Section 2 : La conception d'un dispositif
institutionnel en matière de démocratie
La nouvelle impulsion donnée à l'OIF depuis le
sommet de Hanoi en 1997 qui a été sanctionné par la mise
en place d'un Secrétariat Général, ne pouvait se confirmer
sans la rénovation normative et institutionnelle de l'organisation. Dans
cet ordre d'idées, l'OIF s'est employée non seulement à
rénover ses textes fondamentaux de manière à les adapter
à ses nouvelles missions, mais elle a aussi davantage mis en oeuvre sa
fonction normative en adoptant de nouveaux textes qui constituent le creuset de
la démocratie au sein de la Francophonie (paragraphe1).
Aussi, faut-il ajouter qu'au-delà des textes, des institutions
ont été créées afin d'affirmer la dimension
politique de la Francophonie (paragraphe2).
Paragraphe 1 : L'adoption de textes ambitieux.
Dans le souci d'être une actrice
privilégiée pour l'éclosion démocratique de ses
Etats membres, l'OIF a procédé d'abord à la
rénovation de sa Charte (A). Ensuite elle a
renforcé cet instrument avec l'adoption de deux textes fondamentaux : la
Déclaration de Bamako et la Déclaration de Saint Boniface (B).
28
77 MAILA Joseph, « la notion de crise en Francophonie :
entre dispositif normatif et traitement politique », La Revue
Internationale des Mondes Francophones, n°2, Printemps 2010, p.37.
A- Une Charte rénovée
Depuis la conférence fondatrice de Niamey en 1970, la
Francophonie multilatérale a progressé par étapes. Son
essor a suscité un développement des activités qu'il
devenait nécessaire de rationaliser pour mieux concentrer ses moyens. De
ce point de vue, la première démarche pour la
concrétisation du projet de la Francophonie politique passe par
l'adoption d'une charte. En 1995, à Cotonou (Bénin), moins de dix
ans après le 1er Sommet de la Francophonie réuni
à Versailles (France) en 1986, la Conférence des chefs
d'État et de gouvernement des pays ayant le français en partage
décide de donner à la Francophonie sa pleine dimension politique
en créant la fonction de Secrétaire Général,
appelé à devenir la «clé de voûte du
système institutionnel francophone». En 1997, à Hanoi
(Vietnam), le VIIè Sommet adopte la première Charte de
la Francophonie et élit le premier Secrétaire
Général, M. Boutros Boutros-Ghali (1997-2002).
Afin de donner amplement à l'organisation les moyens de
ses actions, une rénovation de la Charte de Hanoi a été
engagée. A ce propos, le nouveau Secrétaire Général
Abdou Diouf, élu en 2002 rappelait dans son discours lors de la
séance d'ouverture de la Conférence ministérielle de la
Francophonie, réunie à Antananarivo (Madagascar) les 22 et 23
novembre 2005 que: «préparer l'avenir, renforcer la
Francophonie, la rendre plus dynamique, plus cohérente et plus visible :
voilà ce que nos chefs d'État et de gouvernement nous avaient
demandé à Ouagadougou. Pour y parvenir dans les meilleures
conditions, ils nous ont demandé de parachever la réforme
institutionnelle décidée lors des Sommets de Cotonou et de Hanoi
et nous ont donné en particulier le mandat de mieux fonder juridiquement
l'Organisation internationale de la Francophonie et de mieux définir le
cadre d'exercice des attributions du Secrétaire
général»78. La Charte révisée
de la Francophonie adoptée à l'issue de cette
conférence, «met en place un nouveau dispositif institutionnel
qui simplifie et rationalise
29
78 DIOUF Abdou, discours lors de la séance d'ouverture de
la conférence ministérielle de la Francophonie à
Antananarivo au Madagascar les 22 et 23 novembre 2005.
les structures et les modes de fonctionnement de la
Francophonie multilatérale»79. Cette réforme
est le résultat de la volonté constante des chefs d'Etat et de
gouvernement de mieux organiser la communauté francophone et de
valoriser sa place dans les relations internationales.
Le préambule de cette nouvelle Charte précise
que les chefs d'État et de gouvernement, réunis en sommet
à Ouagadougou en 2004, «ont pris la décision de
parachever la réforme institutionnelle afin de mieux fonder la
personnalité juridique de l'Organisation internationale de la
Francophonie et de préciser le cadre d'exercice des attributions du
Secrétaire Général». Elle institue80
donc une seule et même organisation et « donne à l'Agence
de coopération culturelle et technique, devenue Agence de la
Francophonie, l'appellation d'Organisation internationale de la
Francophonie». Dans la mesure où, «le resserrement du
dispositif institutionnel francophone est un aspect important de la
réforme et le gage d'une exécution plus cohérente et plus
efficace des décisions prises par les instances de la
Francophonie», la nouvelle Charte de la Francophonie reconnaît
trois instances : la Conférence des chefs d'État et de
gouvernement des pays ayant le français en partage, la Conférence
ministérielle de la Francophonie (CMF) et le Conseil permanent de la
Francophonie (CPF). Cette réforme institutionnelle initiée
à Antananarivo a été ainsi qualifiée comme
« un puissant adjuvant pour décupler et faciliter les
interventions de l'organisation, en particulier dans le secteur politique, en
général et plus précisément dans celui
afférent aux initiatives de paix»81.
Toutefois, cette avancée reste incomplète sans
la construction d'une véritable doctrine francophone de la
démocratie et de la paix. C'est ce qui explique les multiples
négociations engagées par les Ministres et chefs de
délégation des Etats et
79 Rapport du Secrétaire Général de la
Francophonie (2004-2006), une Francophonie modernisée, p.124.
80 Ibidem, p.124.
30
81 NGARLEM Toldé, La Francophonie et la
résolution des conflits: réflexion sur la notion de tiers,
Lyon, Université Jean Moulin (Lyon 3), thèse de doctorat soutenue
le 20 décembre 2012, p.69. La nouvelle Charte issue des travaux de la
Conférence ministérielle de Antananarivo de novembre 2005,
mettait fin à la dyarchie institutionnelle que la Charte de Hanoi avait
laissé subsister. Car, en dépit de la création d'un poste
de Secrétaire Général de la Francophonie, assisté
d'un Conseil Permanent de La Francophonie, subsistait toujours l'ACCT, devenue
Agence de la Francophonie, qui sera rebaptisée AIF lors du Sommet de
Hanoi en 1997 puis OIF en 2005, seule disposant de la personnalité
juridique internationale sur la base de sa convention constitutive.
Gouvernements des pays ayant le français en partage et
qui ont abouti à l'adoption des déclarations de Bamako et de
Saint Boniface.
|