1-3-2-3- Types d'habitats dans le bassin versant
béninois de la Pendjari
Du fait de cette diversité des groupes socioculturels,
il y a une variation notable du type d'habitat dans le bassin versant de la
Pendjari. En effet l'habitat est dispersé au sud et au sud-ouest du
bassin et groupé au nord et nord-est. La répartition de l'habitat
est liée à la répartition des peuples dans le bassin.
L'habitat dispersé est observé dans les communes
de Natitingou, Boukombé et de Kouandé notamment où le
peuple Otammari est majoritaire. L'habitation de ce peuple est
communément appelée Tata somba (photo 1).
Photo 1: Tata somba à Koutagou (Commune de
Boukombé)
Cette photo présente une tata somba à trois
chapeaux. Les chapeaux des extrémités gauche et droite sont des
greniers et le chapeau en avant-plan est une chambre. Une seconde chambre est
cachée en arrière de celle en avant-plan.
Source : Cliché IDIETI, 2011
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Pour construire un Tata somba, les populations se servent des
espèces végétales collectées sur place. Les
graminées (Schizachyrium sanguineum, Loudetia togoensis et Loudetia
simplex) sous forme de paille, sont surtout utilisées dans la
confection des toîtures. Les ligneux (Afzelia africana,
Crossopteryx febrifuga, Daniellia oliveri, Erythrophleum
africanum, etc.) servent de poutres dans l'agencement des charpentes
(Tenté, 2005).
Les autres peuples (les Waaba, Berba, Gulmaceba,
etc.) s'installent souvent en habitat groupé notamment dans les communes
de Toukountouna, Tanguiéta, Matéri et Cobly. Ce type d'habitat
est la caractéristique surtout des centres urbains de toutes les
communes. Il est constitué de regroupements de cases dans une concession
rectangulaire. L'espace entouré par les différentes cases de la
concession est l'endroit où se déroule l'essentiel des
activités de ménage.
On y rencontre également les campements, type d'habitat
des Peuls et des pêcheurs (Photo 2).
Ce sont les habitations peu étendues souvent à
l'écart des villages et des autres peuples (Tenté, 2005).
Photo 2 : Campement de pêcheurs à Porga
(Commune de Matéri)
En arrière-plan, se trouve les cases du campement des
pêcheurs. Au premier plan, on observe un champ de case en
jachère.
Source : Cliché IDIETI, 2010
Cette organisation socioculturelle dans le bassin versant
béninois de la Pendjari constitue un facteur important dans le processus
de la dynamique des états de surface du bassin à travers les
activités des populations et autres composantes socio-économiques
de la région.
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1-3-3- Caractéristiques socio-économiques du
bassin versant de la Pendjari
Il s'agit des activités menées par les
populations dans le bassin versant béninois de la Pendjari pour subvenir
à leurs besoins et contribuer à l'économie locale et
nationale.
L'agriculture est l'activité
primordiale des populations du bassin versant béninois de la Pendjari et
ses environs. Cette activité est plus pratiquée dans la portion
sud du secteur d'étude. C'est elle qui assure la sécurité
alimentaire des populations vivant dans le bassin (MAEP, 2009). Elle occupe
plus de 65% de la population active (INSAE, 2004). Les principales cultures
sont le sorgho, le mil, le maïs, le niébé, l'igname, le
manioc, le tabac. Le coton, l'arachide et plus récemment le riz sont les
cultures de rente. Il s'agit essentiellement d'une agriculture de subsistance
où les échanges et la monétarisation sont faibles. Les
produits vivriers sont vendus ou échangés sur les marchés
locaux, notamment le riz et l'arachide (MAEP, 2009). La sécurité
alimentaire peut devenir précaire pendant la période de soudure
(juillet à septembre). C'est une agriculture essentiellement pluviale
c'est-à-dire calquée sur le calendrier saisonnier des pluies.
L'élevage est la seconde
activité qu'exercent les populations du bassin versant béninois
de la Pendjari. Elle est pratiquée un peu partout dans le bassin versant
de la Pendjari. Son rôle principal est l'épargne et les animaux ne
sont vendus qu'en cas de besoin urgent en moyen financier (CeRPA Atacora,
2009). En général, ils ne sont consommés que lors des
cérémonies, des réceptions et jours de fête. Toutes
les familles essayent d'élever quelques petits ruminants et de la
volaille. L'élevage de bovins revêt deux caractères : un
élevage local concernant une race rustique très résistante
appelée « race somba » ; et un élevage transhumant
(Ouassa-Kouaro, 2008) pratiqué par les populations peulhs locales et
celles venues des pays limitrophes (Photo 3).
Photo 3 : Troupeau de boeufs des Peuhls à
Nanimbou (Tanguiéta)
On observe en avant plan les peuhl avec leur troupeau de bovins.
En arrière-plan se trouve la végétation du flanc d'un
chaînon de montagne.
Cliché : IDIETI, 2009
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La pêche est une longue
tradition chez les populations du bassin versant de la Pendjari notamment dans
les zones riveraines des cours d'eau importants (Photo 4). Elle est très
pratiquée dans le secteur nord et nord-ouest du bassin versant de la
Pendjari. Elle est pratiquée par les villageois et aussi par des
professionnels d'origines ghanéenne, malienne et nigérienne. Les
populations riveraines de la Réserve de la Biosphère de Pendjari
(RBP) sont autorisées selon le droit d'usage à pêcher dans
la Zone Cynégétique de Pendjari (ZCP) jusqu'à une certaine
limite (CENAGREF, 2009).
Photo 4 : Pêche dans la rivière Pendjari
à Porga
En avant plan se trouvent les pêcheurs en train de
placer le filet dans le cours d'eau ; au second plan s'étend la
rivière bordée par la galerie forestière.
Cliché : IDIETI, 2009
La chasse fait partie des coutumes
dans le bassin versant béninois de la Pendjari, surtout dans les
villages riverains de la RBP. Elle avait et a toujours des aspects
économiques et sociaux. Elle procure une quantité non
négligeable de protéines animales et génère des
revenus occasionnels, surtout aux jeunes en quête "d'argent liquide".
Ouassa-Kouaro (2008) écrit que « La pratique communautaire de la
chasse n'a pas fondamentalement pour objectif de ramener du gibier, mais joue
un rôle initiatique. Cette forme de chasse a donc une fonction sociale
».
En ce qui concerne le tourisme, le
bassin versant béninois de la Pendjari est le porte-flambeau du tourisme
national au Bénin. Le Parc le plus visité par les touristes
étrangers se trouve dans le bassin versant béninois de la
Pendjari. Toute forme de tourisme y est pratiqué :
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tourisme de vision, chasse sportive,
écotourisme. Outre la faune du Parc National de la Pendjari, les
paysages des falaises de l'Atacora, la diversité ethnique (ou
socioculturelle), les villages typiques, les architectures traditionnelles, la
découverte de la nature (avifaune, végétation, etc.) ainsi
que les cascades constituent des attraits touristiques éprouvés
dans le bassin versant de la Pendjari.
Mais, il faut noter que le tourisme n'est pas une
activité économique traditionnelle exercée par les
populations autochtones. Ce n'est qu'à nos jours que les services en
charge de la gestion du Parc impliquent les populations et on observe de plus
en plus une organisation des autochtones sur certains sites des attraits
touristiques.
Les populations du bassin versant de la Pendjari pratiquent la
cueillette pour l'alimentation, la médicine
traditionnelle et l'approvisionnement en matière première pour
des activités artisanales. Les femmes transforment divers
céréales et légumineuses en bière ou beignets et
vendent localement ces produits.
L'apiculture ou la « production
du miel », jusqu'à nos jours, est encore une pratique
traditionnelle dans le bassin versant de la Pendjari. En effet, pour produire
le miel, le paysan construit un pot en forme d'une longue jarre, à base
de l'argile pétrie et mélangée avec de l'herbe
sèche. Ce dispositif est posé dans la forêt ou dans la
savane, sur un arbre ou arbuste fourchu en mesure de maintenir la ruche (photo
5).
Photo 5 : Une ruche traditionnelle sur un arbre d'une
galerie forestière
à Tchatingou (Tanguiéta).
En avant plan, on observe la ruche en pot d'argile placée
entre les fourches de
l'arbre et en arrière-plan, l'eau de la rivière de
Tchatingou. Cliché : IDIETI, 2009
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Pour récolter les produits d'abeilles, le paysan allume
le feu autour de la ruche dans l'objectif d'éloigner les abeilles afin
de récolter librement le miel sans se faire piquer. C'est une mauvaise
pratique car l'utilisation du feu détruit les abeilles qui devraient
être préservées pour la pérennité de la
production du miel. Le miel récolté est vendu sur le
marché des localités du bassin souvent en bouteille ou en
bidon.
Par ailleurs, à l'instar de ce qui se passe au plan
national, pays à production apicole marginale (FAO, 2010), les
données ne sont pas disponibles pour apprécier la production
apicole dans le bassin versant de la Pendjari.
Par contre, le miel produit est véritablement
consommé de diverses manières dans les ménages (soit avec
de la bouillie du maïs ou du sorgho en lieu et place du sucre, soit
utilisé en pharmacopée), et même au-delà des
frontières du bassin. Il n'est pas rare, surtout au sud du Bénin
notamment à Cotonou, de voir sur des pancartes « ici en vente du
bon miel du Nord » ; ou d'entendre dire « ramène-moi de ton
voyage du bon miel du Nord ». La production de miel dépend
entièrement de la végétation disponible. En effet, dans le
bassin versant de la Pendjari, il existe une multitude d'espèces de
plantes qui fournissent les aliments nécessaires aux abeilles. On peut
citer entre autres : Parkia biglobosa ; Ficus sycamorus ;
Adansonia digitata ; Terminalia spp. ; Vernonia
spp ; Azadirachta indica ; Brachystegia spp. ;
Calycophyllum candidissimum ; Ceiba pentandra ;
Cochlospermum spp. ; Combretum spp. ;
Cordia spp. ; Cryptosepalum pseudotaxus ;
Dialium engleranum ; Dombeya rotundifolia ; Faurea
saligna ; Gilibertia spp. ; Isoberlina spp. ; Leucas
aspera ; Lonchocarpus spp. ; Madhuca longifolia; Marquesia
macroura ; Prosopis spp. ; Pterocarpus spp. ;
Sclerocarya caffra ; Syzygium spp. ; Albizia spp., Burkea
spp., Commiphora spp., Jacaranda mimosifolia, Lannea spp., Parianari
spp., Protea spp., etc.
Ces espèces de plantes (arbres, arbustes et herbe) se
trouvent dans des forêts et savanes du bassin versant de la Pendjari,
décrites plus haut. Néanmoins l'apiculture y est très peu
développée. Elle pourrait connaître un certain essor avec
les spécialistes.
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