WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La problématique de la mise en œuvre des recours judiciaires en cas de violation des droits économiques, sociaux et culturels en RDC.


par Christophe KISAMA SHINDANO
Université officielle de Bukavu - Licence en droit 2019
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section II. Portée juridique des DESC et obligations des Etats parties au pacte

« La justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels a fait l'objet d'une longue controverse qui, à bien des égards, a empêché ces droits d'atteindre leur véritable dimension juridique 42(*)».

Une analyse distincte de ces deux points nous permettra de bien décortiquer cette matière et montrer, bien que d'une manière séparée, la pertinence qui existe et l'évolution des débats sur les DESC et sur leur place dans la hiérarchie des normes juridiques.

§. 1 Portée juridique

La portée juridique des droits économiques, sociaux et culturels va varier en fonction de deux éléments : la nature de l'instrument qui les contient et la formulation des dispositions qui les expriment. En ce qui concerne le premier élément, l'énonciation des sources des droits économiques, sociaux et culturels a montré qu'ils étaient contenus dans des traités internationaux et des actes d'organisations internationales. Si le caractère juridiquement obligatoire des premiers est clair, pour les seconds, cette question apparaît plus complexe43(*).

Le juge Tanaka de la Cour internationale de justice affirme, dans son opinion individuelle dans l'Affaire du Sud-Ouest africain en 1966, que la protection des droits de l'homme relève du jus cogens44(*). Dans l'Affaire de la Barcelona Traction en 1970, le juge Ammoun de la CIJ décrivait la protection des droits humains comme une norme juridique valable au même titre que les autres sources traditionnelles du droit international. Il rappelait également qu'en ratifiant massivement la Charte des Nations Unies45(*), les États font des principes apparaissant dans son préambule - desquels il faut compter les droits fondamentaux de l'homme - des règles de jus cogens46(*). Puis, John Humphrey soutenait en 1981 que les droits humains font partie de la coutume internationale47(*), bien avant que la Déclaration de la Conférence de Vienne ne confirme en 1993 qu'au-delà du fait que la promotion et la protection de tous les droits de l'homme est une préoccupation légitime de la communauté internationale, « tous les droits de l'homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés »48(*). Les difficultés qui se dressent pour mesurer la portée juridique des droits économiques, sociaux et culturels représentent certes des obstacles à surmonter, mais les progrès effectués en ce domaine au cours de la dernière décennie dépassent largement tout ce qui avait été réalisé auparavant.49(*)

Dès lors que leur valeur juridique est suffisamment prouvée, et qu'il parait indéniable que les droits économiques, sociaux et culturels ont la même valeur juridique que les droits civils et politiques, la question de leur justiciabilité valle alors son pesant d'or.

A. Questions relatives à la justiciabilité des DESC

Alors que le déni des droits économiques, sociaux et culturels (DESC) se poursuit et s'intensifie dans le monde - tant dans les pays riches que dans les pays pauvres - il apparaît indispensable de s'interroger sur la garantie et la justiciabilité de ces droits à travers les mécanismes juridictionnels et quasi-juridictionnels50(*).

Les systèmes régionaux des droits de l'homme - comme il en existe en Europe et en Amérique - reflètent également la notion selon laquelle ce sont surtout les droits civils et politiques qui sont invocables, ce qui limite la liste des droits pour lesquels un mécanisme de plaintes est prévu51(*).

Dans le document intitulé «ABC des droits de l'homme », le Département Fédéral des affaires étrangères de la Suisse écrit: «On accorde souvent à ces droits (DESC) une valeur moins contraignante parce que, contrairement aux droits civils et politiques, ils ne sont pas suffisamment concrets pour être justiciables, c'est-à-dire qu'il est difficile de les invoquer en justice»52(*).  Il affirme, ce qui est positif, que les droits économiques, sociaux et culturels sont les droits de l'homme qui « offrent actuellement le potentiel de développement le plus important ».

Cette tendance, de nier la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels, a, depuis, évoluée. Les mécanismes juridictionnels et extra juridictionnels ont permis de faire évoluer la tendance visant à nier la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels.

Les adversaires de la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels affirment qu'ils sont si flous ou vagues qu'il n'est pas possible d'en définir suffisamment le contenu, d'où l'impossibilité de les faire valoir devant des tribunaux.

Selon cette opinion, tandis que les droits civils et politiques indiquent clairement les conditions à remplir pour les respecter, les droits économiques, sociaux et culturels ne fixent que des objectifs souhaitables et théoriques; leur contenu varie et manque de l'exactitude nécessaire pour servir de base à une décision judiciaire [...] Il convient d'examiner avec soin cet argument. Si le contenu des droits économiques, sociaux et culturels était imprécis et ne correspondait pas à une obligation juridique spécifique, un juge ne pourrait guère en ordonner la réalisation [...] Cependant, la question du contenu et de la portée d'un droit ne se pose pas uniquement pour les droits économiques, sociaux et culturels. On peut considérer que le contenu de tout droit n'est pas assez précis, que ce droit soit qualifié de «civil», «politique», «social», «économique» ou «culturel» ».53(*)

S'ils ne sont pas justiciables, les droits économiques, sociaux et culturels risquent, en effet, de rester de simples voeux pieux. A fortiori dans le contexte actuel où, en dépit du degré de développement de nos sociétés, la crise économique persistante fait peser de nouvelles incertitudes sur des droits basiques que nous pensions en voie d'être garantis : droit au logement, au travail, à la santé, à un niveau de vie suffisant54(*).

Après avoir fait le constat qu'en Droit international, les droits économiques, sociaux et culturels appartiennent à l'ensemble des droits de l'homme de la même manière et au même rang que les droits civils et politiques qui, eux, bénéficiaient déjà d'un Protocole facultatif, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté le 10 décembre 2008 un Protocole facultatif se rapportant aux droits économiques, sociaux et culturels55(*).

Partant de cette même idée, leur justiciabilité ne devait être, de ces jours, sujet à controverse.

* 42 Idm, p.26.

* 43 Nicolas JAGOBS, op.cit. P., 31.

* 44 « [...] il n'y a pas de doute que l'on peut considérer le droit relatif à la protection des droits de l'homme comme relevant du jus cogens ». Affaires du Sud-Ouest africain (Éthiopie c. Afrique du Sud ; Liberia c. Afrique du Sud), [1966] C.I.J. rec. 6 à la p. 298, juge Tanaka, dissident.

* 45Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, R.T. Can. 1945 no 7.

* 46 Précisons que dans la Charte des Nations Unies, les droits fondamentaux ne sont pas spécifiés individuellement, mais bien présentés comme un ensemble. Affaire de la Barcelona Traction, Lightand Power Company (Belgique c. Espagne), [1970] C.I.J. rec. 3 aux pp. 301, 304, juge Ammoun. Toujours en lien avec les droits humains, cet arrêt est aussi célèbre pour avoir déclaré certaines obligations incombant aux États comme erga omnes, c'est-à-dire applicables à l'égard de tous, même si elles ne font pas l'objet d'un traité entre États. Ces protections visent notamment à interdire, en tout temps et en tout lieux, les actes d'agression, le génocide, l'esclavage et la discrimination raciale. Ibid. à la p. 32. Voir également Theodor Meron, « On a Hierarchy of International Human Rights » (1986) 80 : 1 Am. J. Int'l L. 1.

* 47 John Humphrey, « La nature juridique de la Déclaration universelle des droits de l'homme » (1981)

12 : 2 R.G.D. 397.

* 48Déclaration de la Conférence de Vienne, supra note 17, art. 4-5.

* 49 Nicolas JAGOBS, op.cit. P., 44.

* 50 Fondation René CASIN, la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels, 2ème session annuelle de formation en Droit International des Droits de l'homme Yaoundé, 10 - 15 avril 2017, p2.

* 51 Commission internationale de juristes, les tribunaux et l'application des droits économiques, sociaux et culturels : étude comparative d'expériences en matière de justiciabilité, série droits de l'homme et état de droit, no.2, P.5.

* 52 Département Fédéral des affaires étrangères, ABC des droits de l'homme, Berne, 2016 (2ème édition révisée), p37.

* 53 Commission internationale de juristes, op.cit.,p17.

* 54 ALAIN BOCQUET, au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi, Autorisant La Ratification Du Protocole Facultatif Se Rapportant Au Pacte International Relatif Aux Droits Economiques, Sociaux Et Culturels, Assemblée Nationale, 2013,p.7.

* 55Pierre-Félix KANDOLO ON'UFUKU wa KANDOLO, du système congolais de promotion et de protection des droits de l'homme contribution pour une mise en oeuvre du mécanisme institutionnel spécialisé, mémoire présenté en vue de l'obtention du grade de diplômé d'études approfondies en droit, Université de Lubumbashi, 2011, p 55.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984