§3. Le développement de la pradiplomatie
Le rôle des "composantes territoriales" des
systèmes fédéraux ou régionalisés a, en
effet, été le plus souvent occulté au nom de
considérations méthodologiques, mais surtout en vertu de
postulats ayant longtemps dominé la discipline.13 Un
réaliste conçoit l'Etat-nation de façon unitaire et
homogène, il ignore et minore l'importance des activités
économiques, de l'idéologie de la culture..., il a tendance
à minimiser l'importance des actions internationales des entités
sub-étatiques et la diversité culturelle de la scène
nationale. S'il y a paradiplomatie, ce qui est contesté, c'est en raison
de la volonté de l'Etat territorial d'instrumentaliser les actions des
gouvernements locaux et régionaux.
L'approche du «Two level Games » de Robert
D Putnam est certainement la plus typique sur cette question.14 Les
décideurs de l'Etat central négocieraient presque
simultanément avec les acteurs étrangers et avec les groupes
responsables de la politique du pays.15 Cette approche décrit
les politiques des gouvernements centraux comme instrumentalisant les
régions quand les autres outils de
la politique étrangère s'avèrent moins
intéressants ou moins performants. La paradiplomatie est ainsi un
multiplicateur de puissance lorsque l'Etat central ne peut agir seul. Les
tenants de cette approche suggèrent que les acteurs sub-étatiques
ne s'engagent dans une politique internationale que lorsque le gouvernement
central fait la requête, ils peuvent également s'engager dans une
action internationale lorsque les gouvernements étrangers les prennent
pour cible.
Avec le développement de la mondialisation et du
développement des blocs régionaux. Les entités
sub-étatiques ont été appelé à se
développer une politique étrangère dans leur champ de
compétence et un peu plus. Aux Etats-Unis, de nombreux Etats et villes
émettent même des politiques dans le domaine de droit de l'homme,
de l'environnement et même sur les questions plus traditionnellement
associées à la sécurité militaire. Les 21300 Etats,
comités et villes américaines ont une latitude non
négligeable en matière de relations internationales. En 2001 les
Etats
américains détenaient approximativement 183
représentations à l'étranger comparativement à
quatre en 1970. Tous les Etats américains ont conclut des ententes
13 Eric Philippart cité par Stéphane
Paquin, op cit, p 31.
14 Robert Putnam cité par Stéphane
Paquin, op cit, p32.
15 Stéphane Paquin, op cit p 32 et
Suivantes.
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internationales avec des Etats souverains comme le Mexique ou
avec les entités sub-étatiques comme le gouvernement du
Québec. Les cinquante Etats américains ont également
développé, conséquence de l'Accord de Libre Echange
Nord-Américain (ALENA), des relations transfrontalières
très denses avec les provinces canadiennes et les Etats Mexicains.
Au sein de l'Union Européenne, les entités
sub-étatiques bénéficient des divers canaux de
représentation dont la portée symbolique et pratique est
variable. La paradiplomatie n'est pas une nouveauté mais depuis plus
d'une décennie, il semble qu'il soit à la mode d'ouvrir les
bureaux à l'étranger, de s'immiscer dans les Organisations
Internationales ou prendre part sans relâche à des
conférences. Cette activité porte ses fruits, comme
l'introduction dans la convention de Lomé IV avec les pays de l'ACP
(Afrique, caraïbes et pacifique) du concept
«décentralisé» dans l'Union Européenne, ce qui a
permis à des organisations étrangères du gouvernement
central d'utiliser les ressources destinées par la commission à
la coopération. L'objectif des efforts de la paradiplomatie des
régions européennes est donc indiscutable, même si celle-ci
se déploie dans les domaines culturels, sociaux ou politiques.
Plus encore, depuis le traité de Maastricht, les
représentants d'organismes régionaux ou infra-étatiques
peuvent faire partie des délégations nationales qui
négocient au sein du conseil de l'union.
Les entités sub-étatiques possèdent
souvent d'imposants réseaux de représentation à
l'étranger, souvent plus important que ceux de nombreux Etats
souverains.
Enfin, plusieurs facteurs permettent d'expliquer le
développement de la paradiplomatie mais nous n'en retenons seulement que
trois importants dont "le nationalisme", "la régionalisation et la
construction des blocs régionaux" et "les facteurs
économiques".
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