filles se lamentent quand je dis que le fils est le seul enfant que j'ai alors que c'est clair. Je sais que lorsqu'elles se marieront, ce sera fini. Le problème est qu'elles affichent une jalousie envers ce garçon.»Comme constat, lorsqu'on accorde une grande importance à un seul enfant choisi parmi les autres, on sème directement la zizanie dans la descendance, ce qui peut engendrer une mésentente familiale et une jalousie entre frère et soeurs.

    5.3. Cas SUZ

    SUZ est une femme âgée de 51 ans et son mari est âgé de 59 ans. Le couple a 5 enfants dont le fils unique qui est né en troisième position dans la descendance est âgé de 21 ans. SUZ et son mari sont tous des enseignants à l'école primaire et habitent la colline MBUYE.SUZ répondait sans réserve à toutes les questions. Elle a dit que, dans ses relations avec ses enfants, le couple aime beaucoup plus le fils unique que les filles. Ainsi, SUZ dit : «Hagati yacu abavyeyi n'umuhungu, hari urukundo rwinshi gusumba hagati yacu n'abakobwa. Umuhungu tumukunda kubera ari umwe kandi hari hakenewe n'abandi. Erega ubwiza bw'inka ni ukuba imwe.»

    Ce qui veut dire que : «Entre nous les parents et notre fils unique se trouve une affection beaucoup plus profonde qu'entre nous et les filles. Et d'ailleurs, la beauté d'une vache est d'être unique.» Chez SUZ, nous constatons que l'affection augmente en fonction de la diminution de la descendance de tel ou tel autre à ce sexe.

    Le fils unique est celui qui doit être entretenu avec beaucoup de soins, en évitant tout risque qui peut perturber sa vie. Ceci à été évoqué par SUZ de cette manière : «Twebwe ngaha umuhungu turamufata neza kuko ntitumuruhisha,ntakintu na kimwe abura tugifise, mbere iyo agiye kw'ishure ndamuha amafaranga yo kwiryohera asumba ayompa abakobwa.»

    C'est-à-dire: «Ici, chez nous, le fils est bien entretenu car on ne le fatigue pas, il ne lui manque pas ce que nous avons, et d'ailleurs quand il va à l'école, je lui donne de l'argent de poche plus que les filles pour les loisirs.»Dans cette famille, on comprend bien que le fils unique occupe une place primordiale. Tous les caprices du fils sont satisfaits comme si ce dernier était un enfant unique. L'inégalité au niveau du traitement des enfants se remarque chez SUZ.Suite à son unicité, les comportements du fils unique de SUZ ont été agréables en famille et dans l'entourage. Le fait d'être unique a créé chez le fils une solitude et un souhait des frères comme SUZ le dit : « Umuhungu wacu nta nyifato mbi afise kuko arubaha. Ingorane afise ni irungu kuko ahora ambwira ko nari kuvyara abandi bahungu.»

    Ce qui se traduit ainsi : «Notre fils unique n'a pas de mauvais comportements, il est courtois. Le seul problème qu'il a c'est la solitude car, quelquefois, il me dit que je devais engendrer d'autres garçons.» Parmi les conséquences dues à l'unicité, la solitude vient en premier lieu. Ici, nous voyons que le fils unique est insatisfait dans sa fratrie car il veut avoir des frères. Ce fils unique est gâté chaque fois que tous ses besoins sont satisfaits sans, de sa part, fournir d'efforts. Il est également, dans ce cas, frappé par la solitude à cause de son unicité.

    5.4. Cas MET

    MET est un homme âgé de 61 ans vivant avec sa femme de 56 ans. MET habite la colline RWUYA de la Commune MBUYE. MET a une progéniture composée de 7 enfants dont l'unique filsâgé de 20 ans et un élève au lycée de MURAMVYA. Le couple vit avec 4filles seulement car les deux autres se sont déjà mariées. Cette famille vit de l'agriculture.Apparemment, MET est en bon termes avec son épouse mais il y a quelque chose qu'il n'a pas voulu révéler et qui pousse à ne plus s'entendre car, dit MET : «Mu bisanzwe umugore turahuza, mugabo hari ibintu bimwe bimwe ashaka kugira nanje ntabishaka. Ivyo rero bituma tudahuza rimwe na rimwe, erega abashaka kuntegeka. Abana bo ntangorane, kuko ako mfise kari mw'ishure. Abo bakobwa nabo nyina arababona.»

    C'est-à-dire :«En général, je m'entends avec ma femme, mais il y a quelque chose qu'elle voudrait mais dont je ne veux pas. Ceci fait alors que nous nous n'entendons pas quelquefois, en fait, elle veut me dominer. Pour les enfants, il n'y a pas de problèmes car celui que j'ai se trouve à l'école. Ces filles sont à la charge de leur mère.»MET considère donc les filles comme la charge pour son épouse et le fils unique pour sa charge. On entend bel et bien qu'il y a division au niveau de l'éducation des enfants et qu'il y a beaucoup d'affection entre le fils unique et son père comme le prouve MET : « Atavyo kubesha, umuhungu niwe aza imbere mu bandi bana, kuko niwe azosigara asanze urugo. Iyo Imana itamuduha, ibara ryoguye, we ntubona ko urugo rwociye ruhona?»

    Ce qui se traduit ainsi: « Sans mentir, le fils vient en premier lieu parmi les autres enfants, car c'est lui qui restera pour la sécurité de la famille. Si Dieu ne nous l'avait pas donné, ce serait catastrophique. Ne vois-tu pas que la famille serait détruite ?»MET voit toujours l'avenir de sa famille dans son unique fils. Les filles n'ont pas la même importance que le fils car d'un moment à l'autre elles vont se marier. MET a également exposé la raison qui le pousse à aimer davantage son fils. Il dit : «Mu bisanzwe uruvyaro rwiza, ni ururimwo abahungu benshi n'abakobwa. Kubera ngaha dufise umwe, dutegerezwa kumukunda, tukamufata neza, nk'akarorero agiye kw'ishure ndamuha amahera yo kurya kuko kw'ishure babagaburira nabi. Atashe naho mu buruhuko, nta bikorwa ndamutuma.»

    Ce qui veut dire : « En général, une bonne progéniture est celle qui est constituée de plusieurs fils et filles. Parce qu'ici nous avons un seul fils, nous devons l'aimer, le traiter bien ; par exemple quand il va à l'école, je le lui donnais de l'argent de poche car ils sont mal nourris à l'école. Et quand il revient en vacances, je ne le surcharge pas de travail.» Les traitements réservés aux fils uniques diffèrent de ceux qui sont réservés aux filles. Le fils unique est aimé, bien traité et peu surchargé de travail contrairement aux filles qui, au lieu d'être envoyées à l'école, sont surchargées de travaux domestiques et champêtres.Quand nous lui avons demandé pourquoi ses filles n'ont pas été envoyées à l'école, MET a répondu ceci : « Hize umuhungu, abakobwa n'aho batokwiga, ntaco.»

    Ce qui signifie: « Le fils étant scolarisé, même si les filles ne sont pas à l'école, il n'y aurait pas de problèmes.»MET sème la jalousie dans la fratrie. Il voit, dans son fils, l'avenir de la famille. On comprend que les enfants n'ont pas la même valeur pour MET. Aussi, les filles de MET sont plutôt délaissées. Tout cela montre combien MET minimise les filles en plaçant au premier rang son fils unique.

    MET n'a pas évoqué les problèmes de son fils unique, il a dit que son avenir est assuré car, dit-il : « Nta kazoza kabi azogira kuko ntawundi ndonderera atariwe. Ahejeje ishure, azoca arongora, nzomwubakira inzu, nongere ndamukwere.»

    Ce qui veut dire : « Il n'y a pas de problèmes pour son avenir car je travaille pour son propre gain. Quand il terminera ses études, il va se marier. Je le construirai une maison et je payerai la dot pour lui.» Les parents ayant un fils unique ne remarquent souvent pas que leur fils unique peut avoir des problèmes liés à son unicité. Les parents préparent convenablement l'avenir du fils sans préparer psychologiquement le fils. Remarquons que le fils unique vivra sous la dépendance de ses parents et cela de façon continuelle.En analysant l'entretien effectué avec MET, nous avons constaté qu'il s'est donné à la vie de son fils toute en discriminant ses filles.

    5.5.Cas NIC

    NIC est une femme vivant sur la colline MBUYE de la commune MBUYE. Elle est âgée de 51 ans et son époux avait 56 ans. Le couple a quatre enfants, la cadette a 8 ans et son fils unique est l'aîné de la famille avec 26 ans. NIC a dit que les relations familiales entre les parents et les enfants sont normales même si des difficultés ne manquent pas, ils se donnent des conseils.Concernant l'affection entre parents et fils unique, NIC indique qu'ils l'aiment comme leurs filles. Pour NIC, il n'y a pas de supériorité entre les enfants. Ainsi, dit-elle : « Abana bose barangana, nkunze umwe gusumba uwundi noba mbivye urwanko mu muryango

    C'est-à-dire :« Tous les enfants sont égaux, si j'aime l'un plus que l'autre, je risque de semer la mésentente dans la famille.»Pour NIC, il n'y a pas de traitements affectifs réservés au fils unique, tous les enfants sont traités de la même manière. NIC comprend bien que les enfants sont égaux et que les différences liées aux sexes ne sont pas valables. Tous les parents devraient comprendre que l'affection est nécessaire à tout enfant, qu'il soit garçon ou fille.Pour ce qui est de la place réservée au fils unique, NIC indique ceci : « Narirya ari we mfura, n'aha mu muryango aguma ariwe aza imbere. Mugabo ni uko nyene abakobwa kuva kera bamye bakumirwa, ahandi ho nabone bogabuye n'umuhungu ivyo dufise vyose.»

    Ce qui se traduit par : « Puisqu'il est l'aîné, il garde la première place ici dans cette famille. Mais c'est parce que les filles sont marginalisées depuis longtemps, sinon, celles-ci partageraient avec le fils toute la richesse familiale.» NIC n'affiche pas dans ses attitudes de différents traitements pour ses enfants. Mais, elle garde en lui-même une exclusion faite à l'égard des filles. NIC sait que le fils occupe la première place en famille car elle lui attribue la richesse familiale.Pour ce qui est des comportements du fils unique, en tenant compte des traitements subis de la part de ses parents et de ses soeurs, NIC a révélé que son fils est très actif, qu'il n'est pas gâté. Il travaille sans toutefois tenir compte de ses petites-soeurs. Il n'affiche pas de mauvais comportements comme la délinquance, l'alcoolisme, le banditisme, etc. seulement, il est très calme.

    Pour NIC, lorsque le fils est unique, il faut lui donner des conseils comme ceux d'étudier, d'éviter la méconduite, d'être responsable dans sa vie et plus particulièrement de ne pas s'exposer aux dangers. NIC a également proposé des conseils envers les parents qui maltraitent les filles en disant : « Biva k'ukutamenya, ahandi ho abavyeyi bofata kumwe abana, kuko umwana ni umwana.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Cela vient de l'ignorance, sinon les parents devraient traiter leurs enfants de la même façon, car un enfant est un enfant.» La culture burundaise basée sur le système patriarcal guide la majorité des parents au niveau de leurs attitudes. Les parents se montrent souvent ignorants de l'importance des filles en famille, alors que les enfants sont de même importance. NIC a proposé aussi quelques perspectives à l'Etat car elle voit bien que les filles sont discriminées à cause de l'absence de lois qui les régissent en matière de succession. Ainsi dit-elle : « Hakwiye kuba amategeko akingira abigeme na cane cane kubijanye no gutorana, kuko abakobwa baracinyijwe muri vyose.»

    Cela veut dire : «Il est nécessaire d'élaborer la loi protégeant les filles plus particulièrement en matière de succession, car les filles ont été discriminées dans tout.»Nous avons constaté que pour NIC, il n'y a pas de différence entre les enfants. Pour elle, le fils et la fille, tous ont la même valeur. Pour NIC, la place du fils unique reste la même que celle de la fille au sein de la famille. Par conséquent, il n'y aura ni jalousie ni mésentente entre les membres de la famille.

    5.6. Cas MUJ

    MUJ est un homme de la collineMBUYE de la Commune MBUYE âgé de 58 ans, il a une femme de 52ans et une progéniture de huit enfants dont le fils unique est néà la troisième naissance. Celui-ci est âgé de 23 ans. Cette famille vit de l'agriculture. MUJ nous a donné une information très importante que les autres n'ont pas pu révéler. Concernant les relations entre les enfants. MUJ a dit que son fils unique n'est pas en bons termes avec ses soeurs et ses parents. Souvent, son fils entre en conflit avec les membres de la famille. Voici ses propos à ce sujet : « Jewe ntakubesha, ntako mfise umuhungu umwe, aragoye cane. Yama arashwana na bashikiwe, mbere hari aho bishika na twebwe tugashwana. »

    Ce qui se traduit de la sorte:« Sans vous mentir, même si j'ai un seul fils, celui-ci se comporte mal, il entre souvent en conflit avec ses soeurs, quelquefois, il arrive que nous disputions avec lui.»Les mauvais comportements dus au fils unique affectent toute la famille et l'entourage. Le fils unique «mal éduqué» ne peut être en bon terme avec ses soeurs et ses parents. Sa délinquance et son vagabondage le poussent à adopter des comportements néfastes.MUJ se montrait désolé par la situation éducative de son fils. Pour lui, son fils est un délinquant, il boit trop et souvent il rentre pendant la nuit étant ivre. Voilà comment MUJ le révèle: «Umuhungu wanje ntampesha icubahiro ndavye ukuntu yifata. Yama arayerera, yirirwa mu birabo, mbere kenshi, ataha mw'ijoro yaborewe.»

    Ce qui signifie : « En considérant ses comportements, mon fils ne m'honore pas. Toujours il vagabonde dans la rue, passe toute la journée au cabaret, et souvent même, il rentre la nuit étant ivre.»MUJ était désolé de la situation de son fils parce que, pour lui, le fils unique devrait bien se comporter pour préparer sa vie et pour assurer le développement de la famille.

    Concernant l'amour que les parents affichent à leur fils, MUJ a répondu que son fils pense que ses parents ne l'aiment pas. MUJ ne fait et ne prépare rien de spécifique pour son fils par la simple raison qu'il est unique. Contrairement aux autres enquêtés, MUJ donne des cadeaux aux filles, car elles sont très actives et courageuses. MUJ dit qu'un jour, si son fils le voulait, il construirait pour ce dernier une maison dans le but de se marier. Ainsi dit-il : « Nta co ngirira umuhungu ngo ni uko ari umwe, kandi nta n'ico ntegura kuzomugirira. Ahubwo nopfuma nshimira abakobwa bobo bamfasha gukora. Umuhungu nawe niyiyumvira kwubaka, nzomwubakira inzu.»

    Traduisons:« Je ne fais et je ne prévois rien pour mon fils à cause de son unicité. Je préfère offrir des cadeaux à mes filles qui m'aident à travailler. Et le fils, s'il le veut se marier, je construirais une maison pour lui et pour son mariage.»D'une manière générale, les comportements du fils unique de MUJ sont défavorables pour toute la famille. MUJ a lui-même dit que son fils est un bandit, qu'il pille les produits récoltés comme le haricot et qu'il le vend pour s'amuser en buvant et en fumant.

    Le fils unique est un enfant exposé aux dangers comme MUJ le révèle ainsi: «Sinobabesha aragowe, adahevye ingeso mbi afise z'akaborerwe n'ubusuma, nta kazoza kiwe mbona.»

    Ce qui signifie: « Sans vous mentir, il est malheureux, s'il n'arrête pas ses inconduites d'ivresse et de banditisme, je ne vois pas son avenir.» Les conseils ont été donnés au fils unique par ses parents mais en vain comme le précise MUJ. Depuis son enfance, le fils de MUJ avait un caractère d'instabilité et d'insatisfaction. MUJ conseille à son fils de se conformer au bon modèle des autres garçons de l'entourage.A l'égard des parents ayant un fils unique, MUJ propose chaque fois qu'il faut donner des conseils aux enfants tant qu'ils sont jeunes car, dit-il : « Igiti kigororwa kikiri gito

    C'est à-dire : « Il faut battre le fer tant qu'il est chaud.» Tout enfant doit subir des traitements affectifs de la part de ses parents et cela en bas âge en vue de préparer son avenir. Il serait difficile de ramener en marge de tolérance un adulte devenu délinquant.

    Nous avons exposé dans ce chapitre des données de recherche. Chaque sujet a été interviewé et les propos commentés. Nous avons parcouru les thèmes et les sous-thèmes comme les relations entre les parents et les enfants, les traitements réservés aux fils uniques et leurs conséquences ainsi que les mesures à entreprendre. Il est aussi nécessaire d'analyser et d'interpréter les propos en les regroupant dans les thèmes et les sous-thèmes et en s'appuyant sur les théories des auteurs. C'est ainsi que les relations entre les parents, les filles et le fils unique ont été traités dans les lignes suivantes.

    CHAPITRE VI: LA TRIPLE RELATION ENTRE PARENTS, FILLES ET FILS
    UNIQUE

    Les parents tissent des relations étroites entre eux et avec leurs enfants. Lorsqu'il s'agit d'un seul fils, l'affection parentale est orientée vers celui-ci. Par conséquent, il survient une mésentente entre les parents et leurs filles. Ceci est dû au fait que certains parents, à partir de leurs préjugés, ont démissionné dans leur rôle éducatif. Il faudrait alors, pour aboutir à une entente familiale, développer harmonieusement les relations entre les membres de la famille.

    6. 1. Les relations affectives centrées sur le fils unique

    La naissance des enfants est accompagnée par une grande joie pour les parents et ces derniers donnent une affection à leur descendance. Cette affection se manifeste à partir des relations que les parents tissent avec leurs enfants. Dans une famille à fils unique, certains parents surinvestissent sur leur fils en mettant à l'écart les filles.Au sujet des relations des parents avec leurs enfants dans une famille à fils unique, les parents ne voulaient pas montrer qu'ils aimaient particulièrement leur fils. Dans le but de ne pas créer la jalousie fraternelle, SUZ et CAN aiment secrètement leur fils. Ecoutons les propos de SUZ à ce sujet : « N'abakobwa turabakunda, ariko bisanzwe atari ku rugero rumwe n'umuhungu

    Ce qui veut dire : « Nous aimons également les filles, mais pas au même degré que le fils.» En fait, les parents aiment tous les enfants. La seule différence réside dans le degré d'affection qu'ils affichent vis-à-vis de chacun des enfants.Les parents sont, en effet, au courant du danger qui survient quand un parent oppose sa descendance. Rappelons ici les propos de NIC qui montrent que, dans sa famille, les filles et le fils unique sont au même pied d'égalité. Cette attitude de NIC de prendre au même pied d'égalité tous les enfants apaise les conflits fraternels si l'ambiance entre les enfants n'est pas bonne car, les filles qui ont déjà acquis la capacité de jugement gardent un air jaloux à l'endroit de leur petit-frère à cause de l'attitude de leur mère ou père. Par contre,ATH souligne ceci: « Umuhungu ari umwe, bashikiwe baramugirira ishari kubera urukundo uba umufitiye.»

    Ce qui veut dire: « Si le fils est unique, ses soeurs sont jalouses à cause de l'affection qu'on lui donne.» Les filles sont jalouses de la façon dont les parents privilégient le frère, ce qui est à la base de divers conflits qui peuvent surgir dans la fratrie.

    La présence des enfants de deux sexes dans la famille peut alléger certaines difficultés relationnelles entre les conjoints pouvant, à leur tour, engendrer les conséquences telles que la polygamie, la répudiation de la femme, l'insécurité chez les enfants et la culpabilité chez la mère. L'on peut dire que ces difficultés peuvent survenir dans la famille ayant les enfants de même sexe surtout de sexe féminin. Les données recueillies chez MET l'affirment lorsqu'il dit qu'une bonne progéniture est constituée de plusieurs garçons et filles. En fait, la présence des garçons dans la fratrie, même si ceux-ci sont minoritaires contribue beaucoup au maintien de bonnes relations dans la famille, malgré que la plupart des parents accordent une importance particulière à ces garçons.Il arrive aussi que les parents cachent aux enfants les problèmes relationnels qu'ils connaissent. Mais finalement, ces enfants finissent par les découvrir eux-mêmes et réagissent généralement de façon négative. Voici les propos de ATH à ce sujet : « Abakobwa barabona ko dukunda uwo muhungu gusumba, ntivyokunda ko tubibahisha kuko umwana iyo akuze aramenya amabanga yo mu nzu yose.»

    Ce qui signifie : «Les filles constatent que nous aimons particulièrement ce fils, il est impossible de cacher cet amour car l'enfant, devenu adulte, connaît tous les secrets familiaux.» Les enfants découvrent eux-mêmes les faits familiaux et les gardent secrètement en eux-mêmes. Ils réagissent positivement ou négativement selon le fait. Par exemple les difficultés économiques ou l'atmosphère familiale exercent une influence sur les enfants lorsqu'ils les découvrent. Ainsi, écrit BICHTER H.E. (1971, p.36), « les enfants en savent bien plus sur les parents et leurs difficultés que ceux-ci n'oseraient soupçonner. Souvent, ils prévoient les difficultés que connaît le père dans l'exercice de sa profession. Ils pressentent les angoisses financières ou les problèmes de rivalité qui pèsent sur l'atmosphère familiale. Souvent les parents ne cachent leurs problèmes aux enfants que par crainte d'être jugés par ces derniers.» Les parents croient que leurs enfants ne savent pas ou ne perçoivent pas ce qui se passe dans le ménage alors que ce sont des observateurs avisés surtout quand ce sont ces derniers qui sont au centre du conflit.Dans la société burundaise, ceux qui se marient veulent en premier lieu avoir des enfants. En plus, la majorité de couples préfèrent la présence de deux sexes dans la descendance comme le dit CAN : « Kuvyara abakobwa gusa canke abahungu gusa si vyiza. Uruvyaro rwiza ni urucanze.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Il n'est pas bon de procréer seulement les filles ou les garçons. Une bonne progéniture est celle qui est constituée de deux sexes.» La présence des garçons et des filles dans la descendance se présente alors comme nécessaire pour garder l'harmonie familiale. Dans le cas contraire, l'absence de l'un ou de l'autre sexe peut occasionner des conflits relationnels au niveau de la famille. Ces conflits vont commencer au niveau du couple conjugal pour affecter plus tard les relations entre parents et leurs enfants.

    Ainsi, comme le disait POROT M. (1979, p.14) :« La stabilité et pourtant la sécurité dépendent avant tout de la conduite des parents.» Ainsi, si les relations parentales ne sont pas harmonieuses, les enfants ne seront pas non plus stables. La présence des filles seulement a été à la base de conflits relationnels entre les conjoints.

    6. 2. L'origine de la mésentente entre les parents et filles

    Dans la société burundaise, la naissance du fils en famille qui n'a que des filles n'est pas accueillie de la même manière que celle d'une fille. En effet, les Burundais se réjouissent beaucoup à la naissance d'un garçon. L'absence de celui-ci dans la descendance peut être à la base des conflits entre les parents et les filles.L'absence de garçons dans la descendance est beaucoup plus ressentie par le père que par la mère. Avec l'importance capitale que les hommes attachent à la naissance des garçons, l'absence de ces derniers laisse une grande blessure chez le père. Celui-ci se lamente toujours qu'il périt pour toujours. Il garde en lui la nostalgie de voir un jour un fils naître dans sa descendance. A cause de cette insatisfaction remarquable du père, les relations familiales subissent de grandes perturbations. Voici les propos de MET : « Nagiye kuronka amahoro mbonye havutse umuhungu. Abakobwa bane bose atamuhungu aravuka, sinari mpimbawe ni ukuri. Nabona ko ngiye guhona.»

    Ce qui se traduit : « J'ai eu la paix quand j'ai eu un fils. Avec quatre filles sans fils, je ne me sentais pas bien à l'aise. Je voyais que j'allais périr.» MET est insatisfait de la naissance des filles et ne va pas tisser de bonnes relations avec ces dernières. Comme ces filles constatent que leur maman est elle aussi maltraitée parce qu'elle n'a mis au monde que des filles, elles vont rester attachées à leur maman. Ainsi, leur père les maltraite au même titre que leur mère. De cette manière, les relations entre père et filles deviennent totalement mauvaises. En effet, le père ne considère pas ses filles comme ses vrais enfants. Il agit comme s'il n'avait pas d'enfants.

    La naissance d'un seul fils est une levée de l'insécurité d'une part, pour la mère et, d'autre part, pour les filles. Le père change ses lamentations en amour envers le fils et la mère est aussi attachée à son fils car ce dernier est sécurisant pour la mère. Ces propos d'ATH soutiennent cette idée : « Umuhungu yavutse ubugira gatanu. Imbere y'ico gihe ntamahoro nari mfise. Aho avukiye wamengo ni igitangaro kibaye, numva amahoro mu nzu. Ahandi ho, yaba umugore canke abo bakobwa ntaco nababonamwo. »

    Ce qui veut dire : « Le fils est apparu à la cinquième naissance. Avant cette dernière, je n'étais pas en sécurité.A sa naissance, c'était comme un miracle et la paix régnait dans notre famille. Sinon avant, ma femme et mes filles étaient sans valeur pour moi.»Comme les filles ne sont pas aimées par leur père, celles-ci restent toujours en état de culpabilité. Elles s'attendent aux menaces de la part de leur père. Cet état de culpabilité est aggravé par le fait que leur père les maltraite comme si elles n'étaient pas ses enfants. L'idéed'ATHmentionnée ci-haut montre qu'un père sans fils menace chaque fois son épouse et ses filles. A cela s'ajoute l'idée de NIC qui dit : « Iyo abana badafashwe kumwe n'abavyeyi, abafashwe nabi baca bamera nk'impfuvyi. »

    Ce qui veut dire : «  Si les enfants sont traités différemment par leurs parents, ceux qui sont maltraités se comportent comme des orphelins. »Lesfilles se considèrent comme des orphelines de père à cause de l'attitude de ce dernier. Ceci se remarque par un malaise continuel chez les filles si elles ne sont pas avec le parent qui les aime.

    Les conflits relationnels entre les conjoints affectent les relations entre eux et leurs enfants surtout si ces conflits sont dus au fait qu'ils ne convergent pas sur la façon dont ils considèrent les filles et le fils unique. Dans une famille comptant un seul fils, la femme attache une importance particulière à son fils comme son mari.A ce sujet, voici les propos de la femme nommée SUZ : « Hagati yacu n'umuhungu hari urukundo rwinshi gusumba hagati yacu n'abakobwa

    Cela signifie : « Entre moi-même et notre fils se trouve la plus profonde affection qu'avec les filles.»Chez SUZ, le fils unique est beaucoup plus aimé. On comprend alors que les filles moins aimées par les parents développent des attitudes négatives dans cette famille. Rappelons ici les propos d'ATH qui dit que les filles sont jalouses envers le fils à cause de l'affection de la part des parents. Nous remarquons qu'à travers les propos d'ATH, le fait de s'occuper du fils unique dans la descendance a suscité la jalousie chez les filles et cela crée un climat de mésentente entre les membres de la famille.

    Pour réussir à l'éducation des enfants, il faudrait que chaque parent joue son rôle. Le rôle primordial de la mère dans l'éducation des enfants ne serait donc pas joué convenablement s'il y avait des conflits qui l'opposent à ses filles. A ce sujet, nous nous référons à la théorie de MANNONI M. (1964, p.20) selon laquelle, « la mère est conçue par les enfants non seulement comme dispensatrice des biens mais aussi comme source de protection. L'amour maternel sécurise l'enfant. Et cet autour de cet amour que s'ordonnent les relations de l'enfant avec les autres membres de la famille d'abord et puis avec l'entourage.»Ici, nous voyons la prépondérance du rôle joué par la mère dans l'éducation des enfants. Pour que les parents puissent jouer convenablement ce rôle, ils doivent manifester de l'affection envers leurs enfants sans tenir compte de leur sexe.

    6. 3. Parents démissionnaires de leurs rôles éducatifs

    Les parents ont la mission d'éduquer leurs enfants sans tenir compte de leur sexe. L'amour maternel et l'autorité paternelle doivent être partagés entre tous les enfants. Si l'un des parents démissionne de son rôle, l'enfant peut se sentir abandonné.Les parents doivent suivre l'évolution de leurs enfants. Et avec les carences éducatives, l'enfant est négligé comme le souligne MUJ : « Jewe nari namufashe neza akiri muto, ntaco namutuma, yirirwa arayerera, ariko yaciye yiga ingeso mbi, ubu rero ntagihanurwa, naramuhevye.»

    Pour dire : « Depuis son enfance, il était gâté, je ne lui confiais aucun travail, il passe toute la journée en errance Mais, il a adopté de mauvais comportements. Maintenant, il ne peut être conseillé, et je l'ai délaissé.» Une affection profonde affichée par les parents engendre de mauvaises conséquences chez l'enfant. Comme MUJ le dit, son fils est gâté, et ne fait rien,ce qui l'a poussé à devenir insupportable pour les parents. Parmi les enfants insupportables, certains sont délaissés par leurs parents ; l'exemple est celui du fils de MUJ. La famille serait la première source de mauvais traitements infligés aux enfants.

    Il arrive souvent que, si l'enfant est privé d'une présence parentale compréhensive, bienveillante, clairvoyante et ferme, il adopte un comportement asocial. Une autorité parentale absente ou insuffisante paraît être un facteur important tant dans la déviation des conduites chez la plupart des enfants comme le souligne, ici, DAHAL J. (2000, p. 53) :« L'enfant, pour l'épanouissement harmonieux de sa personnalité, a besoin d'amour et de compréhension. Il doit autant que possible grandir sous la sauvegarde et sous la responsabilité de ses parents, et en tout état de cause, dans une atmosphère d'affection et de sécurité morale et matérielle.» Il en ressort que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être le guide de ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de son orientation. Cette responsabilité incombe en priorité à ses parents. Les ménages qui vivent dans l'instabilité, la mésentente dans le couple, des ménages disloqués à cause du divorce sont parfois source de la maltraitance qui occasionne directement l'insatisfaction affective et matérielle chez l'enfant. Rappelons que ATHdévalorise sa femme parce qu'elle n'a pas mis au monde que des filles. La mésententedans le couple avant la naissance du fils a touché les filles d'ATH qui s'attendent toujours aux menaces de leur père.

    Un enfant qui ne bénéficie pas de la satisfaction des besoins auprès de ses parents peut ressentir un manque d'amour qui lui est nécessaire. Comme le souligne GLOTON R. (1974, p.85), « l'enfant a besoin d'amour, il a besoin qu'on l'aime et qu'on le lui montre, parce que l'amour est l'antidote de la solitude et que tout être humain refuse la solitude alors qu'il la porte en lui comme une fatalité de nature. Pour l'enfant le témoignage d'amour c'est la preuve qu'il est protégé.» L'amour ne joue qu'un rôle de sécurité lorsque l'enfant se sent accepté dans sa famille.

    Si par hasard, l'enfant éprouve un sentiment d'abandon, le risque de se sentir seul au monde est grand. Par conséquent, son développement affectif vis-à-vis de son milieu est handicapé et peut être agressif ou irritable. C'est ce qui arrive chez MET, le père qui a démissionné de l'éducation de ses filles et qui s'occupe exclusivement de son unique fils. MET attribue l'éducation féminine à sa femme alors qu'il est appelé à contribuer pour la bonne éducation de ses filles.Nous constatons que, quelque soit le degré de participation du père dans la vie de la famille, l'éducation de la fille est généralement à la charge de la mère. Lerôle du père de la famille est souvent lâche, alors que son rôle est irremplaçable pour la bonne éducation des enfants.

    Selon l'Univers de psychologie (1978, p.165), « l'enfant, avant sa naissance, est porté par sa mère mais il ne lui appartient pas. Il est l'enfant du couple et le père ne saurait échapper à sa responsabilité dans toute décision à prendre, y compris celle qui consiste à le sacrifier.» Une question qui peut être posée est celle-ci : si le père de famille a failli à sa mission, la mère va-t-elle jouer un rôle double? Celui du père et en plus de son propre rôle. Même si la confusion des rôles peut se présenter, on peut affirmer aussi que chacun des deux parents a une part individuelle et spécifique dans l'éducation des enfants et dans la résolution des problèmes qui se posent entre ces derniers.

    L'enfant, qu'il soit fille ou garçon, a besoin d'un modèle de vie couvert par la complémentarité des deux partenaires du couple parental pour l'intégrité et le développement de la personnalité. Ici, nous partageons l'avis de DODSON F. (1979, p.48) selon lequel « un enfant, en grandissant, a besoin d'un modèle de conduite féminine et masculine. Un seul parent ne peut absolument jouer les deux rôles.» Le père et la mère ont donc besoin de se compléter dans la façon d'agir face à toutes les situations familiales.

    6.4. Développement harmonieux des relations entre les membres d'une famille

    Dans une famille, les rapports entre les parents et les enfants sont caractérisés par des relations interindividuelles, par exemple du père et du fils, de la mère et de sa fille, du frère et de la soeur, de la mère et du fils, et enfin du père et de sa fille.Dans la famille nombreuse et hétérogène, cette richesse de relations donne un climat familial nettement différent de celui d'une famille réduite et plus particulièrement pour une famille nombreuse à fils unique. C'est ainsi que les parents à fils unique sont appelés à modifier leurs propres relations du fait de cette situation évoquée par MET d'attribuer aux femmes seules le rôle d'éduquer les filles. Le père qui laisse sa femme s'occuper, seule, de l'éducation des filles, va être considéré par ces dernières comme absent. Par conséquent, celles-ci vont développer un mépris à l'égard de leur père. Quant à la mère avec qui elles sont toujours en contact permanent, les filles peuvent l'accuser de les surcharger en leur imposant notamment des tâches culturellement masculines. Cependant, LAFON R. (1979,p.603) montre la structure des interrelations entre les membres de la famille :« On ne peut concevoir les parents en famille sans placer dans la totalité plurale qu'elle représente, à côté du père qui incarne l'autorité et la force et de la mère qui représente l'amour et la faiblesse, la fratrie qui symbolise la rivalité et l'amitié.» Le père est nécessaire, à la vue de ses enfants, pour soutenir la mère dans son autorité. Il doit se montrer disponible souvent pour que l'enfant puisse s'affirmer.

    Chaque enfant, garçon ou fille, a toujours besoin d'un modèle de force et de stabilité à traversson père. C'est ce que propose NIC dans ces termes: « Abana bose bofatwa kumwe kugira ntihagire uwushavura. Kandi, umureze nabi aragira ingeso mbi. Abavyeyi bakwiye gutanga akarorero keza ku bana babo.»

    Ce qui veut dire : « Tous les enfants sont traités de la même façon pour que aucun d'eux ne soit pas fâché. Aussi, s'il est mal éduqué, il adopte de mauvais comportements. Les parents devraient donner un bon modèle à leurs enfants.» En effet, chaque parent possède des qualités spécifiques que l'enfant ne peut trouver chez l'autre. L'autorité paternelle est spécifique au père comme le modèle de puissance à imiter. L'amour maternel est spécifique pour la mère. Chaque parent doit transmettre ses qualités à chaque enfant. Ainsi, comme le souligne DEBRE R. (1970, p.415),« il faut que le père permette à l'enfant de faire cette éducation sentimentale et sociale dans une atmosphère d'affection et de sécurité sans l'écraser par conséquent de sa supériorité, mais sans lui donner pour autant une impression d'effacement ou de faiblesse car l'enfant a besoin que son père ne cède pas à ses coups et reste toujours pour lui un modèle de force et de stabilité.» Par la puissance de sa personnalité, il doit être suffisamment énergique pour faire face aux difficultés avec certitude et courage.

    Cependant, CAN s'intéresse beaucoup à ses enfants sans tenir compte du sexe. CAN renforce donc l'idée de NIC en affirmant que les enfants sont tous nécessaires dans la famille et que l'important serait ce qu'on attend de chaque enfant. Cette idée est aussi soutenue par MUJ qui s'intéresse beaucoup plus à ses filles car son unique fils est un délinquant. Il propose une étroite communication au sein d'une famille. Une collaboration avisée du père avec son épouse est nécessaire pour renforcer le rôle du père. La mère doit donc aimer ses enfants pour créer une bonne ambiance familiale.

    Soulignons donc que c'est déplorable de rencontrer une mère qui peut refuser de tisser certaines relations avec ses enfants à cause de leur sexe ou par simple raison de se sentir coupable. Rappelons que SUZ déclare aimer beaucoup plus son fils par le fait que celui-ci est fils unique. SUZ noue avec son fils une relation sécurisante, d'amour qu'elle ne noue pas avec ses filles. Ici, le problème est que certains parents confondent compensation et affection. Ainsi, dit DAVIDO R. (1976, p. 73), « parfois, «la mauvaise mère» qui n'aimera pas son enfant autant qu'elle le devrait se sentira coupable; sa mauvaise conscience la fera agir par compensation, c'est-à-dire qu'elle camouflera cette carence d'affection maternelle par des actes : l'enfant, faute d'être choyé, sera gâté, on ne lui refusera rien, ses jouets s'accumuleront au détriment de l'affection, ce don unique et irremplaçable des parents.» Il est difficile pour un enfant de nouer une relation sécurisante d'amour, de tendresse, de compréhension avec une mère ou un père tendu(e), nerveux(e) ou indifférent(e). C'est ce que nous constatons chez ATH, père de la famille qui s'est désintéressé de sa progéniture féminine en se donnant corps et âme à son unique fils.

    En définitive, l'enfant évolue d'une manière différente selon que c'est un garçon ou une fille. Il a besoin, quoiqu'il en soit, d'une image masculine et d'une image féminine bien différenciées pour son identification. Les parents sont là pour réaliser ces deux images. Une inversion des rôles ou l'absence de l'un d'eux ne va pas sans difficultés car il est nécessaire que la fille puisse s'identifier à l'image féminine et le garçon à l'image paternelle. Cependant,quelques traitements sont réservés aux fils uniques par les parents qui préfèrent beaucoup une descendance masculine que féminine. Ces traitements affectifs se remarquent dans les relations que tissent les parents et leur fils.

    CHAPITRE VII : TRAITEMENTS AFFECTIFS RESERVES AU FILS UNIQUE

    Le fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine est élevé avec douceur et gentillesse. Celui-ci est beaucoup capricieux et ses besoins sont immédiatement satisfaits par ses parents dans le but d'éviter toute frustration que peut connaître le fils unique. Dans cette famille, le fils unique occupe la première place dans la descendance. Par conséquent, le fils unique bénéficie d'une profonde affection de la part de ses parents, car ces derniers voient, dans leur fils, l'avenir de la famille. Les attitudes affichées par les parents dans le traitement de leur fils unique causent la rivalité fraternelle.

    7.1. La satisfaction immédiate des besoins du fils unique

    L'enfant possède en lui-même des besoins comme tout autre adulte. Chaque besoin est satisfait soit par ses parents, soit par lui-même. Pour le cas du fils unique, ses besoins sont pris en charge par ses parents. Ces derniers veulent satisfaire chaque besoin afin que le fils unique ne soit pas frustré. C'est ce qu'affirment SUZ et ATH dans leurs propos quand ils disent que le fils est très important, qu'il mérite un entretien jour au jour.CAN et METattribuent toute la richesse familiale à leur fils et disent que le fils unique ne manquent rien en leur présence. Pour que l'enfant se développe harmonieusement, il a besoin d'être satisfait dans ses besoins mais également d'être responsable de la satisfaction de ses propres besoins.Un enfant normal, pour devenir un adulte bien constitué, évolue sur trois plans essentiels à savoir les plans physique, intellectuel, et affectif. A ce sujet, POROT M. (1979, p.14) nous explique bien ceci : « Le libre jeu des grandes fonctions et la satisfaction des besoins organiques permettent son épanouissement physique. L'éducation et l'instruction au sens large du mot favorisent son développement intellectuel. C'est de ses relations avec l'ambiance et presque exclusivement avec sa famille, surtout dans son jeune âge, que dépend l'équilibre et l'évolution normale de son affectivité

    Dans notre travail, le fils unique est à l'aise dans sa famille parce qu'il est entouré par des personnes auxquelles il est attaché et qui l'aiment bien. Cette situation que nous venons de décrire est valable pour tous les enfants beaucoup souhaités par leurs parents et plusparticulièrement pour le cas du fils unique car, celui-ci mène une vie différente de celle de ses soeurs.Le fils unique est perçu comme un objet unique au monde pour ses parents et ses derniers s'invertissent beaucoup dans leurs relations avec lui et nombreux sont ceux qui préfèrent satisfaire tous ses besoins.Ainsi, dit SUZ : « Twebwe ngaha umuhungu turamufata neza, kuko ntitumuruhisha, nta na kimwe abura tugifise.Tumufungurira neza, mbere iyo agiye kw'ishure ndamuha amahera asumba ayompa abakobwa.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Ici chez nous, le fils est bien entretenu car, nous ne le fatiguons pas, il ne lui manque de rien. Nous le nourrissons bien, et d'ailleurs, quand il va à l'école, je lui donne plus d'argent de poche qu'aux filles.» SUZ essaie de satisfaire tous les besoins de son fils. Celui-ci est un élève et a les mêmes besoins que ses soeurs, mais SUZ s'occupe beaucoup plus des besoins du fils. De cette façon, le fils unique est le point de toutes les attentions et de toutes les tendresses des parents.

    DANA J. (1978, p. 42) indique que, pour un enfant élevé avec tant de soins, « il se sent tellement le centre du monde qu'il peut quitter le centre de la terre ou bien il emporte la terre avec lui.» L'ambiance chaleureuse dans laquelle le fils unique est élevé détermine son développement affectif. Ainsi, la situation dans laquelle se trouve le fils unique ne le laisse pas sans problèmes.D'une part, il est toujours satisfait dans ses besoins et, par conséquent, il est gâté. D'autre part, il adopte un comportement de va-et-vient en demandant à l'un des parents ce que l'autre lui refuse. Voici les propos d'ATH à ce sujet : « Umuhungu arakenewe mu muryango. Nico gituma tugerageza kumuha ibikenewe vyose. Kandi ntaco abura hagati yacu. Nyina aramuha nanje nkamuha.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Le fils est nécessaire dans la famille. C'est pour cette raison que nous essayons de lui donner tout le nécessaire. Il ne lui manque de rien, nous satisfaisons tous ses besoins.» Il est bien entendu que ce fils unique est considéré comme unique enfant de la famille placé au centre des préoccupations des parents. Il est satisfait dans tous ses besoins. Cependant, la conséquence de cette satisfaction juvénile du fils deviendra plus tard l'insatisfaction lorsque ses parents ne seront plus là ou laisseront le fils indépendant et responsable de ses besoins. MUJ affirme cette idée : « Akiri muto ntaco yabura, ariko rero aho amariye gukura, aguma ashaka kurya yicaye. Umwanya wose ngo mpa iki, kuko ataronka ico ashaka cose, yaciye yadukana ingeso mbi z'ubusuma.»

    C'est-à-dire :« Il ne lui manquait rien dans sa jeunesse. Mais dès son âge adulte, il ne voulait que manger sans travailler. A chaque instant, il nous demande ceci et cela. Parce qu'il n'est pas satisfait dans ses besoins, il a commencé à commettre des vols.» L'enfant gâté n'a pas d'esprit de créativité. A l'âge adulte, ses parents ne continuent pas à satisfaire ses besoins en totalité. En revanche, pour satisfaire ses besoins, l'enfant peut développer des comportements asociaux. Le fils unique, qu'on satisfait dès sa naissance, devient un petit tyran jamais satisfait. Dans l'Encyclopédie de la psychologie (1970, p.355), il est dit que « pour peu que les parents tentent obscurément de conquérir ses faveurs, l'enfant unique va avec astuces jouer sur les tableaux. Il demande à l'un ce que l'autre refuse. S'il ne se heurte pas à un bloc indissoluble, on comprend qu'il se livre avec complaisance à ce sujet de va-et-vient, petit tyran jamais satisfait, assistant à cette lutte dont il est l'enjeu.»

    En définitive, le fils unique est privilégié par ses parents par rapport aux autres. Cependant, cela ne veut pas dire qu'il aura un bon avenir par rapport à ses soeurs lorsqu'on tient compte des mauvais comportements qu'il peut adopter. A ceci s'ajoutent des mauvais traitements qu'il peut subir de la part de ses soeurs lorsque ses parents sont absents à la maison. A ce moment, il se trouve écarté par ses soeurs, que ce soit dans les jeux ou dansd'autres travaux en commun.

    7. 2. La place primordiale du fils unique dans une famille

    Le sexe des enfants est l'un des principaux facteurs de dislocation des foyers dans le Burundi traditionnel et même moderne. En effet, les Burundais appréciaient beaucoup le sexe masculin. La naissance d'une fille n'est pas accompagnée d'une grande joie comme celle du garçon. On dit qu'une fille n'est pas un enfant de la famille. Les Burundais préfèrent les garçons aux filles car, ce sont eux qui assurent la continuité de la famille. Par contre, la fille, par le mariage, quitte sa famille pour élargir une autre famille qui n'est pas la sienne. Ainsi, affirme ATH : « Iyo mvuze ko umuhungu ariwe mwana mfise, abakobwa ndumva bidoga ariko bigaragara. Ndazi ko bagiye kwubaka bizoba biheze.»

    C'est-à-dire :« Les filles se lamentent quand je dis que le fils est le seul enfant que je possède, alors que c'est clair. Je sais que lorsqu'elles iront se marier, ce sera fini.»On constate par là que la raison qui pousse les parents à accorder peu d'importance aux filles est que ces dernières quittent leur propre famille en allant se marier. D'autres cas ont affirmé des raisons de mieux placer le fils unique dans leur famille. D'abord MET, père de la famille, dit ceci : «Atavyo kubesha, umuhungu ni we aza imbere mu bandi bana, kuko niwe azosigara asanze urugo.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Sans mentir, le fils vient en premier lieu parmi les autres enfants, car c'est lui qui restera pour la sécurité de la famille.» Le fils est le plus aimé parce que c'est lui qui remplace valablement son père dans la famille. Le rôle du père est celui d'assurer la sécurité familiale et le fils unique le jouera plus tard et sera le responsable de la famille après la mort de ses parents. Ensuite, à part que MET évoquait la raison culturelle fondée sur le patriarcat, SUZ mère dans le couple a parlé de la question d'héritage comme raison économique de cette manière : « Uwo muhungu tumukunda kuko ariwe samuragwa.»

    Ce qui veut dire : « Nous aimons ce fils parce que c'est l'héritier des biens familiaux.»A partir des propos d'ATH, SUZ, MET, CAN et MUJ, on comprend que si un homme meurt sans laisser d'héritier mâle, il trouve que son groupe familial s'éteint et c'est là une contrainte pour son avenir. Donc, l'enfant a non seulement une valeur économique (aider les parents dans l'exécution de multiples travaux par exemple), mais aussi, il assure la continuité de la lignée familiale.En s'appuyant sur une théorie, dans leur enquête sur la famille et la fécondité au Burundi, NAVAS J. et son équipe (1977, p.52) trouvent que certains de leurs enquêtés préfèrent une famille pauvre avec un enfant unique mâle à une famille riche avec des filles seulement. Et selon eux, « ce garçon unique héritera la propriété familiale et pourra engendrer des garçons et des filles que son père n'a pas eus, assurant ainsi la continuité de la lignée.»

    Nous constatons que l'importance qu'on attache au sexe de l'enfant dans le Burundi traditionnel n'a pas changé. En effet, parmi les six cas de famille ayant un seul fils, un seul cas a manifesté un sentiment d'égalité entre enfants. Nous rappelons les propos de NIC, mère dans la famille qui dit quetous les enfants sont égaux et que si on aime l'un plus que l'autre, on sème la mésentente dans la famille.Nous remarquons plus particulièrement que la culture influence beaucoup dans les familles burundaises. Les parents éduquent et considèrent les enfants selon le modèle patrilinéaire comme le montre, ainsi, BIGANGARA J.B. (1986, p.89) :« Le père de la famille jouit d'une autorité absolue sur sa femme et ses enfants. Il est obligé d'assurer la survivance de la lignée patrilinéaire.» L'idée évoquée ici du rapport « dominateur-dominé» ou tout simplement «homme- femme» est un préjugé auquel on continue à adhérer. Ce préjugé met en avant le sexe masculin comme dominateur pour le sexe féminin.

    Rappelons que les propos d'ATH montrent que la lignée familiale est assurée par le fils. Le fils est éduqué pour remplacer son père. En effet, tout cela découle du fait que le Burundi est caractérisé par le système patriarcal. Et si nous nous référons aux caractéristiques de la société burundaise données par NTAHOMVUKIYE J. et al. (2001, p.4), la société burundaise est caractérisée par:

    « -Un système de domination du mâle ;

    -Un système de contrôle culturel, économique, social, religieux et politique monopolisé par les hommes ;

    -Un système où les responsabilités reviennent au genre masculin, le sexe féminin est dominé par le sexe masculin

    Dans la société burundaise, c'est le père qui est le chef de la famille. Le fils unique est, par conséquent, placé au premier rang, mieux formé pour qu'il puisse diriger et devenir chef de la famille qu'il aura fondée. C'est ainsi que même pendant son enfance, il occupe la première place dans la descendance. Ceci se montre également par un profond attachement que les parents affichent à l'égard de leur fils unique.

    7. 3. La profonde affection entre parents et fils unique

    Quand l'homme décide de se marier, il porte en lui des sentiments de procréation, c'est-à-dire avoir une descendance. Mais pour les parents, la descendance masculine vient en premier lieu, parce que c'est le garçon qui est chargé de suivre les biens de sa famille quand ses parents ne seront plus. Donc, le fils, s'il est unique dans une fratrie nombreuse, importe beaucoup. Dans ses propos, ATH montre l'importance du fils dans la famille.Pour ATH, le fils a une valeur comme celle de son père. En l'absence de ce dernier, on comprend bien que c'est le fils qui va prendre le pouvoir familial après la mort de son père. MET a également appuyé l'idée de cette manière : « Umuhungu ni we atorana, ni we uraga amatungo. Utavyaye agahungu na kamwe umuryango uca usambuka.»

    Ce qui se traduit ainsi : « C'est le fils qui hérite la richesse familiale, quand on n'a pas procréé au moins un seul fils, la famille disparaît.» Ceci montre que le Burundi attache une importance capitale sur la descendance masculine. Celle-ci perpétue le nom de la famille et garde les biens familiaux selon ATH, MET, SUZ, et CAN. L'absence des fils peut être à la base de la mésentente familiale même si cette famille est bien nantie matériellement.Les attitudes que les parents d'un fils unique adoptent dépendent de la personnalité de chacun des parents ou des relations qui les unissent. Il y a des parents hyperprotecteurs qui veulent surprotéger leur fils unique. Dans ses propos, CAN sécurise son fils unique comme son unique richesse. Elle a peur de le perdre et le prive de circuler sans but. Ainsi, dit POROT M. (1979, p.106),« parfois un petit camarade jugé acceptable par le tamisage maternel lui permet de satisfaire tant bien que mal son désir de contact social.» D'autres parents comme SUZ, ATH et MET épargnent leur fils unique de tout effort. Ils veulent le faire vivre dans un univers où tout est rassurant et facile. Selon ces parents, le fils unique est surprotégé et ne connaît pas de frustration. On satisfait même ses plus petits désirs et quand il demande quelque chose, il l'obtient immédiatement. Donc, un fils unique suscite trop de soucis pour ses parents qui s'inquiètent pour lui. A ce moment, il leur devient difficile d'ignorer ses demandes.

    Comme pour les hommes, ne pas avoir de garçon dans une progéniture est une situation aussi douloureuse pour la femme. Et si, par chance, il naît un seul fils, il devient précieux pour la famille. C'est pourquoi on lui donne une affection aussi profonde qu'elle soit. Ainsi, dit ATH : « Ndetse ko ndamubungabunga, ntakindi ndamugirira kuko ivyo mfise vyose ni ivyiwe.»

    Cequi se traduit de cette manière: « A part que je l'entretiens, je ne lui offre rien de spécial car tout ce que je possède lui appartient.» La richesse familiale devrait être partagée par tous les enfants. Mais, pour ATH, le fils unique est le seul héritier et les filles bénéficient l'héritage de leurs époux. A cette idée, ajoute Madame SUZ : « Iyo ansavye ikintu mba nshaka ko aca akironka. Atakironse nca numva umengo ni jewe mbabaye. Numva ikigumbagumba bigatuma ntashobora kwihoza ico ansavye kuko simba nipfuza kumushavuza

    Cela veut dire : « Quand il me demande une chose, je souhaite qu'il l'obtienne immédiatement. Lorsqu'il ne l'obtient, je me sens moi-même touchée. Je ressens spontanément une profonde affection et cela m'empêche de faire la sourde oreille car je ne veux pas qu'il se fâche contre moi.» On comprend que les parents du fils unique ont peur de perdre l'affection de leur fils et c'est la raison pour laquelle ils affichent une très grande sollicitude envers ce fils. Ils ne veulent pas le perdre de vue. Cependant, les comportements affichés par les parents provoqueront, plus tard, une sorte de rivalité dans la fratrie.

    7.4. Les comportements des parents comme source de rivalités fraternelles

    Le sexe des enfants influence toujours les relations familiales et fraternelles. Suivant que tel parent privilégie les enfants de tel sexe, ceci peut provoquer des conflits au sein de la fratrie.En effet, pour notre étude, nous avons constaté que nos enquêtés privilégient le sexe masculin. Par exemple, MET privilégiait son fils unique dans tout. Ainsi, il dit : « Hize umuhungu, abakobwa n'aho batokwiga ntaco

    Ce qui veut dire : « Si le fils est scolarisé, alors que les filles ne le sont pas, il n'y aurait pas de problèmes.»Par conséquent, si le fils unique est privilégié au détriment des filles, ces dernières peuvent devenir jalouses à l'égard de ce fils et les conflits fraternels y trouvent dès lors leur origine. Dans ses propos ATH montre la jalousie de ses filles envers le fils unique car ce dernier est beaucoup privilégié.Cette situation montre que les parents doivent tenir compte des conséquences qui découlent de la façon dont ils considèrent les enfants. Le but serait ici d'éviter sinon limiter les conflits entre frères et soeurs pouvant affecter tous les membres de la famille. Il convient alors ici de donner des conseils aux fils uniques et aux parents démissionnaires de leurs rôles éducatifs pour qu'ils puissent eux-mêmes harmoniser les relations familiales et la réussite éducative de leurs enfants.

    7.5. La maltraitance faite au sexe féminin

    Au Burundi, les filles sont négligées et maltraitées de différentesfaçons. Certaines filles peuvent êtremaltraitées psychologiquement, c'est-à-dire qu'elles sont victimes d'une attitude parentale négative. Par exemple, la fille est dénigrée sans cesse, ridiculisée, ses succès sont méprisés, elle est privée de contacts sociaux. Une fille est égalementnégligée psychologiquement et émotionnellement lorsqu'elle ne reçoit pas assez d'attention, d'affection et de sécurité. Rappelons que MUJ maltraite les filles et son épouseparce que celle-ci n'a pas engendré des garçons. Aux yeux de MUJ, le sexe féminin n'a pas de valeur comme lui-même l'a révélé. MUJ maltraite sa femme parce que cette dernière a engendré les filles. La maltraitance a pris fin avec la naissance du fils. Pour dire que les garçons et les filles n'ont pas la même valeur chez lui. La maltraitance faite à la femme de MUJ touche psychologiquement ses filles car elles voient qu'elles sont la cause de celle-ci. Les filles remarquent,à ce moment-là, que le sexe féminin occupe la deuxième place en famille et joue également le rôle secondaire dans la famille car le sexe masculin domine dans tout. Les filles sont alors angoissées comme le souligne HAYEZ J.Y. (1982, p. 224) en ces termes : « Il est des enfants angoissés parce que le parent de leur sexe joue lui-même un rôle secondaire dans l'économie familiale : plus timide, plus inconsistant, dominé par son partenaire ; dans ces conditions, l'enfant ne se sent pas protégé par lui et il est culpabilisé à l'idée - plus ou moins illusoire - de triompher de lui et de l'abattre au détour de son mouvement oedipien. »Lorsque les filles remarquent que leur mère est limitée dans la prise des décisions, elles sont angoissées de plus. Elles voient réellement que leur place en famille est secondaire et acceptent, de ce fait, la domination de leur frère.

    La négligence des enfants plus particulièrement celle des filles peut êtrematérielle. La négligencematérielleest caractérisée par un manque de soins des enfants (manque d'habits,de temps de repos, insuffisance des conditions sanitaires...). Comme le souligne TOURIGNY cité par NDAYISABA J. et DE GRANDMONT N. (1999, p.347), «  la négligence est le refus de la part de la personne chargée d'éduquer l'enfant, d'administrer à celui-ci les soins nécessaires et de répondreà son besoin d'affection. Elle peut être physique comme refus de nourrir l'enfant, refus de l'habiller ou affective comme l'enfant rejeté,ignoré, l'enfant traité comme simple objet. » Les filles sont, à cause de la tradition culturelle burundaise, moins considérées. Elles ne sont pas envoyées à l'école au même rythme que les garçons comme MET le souligne dans ses propos.

    Les filles donc sont appelées à se soumettre aux hommes tout en affichant respect et obéissance. Devenues femmes, les filles gardent cette même valeur en famille. Ainsi, ATH dit ceci : «  Abakobwa kuva kera ntibigeze batorana, turabarera kugira bagire indero runtu yo kubaha, kugira ntibazodutukishe nibaja kubaka, bazokubahe abagabo babo. »

    Ce qui veut dire : «  Depuis longtemps, les filles n'héritent pas, on les éduque pour qu'elles aient une éducation d'obéissance, pour qu'elles ne nous déshonorent pas après le mariage, pour qu'elles obéissent à leurs époux. » La tradition est à la cause de cette problématique de déconsidérer les filles. Les filles sont éduquées pour la vie à une autre famille, pour le respect de leurs futurs époux. Les filles sont privées de l'héritage de leurs parents, elles héritent chez leurs époux.

    En clair, il s'agit d'une injustice commise à l'égard de la femme comme le souligne, ainsi, le PNUD (1999, p.21) : «  Juridiquement, sous certains aspects, les femmes burundaises ne jouissent pas pleinement des mêmes droits que les hommes. Le code des personnes et de la famille accuse encore des insuffisances en matière d'héritage et de succession. » Nonobstant, la femme ne devrait pas être écartée lors de la succession dans la mesure où elle participe beaucoup à la production familiale et au bien-être familial.Le statut de la femme en général est en rapport avec le contexte socioculturel. Son image, aux yeux de la société burundaise, n'a pas encore évolué bien qu'on prône son émancipation. Etant donné que les femmes participent à peine aux décisions politiques, on continue à ignorer de façon délibérée leurs droits et les aspirations légitimes.Selon BEAUVOIR S. (1979, p.25),«  il est plus facile d'accuser un sexe que d'excuser l'autre(...). Le code romain, pour limiter les droits de la femme, invoque l'imbécilité, la fragilité du sexe. » Même si les femmes n'ont pas eu cette occasion de participer massivementà toutes les activités que les hommes, elles sont aussi courageuses que ces derniers quand on les confie un travail.

    Dans cette optique, on peut se poser la question de savoir dans quelle condition et comment les femmes doivent élaborer des alternatives susceptibles de leur faire sortir de leur situation défavorable. Pour promouvoir la condition de la femme, BOURGUIBA M. (1962, p.73) pense que «  la société ne peut progresser et aspirer à une vie réellement digne que lorsque l'homme et la femme modifient leur comportement et leur optique l'un vis-à-vis de l'autre. » Le fils unique est placé au premier rang dans la famille car il va remplacer son père, chef de famille après la disparition de ce dernier. Nous pensons que cet état de choses résulte, dans la société burundaise, du fait que la domination masculine constituait l'idéal culturel. A ce sujet, NEWLAND K. (1981, p.160) écrit ceci: «  lorsque la domination masculine constitue l'idéal culturel, un garçon de douze ans sera qualifié ou se qualifiera même personnellement de chef de la famille dans un foyer dépourvu d'homme adulte. »Il faut donc, pour que les femmes sortent de cetétat de choses, que les hommes sachent bien que les femmes sont aussi courageuses. Les femmes doivent elles-mêmesparticiper dans toutes les décisions prises à leur égard et participent dans la vie socio-politico-économique du pays.

    Nous avons évoqué dans ce chapitre les traitements réservés au fils unique, la place du fils unique dans la famille, les attitudes des parents comme source de rivalités fraternelles et la maltraitance faite au sexe féminin. Nous pouvons conclure toute en disant que les garçons et les filles sont traitésdifféremment. Mais les traitements réservés au fils unique comportent de lourdesconséquences pour ce dernier.

    CHAPITRE VIII : LE FILS UNIQUE, SES PARENTS ET LES PERSPECTIVES

    Dans ce chapitre, nous avons relevé quelques conséquences du fait de fils unique sur l'enfant lui-même et sur ses parents et qui peuvent bloquer une existence équilibrée d'un fils unique dans une famille. . Les traitements subis par le fils unique peuvent engendrer chez l'enfant de lourdes conséquences comme le manque d'autonomie, de responsabilité et autres.Nous avons également donné quelques perspectives pouvant aider les parents et le fils unique dans sa conduite vers le développement harmonieux de ses relations et de sa personnalité.

    8.1. Les conséquences néfastes rencontrées par le fils unique dans une famille

    Chaque enfant a, son hérédité, son histoire, ses qualités et ses défauts. Il est évident que la situation qu'il vit dans sa famille est différente de celle des autres, mais la façon dont le fils unique l'exploitera dépend de deux grands facteurs à savoir les parents et l'environnement familial. Toutefois, le fils unique peut avoir des problèmes qui lui sont spécifiques et qui peuvent avoir des retombées négatives sur lui et la famille elle-même si les parents n'y prennent pas garde.Les parents hyper-protecteurs vont à l'encontre du bien-être de leur fils unique puisqu'ils l'empêchent de devenir autonome. Ceux-ci veulent agir toujours à sa place. Il n'y a aucun secteur de sa vie dans lequel ils n'interviennent pas en voulant l'orienter chaque fois, même dans le choix des amis. Ainsi, dit CAN:« Ntawomureka ngo yigire ivyo yishakiye. Wewe ntabona ko abangamiwe. Ntegerezwa kumucunga kugira ntagire ingorane. »

    Ce qui se traduit par : « On ne peut pas le laisser faire tout ce qu'il veut. Lui, il ne voit pas qu'il est exposé aux dangers. Je dois le surveiller pour qu'il ne rencontre pas de problèmes.»Pour que l'enfant développe mieux son autonomie, il faut qu'il ait une certaine liberté dans ses activités. Le choix des amis ne doit pas être guidé par quelqu'un d'autre. Cette indépendance va s'accroître au fur et à mesure qu'il grandit et aura une importance vers l'âge adulte lorsque l'enfant se détachera de ses parents pour fonder sa propre famille. Nous nous appuyons sur les propos de WINNICOTT D.W. cité par KUBWIMANA J.D. (2005, p.3) pour affirmer que « chez l'enfant, le développement affectif intervient si des conditions suffisamment bonnes lui sont offertes. Les forces vers la vie, vers l'intégration de la personnalité, vers l'indépendance, sont extrêmement puissantes et si les conditions sont suffisamment bonnes, l'enfant progresse. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, ces forces sont retenues dans l'enfant et d'une façon ou d'une autre tendent à le détruire. »

    C'est ainsi que l'absence d'autonomie dès le jeune âge aura des effets importants à l'âge adulte comme celui de ne plus satisfaire ses propres besoins sans l'intervention.

    Un fils unique élevé avec autant de précautions ne peut pas manquer de difficultés dans sa vie ultérieure. Même s'il grandit physiquement, il peut rester psychologiquement enfant parce qu'il n'a jamais pris de responsabilités. En voulant trop le protéger, ses parents créent, chez le fils unique, des attitudes de dépendance. De cette façon, ils peuvent gâcher sa vie alors qu'ils se croyaient entrain de lui faire du bien. Dans les familles à fils unique, les parents pensent souvent à sa liberté. C'est le cas de MUJ qui a fait gâter son fils en lui privant des travaux dès son enfance, et qui, par après, est devenu un enfant très difficile. Finalement, MUJ a constaté qu'il faut battre le fer tant qu'il est chaud.DODSON F. (1979, p.226) suggère que «  si vous donnez à manger à votre bébé quand il a faim, si vous le cajolez beaucoup, si vous ne le laissez pas crier sans intervenir, il éprouvera un sentiment de satisfaction à l'égard de lui-même et du monde qui l'entoure et pourra acquérir un point de vue résolument optimiste sur sa vie. » L'enfance est une période la plus importante de la vie car c'est làoù l'enfant va acquérir son attitude fondamentale à l'égard de lui-même et du monde qui l'entoure. Il est nécessaire que l'enfant obtienne en même temps des moments de frustration et d'ambiance.Lorsque l'enfant est laissé avec beaucoup de liberté, il est automatiquement gâté et irresponsable dans tout. Il faut donc que les parents entraînent leurs enfants dès le bas âge à exercer des travaux domestiques, en lui confiant plus des responsabilités.

    La solitude est un phénomène où l'individu se sent seul et éprouve des difficultés de communication. L'absence de l'un et de l'autre avec qui on peut dialoguer laisse une blessure chez l'enfant qui évolue jusqu'à sa vie d'adulte.En effet, la communication s'établit chez l'enfant à partir de la communication familiale et évolue à travers des phases très différentes qui continuent d'exiger l'investissement à la satisfaction des besoins de l'individu. Ces propos de SUZ montre que le fils unique est beaucoup touché par la solitude : « Ingorane afise ni irungu kuko ahora ambwira ko nari kuvyara abandi bahungu.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Le seul problème qu'il a c'est la solitude car quelquefois, il me disait que je devrais engendrer d'autre fils.» Le fils unique reste seul même s'il est avec ses soeurs. Le fait qu'il se voit comme le seul garçon dans la famille ne le satisfait pas. Il veut encore établir une communication avec les garçons. La solitude qui le limite dans ses interactions le rend associable car la solitude diminue la communication avec les autres personnes.

    En nous référant à cette théorie de SILLAMY N. (1980, p. 241), nous comprenons l'importance de la communication. Pour l'auteur, « la communication est un élément fondamental et complexe de la vie sociale qui rend possible l'interaction des personnes.» Selon SUZ, le fils unique n'est satisfait dans sa fratrie. Souvent, il reste calme parce que le dialogue de ses soeurs ne le satisfait pas. C'est le cas qui est arrivé chez CAN quand il dit ceci: « Ndabona ko umuhungu wanje afise ingorane kuko kenshi aguma ahoze. Sinzi ko ari kubera abura abo bikina, na bashikiwe ntibaganira, kuko baba bibereye muvyabo.»

    Ce qui veut dire: « Je vois que mon fils ades problèmes car il reste souvent impossible. Je ne sais pas si c'est parce qu'il manque d'autres avec qui il peut jouer. Il ne joue pas avec ses soeurs, car celles-ci s'occupent de leurs propres affaires.»Il faut toutefois souligner que la solitude est un comportement qui handicape la vie de chaque personne. Pour le fils unique, c'est également un handicap éternel, car le dialogue est nécessaire dans la vie de l'individu. Ainsi, dit POURTOIS J.P. (2000, p.31), «si l'acte de communication est essentiel dans le développement social de tout enfant, il reste d'une extrême importance durant toute la vie d'un individu.» Ainsi, de nombreux auteurs insistent sur le fait que plus l'enfant grandit plus le dialogue devient nécessaire. Egalement, plus l'enfant échange avec ses amis, plus sa personnalité devient mûre afin de s'adapter à la vie sociale.

    Si le fils unique constate que ses parents se montrent toujours tolérants envers ses manquements, qu'ils se sacrifient pour répondre favorablement à toutes ses sollicitations et qu'ils se soumettent à toutes ses caprices, celui-ci peut développer un caractère bizarre. Nous nous référons aux propos de MUJ qui, dès l'enfance de son fils, s'est sacrifié en satisfaisant toutes ses sollicitations. A l'âge adulte, son fils a adopté de mauvaises attitudes en se livrant dans la délinquance, le banditisme et l'ivresse.Partout où il se trouve et dans n'importe quelle situation, il continue à manifester ce type de comportement. Il aime battre d'autres enfants. Ces parents, en se montrant faibles devant le fils unique, l'exposent à de nombreux dangers. Au sujet de cette faiblesse d'autorité parentale, voici ce que dit LERICHE A. M. (1975, p.45) :« Certains parents, pour épargner à leurs enfants peurs et complexes, abdiquent toute autorité et font apparemment preuve d'une compréhension infinie. Ils ne sont pas mécontents de voir leur progéniture en visite chez les amis, grimper et sauter partout, déranger toutes les affaires, réclamer sans arrêt à boire et à manger, vouloir qu'on s'occupe d'eux.»Le fils unique, élevé avec trop de tolérance, se comporte comme il veut devant n'importe qui. Comme il est le seul être cher en famille et vers qui se dirigent toutes les attentions, celui-ciest traité d'intouchable. Il est adulé et il règne sur son territoire familial. Ainsi, toutes les bêtises sont acceptées et il continue à les faire même à l'extérieur de la cellule familiale.Aux yeux des parents, tout est tolérable. Donc, lorsqu'il y a relâchement total au niveau de l'éducation d'un fils unique ou tout simplement de n'importe quel enfant, celui-ci peut en outre développer des attitudes de domination, ceci parce que ses parents ne font que s'incliner devant ses exigences, ce qui peut sans doute le rendre insupportable. Voici les propos de MUJ à ce sujet : « Iyo umwana utamureze neza hakiri kare, akuze ntaba akigondwa. Abavyeyi bakwiye rero gukarira abana babo bakabaha indero runtu bakiri bato.»

    Ce qui signifie : « Lorsque l'enfant n'est pas bien élevé dès son bas âge, il devient insupportable à l'âge adulte. Les parents devraient donc montrer leur autorité en donnant une éducation civique à leurs enfants depuis leur jeunesse.»En définitive, il faudrait que les parents inculquent à leurs enfants le sens du respect dès le jeune âge ou tout simplement les bonnes manières. A part que les fils uniques connaissent des conséquences liées à leur unicité, leurs parents aussi en connaissent.

    8.2. Conséquences pour les parents à fils unique

    Le phénomène de fils unique suscite diverses attitudes chez ses parents. Ces attitudes peuvent avoir des influences sur l'éducation de ce fils. Les parents pourront également avoir des difficultés qui découlent de l'unicité du fils telles que la culpabilité et l'autorité faible. Nous avons donc noté une sorte de culpabilité chez les parents du fils unique quand celui-ci n'est pas visible à leur égard. Ainsi, nous rappelons les propos de CAN qui se trouve dans l'insécurité, de crainte que la mort puisse emporter son fils unique. Les parents à fils unique sont plus craintifs car ils prévoient l'avenir de leur famille à leur fils. Et si, par malheur, la mort emporte ce fils, la famille disparaît. Le fait que le fils continue la lignée familiale, les parents essayent de le protéger à toute difficulté.

    A propos de la culpabilité que ressentent les parents hyperprotecteurs, LERICHE A. M. (1975, p. 24) signale que « les parents sont eux-mêmes très anxieux et malheureux. Ils se sentent, souvent inconsciemment, coupables à l'égard de leurs enfants et c'est pour réparer ou expier cette faute imaginaire et inconsciente.» Parfois les parents d'un seul fils affichent une anxiété liée au fait que leur fils peut être perdu d`un moment à l'autre et que ces parents restent avec une progéniture seulement féminine.

    Dans la mentalité burundaise traditionnelle, un seul fils est considéré comme un seul enfant ne fait pas la famille. Souvent, on dit : « Umwana umwe ntagira umuryango », ce qui veut dire: « Avoir un seul enfant n'est pas encore avoir de la famille.» Et l'enquêté CAN le confirme aussi en se montrant insatisfait de son unique fils. Au Burundi, celui qui a un seul enfant est considéré presque comme s'il n'en avait pas. D'une part, le couple est heureux de l'unique enfant et, d'autre part, le couple tombe dans l'anxiété, hanté par la peur de perdre l'enfant. Le fils unique est aussi considéré comme le seul enfant, car unique garçon dans la famille. Ces propos ont été également répétés par un enquêté de NAVAS J. et al. (1977, p.52) en disant que : « Avoir un seul enfant, c'est comme avoir un seul oeil : s'il se ferme, on devenait aveugle.»Ces propos montrent que les Burundais avaient peur de la mort et particulièrement celui qui a un seul fils ne pouvait pas être tranquille. Le fils unique ne confère pas à la famille le sentiment de satisfaction. Il restait plus un objet d'anxiété et d'angoisse que de joie.

    Dans le but d'éviter à leur fils unique peines et frustrations, certains parents abdiquent leurs responsabilités et font preuve d'une compréhension infinie. A ce moment, les conséquences au niveau de l'éducation du fils unique ne sont pas du tout bonnes.En effet, le respect et la discipline semblent être relâchés et il y a risque de déviation au niveau du comportement du fils unique. Voici ce qu'a raconté MUJ sur les comportements de son fils : « Urya muhungu aragoye cane, arakunda gushwana na bashikiwe. Ugize uravuga hari igihe aca agutuka. Urumva indero sinziza.»

    Ce qui signifie : « Ce fils-là est très difficile, il aime disputer avec ses soeurs. Si nous essayons de lui donner des conseils, il arrive qu'il nous insulte. Donc, on comprend bien qu'il n'est pas bien éduqué.»Depuis son enfance, le fils de MUJ a été bien traité. Ses demandes ont été immédiatement fournies. Il n'est pas puni dans son enfance, ce qui l'a poussé à avoir un comportement asocial. C'est ce que dit encore MUJ en ces mots : « Umwana umureze adahanwa ni bibi, kuko aca akura ari umunyamafuti. Ubu twararengewe yarabaye umuhimbiri ntakivayo.»

    Ce qui se traduit ainsi : « Si un enfant est traité sans subir des punitions, c'est très mauvais, car il grandit étant fautif. Aujourd'hui, nous sommes dépassés par sa délinquance, il ne peut plus être corrigé.» L'absence de l'autorité parentale chez l'enfant lui permet d'avoir une personnalité faible. Si l'enfant devient associable, il peut devenir incapable de résoudre les problèmes qui pourraient lui arriver. MUJ comprend maintenant qu'un seul fils a besoin d'un traitement un peu sévère dès son enfance, car, comme l'écrit SILLAMY N. (1980, p.39), «l'autorité est aussi nécessaire que l'affection. Au moment de l'adolescence, elle devient plus importante. Sans autorité, l'éducation se fait mal.»En voulant trop protéger le fils unique, dit MUJ, on l'expose sans le savoir à de nombreux dangers. A ce sujet, LESCURE M. (1978, p.110) trouve qu'«élever l'enfant sans contrainte aucune sous le fallacieux prétexte de respecter la liberté, c'est le livrer à sa propre fantaisie à un âge où celle-ci risque d'être tyrannique et mal le préparer aux contraintes de la vie sociale.» Il faut donc noter que les parents doivent êtreun peu sévères en équilibrant sévérité et affection.

    8.3. Conseils donnés au fils unique et aux parents

    Nous remarquons qu'il y a des familles où les parents affichent une affection extrême à leur fils unique et une affection presque absente à leurs filles. Rappelons que SUZ aime beaucoup son fils et que MUJ a délaissé ses filles au profit deson fils. Le fils de MUJ a reçu un amour excessif mais son éducation n'est pas meilleure. Ce qui implique que l'excès ou l'absence d'une affection engendre une mauvaise discipline chez l'enfant.Dans ces conditions, l'enfant sera plus difficile et les relations entre parents et filles seront de plus en plus détériorées ouabsentes. A ce sujet,pour PLAQUEVENT J. (1996, p.70), « est artificielle, donc ennuyeuse et aisément mortelle, toute discipline dont l'amour est absent ou simplement suffisamment présent. Un amour relatif n'autorise de ce fait qu'une discipline relative.»Il faut donc que chaque parent donne à chaque enfant une affection équilibrée. Nous ajoutons que l'absence des relations chaleureuses entre parents et enfant crée chez ce dernier un sentiment d'insécurité.

    Dans toute éducation, des prescriptions et des proscriptions établissent des limites au sujet de ce qu'il faut faire et de ce qu'il ne faut pas faire. Mais il faut que l'amour fasse bon ménage avec l'autorité. L'amour et l'autorité se complètent. Certains fils uniques sont victimes de l'absence de l'autorité du père, ce qui les plonge dans la délinquance. Les filles sont également dans l'insécurité à cause de l'absence de l'autorité du père. Ainsi, pour PLAQUEVENT J. (1996, p. 86) « l'équilibre premier et fondamental de l'affectivité doit être dès l'origine, une sécurité totale.» Cette sécurité totale ne peut se retrouver nulle part, si elle ne s'enracine pas dans la famille.

    En effet, pour assurer le développement harmonieux de l'enfant, le père et la mère doivent exercer des rôles complémentaires, pour aboutir à une bonne éducation de chacun de leurs enfants. Cependant, nous remarquons que la cohésion du couple n'a pas été réalisée pour qu'elle soit garante de l'affection pour tous les enfants. Ainsi, CAN, ATH, SUZ et MET font comprendre qu'ils s'intéressent beaucoup à leurs fils. Leurs filles n'ont pas bénéficié de la même affection que le fils unique.Il en va de même pour le père, personnage important dans l'univers de l'enfant, son absence au foyer et sa non-assomption du rôle paternel entraîne de graves difficultés tant sociales que psychologiques pour les membres de la famille. Rappelons que MUJ se montre démissionnaire de son rôle éducatif. Il n'a pas affiché l'autorité pour son fils. Son fils est aujourd'hui tombé dans l'incapacité de vivre harmonieusement dans la société et plus particulièrement dans sa famille.

    La famille a des obligations qu'elle doit assurer à l'endroit de l'enfant, à défaut desquelles ce dernier va manifester des comportements dits anormaux. Ainsi, la famille a le devoir de veiller à l'harmonie de la croissance physique de l'enfant. A l'adresse des parents qui ne manifestent pas d`affection à leurs enfants, qui sont souvent accablés par le travail, WINNICOTT D.W. (1957, p.10) écrit : «L'amour et la tendresse maternels sont pour le psychisme ce que sont les vitamines pour le physiologiste.» Le psychisme de l'enfant se développeparticulièrement en présence d'un amour et d'une tendresse moyenne à travers ses parents. Comme l'excès ou l'absence des vitamines engendre des effets néfastes sur le corps, l'excès ou l'absence d'affection engendre des comportements anormaux pou l'enfant.

    Effectivement, la mésentente des parents, la dislocation familiale, l'absence d'un des parents ou la surcharge professionnelle des parents sont à l'origine des carences affectives dont souffrent bon nombre d'enfants à comportement difficile. Signalons que nos enquêtés vivent à majorité en présence de leurs enfants. Ce qui fait qu'un aucun enfant n'a aucun problème de carences affectives dû aux surcharges professionnelles de ses parents.C'est du reste dans le même sens que BERNARD P. (1979, p.10) écrit ceci : « Le besoin de sécurité doit être satisfait pour vivre une relation sans angoisse avec les autres. Ce besoin de sécurité presque aussi vital que la nourriture est assuré par les deux parents ou par un substitut. Ainsi, il est essentiel que le nourrisson ou le jeune enfant trouve à satisfaire ce besoin de sécurité et de protection en vivant des relations affectueuses intimes et continues.» L'éducation d'un enfant exige d'efforts de la part des parents, ceux-ci doivent créer un environnement favorable pour l`épanouissement de celui-ci. L'éducation d'un fils unique n'a rien de plus particulier que celle des autres fils issus des familles à plusieurs garçons. Le fils unique a alors des problèmes spécifiques comme les autres ont les leurs. Toutefois, une certaine fermeté face à cet enfant est nécessaire pour le guider vers une meilleure constitution de sa personnalité.

    A partir des propositions de nos enquêtés et en les confrontant avec celles des spécialistes qui sont intéressés à l'éducation des enfants, nous sommes arrivé à établir des perspectives qui pourraient aider dans l'éducation du fils unique. Ainsi, dans les petites rencontres fréquentes avec les enfants voisins de sexe masculin, le fils unique aura l'occasion d'êtresocialisé, et de gagner ce qui lui manque suite à l'absence des frères dans sa fratrie. L'adhésion à des mouvements de jeunesse est suggérée comme donnant de multiples possibilités de socialisation et tire le fils unique de la solitude dans laquelle il est plongé.Les clubs sportifs, les associations culturelles, les activités familiales peuvent également favoriser l'insertion du fils unique dans des groupes. De cette façon, le fils unique trouvera beaucoup de temps à vivre en compagnie d'autres garçons. Il faut alors que les parents donnent cette occasion à leur fils pour qu'il puisse s'épanouir dans le choix de ses amis. En définitive, les parents qui prennent conscience des dangers et des avantages de cette situation sauront créer des conditions favorables à l'exploitation maximale des avantages et compenser les risques éventuels.

    CONCLUSION GENERALE

    Au terme de notre travail, il convient de rappeler les grandes lignes sur lesquelles reposait notre étude. Notre sujet avait pour but d' « étudierla place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine». Pour y arriver, il nous a fallu de passer par un cheminement qu'il est nécessaire de rappeler ici. En effet, cette recherche était articulée sur deux parties essentielles à savoir le cadre théorique et méthodologique ainsi que la présentation des cas, l'analyse des données et l'interprétation des résultats de recherche.

    D'abord, nous avons fait une introduction tout en délimitant et en justifiant le sujet et en élaborant les fondements théoriques et méthodologiques de la recherche. Nous avons élucidé les concepts-clés et dégagé des généralités sur la famille, le fils unique dans la famille burundaise et nous avons présenté la problématique de recherche et la méthodologie que nous avons utilisée. Nous nous sommes posé des questions de recherche qui nous ont conduit à la formulation de l'objectif général que nous avons opérationnalisé. Dans notre travail, nous avons utilisé la méthode qualitative et l'enquête par entretien semi-directif comme technique de recherche, nous nous sommes entretenu avec six sujets habitant la Commune MBUYE de la Province de MURAMVYA.

    La deuxième partie de notre recherche consistait en la présentation des cas, l'analyse des données et l'interprétation des résultats de recherche. Ainsi, cette partie nous a conduità dégager les résultats suivants. Concernant le premier objectif spécifique qui consistait à cerner les types de relations unissant les parents, les filles et le fils unique, nous avons pu nous rendre compte qu'une partie de nos enquêtés entretient de bonnes relations avec leurs filles et fils unique. Ceux-ci vivent dans une ambiance d'entente et de compréhension, au moment où une autre partie des enquêtés reste insatisfaite suite à un phénomène de fils unique parce que ces derniers ne sont pas en bons termes avec leurs filles.Eu égard donc des résultats auxquels nous avons abouti en rapport avec cet objectif, nous pouvons dire que celui-ci a été atteint.

    Au sujet du deuxième objectif spécifique qui consistait à découvrir les traitements affectifs réservés au fils à cause de son unicité, nous avons constaté que les parents ont des attitudes variées au plan du traitement de leur fils unique. Il y aceux qui comprennent que tous les enfants sont égaux et que ces derniers devraient subir les mêmes traitements. Les autres parents interviewés ne sont pas du tout contents de leur progéniture féminine et affichent une sollicitude plus marquée à l'égard du fils unique. Ainsi, ces parents donnent une affection profonde à leur fils et délaissent relativement les filles. En tenant compte de tout cela, nous admettons que cet objectif a été atteint.

    Quant au troisième objectif spécifique, avec lequel il était question de montrer les conséquences pour le fils unique et pour sa famille, les résultats auxquels nous avons abouti montrent que les conséquences pour le fils unique vivant dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine sont nombreuses. En effet, ces conséquences ont comme origine principale, l'attitude parentale face à l'inégalité des sexes. Le sexe des enfants influence beaucoup sur l'attitude des parents. La culture burundaise fondée sur le système patriarcal est un facteur aussi influençant les parents à fils unique.Les parents qui élèvent leur fils unique avec douceur et surprotection exposent ce dernier à des difficultés sans le savoir. Nous pouvons citer parmi celles-ci la solitude, le manque de bonnes manières, le manque de responsabilité et d'autonomie. Pour éviter cela, il faut que les parents tiennent au même pied d'égalité leurs enfants, et plus particulièrement en préparant le fils unique à être autonome et responsable pour qu'il réussisse dans sa vie future. Ainsi, avec les éléments ci-haut, nous disons que cet objectif a été également atteint.

    Enfin, s'agissant du quatrième et dernier objectif spécifique qui consistait à proposer les précautions à envisager dans une telle famille pour éviter le préjugéfondé sur la discrimination des sexes, nous avons relevé que NIC et MUJont donné des conseils aux parents ayant des préjugés fondés sur la discrimination des sexes. Disons la considération équitable des garçons et des filles, la non-violence du sexe féminin et l'égalité des enfants en matière de succession, etc. Ainsi, cet objectif a été atteint.

    En ce qui concerne l'objectif général qui visait à étudier la place du fils unique dans une famille comptant une progéniture à majorité féminine, après avoir cerné les types de relations qu'entretiennent les parents et les enfants, la place primordiale que les parents accordent à leurs fils uniques au niveau familial, nous pouvons conclure que notre objectif général de recherche a été atteint.Nous ne prétendons pas avoir mené une étude exhaustive. C'est pourquoi nous inviterions toute personne intéressée par le domaine d'éducation dans son ensemble et en particulier en famille de nous emboiter le pas pour approfondir le sujet et exploiter d'autres aspects tels que :

    Ø La place de la fille unique dans une famille comptant une progéniture à majorité masculine.

    Ø Le vécu psychosocial d'un couple à progéniture uniquement masculine.

    SUGGESTIONS

    Au terme de notre travail, il s'avère judicieux de donner des suggestions pour les différentes composantes de la famille particulièrement les parents, le fils unique d'une part et, d'autre part, l'Etat afin que les Burundais puissent placer les filles et les garçons au même pied d'égalité.

    v A l'endroit des Conjoints :

    - Savoir que le garçon et la fille sont d'une importance égale dans la famille. Cela éviterait les lamentations et les traumatismes faits aux femmes ayant engendré les filles uniquement.

    - Cultiver l'esprit d'égalité des sexes dans l'action éducative de leurs enfants. Les enfants tenus au même pied d'égalité entretiennent des relations d'entente avec leurs parents. Il n'y aura pas des lamentations des filles et favorisera le partage du patrimoine familial.

    - Savoir que les maris sont responsables de la naissance des garçons et des filles pour qu'ils ne maltraitent pas leurs épouses. Les maris qui savent bien qu'ils sont responsables du sexe des enfants ne maltraitent pas leurs femmes. Ils comprennent facilement pourquoi tel enfant est né avec tel ou tel autre sexe.

    - Militer en faveur des droits de la femme dans la conquête de l'égalité des sexes. Tous les Hommes devraient êtreégaux,ce qui n'est pas le cas au Burundi. L'égalité entre les hommes et les femmes devrait êtreréclamée par ces dernières.

    - Rompre avec les mentalités qui déconsidèrent les filles. Puisque tous les enfants sont égaux, les parents sensibilisés comprendront l'importance des filles et, par conséquent, elles seront traitées de la même manière que les garçons.

    -Créer un environnement familial socialisant pour le fils unique et ses soeurs. L'environnement familial crée un climat d'entente dans la fratrie et diminue de ce fait la jalousie fraternelle.

    - Jouer chacun son rôle en affichant chaque fois amour et autorité suffisants et équilibrés pour tous les enfants afin d'harmoniser le développement affectif de ces derniers. Ceci aidera les parents à vivre en harmonie avec les enfants et ces derniers auront une affection équilibrée et suffisante.

    v Aux fils uniques :

    - Ne plus profiter de leur unicité pour se rendre insupportables et eviter, ainsi, des comportements capricieux.

    - Participer à toute activité pour s'adapter à une vie autonome. Le fils unique n'aura aucune difficulté dans sa vie future. Il sera capable d'organiser sa vie et de résoudre lui-même les problèmes rencontrés.

    - Prendre des responsabilités et ne plus se comporter comme un petit roi. La responsabilité est un atout pour l'enfant de se préparer pour prendre conscience dans l'exercice des travaux. Sinon, le fils unique qui se comporte comme un petit roi est gâté.

    v A l'Etat

    -Promouvoir la politique de l'égalité des sexes pour diminuer les conflits relationnels tenant au sexe. La mise en place d'une loi régissant l'égalité des sexes diminuera les conflits souvent évoqués pendant l'héritage. Cette loi aidera les femmes à réclamer les biens de leurs parents. Peu à peu, les garçons et les filles comprendront qu'ils sont égaux.

    -Sensibiliser la population pour qu'elle puisse attribuer aux garçons et aux filles la même valeur familiale et qu'elle puisse éradiquer les mentalités qui visent à considérer les enfants suivant leurs sexes. La sensibilisation de la population à partir des sociologues et anthropologues vaincra le traditionalisme qui discrimine les femmes et, les hommes et les femmes comprendront de ce fait qu'ils sont égaux.

    -Etablir la loi protégeant les femmes qui sont maltraitées voire répudiées pour avoir mis au monde des enfants de tel sexe. Les femmes qui ont mis au monde seulement les filles ne devraient pas être maltraitées par leurs époux. La loi viendrait protéger ces femmes maltraitées tout en punissant les auteurs.

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    II. Dictionnaires

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    III. Mémoires, Revues et autres Documents

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    ANNEXES

    ANNEXE I: PRESENTATION ET CONSIGNE EN KIRUNDI

    Mwaramutse,

    Nitwa Siriyako CIZEROCIMANA, ndi umunyeshure wo mw'ishure Kaminuza y'Uburundi, ndiko ndakora igikorwa co guheza ivyigwa. Naje ndabatumbereye mwebwe, abavyeyi canke umuvyeyi, kugira mumbwire ku bijanye n'umuhungu wanyu w'ikinege, na canecane ikibanza mumuha ngaha mu muryango. Inkuru muza kumpa zirakenewe cane, n'ico gituma nitwaje aka gakoresho ko gufata amajwi kugira inyishu muza gutanga kuri ibi bibazo ndazibike neza. Ndabemereye kandi ko ivyo tuvugana atawuzomenya uwabivuze. Murakoze !

    ANNEXE II : GUIDE D'ENTRETIEN EN KIRUNDI

    A. IDENTIFICATION DE L'ENQUETE

    Abavyeyi bose :

    Umupfakazi :

    Imyaka y'umugabo :

    Imyaka y'umugore :

    Imyaka y'umuhungu :

    Igitigiri c'abana :

    Igitigiri c'abakobwa :

    B. IBIBAZO

    ? Ukumenya uko imigenderanire iri hagati y'abavyeyi, abakobwa n'umuhungu umwe yifashe.

    1. Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu n'abakobwa yifashe?

    - Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati yanyu n'umuhungu yifashe?

    - Mwotubwira uko imigenderanire iri hagati y'abakobwa n'umuhungu yifashe?

    2. Kubera iki hari urukundo rwinshi hagati yanyu n'umuhungu wanyu ?

    3. Ni igiki gituma habura umwumvikano hagati yanyu n'abakobwa banyu?

    4. Ni igiki cotuma haba umwumvikano hagati y'abagize umuryango ?

    ?Kumenya uko umuhungu afashwe bivanye n'ubunege bwiwe.

    5. Dufatiye ku bunege bw'umuhungu, ni iki mumugirira mutagirira abakobwa ?

    6. Bivanye n'uko mufashe umuhungu, mumuha ikibanza ikihe aha mu muryango?

    7. Dufatiye kuvyo mugirira umuhungu, abakobwa bo mubagirira iki ?

    ?Kwerekana inkurikizi ku muhungu nomu muryango.

    8. Ni izihe nyifato nziza z'umuhungu bivanye n'ivyo mumugirira hamwe n'ivyagirirwa n'abashikiwe?

    9. Ni izihe ngorane umuhungu wanyu ahura muri uyu muryango?

    10. Ni izihe nyifato mbi ziva ku bunege bwiwe no kukuntu mumufata?

    ? Ugutanga ingingo ngenderwako mu muryango kugira hatuzwe ivyiyumviro bifatiye kugacinyizo k'ibitsina.

    11. Ni izihe mpanuro mwoha umuhungu wanyu kugira ategure neza kazoza kiwe?

    12. Ku bwanyu, abavyeyi bokora iki kugira indero y'abana itere imbere na canecane iy'umuhungu umwe?

    13. Ni izihe mpanuro mwoha abavyeyi kugira haranduranwe n'imizi ivyiyumviro bifatiye kugucinyiza igitsinakobwa mu muryango?

    14. Ni izihe ngingo mwosaba ko Leta ishira mungiro kugira ituze agacinyizo kagirirwa igitsinakobwa?

    ANNEXE III : PRESENTATION ET CONSIGNE EN FRANÇAIS.

    Bonjour ;

    Je réponds au nom de Cyriaque CIZEROCIMANA, je suis étudiant de 2e cycle à l'Université du Burundi, je suis en train de faire un travail de fin des études universitaires. Je m'adresse à vous, parents, pour que vous me parliez de la situation de votre fils unique et plus particulièrement de la place que vous lui accordez ici dans votre famille. Ainsi, les informations que vous allez me livrer sont utiles, c'est pourquoi je me suis muni de cet appareil enregistreur pour garder les réponses que vous allez donner à mes questions. Je tiens également à vous garantir l'anonymat de vos propos. Je vous remercie !

    ANNEXEIV : GUIDED'ENTRETIENENFRANÇAIS

    A. IDENTIFICATION DE L'ENQUETE

    Couple vivant :

    Veuf ou veuve :

    Age du mari :

    Age de l'épouse:

    Age du fils :

    Nombre d'enfants :

    Effectif de filles :

    B. LES QUESTIONS

    ? Les types de relations entre les parents, les filles et le fils unique

    1) Pouvez-vous nous parler de vos relations avec vos filles?

    -Pouvez-vous nous parler de vos relations avec votre fils?

    -Pouvez-vous nous parler des relations entre votre fils et vos filles?

    2) Pourquoi y a-t-il une affection profonde entre les parents et leur fils unique ?

    3) Qu'est-ce qui est à l'origine de la mésentente entre les parents et leurs filles dans une telle famille ?

    4) Qu'est-ce qui fait que les relations soient bien organisées entre les membres de la famille ?

    ? Les traitements affectifs réservés au fils à cause de son unicité.

    5) En tenant compte de l'unicité du fils, quels sont les traitements que vous lui réservez contrairement aux filles?

    6) En tenant compte des traitements du fils, quelle est la place qu'on lui accorde ici dans cette famille?

    7) A partir de ce que vous faites pour votre fils, qu'est-ce que vous faites pour les filles seulement?

    ? Les conséquences pour le fils et pour la famille.

    8) Quels sont les bons comportements du fils résultant de vos traitements et ceux de ses soeurs?

    9) Quels sont les problèmes rencontrés par le fils unique dans votre famille ?

    10) Quels sont les mauvais comportements résultant de son unicité et des traitements qu'il subit?

    ? Les précautions à envisager dans une telle famille pour éviter le préjugé fondé sur la discrimination des sexes?

    11) Quels sont les conseils donnés à votre fils unique pour qu'il puisse bien préparer sa vie future?

    12) Selon vous, que doivent faire les parents pour réussir à l'éducation de leurs enfants en général et du fils unique en particulier ?

    13) Quelles sont les mesures proposez -vous aux parents pour éviter le préjugé fondé sur la discrimination du sexe féminin?

    14)Quelles sont les mesures proposez-vous à l'État pour éviter le préjugé fondé sur la discrimination du sexe féminin?






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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle