Conclusion
Possibilité offerte par le web 2.0, la production
participative basée sur le financement des internautes fait figure de
nouveau modèle économique en parallèle de la production
par « les professionnels ». Désormais, «
l'internaute-producteur » intervient en amont de la commercialisation
d'une « oeuvre musicale » et participe à la chaîne de
création de valeur. N'étant plus qu'un simple consommateur, il
devient « un acteur » qui choisit de financer l'album ou le single
d'un artiste.
Une quinzaine de labels communautaire sur le
marché testent un créneau porté par un contexte
technologique (évolution des TIC , techniques de l'information et de la
communication) et sociologique (« la culture de la participation »)
favorables à leur développement.
De plus, dans un contexte de crise du disque, pendant
lequel les risques financiers sont minimes, la production communautaire ou le
financement participatif apparaît comme une opportunité, comme
« une valeur refuge » puisque le risque est ici supporté par
les internautes.
Cependant, les start-up semblent être, encore,
à la recherche d'un équilibre de « leur système
» dont dépendrait le facteur « visibilité »
apporté par l'émergence d'une « tête d'affiche ».
Dans ce secteur concurrentiel, la majorité des sites cherchent encore
une stabilité économique. En effet, depuis leur apparition en
2007, « le parcours économique » des sites de production
participative semble inégale, les plus stables d'entre eux
déclinent « le système » dans divers secteurs,
développent des projets à l'international alors que d'autres
peinent à s'inscrire dans la durée, connaissent des
difficultés financières ou encore la faillite. Le foisonnement
des sites participatifs qui s'apparentait à un dynamisme du secteur
laisse peu à peu place à une tendance
oligopolistique.
Tremplin incontestable pour les artistes, la production
participative n'est pas, pour autant, une solution à la crise du disque.
Autrement dit, « la faille » ne se trouve pas au niveau de la
production, qu'elle émane des internautes ou bien des professionnels,
elle sera confrontée à la même problématique : la
baisse progressive de la vente du disque, due à l'ère
numérique. Pour un artiste, il est certes opportun de
bénéficier d'un financement participatif, mais il doit prendre la
mesure des désillusions que peut générer ce
système. D'un point de vue plus optimiste, la production communautaire
est un formidable moyen, pour le « nouveau talent », de
bénéficier d'une visibilité, même minime soit-elle.
De plus, la diffusion numérique des oeuvres de ces artistes, faite sur
le site du label participatif et grâce aux partenaires (Réseau
Believe (Itunes, Fnac etc.)) semble compenser
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le manque à gagner du support physique. Ce mode de
financement ne devrait pas être une vu comme une fin en soi, mais
plutôt comme un moyen, parmi tant d'autres, de proposer au public sa
création.
Et la valeur artistique dans tout ça ? C'est la
question que pose certains spécialistes de la musique qui s'insurgent
contre l'idée de donner « le pouvoir » à « des
amateurs » de juger la qualité artistique d'une création,
grâce à son financement . Débat récurrent depuis
l'apparition du web 2.0 et qui fait écho à la thèse,
quelque peu radicale d'Andrew Keen, qui traite de l'impact destructeur de la
révolution numérique sur notre culture et nos valeurs. Cependant,
cette interrogation semble inappropriée au cas de la production
communautaire.
En effet, d'une part l'internaute apparaît comme un
« investisseur », sa part dans l'aspect artistique est inexistante.
D'autre part, dans une industrie de la musique qui vise à satisfaire un
plus grand nombre (importance de l'objectif de vente), le fait de demander
« l'avis », en amont de la commercialisation, à un «
échantillon » du public n'est pas contradictoire. Cette posture
est, bien sûr, rassurante pour les entrepreneurs que sont les labels
communautaires.
Si le choix des internautes est légitime, la
tendance spéculative d'un « système » basé sur
la mise d'argent,est quant à elle, contrariante. Même si la
motivation première des « internautes-producteurs » est la
satisfaction de participer à une aventure artistique, à la
découverte de nouveaux talents, l'appât du gain pourrait à
long terme, si les sites de production génèrent des revenus
importants, occulter le jugement personnel, affectif, peut être
même au détriment d'une qualité artistique.
L'avenir de la production participative semble lié
à la « filière classique », c'est à dire aux
majors (en tant que distributeurs), labels indépendants (en tant que
co-producteurs). Si la première se stabilise grâce à ces
acteurs de l'industrie de la musique, la seconde trouve dans le financement
participatif un moyen de limiter les risques et de revendiquer la
légitimité d'un artiste choisi par les internautes. Un
modèle hybride émanant des partenariats de ces deux
filières est plausible.
Interrogé pour les besoins de ce mémoire,
David Gourmandie, manager du groupe The Enjoys affirme « vu que la «
génération du web » va s'amplifier, en plus il y a une
remise en question du téléchargement, donc il y aura un
encouragement dans le sens de la production participative»
Selon, André Garceau, producteur à GHAT
PRODUCTION, basé à Bordeaux « C'est un nouveau modèle
qui trouvera sa place dans le paysage du futur mais ne sera pas le
modèle unique du futur »
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Toutefois, ce rapprochement pourrait, à long
terme, dissuader certains internautes qui « s' insurgent » contre le
« système dominant » des majors dans l'industrie du
disque.
Désigné comme étant un soutien aux
artistes et plus généralement à la création
musicale, le financement 2.0 : auto-production (production de l'artiste sans
intermédiaire), production communautaire, est soumis à
l'impôt sur les bénéfices non commerciaux payé par
les internautes. Les acteurs de la filière souhaitent une
défiscalisation des retours sur investissements au même titre que
le mécénat dans l'Art.
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