II. HYPOTHESES
A la question de savoir quelles sont les contraintes de la
justiciabilité des DESC, il faut d'emblée préciser que
plusieurs facteurs peuvent être soulevés.
Comme en droit congolais, la fonction de dire le droit et de
faire justice revient exclusivement au juge, dans le cas d'espèce, il
demeure le premier obstacle. Le juge congolais semble ne pas prendre en compte
les DESC comme des « véritables » droits.
Comparativement aux droits civils et politiques où il existe une
jurisprudence abondante et encourageante, le juge congolais ne prend souvent
pas en compte les DESC. Dans la plupart des cas, il rejette les arguments des
justiciables lorsqu'ils reposent leurs prétentions sur le PIDESC. Ce qui
montre qu'il n'est pas suffisamment formé sur la protection des DESC.
De par son inaction, il semble s'inscrire encore et
malheureusement dans la logique des années quatre-vingt-dix tendant
à nier la justiciabilité des DESC. Cette passivité est
assimilable au déni de justice. Saisi par les individus au moyen des
recours individuels ou par les associations de défense des droits de
l'homme par le biais des recours collectifs, le juge congolais ne répond
pas favorablement. Le juge devrait au minimum se limiter, comme font les juges
dans plusieurs pays, à établir des règles minimales que
l'Etat devait prendre allant dans le sens de l'effectivité et de
l'application des DESC par l'Etat.
Le juge reste retissant quant au sort à donner aux
recours judicaires relatifs aux règles des droits de l'homme en
général et celles des droits économiques, sociaux et
culturels en particulier.
Les défenseurs des droits de l'homme et les
justiciables constituent aussi un frein à la justiciabilité des
DESC. Pour les défenseurs des droits de l'homme, ils ses limitent
à défendre plus les droits d'ordre politiques. Soit ils
méconnaissent les DESC, soit ils sont encore inscrits dans la
différenciation d'ordre idéologique des années soixante
entre le bloc socialiste_ (qui soutenait les DESC) et le bloc occidental_ (qui
était pour les droits civils et politiques). Ce raisonnement peut
paraitre vrai car la plupart des défenseurs des droits de l'homme sont
de la deuxième école.
Les justiciables sont aussi responsables car ils ne prennent
pas souvent le courage d'introduire des recours lorsque c'est les DESC qui sont
violés. Ceci est la conséquence de leur manque d'information. Un
droit dont on ne réclame pas exécution ou application par les
organes habilités risque de paraître inexistant.
A la question de savoir quelles sont les voies de sortie face
à ces différentes contraintes, la réponse pourrait varier
selon qu'on est juge, justiciable ou défenseur des DH.
Pour le juge, les textes juridiques existent bel et bien. Le
problème ici est leur application. Il n'est donc pas question de voter
une loi spéciale. Il faut plutôt la formation spécifique et
la prise de conscience. Même si l'on parle de la formation, il est une
présomption que tout juge congolais est censé connaitre l'arsenal
juridique du pays. Cela étant, il ne peut prétendre
méconnaitre l'existence des DESC ni leur caractère obligatoire
qui est certes encours d'évolution mais qui a déjà des
fondements solides. Cette formation approfondie, à l'instar de celles
organisées dans les cadres des droits civils et politiques, permettrait
au juge congolais de se ressaisir et de ne pas rejeter catégoriquement
les réclamations introduites par les citoyens dans le cadre des DESC
mais plutôt de les examiner cas par cas, d'en définir la
portée et enfin donner sa position en tenant compte de chaque droit
économique et social et de sa spécificité.
Pour les défenseurs des droits de l'homme, ils doivent
introduire dans leur champ d'application et dans leurs revendications les DESC
et les donner la même considération comme ils font pour les droits
civils et politiques.
Pour les justiciables, ils doivent savoir que les DESC font
partie des droits justiciables. Et cela doit se faire par les sensibilisations
de masse par les défenseurs des droits de l'homme. Les pouvoirs publics
ont déjà montré leur limite. Il serait aberrant de
s'attendre à leur aide pour la vulgarisation des DESC. Mais le
disfonctionnement de la justice en RDC laisse les justiciables perplexes. Ces
derniers n'ont quasiment aucune confiance à la justice.
La non application des textes juridiques en République
démocratique du Congo est une question très complexe.
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