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La mise en demeure en matière de résiliation du bail à  usage professionnel.


par Ted-Rousseau KENNANG GUEFACK
Université de Dschang Cameroun - Master II 2016
  

Disponible en mode multipage

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    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

    l'Ohada

    AVERTISSEMENT

    i

    L'Université de Dschang n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions défendues dans ce mémoire. Elles sont considérées comme personnelles et engagent la seule responsabilité de leur auteur.

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    DÉDICACE

    ii

    À mes parents KENNANG Jean Rousseau et

    EVOUNA Messie qui ont toujours cru en moi et

    m'encouragent tous les jours.

    iii

    iv

    V

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

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    REMERCIEMENTS

    Ce travail est l'aboutissement d'un effort auquel ont contribué de nombreuses personnes à qui je tiens à exprimer ma profonde gratitude. Mes remerciements vont à cet effet :

    Au Seigneur tout Puissant pour la force et la vie qu'il daigne bien m'accorder chaque jour.

    À mon directeur de thèse, le Docteur KEM CHEM Marcelin Bruno, qui a toujours fait preuve de patience et a toujours su m'apporter les conseils pédagogiques, les critiques, la rigueur méthodologique et les suggestions nécessaires à la bonne avancée et à l'aboutissement de ce travail.

    Au Professeur Henri Désiré MODI KOKO BEBEY, Doyen de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Dschang, qui a bien voulu donner un accord

    favorable à la supervision de cette thèse ainsi qu'à tout le personnel enseignant de
    l'Université de Dschang pour leur souci constant d'offrir une formation de qualité aux étudiants.

    Aux Dr TECHE Stéphane, Dr KEUGONG WATCHO Rolande dont la disponibilité et les conseils m'ont permis de réaliser le présent mémoire.

    À Me CHEKEM, avocat à Douala, qui a eu l'obligeance de me fournir des documents nécessaires à la rédaction de ce travail.

    À ma bien aimée KAMGA BAKAM Laure Mireille, pour ses prières incessantes et ses encouragements.

    À tous mes frères et soeurs pour leurs encouragement et soutien infaillible; leur présence ainsi que la gaieté qu'ils m'ont toujours apporté tout au long de ce labeur.

    À mes amis pour leur encouragement de chaque jour, leur prière, particulièrement MEDJA Franck, TSIMI Prosper, et FOTSING Edmond.

    À mes camarades de promotion pour leur collaboration, particulièrement à KUATE Defo Rodrigue, LEUKOUE Uri, DONGMO DOUANLA Brice, NDOUWA Clauvis, KADJE Gyres, FOUEDJIO Steve.

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    PRINCIPALES ABBRÉVIATIONS

    AJPI : Actualité juridique, Propriété Immobilière

    Al. : Alinéa

    Art. : Article

    AUDCG : Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général

    AUPRSVE ou AUVE : Acte Uniforme portant organisation des procédures Simplifiées

    et voies d'Exécution

    AUPCAP : Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives

    d'apurement du Passif

    AUS : Acte Uniforme portant organisation des sûretés

    Bull. : Bulletin des Arrêts de la Cour Suprême

    Bull. Civ. : Bulletin des Arrêts de la Cour de Cassation, Chambres Civiles

    CA : Cour d'Appel

    Cass.Civ. 1ère, 2è et 3è. : Arrêt de la première, deuxième, troisième Chambre de la Cour

    de cassation

    Cass. Com. : Arrêt de la Chambre commerciale de la cour de cassation

    C.Civ. : Code Civil

    C.Com. : Code du Commerce

    Chron. : Chronique

    Comm. : Commentaires

    Concl. : Conclusions

    Doctr. : Doctrine

    Dr. : Droit

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

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    Ed. : Edition

    Gaz. Pal. : Gazelle du Palais

    JCP: Jurisclasseur Périodique (semaine juridique)

    LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

    N° : Numéro

    Obs. : Observation

    OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des

    Affaires

    OP. Cit. : Opere citato (dans ouvrage précité)

    P. : Page

    P.A. : Petites Affiches

    Préc. : Déjà cité

    PUA : Presses Universitaires d'Afrique

    Rev. : Revue

    RDAO : Revue de Droit des Affaires OHAD

    RTD civ. Revue Trimestrielle de Droit civil

    RTD com. : Revue Trimestrielle de Droit commercial

    Ss. : Suivant

    Somm. : Sommaire

    TGI : Tribunal de Grande Instance

    TPI : Tribunal de Première Instance

    V. : Voir

    Vol. : Volume

    vi

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

    SOMMAIRE

    l'Ohada

    INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

    PREMIÈRE PARTIE : LA MISE EN DEMEURE: FORMALITÉ PRÉALABLE EN

    MATIÈRE DE RUPTURE DU BAIL À USAGE PROFESSIONNEL EN DROIT DE

    L'OHADA 10

    CHAPITRE I : LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE 12

    SECTION 1: LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE TENANT EN

    LA FORME DE LA RUPTURE 12

    SECTION 2: LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE TENANT EN

    LA NATURE DU MOTIF DE LA RUPTURE 20

    CHAPITRE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA MISE EN DEMEURE 25

    SECTION 1: L'ÉLABORATION DE LA MISE EN DEMEURE 25

    SECTION 2: LA NOTIFICATION DE LA MISE EN DEMEURE 31

    CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE 40

    DEUXIÈME PARTIE: LA MISE EN DEMEURE: FORMALITÉ PRODUISANT

    DES EFFETS VARIABLES DANS LA PROCÉDURE DE RUPTURE DU BAIL À

    USAGE PROFESSIONNEL EN DROIT DE L'OHADA 41

    CHAPITRE I: LE RESPECT DE LA MISE EN DEMEURE 43

    SECTION 1 : LA RÉGULARISATION DE LA SITUATION DÉFAILLANTE 43

    SECTION 2 : LE DÉFAUT DE RÉGULARISATION DE LA SITUATION

    DÉFAILLANTE 49

    CHAPITRE II: L'ABSENCE DE LA MISE EN DEMEURE 63

    SECTION 1: LE SORT DE L'ACTION EN RÉSILIATION 63

    SECTION 2: LE SORT DU BAIL À USAGE PROFESSIONNEL 72

    CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE 81

    CONCLUSION GÉNÉRALE 81

    vii

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

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    RÉSUMÉ

    Le législateur OHADA a toujours été soucieux du sort des transactions effectuées sous l'égide de la législation OHADA. C'est ce qui d'ailleurs justifie qu'en matière de bail commercial, toute intention de rupture doit être suffisamment encadrée. Cet encadrement dont il s'agit en effet, passe en grande partie par une exigence de mise en demeure perçue comme un dernier échéancier accordé à la partie défaillante pour s'exécuter. Cette mise en demeure, retrouvée à l'article 101 de l'Acte Uniforme ancien de 1997, a subi avec la réforme du 15 Décembre 2010 quelques améliorations que l'on ne saurait pas manquer apprécier. L'intérêt était justement de permettre à la partie ne s'étant pas exécuter de le faire dans le nouveau délai à lui imparti. C'est la raison pour laquelle le législateur Ohada semble très peu indulgent de la violation de l'article 133 de l'Acte Uniforme nouveau considéré d'ailleurs comme une disposition d'ordre public selon l'article 134 de l'Acte Uniforme. La réforme de 2010 a permis d'entrevoir un champ d'application large de la mise en demeure en ce que dorénavant elle s'applique même en cas de résiliation de plein droit. Cette innovation permettra de protéger la partie défaillante dans toutes les formes de résiliation et lui permettre du même coup de pouvoir s'exécuter. En plus, sa validité est un impératif à ne point manquer.

    Par ailleurs, il est reconnu à la partie défaillant une possible régularisation de sa situation vis-à-vis de l'autre. Si elle y parvient, le bail sera maintenu. Par contre et selon le cas, la résiliation judiciaire ou le refus de renouvellement seront les sanctions opposées à la partie qui, avertie, n'aura pris les dispositions pour exécuter ses obligations ou faire cesser le trouble. En outre, si cette formalité n'est pas respectée, c'est-à-dire, si la mise en demeure n'est pas conforme à l'article 133 de l'Acte Uniforme relatif au Droit commercial Général, la partie auteur de l'acte exposerait dans pareil cas son acte soit à la nullité, l'irrecevabilité pouvant même aller jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction.

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

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    ABSTRACT

    Législator OHADA was always concerned of the fate of the transactions carried out under the aegis of legislation OHADA. It is what besides justifies that as regards commercial lease, any intention of rupture must be sufficiently framed. This framing about which it all is indeed, makes mainly by a requirement of setting in residence perceived like a last bill book granted to the failing part to be carried out. This setting in residence, found in article 101 of the old Uniform Act of 1997, underwent with the reform of December 15 2010 some improvements which one could not miss appreciating. The interest was precisely to make it possible the part not being to be carried out to do it within the new time with him assigned. This is why legislator OHADA seems far from lenient of the violation of article 133 of the new Uniform Act considered besides as a provision of law and order according to article 134 of the Uniform Act. The reform of 2010 made it possible to foresee a broad field of application of the setting in residence in what henceforth it applies even in the event of full cancellation. This innovation will make it possible to protect the failing part in all the forms from cancellation and at the same time to enable him to be able to be carried out. Moreover, its validity is a requirement not to be missed.

    In addition, it is recognized with the part weakening a possible regularization of its situation screw-with - screw of the other. If it reaches that point, the lease will be maintained. On the other hand and according to the case, the legal cancellation or the refusal of renewal will be the sanctions opposed to the part which, informed, will not have made the provisions to carry out its obligations or to put an end to the disorder. Moreover, if this formality is not respected, it is with - to say, if the setting in residence is not in conformity with article 133 of the Uniform Act relating to the Commercial law Général, the author part of the act would expose in similar case its act is with nullity, the inadmissibility being able even to go until the payment of the allowance of ousting.

    INTRODUCTION GÉNÉRALE

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    La localisation géographique d'un commerce présente un grand intérêt pour toute entreprise1 en ce que très souvent, elle est déterminante pour ses performances économiques et financières. Le professionnel2 a donc besoin d'une localisation géographique précise pour stabiliser et rentabiliser son activité. Les motivations du choix d'un site pour implanter une entreprise sont différentes suivant que l'objet de l'exploitation est une industrie, une entreprise de prestation de services ou de vente au public d'un produit et aussi du type de clientèle intéressée. C'est ce qui justifie que le commerçant une fois installé, ferra toujours en sorte de mettre tous les moyens en jeu en vue de demeurer dans les locaux où il exploite son fonds de commerce3 .Il va sans dire, dans ces conditions, que le nombre de locataires professionnels soit extrêmement élevé perpendiculairement aux propriétaires et bailleurs qui s'adonnent opportunément à la construction d'immeubles dits commerciaux. Dans les activités purement commerciales, si le commerçant n'est pas propriétaire des locaux, le droit au bail constitue un élément important sinon le plus important du fonds de commerce et c'est ce qui explique l'insertion fréquente du pacte de préférence, le rappel du droit de préemption au profit du locataire dans l'hypothèse où l'immeuble serait mis en vente. En plus, quelle que soit l'activité professionnelle envisagée, le lieu de l'installation matérielle du professionnel participe beaucoup à ses chances de réussite d'une façon générale. Il y a lieu d'observer que le locataire est en position précaire voire fragile par rapport au bailleur et cela quel que soit l'état de ses affaires : que ses affaires marchent ou qu'elles périclitent. En effet, lorsqu'un lieu « marche bien », il est possible qu'une autre personne vienne proposer au bailleur de résilie le contrat en cours pour lui louer lesdits lieux contre un loyer plus conséquent que le premier. Ainsi, les auteurs du siècle suivant évoquaient plutôt « l'abus de puissance du bailleur» et relataient leur comportement déloyal à l'égard des preneurs, avec la complicité parfois des grandes firmes de l'époque. En effet, deux siècles plus tard, la

    1 L'entreprise est définie généralement comme « une unité qui implique la mise en oeuvre des moyens humains et matériels de production ou de distribution des richesses reposant sur une organisation préétablie. » Voir GUILLEN (A.) et VINCENT (J.), lexiques des termes juridiques, 13è éd, p. 23.

    2 La doctrine définit le professionnel comme étant une personne physique ou morale qui agit dans le cadre d'une activité habituelle et organisée de production, de distribution et de prestation de services, Cf. CALAIS-AULOY (J.) et STEINMETZ, Droit e la consommation, Paris , Dalloz, 2003, PP. 12 et Ss. Cette définition a non seulement l'avantage d'exclure les travailleurs salariés et d'inclure les personnes morales d'une part, mais surtout, d'étendre la notion de profession aux activités de production, de distribution des biens et de fourniture des services d'autre part. Apparaissant ainsi comme une notion fédératrices du droit civil et du droit commercial, la profession quel que soit sa nature, constitue l'un des éléments d'encrage qui permet de saisir et l'activité commerciale, et la personne qui l'exerce. DIFFO TCHUNKAM (J.), « Actualité et perspective du droit OHADA des affaires après la réforme de l'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général du 15 Décembre 2010 », www.ohada.com

    3 Lorsque le local ou le terrain donné en location est très bien situé, les clients trouvent y venir facilement et il arrive même parfois qu'ils indiquent cet emplacement a d'autres clients.

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    loi du 17 mars 1909 relative au fonds de commerce avait eu pour conséquence d'augmenter leur valeur. Avec l'apparition des grandes entreprises, celles-ci proposaient aux propriétaires bailleurs des offres de relocation « à des prix défiant toute concurrence» se substituant aux locataires en place. Les auteurs rapportent que les bailleurs les expulsaient « sans bourse délier» pour profiter de la clientèle développée et des éventuels profits générés tout en s'assurant pour l'avenir de la solvabilité des nouveaux preneurs : « La morale n'avait pas gagné à la réforme de 1909 et les commerçants y avaient quelque peu perdu de leur sécurité. Il peut même arriver que le propriétaire lui-même, pour continuer d'assouvir ses appétits de gain d'argent, veuille libérer les lieux pour y entreprendre une activité similaire ou identique car les loyers sont devenus insignifiants à côté d'une telle opportunité. Cette manoeuvre devient d'application pleine et immédiate lorsque le professionnel éprouve des difficultés passagères ou réelles à satisfaire les conditions du bail. C'est pourquoi il devrait y avoir une veille permanente des autorités administratives, juridiques, judiciaires et du preneur lui-même pour déjouer certaines collusions inavouées ou contenir certains appâts exacerbé du gain car la réussite d'une bonne politique d'emploi, d'auto-emploi, d'essor économique et financier dépend de la stabilité dont peuvent ou doivent bénéficier les fonds de commerce et les baux professionnels. En raison de l'ampleur et de la valeur de leurs installations matérielles, les entreprises industrielles et les grands magasins sont généralement propriétaires des locaux dans lesquels ils exercent leurs activités. Mais il arrive parfois que le commerçant ne soit pas propriétaire de l'immeuble dans lequel il exerce son activité : il occupe celui-ci en exécution d'un contrat, le contrat de bail. Le bail est un élément très important d'un fonds de commerce4 en ce qu'il lui assure la clientèle stable5.

    Le contrat de bail6 est un contrat par lequel on cède l'usage d'un bien pour un temps et un prix. Le contrat de bail qui naît dans ces conditions ne saurait, de toute évidence et en toutes circonstances connaître une application conventionnelle seulement. L'intervention de l'État à travers des textes, va donc s'avérer obligatoire. Malgré cette intervention autoritaire, présumée régulatrice entre bailleur et preneur, il ne serait pas superfétatoire d'évoquer le

    4 L'ensemble des éléments corporels (matériels, outillages, marchandises) et incorporels (droit de bail, nom enseigne..) qu'un commerçant ou un industriel groupe et organise en vue de la recherche d'une clientèle, ce qui constitue une entité juridique distincte des éléments qui le composent. Cf. GUILLEN (R.) et VINCENT (J.) op.cit., P. 265

    5 La clientèle est un ensemble de personnes (client) qui sont en relation d'affaires avec un professionnel. Si ce dernier est un commerçant, la clientèle est dite commerciale. S'il exerce une profession civile et en particulier libérale, elle est dite clientèle civile. Cf. GUILLEN (R.) et VINCENT (J.) op.cit. P.105

    6 Le contrat de bail est aussi appelé « contrat de location » ; le locataire est aussi appelé preneur et celui qui donne à bail, bailleur.

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    professeur Pierre VERDIER7 dans ses idées sur le comportement humain. Il fait allusion à la morale et à l'éthique pour inviter à éviter les excès. Aussi déclare-t-il la morale peut être définie comme « l'ensemble des règles de conduite socialement considérées comme bonnes ». L'éthique est « l'ensemble des principes qui sont à la base de la conduite de chacun ». Ces deux vocables conjugués conduiront les éléments de la société à s'imposer individuellement des comportements corrects et à observer collectivement, avec un esprit de coopération imbu de bonne foi, des règles de bonne conduite. Par ailleurs, l'article 1709 du Code Civil Français définit le bail comme une convention par laquelle « l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celui-ci s'oblige de lui payer ». Le prix dans le contrat de bail est appelé loyer, fermage8 ou encore prix de location. L'objet du bail peut être un bien meuble tout comme un bien immeuble. Conclu sur un immeuble l'on distingue plusieurs types de baux : le bail civil ou bail d'habitation qui permet au preneur de louer une maison pour s'y loger, le bail à construction dont la location au preneur permet de réaliser des constructions sur un terrain en vue de les exploiter lui-même ou de les donner à bail, et le bail commercial, désormais connu sous l'appellation de bail à usage professionnel9 dans l'espace OHADA10 depuis le reforme intervenue en 2010, qui nous intéresse ici. Le bail professionnel est une institution extrêmement importante car constituant le facteur de base de la stabilité donc de la promotion des activités commerciales ou professionnelles11. Ce bail qui met sur scène deux personnes aux intérêts à la fois convergents et divergents joue un rôle social et économique de premier plan dans l'essor des affaires et des professions. Il procure l'usage de l'immeuble ou du bien au locataire et assure les fruits du même bien au bailleur12. La proposition d'un nouveau droit unique, valable pour tous les professionnels remonterait à d'éminents juristes

    7 VERDIER (P.) Morale, Éthique, déontologie et droit, , Fondation la vie au Grand Air

    8 Le fermage est un mode de faire-valoir d'une exploitation agricole ou d'une parcelle de terrain dans lequel l'exploitant, n'ayant pas la propriété du sol verse un loyer au propriétaire ; ce loyer lui-même.

    9 La conséquence en est l'élargissement du régime de protection « des baux commerciaux » à des professionnels non commerçants tels que les artisans, mais aussi à toute activité professionnelle. L'enjeu se situe plus haut, dans la mesure où le législateur a étendu l'assiette des acteurs de l'entreprise en appréhendant des entrepreneurs du secteur informel qui ne sont pas des acteurs économiques de moindre importance. DIFFO TCHUNKAM (J.), « Actualité et perspective du droit OHADA des affaires après la réforme de l'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général du 15 Décembre 2010 »précité, www.ohada.com

    10 Il s'agit de l'Organisation pour l'Harmonisation du Droit des Affaires dont le traité institutif a été signé au sommet de Port-Louis le 17 octobre 1993.

    11 SISSOUMA (S.) « LE BAIL PROFESSIONNEL (En espace OHADA) : un mécanisme de veille (juridique) Permanente » in juridis périodique, p.83.

    12 Malaurie(P.) et Aynès (L.), « les contrats spéciaux », Éditions Cujas 1995. 4, 6.8 rue de la Maison Blanche 75013 Paris.

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    français13lesquels dès 1939 faisaient le constat que les activités professionnelles14 présentent des caractéristiques similaires.

    En Afrique, le bail à usage professionnel est actuellement régi et plus précisément dans l'espace OHADA par l'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général abrégé AUDCG. Cet acte dans sa version antérieure fut adopté à Cotonou au Bénin, le 17 Avril 1997 et entrée en vigueur le 1er Janvier 1998 qui traitait du bail commercial a été remplacé en 2010 par le nouvel acte uniforme15 qui tient en compte les insuffisances et les imperfections du premier et traite désormais du bail à usage professionnel, ceci dans l'objectif de faire bénéficier le statut protecteur à tous ceux qui justifieraient d'une clientèle. Comme tous les autres Actes Uniformes 16 , l'AUDCG participe à l'objectif principale de l'OHADA, notamment « l'harmonisation du droit des affaires dans les États-partie17 par l'élaboration et l'adoption de règles communes, simples, modernes et adaptées à la situation de leurs économies ; ainsi que par la mise en oeuvre des procédures judiciaires appropriées et l'encouragement du recours à l'arbitrage pour le règlement des litiges contractuels »18. De plus, le traité de l'OHADA a pour but de favoriser, au plan économique, le développement et l'intégration régionale, ainsi qu'une sécurité juridique et judiciaire afin de faire « renaître un climat de confiance entre partenaires économiques nationaux et internationaux ».L'AUDCG adopté le 15 Décembre 2010 et entré en vigueur le 14 Mai 2011, à travers ses objectifs et ses enjeux réorganise et redéfinit le droit commercial. Il est divisé en neuf (09) livres, dont le livre VI qui traite du « bail à usage professionnel et fonds de commerce ». L'article 103 de ce texte définit le bail à usage professionnel comme « toute convention, écrite ou non, entre une personne investie par la loi ou une convention du droit de donner en location tout ou partie d'un immeuble compris dans le champ d'application du présent Titre, et une autre personne physique ou morale, permettant à celle-ci, le preneur, d'exercer dans les lieux loués avec

    13 Ripert (G), « Ébauche d'un droit civil professionnel : Études », Henry Capitant, Dalloz 1939. P 677 in Mamadou Koné : le nouveau droit commercial OHADA.

    14Elles sont soit civiles soit commerciales.

    15 Acte uniforme relatif au Droit Commercial Général adopté le 15 Décembre 2010 à Lomé au Togo

    16 À ce jour, l'OHADA a déjà mis sur pieds sept (07) Actes Uniformes :

    L'acte uniforme relatif au droit commercial général ;

    L'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique ;

    L'acte uniforme portant organisation des sûretés ;

    L'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ;

    L'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution ;

    L'acte uniforme sur l'arbitrage ;

    L'acte uniforme sur le droit comptable.

    17 À ce jour l'OHADA compte 17 pays membres.

    18 Article 1er du Traité OHADA modifié en 2008

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    l'accord de celle-là, le bailleur, une activité commerciale, industrielle, artisanale ou toute autre activité professionnelle ». Cette définition traduit une opération commerciale qui met en relation des parties contractantes dont l'objectif est généralement la recherche du gain, du profit. Cela suppose qu'elles ont une totale maîtrise de leur opération en ce sens qu'elles ont une libre disposition des biens ou des droits objets de leurs transactions et peuvent en faire ce que bon leur semble19.

    Le droit commercial a taillé au bail à usage professionnel un régime dérogatoire du droit commun des baux régit par le Code Civil en ses articles 1709 à 1762. Ce corpus juridique spécifique était pour l'essentiel destiné à assurer une protection du preneur commerçant dans le souci de garantir la stabilité et le bon fonctionnement du fonds de commerce exploité dans les lieux loués20. En effet, les rapports entre les parties au contrat de bail souvent stables et cordiaux au cours de la formation du contrat, ayant comme pierre angulaire la liberté contractuelle, peuvent devenir quelques fois tendus et orageux en phase d'exécution de la convention. Ceci peut être dû à une faute provenant d'une des parties par exemple : un preneur ayant cessé de payer ses loyers ou ne les ayant jamais payé ou un bailleur refusant d'effectuer des travaux jugés nécessaires pour l'exploitation de l'immeuble loué. Ainsi ces fautes peuvent aboutir à une rupture du bail 21 . Une telle rupture était très souvent préjudiciable aussi bien pour les parties que pour le tissu socio-économique. Le bail commercial tire sa valeur de sa stabilité, devant permettre au preneur de créer ou reprendre un fonds et développer une activité dans la sérénité. Le régime de la rupture du bail commercial est particulièrement drastique, exprimant cette pérennité. Le statut des baux commerciaux s'attache à restreindre efficacement les prérogatives du bailleur propriétaire, le dissuadant autant que possible de reprendre son bien. La rupture du bail à son terme s'opère par l'effet d'un congé portant refus de renouvellement. Ce refus emporte en principe paiement d'une indemnité d'éviction égale au préjudice causé au preneur. L'article 126 de l'AUDCG évalue globalement ce préjudice à la valeur marchande du fonds de commerce, dont l'évaluation est évidemment source de nombreuses expertises et d'un important

    19 WAMBO (J.), « bail commercial et domaine public en droit OHADA, études de jurisprudence », Revue del'ERSUMA, N' 2, 2013, P.339

    20 TOURE (A.P.), « le nouveau visage de l'action en résiliation du bail à usage professionnel dans l'Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général adopté le 15 Décembre 2010 », in Revue ERSUMA, N' 1, Juin 2012

    21Contrairement à la fin normale des relations contractuelles par exemple par l'arrivée d'un terme stipulé, la rupture suppose que l'une des deux parties ou les deux mêmes semblent ne plus vouloir poursuivre le bail pour des raisons justifiées ou pas.

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    contentieux. Par ailleurs, le bail peut également être rompu avant son terme. Le Code de commerce consacre ainsi une section VII à sa résiliation, régissant les clauses insérées dans le bail prévoyant sa résiliation de plein droit. Cela ne signifie pas que seule la résiliation de plein droit est envisageable, les parties restant libres de convenir d'une résiliation amiable ou d'en demander la résolution judiciaire. Longtemps la jurisprudence n'a semblé se soucier du trouble sémantique né d'un usage aléatoire des notions de résolution et de résiliation. La distinction répandue était tirée de la nature du contrat rompu: le contrat à exécution instantanée est résolu, tandis que le contrat à exécution successive se trouve résilié, en conformité d'ailleurs avec le vocable législatif s'agissant du bail commercial. Pour donc parvenir à une quelconque rupture fusse-t-elle très souvent judiciaire, le législateur de 1997 entériné par celui de 2010, a mis à la charge de la partie qui demande en justice cette rupture une obligation de mise en demeure, laquelle est prévue à l'article 133 alinéa 2 et suivants de l'AUDCG

    La mise en demeure se définit comme tout acte extrajudiciaire signifié par un huissier de justice au débiteur et portant sommation d'avoir à exécuter les obligations faillies. En matière commerciale, une lettre recommandée constitue une mise en demeure suffisante. Il s'agira d'un dernier avertissement adressé à la partie défaillante de régulariser la situation frauduleuse faute de quoi le créancier22 ira saisir le juge pour apporter une solution à cette inexécution. Toutefois, la mise en demeure n'est pas sans intérêt pour le créancier puisqu'elle engendre plusieurs conséquences juridiques. Ainsi, si la mise en demeure reste sans résultat c'est-à-dire que le débiteur23 refuse de s'exécuter ou ne répond pas, elle fait courir des intérêts de retard et des dommages-intérêts peuvent être réclamés pour le retard subi. Par ailleurs, certaines procédures judiciaires conditionnent la possibilité d'agir en justice contre le débiteur à l'envoi d'une mise en demeure préalable par le créancier. La demeure peut donc être vue comme une étape préalable à une action judiciaire. C'est du moins ce qui est prévu par l'AUDCG dans son article 133 alinéas 2 et suivants qui conditionnent l'exercice et l'aboutissement de toute action en résiliation du bail à usage professionnel à l'envoi d'une mise en demeure en bonne et due forme. Mais, bien que sans effet contraignant immédiat pour le débiteur, la mise en demeure n'est pourtant pas inutile pour le créancier, puisqu'elle constitue un moyen de pression qui entraîne aussi des effets au niveau procédural.

    22 Ici est entendu comme la partie vis-à-vis de laquelle l'exécution du contrat n'a pas eu lieu.

    23 Il est défini comme la partie défaillante à ses obligations ou ayant commis une faute dans le cadre de l'exécution du bail.

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

    l'Ohada

    Étudier la mise en demeure en cas de résiliation du bail professionnel revêt un intérêt tout autant théorique que pratique.

    Sur le plan théorique, cette étude permet de révéler la richesse de la réforme de 2010. Précisément, elle nous permettra de comprendre que le législateur OHADA, protecteur de la propriété commerciale, acquiert aussi de nos jours le statut de protecteur de la sécurité contractuelle. Cette étude permettra donc de mette en exergue un régime protecteur en faveur du bail ce pour éviter de procéder à des résiliations arbitraires. D'où, le souci d'imposer une mise en demeure. Encore qu'il est loisible de constater la place majeur qu'occupe la mise en demeure dans presque toutes les instances qu'elles soient civiles, commerciales ou administratives. Cette mise en demeure aura donc pour rôle de limiter autant que possible les actes inavoués de la partie voulant rompre le contrat, en la contraignant à donner une dernière chance à l'autre.

    Sur le plan pratique, cette étude pourra se présenter comme un outil pour les parties à un contrat de bail à usage professionnel puisqu'elle précise les conditions et les traitements judiciaires auxquelles est subordonnée la mise en demeure. Pour le bailleur, elle pourra lui permettre d'informer le preneur récalcitrant. En effet, la procédure de mise en demeure est parfois peu ou mal connue par les bailleurs, qui même, sont parfois réticents à la mettre en oeuvre. Pour le preneur, il pourra y trouver une sorte de protection en ce que le législateur sanctionne rigoureusement le défaut d'envoi de mise en demeure, surtout que les parties n'en connaissaient que rarement l'existence.

    Au-delà des préoccupations essentielles, il semble nécessaire de s'interroger sur l'importance de la mise en demeure perçue comme une formalité incontournable en matière de rupture du bail professionnel. Autrement dit, quelle est la place de la mise en demeure dans la procédure de résiliation du bail à usage professionnel ?

    En effet, pour juridique que soit notre travail, nous serons amenés à utiliser la méthode juridique propre à toute analyse juridique. Cette méthode se décline en deux variantes principales : la première est l'exégèse et la seconde la casuistique. Ce type d'analyse rend le travail plus clair car il permet une étude très élucidée des institutions dans leurs aspects analytique et global. Mais pas pour parfaite qu'elle puisse être, il nous est permis parfois de nous référer aux techniques propres à d'autres sciences et disciplines telle la méthode comparative que nous adopterons tout au long de notre analyse. Pour redire le Professeur

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    l'Ohada

    Roland DRAGO : « tout juriste doit être un comparatiste. » car il y gagne « une faculté d'approfondissement des notions fondamentales et une certaine modestie à l'égard de son droit... » 24 . Cette méthode comparative suppose une maitrise des systèmes juridiques comparés, tâche à laquelle nous nous attèlerons.

    Il semblera très pertinent de mener notre étude autour de deux(02) axes qui, s'ils sont pertinemment exposés conduiront à une compréhension constructive du sujet. Il s'agit de présenter tout d'abord la mise en demeure comme préalable à toute procédure de résiliation judiciaire du bail à usage professionnel (PREMIÈRE PARTIE) et ensuite les effets produits par la mise en demeure dans cette procédure (SECONDE PARTIE).

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    24 DRAGO (R.), « Méthode des sciences sociales »

    LA MISE EN DEMEURE: FORMALITÉ PRÉALABLE
    EN MATIÈRE DE RUPTURE DU BAIL À USAGE
    PROFESSIONNEL EN DROIT DE L'OHADA

    PREMIÈRE PARTIE :

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    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

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    La mise en demeure est une exigence posée par le législateur communautaire de l'Ohada et préalable à toute intention de mettre un terme au contrat de bail. C'est dans le souci de favoriser la coopération entre le bailleur et le preneur qui constitue l'un des éléments clé de toute relation contractuelle, que le législateur communautaire par le biais de l'article 133 alinéa 2 de l'Acte uniforme portant droit commercial général25 a imposé une mise en demeure perçue ici comme une dernière chance pour la partie défaillante à ses obligations, à devoir les exécuter. Parmi les différents types de préavis auxquels une partie défaillante peut être assujettie, la mise en demeure constitue certes, en pratique, le mode le plus courant de rappel à l'ordre. En droit Ohada du bail professionnel, et avec la réforme subie par l'acte uniforme sur le droit commercial général en 2010, nous remarquerons déjà que la mise en demeure procède d'un champ d'application très vaste qui témoigne de l'importance de cette mention (CHAPITRE I). À côté du champ d'application de la mise en demeure qui semble déjà présenter bien d'intérêt, s'entrevoit sa mise en oeuvre (CHAPITRE II).

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    25Dans la version de 1997, on le retrouvait à l'article 101 alinéas 2

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    LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN

    CHAPITRE I :

    DEMEURE

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    L'idée du champ d'application de la mise en demeure est conséquente à l'évolution que cette exigence a subie en droit Ohada. Il est question plus nettement de s'interroger sur l'étendue de la mise en demeure. De l'analyse que nous pouvons faire, nous constaterons que cette formalité est présente dans presque toutes les situations d'inexécution d'une obligation par l'une des parties. Mais une analyse plus profonde peut faire ressortir une autre approche qui est de bord plus porteuse d'intérêt. Il s'agit d'étudier le champ d'application de la mise en demeure tenant en la forme de la rupture (SECTION 1) et autrement, mais cette fois en prenant en compte la nature du motif de la rupture (SECTION 2).

    SECTION 1: LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE

    TENANT EN LA FORME DE LA RUPTURE

    La compréhension du champ d'application perçu sous l'angle de la forme de la rupture semble porteuse d'un grand intérêt, dans cette mesure où le constat est fait de ce que l'exigence de la mise en demeure est établie dans presque toutes les hypothèses de rupture du lien contractuel entre les parties. Ainsi le bail peut être rompu soit par le biais de la résiliation (paragraphe 1), ou même par le refus de renouveler le bail (paragraphe 2).

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    Paragraphe 1- La mise en demeure dans la procédure de résiliation du bail à usage

    professionnel

    Dès lors qu'un contrat de bail à usage professionnel26 entend être résilié par l'une des deux parties pour inexécution de l'autre, un certain nombre de formalités prévu par l'acte uniforme du 15 Décembre 2010 relatif au droit commercial général doivent être respectées Aussi, le législateur communautaire a-t-il maintenu un mécanisme classique de l'instance en résiliation du bail, à savoir la mise en demeure préalable de la partie défaillante d'avoir à respecter les clauses du contrat dans un certain délai. Aux termes de l'article 133 alinéa 2 du nouvel Acte uniforme : « la demande en justice aux fins de résiliation du bail doit être précédée d'une mise en demeure d'avoir à respecter la ou les clauses ou conditions violées. La mise en demeure est faite par acte d'huissier ou notifiée par tout moyen permettant d'établir sa réception effective par le destinataire... ». Ainsi, toute action en résiliation en l'absence de clause résolutoire doit être précédée d'une mise en demeure (A). En outre, le nouvel acte uniforme a consacré l'extension de cette formalité même à la résiliation de plein droit (B).

    A- La résiliation en l'absence de toute clause résolutoire

    Il ressort de l'article 13327 de L'acte uniforme du 15 Décembre 2010 relatif au droit commercial général, que lorsque le locataire n'exécute pas les obligations mises à sa charge dans le bail28, le bailleur a la possibilité, après mise en demeure29de saisir le juge d'une action en résiliation du bail professionnel30. L'inverse est aussi possible, c'est-à-dire que le locataire

    26Le bail professionnel que le législateur OHADA a désigné au début par défaut sous le vocable de bail commercial, fut à l'origine un contrat garantissant le fonds de commerce parce que seul était couvert par lui, les personnes ayant la qualité de commerçant et exerçant sur un fonds de commerce.

    27 Anciennement article 101 sous la version de 1997.

    28 Par exemple refuse de payer ses loyers malgré une mise en demeure. V .Tribunal régional hors classe de Dakar, jugement civil n° 2003 du 03 décembre 2003, Mamadou Fall c/Mamadou Ly. Ohadata J-04-226. V. Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo, 08/07/2003, Ordonnance de contentieux d'exécution n° 756, Tchoube Joseph c/ Abgai Okoji, Ohadata j-04-451 ;

    29 La mise en demeure préalable doit répondre aux exigences de l'acte uniforme. Notamment elle doit reproduire sous peine de nullité, les termes de l'article 133 de l'acte uniforme portant organisation du droit commercial général. Pour une application, TPI de Nkongsamba, jugement n° 04/civ. du 21 novembre 2001 : aff : Mbatchou Ambroise c/ Benyomo Paulin Désiré. Juris périodique n° 51, Juillet-Août, Septembre 2002, p. 46, Ohadata J-03159, obs. F. TEPPI KOLOKO.

    30GATSI (J.), Pratique des baux commerciaux dans l'espace OHADA, 2è éd, PRESSES UNIVERSITAIRE LIBRE, 2008 , P.182.

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    qui entend résilier le contrat de bail le liant au bailleur pour inexécution31 de ses obligations par le bailleur devra aussi procéder par la voie de la mise en demeure. C'est dire donc que la résiliation ne peut aboutir devant le juge si aucune mise en demeure n'a été servie à la partie défaillante. L'article 13432 de l'acte uniforme érige d'ailleurs cette formalité en une mention d'ordre public. Il reviendra donc au juge d'apprécier souverainement la validité de l'acte servi à la partie défaillante afin d'éviter toute assimilation incontrôlée33. Une demande en résiliation judicaire fondée sur les dispositions de l'article 133 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général de 2010 nécessite une mise en demeure préalable. À cet égard, l'acte uniforme prévoit la procédure à suivre à défaut d'exécution des obligations contractuelles par l'une des deux parties. D'abord, le législateur impose au bailleur d'adresser une mise en demeure au preneur défaillant laquelle mise en demeure rappelle les obligations à respecter et est assortie d'un délai d'un mois. Elle est soumise à un formalisme prévue à l'article 133 de l'acte uniforme suscité. Ensuite, pourra suivre la procédure de résiliation proprement dite. De ce fait, l'on ne saurait dissocier la mise en demeure de la procédure de résiliation du bail professionnel. D'ailleurs la procédure de résiliation ne sera régulière que lorsque par acte extrajudiciaire reproduisant les termes de l'article 133 de l'acte uniforme portant sur le droit commercial général, un commandement d'avoir à exécuter les obligations faisant défaut aura été servi à la partie fautive. La mise en demeure qui suspend la procédure de résiliation pendant un mois est l'oeuvre dans la majorité des États membres de l'Ohada, des huissiers de justice qui y mettent matériellement les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 133 sous peine de nullité ainsi libellé : « ...A défaut de paiement du loyer ou en cas d'inexécution d'une clause du bail, le bailleur pourra demander à la juridiction compétente la résiliation du bail et l'expulsion du preneur et tous occupants de son chef, après avoir fait délivrer, par acte extra judiciaire, une mise en demeure d'avoir à respecter les clauses et conditions du bail. ». En réalité cette mise en demeure peut même interrompre la procédure si le preneur respectait les conditions par la régularisation de sa situation ou si le bailleur revenait à de meilleurs sentiments de tolérance par l'accord d'une grâce conventionnelle.

    31 Pour le bailleur l'inexécution peut tenir en un défaut d'exécution des travaux jugés « grosses réparations », en un trouble de jouissance...

    32 L'article 134 dispose : «Sont d'ordre public les dispositions des articles 101, 102, 103, 107, 110, 111, 117, 123, 124, 125, 126, 127, 130 et 133 du présent Acte uniforme ».

    33 La sommation de payer et de libérer les lieux adressée par le bailleur au preneur ne saurait être assimilée à la mise en demeure que l'acte uniforme impose au bailleur de respecter avant toute résiliation du bail à usage Professionnel. Cf. C.A. de l'ouest, arrêt n°11/civ, du 09 octobre 2002, affaire KOUDOUM Ambroise c/ FONKOUE Charlemar, ohadataJ-04-227 ;

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    B- L'extension de l'exigence à la résiliation de plein droit

    La résiliation de plein droit est-elle subordonnée à une mise en demeure préalable ? La question mérite d'être posée, d'autant plus que l'AUDCG dans sa version d'origine n'imposait expressément ce formalisme que dans deux (02) hypothèses34. L'ancien texte était donc silencieux quant à la nécessité de la mise en demeure en cas de résiliation de plein droit. Ce silence n'était que la conséquence logique du fait que, comme on l'a vu, ce type de résiliation n'était pas réglementé par l'Acte uniforme de 1997 sur le droit commercial général.

    En outre, la clause résolutoire est expresse et sanctionne les cas d'inexécution d'une des obligations prévues au contrat. Cette clause vise à la fois en ce qui concerne le locataire le défaut de paiement du loyer et le non-respect des diverses obligations mises à sa charge telles que prévu à l'article 133 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général35. En raison de l'automatisme et de la rigueur de la clause résolutoire de plein droit, la jurisprudence a toujours considéré qu'elle doit être expressément stipulée par les parties et ne peut jouer que pour sanctionner l'inexécution d'une obligation inscrite au contrat de bail36. Ainsi, rien n'interdit donc aux parties ayant prévu une clause résolutoire dans leur contrat, de stipuler que sa mise en oeuvre sera subordonnée au respect de la mise en demeure. Dans une affaire tranchée par la Cour d'Appel du littoral37, les parties avaient dans leur contrat en l'article 18 stipulé que la « résiliation de plein droit dudit contrat pour défaut de paiement est subordonnée à une mise en demeure restée infructueuse » et c'est l'absence de cette formalité que les juges de l'espèce reprochaient au premier juge de n'avoir pas sanctionnée. Une inquiétude demeure tout de même. Dans le cas où les parties auraient prévu une clause résolutoire sans toutefois stipuler expressément que sa mise en oeuvre est soumise à

    34D'une part, en cas de refus de renouvellement fondé sur un motif grave et légitime reproché à l'une des parties, notamment l'inexécution d'une obligation substantielle ou la cessation de l'exploitation du fonds de commerce ( L'article 95( devenu l'article 126), in fine de ce texte posait ainsi que : « Ce motif ne peut être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les faire cesser. ». D'autre part, en cas de résiliation judiciaire. L'article 101 (devenu l'article 133) alinéa 2 prévoyait que : « A défaut de paiement du loyer ou en cas d'inexécution d'une clause du bail, le bailleur pourra demander à la juridiction compétente la résiliation du bail et l'expulsion du preneur, et de tous occupants de son chef, après avoir fait délivrer, par acte extrajudiciaire, une mise en demeure d'avoir à respecter les clauses et conditions du bail ».

    35GATSI (J.), Pratique des baux commerciaux dans l'espace OHADA, op.cit. p.184.

    36 Ce qui a changé avec la réforme de l'Acte uniforme du 15 décembre 2010 relatif au droit commercial général.

    37 C.A. Littoral, arrêt n°100/CC du 07 Juin 2010, affaire La SOIDIC Sarl c/ Moukoury Ekongolo Martin, Juris périodique n°89, Janvier-Février-Mars 2012 ; note : KEM CHEKEM Bruno M.

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    l'accomplissement d'une mise en demeure, devrait-on obligatoirement la respecter ? Une réponse affirmative s'impose car la réglementation des baux commerciaux désormais professionnels telle que prévue par l'AUDCG montre clairement que l'esprit général du législateur Ohada est, d'empêcher que le locataire la partie défaillante ne soit brutalement et trop sévèrement sanctionnée. La formalité de mise en demeure poursuivant justement cette finalité, on voit mal comment on pourrait s'en passer.

    En théorie générale des obligations, la clause résolutoire de plein droit permet aux parties à un contrat synallagmatique, sauf disposition légale contraire, de « convenir expressément qu'à défaut d'exécution le contrat sera résolu de plein droit (...) »38. Cette clause ne peut jouer qu'à la date de la notification au défaillant des manquements constatés. La notification dont il est question est celle de la mise en demeure, qui depuis la réforme de 2010, est imposée même lorsque la résiliation opère de plein droit. La mise en demeure désigne « l'acte par lequel le créancier a manifesté sa volonté d'exiger l'exécution des prestations qui sont dues et, à défaut, de tirer les conséquences légales de l'inexécution des obligations ». Elle constitue, selon le Doyen CARBONNIER, « une réclamation destinée à mettre le débiteur en son tort en lui ôtant tout prétexte tiré d'une négligence ou tolérance de son créancier ». La particularité du mécanisme prévu par l'article 133 du nouvel Acte uniforme est que désormais l'exigence de mise en demeure préalable s'est emparée d'un champ beaucoup plus large. Elle a été étendue à la résiliation de plein droit. Le préalable de la mise en demeure a désormais vocation à s'appliquer lorsque la juridiction saisie prononce la résiliation du bail concomitamment à l'insertion d'une clause résolutoire. Cependant, toutes les notifications faites par la partie demanderesse ne valent pas mise en demeure, même si cet objet est atteint. Ainsi, n'ont pas été jugés valant mise en demeure requise par l'article 133 de l'AUDCG, celle adressée un dimanche ou l'exploit de congé servi au preneur39. Plus loin, on sait à quel point la clause résolutoire, qui permet à une partie de mettre fin au contrat après une mise en demeure, s'est implanté dans divers secteurs de la vie économique. Dans un souci de protection des droits du débiteur de l'obligation et pour lui permettre donc de s'exécuter dans

    38Mais nous ne devons pas au risque de nous tromper se fier au vocable « résiliation de plein droit » pour affirmer que le juge n'intervient pas lors de cette phase. En réalité, la raison tiens au fait que c'est au juge que reviens le soin de prononcer la résiliation du bail que celle soit avec ou sans clause résolutoire

    39 l'« exploit de congé » servi au preneur n'est pas une mise en demeure valable ; la procédure d'expulsion subséquente est entachée d'une nullité formelle et le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a, sur la base de l'article 1728 du Code civil, prononcé la résiliation du bail et ordonné l'expulsion du preneur ; la réintégration du preneur doit être ordonnée (CA Abidjan (Côte d'Ivoire), 4ech. civ. & com., n° 670, 2-6- 2006 : M. M. B. A. c./ Ayants- droit de Feu El Hadji V. D., obs. J. Issa- Sayegh, Ohadata J- 11-28) ;

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    le délai qui lui est imparti, il est nécessaire qu'il soit informé précisément des griefs qui lui sont reprochés. La clause ne pourra jouer si le commandement notifié au preneur ne lui permet pas d'être en mesure de déterminer à quelles conditions du bail il aurait contrevenu et quelles obligations contractuelles il doit exécuter. Ainsi, même une faute grave d'une des parties consistant en l'inexécution de l'une de ses obligations ne suffit pas à entraîner la résiliation de plein droit du bail professionnel. Encore faut-il qu'il n'ait pas régularisé après l'envoi d'une mise en demeure le sommant de se conformer aux stipulations du bail.

    Paragraphe 2- La mise en demeure dans la procédure de refus de renouvellement du
    bail à usage professionnel

    En vertu de cette idée de propriété commerciale s'exprimant dans le droit au renouvellement du bail, il est acquis au professionnel preneur selon l'article123 AUDCG, le droit au renouvellement dès lors qu'il justifie avoir exploité les locaux conformément aux stipulations du bail par l'exercice de l'activité prévue et ce pendant deux ans. Cependant, il peut arriver que l'une des deux parties refuse de renouveler le contrat de bail le liant à l'autre. Aux termes de l'article 127 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général nouveau, le bailleur est en droit de refuser le renouvellement du bail40. De ce fait, Il devra donc donné un congé41 avec refus de renouvellement, lequel congé devra contenir les griefs invoqués contre l'autre partie. Ces motifs doivent être suffisamment sérieux pour exonérer la partie qui refuse tout renouvellement du paiement de l'indemnité d'éviction. Ces motifs ne peuvent être invoqués que si les actes se sont poursuivis plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par voie d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les faire cesser. Une mise en demeure de cesser le trouble doit donc nécessairement être servie à la partie défaillante pour une faute commise par elle dans l'exécution du contrat. Ainsi, que ce soit pour violation des obligations contractuelles (A), ou pour cessation de l'exploitation du fonds donné en bail (B) une mise en

    40« Le bailleur peut s'opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou Indéterminée, sans avoir à régler d'indemnité d'éviction, dans les cas suivants :

    1) S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur sortant. Ce motif doit consister soit dans l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail, soit encore dans la cessation de l'exploitation de l'activité. »

    41 Le bailleur par exemple, devra faire état dans son congé de tous les agissements fautifs de son locataire connus de lui à la date de délivrance du congé.

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    demeure doit être envoyé à la partie défaillante.

    A- La violation des obligations contractuelles

    Il s'agit autrement de l'inexécution d'une obligation jugée substantielle du bail42, et qui peut fonder l'autre partie refuser tout renouvellement. L'inexécution d'une obligation substantielle du bail professionnel par le locataire peur résider, par exemple, dans le défaut de paiement du loyer et des diverses charges accessoires ; la violation de l'obligation de réparation à laquelle il est tenu ; l'exécution des travaux importants modificatifs de l'architecture de l'immeuble au mépris des clauses du bail ; La cession du bail ou la sous-location des lieux au mépris des dispositions du contrat. De cette liste non limitative, nous constaterons que le défaut de paiement est l'une des violations les plus fréquentes en matière d'exécution du bail professionnel. L'article 112 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général impose d'ailleurs au locataire le paiement d'un loyer en contre partie de la jouissance des locaux43 et il reviendra au bailleur estimant n'avoir pas reçu de paiement d'adresser une mise en demeure à son locataire de s'exécuter ou d'avoir à faire cesser le trouble. L'obligation préalable de la mise en demeure s'appliquant désormais à toute partie et ce depuis la réforme de l'acte uniforme du 15 décembre 2010, nous pouvons à la suite de la doctrine44reconnaître au preneur la possibilité d'adresser une mise en demeure au bailleur et plus loin même de refuser de renouveler le bail avec son bailleur. Ainsi, contrairement à l'article 101 de l'ancien Acte uniforme qui visait « le preneur » comme le seul destinataire de la mise en demeure, l'alinéa 2 de l'article 133 du nouvel Acte uniforme, énonce désormais plus généralement que la mise en demeure doit informer « le destinataire » qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un moisa compter de sa réception au contrat, cette exigence légale n'est plus une obligation à la charge exclusivement du bailleur. Il est à rappeler que la mise en demeure dans la

    42 Le droit de résiliation pour inexécution d'une clause du contrat est placé sous le contrôle du juge et il en résulte que les clauses résolutoires expresses sont dépourvues de tout effet automatique. Le juge peut par exemple tenir compte de ce que le débiteur s'est intégralement acquitté, des loyers échus avant l'introduction de l'instance en expulsion : C.A. du centre, Arrêt n° 124/De, du 19 mars 2004, Le groupe SOCOPAC/FOMUP c/ la SCI des frères Réunis, ohadata J-04-201.

    43Art.112 de l'acte uniforme sus-cité : « En contrepartie de la jouissance des lieux loués, le preneur doit payer le loyer aux termes convenus entre les mains du bailleur ou de son représentant dûment mandaté. Le paiement du loyer peut être fait par correspondance ou par voie électronique. »

    44PAPA ASSANE (T.), « Le nouveau visage de l'action en résiliation du bail à usage professionnel dans l'Acte Uniforme portant Droit Commercial Général adopté le 15 Décembre 2010 ». In revue OHADA n° 1-Juin 2012;

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    procédure de renouvellement du bail s'inscrit dans un délai de deux (02) mois45. La partie défaillante dispose donc d'un délai de deux (02) à compter de la signification de la mise en demeure pour mettre fin à l'infraction qui lui est reprochée. À l'expiration du délai, la partie demanderesse peut, en invoquant cette infraction non réparée, refuser valablement le renouvellement du bail sans avoir à payer l'indemnité d'éviction46.

    B- La cessation de l'exploitation du fonds donné en bail

    La cessation d'exploitation du fonds de commerce constitue elle aussi un motif de non renouvellement du bail commercial sans paiement d'une indemnité d'éviction. Cette infraction au bail ne s'applique qu'au locataire puisque lui seul et rien que lui exploite le fonds donné en bail. Il ne pourra se justifier que par une raison jugée sérieuse et légitime, telle une longue maladie. Cette maladie ne sera pas toujours considérée comme une cause sérieuse et légitime du défaut d'exploitation si l'intéressé pouvait faire exploiter le fonds par un salarié ou un gérant libre. Il reviendra donc à ce dernier de rapporter la preuve de l'impossibilité absolue d'exploiter le fonds de commerce47. De ce fait, la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds par exemple la fermeture du local alors qu'une clause du bail mettait à la charge du locataire une obligation d'exploitation, est susceptible d'entraîner des conséquences sévères pour le locataire si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus de deux(02) mois après la mise en demeure. Le motif peut alors être invoqué à l'appui d'un refus de renouvellement sans indemnité d'éviction. Cependant, le défaut de mise en demeure empêche le propriétaire de se prévaloir du grief pour refuser le renouvellement sans indemnité d'éviction. Toutefois, la mise en demeure ayant pour objet de permettre au locataire de mettre fin au manquement qui lui est reproché dans un délai imparti, elle devient inutile s'il n'est pas possible de faire cesser ou de réparer l'infraction. La mise en demeure est impérativement effectuée par acte d'huissier. Elle doit, à peine de nullité, indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées(...). Partant du contenu de l'article 133 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général, l'on constate encore ici que la mise en demeure joue un rôle très important dans la procédure de refus de renouvellement du bail.

    45 . Ce motif ne peut être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les Faire cesser

    46 C.A. de Dakar, 16/08/2002, Arrêt n° 400, Ibra Guèye c/ SCI AMINE, Ohadata J-05-61.

    47 Lorsqu'une branche commerciale devient déficitaire, elle peut être supprimée ou constituer un défaut d'exploitation, lorsque le preneur continue son activité dans d'autres secteurs plus importants et plus rentables. Car, il serait anormal d'obliger un locataire à poursuivre l'exercice d'une branche commerciale déficitaire.

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    SECTION 2: LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE

    TENANT EN LA NATURE DU MOTIF DE LA RUPTURE

    La mise en demeure va aussi trouver à s'appliquer selon la nature de la raison entraînant la rupture. Cette réflexion est d'autant vraie qu'il existe des motifs pour lesquelles la jurisprudence a estimé qu'il ne sera plus possible de revenir au statu quo antérieur. Ceci dit, la mise en demeure telle que prévu à l'article 133 de l'AUDCG est une formalité indispensable à toute procédure emportant rupture du bail. Mais une interrogation perdure : l'exigence de la mise en demeure est-elle absolue ? Loin de croire que oui, il est établi dans certaines circonstances précises que cette mention peut être dispensée. Ainsi quoi que nécessaire pour les manquements susceptibles de régularisation (paragraphe 1), la mise en demeure pour les manquements insusceptibles de régularisation est exclue (paragraphe 2).

    Paragraphe 1- La nécessité de la mise en demeure pour les manquements susceptibles de

    régularisation

    Il s'agit par manquements susceptibles de régularisation, des fautes commises par l'une des parties et qui peuvent possiblement être réparées. On les appelle aussi « les manquements simples ». Ces manquements sont aussi appelés manquements « traditionnels » au rang desquels nous pouvons citer : le non-paiement du loyer et des charges accessoires, la déspécialisation, la cessation d'exploitation, le trouble de jouissance48 etc... La mise en demeure doit toujours être servie s'il est établi que l'exécution de la prestation requise peut être ordonnée et accomplie par la partie défaillante. Ainsi, la délivrance préalable de la mise en demeure est de ce fait requise et il reviendra au juge d'apprécier son bien-fondé. La partie mise en demeure dispose selon le cas d'un délai pour s'acquitter de sa dette ou pour faire cesser le trouble. La particularité de cette mise en demeure est qu'elle ne trouve mieux de s'appliquer que lorsque la partie destinataire dispose des moyens pour s'exécuter. Dans un Arrêt rendu par la Cour de Cassation le 23 novembre 2011, n°10-24180, elle énonce qu' « un

    48 Cour d'appel de Bobo-Dioulasso, ch. Civ., Arrêt n°29/08 du 17 mars 2008, Aff. SANOU Issa c/ BARRY Omar, Ohadata J-10-113.

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    bailleur qui refuse le renouvellement du bail à raison de l'exploitation illégale du fonds, est tenu de délivrer une mise en demeure au preneur, dès lors que celui-ci peut régulariser sa situation selon différentes voies de droit ». Les faits de l'arrêt sont les suivants : M. X..., propriétaire de locaux à usage commercial de bar, débit de boissons, donnés à bail à M. Y..., lui a notifié, par acte du 26 janvier 2007, un congé avec refus de renouvellement sans offre d'indemnité d'éviction, au motif, notamment, que le preneur poursuivait son activité alors qu'il se trouvait, par suite de condamnations pénales prononcées contre lui, interdit d'exploiter un débit de boissons à consommer sur place en application des articles L. 3336-2 et suivants du code de la santé publique ; que M. Y... a assigné le bailleur en paiement de l'indemnité d'éviction. L'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus de deux (02) mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes de l'article 133 de l'AUDCG. Le bailleur est tenu de délivrer une mise en demeure au locataire n'ayant pas exécuté ses obligations. La Cour d'appel a donné gain de cause au bailleur au motif que : « l'infraction d'exploitation illégale du fonds, alléguée comme motif grave et légitime, était consommée et non susceptible de régularisation». La Cour de cassation casse et annule au motif que : « Qu'en statuant ainsi, alors que M. Y... pouvait régulariser sa situation selon différentes voies de droit, et qu'en conséquence, le bailleur était tenu de lui délivrer une mise en demeure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ». Cela va sans dire puisque le but de la mise en demeure est d'une importance indéniable dans la procédure de rupture du bail à usage professionnel en droit Ohada de par le rôle qu'il joue dans cette procédure49.

    Paragraphe 2- La dispense de la mise en demeure en présence de manquements
    insusceptibles de régularisation

    Malgré l'importance accordée à la mise en demeure, dans le droit antérieur comme dans le droit nouveau50, certains facteurs ont permis d'écarter cette démarche afin de protéger les intérêts légitimes du créancier : ce dernier profite alors de tous les effets associés

    49. La mise en demeure désigne « l'acte par lequel le créancier a manifesté sa volonté d'exiger l'exécution des prestations qui sont dues et, à défaut, de tirer les conséquences légales de l'inexécution des obligations » 50 Il s'agit du droit français applicable avant l'entrée en vigueur du traité Ohada et par là même des règles applicables au bail professionnel et plus loin à la mise en demeure.

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    à la demeure de façon immédiate, sans être tenu d'accorder un délai d'exécution additionnel à son débiteur. C'est ce que plusieurs appellent la demeure de plein droit51 mais que nous désignerons plutôt comme la demeure «par l'effet de la loi». Principalement, deux facteurs expliquent la dispense dont bénéficie le créancier : soit l'inutilité de la mise en demeure et l'attitude manifestée par le débiteur.

    Il ne fait pas de doute que la mise en demeure ne saurait être imposée lorsqu'elle s'avère à toutes fins pratiques inutile. L'exiger dans de telles circonstances relèverait d'un formalisme contraire à l'esprit du droit actuel. C'est ainsi que la loi dispense le créancier de mettre son débiteur en demeure lorsqu'il y a urgence, ou encore que l'obligation ne pouvait être exécutée utilement que dans un certain temps que le débiteur a laissé s'écouler. Le fait d'avoir manqué à l'exécution d'une obligation de ne pas faire relève du même fondement: en principe, même mis en demeure, le débiteur ne pourrait arriver à effacer un acte passé qu'il devait s'abstenir de poser52. De la même façon, la mise en demeure d'exécuter une obligation s'avère inutile lorsque le débiteur a, par sa faute, rendu l'exécution en nature impossible.

    Le second fondement, soit l'attitude du débiteur, se rencontre essentiellement dans deux cas. Il en va ainsi, tout d'abord, du débiteur qui manifeste clairement son intention de ne pas exécuter l'obligation, c'est-à-dire la «répudiation» de l'obligation53. C'est également le cas du débiteur qui refuse ou néglige, de façon répétée, d'exécuter une obligation à exécution successive54. Dans tous ces cas de dispense, qu'ils soient motivés par l'inutilité de la mise en demeure ou encore par l'attitude du débiteur, le principe de la bonne foi apparaît en filigrane : le débiteur ne saurait chercher à se prévaloir d'un délai d'exécution lorsque celui-ci s'avère purement dilatoire. Cette position ne nous semble pas convaincante puisque cela permettrait, dans certaines circonstances, de protéger un débiteur qui ne mérite pas un droit à

    51 L'expression «demeure de plein droit» peut, en effet, s'avérer ambiguë dans certains cas :

    elle peut renvoyer à tout cas de dispense de mise en demeure, ou uniquement à ceux qui résultent de la loi.

    52 C'est cela qui permet de justifier le vocable de « manquements non susceptibles de régularisation.

    53 La répudiation peut survenir lorsque le créancier mentionne au débiteur l'inexécution Constatée, par exemple le retard dans l'exécution ou encore l'exécution défectueuse, et que le débiteur n'apporte aucun correctif. Donc, même si aujourd'hui certaines législations, par exemple celle du Québec ,exigent désormais une mise en demeure écrite, les doléances exprimées verbalement par le créancier s'avèrent toujours pertinentes dans l'analyse de la demeure.

    54 ce cas de dispense ne saurait être invoqué à l'égard du premier manquement : il vise simplement à éviter que le créancier, déjà victime d'une première inexécution pour laquelle il a constitué son débiteur en demeure, soit tenu d'expédier une nouvelle mise en demeure pour toute nouvelle inexécution.

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    la dernière chance. Ainsi, il nous apparaît donc souhaitable de conserver la position jurisprudentielle du droit antérieur et d'accepter l'existence de cas de dispense résiduels, tout en adoptant une attitude prudente sur la question afin d'éviter une érosion du principe de la mise en demeure. Par ailleurs, le débiteur ne peut se plaindre du défaut de son créancier de lui expédier une mise en demeure lorsqu'il a lui-même quitté son domicile sans laisser d'adresse. Dans ce dernier cas, on peut même y voir un cas où le débiteur a, par son fait, rendu l'exécution en nature impossible. La question de l'incompétence du débiteur appelle quelques précisions. Tout d'abord, il convient de distinguer la mauvaise exécution et l'incompétence véritable. Le débiteur «incompétent» au sens où nous l'entendons ici est celui qui, de façon généralisée, ne maîtrise pas son art: ses connaissances et habiletés ne lui permettent pas de comprendre les causes ou l'étendue de son inexécution et, à plus forte raison, d'y apporter des correctifs appropriés. Il faut souligner que l'incompétence du débiteur ne constitue pas, en soi, un motif « de demeure par l'effet de la loi ». Il a droit, en principe, à un rappel à l'ordre afin qu'il ait la possibilité de corriger cette prestation. Lorsque le créancier confronté à l'incompétence de son débiteur n'a aucunement pris la peine de faire connaître son mécontentement, ne serait-ce que par un avis verbal en ce sens, il nous semble contraire au principe de la bonne foi de le dispenser systématiquement de mise en demeure sur le seul fondement de l'incompétence de son débiteur. Une solution plus juste, à notre avis, consisterait à présumer, dans de telles circonstances, qu'une mise en demeure n'aurait eu aucune utilité compte tenu du degré d'incompétence constaté et à imposer au débiteur le fardeau de démontrer qu'il aurait pu, en étant valablement informé de l'insatisfaction de son créancier, corriger sa prestation. Ainsi vu, il n'est pas toujours aisé de tracer la frontière entre les cas où la mise en demeure est requise et ceux où le créancier en est dispensé.

    *

    * *

    Parvenu au terme de ce chapitre consacré au champ d'application de la mise en demeure, nous constaterons que fort de ce que l'article 133 de l'AUDCG la place comme exigence préalable à toute intention de rompre le bail professionnel en droit Ohada, son

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    champ d'application présente des contrastes tant au niveau de la forme de la rupture que de la nature du motif susceptible d'entraîner la rupture du contrat.

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    LA MISE EN OEUVRE DE LA MISE EN DEMEURE

    CHAPITRE II :

    La mise en oeuvre peut s'entendre simplement comme un ensemble de phases permettant de mettre en place un mécanisme ou un acte. De par l'approche ainsi donnée de la mise en oeuvre, il est question de voir maintenant comment cette formalité prévu par l'AUDCG en son article 133 est implémenté. Plus loin, nous pourrions voir en la mise en demeure, une exigence dont la mise en oeuvre est minutieusement encadrée par le législateur communautaire55. L'encadrement dont il est fait allusion plus haut s'inscrit dans le souci d'éviter l'arbitraire. L'idée de mise en oeuvre suscite donc d'appréhender notre travail selon deux pistes. La première est l'élaboration de la mise en demeure (SECTION 1) et la seconde la notification de celle-ci (SECTION 2).

    SECTION 1: L'ÉLABORATION DE LA MISE EN DEMEURE

    Comme tout acte juridique, la mise en demeure est astreinte à un minimum de validité. D'ailleurs l'AUDCG en son article 133 ne manque pas d'y faire allusion en son alinéa 2 et suivants. Ainsi, il énonce que : « (...) La demande en justice aux fins de résiliation du bail doit être précédée d'une mise en demeure d'avoir à respecter la ou les clauses ou conditions violées. La mise en demeure est faite par acte d'huissier ou notifiée par tout moyen permettant d'établir sa réception effective par le destinataire. À peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef(...) ». De l'analyse de

    55 Cf. art 133 al 2 et suivants.

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    cette disposition, il ressort clairement que la validité de la mise en demeure peut s'apprécier tant sur la forme (paragraphe 2), que sur le fond (paragraphe 1).

    Paragraphe 1-Le contenu de la mise en demeure

    Selon l'article 133 alinéa 2 de l'Acte uniforme susvisé : « À peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef ».Les engagements conventionnels constituent donc le domaine par excellence de la mise en demeure. Dans ce cadre, celle-ci a une fonction foncièrement informative. La mise en demeure est en effet destinée à informer le débiteur d'une obligation contractuelle et de la volonté du créancier d'en tirer les conséquences qui s'imposent. C'est pourquoi dans la procédure de rupture du bail, elle doit obéir à un formalisme presque sacramentel. Ainsi, la validité de la mise en demeure est subordonnée au respect de deux conditions cumulatives : l'Indication des clauses ou conditions violées (paragraphe 1) et la Mention suffisante du respect du délai légal prévu par l'article 133 de l'AUDCG nouveau (paragraphe 2).

    A- L'indication des clauses et conditions violées

    La mise en demeure qui comporte la reproduction intégrale de l'art.133 de l'AUDCG est valable. Avec l'ancien acte uniforme de 1997, l'article 101 n'exigeait pas l'indication dans la mise en demeure des clauses et conditions spécifiques qu'il est demandé à la partie mis en demeure de respecter56. Dorénavant, et avec la réforme de l'AUDCG en 2010, l'article 133 al. 2 exige désormais qu'« à peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et (...)». Ceci veut dire que l'acte dont il est question c'est-à-dire la mise en demeure doit être suffisamment précise sur les comportements et agissements commis par la partie auteur du trouble. La mention des motifs a pour but principal de donner à la partie fautive, la chance pour prendre les mesures favorables avant la

    56 Le moyen selon lequel si les termes dudit article sont reproduits dans la mise en demeure, nulle part n'y figure l'information au preneur qu'à défaut de paiement ou de respect des clauses et conditions du bail dans un délai d'un mois, la résiliation sera poursuivie alors que cette mention est prescrite à peine de nullité doit être rejetée (CCJA, 3ech., n° 60/2012, 7-6- 2012 ; P. n° 077/2009/PC du 24-8- 2009 : Sté Camerounaise de Divertissements et de Commerce (SOCADIC) c./ KADJI DEFOSSO Joseph)

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    fin du contrat. À travers cette obligation imposée aux parties au contrat de bail à usage professionnel, il est davantage question de circonscrire les comportements jugés abusifs ou anormaux pouvant justifier l'intention de mettre un terme au contrat. Le bailleur est obligé de mentionner dans la mise en demeure les mentions prévues à l'article 133 de l'AUDCG. Cet article à un rôle très important dans l'information du locataire par les mesures à prendre en cas de réception de la mise en demeure. La jurisprudence a eu l'occasion plusieurs fois et plus particulièrement la Cour d'Appel d'Abidjan de sanctionner des mises en demeures qui n'étaient pas conformes aux dispositions prescrites par l'article 133 de l'AUDCG en infirmant par exemple l'ordonnance d'expulsion rendue57. Ainsi, toute mise en demeure doit devoir être explicite sur les inexécutions ou les fautes d'une partie.

    B- La mention du respect du délai légal prévu par l'article 133 de l'Acte Uniforme portant organisation du droit commercial général

    La mise en demeure qui comporte la reproduction intégrale de l'article 133 et la mention selon laquelle le preneur « dispose du délai d'un mois à compter de la signification des présentes, pour honorer les termes du contrat de bail et du présent acte, faute de quoi, il sera procédé judiciairement » est valable. En clair, la mise en demeure doit également informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans le délai légal prévu des sanctions pourront être prononcées. Il est néanmoins loisible de constater que le législateur communautaire Ohada a prévu des délais différents selon que l'on est dans une procédure de résiliation ou dans une procédure de non renouvellement. L'article 133 alinéa 2 et suivants traite de la mise en demeure dans la résiliation. Le délai prévu et qui doit être mentionné dans la mise en demeure est celui d'un (01) mois en l'occurrence58. Dans un Arrêt rendu par la CCJA59, le juge a eu l'occasion de se prononcer sur la question. Dans l'espèce, il était reproché à l'arrêt attaqué d'avoir violé l'article 133 de l'AUDCG, en ce que la Cour d'Appel a poursuivi la résiliation du bail alors que le délai d'un mois imposé par le texte, avant l'expiation duquel la résiliation

    57 C.A. Abidjan, n° 279, 6/3/2001: Sté PAGOTO c/ O., Ohadata J6-04-114.- Le Juris-Ohada, n°3/2003, Juillet-septembre 2003, p.55.

    58 Sous l'angle processuel, le délai d'un mois à compter de la réception de la mise en demeure s'analyse en un « délai d'attente » que le demandeur en résiliation du bail professionnel doit respecter avant de faire constater la résiliation par le juge.

    59CCJA, N°062/2008, 30-12-2008 : M. Neil RUBIN c/ ATLAS ASSURANCES S.A, Recueil de jurisprudence n°12, Juillet-Décembre 2008, p.99, Ohadata J-10-36, Ohadata J-09-271, Juris Ohada n°1/2009, janvier-mars, p.45

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    ne peut être poursuivie, n'avait guère été observé par le prétendu qui, au contraire, a procédé à la signification le même jour à la même heure, du commandement de payer et de l'assignation en résiliation. À l'image de l'absence de mise en demeure, le non-respect du délai d'un mois prévu par l'alinéa 2 de l'article 133 de l'Acte uniforme sur le droit commercial, doit être sanctionné par une fin de non-recevoir. En effet, l'action en résiliation initiée avant l'expiration du délai d'un (01) mois à compter de la mise en demeure est précoce d'autant plus que le droit d'agir n'existe pas encore.

    En outre, lorsque le créancier de l'obligation est obligé de renvoyer une mise en demeure à la partie défaillante pour exprimer son refus de renouvellement, il doit donc le faire conformément aux règles propres à la validité de la mise en demeure. Aux termes de l'article 127 : « Le bailleur peut s'opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée, sans avoir à régler d'indemnité d'éviction, dans les cas suivants : 1) S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur sortant. Ce motif doit consister soit dans l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail, soit encore dans la cessation de l'exploitation de l'activité. Ce motif ne peut être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les faire cesser. (...)». L'on constate que contrairement à la résiliation étudiée plus haut, la différence est au niveau du délai qui varie. L'alinéa 2 de l'article 133 suscité nous renseigne davantage sur le délai de la mise en demeure en cas de refus de renouvellement et il s'agit du délai de deux (02) mois.

    Mais quelle que soit la forme de la rupture du bail professionnel, il est important de garder en vue que la mise en demeure devra pour être considérée comme valable contenir la mention de l'indication du délai légal prévu pour chaque cas.

    Paragraphe 2- Le formalisme dans la mise en demeure

    Dans l'instance en résiliation du bail à usage professionnel, le formalisme de la mise en demeure constitue un élément déterminant pour l'information de la partie défaillante par rapport au manquement à ses obligations contractuelles. L'exécution effective de cette obligation d'information est largement tributaire de la forme que doit revêtir l'acte de mise en demeure. Sous l'empire de l'ancien article 101 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général, la mise en demeure ne pouvait être délivrée que par « acte extrajudiciaire ». La

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    lourdeur de ce procédé ainsi que son caractère dispendieux ont incité les rédacteurs du nouvel Acte uniforme à simplifier la forme de la mise en demeure, sans pour autant répudier le recours à un officier ministériel. Il résulte de l'alinéa 2 de l'article 133 de l'Acte uniforme précité : « la mise en demeure est faite par acte d'huissier ou notifiée par tout moyen permettant d'établir sa réception effective par le destinataire ».

    L'avènement du nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général60 a marqué l'apparition de l'expression « tout moyen permettant d'établir sa réception effective par le destinataire » dans la terminologie du législateur communautaire. Cette formule est employée dans plusieurs autres textes issus de la réforme pour traduire la volonté législative d'allégement du formalisme de certains actes. Il en est ainsi de la forme de la cession du bail, de celle du renouvellement du bail, de la forme du congé ou de la mise en demeure du preneur dans le cadre de l'opposition au droit au renouvellement du bail. Cette formule générique semble viser tout procédé permettant de garantir la réception effective de la mise en demeure par la partie défaillante. Il ne fait pas de doute que le procédé de la lettre recommandée avec accusé de réception ou de la simple lettre dûment déchargée par son destinataire, permet de remplir cet objet spécifique.

    Mais, avec le développement contemporain des technologies de l'information et de la communication (TIC), on peut se demander si le recours à des procédés électroniques ne peut valoir utilisation de moyens permettant d'établir la réception effective de l'acte de mise en demeure par le destinataire. En l'état actuel du droit uniforme de l'OHADA, le Conseil des Ministres n'a pas encore adopté un Acte uniforme sur les transactions électroniques qui pourrait héberger le principe de l'admissibilité de la preuve électronique. Mais, le législateur communautaire de l'OHADA a profité du chantier de réforme de l'Acte uniforme sur le droit commercial général pour envisager, dans le cadre de l'informatisation du registre du commerce et du crédit mobilier, la question de l'équivalence entre l'écrit sur support papier et l'écrit électronique. Selon l'article 82 alinéa 2 du nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général : « les documents sous forme électronique peuvent se substituer aux documents sur support papier et sont reconnus comme équivalents lorsqu'ils sont établis et maintenus selon un procédé technique fiable, qui garantit, à tout moment, l'origine du document sous forme électronique et son intégrité au cours des traitements et des transmissions électroniques ». Les procédés techniques fiables et garantissant l'origine des

    60 Il s'agit de l'AUDCG adopté le 15 décembre 2010

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    documents sous forme électronique ainsi que leur intégrité au cours de leurs traitements et de leurs transmissions électroniques sont reconnus valables par le nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général ou par le Comité technique de normalisation des procédures électroniques. Les rédacteurs de l'Acte uniforme ont entendu donner une grande portée juridique au principe d'équivalence entre l'écrit sur support papier et l'écrit électronique. Il résulte de l'article 79 de l'Acte uniforme que les dispositions du livre V sur l'informatisation du registre du commerce et du crédit mobilier du fichier national et du fichier régional, dans lequel est inséré l'article 82 de l'Acte uniforme précité, s'appliquent aux formalités ou demandes prévues par le présent acte uniforme, par tout autre acte uniforme ou par toute autre réglementation. En d'autres termes, faute d'avoir prévu un Acte uniforme spécifique aux transactions électroniques, le législateur a voulu étendre la nouvelle réglementation sur la preuve électronique contenue dans le nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général, aux autres Actes uniformes61 et même aux droits des États Parties ne disposant pas encore d'un cadre juridique approprié. L'accueil de l'écrit électronique au même rang que la preuve manuscrite classique a permis au législateur d'admettre la preuve des actes de commerce à l'égard des commerçants par voie électronique et le paiement du loyer par voie électronique .

    Dans le cadre du contentieux de la résiliation du bail professionnel, le nouveau dispositif sur la preuve électronique de l'OHADA, n'autoriserait-il pas le demandeur en résiliation du bail ou en refus de renouvellement du bail à servir à son cocontractant une mise en demeure par un procédé électronique, comme un courrier électronique (mail) ? Il est légitime de le penser. Mais, pour admettre ce mode de preuve, le juge devra vérifier la condition d'intégrité du document électronique posée par l'article 82 du nouvel Acte uniforme et celle tirée de la réception effective de la mise en demeure électronique au destinataire prévue par l'article 133 alinéa 2 du même Acte uniforme. Dans la pratique, la vérification judiciaire de ces conditions d'admissibilité de la mise en demeure électronique risque de poser des difficultés. En effet, en raison de la technicité de la matière, le juge ne dispose pas toujours d'éléments d'appréciation suffisants, et ce, d'autant que le contenu de la mise en demeure obéit à un formalisme dont la simplification a été également recherchée par la réforme

    61Déjà, l'acte uniforme de l'OHADA relatif aux contrats de transports de marchandises par route du 22 mars 2003 avait consacré une acception très extensive de la notion d'écrit incluant les supports numériques modernes. L'article 2 de cet Acte uniforme définit l'écrit comme : « une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible et mis sur papier ou sur un support faisant appel aux technologies de l'information ».

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    SECTION 2: LA NOTIFICATION DE LA MISE EN DEMEURE

    Une notification est une formalité par laquelle l'on donne connaissance à un individu du contenu d'un acte pris à son égard. Ce sont des actes juridiques qui n'ont efficacité que lorsqu'ils sont portés à la connaissance de leur destinataire ; que lorsque celui-ci les reçoit. On a pu signaler le cas de la mise en demeure par exemple. La plupart des actes de la procédure doit être portée à la connaissance de la partie adverse, lui être notifiée, plus précisément. Cette notification est essentielle.

    Si la notification est nulle, si elle est irrégulière, l'acte n'ayant pas été porté régulièrement à la connaissance de son destinataire sera sans aucune efficacité dans la procédure. Si la notification est irrégulière, l'acte sera considéré comme non avenu, il n'aura jamais eu ses effets. C'est pourquoi la notification est soumise à des exigences très précises. En outre, l'acte de mise en demeure peut se faire notifié par différents moyens lesquels moyens ont pour but d'assurer une information suffisante de la partie vis-à-vis de laquelle l'acte a été dressé (paragraphe 1). Plus loin, il se pose le problème du moment à prendre en compte pour apprécier l'effectivité de la notification (paragraphe 2).

    Paragraphe 1-Les procédés de notification de la mise en demeure

    Sous l'empire de l'ancien article 101 de l'AUDCG, il a été jugé que la mise en demeure doit être adressée par acte extrajudiciaire, c'est-à-dire par voie d'huissier. Celle adressée par lettre simple de l'avocat du bailleur n'est pas valable et ne peut servir de fondement à une résiliation judiciaire. Mais comme l'observe très justement un auteur, la seule condition désormais exigée par l'article 133, al.2 de l'AUDCG pour la validité de la notification de la mise en demeure est l'existence de «tout moyen permettant d'établir sa réception par le destinataire»62. Il en résulte que la décision ci-dessus est désormais caduque, sauf si dans l'espèce, il n'y avait eu aucun moyen de prouver la réception de la mise en demeure par le destinataire. L'acte extrajudiciaire n'est plus obligatoire si l'auteur de la mise en demeure est capable de prouver sa réception par le destinataire.

    62 TGI Bobo-Dioulasso (Burkina-Faso), n° 32, 2-2-2005 : SANGA Mady c/ GRAPHI-SERVICE, Ohadata J-09-63).Obs. Jimmy Kodo.

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    La notification de la mise en demeure pourra donc se faire par le biais de plusieurs procédés. On pourra utiliser plusieurs critères de distinction de ces moyens, mais la distinction la plus simple et la plus utilisée est celle consistant à envisager d'une part La voie ordinaire de notification (A), et d'autre part la voie de la signification (B).

    A- La voie ordinaire

    Ici, il n'y a pas de complication, l'acte va être placé sous pli fermé et il sera expédié par la Poste, soit remis directement à son destinataire et dans ce cas, contre émargement ou récépissé, selon l'article 667 du Cpcc. Lorsque l'on procède par voie postale, l'administration des Postes n'est tenue à aucune diligence particulière pour toucher particulièrement le destinataire. Rien n'indique qu'il n'ait été touché. Et c'est là le grand risque que présente ce procédé ; il est certes moins onéreux mais porteur de beaucoup d'inconvénients pour l'expéditeur de la mise en demeure63.

    La notification par forme ordinaire recouvre plusieurs procédés, comme par voie postale, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Parfois-même, la loi se contente d'une lettre simple, ce qui est rare sur le plan probatoire. Le recours à la lettre recommandée présente un intérêt pour établir la réalité d'un envoi, la date de celui-ci et, le cas échéant, sa réception par le destinataire. Les hypothèses sont légion, qu'il s'agisse, pour une partie, d'établir qu'elle a effectivement posé un acte unilatéral ou porté un fait à la connaissance d'une autre partie. Cependant, à l'heure où se généralise la communication électronique pour s'échanger des informations ou pour poser ou conclure des actes juridiques, il s'imposait de reconnaître la possibilité d'effectuer des envois recommandés de mise en demeure sur support électronique. Cette reconnaissance étant désormais acquise64.

    Il existe de nombreuses situations où l'on souhaite se ménager la preuve de l'envoi d'un

    63 Ceci est d'autant vrai qu'en cas d'impossibilité de toucher le destinataire par l'acte, les conséquences y afférentes seront opposées à l'expéditeur.

    64Selon l'article 82 alinéa 2 du nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général : « les documents sous forme électronique peuvent se substituer aux documents sur support papier et sont reconnus comme équivalents lorsqu'ils sont établis et maintenus selon un procédé technique fiable, qui garantit, à tout moment, l'origine du document sous forme électronique et son intégrité au cours des traitements et des transmissions électroniques ». Les procédés techniques fiables et garantissant l'origine des documents sous forme électronique ainsi que leur intégrité au cours de leurs traitements et de leurs transmissions électroniques sont reconnus valables par le nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général ou par le Comité technique de normalisation des procédures électroniques.

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    courrier afin d'éviter toute contestation ultérieure sur la réalité de cet envoi. Une telle précaution s'avère particulièrement opportune lorsqu'une relation s'envenime et qu'un litige se profile à l'horizon. À titre d'illustration, on peut songer, en matière de baux, à l'insatisfaction d'un locataire (infiltrations d'eau non résolues, grosses réparations non effectuées...). Ce dernier aura intérêt à consigner ses reproches dans une mise en demeure adressée par envoi recommandé, afin d'être en mesure de prouver, dans le cadre d'un litige ultérieur, qu'en temps utile, il avait effectivement averti son bailleur des désagréments qu'il subissait. Par ailleurs, préalablement à toute sanction, une mise en demeure est nécessaire : le créancier est, en principe, tenu de manifester au débiteur, d'une manière claire et non équivoque, sa volonté de voir exécuter l'obligation en souffrance. La mise en demeure constitue un acte unilatéral65: son efficacité est donc subordonnée à une notification au débiteur et le créancier doit se ménager une preuve de sa réception. En ce qui concerne la forme de la mise en demeure, la jurisprudence fait preuve aujourd'hui de la plus grande souplesse : aussi, en pratique, elle pourra fréquemment être adressée au débiteur par lettre recommandée (ou même par simple lettre) 66 . L'intérêt incontestable de toute lettre recommandée est de ménager à l'expéditeur une preuve de la réalité et, au besoin, du moment de son envoi, ou plus exactement de son dépôt à La Poste. Cette double preuve pourra être rapportée grâce au récépissé qui lui est remis par l'agent de la Poste lors du dépôt du pli. Comme cela vient d'être suggéré, le dépôt à la Poste d'une lettre recommandée n'atteste nullement que celle-ci est effectivement parvenue à son destinataire. L'occasion a été donnée à la jurisprudence de confirmer ce point de vue : «Le seul fait pour les services de la Poste d'apposer pour chaque envoi individuel un cachet établissant l'envoi recommandé n'apparaît pas suffisant pour en déduire que le destinataire a reçu l'envoi qui lui était destiné ou qu'il en a eu connaissance (...)67''. L'éventualité qu'un envoi recommandé s'égare et n'arrive jamais à destination est d'ailleurs clairement envisagée dans les dispositions fixant la hauteur de l'indemnité due par la Poste en cas de perte, de vol ou de détérioration d'un envoi recommandé.

    En tout état de cause, le destinataire peut toujours prétendre n'avoir pas reçu le courrier

    65 Il s'agit d'un acte juridique, et non d'un fait juridique, car ses effets de droit sont voulus par le créancier, et d'un acte unilatéral au motif qu'il émane de la seule volonté du créancier et n'est pas subordonné à une acceptation du débiteur

    66 En matière commerciale, il est admis, de longue date, que la mise en demeure ne doit répondre à aucune forme spéciale. La mise en demeure peut donc prendre la forme d'une lettre recommandée (ou même d'une simple lettre), pourvu qu'elle contienne une interpellation suffisamment ferme du débiteur.

    67Par exemple, Mons, 21 octobre 1998, J.L.M.B., 1999, I, p. 456.

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    recommandé que l'expéditeur affirme avoir déposé à la Poste. L'expéditeur peut toutefois se prémunir contre ce risque, en faisant recours à un type particulier de recommandé : le recommandé avec accusé de réception. Dans cette hypothèse, le destinataire est invité à signer un accusé de réception du courrier qui lui est présenté par le facteur. Ce dernier doit vérifier l'identité du destinataire et remettre la lettre en main propre. Ainsi, sur le plan de la preuve, la situation de l'expéditeur sera particulièrement confortable si l'accusé de réception est effectivement signé de la main du destinataire. Celui-ci ne pourra alors plus prétendre qu'il n'a pas reçu le courrier68.

    Tous les problèmes ne sont pas pour autant parfaitement résolus.

    Tout d'abord, il arrive parfois que le signataire de l'accusé de réception ne soit pas le véritable destinataire de l'envoi. Dans cette hypothèse, si un litige survient, la responsabilité de la Poste pourrait être engagée puisque l'employé n'a pas procédé à une vérification d'identité.

    Ensuite, le destinataire peut toujours refuser le pli recommandé qui lui est présenté. Toutefois, il y a lieu de considérer qu'est parfaitement valable l'incombance par exemple une mise en demeure accomplie par lettre recommandée au destinataire qui, sans motif plausible, refuse le pli, alors que les circonstances devaient lui faire deviner le contenu. Cette attitude de refus apparaît pour le moins suspecte et, en principe, ne permet donc pas d'éviter les effets d'une mise en demeure.

    B- La voie de la signification.

    La forme la plus sûre et la plus pratiquée est la signification, la signification d'un acte par huissier de justice. Lorsque les actes de la procédure sont rédigés par l'huissier de justice, la forme normale de la notification sera la signification. C'est d'ailleurs l'une des formes de notification prévues par le législateur Ohada à travers l'article 133 alinéa 2 de l'AUDCG. Aux termes de cet article 133 suscité : « (...) La demande en justice aux fins de résiliation du bail doit être précédée d'une mise en demeure d'avoir à respecter la ou les clauses ou conditions violées. La mise en demeure est faite par acte d'huissier ou notifiée par tout moyen

    68 . MOUGENOT, La preuve, Tiré à part du Répertoire notarial, 3e éd. revue et mise à jour par D. MOUGENOT, Bruxelles, Larcier, 2002, p. 244, n° 180.

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    permettant d'établir sa réception effective par le destinataire. (...)». De ce qui précède, nous constatons que la particularité de la signification est qu'elle est faite par voie d'huissier de justice.

    Matériellement, cette notification peut être faite par l'huissier de justice lui-même ou par un clerc assermenté. L'article 609 du CCPC Camerounais dispose : « Aucune signification ni exécution ne pourra être faite, avant six heures du matin et après six heures du soir ; non plus que les jours de fête légale, si ce n'est en vertu de permission du Juge, dans le cas où il y aurait péril en la demeure ». Il reste encore une fois que le procédé de la signification est le procédé le plus sûr en tous les cas, car l'huissier de justice a la qualité d'officier public. Le ministère qui le confie l'oblige à des diligences particulières. L'idée fondamentale tient au fait qu'il faut tout faire pour toucher le destinataire. Il faut faire tout ce qui est possible pour le toucher par la mise en demeure. Lorsque tout a été fait, le destinataire ne pourra alors plus se soustraire à l'acte qui lui aura été régulièrement notifié alors même qu'il n'aura pas été le cas échéant touché. On considérera que, si tout a été fait dans les règles, la notification est régulière et efficace. A contrario, si les règles n'ont pas été respectées, la notification sera nulle. Et par conséquent, l'acte notifié sera sans efficacité. Matériellement, il faut pouvoir s'assurer que l'huissier ait bien effectivement accompli toutes les démarches pour toucher personnellement le destinataire. Au cas échéant, l'article 603 du CCPC Camerounais pose que : « Les procédures ou les actes nuls ou frustratoires et les actes qui auront donné lieu à une condamnation d'amende, seront sur conclusions des parties ou même d'office, mis à la charge des avocats-défenseurs ou officiers ministériels qui les auront faits, lesquels suivant l'exigence des cas, seront en outre passibles des dommages et intérêts de la partie, et pourront même être suspendus de leurs fonctions ».Donc, Il faut encore s'en assurer. C'est pourquoi, la loi impose à l'huissier de justice à peine de nullité, d'écrire dans le corps-même de l'acte, toutes les formalités qu'il aura accompli pour signifier69.

    La forme privilégiée de la signification est la signification à personne. S'il n'y parvient pas, après diligence, il devra procéder à une signification à domicile ou à résidence.

    Primo, la signification à personne est le mode de notification normal qu'il faut

    69 Dans un acte de signification, ces indications figureront dans l'en-tête de l'acte. Ces modalités de la

    notification qui s'imposent à l'huissier de justice sont organisées concrètement par les articles 653 à 664 du Code de Procédure Civile Français.

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    privilégier à peine de nullité. Mais la règle n'a pas le même sens que pour les personnes physiques et les personnes morales.

    Pour les premières, Si on arrive à toucher la personne, l'huissier de justice lui remettra l'acte en main propre. On a alors l'assurance que le destinataire a été régulièrement touché. Il faut la localiser et savoir dans quels lieux peut-on procéder à cette signification par personne. La loi est très libérale. Elle n'impose ni n'interdit aucun lieu. Elle interviendra au lieu du domicile, de la résidence ou sur le lieu du travail. S'il ne parvient pas à toucher la personne à domicile, il doit chercher sur le lieu de travail, ou sur un autre lieu de fréquentation de la personne. S'il n'y parvient pas, il devra s'expliquer dans le corps de la signification, selon l'article 655 alinéa 2 du Code de Procédure Civile. Ce genre de signification est difficile lorsque les personnes ne veulent pas être touchées et refusent d'ouvrir à l'huissier de justice. C'est pourquoi la notification à domicile est si fréquente.

    Lorsqu'il s'agit de signifier à une personne morale, la signification ne pourra être faite qu'à une personne physique. Seules les personnes physiques peuvent être les destinataires matériels de la signification. Puisqu'il en est ainsi, le lieu de la notification qui n'avait aucune importance pour les personnes physiques, va au contraire prendre une très grande importance pour les personnes morales. La signification à personne morale ne peut avoir lieu n'importe où. L'article 689 du Code de Procédure Civile et commerciale précise que la signification doit être faite au lieu de leur établissement. Mais cette notion est comprise de manière particulière par la jurisprudence. Normalement, le lieu de l'établissement pour une personne morale de droit privé sera le lieu du siège social. Mais par faveur, car il n'est pas toujours aisé de trouver le siège social de la personne morale de droit privé, la jurisprudence autorise à notifier dans les différentes succursales de la personne morale. C'est la « théorie des gares principales ». Simplement, qu'il s'agisse du siège social ou d'une succursale, il faut savoir à qui l'acte pourra être remis régulièrement. Ici, au contraire de l'exigence légale d'une localisation de notification, la jurisprudence est très libérale. Toute personne physique peut se voir remettre la notification en ce lieu. N'importe quel préposé pourra recevoir l'acte. Toutefois, si l'huissier de justice parvient à remettre l'acte au représentant légal, ou bien à un fondé de pouvoir, ou bien à toute personne habilitée à recevoir des significations pour le compte de la personne morale, dans ce cas, on considérera juridiquement, que la signification est faite à personne, selon l'article 654 alinéa 2 du CCPC Français. Mais il faut compter encore avec une autre règle jurisprudentielle favorable aux huissiers de justice. La

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    jurisprudence retient de manière constante que l'huissier de justice n'est pas tenu de vérifier les pouvoirs de celui qui se dit représentant, fondé de pouvoir, ou habilité à recevoir signification. S'il en est ainsi, si l'huissier de justice n'a pas à rechercher spécialement cette habilitation de pouvoir, c'est dire que l'huissier de justice peut se contenter d'indiquer dans le parlenta 70 que la personne à qui il a remis l'habilitation a été habilitée à recevoir la signification. On considérera encore, que ce pouvoir soit avéré ou non, que cette signification a été faite à personne. C'est dire, a contrario, que la signification à domicile est tout à fait exceptionnelle dans le cas des personnes morales.

    Mais, le législateur a posé un garde-fou. Toute signification à personne morale doit être doublée d'une lettre simple que l'huissier va adresser au représentant légal de la personne morale et qui va l'informer de la signification, même si la signification a été faite à personne, selon l'article 658 du Cpcc.

    Secundo, si l'on constate que la signification à personne n'ait pas été possible, l'huissier de justice va chercher à notifier à domicile. Si le domicile n'est pas connu, il va chercher à signifier à résidence, au lieu où le destinataire demeure habituellement, en fait.

    Or, si le destinataire n'a pas encore été touché le cas échéant, pendant combien de temps, l'huissier de justice devrait- il conserver l'acte de mise en demeure en sa disposition ? L'huissier devra conserver l'acte pendant trois (03) mois à la disposition de son destinataire. Au-delà des trois (03) mois, l'huissier de justice est déchargé et pour autant, la signification à domicile est réalisée. Passé ce délai, on considérera que, quoi qu'il arrive, la notification a été faite et qu'elle a la valeur d'une signification à domicile.

    Paragraphe 2- Le moment de la notification de la mise en demeure

    Lorsque la notification a eu lieu par voie postale, les choses sont simples, la loi n'impose aucune règle à ce sujet. La notification va se faire à l'heure du facteur, le facteur ne peut d'ailleurs passer à une heure indue.

    70 Il s'agit de la mention de toutes les formalités que l'huissier aura accomplies pour signifier l'acte de mise en demeure.

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    Lorsque maintenant, le procédé de la notification est laissé à la discrétion des intéressés, lorsqu'ils ont le choix, lorsque l'intéressé peut porter lui-même l'acte à la connaissance de l'autre partie, la seule limite temporelle à la notification tient au respect de la vie privée. Si l'on s'aventurait à notifier au milieu de la nuit, on pourrait la considérer comme irrégulière. Finalement, tout le problème se concentre ainsi par la seule signification, la notification par huissier de justice. C'est à ce seul sujet que la loi a posé des règles précises. Ce sont des règles d'interdiction. La notification ne peut avoir lieu ni un dimanche71, ni un jour férié, ni un jour chômé, et pas avant six heures du matin et après vingt et une heures du soir72.Partant, la notification participe aussi du respect des droits de la défense. Il se peut que parfois l'urgence, les circonstances particulières commandent de faire exception à ces garde-fous. Précisément le législateur y pourvoit. En cas de nécessité, on pourra obtenir du juge la permission de passer outre, de notifier hors ces heures normales. Si ces règles ne sont pas respectées, la sanction encourue est la nullité pour vice de forme de la mise en demeure, avec le régime restrictif qui est le sien.

    Dans les faits, la difficulté est différente et se concentre sur la détermination du moment précis où intervient la notification. Quand, juridiquement, à quel instant précis la notification est-elle réalisée ? Cet instant précis a une importance évidente car elle fait courir un délai pour le destinataire. Il faut alors connaître exactement le point de départ de ce délai. C'est la notification qui doit intervenir dans un certain délai imposé à l'auteur de l'acte.

    Par exemple, on dispose d'un mois après la notification d'une mise en demeure pour exécuter la prestation défaillante ou faire cesser le trouble objet de l'acte de mise en demeure. Il faut dater exactement la notification. Comme la preuve est parfois impuissante à déterminer cette date, la loi a dû recourir à des présomptions. Si la notification est une signification, les choses sont simples, la date de la signification sera celle portée par l'acte. Autrement dit, la date d'accomplissement qui fera pleine foi. Si par contre, la notification a été effectuée par voie postale, on retrouve une question de savoir s'il faut retenir la date de l'expédition ou de la réception. On peut en logique retenir les deux solutions.

    71La mise en demeure adressée à un preneur un dimanche sans autorisation de la juridiction compétente comme l'exige la législation camerounaise relative aux exploits d'huissiers est nulle, si bien que la demande de résiliation du bail et d'expulsion du locataire par le bailleur doit être déclarée irrecevable (TPI Bafoussam, n° 63, 2-9-2005 : Me GEUGANG c/ DJOBDIE AMADAMA, Ohadata J-07-64)

    72 CPCC Cameroun « Aucune signification ne peut être faite avant six heures et après vingt et une heures, non plus que les dimanches, les jours fériés ou chômés, si ce n'est en vertu de la permission du juge en cas de nécessité ».

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    Le Code de procédure civile et commercial Français a pris parti sur ce point à l'article 668. Ce texte pose une distinction. En principe, la date de la notification par voie postale est à l'égard de celui qui procède à l''expédition. Autrement dit, il n'aura respecté le délai qui s'impose le cas échéant à lui pour la notification que s'il a expédié la notification avant l'expiration du délai. Si l'expédition est intervenue avant l'expiration du délai, celui qui est à l'origine de l'acte est dans les délais. À l'égard du destinataire de l'acte, la date à retenir est celle de la réception de la lettre. Autrement dit, si la notification fait courir un délai, ce délai ne commencera à courir contre lui qu'à compter du jour où il aura été touché effectivement, où il aura reçu la lettre.

    Il se peut en effet que le destinataire ne soit pas présent ou refuse le courrier. Dans ce cas-là, le préposé aux Postes établira un avis de passage qui n'établira pas réception. C'est seulement lorsqu'il y a réception au domicile, ou au bureau de Poste qu'il y aura réception.

    *

    * *

    À l'image de tout acte juridique, la mise en demeure est un acte dont la mise en oeuvre répond à un ensemble de règles concourant chacune à la validité de celle-ci. Mais contrairement à tout autre acte, la mise en demeure obéit à des règles prévues dans l'AUDCG nouveau à l'article 133. Sa validité comme nous l'avons vu est de pair avec sa mise en oeuvre, puisqu'on ne saurait parler de mise en oeuvre sans toutefois se demander si l'acte est valable. De plus, le législateur communautaire Ohada attache beaucoup d'importance à la validité de la mise en demeure. D'ailleurs, cela est perceptible à travers l'article 134 de l'Acte uniforme suscité qui traite du caractère d'ordre public des dispositions applicables à la mise en demeure.

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    LA MISE EN DEMEURE: FORMALITÉ PRODUISANT DES
    EFFETS VARIABLES DANS LA PROCÉDURE DE RUPTURE
    DU BAIL À USAGE PROFESSIONNEL EN DROIT DE L'OHADA

    DEUXIÈME PARTIE:

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    CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE

    La consécration de la mise en demeure comme formalité indispensable en droit commercial Ohada découle du rôle « informateur » qu'il joue lors de la rupture du bail à usage professionnel73. Mais, nous l'avons vu, l'existence des hypothèses d'exclusion de la formalité, notamment les cas de dispenses. Mais, il reste vrai qu'aux termes de l'article 134 de l'Acte uniforme sur le droit commercial : « Sont d'ordre public les dispositions des articles 101, 102, 103, 107, 110, 111, 117, 123, 124, 125, 126, 127, 130 et 133 du présent Acte uniforme. Sauf convention contraire entre le bailleur et l'entreprenant, ce preneur ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement du bail, ni d'un droit à la fixation judiciaire du loyer du bail renouvelé », la mise en demeure ne saurait être exclue dans une phase de résiliation du bail ou de refus de renouvellement. En effet, il n'est pas possible pour les parties par quelques clauses que ce soit de soustraire cette formalité à la procédure de résiliation ou de refus de renouvellement. S'ils le font néanmoins, cette procédure sera simplement irrégulière pour défaut de mise en demeure. Le législateur a d'ailleurs encadré rigoureusement sa mise en oeuvre en subordonnant, sa validité au respect d'un certain nombre de conditions prévues à l'article 133 de l'Acte uniforme. Cet encadrement rigoureux revêt une grande importance, d'autant plus que la mise en demeure permet de donner une dernière chance au débiteur qui pourrait ne pas connaître l'étendue de ses obligations et qu'il échoira pour lui à travers elle de pouvoir les exécuter.

    Cependant, même si la mise en demeure participe du besoin de donner une dernière chance au débiteur de l'obligation, il n'en demeure pas moins vraie qu'elle génère des effets qu'il échait dès lors de présenter.

    73Le bailleur ne peut demander la résiliation du bail et l'expulsion du preneur à la juridiction compétente qu'après avoir fait délivrer par acte extrajudiciaire une mise en demeure d'avoir à respecter les clauses et conditions du bail ; à défaut il doit être débouté de sa demande (TGI Bobo-Dioulasso (Burkina-Faso), n° 219, 21-6-2006 : AD Sanou S. Siméon c/ Ouédraogo Lassané, Ohadata J-09-89).

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    La mise en demeure est un commandement de payer ou de s'exécuter que l'on va envoyer à la personne débitrice, redevable, en vertu d'un contrat, d'une prestation ou d'un paiement. Cet écrit est envoyé car la partie mise en cause n'a pas respecté ses propres obligations contractuelles. En outre, elle informe une entreprise ou un particulier de l'intention du créancier d'engager d'éventuelles poursuites judiciaires devant la juridiction compétente s'il ne remédie pas à la situation. La mise en demeure présente de nombreux intérêts. Ainsi, la mise en demeure est nécessaire et conditionne le point de départ de la prise en compte des intérêts dit moratoires, c'est-à-dire, ceux qui désignent une forme de réparation du préjudice causé au créancier d'une somme d'argent en raison du retard dans l'exécution des obligations qui incombent au débiteur74.

    Bien qu'étant encore dans une phase amiable du litige, cet acte n'est pas sans conséquence, en effet il est destiné à produire des effets juridiques notamment lors de la réception de ce dernier. Mais ces effets varieront selon que l'acte de mise en demeure sera conforme ou pas aux prescriptions légales75. Autrement dit, selon que l'auteur de l'acte aura respecté les règles concourant à sa validité (CHAPITRE I) ou sera passé outre, en les ignorants (CHAPITRE II).

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    74Civ 1ère, 29 nov. 2005

    75 Il s'agit des prescriptions posées par l'article 133 de l'AUDCG.

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    LE RESPECT DE LA MISE EN DEMEURE

    CHAPITRE I:

    La mise en demeure comme nous l'avons déjà souligné plus haut joue un rôle indispensable dans la procédure de rupture du bail professionnel puisque sans elle, cette procédure serait déclarée irrégulière. C'est la raison pour laquelle, il est important que cet acte soit lui-même valable pour pouvoir produire les effets attachés à un acte régulier. Par ailleurs, une fois la validité de la mise en demeure attestée, il est question de s'interroger sur une possible régularisation de la situation de la partie défaillante. Il convient donc d'analyser la question de la régularisation de la situation litigieuse (SECTION 1). Lorsque la partie défaillante refuse du tout de s'exécuter c'est-à-dire de régulariser la situation alors des effets spécifiques s'y appliqueront. (SECTION 2).

    SECTION 1 : LA RÉGULARISATION DE LA SITUATION
    DÉFAILLANTE

    La régularisation est définie comme la mise en conformité d'un acte juridique ou d'un acte de procédure avec les prescriptions légales opérant validation de l'acte originairement entaché de nullité. Cette régularisation est donc nécessaire pour valider ledit acte ou ladite procédure. Mais elle variera selon que nous sommes en matière de résiliation (paragraphe 1), ou en matière de renouvellement (paragraphe 2).

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    Paragraphe 1- L'hypothèse de la résiliation judiciaire

    La régularisation en instance de résiliation est possible et la partie souhaitant exécuter ses obligations pourra le faire dans le délai imparti par la mise en demeure (A). Cependant, il se pose le problème de la régularisation alors même que le délai est déjà écoulé (B).

    A- Régularisation dans les délais impartis

    La régularisation de la situation litigieuse est recommandée pour que l'acte puisse être jugée valable. La partie défaillante qui peut être soit le preneur, soit le bailleur selon le cas, peut à cet effet décider d'exécuter les obligations manquantes. L'article 133 imparti un délai à la partie défaillante pour cette régularisation. Il dispose : «À peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef ». Si elle y parvient, c'est-à-dire la partie défaillante, et ce dans les délais prévus, la régularisation emportera certains effets qu'il importe de ne pas ignorer. En effet, du moment où la partie pourtant fautive a exprimé son intention de régulariser sa situation, ou l'a d'ailleurs déjà fait, il s'en suit que toutes les actions tendant à demander la résiliation du bail seront éteintes. D'où l'idée de « l'extinction des actions en résiliation du bail ». Ceci se justifie par le souci de permettre à celle-ci de se rattraper dans le cadre de l'exécution de ses obligations. Ainsi, toute action en résiliation intentée postérieurement sera irrecevable puisque éteinte.

    Dans l'hypothèse d'une clause résolutoire, il est encore possible pour le locataire de régulariser sa situation dans le délai d'un (01) mois. Dans ce cas, la clause résolutoire est privée d'effet et le bail se poursuit normalement. La Cour d'appel de Bordeaux a ainsi rendu la décision suivante le 2 novembre 201176: « Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. (...) Dans ces conditions, compte tenu de la situation du débiteur, l'octroi rétroactif de délais de paiement pour la régularisation de deux termes de loyers et de

    76 CA Bordeaux, 02 /11/201, n° 11/4804.

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    la suspension de la clause résolutoire pour effectuer ce paiement sont justifiés. Le paiement intégral des loyers dus étant intervenu avant même que la cour accorde ces délais, il doit être constaté que la clause résolutoire n'a pas opéré. ». Nous constatons ici que le juge est très peu tolérant des résiliations précipitées puisqu'il n'accorde que peu de crédit à une action en résiliation alors même que la partie défaillante proposait de régulariser la situation ou l'a même déjà régularisé. La Cour de l'Ouest dans une affaire a décidé que le refus pour le bailleur de renoncer à l'action en résiliation alors que le preneur offrait de s'exécuter est une faute de la part du bailleur pouvant entraîner le versement d'une indemnité d'éviction77. L'indemnité d'éviction était due dans le cas d'espèce car, le véritable but du bailleur était la libération des locaux et non le paiement des arriérés de loyers. Il échait de rappeler que la régularisation peut aussi être faite par les créanciers du débiteur de l'obligation et ce, en vue de protéger leurs intérêts qui pourraient être sapés si la résiliation venait à être prononcée. Un délai d'un mois à compter de la mise en demeure lui est imparti pour exécuter ses propres obligations et d'autre part un délai supplémentaire d'un mois, après la notification de la demande en résiliation du bailleur, pour permettre aux créanciers inscrits de se substituer à lui pour exécuter à sa place ses obligations ou l'inciter à s'exécuter. La haute juridiction de cassation française a eu l'occasion de juger que l'exécution par le locataire, pendant ce délai, de ses obligations spontanément ou sur incitation du créancier inscrit, a pour effet de faire échec à la résiliation sollicitée. En cas de notification de la demande en résiliation aux créanciers inscrits, la juridiction saisie, pour se conformer à l'article 133 du nouvel Acte uniforme, devrait renvoyer la procédure à plus d'un mois avant de rendre sa décision de résiliation. En effet, l'exigence de la notification a pour objet de porter la procédure de résiliation initiée par une partie au bail à la connaissance des créanciers inscrits sur le fonds antérieurement à la demande en résiliation , en vue de leur permettre « de prendre le cas échéant toutes dispositions utiles pour sauvegarder leurs intérêts » . Récemment, un arrêt de la Cour de cassation française du 14 décembre 2008 a jugé que la notification de l'acte introductif d'instance vaut mise en demeure au créancier d'exécuter les obligations du bailleur défaillant ou de les faire exécuter. Cette obligation d'information permet aux créanciers inscrits d'une part d'intervenir dans l'instance en résiliation pour s'assurer qu'il n'existe pas

    77CA de l'Ouest, n° 11/civ., 9-10-2002 : K. A. c/ F. C., Ohadata J-04-227 : Lorsque la mise en demeure a été suivie d'une offre réelle par le preneur de payer les loyers dus, offrerejetée par le bailleur qui a répondu qu'il «ne veut pas recevoir de l'argentcar le véritable problème était que le preneur libère sa maison», les conditions de résiliation prévues par l'article 101 [devenu 133] ne sont pasremplies ; si le bailleur décide tout demême de résilier, il doit, dans ce cas, se conformer à l'article [94 devenu 126] de l'AUDCG, c'est à dire offrir au preneur une indemnité d'éviction

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    une collusion frauduleuse entre le bailleur et le locataire et d'autre part d'avoir la faculté d'exécuter les obligations du locataire défaillant en ses lieux et place. Mais, lorsque la défaillance du preneur résulte d'agissements positifs par exemple l'extension d'activités illicites, réalisation de travaux sans autorisation du bailleur..., la marge de manoeuvre du créancier inscrit est bien limitée. Il ne peut, en effet, se substituer au locataire. Il ne peut intervenir que pour l'amener à faire cesser le manquement à ses obligations. Cependant, lorsque l'action en résiliation est fondée sur un défaut de paiement de loyers ou le refus de procéder aux réparations d'entretien, le créancier inscrit peut exécuter ces obligations à la place du preneur, pour éviter le dépérissement de sa sûreté.

    B- Régularisation hors délai

    La régularisation de la situation litigieuse doit intervenir dans un délai bien déterminé qui est d'un (01) mois. L'article 133 de l'AUDCG de 2010 dispose que : « À peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef ». Ce qui à notre sens semble vouloir dire que toute régularisation ne devrait pas s'inscrire en dehors du délai d'un mois. Cependant, qu'en est-il donc si elle intervient après ce délai ? Le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar78 a proposé une solution, lorsqu'il estime que : «Lorsque le preneur ne paye pas ses loyers ou ne respecte pas les clauses et conditions du bail, la résiliation de celui-ci et l'expulsion du preneur peuvent être obtenues par voie judiciaire. Conformément à l'article 101 de l'AUDCG, une mise en demeure par acte extrajudiciaire doit informer le preneur qu'à défaut de paiement dans un délai d'un mois la résiliation sera poursuive. Ainsi lorsque les loyers réclamés ont été payés hors du délai imparti par le commandement de payer, le juge ordonne la résiliation du bail, l'expulsion et la condamnation à payer les sommes dues ». Mais cette solution va être remise en cause par un Arrêt de la Cour d'Appel du Centre79 dans laquelle le juge estime que : « Le juge peut refuser la résiliation pour tenir compte de ce que le débiteur a intégralement acquitté des

    78 Tribunal Régional Hors Classe de DAKAR, jugement civil n° 2322 du 17 décembre 2003, REMY JUTEAU c/ LA STE SENITAL, Ohadata J-04-282.

    79CA du CENTRE, N°124/De, 19-3-2004 : Le groupe SOCOPAC/FOMUP c/ La SCI des Frères Réunis, Ohadata J-04-207 ; voir aussi dans ce sens CA Ouagadougou, N° 105, 19-11-1999 : IMPEX-AFRIQUE c/ ATTIE CHAWKI, F. AHO et al. ; OHADA : Jurisprudences nationales. Éd. BENIN CONSULTING GROUP, Cotonou (Bénin) : 2004, p 39,2BF21

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    loyers échus avant l'introduction de l'instance en expulsion bien que le délai d'un mois imparti étant déjà écoulé ». De même, comme l'a rappelé le juge de la Cour d'Appel d'Abidjan, l'appelant (locataire) s'étant déjà acquitté de tous les loyers dus, y compris ceux qui avaient motivé le premier juge à ordonner son expulsion, la demande actuelle de résiliation du bail fondée sur le non-paiement de loyers devient sans objet, et il n'y a lieu ni à résiliation du contrat ni à expulsion de l'appelant80. Ainsi, si la situation est régularisée, et ce même après que soit rendue la décision constatant l'acquisition de la clause résolutoire l'expulsion du locataire peut ne pas avoir lieu. En effet, la jurisprudence précise que lorsque les causes du commandement ont été réglées hors du délai imparti, mais avant que le Juge ne statue, le Juge peut accorder rétroactivement des délais au locataire, puis constater que le paiement ou l'exécution demandé a eu lieu dans ces délais81Notons que «la demande de suspension des effets de la clause résolutoire est recevable, même si l'acquisition de la clause résolutoire a été consacrée par une ordonnance du Juge des référés devant lequel le preneur, qui n'avait pas comparu, n'avait pas sollicité de délai».

    Cependant, il se pose un problème de savoir si la possibilité donnée au preneur de s'exécuter même après le délai légal d'un mois ne remet il pas en cause l'efficacité de la mise en demeure ? La réponse à cette question nécessite de comprendre le but même de la législation Ohada, c'est-à-dire assurer la sécurité des transactions juridiques en maintenant autant que possible les contrats en vie. Par là même, il est donc de bon droit et c'est ce que la jurisprudence en validant une régularisation hors délai, de reconnaître à la partie souhaitant régulariser sa situation après le délai prévu de le faire. Mais, si tel est le cas que deviendra donc le bailleur s'étant déjà engagé auprès de tierces personnes ? Va-t-on le sacrifier ? Il s'en suit qu'une réparation pourrait lui être alloués sur la base du retard dans l'exécution de son ou ses obligations contractuelles. La réparation pourra aussi tenir compte du fait que le bailleur aurait subi un préjudice ou fait subir un préjudice à un éventuel tiers avec qui il aurait déjà contracté. Aussi, plus loin, il échait de comprendre que la mise en demeure peut être double si l'on se base sur l'article 133 al.4 de l'AUDCG nouveau82 qui prévoit une notification aux

    80CA Abidjan, N° 330, 10-3-2000 : MALKA Elie c/ Sté TOTAL CI, F. AHO et al. ; OHADA : Jurisprudences nationales. Éd. BENIN CONSULTING GROUP, Cotonou (Bénin) : 2004, p 24, 2CI11.

    81Cour d'appel de Bordeaux, 2 novembre 2011, n° 11/4804 :«Le paiement intégral des loyers dus étant intervenu avant même que la cour accorde ces délais, il doit être constaté que la clause résolutoire n'a pas opéré.»

    82 Article 133 al.4 : « La partie qui entend poursuivre la résiliation du bail doit notifier aux créanciers inscrits une copie de l'acte introductif d'instance. La décision prononçant ou constatant la résiliation du bail ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la demande aux créanciers inscrits ».

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    créanciers inscrits sur le fonds qui intervient après la première mise en demeure et qui leur impartis encore un délai d'un mois supplémentaire pour leur permettant ainsi d'être informé et de prendre les mesures qui s'imposent.

    Paragraphe 2 : Le cas du refus de renouvellement du bail

    Le propriétaire de l'immeuble peut refuser le renouvellement du bail en versant au preneur une indemnité d'éviction fixée d'accord parties ou par le juge. Le bailleur peut aussi dans certains cas, refuser le renouvellement sans être tenu au versement d'une indemnité au locataire. L'Acte Uniforme de 2010 prévoit en son article 127, les cas que le bailleur peut invoquer pour s'exonérer du paiement de l'indemnité. Le refus de renouvellement peut par exception être opéré sans indemnités dans deux hypothèses. La première hypothèse : S'il existe un motif grave et légitime de refuser le renouvellement comme la faute du locataire consistant à une violation de ses devoirs de locataire83. Et la seconde hypothèse est en cas de droit de reprise. Concernant particulière la première hypothèse, le bailleur peut s'opposer à tout renouvellement s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur84. Les motifs graves et légitimes'' dont peut se prévaloir le bailleur pour refuser le renouvellement se résument pour l'essentiel en un comportement gravement répréhensible du locataire. Il s'agira, d'après l'Acte Uniforme, soit de l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail85 , soit la cessation de l'exploitation du fonds de commerce. La première hypothèse renvoie à une violation de la part du preneur locataire d'une obligation contractuelle. En nous référant aux articles 112 et suivants de l'AUDCG nouveau sur les obligations du locataire. Ces motifs graves et légitimes'' consisterons principalement au non-paiement ou paiement irrégulier des loyers 86 , ainsi qu'en la déspécialisation non autorisée87. Il pourrait également s'agir du défaut d'entretien et des dégradations des lieux

    83Il ne paie pas ses loyers ; il n'entretient plus de locaux ; il a changé la destination des lieux sans autorisation du propriétaire.

    84 Sauf cas de survenance d'une circonstance exceptionnelle faisant apparaitre de nouveaux motifs. Ex : Ruine de l'immeuble, promulgation d'une loi rendant caduc le motif précédemment invoqué. Par ailleurs, à tout moment de la procédure , le bailleur pourra également invoquer l'absence de l'une des conditions légales du droit au renouvellement, tel par exemple, le fait que le locataire a cessé d'exploiter le fonds de commerce dans les lieux loués, le fait que le local accessoire faisant l'objet du bail n'est plus nécessaire à l'exploitation du fonds.

    85 Cette violation peut aller selon la jurisprudence jusqu'à celle de ne refuser de souscrire une police d'assurance si cela figurait au contrat. Voir. CCJA, Arrêt n°32/2008, Aff. Sté METALUX Sarl c/ CHEICK BASSE, Actualités juridiques n°60-61, note anonyme, ohadata J-08-134

    86 En effet, payer le loyer est pour le preneur une obligation substantielle qui caractérise le bail. Un paiement est dit irrégulier s'il s'effectue avec retard ou entre les mains de toute personne autre que le bailleur ou son représentant désigné au contrat.

    87 C'est-à-dire des travaux ou changement de destination des lieux loués sans autorisation du bailleur.

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    loués par le locataire. La seconde quant à elle, consiste non seulement au défaut d'exploitation sans raison sérieuse et légitime88 mais également une exploitation non conforme ou ayant un caractère immoral. Il en sera de même des cessions et sous-locations interdites. Le preneur locataire peut lui-même s'opposer au renouvellement du bail demandé par le bailleur. L'article 105 et suivant de l'AUDCG nouveau précise clairement les obligations qui incombent au bailleur dans le cadre de l'exécution du bail. Ces obligations se résument pour l'essentiel en l'exécution des grosses réparations89 et en une garantie de bonne jouissance des lieux loués90. Ainsi, le bailleur refusant de remplir ces engagements qui sont pourtant siennes dans un contrat, il reste que le preneur peut en se basant sur cette inexécution, refuser de renouveler le bail le liant au propriétaire de l'immeuble, le bailleur. Par ailleurs, la partie ayant manqué à ses obligations peut décider de régulariser la situation litigieuse, encore que rien ne l'y empêche. Mais, que cette régularisation intervienne avant ou après le délai prévu par la mise en demeure, la partie demanderesse ne peut refuser de renouveler le bail. Si elle s'y oppose, alors l'on parlera de l'illégitimité du refus de renouvellement ou de motifs inopérants pouvant conduire à un refus non justifié. Dans pareil cas, cas seule une indemnité d'éviction sera due91.

    SECTION 2 : LE DÉFAUT DE RÉGULARISATION DE LA SITUATION DÉFAILLANTE

    La mise en demeure comme nous l'avons déjà souligné plus haut joue un rôle indispensable dans la procédure de rupture du bail professionnel puisque sans elle, cette procédure serait déclarée irrégulière92. C'est la raison pour laquelle, il est important que cet acte soit lui-même valable pour pouvoir produire les effets attachés à un acte régulier. Par ailleurs, une fois la validité de la mise en demeure attestée, la question qui se pose ici avec beaucoup d'acuité est celle de savoir : que se passera-t-il si la partie défaillante refuse de

    88 Le défaut d'entretien ne peut pas par exemple résulter d'un cas de maladie grave d

    89 Les grosses réparations sont notamment celles des gros murs, des voûtes, des poutres, des toitures, des murs de soutènement, des murs de clôture, des fosses septiques et des puisards (article 106 al 2).

    90 Le bailleur est responsable envers le preneur du trouble de jouissance survenu de son fait, ou du fait de ses ayants-droit ou de ses préposés (article 109).

    91 En pareil cas, si le bailleur souhaite vraiment résilier le bail, il devra offrir au preneur une indemnité d'éviction (CA de l'Ouest, n° 11/civ., 9-10-2002 : K. A. c/ F. C., Ohadata J-04-227).

    92CF TPI DE BAFOUSSAM, JUG CIVIL N° 67 DU 16 SEPTEMBRE 2005, AFFAIRE Paroisse de la cathédrale de Bafoussam c/ ngoupou Samuel : « en l'absence d'une mise en demeure préalable, la demande de résiliation d'un contrat de bail commercial formée par le bailleur doit être déclarée irrecevable. Article 133 AUDCG

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    régulariser sa situation ? La réponse est simple puisque deux solutions sont prévues en l'occurrence : d'une part la résiliation du bail (paragraphe 1), et d'autre part le refus de renouvellement (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : la résiliation du bail à usage professionnel en droit de l'Ohada

    La doctrine oppose la résolution, dont l'effet est en principe rétroactif, à la résiliation, qui ne joue que pour l'avenir93 ; ce qui conduit certains auteurs à déclarer à l'égard des contrats à exécution successive, qu'il y aurait résiliation et non résolution94. La résiliation est définie comme : « la suppression d'un contrat successif pour l'avenir, en raison de l'inexécution par l'une des parties de ses obligations »95. C'est donc son effet rétroactif qui la distingue de la résolution, et plus encore de la nullité qui sanctionne plutôt un vice de formation. Longtemps la jurisprudence n'a semblé se soucier du trouble sémantique né d'un usage aléatoire des notions de résolution et de résiliation. La distinction répandue était tirée de la nature du contrat rompu : le contrat à exécution instantanée est résolu, tandis que le contrat à exécution successive se trouve résilié, en conformité d'ailleurs avec le vocable législatif s'agissant du bail commercial. En étaient déduits les effets respectifs de la résolution et de la résiliation, la première devant remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient antérieurement, alors que la seconde ne valait que pour l'avenir, ne remettant pas en cause l'exécution contractuelle intervenue+ depuis la conclusion du contrat jusqu'à sa résiliation. Mais il semble que la résiliation ne soit pas la résolution d'un contrat à exécution successive. Si seule la résolution se conçoit pour un contrat à exécution instantanée, résolution et résiliation se combineraient pour un contrat à exécution successive, en fonction de l'inexécution sanctionnée.

    En outre, en ce qui concerne le bail, il a été procédé à un véritable toilettage des dispositions relatives à la cessation du bail professionnel. De prime abord, il importe de relever la disparition du terme « judiciaire » de l'intitulé du chapitre VII consacré désormais à la « résiliation du bail ». Au regard de cette disparition, l'on est tenté de penser que la

    93 La Cour de Cassation pour sa part, utilise indifféremment les deux termes. Une telle incertitude terminologique rend parfois l'interprétation de ses arrêts particulièrement délicate. Voir par exemple, l'interprétation donnée à l'arrêt Cass.Civ. 2 mars 1983 MARTY ET RAYNAUD dans Les obligations, Sirey, 2è éd., 1988 n°332, P.342, note 4.

    94 GHESTIN (J.), JAMIN(C.), BILIAU (M.), Traité de droit civil (les effets des contrats), L.G.D.J, 3è édition, 2005, n°615.

    95 GUILLIEN et VINCENT, Lexique des termes juridiques, 13è édition, 2001, P.487.

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    résiliation du bail peut être amiable d'autant plus que contrairement à l'article 100 de l'ancien Acte uniforme relatif au droit commercial général, le nouvel article 132 semble beaucoup plus libéral puisqu'il consacre la possibilité de s'affranchir de l'office du juge96. Malgré tout, la résiliation demeure judiciaire, car l'article 133 alinéa 2 établit l'obligation de saisir le juge en exigeant que la demande en justice aux fins de résiliation du bail doive être précédée d'une mise en demeure. Le législateur cherche par-là à soumettre cette procédure au contrôle du juge qui devra toujours chercher à assurer la protection des intérêts des parties en présence.

    En effet, les distorsions jurisprudentielles sur des questions processuelles comme celle de la compétence juridictionnelle ainsi que les lenteurs constatées dans l'instance en résiliation du bail professionnel sont de nature à entraver l'objectif d'une application judiciaire du droit uniforme OHADA97. C'est conscient de ces enjeux stratégiques que le législateur de l'OHADA a esquissé une stratégie d'aménagement de la procédure de résiliation du bail professionnel (A). Mais, à la lecture de l'article 133 du nouvel Acte uniforme, il ne fait pas de doute que le législateur uniforme n'est pas allé jusqu'au bout de sa logique. En outre, une fois que la procédure de résiliation aura été menée régulièrement, celle-ci produira inéluctablement des effets juridiques (B).

    A- La procédure applicable en cas de résiliation du bail professionnel

    Le droit uniforme du bail commercial a été toujours marqué par une volonté de garantir la protection du locataire commerçant contre l'arbitraire du bailleur au cours de l'instance en résiliation. Il s'agissait, à travers l'exigence d'une mise en demeure préalable du preneur et de la nécessité de la reproduction de certaines mentions dans l'acte extrajudiciaire de mise en demeure, de favoriser la continuité de l'exploitation et la sécurité des activités commerciales. Cette protection recherchée non seulement par le législateur OHADA mais par toutes les législations en droit du bail professionnel, se décline quelque part en l'évitement des lenteurs procédurales. Il sera davantage question dans le cadre de cette procédure de s'interroger sur deux (2) points : Qui peut exercer cette action ? D'où l'idée des titulaires de l'action et quelle est la juridiction compétente pour statuer ?

    96 L'on peut affirmer que le recours au juge est facultatif puisque la mise en oeuvre d'une clause résolutoire n'est pas nécessairement assujettie à la présence du juge. Voir en ce sens C.A. du Centre, arrêt n°108/Civ. du 12 déc. 2003, FOMAKA GWEI Isaac c/ La Sierka, Ohadata n°J-04-204.

    97« Avec diligence dans les conditions propres à garantir la sécurité juridique des activités économiques afin de favoriser l'essor de celles-ci et d'encourager l'investissement »

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

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    S'agissant primo des titulaires de l'action en résiliation, nous devons partir du constat selon lequel l'action en résiliation a été considérée avant la réforme de 2010 comme une « action attitrée » ou « action réservée ». Il s'agit d'une action dans laquelle « la qualité pour agir apparait comme une condition distincte de l'intérêt à agir puisqu'il faut exciper tout à la fois de l'intérêt que l'on a à élever ou à combattre la prétention litigieuse et du titre qui permet de le faire». L'action attitrée n'est attribuée qu'à certaines personnes intéressées seulement98. Sous l'angle de la théorie générale de l'action en justice, la loi communautaire avait ainsi prévu une « attribution exclusive » du droit d'agir au bailleur , du moins dans le cadre de l'action en résiliation du bail commercial pour inexécution des conditions du bail. Sous l'empire de l'ancien article 101 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général, il a été prévu une attribution spéciale très étroite du droit d'agir en résiliation du bail commercial. Seul le bailleur était habilité à se pourvoir en résiliation. Cela est d'ailleurs mieux perceptible à l'article 101 alinéa 2. Mais, cette attribution exclusive au bailleur du droit d'agir en résiliation était de moins en moins acceptable, si l'on sait que le preneur pouvait dans bien des situations avoir intérêt à se délier du contrat de bail, en invoquant une inexécution des obligations du bailleur. Alors, pourquoi, ne pas lui ouvrir la possibilité d'agir en résiliation en excipant d'une défaillance du bailleur ? C'est à cette question que le législateur Ohada a répondu en consacrant, dans la nouvelle version de l'acte uniforme relatif au droit commercial général un droit de résiliation du preneur. Le nouvel Acte uniforme portant sur le droit commercial général a franchi ce pas, en consacrant le droit de résiliation du preneur. Il résulte de l'alinéa 1er de l'article 133 de cet Acte uniforme que : « le preneur et le bailleur sont tenus chacun en ce qui le concerne au respect de chacune des clauses et conditions du bail sous peine de résiliation ». Désormais, aussi bien le bailleur que le preneur ont qualité pour agir en résiliation, en raison de la défaillance de l'autre partie dans l'exécution de ses obligations contractuelles.

    Secundo, s'agissant de la juridiction compétente, La réforme du 15 décembre 2010 de l'AUDCG a essayé d'apporter une réponse à la question du juge compétent en matière de résiliation. L'article 133 dispose désormais que « La demande en justice aux fins de résiliation du bail doit être précédée d'une mise en demeure d'avoir à respecter la ou les clauses ou conditions violées (...) A peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de

    98C'est tout le sens du deuxième paragraphe de l'article 1-2 alinéa 1e du Code de procédure civile sénégalais qui réserve les « cas où la loi attribue ce choix aux seules personnes qu'elles qualifie pour élever une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé »

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    s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef ».La compétence du juge siégeant à bref délai, c'est-à-dire pour le droit camerounais, le juge des référés, semble s'ériger en principe. Dans l'hypothèse de la résiliation en présence d'une clause résolutoire, le problème de la compétence du juge des référés s'est posé avec beaucoup d'acuité. La détermination de la juridiction compétente variera selon que la résiliation sera avec ou sans clause résolutoire. La difficulté tenait en ce que le juge des référés ne rendant que des ordonnances, devait-il se déclarer compétent toutes les fois qu'il était saisi d'une demande en expulsion pour inexécution ou mauvaise exécution des conditions du contrat de bail professionnel ? Cette question qui à l'origine d'une énorme division jurisprudentielle99 n'a pas elle-même trouvé de solution malgré l'avis donnée par la CCJA le 04 Juin 2003100. Même si l'avis donné par la CCJA, n'a pas apportée une solution satisfaisante à la question, elle a eu le mérite d'avoir levé le doute sur le sens du mot « jugement » qui doit s'entendre au sens large. Mais il demeurait la question de savoir si la compétence du juge du fond était le principe et celle du juge des référés l'exception ? La grande partie de la doctrine avait alors pris position, pour la compétence du juge de fond, le juge des référés ne pouvant intervenir qu'en présence d'une clause résolutoire, ce que n'approuve pas une autre doctrine101. Ceci s'est justifié par le fait qu'en présence d'une clause résolutoire, le juge, n'ayant pas grand-chose à faire, il doit siéger à bref délai, car il ne doit que constater la résiliation qui a été parfaite entre les parties. On sait traditionnellement que la clause résolutoire, lorsquelle est insérée dans un contrat, a pour effet de faciliter la rupture du contrat concerné. Parce qu'une telle clause prive le juge de tout

    99 Au Cameroun, Arrêt n° 157/Civ, du 28 Janvier 2000, Aff. Sté Papadhópoulos et Fils c/ CNDC, inédit. Le juge de référé de la Cour d'Appel du centre affirma sans aucune ambiguïté que « le bail non écrit n'en constitue pas moins un et que le juge des référés est compétent pour prononcer l'expulsion du locataire s'il est établit que celui-ci ne paie pas ses loyers ». Par contre, dans d'autres affaires, la même juridiction avait subordonnée cette compétence à l'insertion dans le contrat d'une clause résolutoire. Voir Arrêt n°362/Civ/02-03 du 06 Juin 2003 Aff. SCI FOV c/ Sieyansdji Jean Baptiste, Inédit.

    100Une position de principe de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage s'avérait nécessaire pour mettre un terme aux hésitations jurisprudentielles. D'une part, saisie par voie consultative par le Ministère de la Justice du Sénégal sur la question de la détermination de la juridiction compétente visée par l'article 101 de l'Acte uniforme portant droit commercial général, la haute juridiction communautaire a rendu l'avis n° 001/2003/EP du 4 juin 2003.

    101Ce qui au regard d'un auteur semble « alourdir la procédure d'expulsion des preneurs indélicats, qui se trouvaient par l'occasion protégés excessivement par les dispositions bienveillants de l'article 101 de l'AUDCG ». Voir KEUGONG WATCHO (R.S.), « Juridictions compétentes en matière de résiliation de bail professionnel après la réforme de l'Acte Uniforme relatif au droit commercial général » in Juridis périodique, n°93, Janvier-Février-Mars 2013, P.102.

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    pouvoir d'appréciation du degré d'inexécution de la part du débiteur102, on admet que le juge des référés est compétent pour se prononcer pour la résiliation du bail, et l'expulsion du preneur. En effet, en présence d'une clause résolutoire, ce n'est pas le juge qui prononce la résiliation, mais elle s'opère de plein droit à partir du moment où une des deux parties a violé une des conditions visée par la clause résolutoire introduite dans le du bail. Le législateur OHADA a confirmé cette compétence du juge des référés en matière de résiliation du bail dans sa réforme de 2010. Mais il semble que le législateur OHADA a même étendu cette compétence du juge des référés en cas d'absence de clause. Ainsi une interrogation naît : le juge des référés serait-il devenu le juge de droit commun en matière de résiliation du bail professionnel en OHADA ? Une réponse affirmative s'impose et diverses raisons là justifient. Les premières tiennent au fait que le législateur de 2010 en changeant la terminologie « Résiliation Judiciaire » pour « Résiliation »103 tout court a voulu être plus précis quant au fait que la résiliation pourrait être judiciaire, conventionnelle ou légale. Et quel que soit le cas, le juge des référés sera compétent pour connaître de la résiliation du bail professionnel. Les secondes, quant à elles concernent l'idée de « juridiction siégeant à bref délai ».En réalité, le fait pour le législateur d'avoir adjoint à l'expression « juridiction compétente » celle de « juridiction compétente siégeant à bref délai » est justement de donner au juge des référés pris comme juridiction siégeant à bref délai une compétence ne faisant plus l'objet d'un doute. La réforme de 2010 a apporté une solution en affirmant qu'il existe des hypothèses dans lesquelles le juge des référés peut se prononcer sur la résiliation alors que dans d'autres et notamment en présence d'une clause elle devra tout simplement constater la résiliation qui se serait réalisée automatiquement. Le texte communautaire aurait ainsi doté la juridiction des référés d'une compétence dérogatoire qui emporterait éviction des conditions du référé de droit commun104. Il s'agirait d'un référé spécial ou plus précisément d'un référé de fond, qui n'emprunte au référé que les formes procédurales tandis que les principes généraux qui caractérisent les référés ne lui sont pas applicables. Ainsi, même en présence de contestation sérieuse ou en dehors de toute urgence, le juge des référés serait seul compétent pour statuer sur la résiliation du bail professionnel, à l'exclusion de toute autre juridiction.

    102 En effet, dans le cadre d'une action en résiliation judiciaire le juge se doit d'apprécier l'importance de la faute (en ce sens, V. Cass.Civ. 3è éd, 126 mars 1977 ? Rev. Loyers, 1977).

    103 Chapitre VII du Titre 1 Livre VII relatif au bail à usage professionnel et fonds de commerce.

    104 Il s'agit de l'absence de contestation sérieuse, urgence etc...

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    B- Les effets de la résiliation du bail professionnel

    Le bail professionnel en droit Ohada est le plus souvent conclu au profit du preneur, et l'on voit mal un locataire demander la résiliation de ce contrat. Généralement, il cherchera toujours à exécuter les obligations manquantes du bailleur, sous réserve de déduire les frais dépensés dans le loyer dû. Cela dit, la résiliation ne pourra être couramment prononcée qu'à l'égard du bailleur qui aura toujours intention à ce que le contrat le liant au preneur soit résilié si le preneur est indélicat. Ainsi, lorsque la résiliation est reconnue acquise et le lien contractuel rompu, le preneur qui ne libère pas volontairement les lieux doit en être expulsé conformément à la décision de justice qui l'a prononcé, mais, celle-ci est souvent accompagnée de sanctions conventionnelles complémentaires.

    S'agissant de l'expulsion, elle est l'action consistant à obliger l'occupant sans titre ou le locataire à la fin du bail d'un immeuble de vider les lieux105. Le créancier doit posséder une décision de justice ou un procès-verbal de conciliation pour exiger l'expulsion du preneur, d'où la nécessité d'une décision prononçant cette expulsion. Ainsi, tout locataire preneur qui, face à toute menace de résiliation du bail professionnel ne prends pas de mesures adéquates pour juguler la situation, pourra être expulsé du local qu'il occupait lors. L'AUDCG en son article 133 alinéa 2 dispose : « À peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef ».Il ressort clairement de cette disposition que le législateur OHADA réprime froidement le non-respect par le locataire de ses obligations. Prévoir une expulsion du preneur est une mesure sanctionnatrice et s'inscrit davantage dans la logique de la protection du droit de propriété du bailleur propriétaire du fond. Il revient donc au juge de prononcer cette expulsion dès lors que le constat de l'inexécution a été fait. Il en est ainsi puisque seul le juge est habilité à déclencher l'expulsion du preneur. C'est ce qui ressort de la lecture de l'article 133 alinéa 4 de l'AUDCG. La conséquence est qu'en l'absence de décision de justice, la procédure d'expulsion ne saurait être valable. La Cour d'Appel d'Abidjan a d'ailleurs eu à décider que le locataire doit être maintenu dans le local à usage commercial, dès lors qu'il a été expulsé de fait, aucune décision de justice ne l'ayant

    105 LADEGAILLERIE (V.), Lexique des termes juridiques, Anxagora,13 Juillet 2005, P.74, www.anaxagora.net

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    expulsé dudit local106.

    S'agissant en outre des sanctions conventionnelles complémentaires, nous retenons qu'à l'expiration du délai d'un mois, le preneur qui n'a pas totalement obtempéré à la mise en demeure s'expose à des poursuites engagées par le bailleur. Si la résiliation est reconnue acquise au bailleur, elle pourra très souvent être accompagnée de sanctions conventionnelles complémentaires.

    Il s'agira d'abord du remboursement de l'ensemble des frais de poursuites, y compris les honoraires du conseil. Ces frais sont naturellement à la charge de la partie défaillante.

    Ensuite de la fixation par avance de l'indemnité d'occupation avec son mode de calcul. Ce sont des sommes d'argent que verse le preneur évincé et qui demeure dans les lieux et ce, en vertu d'une décision d'expulsion régulière. Le loyer contractuel est remplacé par une indemnité d'occupation. Elle est due de plein droit à compter de la cessation du bail et ce par le locataire qui se maintient dans les lieux alors qu'une décision rendue l'en expulse pourtant. Cette indemnité est calculée selon la valeur locative, et compte tenu de tous les éléments d'appréciation. Au regard de la jurisprudence actuelle, les juges, tout en prônant une protection du preneur, conditionnent celle-ci au départ effectif des lieux même si leur fonds de commerce s'en retrouve anéanti faute d'emplacement nouveau.

    Et enfin, du dépôt de garantie 107 qui reste intégralement acquis au bailleur à titre d'indemnité108, puisque dans l'hypothèse de la mise en oeuvre de la clause résolutoire, le preneur a nécessairement commis une faute. L'Acte Uniforme ne proscrit pas le dépôt de garantie, en conséquence, dans la pratique des baux à usage professionnel, cette clause est usuelle109.

    De ce qui précède, nous pouvons remarquer que les effets de la résiliation ne sont envisagés que contre le preneur alors que toutes les deux parties ont désormais le droit d'agir

    106 CA Abidjan, n°361,27-3-2001 : N c/ A, Le Juris Ohada, n° 1/2003,Janvier-mars 2003, P.54, Ohadata J-03118 ;

    107 Le dépôt de garantie constitue une somme versée par le locataire au propriétaire d'un immeuble à usage professionnel en vue de garantir la bonne exécution des obligations du bail. Cette somme est souvent stipulée remise à titre de nantissement. V. GATSI (J.), pratique des baux commerciaux dans l'espace OHADA, 2è éd., Presse Universitaire Libre, 2008.

    108 CA Paris, 16è Ch. A, 11 juin 1991.

    109 Aucune disposition de l'AUDCG ne prévoit, au profit du bailleur, le versement d'une somme en garantie de l'exécution des obligations du bail, mais cette pratique est courante au, point de justifier un examen affectif. V. GATSI (J.), pratique des baux commerciaux dans l'espace OHADA op.cit., p.89

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    en résiliation. Mais en allant plus loin on peut tout de même admettre que si le preneur demande la résiliation du bail, des dommages-intérêts pourraient lui être octroyés. En effet, le trouble de jouissance du fait du bailleur, ou la ruine de l'immeuble, par exemple, lorsqu'il se réalise sont de nature à causer un préjudice au preneur. Par ailleurs, il faut préciser que ces dommages-intérêts ne pourront être dus que si les conditions de la responsabilité civile, fondée sur les articles 1382 et suivants du Code Civil110, sont réunies.

    Paragraphe 2- le refus du renouvellement justifié du bail à usage professionnel

    Comme il était déjà admis sous l'ancienne législation, le droit au renouvellement du bail est acquis au locataire-commerçant. Le renouvellement est un droit qui confère au preneur une illusion de propriété ; raison pour laquelle Yves GUYON le qualifie de «propriété commerciale ». Il est ouvert au locataire qui justifie avoir exploité, avec l'accord du propriétaire, l'activité prévue au bail pendant une durée d'au moins deux(02) ans111. Les délais de la demande de renouvellement sont désormais plus réduits, notamment en ce qui concerne le bail à durée déterminée : la partie sollicitant le renouvellement, généralement le preneur, doit agir par acte extrajudiciaire au plus tard trois(03) mois avant la date d'expiration du bail. Faute de quoi, il est déchu de son droit au renouvellement. Quant à l'autre, très souvent le bailleur, elle doit faire connaître sa réponse au plus tard un (01) mois avant l'expiration du bail, faute de quoi il est censé avoir accepté112. Ainsi, le propriétaire de l'immeuble peut refuser le renouvellement du bail en versant au preneur une indemnité d'éviction fixée d'accord parties ou par le juge. Le bailleur peut aussi dans certains cas, refuser le renouvellement sans être tenu au versement d'une indemnité au locataire. L'Acte Uniforme de 2010 prévoit en son article 127, les cas que le bailleur peut invoquer pour s'exonérer du paiement de l'indemnité.

    110 « Tout fait quelconque de l'Homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ». Article 1382 du Code civil

    111 Aux termes de l'article 91(désormais l'article 123) de l AUDCG : « Le droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée est acquis au preneur qui justifie avoir exploité, conformément aux stipulations du bail, l'activité prévue à celui-ci, pendant une durée minimale de deux ans(...) ».

    112 Voir l'article 124 de l'AUDCG : « Dans le cas du bail à durée déterminée, le preneur qui a droit au renouvellement de son bail en vertu de l'article 123 ci-dessus peut demander le renouvellement de celui-ci, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, au plus tard trois mois avant la date d'expiration du bail. Le preneur qui n'a pas formé sa demande de renouvellement dans ce délai est déchu du droit au renouvellement du bail. Le bailleur qui n'a pas fait connaître sa réponse à la demande de renouvellement au plus tard un mois avant l'expiration du bail est réputé avoir accepté le principe du renouvellement de ce bail. »

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    Particulièrement à notre analyse, le premier alinéa de cet article113parle de motifs graves et légitimes pouvant motivés l'une des parties à refuser le renouvellement. À cet effet, si l'une des parties se rend fautive et est mise en demeure par l'autre de faire cesser le trouble, sans cependant qu'elle n'obtempère, la partie défenderesse pourra invoquer les motifs graves et légitimes ayant justifié ce refus (A), lesquels feront l'objet d'une appréciation par le juge (B).

    A- L'invocation des motifs graves et légitimes liées la faute d'une partie

    Le lien contractuel existant entre le bailleur et le locataire doit être marqué par la confiance et l'honnêteté contractuelle. Lorsque l'une des deux (02) parties s'aventurent à ne pas exécuter l'une de ses diverses obligations, elle commet une faute qui selon sa gravité peut conduire à un renouvellement du bail refusé. Les motifs graves et légitimes sont ainsi compris comme des raisons flagrantes étant susceptibles d'entraîner un refus de renouvellement. Mais avant que ceux-ci ne soient invoqués, ils doivent obéir à certaines conditions (1). Une fois leur validité acquise, il sera question de présenter les hypothèses de motifs graves et légitimes (2).

    1- Les conditions de validité des motifs graves

    Un seul acte préjudiciable d'une partie ne saurait suffir à légitimer le refus de l'autre de procéder au renouvellement du bail. Il faut pour cela non seulement une répétition de tels actes, mais aussi, le créancier de l'obligation doit attirer l'attention de l'autre sur ses agissements, afin notamment à l'amener à remplir convenablement ses obligations contractuelles. C'est dans ce sens que l'Acte Uniforme énonce que «ce motif ne pourra être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur par acte extrajudiciaire d'avoir à les faire cesser »114. Le bailleur ne peut donc toutefois évoquer ces fautes que s'il a mis en demeure le locataire par acte huissier et que ces fautes se sont renouvelées dans le mois suivant la mise en demeure115. La mise en

    113 « S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur sortant. Ce motif doit consister soit dans l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail, soit encore dans la cessation de l'exploitation de l'activité. Ce motif ne peut être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les faire cesser. »

    114 Article 127 de l'AUDCG de 2010.

    115Il ne paie pas ses loyers ; il n'entretient plus de locaux ; il a changé la destination des lieux sans autorisation du propriétaire.

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    demeure permet ainsi d'éviter tout effet de surprise envers le locataire. Autrement dit, l'on ne saurait parler de motif grave si celui-ci ne s'est pas répété à plusieurs reprises ouvrant ainsi voie à une mise en demeure de s'exécuter.

    2- Les hypothèses de motifs graves et légitimes

    Le refus de renouvellement peut par exception être opéré sans indemnités dans deux hypothèses. La première hypothèse : S'il existe un motif grave et légitime de refuser le renouvellement comme la faute du locataire consistant à une violation de ses devoirs de locataire116. Et la seconde hypothèse est en cas de droit de reprise. Concernant particulière la première hypothèse, le bailleur peut s'opposer à tout renouvellement s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur117. En outre, il est aussi possible à un locataire de s'opposer au renouvellement demandé par son bailleur.

    Primo, les motifs graves et légitimes'' dont peut se prévaloir le bailleur pour refuser le renouvellement se résument pour l'essentiel en un comportement gravement répréhensible du locataire. Il s'agira, d'après l'Acte Uniforme, soit de l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail118 , soit la cessation de l'exploitation du fonds de commerce. La première hypothèse renvoie à une violation de la part du preneur locataire d'une obligation contractuelle. En nous référant aux articles 112 et suivants de l'AUDCG nouveau sur les obligations du locataire. Ces motifs graves et légitimes'' consisterons principalement au non-paiement ou paiement irrégulier des loyers 119 , ainsi qu'en la déspécialisation non autorisée120. Il pourrait également s'agir du défaut d'entretien et des dégradations des lieux loués par le locataire. La seconde quant à elle, consiste non seulement au défaut d'exploitation sans raison sérieuse et légitime121 mais également une exploitation non conforme ou ayant un caractère immoral. Il en sera de même des cessions et sous-locations interdites.

    116Il ne paie pas ses loyers ; il n'entretient plus de locaux ; il a changé la destination des lieux sans autorisation du propriétaire.

    117 Sauf cas de survenance d'une circonstance exceptionnelle faisant apparaitre de nouveaux motifs. Ex : Ruine de l'immeuble, promulgation d'une loi rendant caduc le motif précédemment invoqué. Par ailleurs, à tout moment de la procédure , le bailleur pourra également invoquer l'absence de l'une des conditions légales du droit au renouvellement, tel par exemple, le fait que le locataire a cessé d'exploiter le fonds de commerce dans les lieux loués, le fait que le local accessoire faisant l'objet du bail n'est plus nécessaire à l'exploitation du fonds.

    118 Cette violation peut aller selon la jurisprudence jusqu'à celle de ne refuser de souscrire une police d'assurance si cela figurait au contrat. Voir. CCJA, Arrêt n°32/2008, Aff. Sté METALUX Sarl c/ CHEICK BASSE, Actualités juridiques n°60-61, note anonyme, ohadata J-08-134

    119 En effet, payer le loyer est pour le preneur une obligation substantielle qui caractérise le bail. Un paiement est dit irrégulier s'il s'effectue avec retard ou entre les mains de toute personne autre que le bailleur ou son représentant désigné au contrat.

    120 C'est-à-dire des travaux ou changement de destination des lieux loués sans autorisation du bailleur.

    121 Le défaut d'entretien ne peut pas par exemple résulter d'un cas de maladie grave.

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    Secundo, le preneur locataire peut lui-même s'opposer au renouvellement du bail demandé par le bailleur. L'article 105 et suivant de l'AUDCG nouveau précise clairement les obligations qui incombent au bailleur dans le cadre de l'exécution du bail. Ces obligations se résument pour l'essentiel en l'exécution des grosses réparations122 et en une garantie de bonne jouissance des lieux loués123. Ainsi, le bailleur refusant de remplir ces engagements qui sont pourtant siennes dans un contrat, il reste que le preneur peut en se basant sur cette inexécution, refuser de renouveler le bail le liant au propriétaire de l'immeuble, le bailleur.

    Mais une question surgit à l'esprit, celle de savoir si l'une des parties peut fonder son refus sur des motifs ne tenant pas nécessairement à l'inexécution d'une obligation contractuelle. Ce serait notamment le cas par exemple de violences exercées par le locataire sur le bailleur, d'une attitude injurieuse, de l'abus de jouissance, de l'émission d'un chèque sans provision124 ou du comportements du bailleur, qui ne représentent pas forcément une violation spécifique du contrat, mais qui portent atteinte à la personnalité du locataire ou à celle de ses proches 125 ... Nous serions en droit de répondre à cette interrogation par l'affirmative, car il s'agit là en général des causes susceptibles de provoquer en même temps la résiliation du bail. Pour ce faire, elles doivent être exprimées de telles sortes que la partie coupable ne puisse pas se méprendre sur leur nature126.

    B- L'appréciation souveraine des motifs graves et légitimes

    En droit français, le juge dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation de la gravité et de la légitimité des motifs de refus127. Il s'agit d'une question de pur fait échappant au contrôle de la Cour de cassation.

    122 Les grosses réparations sont notamment celles des gros murs, des voûtes, des poutres, des toitures, des murs de soutènement, des murs de clôture, des fosses septiques et des puisards (article 106 al 2).

    123 Le bailleur est responsable envers le preneur du trouble de jouissance survenu de son fait, ou du fait de ses ayants-droit ou de ses préposés (article 109).

    124 Certains auteurs estiment à ce sujet que « la remise d'un chèque sans provision par le locataire au propriétaire peut entraîner la détérioration de leurs rapports. Néanmoins, les motifs totalement étrangers au bail et fondés par exemple sur les relations familiales sont sans effet. De même, la faute d'un précédant locataire ayant cédé son bail ne peut être opposée au cessionnaire, sauf si la cession a porté sur le droit au renouvellement lui-même, après expiration du bail, le cessionnaire ne pouvant avoir plus de droits que le propriétaire.

    125 Tribunal de district de March, 24.04.1997, Comm. Office fédéral du logement 29, n° 4 : allégations d'attouchements d'un enfant du locataire, non établies en l'espèce.

    126 Voir Cass.Com. 28 mars 1962. D. 1962, p.422.

    127 Pour une cession irrégulière ou une sous-location auquel le bailleur n'a pas été appelé voir 3è Civ. 9 juillet 2003, n° 02-11.621, Bull. Civ. III n° 147 ;

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    D'une part, le juge peut déclarer recevables les motifs graves et légitimes invoqués par le bailleur. La jurisprudence est casuistique dans ce domaine mais de grandes tendances peuvent être dégagées. Il a été jugé que constituent des motifs graves et légitimes l'abus de jouissance128, la cession irrégulière du bail129, les infractions aux clauses du bail130, un changement de destination des lieux131, une inexploitation132, des loyers impayés après un commandement de payer d'un mois133, des violences sur la personne du bailleur134. Plus largement la jurisprudence a retenu que des motifs extracontractuels pouvaient constituer des motifs graves et légitimes de refus de renouvellement sans indemnité. En effet, le motif grave et légitime ne doit pas forcément être rattaché à une clause du contrat mais peut seulement avoir un lien suffisant avec l'exécution du bail commercial. L'interprétation de la jurisprudence est souple à cet égard. À titre d'illustration, on peut citer le cas de la production de documents gravement inexacts en cours d'opérations d'expertises135 ou la production auprès d'un nouveau bailleur d'un bail qui s'avère être faux sur lequel la signature du précédent bailleur a été imitée136.

    D'autre part, étant donné que la preuve du motif grave et suffisant est subordonnée à l'appréciation souveraine des juges du fond, ces derniers peuvent retenir que les motifs invoqués sont irrecevables. À titre d'exemples, on peut citer l'exercice d'activités complémentaires non autorisées137, l'accumulation de retards de loyers et charge expliquée par un contexte financier difficile, le preneur ayant toujours régularisé sa dette, l'exécution de travaux sans les autorisations requises mais rendus nécessaires par l'obligation d'adapter le fonds à la nouvelle activité connue et acceptée par le bailleur ou encore l'inexécution de

    128 CA Paris, 16ech. Sect. A, 16 janvier 2002 ; 3eCiv. 20 juin 1979, Rev. Loyers 1980, p. 42 ; CA Paris 16ech. Sect. A, 26 avr. 2006, n° 05/01903.

    129 CA Paris 16ech. Sect. A 14 janvier 1997, n° RG : 95/11149 ; CA Montpellier, 1ere ch. Sect. B, 14 février 2006..

    130 Pour un abandon du commerce voir Com. 31 janv. 1949, Bull. Civ. III, n° 51 ; pour un cinéma classé commerce de luxe et projetant, sans autorisation, des films érotiques voir CA Paris 29 janvier 1987 D. 1987, IR 33.

    131 Pour un cinéma classé commerce de luxe et projetant sans autorisation des films érotiques voir CA Paris 29 janvier 1987 D. 1987, IR 33.Ca Paris 16e ch. Sect. B, 22 nov. 2007, n° RG : 06/17666; 2 mars

    2006 RG : 05/08364 ; pour l'utilisation à usage de chenil d'un local destiné à l'usage de débit de boissons voir Civ. 3 e, 3 avril 2001, n° 99-19.768 Gaz. Pal. 2002, somm. p. 162.

    132 Com. 6 juill. 1960 D. 1961, somm. 57 ; Com. 8 févr. 1965, D. 1965. 292 ; CA Montpellier 1re ch. Sect. B., 5 juin 2007, n° RG : 06/03501.

    133 Civ. 3e 12 juill. 1989, n° 88-12.539, Loyers et copr. 1989, n° 484 ; Civ. 3e ,17 févr. 1993, n° 89-12.597, Loyers et copr. 1993, n° 225

    134 Civ. 3e, 28 mars 1995, n° 93-16.657, Rev. Loyers 1995, p. 414.

    135 Civ. 3e, 19 déc. 2001, n°00-14.425, Bull. Civ. III n°156 ; BRDA 2/2002, n°10.

    136 Civ. 3e ,11 juin 2008, n°07-14.551, Bull. Civ. III, n°103.

    137 Civ. 3e, 1er avril 1998, n°96-14.638, Bull. Civ. III, n°77, Gaz. Pal. 28 août 1998, pan. 228.

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    réparations nécessaires au bon entretien de l'immeuble lorsque la vétusté et la négligence du bailleur sont en partie responsables. L'on comprend bien que la jurisprudence Française, puisque c'est bien d'elle dont il s'agit ici, part de l'idée selon laquelle le juge peut donner une interprétation constructive d'une notion afin d'apprécier si oui ou non celle-ci peut être considérée comme faute ou pas. Nous pouvons aussi soupçonner les juges communautaires de l'Ohada d'user dans certaines circonstances d'un pouvoir d'appréciation des faits afin d'en dégager une interprétation claire.

    *

    * *

    Parvenu au terme de ce chapitre, il est possible de retenir que la mise en demeure, une fois sa validité acquise produira inéluctablement des conséquences juridiques qui seront graves. Nous relevons que ces conséquences ou effets juridiques auront un impact sur l'existence du bail. Alors, il reviendra à la partie défaillante de s'exécuter avec diligence afin d'éviter que la mise en demeure qui lui est adressée par le créancier de l'obligation ne produise les effets y attachés.

    En outre, la situation est autre lorsque la mise en demeure telle que réglementée par l'article 133 de l'AUDCG nouveau est absente.

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    L'ABSENCE DE LA MISE EN DEMEURE

    CHAPITRE II:

    Le législateur Ohada a posé par l'acte 133 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général de 1997 révisé le 15 décembre 2010, une exigence de mise en demeure préalable à toute intention de mettre un terme au contrat de bail. Ainsi, la mise en demeure ne respectant pas les prescriptions posées par l'article 133 de l'AUDCG n'est pas valable. On parle de « mises en demeure irrégulières ». Néanmoins et même si l'acte uniforme ne réglemente pas expressément à l'article 133 l'hypothèse de l'absence de mise en demeure, la jurisprudence de l'Ohada a eu à se prononcer sur la question. Partant de là peut-on assimiler une absence de mise en demeure à une mise en demeure irrégulière ? Le juge du TPI du Mfoundi s'est prononcé en consacrant une assimilation des deux (02) notions et reconnaissant par-là que les deux produisent les mêmes effets138. La partie souhaitant donc ne plus poursuivre ses relations contractuelles avec l'autre pour des raisons tenant en ses fautes, doit absolument procéder à cette formalité de mise en demeure sauf en cas de dispenses tels qu'étudier plus haut139. Si elle ne le fait pas, elle s'expose à des sanctions. Celles-ci peuvent être présentées selon que l'on s'intéressera au sort de l'action en résiliation (SECTION 1) ou au sort du bail commercial (SECTION 2).

    SECTION 1: LE SORT DE L'ACTION EN RÉSILIATION

    Le sort de cette action est variable. Ainsi, selon que la mise en demeure sera adressée au preneur (Paragraphe 1) ou aux créanciers inscrits sur le fonds (Paragraphe 2), les sanctions varieront.

    138 « La mise en demeure qui ne respecte pas les exigences de l'article 101(devenu article 133) de l'AUDCG n'est pas valable ; dans ce cas le tribunal constate l'absence de mise en demeure et déboute le bailleur de son action en résiliation judiciaire du bail ». TPI Yaoundé (Cameroun) Centre Administratif, Ord. N° 477/C, 1-92008 : Sté AGF Cameroun Assurances c/ Techni-Cameroun, Journal Le Jour, Faty and Sister Compagny et autres, Ohadata J-09-225.

    139 Par exemple lorsque le débiteur a exprimé son intention de ne plus continuer le bail

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    Paragraphe 1 : Le cas de la mise en demeure adressé au preneur.

    Spécifiquement à cette procédure de résiliation, le défaut de mise en demeure semble ne pas encore avoir trouvé la sanction idoine en droit Ohada encore que la jurisprudence n'est pas unanime sur la question et le législateur n'ayant rien prévu en la matière. Or, le TGI de la Menoua a déclaré dans une affaire que : « faute de mise en demeure, la procédure de résiliation et d'expulsion qui en est résulté doivent être frappées de nullité »140. En réalité, la sanction de la nullité qui frappe l'acte de mise en demeure et posé par la jurisprudence141 n'en rejaillit pas moins sur la recevabilité de l'action en résiliation du bail à usage professionnel. La nullité entrainant l'anéantissement de la mise en demeure (A), bascule, du coup, les parties dans la situation d'une instance en résiliation initiée sans mise en demeure préalable. Or, cette irrégularité est sanctionnée par une fin de non-recevoir tenant à l'irrecevabilité de l'action (B).

    A- La nullité de la mise en demeure non conforme

    La nullité de la mise en demeure est la sanction attachée à un acte présentant des irrégularités ou un acte dont le contenu n'est pas conforme aux dispositions régissant la matière. Le dictionnaire de Droit Privé de Serge Braudo le définit comme : « la sanction de l'invalidité d'un acte juridique, ou d'une procédure. Soit que la cause de la nullité réside dans l'absence de l'utilisation d'une forme précise qui est légalement imposée, soit qu'elle résulte de l'absence d'un élément indispensable à son efficacité ». En l'occurrence dans le cadre de l'OHADA, c'est l'article 133 de l'AUDCG qui pose les conditions de validité de l'acte suscité. La partie qui entend donc contestée la procédure de rupture du bail intentée par l'autre peut se fonder sur l'irrégularité de la mise en demeure. Si cette irrégularité est avérée, l'acte concerné sera annulé. Ainsi, plusieurs faits peuvent être causes de l'annulation d'une mise en demeure (1) laquelle annulation entraîne généralement des conséquences juridiques sur la

    140 TGI de la Menoua à Dschang, n°28/Civ, 10-03-2003 : amicale des anciens combattants, Anciens militaires et victimes de guerre de la Menoua c/ ZEBAZE Pierre, ohadata J-05-111.

    141Un jugement du tribunal de première Instance de Bafoussam du 16 septembre 2005 a bien campé ce débat en énonçant que : « la mise en demeure préalable avec reproduction sous peine de nullité des termes ( de l'article 101 de l'AUDCG) est une condition indispensable à toute résiliation d'un bail commercial ; Mais attendu qu'en l'espèce, la sommation de payer et de libérer du 17 Mars 2003 servie au défendeur et tenant lieu de dite mise en demeure ne satisfait pas aux exigences légales prescrites par l'article susvisé en ce qu'elle ne reproduit aucunement les termes de ce texte ; Qu'il échait par conséquent de déclarer cette sommation nulle et partant irrecevable en l'état l'action de la demanderesse ».

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    procédure de rupture du bail (2).

    1- Les raisons justifiants la nullité

    Elles sont à l'origine de l'annulation de la mise en demeure. Elles sont réglementés par l'Acte Uniforme et concernent la validité de lacte même. Quoi qu'il en soit, la nullité dont il est question sanctionne la violation des règles de fond et celles de forme.

    S'agissant des règles de fond, aux termes de l'article 133 alinéa 2 il ressort clairement que: « À peine de nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et conditions du bail non respectées et informer le destinataire qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois à compter de sa réception, la juridiction compétente statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout occupant de son chef ». Selon l'article 133 alinéa 2 de l'Acte uniforme susvisé, la validité de la mise en demeure est subordonnée au respect de ces deux conditions cumulatives. Il faut d'emblée relever que l'exigence classique de la reproduction des dispositions de l'article 101 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général, n'a pas survécu à la réforme. A la place, l'article 133 du nouvel Acte uniforme a prévu l'obligation pour le demandeur en résiliation du bail d'indiquer dans la mise en demeure la ou les clauses et conditions du bail non respectées. Quoi qu'il en soit, l'obligation d'indication dans la mise en demeure des conditions du bail violées et d'information du destinataire qu'en cas d'inexécution dans un délai d'un mois à compter de sa réception le juge sera saisi d'une action en résiliation, est prescrite « à peine de nullité » de la mise en demeure. Sous l'empire des textes antérieures, la jurisprudence des tribunaux sénégalais n'était pas fixée sur la sanction du non-respect de l'obligation de reproduction dans la mise en demeure des dispositions de l'article 101 (devenu 133) de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général. Le tribunal régional de Kaolack (Sénégal) a été saisi d'une action en résiliation d'un bail commercial initiée par une personne qui n'avait pas respecté l'obligation de reproduction de ce texte. Le tribunal dans son jugement du 14 août 2002 a énoncé que : « l'article 101 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général dispose que la mise en demeure doit reproduire sous peine de nullité les termes du présent article ; Que ladite prescription n'ayant pas été observée, il y a lieu de constater la nullité de la procédure ». Plus loin, Un jugement du tribunal de première Instance de Bafoussam du 16 septembre 2005 a bien campé ce débat en énonçant que : « la mise en demeure préalable avec reproduction sous peine de nullité des termes ( de l'article 101 (devenu 133) de l'AUDCG) est une condition indispensable à toute résiliation d'un bail

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    commercial ,
    · Mais attendu qu'en l'espèce, la sommation de payer et de libérer du 17 Mars 2003 servie au défendeur et tenant lieu de dite mise en demeure ne satisfait pas aux exigences légales prescrites par l'article susvisé en ce qu'elle ne reproduit aucunement les termes de ce texte ,
    · Qu'il échait par conséquent de déclarer cette sommation nulle et partant irrecevable en l'état l'action de la demanderesse
    ».

    Par ailleurs, l'on peut à bon droit étendre la question en cas de non-respect du délai légal d'un mois prévu au même article 133 suscité. La mise en demeure qui comporte la reproduction intégrale de l'article 133 et la mention selon laquelle le preneur « dispose du délai d'un mois à compter de la signification des présentes, pour honorer les termes du contrat de bail et du présent acte, faute de quoi, il sera procédé judiciairement » est valable. Le moyen selon lequel si les termes dudit article sont reproduits dans la mise en demeure, nulle part n'y figure l'information au preneur qu'à défaut de paiement ou de respect des clauses et conditions du bail dans un délai d'un mois, la résiliation sera poursuivie alors que cette mention est prescrite à peine de nullité doit être rejetée142. Ainsi, à l'image de l'absence de mise en demeure, le non-respect du délai d'un mois prévu par l'alinéa 2 de l'article 133 de l'Acte uniforme sur le droit commercial, doit être sanctionné par la nullité. En effet, l'action en résiliation initiée avant l'expiration du délai d'un mois à compter de la réception de la mise en demeure est prématurée143.

    S'agissant ensuite des règles de forme, l'article 133 alinéa 1 dispose que : «La demande en justice aux fins de résiliation du bail doit être précédée d'une mise en demeure d'avoir à respecter la ou les clauses ou conditions violées. La mise en demeure est faite par acte d'huissier ou notifiée par tout moyen permettant d'établir sa réception effective par le destinataire ». Dans la procédure de résiliation du bail à usage professionnel, le formalisme de la mise en demeure constitue un élément déterminant pour l'information de la partie défaillante par rapport au manquement à ses obligations contractuelles. L'exécution effective de cette obligation d'information est donc tributaire de la forme que doit revêtir l'acte. Sous l'ancienne version de l'Acte Uniforme de 1997, « la mise en demeure ne pouvait être délivrée

    142 CCJA, 3e ch., n° 60/2012, 7-6- 2012 ; P. n° 077/2009/PC du 24-8- 2009 : Sté Camerounaise de Divertissements et de Commerce (SOCADIC) c/ KADJI DEFOSSO Joseph).Obs. J. Issa- Sayegh

    143Le droit d'agir n'existe pas encore, et par là l'action peut aussi être frappée d'irrecevabilité. Cette exigence formelle était déjà contenue dans l'ancien article 101 de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général. Mais, la particularité du nouvel Acte uniforme réside dans la précision du point de départ du délai d'un mois prévu par la loi, ce délai courant à compter de la réception de la mise en demeure.

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    que par acte extrajudiciaire »144. C'est d'ailleurs la position qu'a pris la jurisprudence qui sanctionnait le non-respect de cette formalité. Il était d'ailleurs difficile pour les parties de toujours se plier à cette formalité qui était jugée de houleuse pour la procédure. La lourdeur de ce procédé ainsi que son caractère dispendieux ont incité les rédacteurs du nouvel Acte uniforme à simplifier la forme de la mise en demeure, sans pour autant répudier le recours à un officier ministériel. Il résulte de l'alinéa 2 de l'article 133 de l'Acte uniforme précité : « la mise en demeure est faite par acte d'huissier ou notifiée par tout moyen permettant d'établir sa réception effective par le destinataire ». C'est dire que tout acte qui ne recouvre pas une forme susceptible de laisser une preuve, devrait donc être annulée. Il en est par exemple des mises en demeure faites sous forme non-écrite.

    2 - Les effets attachés à la nullité de la mise en demeure irrégulière

    La particularité de chaque sanction juridique est qu'elle est amenée à produire des effets juridiques précis. La nullité, sanction par excellence des actes juridiques irréguliers, frappant un acte de mise de demeure dans le cadre d'une procédure de résiliation du bail à usage professionnel, conduira inéluctablement à une annulation rétroactive de cet acte. Ainsi, dès l'instant où le juge prononce la nullité, l'acte de mise en demeure disparaît rétroactivement: il est censé n'avoir jamais existé. Il n'existe plus ni dans le passé, ni dans l'avenir. Tout doit être remis dans l'état antérieur qui existait avant l'élaboration de l'acte mitigée. Dans son jugement du 2 septembre 2005, le TPI de Bafoussam a décidé qu'« en raison de la nullité de l'exploit susvisé, tout se passe comme s'il n'y a jamais eu de mise en demeure préalable telle qu'exigée par l'article 101 de l'Acte uniforme susvisé ». Cette annulation rétroactive de l'acte de mise en demeure aura pour but d'invalider la procédure de résiliation puisqu'une mise en demeure irrégulière équivaut à une absence de mise en demeure comme l'a clairement admis le TGI du Mfoundi145.

    B- L'irrecevabilité de l'action en résiliation

    La "recevabilité" est la qualité que doit présenter la demande dont un plaideur saisit

    144 Article 101 de l'AUDCG de 1997

    145 « La mise en demeure qui ne respecte pas les exigences de l'article 101(devenu article 133) de l'AUDCG n'est pas valable ; dans ce cas le tribunal constate l'absence de mise en demeure et déboute le bailleur de son action en résiliation judiciaire du bail ». cf. note n°103 suscité.

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    une juridiction pour que le juge en soit régulièrement amené à statuer. Si la demande ne réunit pas l'ensemble des conditions fixées par la Loi, la demande est dite "irrecevable" : le juge va la rejeter sans qu'il puisse examiner si elle est ou non bien fondée146. Ainsi et en dépit du principe de la liberté d'agir, la recevabilité de toute action en justice visant la rupture du bail à usage professionnel comme d'ailleurs toute autre action en droit processuel est subordonnée au respect de différentes exigences cumulatives qui s'imposent. Par exemple la capacité, la qualité ou même l'intérêt. Le non-respect des formalités imposées pour aboutir à un jugement valable est très souvent peu toléré. Et sur ce point, le législateur Ohada a prévue à l'article 133 de l'AUDCG un certain formalisme que doit revêtir la procédure de résiliation du bail. En l'occurrence, l'exigence de la mise en demeure en bonne et due forme. La jurisprudence s'attache très fortement au strict respect de ce formalisme sous peine d'irrecevabilité. La Cour d'Appel du littoral a dans une affaire déclaré irrecevable une mise en demeure qui correspondait plus en une sommation147.

    En réalité, la sanction de la nullité qui frappe l'acte de mise en demeure n'en rejaillit pas moins sur la recevabilité de l'action en résiliation du bail à usage professionnel. La nullité entrainant l'anéantissement de la mise en demeure, bascule, du coup, les parties dans la situation d'une instance en résiliation initiée sans mise en demeure préalable. Or, cette irrégularité est sanctionnée par une fin de non-recevoir tenant à l'irrecevabilité de l'action. Un jugement du tribunal de première Instance de Bafoussam du 16 septembre 2005 a bien campé ce débat en énonçant que : « la mise en demeure préalable avec reproduction sous peine de nullité des termes de l'article 101 (devenu l'article 133) de l'AUDCG est une condition indispensable à toute résiliation d'un bail commercial ; Mais attendu qu'en l'espèce, la sommation de payer et de libérer du 17 Mars 2003 servie au défendeur et tenant lieu de dite mise en demeure ne satisfait pas aux exigences légales prescrites par l'article susvisé en ce qu'elle ne reproduit aucunement les termes de ce texte ; Qu'il échait par conséquent de déclarer cette sommation nulle et partant irrecevable en l'état l'action de la demanderesse ». Le TPI de Bafoussam a d'ailleurs réitéré cette solution de l'irrecevabilité dans un jugement rendu le 16 septembre 2005 dans laquelle le juge décida que : « en l'absence d'une mise en

    146 Braudo (S.), Dictionnaire juridique, 2016.

    147 CA. Littoral, arrêt n°152/CC du 04 Juillet 2011, Aff. MR. JEUNGA Jean c/ Dame DIBA Georgette, Juridis périodique n°97, Janvier-mars 2014, p. 44-45.

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    demeure préalable, la demande de résiliation d'un contrat de bail commercial formée par le bailleur doit être déclarée irrecevable»148.

    Paragraphe 2 : l'hypothèse de la mise en demeure adressée aux créanciers

    inscrits sur le fonds de commerce

    Le droit uniforme de l'OHADA a toujours aménagé un régime de protection au profit des créanciers inscrits sur le fonds de commerce. L'article 133 du nouvel Acte uniforme, reprenant le dispositif prévu par l'ancien article 101 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général, a mis à la charge du demandeur une obligation de notification de la demande en résiliation aux créanciers inscrits. Aux termes de l'article 133 alinéa 5 du nouvel Acte uniforme sur le droit commercial général « la décision prononçant ou constatant la résiliation du bail ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la demande aux créanciers inscrits ». Ainsi, en cas d'inscription de créanciers sur le fonds de commerce, le respect par le demandeur en résiliation du bail professionnel de son obligation de notification de sa demande en justice aux créanciers inscrits n'est pas qu'une simple formalité. Il présente un enjeu certain pour la régularité de la procédure de résiliation du bail. D'ailleurs, l'article 176 du nouvel Acte uniforme sur les sûretés énonce que la résiliation amiable ou en vertu d'une clause résolutoire de plein droit ne peut produire effet qu'après l'expiration du délai de notification. Dans le cadre de la résiliation judiciaire, tout se passe comme si le juge était en face d'une « question préjudicielle à la décision de résiliation ». D'ailleurs, la décision prescrivant la résiliation du bail ne peut être prononcée « qu'après l'expiration d'un délai d'un mois » suivant l'information des créanciers inscrits. Il s'agit d'une sorte de « délai d'attente » qui affecte non pas le droit d'agir mais l'intervention de la décision de justice.

    La notification de l'acte introductif d'instance valant mise en demeure au créancier d'exécuter les obligations du preneur défaillant ou de les faire exécuter, il n'est pas logique que le délai imparti au locataire pour s'exécuter soit différent de celui accordé au créancier inscrit pour se substituer au preneur. C'est la raison pour laquelle, nous pensons que c'est le délai d'un mois prévu par l'article 133 de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial

    148TPI de Bafoussam, JUG CIVIL N° 67 DU 16 SEPTEMBRE 2005, AFFAIRE Paroisse de la cathédrale de Bafoussam c/ ngoupou Samuel, IDEF, p. 32.

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    général qui doit être observé entre la date de la notification de la demande en résiliation et la décision y faisant droit. C'est un problème que soulève l'analyse de l'AUDCG et de l'AUS. En effet, il résulte de l'article 176 alinéa 2 de l'acte uniforme sur les sûretés, reprenant l'article 143-2 du Code de commerce français, que « la décision judiciaire de résiliation ne peut intervenir, ni la résiliation amiable ou en vertu d'une clause résolutoire de plein droit produire effet, qu'après l'expiration du délai de deux mois suivant la notification ». Alors, que l'article 133 al.5 prévoit plutôt un délai d'un (01) mois. Faute par le demandeur d'exécuter son obligation d'information, en principe la décision de résiliation ne devrait pas être prononcée, cette décision ne pouvant intervenir, selon l'article 133 alinéa 5 du nouvel Acte uniforme « qu'après l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la demande aux créanciers inscrits ». La formalité de la notification de la demande en justice étant le point de départ du délai d'un mois à l'expiration duquel la juridiction saisie devra statuer, lorsque le demandeur n'accomplit pas cette formalité, ce délai ne court pas. Le non-respect de l'obligation d'information des créanciers inscrits devient alors un obstacle au prononcé de la décision de résiliation du bail professionnel149.

    L'étude des diverses décisions rendues par le tribunal régional Hors Classe de Dakar permet de constater que les juges sénégalais semblent assimiler le défaut de notification de la demande en résiliation aux créanciers inscrits à l'absence de justification de l'inexistence de créanciers inscrits sur le fonds. Cependant, les magistrats sont divisés sur la sanction attachée à l'absence de justification de l'inexistence de créanciers inscrits sur le fonds. Certaines décisions, analysant la question sous l'angle de la recevabilité de l'action en résiliation du bail, sanctionnent cette irrégularité par l'irrecevabilité de la demande en justice (A). D'autres par contre parle d'inopposabilité(B).

    A- L'irrecevabilité de l'action

    Le demandeur a l'obligation de d'informer les créanciers inscrits sur le fonds. S'il ne le fait pas il expose son action à une éventuelle irrégularité. Ainsi, un jugement rendu par le tribunal régional Hors classe de Dakar le 5 janvier 2010 a déclaré irrecevable l'action en résiliation du demandeur au motif qu'il n'a pas produit un certificat négatif pour établir qu'il

    149Sur l'effet de l'absence de notification au créancier inscrit de la demande de résiliation d'un bail commercial, dans le même sens que : Chambre civile 3, 1995-12-06, Bulletin 1995, III, n° 252, p. 170 (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité. Sur la nécessité de notifier, à rapprocher : Chambre civile 3, 2006-03-22, Bulletin 2006, III, n° 75, p. 62

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    n'y avait aucune inscription sur le fonds de commerce. Un autre jugement rendu le 19 mai 2009 a énoncé que : « le jugement prononçant la résiliation ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la demande aux créanciers inscrits ;Qu'en l'espèce le demandeur n'a pas daigné produire un certificat négatif de nantissement et ce, malgré le rabat du délibéré qui a été opéré à cette fin ;Qu'il échait en conséquence de déclarer irrecevable la demande d'expulsion ». Plus récemment, un jugement rendu par le tribunal régional Hors Classe de Dakar du 14 décembre 2011 a déclaré irrecevable une action en résiliation de bail professionnel au motif que le demandeur n'avait pas respecté son obligation de notification de la demande en justice aux créanciers inscrits.

    D'autres décisions, moins nombreuses, appréhendent la question l'obligation d'information des créanciers inscrits comme une condition de fond de la demande en résiliation qu'ils sanctionnent par une décision de débouté au fond. Quoi qu'il en soit, dès lors que le demandeur n'a pas respecté son obligation d'information à l'égard des créanciers inscrits, l'affaire n'est pas en état d'être jugée, puisque d'après l'article 133 alinéa 5 du nouvel Acte uniforme, la décision de résiliation ne peut être prononcée qu'après l'expiration du délai d'un mois à compter de la notification de la demande en justice aux créanciers inscrits.

    B - L'Opposabilité de la décision aux créanciers non informés

    En droit français, la jurisprudence répète inlassablement que, bien que l'article 143-2 du Code de commerce, repris à la lettre par l'article 133 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général soit taisant sur ce point, la résiliation est inopposable aux créanciers inscrits non informés. Un auteur a pu parler à ce sujet d'une « vigueur de la sanction ». La chambre civile de la Cour de cassation française, dans un arrêt du 12 juillet 2006, a déjà jugé que « l'inopposabilité de la résiliation intervenue est acquise de plein droit dès lors que le bailleur a manqué à ses obligations à l'égard des créanciers inscrits». Un commentateur de cette décision a écrit qu'il s'infère de cette solution prétorienne que « toute tentative de régularisation de l'absence de notification ou d'une notification tardive de l'assignation en résiliation est vouée à l'échec». En raison de l'irrévocabilité de l'inopposabilité de la résiliation, cette sanction jouera même si les créanciers ont eu connaissance des défaillances du débiteur et n'avaient rien fait pour y remédier. L'obligation de notification prévue par l'article 133 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général semble être érigée à la dignité d'une formalité impérative. La sanction rigoureuse de l'inopposabilité offre au créancier

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    inscrit non informé un triple recours qui constitue des substitutifs au nantissement du fonds.

    D'abord, le créancier non informé peut poursuivre la réalisation de son gage incluant le droit au bail, alors même que ce bail est résilié dans les rapports entre le bailleur et le locataire.

    Ensuite, il peut former tierce opposition à la décision prononçant ou constatant la résiliation du bail dans les conditions énoncées aux articles 281 et suivants du Code de procédure civile du Sénégal. Aussi, le jugement rendu sur tierce opposition et reconnaissant aux créanciers inscrits le droit au maintien du bail pour sauvegarder leur gage, a-t-il pour conséquence la rétractation de la décision de résiliation à l'égard de toutes les parties, y compris à l'égard du le locataire. Cette rétractation produit des effets à l'égard de toutes les parties, en raison de la nature indivisible des obligations découlant du bail. La conséquence de cette indivisibilité est que le bailleur doit recommencer l'ensemble des opérations nécessaires pour arriver à la résiliation, notamment la notification de l'action en résiliation aux créanciers inscrits.

    Enfin, le créancier inscrit qui aurait subi un préjudice du fait de l'inobservation de la formalité prévue par l'article 133 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général, est en droit, dans les conditions du droit commun, de réclamer la réparation de ce dommage qui peut être égal au montant non payé de sa créance

    SECTION 2: LE SORT DU BAIL À USAGE PROFESSIONNEL

    Le non-respect par l'une des deux parties des exigences posées par l'article 133 de l'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général en termes de mise en demeure aura une incidence sur le bail à usage professionnel conclu entre le bailleur propriétaire du local et le preneur locataire. À cet effet, tout défaut d'acte de mise en demeure ou de mise en demeure irrégulière invalidera la procédure de rupture du bail et la première conséquence est la continuité des relations contractuelles entre les parties jusqu'à la régularisation de la procédure d'où la survie du bail (Paragrahe1) qui se suivra par le paiement d'une indemnité d'éviction selon le cas (Paragraphe 2).

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    Paragraphe 1 : la survie du Bail à usage professionnel

    La survie du bail suppose que l'on considèrera que les parties doivent être remises à l'état où elles se trouvaient avant la décision frauduleuse. Le preneur doit se maintenir dans les lieux s'il y était encore (A) ou qu'il doit être réintégré s'il avait déjà été expulsé (B).

    A- Le maintien dans les lieux loués

    Le locataire doit être maintenu dans les lieux dès lors qu'il est établi qu'il a été expulsé irrégulièrement. L'expulsion est irrégulière lorsqu'elle ne se base sur aucune décision ou sur une décision irrégulière. Si le locataire n'avait pas encore libéré les lieux loués, il pourra demander son maintien jusqu'à ce qu'une décision régulière l'en expulse. Ainsi, tout bailleur qui serait tenté par exemple d'expulser de fait le locataire pourra se heurter au refus de ce dernier de libérer. Une affaire rendue par la Cour d'Appel d'Abidjan témoigne bien de l'importance donnée au strict respect des règles concourant à l'expulsion du preneur150. Si par contre l'expulsion a été poursuivie sans congé préalable comme l'exigent les articles 123 et 133 de l'AUDCG, le juge des référés peut être saisi pour ordonner le maintien du locataire dans les lieux loués151.

    B- La réintégration dans les lieux du preneur expulsé

    La réintégration du preneur est l'une des diverses mesures prises par les juges pour rétablir le locataire preneur dans ses droits. Ceci est d'autant vrai qu'une procédure mal menée peut conduire néanmoins à une expulsion injustifiée du preneur des locaux loués. De plus, le bailleur peut même être fondé dans son action mais ne respecte pourtant pas la procédure prévue à l'article 133 de l'AUDCG. La jurisprudence ne s'accommode pas d'une situation pareille puisqu'elle sanctionne le bailleur qui n'ayant pas adressé de mise en demeure, souhaitait néanmoins l'expulsion du preneur locataire152. Cette réintégration doit permettre au locataire de retrouver l'usage des locaux desquels il fut expulsé irrégulièrement.

    150 CA Abidjan, n° 361, 27-3-2001 : N c/ A, Le Juris Ohada, n°1/2003, Janvier-mars 2003, p.54, Ohadata J-03118.

    151 CA Abidjan, Ch. civ. & com., n° 774, 9-7-2004 : Sté SOTRANSYA c/ Sté IBN TRANSPORTS, Ohadata J05-326.

    152 la procédure d'expulsion subséquente est entachée d'une nullité formelle et le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a, sur la base de l'article 1728 du Code civil, prononcé la résiliation du bail et ordonné l'expulsion du preneur ; la réintégration du preneur doit être ordonnée (CA Abidjan (Côte d'Ivoire), 4e ch. civ. & com., n° 670, 2-6- 2006 : M. M. B. A. c./ Ayants- droit de Feu El Hadji V. D., obs. J. Issa- Sayegh, Ohadata J11-28).

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    La jurisprudence a décidé que s'agissant d'un restaurant, le bailleur qui n'a pas respecté les termes de leur contrat faisant obligation à la partie voulant se dégager, d'en informer l'autre un mois avant la rupture effective, et qui ne s'est pas non plus conformé aux prescriptions d'ordre public de l'article 101 (devenu 133) de l'AUDCG a commis une voie de fait qu'il convient de faire cesser en ordonnant la réouverture du restaurant et la réintégration du preneur dans les lieux153. Toutefois, une expulsion n'est régulière que si les conditions et la procédure de résiliation ont été respectées. À cet effet, l'expulsion du preneur a été jugée irrégulière dès le moment où le commandement de payer ou la mise en demeure n'est pas conforme aux dispositions prescrites par l'article 133 de l'AUDCG. Cette mise en demeure n'étant pas valable, l'ordonnance d'expulsion doit être infirmée pour non-respect de l'article sus cité. La Cour d'Appel de Douala a rendu dans une décision allant dans ce sens et un attendu mérite bien d'être cité : « Attendu que les dispositions de l'article 101 AUDCG sont d'ordre public, toute procédure d'expulsion n'étant pas précédé d'une mise en demeure, devrait être déclaré irrecevable»154. Puisque l'irrégularité de la mise en demeure est assimilée à son absence155, la procédure de résiliation en résultant par cet effet est nulle elle-même. Par conséquent, les parties sont remises au même état où elles étaient avant l'ordonnance d'expulsion irrégulière156. Il a déjà été procédé à l'expulsion du preneur, le juge peut ordonner sa réintégration. À titre d'exemple, la Cour d'Appel de Daloa a ordonné la réintégration du preneur dans les lieux en cas de résiliation irrégulière, s'agissant du bail d'un local servant de restaurant. En effet, elle soutient que le bailleur qui n'a pas respecté les termes de leur contrat faisant obligation à la partie voulant se dégager, pour des raisons justifiées, d'en informer l'autre un mois avant la rupture effective, et qui ne s'est pas non plus conformé aux prescriptions d'ordre public de l'article 101(devenu 133) de l'AUDCG a commis une voie de fait qu'il convient de faire cesser en ordonnant la réouverture du restaurant et la réintégration

    153 CA., de Daloa, n°295,20-11-2002 : K.K. c/ S.G, le Juris Ohada, n°4/2005, Juillet-Septembre 2005, p.32 ; Ohadata J-06-19.

    154CA Littoral à Douala, arrêt n° 58/ réf du 21 AVRIL 2003, MOHAMED Aref c/ FONKA Louis. ; CA Abidjan, n°279, 6-3-2001 : Sté PAGOTO c/ O, OhadataJ-04-114, Le Juris Ohada, N°3/2003, Juillet-septembre 2003, P.55 ; TGI de la Menoua à Dschang, n° 28/CIV,10-3-2003 : Amicale des Anciens Combattants, Anciens militaires et victimes de Guerre de la Menoua c/ ZEBAZE Pierre, Ohadata J-05-111 « Faute de mise en demeure, la procédure de résiliation et l'ordonnance d'expulsion qui en est résulté doivent être frappées de nullité. »

    155La mise en demeure qui ne respecte pas les exigences de l'article 101 [devenu 133] de l'AUDCG n'est pas valable ; dans ce cas le tribunal constate l'absence de mise en demeure et déboute le bailleur de son action en résiliation judiciaire du bail (TPI Yaoundé (Cameroun), Centre Administratif, Ord. N°477/C, 1-9-2008 : Sté AGF Cameroun Assurances contre Techni-Cameroun, Journal Le Jour, Faty and Sister Compagnie et autres, Ohadata J-09-225).

    156 CA Yaoundé, n° 222/Civ, 14-3-2003 : NGOUNOUN NGATCHA Benjamin c/ NOUMESSI Gilbert, F. AHO et al. OHADA : Jurisprudences nationales. Ed. BENIN CONSULTING GROUP, Cotonou (Bénin) : 2004, P.47.

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    du preneur dans les lieux157. On peut également citer l'arrêt rendu par la Cour d'Appel d'Abidjan en date du 02 Juin 2006158dans lequel le juge rappelle que l'exploit de congé servi au preneur n'est pas une mise en demeure valable ; la procédure d'expulsion subséquente est entachée d'une nullité formelle et le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a, sur la base de l'article 1728 du Code civil, prononcé la résiliation du bail et ordonné l'expulsion du preneur ; la réintégration du preneur doit être ordonnée.

    Le bailleur a donc l'obligation de remettre le local à la disposition du preneur notamment à travers la remise des clés. Mais cependant une question se pose ici : celle de savoir si le preneur a un délai pour réintroduire le local ? À cette question la Cour de Cassation par un Arrêt du 06 mai 1964 réponds par l'affirmative en imposant au preneur de réintégrer le local dans un délai raisonnable faute pour lui de le faire le bailleur pourra le louer à un autre locataire.

    Par ailleurs que se passera-t-il si le local avait déjà été loué à une autre personne ? Dans pareil cas, les notions de bonne foi et mauvaise foi guideront notre logique. Ainsi, nous pensons que le locataire de bonne foi sera maintenu dans le local, le preneur expulsé ne pouvant se contenter que d'une indemnité d'éviction. Par contre, si le tiers était de mauvaise foi, les choses seront autrement puisqu'il sera évincé compte tenu qu'il savait que l'expulsion n'était pas régulière. Ainsi il devra libérer pour permettre à l'ancien preneur de réintégrer les dits lieux.

    Paragraphe 2 : l'octroi de l'indemnité d'éviction

    Le droit au renouvellement reconnu au locataire est destiné à lui assurer la protection et la stabilité du fonds de commerce exploité dans les lieux loués. Cette protection est toutefois conditionnée : le locataire doit lui-même remplir les conditions d'application du statut. À défaut, il n'aura droit ni au renouvellement ni au paiement d'une indemnité d'éviction. S'il bénéficie de ce droit au renouvellement, cela ne veut pas dire que le bailleur soit obligé de lui accorder. Il peut arriver que le bailleur refuse de renouveler le bail et ce pour des raisons justifiées : soit il pourra invoquer un motif grave et légitime159 ou un droit de

    157 CA Daloa, n°295, 20-11-2002 : K.K. c/ S.G, Le Juris Ohada, n° 4/2005, Juillet-septembre 2005, p.32, Ohadata J-06-19.

    158 CA Abidjan (Côte d'Ivoire), 4ech. civ. & com., n° 670, 2-6- 2006 : M. M. B. A. c./ Ayants- droit de Feu El Hadji V. D., obs. J. Issa- Sayegh, Ohadata J- 11-28

    159 Cf., article 127 : « Le bailleur peut s'opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée, sans avoir à régler d'indemnité d'éviction, dans les cas suivants :

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    reprise160. Mais, si le bailleur ne respecte pas la procédure de refus de renouvellement telle que décrite à l'alinéa 1(1) de l'article 127 de l'AUDCG, par exemple lorsqu'il omet ou simplement refuse d'adresser de mise en demeure, pourra-t-on le contraindre à le faire ? La jurisprudence dans une espèce y répond par la négative. À cet effet, s'agissant de la sanction pour absence de mise en demeure ; la question était de savoir si le preneur pouvait s'en prévaloir afin de poursuivre le bail. La cour de cassation a considéré que :« l'absence de mise en demeure régulière, si elle est établie, laisse subsister le refus de renouvellement mais ouvre droit, pour le preneur, au paiement d'une indemnité d'éviction »161. Le droit du locataire au renouvellement se heurte donc au droit de propriété du bailleur, qui souhaite reprendre le bien loué. Afin de protéger le fonds de commerce du locataire, il s'agira alors de réparer l'intégralité du préjudice subi du fait de l'éviction. Le plus souvent, cette indemnité d'éviction versée par le bailleur permet au locataire de se réinstaller et de poursuivre son activité.

    Il sera donc question pour mieux explorer la question de consacrer une première analyse au régime juridique de l'indemnité d'éviction (A), pour plus loin s'interroger sur les règles relatives à son règlement (B).

    1) S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur sortant. Ce motif doit consister soit dans l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail, soit encore dans la cessation de l'exploitation de l'activité.

    Ce motif ne peut être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les faire cesser.

    2) S'il envisage de démolir l'immeuble comprenant les lieux loués, et de le reconstruire. Le bailleur doit dans ce cas justifier de la nature et de la description des travaux projetés. Le preneur a le droit de rester dans les lieux jusqu'au commencement des travaux de démolition, et il bénéficie d'un droit de priorité pour se voir attribuer un nouveau bail dans l'immeuble reconstruit.

    Si les locaux reconstruits ont une destination différente de celle des locaux objets du bail, ou s'il n'est pas offert au preneur un bail dans les nouveaux locaux, le bailleur doit verser au preneur l'indemnité d'éviction prévue à l'article 126 ci-dessus»

    160 L'article 128 : « Le bailleur peut, sans versement d'indemnité d'éviction, refuser le renouvellement du bail portant sur les locaux d'habitation accessoires des locaux principaux, pour les habiter lui-même ou les faire habiter par son conjoint ou ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint.

    Cette reprise ne peut être exercée lorsque le preneur établit que la privation de jouissance des locaux d'habitation accessoires apporte un trouble grave à la jouissance du bail dans les locaux principaux, ou lorsque les locaux principaux et les locaux d'habitation forment un tout indivisible ».

    161 Civ. 3ème, 19 décembre 2012, n° de pourvoi 11-24.251 Publié au Bulletin.

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    A- Le régime juridique de l'indemnité d'éviction

    L'article 127 alinéa 1 de l'Acte Uniforme énonce sans équivoque que : « Le bailleur peut s'opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée sans régler au locataire une indemnité d'éviction ». Mais si cette procédure de refus de renouvellement est menée en ignorance de l'obligation de mise en demeure pesant sur le bailleur, celui-ci sera tenu au versement d'une indemnité d'éviction162. Le paiement de l'indemnité apparait donc comme une autre manifestation de la propriété commerciale''. Instituée dès l'origine par les textes anciens sur les baux commerciaux163, l'indemnité d'éviction se trouve aujourd'hui au coeur du droit au renouvellement du bail commercial. Afin de mieux comprendre sa place dans la procédure de renouvellement, nous nous interrogerons sur sa véritable nature juridique avant de nous pencher sur l'identification des parties en présence. Il n'en demeure cependant pas moins que l'indemnité d'éviction est une indemnité compensatrice et pour ce faire, doit être calculée suivant un certain nombre de critères légaux.

    1- Nature de l'indemnité d'éviction

    L'indemnité d'éviction, de par sa nature, est une indemnité compensatrice. Elle compense ainsi le préjudice subi par le locataire du fait du refus de renouvellement164, refus considéré par certains comme un abus de droit, tandis que d'autres trouvent son fondement dans le concept même de propriété commerciale''. L'indemnité d'éviction serait alors une indemnité d'expropriation'' due par le propriétaire de l'immeuble au propriétaire commercial à. Elle doit compenser autant que possible les droits qui découlaient du renouvellement du bail commercial, c'est donc une sorte de dommages-intérêts.

    En effet, l'indemnité d'éviction compense le préjudice subi par le locataire non seulement du fait de la perte matérielle du fonds, mais également en raison des frais supplémentaires que lui occasionne l'acquisition d'un autre fonds. Elle sera fixée compte-

    162l'absence de mise en demeure régulière, si elle est établie, laisse subsister le refus de renouvellement mais ouvre droit, pour le preneur, au paiement d'une indemnité d'éviction.

    163 Voir art. 4 Loi du 30 juin 1926.

    164 Cette fonction de l'indemnité d'éviction était déjà celle retenue par le législateur de 1926 (art.4).

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    tenu des 'éléments de perte''165 que le locataire aura à subir et des 'éléments de gains'' dont il sera privé, c'est-à-dire le trouble commercial ou manque à gagner''166, depuis la fermeture de l'ancien fonds jusqu'à la réouverture du nouveau.

    Ainsi présentée, l'indemnité d'éviction vise essentiellement la protection du fonds de commerce et qui peut résulter du non-renouvellement du bail. Ce non-renouvellement peut être le fait d'une procédure de renouvellement mal menée, par exemple en cas de défaut de mise en demeure, ayant conduit le bailleur non à être contrains de continuer de louer son local mais à devoir verser au propriétaire une indemnité d'éviction. Néanmoins, il peut arriver que le droit au bail constitue à lui-seul l'élément le plus important du fonds. Dans ce cas, le préjudice représenté par la perte de ce droit aura alors une valeur supérieure à celle du fonds lui-même, en raison du potentiel de développement qu'il représente. Ainsi, dans cette hypothèse, l'indemnité d'éviction est considérée comme protectrice non plus du fonds, mais plutôt du seul droit au bail167.

    Quant à son montant, l'indemnité d'éviction présente un caractère d'indivisibilité. En découle le fait qu'en cas de refus de renouvellement pour motif grave et légitime retirant au locataire tout droit au versement d'une telle indemnité, il ne sera pas possible pour les juges d'imposer le paiement d'une indemnité d'éviction dont le montant aurait été minoré en fonction du caractère plus ou moins grave du motif de non-renouvellement. En d'autres termes, l'indemnité d'éviction doit être versée dans son intégralité ou ne pas être versée du tout, aucune situation intermédiaire n'étant possible. En vertu de ce caractère d'indivisibilité, l'indemnité d'éviction devra également couvrir l'entier préjudice du locataire alors même que celui-ci n'est évincé que de la partie des locaux affectée à un usage commercial dans l'hypothèse d'un bail mixte portant sur des locaux affectés en partie à un usage d'habitation et en partie à un usage commercial. En somme, si l'indemnité d'éviction compense effectivement les préjudices matériels et financiers subis par le locataire, elle est cependant loin de couvrir tous les effets néfastes nés du refus du propriétaire de renouveler le bail du commerçant, d'où l'ampleur des difficultés pouvant résulter du refus de renouvellement.

    165 Il s'agit notamment de la valeur du fonds, des droits d'enregistrement et taxes locales à payer pour l'achat d'un fonds de même valeur,, des frais des intermédiaires et rédacteurs d'actes, des frais de déménagement et de réinstallation, des indemnités de licenciement dues au personnel salarié évincé des lieux.

    166 Tel par exemple la perte de clientèle.

    167Mais cette solution a été critiquée en doctrine car étant de nature à engendrer des spéculations sur la valeur du droit du bail. (Voir DE JUGLART (M.) et IPPOLITO (B.) Droit commercial, vol 1, éd Montchrestien, Paris, 1980, 744 pages).

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    2- Calcul de l'indemnité d'éviction

    L'évaluation du préjudice dépend tout d'abord de leur nature : matériel et financier. Cependant, l'Acte uniforme en son article 94 de même que la loi française ne prennent pas en compte l'indemnisation du préjudice moral.168 En effet c'est le dommage qui est causé d'une manière volontaire ou involontaire. Le préjudice peut être le fait d'une personne, la survenance d'un événement naturel etc. Il peut affecter la personne dans son patrimoine ; il consiste soit dans une perte soit des dommages causés aux biens, soit encore dans la suppression ou la diminution des revenus. Et si on analyse la situation du preneur évincé il est certain qu'une diminution des revenus et du patrimoine n'est pas à écarter des conséquences du refus du renouvellement par le propriétaire ; qu'il soit légitime ou illégitime. La réinstallation du fonds dans un autre immeuble demande l'emploi de nouvelles ressources financières et en France 'le pas de porte''169 est exigé par certain propriétaire .Ainsi le préjudice moral est certain ; En ce sens que le locataire sera obligé dans une certaine mesure à réemployer des sommes d'argent pour continuer son exploitation commerciale. La réparation doit donc prendre en compte la perte subie et le gain manqué.

    Le refus de renouvellement s'accompagne forcément d'une indemnité, cette dernière devant réparer le préjudice subi par le locataire du fait de l'éviction. À cet effet, le calcul de l'indemnité d'éviction s'effectue généralement sur la base de certains éléments fixés par la Loi. Par ailleurs, si le bailleur n'entend pas payer tout ou partie de cette indemnité il lui appartient alors de faire la démonstration d'un « préjudice moindre » subi par son locataire. L'indemnité d'éviction comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce. L'un des éléments les plus importants du fonds de commerce est le droit au bail. Des auteurs le définissent comme étant « l'élément qui mesure l'intérêt pour un exploitant d'être situé à un emplacement donné pour exploiter un commerce donné moyennant un loyer donné170». Dans le cadre de l'indemnité d'éviction, il s'agit de calculer la perte du droit au bail par le preneur évincé qui représente le préjudice à indemniser.

    Sont à cet effet souvent pris en compte les frais de déménagement et de réinstallation. Ainsi, Si le locataire a déjà quitté les lieux au moment où le tribunal statue, il suffira d'ajouter à l'indemnité

    168Mais si on s'en tient à la définition de ce type de préjudice, il importait pourtant d'en prendre compte pour l'évaluation des dommages subi par le commerçant évincé.

    169 Il s'agit des sommes d'argent versé avant l'occupation des lieux.

    170Droit et pratique des baux commerciaux, Dalloz, n° 550-130, p. 565

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    principale le montant des frais de déménagement et de réinstallation déboursés par le locataire évincé sur justification. Néanmoins, seuls les frais normaux sont pris en compte, ce qui exclut les dépenses somptuaires. Les frais de réinstallation, dès lors qu'ils ont un caractère indispensable pour l'exercice de l'activité du preneur, doivent être pris en considération même s'ils apportent une plus-value à l'immeuble acquis par celui-ci. Le locataire évincé qui a acquis des locaux en vue d'y transférer son activité doit très normalement adapter la distribution desdits locaux à son activité future. Les dépenses que cette adaptation implique y compris le renforcement de la structure de l'immeuble pour accueillir dans de bonnes conditions, d'une part, la clientèle et le personnel, d'autre part, l'équipement de distribution de monnaie sont totalement induites par la nécessité par le locataire de transférer ses équipements et doivent donc être prises en compte pour le calcul de l'indemnité d'éviction. Peu importe que ces dépenses correspondent à des travaux de gros oeuvre apportant une plus-value à l'immeuble. Le locataire n'a pas à supporter les frais d'une réinstallation coûteuse à proportion du degré d'amortissement des investissements qu'il abandonne par la contrainte et ne doit conserver à sa charge que les seuls travaux qui auraient dû être refaits à brève échéance dans le local abandonné qui ne relèvent pas en leur valeur à neuf des frais normaux de réinstallation mais correspondent à court terme à une économie d'investissement que le bailleur n'est pas tenu de supporter. En conséquence, si les nouveaux locaux acquis par le preneur pour transférer son fonds de commerce lui ont été livrés sans aucun aménagement et qu'il est indispensable qu'il les adapte à son activité, le bailleur devra supporter une partie de ces travaux d'aménagement.

    B- Le règlement de l'indemnité d'éviction

    À titre de rappel, le droit à l'indemnité naît au jour du refus de renouvellement, mais l'évaluation doit être effectuée à la date la plus proche du jour de l'éviction effective171. Il s'agira donc pour le bailleur dès lors que cette indemnité est calculée de la payer. Mais certaines modalités entourent néanmoins le paiement de celle-ci. En outre qu'adviendra-t-il si le bailleur refuse de régler cette indemnité ? D'où l'idée des difficultés liées au non-paiement. Les modalités de paiement de l'indemnité d'éviction sont multiples.

    Concernant les modalités de règlement de l'indemnité tenant à sa fixation, c'est l'article 126 alinéa 1er traite de la question. Cet article dispose que : « À défaut d'accord sur le

    171 Notamment à la date à laquelle le locataire doit vider les lieux, car c'est à ce moment que le préjudice se réalise ; ou à défaut à la date où le juge statue si cette éviction n'est pas encore réalisée.

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    montant de cette indemnité, celle-ci est fixée par la juridiction compétente en tenant compte notamment du montant du chiffre d'affaires, des investissements réalisés par le preneur, de la situation géographique du local et des frais de déménagement imposés par le défaut de renouvellement ». Aux termes de cet article, l'on peut constater en premier point qu'il revient selon les vouloirs du législateur aux parties de fixer le montant de l'indemnité à payer. Donc, il s'agit d'une fixation conventionnelle à la base. Le texte suscité va plus loin en suppléant au silence des parties. En effet, à la lecture de ce texte, le juge est en cas de silence des parties, habilité à fixer cette indemnité et ce sur la base d'éléments énumérés par ce même article. Par ailleurs, le juge peut désigner un expert chargé de l'évaluation de l'indemnité à verser.

    Concernant les modalités de règlement de l'indemnité tenant aux parties, celle-ci peut être versée au locataire directement ou entre les mains d'un séquestre, auquel cas le délai imparti pour libérer les lieux ne commence à courir qu'à partir de la notification au locataire du versement de l'indemnité au séquestre. Le séquestre ne se libérera de l'indemnité entre les mains du locataire que lorsque ce dernier aura justifié auprès de lui qu'il a bien quitté les locaux, s'est acquitté des impôts, loyers et réparations locatives et qu'aucun créancier n'a formé d'opposition. Cependant que se passe-t-il quand le bailleur ne donne pas de verser cette indemnité ?

    En vertu de l'article L. 145-28 du Code de commerce Français, « aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé à quitter les lieux avant de l'avoir reçue. Jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. ». Ainsi, l'éviction consécutive au refus de renouvellement discrétionnaire du bailleur ne peut, pour des raisons pratiques, avoir d'effet automatique et contraindre le preneur à quitter les lieux le jour du congé. Ainsi, si théoriquement la relation contractuelle a cessé à compter du jour du refus de renouvellement, il n'en reste pas moins que le preneur dispose du droit de rester dans les lieux jusqu'au complet paiement de l'indemnité d'éviction. Ainsi en droit Français, Après avoir perçu l'indemnité d'éviction, le locataire dispose de trois mois pour quitter les lieux.

    Qu'en est-il si le locataire continuait à se maintenir sur les lieux loués après avoir perçu son indemnité et ce contre le gré du bailleur ? Dans ce cas, le preneur sera tenu au

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    paiement d'une indemnité d'occupation172 L'indemnité d'occupation doit correspondre à la valeur locative et se calcule par référence à un loyer déplafonné. Toutefois, à la défaveur du bailleur, la pratique judiciaire révèle que les juges appliquent un coefficient d'abattement en raison de la précarité de l'occupation.

    En définitive, le preneur quittera les lieux après paiement intégral de l'indemnité d'éviction du bailleur. Pour faciliter le règlement, les parties peuvent convenir que les créances seront compensées selon les règles de l'article 1289 et suivants du Code civil Camerounais. La jurisprudence reconnaît que la compensation peut produire ses effets dès lors qu'une décision juridictionnelle a reconnu la réciprocité des dettes. L'étude du refus de renouvellement sans indemnité d'éviction révèle que le bailleur sort affaibli de la lutte entre droit de propriété et droit à la propriété commerciale dès lors qu'elle est mal menée173. Il revient donc à la partie diligente, et très souvent le bailleur, de régulariser la procédure en respectant par exemple l'exigence de mise en demeure faisant défaut.

    *

    * *

    En conclusion, l'absence de mise en demeure a pour inconvénient de remettre en cause toute la procédure de résiliation. Dès que les conditions à remplir par la procédure ne sont pas respectées, il y a lieu de sanctionner celle-ci. Mais, il est possible à la partie vis-à-vis de laquelle la sanction de la procédure porte grief, d'effectuer les diligences manquantes.

    En effet, il est possible que la partie n'ayant pas adressé de mise en demeure n'était pas informé de l'exigence d'un tel impératif, et par là même, a engagé une procédure qui se vouait déjà être irrégulière. Ainsi, lui est donc possible de régulariser la situation en adjoignant à la procédure l'acte de mise en demeure faisant défaut. En outre, celle qui le

    172 Sauf dans l'hypothèse où celui s'est retrouvé dans un cas fortuit ou une force majeure l'empêchant d'effectuer la remise des clés du local.

    173 Les montantsdéfinitifs des indemnités d'éviction, qu'elles soient de remplacement ou de déplacement, peuvent atteindre des montants très exorbitants.

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    savait et est passée outre, devra subir les conséquences attachées à l'absence de mise en demeure : nullité de la procédure, paiement de l'indemnité d'éviction. Il s'agit donc de sanctionner le non-respect d'une mention prévue par le législateur Ohada et indispensable à l'information de la partie fautive, le législateur étant fidèle à son désir de préserver la stabilité des relations contractuelles gages d'essor dans les affaires dans l'espace OHADA.

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    CONCLUSION GÉNÉRALE

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    CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE

    On constate que le législateur Ohada a préservé les éléments fondamentaux de la protection des contrats commerciaux parmi lesquels le bail commercial. C'est la raison pour laquelle une exigence d'une mise en demeure fut imposée. Cette mise en demeure produit des effets d'ailleurs comme tout acte de procédure. Cependant en cas de violation des exigences légales posées, des sanctions sont prévues quoique, toutes n'étant pas expressément prévues par l'AUDCG.

    Primo, la mise en demeure est un acte informant la partie défaillant d'avoir à s'exécuter. Une telle possibilité peut être saisie par le débiteur de l'obligation, qui peut dès lors régulariser sa situation en exécutant les obligations faisant défaut. Plus loin, il est aussi donner une possibilité aux créanciers inscrits sur le fonds du preneur d'exécuter les obligation manquantes ou même de contraindre ce dernier à les exécuter. Si donc, elle n'y arrive pas, c'est-à-dire en cas de non régularisation, deux effets seront produits : soit elle entraîne la résiliation du bail avec toutes ses conséquences, soit un refus de renouvellement tel que prévues respectivement aux articles 133 et 127 de l'Acte Uniforme relatif au droit commercial général.

    Secundo, rappelons que comme tout acte juridique irrégulier, la mise en demeure peut faire l'objet de diverses sanctions lorsqu'il est établi qu'elle ne respecte pas les conditions de validité174. Déjà le bail, dont la résiliation est irrégulière, sera maintenu jusqu'à ce qu'une procédure régulière soit menée. Comme corollaire la réintégration du preneur dans les lieux s'il était déjà expulsé ou son maintien s'il n'en n'était pas encore expulsé. Cette irrégularité peut aussi aboutir dans l'hypothèse contraire au versement d'une indemnité d'éviction en bonne et due forme.

    174 Article 133 de l'AUDCG.

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    En définitive, prévue et aménagée pour protégée le bail professionnel, la mise en demeure a été placé au rang d'une formalité d'ordre public par le législateur OHADA à l'article 234 alinéa 1 de l'AUDCG. En effet, l'ordre public attaché à cette mention a pour objectif de préserver la propriété commerciale sans laquelle le preneur professionnel se trouverait dans une insécurité intempestive, puisque c'est elle qui lui permet de se prévaloir du renouvellement de son bail ou à défaut, d'une indemnité d'éviction qui pourra lui permettre de se réinstaller ailleurs en cas de refus de renouvellement par le bailleur. Elle a pour but d'informer la partie défaillante de l'inexécution des obligations qui sont pourtant siennes et de l'inciter à les exécuter. Il s'agit donc d'une dernière chance donnée pour remplir les obligations contractuelles faillies. Ceci explique dont pourquoi le législateur a encadré rigoureusement les règles applicables à la mise en demeure, à travers l'article 133 du nouvel AUDCG, en lui donnant un rôle quasi incontournable dans les procédures emportant rupture du bail professionnel.

    En effet, toute procédure dont la finalité est la rupture du lien contractuel qu'est en l'occurrence le bail doit nécessairement faire intervenir un acte de mise en demeure en termes d' « ultimatum » donné au locataire ou au bailleur selon le cas. Comme nous l'avons dit plus haut, cette mise en demeure sert à l'information de la partie défaillante. En effet, il peut arriver comme cela est très souvent le cas, que la parte débitrice de l'obligation ne l'a pas exécuté en ignorance de cause. Il est donc nécessaire de lui donner la possibilité de régulariser une situation dont les conséquences auraient pu être néfastes à son égard. Dans cette situation, le preneur peut prendre toutes les mesures qu'il juge utiles pour exécuter les obligations manquantes ou faire cesser le trouble résultant de son fait ou d'un tiers proche. Bien plus, les créanciers du preneur doivent être informés de la procédure de résiliation contre leur débiteur. Cette exigence permettra à ces derniers s'ils le souhaitent d'exécuter les obligations faillies de leur débiteur.

    En outre, retenons que selon les cas de rupture, la mise en demeure s'applique différemment. Mais, le but visé est le même : l'évitement de la rupture du bail gage de l'essor des affaires dans l'espace OHADA. Le bail professionnel est considéré comme l'un des éléments les plus importants du fonds de commerce, et par là même, il est donc primordial de le protéger et d'en assurer la survie. Cependant, il arrive souvent et très souvent que le respect de l'exigence de mise en demeure ne soit pas avéré. Dans pareil cas, le législateur OHADA, n'ayant pas été très explicite sur les sanctions applicables en cas d'absence de mise en

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    demeure, il demeure que la jurisprudence emboîtant le pas, semble avoir trouvé des pistes de réponses au problème des sanctions en cas d'absences de mise en demeure. À cet égard, il est impératif pour la partie exprimant son intention de mettre un terme au bail d'en informer l'autre par une lettre de mise en demeure la sommant de s'exécuter au péril de voir son contrat de bail résilier.

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    · Code de procédure civile et commercial Français ;

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    · CCJA 2ème Ch. Arrêt n°5 du 2 Février 2012 SCI LUMIÈRE C/ IPM, OHADATA J13-59, cassation de CA Abidjan du 7 Avril 2006, note sous Faustin EKOLLO.

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    l'Ohada

    TABLES DES MATIÈRES

    AVERTISSEMENT i

    DÉDICACE ii

    REMERCIEMENTS iii

    PRINCIPALES ABBRÉVIATIONS iv

    SOMMAIRE vi

    RÉSUMÉ vii

    ABSTRACT viii

    INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

    PREMIÈRE PARTIE : LA MISE EN DEMEURE: FORMALITÉ PRÉALABLE EN MATIÈRE DE RUPTURE DU BAIL À USAGE PROFESSIONNEL EN DROIT DE

    L'OHADA 10
    CHAPITRE I : LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE ... 12

    SECTION 1: LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE TENANT EN

    LA FORME DE LA RUPTURE 12

    Paragraphe 1- La mise en demeure dans la procédure de résiliation du bail à usage

    professionnel 13

    A- La résiliation en l'absence de toute clause résolutoire 13

    B- L'extension de l'exigence à la résiliation de plein droit 15

    Paragraphe 2- La mise en demeure dans la procédure de refus de renouvellement du bail

    à usage professionnel 17

    A- La violation des obligations contractuelles 18

    B- La cessation de l'exploitation du fonds donné en bail 19

    SECTION 2: LE CHAMP D'APPLICATION DE LA MISE EN DEMEURE TENANT

    EN LA NATURE DU MOTIF DE LA RUPTURE 20

    Paragraphe 1- La nécessité de la mise en demeure pour les manquements susceptibles de

    régularisation 20

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

    l'Ohada

    Paragraphe 2- La dispense de la mise en demeure en présence de manquements

    insusceptibles de régularisation 21

    CHAPITRE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA MISE EN DEMEURE 25

    SECTION 1: L'ÉLABORATION DE LA MISE EN DEMEURE 25

    Paragraphe 1- Le contenu de la mise en demeure 26

    A- L'indication des clauses et conditions violées 26

    B- La mention du respect du délai légal prévu par l'article 133 de l'Acte Uniforme

    portant organisation du droit commercial général 27

    Paragraphe 2- Le formalisme dans la mise en demeure 28

    SECTION 2: LA NOTIFICATION DE LA MISE EN DEMEURE 31

    Paragraphe 1-Les procédés de notification de la mise en demeure 31

    A- La voie ordinaire 32

    B- La voie de la signification. 34

    Paragraphe 2- Le moment de la notification de la mise en demeure 37

    CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE 40

    DEUXIÈME PARTIE: LA MISE EN DEMEURE: FORMALITÉ PRODUISANT DES EFFETS VARIABLES DANS LA PROCÉDURE DE RUPTURE DU BAIL À

    USAGE PROFESSIONNEL EN DROIT DE L'OHADA 41

    CHAPITRE I: LE RESPECT DE LA MISE EN DEMEURE 43

    SECTION 1 : LA RÉGULARISATION DE LA SITUATION DÉFAILLANTE 43

    Paragraphe 1- L'hypothèse de la résiliation judiciaire 44

    A- Régularisation dans les délais impartis 44

    B- Régularisation hors délai 46

    Paragraphe 2 : Le cas du refus de renouvellement du bail 48
    SECTION 2 : LE DÉFAUT DE RÉGULARISATION DE LA SITUATION

    DÉFAILLANTE 49

    Paragraphe 1 : la résiliation du bail à usage professionnel en droit de l'Ohada 50

    A- La procédure applicable en cas de résiliation du bail professionnel 51

    B- Les effets de la résiliation du bail professionnel 55

    Paragraphe 2- le refus du renouvellement justifié du bail à usage professionnel 57

    A- L'invocation des motifs graves et légitimes liées la faute d'une partie 58

    La mise en demeure en matière de rupture du bail à usage professionnel en Droit de

    l'Ohada

    1- Les conditions de validité des motifs graves 58

    2- Les hypothèses de motifs graves et légitimes 59

    B- L'appréciation souveraine des motifs graves et légitimes 60

    CHAPITRE II: L'ABSENCE DE LA MISE EN DEMEURE 63

    SECTION 1: LE SORT DE L'ACTION EN RÉSILIATION 63

    Paragraphe 1 : Le cas de la mise en demeure adressé au preneur. 64

    A- La nullité de la mise en demeure non conforme 64

    1- Les raisons justifiants la nullité 65

    2 - Les effets attachés à la nullité de la mise en demeure irrégulière 67

    B- L'irrecevabilité de l'action en résiliation 67
    Paragraphe 2 : l'hypothèse de la mise en demeure adressée aux créanciers inscrits sur le

    fonds de commerce 69

    A- L'irrecevabilité de l'action 70

    B - L'Opposabilité de la décision aux créanciers non informés 71

    SECTION 2: LE SORT DU BAIL À USAGE PROFESSIONNEL 72

    Paragraphe 1 : la survie du Bail à usage professionnel 73

    A- Le maintien dans les lieux loués 73

    B- La réintégration dans les lieux du preneur expulsé 73

    Paragraphe 2 : l'octroi de l'indemnité d'éviction 75

    A- Le régime juridique de l'indemnité d'éviction 77

    1- Nature de l'indemnité d'éviction 77

    2- Calcul de l'indemnité d'éviction 79

    B- Le règlement de l'indemnité d'éviction 80

    CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE 81

    CONCLUSION GÉNÉRALE 81

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 81

    TABLES DES MATIÈRES 81






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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle