WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L’héritage industriel dans le renouveau du quartier « Grandclément gare".


par Camille JEAN-BAPTISTE
Université Jean moulin Lyon 3 - Master géographie et aménagement du territoire 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3. Quels résultats ?

3.1 Le patrimoine une thématique délaissée

Quelque que soit le dispositif mis en place pour interroger le rapport à l'espace des Villeurbannais j'ai la plupart du temps était confronté à l'absence quasi-totale d'une volonté de conservation de bâtiment ou de réhabilitation que ce soit par exemple pour des raisons architecturales ou pour des raisons plus personnelles, la démolition n'est pas non plus mal vécue. Parler de la transformation du quartier c'est surtout quelque chose qui interroge puisqu'elle implique le renouveau et donc l'inconnu. Toutefois s'intéresser à ce qui va disparaître ne fait pas partie des préoccupations des habitants interrogés et ce constat est valable même pour les plus anciens. Ces personnes sont heureuses de pouvoir raconter leur

65

quartier leurs souvenirs mais de là à les mobiliser pour reconstruire le quartier c'est bien plus difficile.

Par ailleurs, parler de patrimoine n'apparait absolument pas comme quelque chose de « naturel », comme quelque chose de spontané. Il est toujours nécessaire que ce soit une personne extérieure, une personne préoccupée par ce paramètre pour qu'il puisse faire l'objet d'une discussion. Dans chacune des activités que j'ai proposé la question le patrimoine était suggérée, proposée ou tout à fait annoncé mais elle n'aboutissait pas à des prises de position fermes. La perspective de créer un projet patrimonial avec les habitants est une tâche assez difficile.

3.2 Le patrimoine social valorisé

Le mot patrimoine social me paraissait le plus approprié pour parler des résultats obtenus. Très souvent les interrogés m'ont fait part des moments agréables vécus dans le quartier d'autrefois. La convivialité et l'ambiance agréable de la rue et du quartier en général ressort très fréquemment. En revanche ces mêmes souvenirs sont très rarement rattachés à des éléments bâtis, à des logements, à des usines ou toute autre construction du quartier alors que leur lien est attesté. En effet, l'une des marques de l'industrialisation de la ville réside dans les différentes constructions de cette époque, les lieux de vie et les lieux de travail étaient étroitement liés, on travaillait là où on vivait, les connexions entre les habitants étaient donc facilitées. Même s'il est parfois mentionné le lien entre l'aménagement et la potentielle richesse sociale qu'il peut apporter n'est que rarement mis en évidence et aucunement mis en avant pour la reconstruction du quartier.

Interroger les habitants sur le patrimoine de leur quartier dans le cadre d'un processus de rénovation urbaine est une activité délicate, qui nécessite une approche diversifiée, et un vocabulaire adapté. Le caractère industriel du quartier Grandclément n'est plus, à la fois dans les activités économiques du secteur ni dans les représentations de ses habitants. Réinvestir, réutiliser ce caractère industriel apparait ici non pas comme un non-sens mais disons comme une nouveauté. Les habitants ne se sentent globalement pas intéressés spontanément par ce paramètre-là, il faut une fois encore que cette question soit soulevée par des « experts » du patrimoine du moins pour ce quartier-là et avec cet échantillon de personnes.

66

Finalement, le projet de rénovation urbaine à l'oeuvre dans le quartier « GrandClément gare » aura été l'occasion de saisir les multiples enjeux que peut revêtir une telle opération. Construire ou reconstruire sur une ville avec un passé marqué, dans le cas présent un passé industriel implique une nécessaire réflexion autour de son héritage. Les experts en aménagement du territoire en charge d'un tel projet ont alors plusieurs possibilités pour traiter la question. Leur action n'est pas neutre et impacte durablement ce que nous pourrions qualifier comme l'identité du territoire. Selon les personnes en charge du projet les orientations peuvent varier considérablement, pour le quartier GrandClément c'est une agence d'urbanistes et d'architectes préoccupée par la spécificité du quartier qui s'est chargée de questionner son renouveau. Un véritable travail de recherche sur les spécificités de ce quartier a été mené par l'équipe et le patrimoine industriel est alors apparu sous ses formes matérielles et architecturales. Les orientations qu'ils vont tracer vont s'avérer être les seules décisives dans la restructuration du quartier. Cependant, aujourd'hui on s'interroge sur la légitimité de ces acteurs pour réaliser les différentes étapes des opérations d'urbanisme. La place des habitants est de plus en plus mise en avant et la concertation habitante mise en place pour ce projet en est la preuve. La concertation avec les habitants reste néanmoins superficielle et ne trouve pour l'instant pas de véritables finalité. Elle intervient trop tard et ne s'adresse pas encore dans les faits à l'ensemble des riverains. La concertation offre malgré tout un bon terrain d'enquête pour observer comment les habitants se saisissent de certaines thématiques du projet urbain, dans le cas présent c'est la question du patrimoine industriel qui a été soulevé.

Il apparait en définitive que cette thématique ne fait pas sens pour les habitants, certes une fois qu'elle est mentionnée mise en forme et définit par des experts en la matière le sujet apparait beaucoup plus simple mais élaborer une réflexion poussée sur le patrimoine du quartier et plus précisément sur son patrimoine industriel s'avère être une tâche bien plus complexe. Les riverains ont beaucoup de mal à faire le lien entre le patrimoine social fruit des interactions entre les individus et le patrimoine bâti. Finalement, la mémoire ouvrière ne passe pas nécessairement par le biais de traces ou par leur réinvestissement. Malgré les démolitions et les friches industrielles la mémoire individuelle reste prégnante et peut être réactivée par de simples conversations informelles voire même par la consultation de photos (Veschambre). Toutefois, ce constat n'est valable que pour les derniers survivants

67

de cette époque industrielle qu'en sera-t-il une fois qu'ils ne seront plus là ? On pose ici la question de la transmission de cet héritage.

Les aménageurs apparaissent dans ce cas de figure comme les seuls en mesure d'interroger l'héritage d'un quartier et à pouvoir véritablement impacter leur devenir dans les projets de renouvellements urbains. Tant que le site ne fait pas l'objet de revendications particulières, il peut voir son identité complètement remodelée. Ce constat interpelle, la question de l'héritage d'un quartier n'est vraiment discuté qu'en cas de situations conflictuelle, comment la potentielle disparition des sites industriels doit-elle abordée ? Mais plus largement, les institutions et professionnels de la mémoire doivent-ils transmettre leurs connaissances aux habitants ? Si c'était le cas quels seraient les apports de cette démarche et quelles seraient ses conséquences sur les propositions d'aménagement du territoire ?

68

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite