VI. Revue de la littérature
Tout travail de recherche s'inscrit dans un continuum et peut
être situé dans ou par rapport à des courants de
pensées qui le précèdent et l'influencent,
précisent Raymond Quivy et Luc Campenhoudt (12). Aucun
chercheur ne peut faire avancer ses recherches sans s'appuyer sur les travaux
des autres, passés ou présents. Et procéder à ce
que Michel Ghiacobi et Jean Pierre Roux appellent la lecture des recherches
préalables (13). Pour ces derniers, il est normal et
nécessaire qu'un chercheur prenne connaissance des travaux
(11) MPONGO BOKANO BAUTOLINGA, E.,institutions politiques
et droit constitutionnel, Tome I , Théorie générale
des Institutions de l'Etat , EUA ., P.22.
(12) Cités par MATIABO ASAKILA , les méthodes
de recherche en science sociale , inédit , 2005 , p.13.
(13) Cités par SADI OMARI SIMBI , Analyse des
négociations politiques inter congolais de 1998 à 2003.
Mémoire de fin d'études. Faculté des Sciences, politiques
et administratives. Université de Kinshasa, 2003, P.9.
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antérieurs qui portent sur des objectifs comparables et
qu'il soit explicite sur ce qui rapproche et sur ce qui distingue son propre
travail de ceux des autres. Etant complexe, la problématique de la
décentralisation territoriale en RDC a fait l'objet de plusieurs
études théoriques et publications scientifiques. Beaucoup de
réflexions ont aussi été consacrées par
différents chercheurs sur cette question, études auxquelles nous
avons fait référence. En étudiant la littérature
relative au sujet, il nous a semblé que certains travaux méritent
d'être mentionnés. Tel est le cas de:
VUNDUAWE te PEMAKO (14) qui avait, de bonne heure
dégagé les aspects pratiques pour saisir en quoi la
décentralisation consistait sur les plans politique, économique
et juridique.
Sur le plan politique, la décentralisation est le
corollaire de la démocratie : elle favorise la formation du citoyen
(électeur ou élu) par le jeu et les enjeux d'une élection,
et lui permet de maîtriser les rouages du pouvoir et les astuces de la
technique (la psychologie aussi) par le jeu d'essai-erreur au niveau le plus
bas de la gestion des affaires publiques. La décentralisation
territoriale est ainsi perçue comme une véritable école
politique. Elle est en effet un facteur d'épanouissement de l'esprit
civique et peut permettre, dans le chef des citoyens, l'émergence d'une
conscience du pouvoir.
Sur le plan économique, décentraliser, c'est
assurer un développement harmonieux et équilibré des
provinces et autres entités territoriales décentralisées.
Le droit de prendre l'initiative en matière de programmes et projets de
développement économique, accordée aux entités
locales, ouvre la voie au privilège des programmes ou projets locaux,
donc à un développement national équilibré
(15). La décentralisation territoriale contribue ainsi
à la promotion de la participation locale qui, elle permet la
mobilisation et la valorisation des ressources locales ainsi qu'une meilleure
coordination des activités de développement, estime YambaYamba
(16).
(14) VUNDUAWE te PEMAKO. F., « La
décentralisation territoriale des responsabilités au Zaïres
. Pourquoi et comment ? II. La nouvelle organisation territoriale, politique et
administrative du Zaïre », in Zaïre - Afrique, n°
166, 1982.
(15) il est d'ailleurs prévu à cet effet une
caisse nationale de péréquation destinée à «
financer des projets et programmes d'investissement public, en vue d'assurer la
solidarité nationale et de corriger le déséquilibre de
développement entre les provinces et entre les autres entités
territoriales décentralisées. ( cfr article 181 de la
constitution du 18 février 2006). L'article 3 de cette même
Constitution consacre l'autonomie de gestion des ressources de ces
entités.
(16) YAMBA YAMBA ( S) , les dynamiques de la
décentralisation en RDC , Kinshasa , 2005 , Inédit.
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Sur le plan juridique ou administratif, décentraliser,
c'est transformer en centres d'impulsion les entités locales (provinces,
villes, communes et secteurs) qui cessent d'être de simples
circonscriptions policico-administratives pour devenir des personnes morales de
droit public, avec tous les attributs de la personnalité juridique :
ester en justice, exercer des prérogatives de puissance publique,
prendre des décisions adaptées au besoin des administrés
ou aux circonstances (17).
A ces trois aspects pratiques ou manifestations
concrètes de la décentralisation, Jean-Pierre Lotoy ilango Banga
et Mukika (18) ajoutent un quatrième qui résulterait
de sa pratique-même et revêtirait une coloration
opérationnelle, managériale pour ainsi dire. Sous cet angle,
décentraliser, c'est motiver. « En effet, le degré de
responsabilisation d'un individu .et la liberté d'action qui lui est
laissée peuvent être la base d'une prise de conscience capable de
stimuler sa productivité » (19). Cela est vrai aussi
pour une entité rendue autonome par le moyen dc la
décentralisation. Celle-ci constitue en effet un processus d'auto-
identification des autorités locales élues aux objectifs de
reconstruction au niveau local, motivées ainsi par le souci de leur
réélection.
C'est ainsi que Vunduawe te Pcmako, initiateur de la loi
congolaise sur la décentralisation de 19S2, souligne que « 1a
décentralisation » consiste au plan économique, «
à réclame un souffle nouveau au développement
économique régionale » et « la relance
économique » (20). Par la mobilisation des ressources
financières locales des entités de base.
Comme nous l'avons dit, la décentralisation
territoriale est un mode dc gestion des entités locales qui consiste en
une responsabilisation de celles-ci en ce qui concerne leur gestion quotidienne
pour laquelle elles bénéficient d'une autonomie de
décision.
Pour MWAYILA TSHIYEMBE ; saisir la portée de la
décentralisation ; force est de partir du postulat que l'Etat unitaire
ou indivisible , en tant que type idéal , repose sur trois axes :
unité du territoire ( il ne peut être fragmenté en
circonscription ), unité de la population ( elle forme un tout
appelé nation. Aucune partie de celle - ci ne peut
(17) idem
(18) LOTOY ILANGO BANGA ( J-P ) et MUKIKA ( E) , « pour
un nouveau type d'homme adopté à la décentralisation ,
contribution à l'analyse de l'efficacité de la territoriale au
Zaïre », in Zaïre - Afrique n°239, novembre 1989.
(19) LOTOY ILANGO BANGA ( J-P) , « la
décentralisation territoriale et le développement des
entités locales en République démocratique du Congo ( RDC)
en ligne à l'adresse fille///cb/Documents % 20 and % 20 settings /
Administration / Mes % 20 documents /Downoalds /6- Banga- reformes en RDC
.pdf., consulté 26 mai 2016
(20) E SAMBO KANGASHE ( J-L) , la décentralisation ,
élément indispensable au développement de la
République démocratique du Congo ...., op.cit. , P.1 ;
11
revendiquer une place particulière), unité de
l'organisation politique ( un seul pouvoir exécutif , un seul pouvoir
législatif , un seul pouvoir judiciaire ) (21).
Néanmoins, ce type idéal n'est réalisable nulle part. cela
explique quelque aménagement tels que la décentralisation
opérée en vue de rendre le type idéal opérationnel
, en fonction de l'histoire , de la culture , des aspirations des peuples en
cause , des réalités et des stratégies politiques des
acteurs. De ce fait, il conclut par dire que la décentralisation est un
système de transfert des compétences de l'Etat vers les
collectivités territoriales ou institutions publiques, pour qu'elles
disposent d'un pouvoir juridique et d'une autonomie financière.
En fin , nous pouvons conclure cette série avec
MAZYAMBO MAKENGO KISALA , A. qui voit en décentralisation , un
système d'organisation administrative dans lequel il y' a
création par la loi ou par le constituant lui- même , en dehors du
centre , d'autres niveaux de responsabilité et de décision. De ce
fait, elle consiste à confier des pouvoirs de décisions à
des organes autres que de simples agents du pouvoir géographique d'un
Etat ( voir à cet effet ; l'organisation de la Province , ville ,
Commune , Secteur et Chefferie ) (22)
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