Dans une enquête en ligne du Figaro
réalisée en avril 201969, sur 38 000 votants, 59%
déclarent qu'ils sont prêts à «
préférer le train à l'avion pour des raisons
écologiques ». Bien sûr, « être
prêts à » ne veut pas dire faire, pourtant c'est le Figaro
à nouveau dans un article de Guillaume Poingt paru le 13 avril
201970 qui nous rapporte les témoignages de personnes ayant
arrêté d'utiliser l'avion. Il y a par exemple Benedicte, 30 ans
qui déclare « Le voyage en France, en train ou en
voiture, offre d'incroyables possibilités de voyages moins polluants. Je
pars moins souvent, mais plus longtemps. Exit les week-ends en avion dans des
capitales européennes. » Ou encore Ingrid, 32 ans qui
utilise exclusivement le train « Dans ces cas-là, le
trajet fait vraiment partie du voyage. Il permet d'éprouver la distance,
de prendre le temps qu'on n'a pas dans la vie de tous les jours pour lire,
préparer son séjour. » Les différents
interviewés regrettent en revanche que le train soit bien souvent plus
cher que l'avion.
Dans un autre article, paru sur ConsoGlobe en mars 2019 et
intitulé Voyager sans avion, la nouvelle tendance de
l'écotourisme71, la journaliste Pauline Petit nous
décrit des voyageurs souhaitant aller jusqu'au bout de leurs
idées, par souci de cohérence. Encore une fois, l'idée de
temps de trajet plus long ressort mais sous l'aspect d'un temps pour soi, qui
permet de profiter pleinement du voyage. Elle évoque également
l'idée de perte d'exotisme dans un certain type de tourisme «
quel exotisme trouve l'Allemand en week-end à Ibiza, qui
écoute un DJ de son pays entouré de centaines de ses comparses ?
». Voyager sans avion est à l'opposé de ce
type de tourisme.
Dans un autre article paru sur LCI le 3 juin
201972, la journaliste Justine Faure recueille les
témoignages de deux personnes ayant complétement
arrêté d'utiliser l'avion. Elle évoque encore une fois des
soucis
69
http://www.lefigaro.fr/international/2019/04/07/01003-20190407QCMWWW00032-comme-en-scandinavie-etes-vous-pret-a-preferer-le-train-a-l-avion-pour-des-raisons-ecologiques.php
70
http://www.lefigaro.fr/conso/ces-francais-qui-ne-prennent-plus-l-avion-pour-preserver-la-planete-20190413
71
https://www.consoglobe.com/voyager-sans-avion-ecotourisme-cg
72
https://www.lci.fr/population/ma-vie-apres-avoir-dit-comme-greta-thunberg-stop-aux-voyages-en-avion-proposition-de-loi-ruffin-train-vols-interieurs-2118243.html
de cohérence, des personnes sensibles à la
cause climatique, qui essaient de faire des efforts au quotidien, de consommer
local ou qui s'investissent dans des mouvements comme Youth for Climate et pour
qui prendre l'avion devient alors éthiquement inenvisageable. L'une des
interviewée s'appelle Lena, elle a 20 ans et vient de réaliser un
tour d'Europe d'un an en train. Son prochain projet de voyage est le Japon,
elle a déjà prévu son itinéraire en train via
Moscou puis le transsibérien pour terminer en ferry. Elle prévoit
10 à 15 jours de trajet et commente « Nous sommes dans une
société où il est difficile de vivre de manière
écologique. Quand vous avez seulement cinq semaines de congés
payés par an, si vous voulez aller au Japon, prendre 15 jours juste pour
le trajet, c'est compliqué. Mais je pense qu'aller aux Etats-Unis ou en
Asie du Sud-est devrait être des choses extrêmement rares et
précieuses. C'est normal de prendre du temps. D'un point de vue
philosophique je serai pour la suppression des vols long-courriers.
»
Voyager en avion semble être le moyen le plus simple et
le plus rapide de se rendre d'un point A à un point B. En revanche,
voyager sans avion semble remettre en cause l'intérêt de cette
rapidité, en transformant le trajet en voyage. Cette question rejoint en
fait notre rapport au temps. Le temps « vacant », le temps des
vacances, qu'il faut rentabiliser pour profiter au maximum. Visiblement les
partisans du « Flyless » ne l'entendent pas de cette façon.
C'est également ce que résume Jérémy, sur son blog
Roadcall dans un article intitulé Voyager sans prendre l'avion : mission
impossible ? Peut-être pas ! Voici les alternatives73 «
Oui il est possible de voyager et même de s'éclater en voyage
sans prendre l'avion. Simplement, il faut changer son rapport au temps.
C'est-à-dire ne plus vouloir absolument aller quelque part, ne plus
faire de la destination le but ultime, mais plutôt chercher à
apprécier le voyage, le mouvement en tant que tel. »
Les voyageurs ayant dit non à l'avion nous relatent
des voyages heureux, des voyages où l'on prend le temps de
découvrir les lieux traversés, et dans lesquels le chemin est
aussi important que la destination. Dans cette logique, c'est le rapport entier
au voyage qui est différent et pas seulement le moyen de transport.
L'avion, dans cette idéologie, est presque perçu comme le symbole
absolu de ce qui est rejeté, le symbole d'une certaine vision du monde.
Bien loin de la fascination du début du siècle, de
l'épopée des premiers vols et de la créativité des
inventeurs.