2.2. Réduction de la production agricole
nationale
La Côte d'Ivoire est un pays dont l'économie
repose principalement sur l'agriculture. Ainsi, les conflits fonciers
situés dans les zones à prédominance forestière et
agricole telles que Sinfra,ont un impact direct sur la rentabilité
nationale des cultures d'exportations (café, cacao, anacarde,
hévéa,...).
Selon le chef de la tribu Sian Mr Z.(71 ans, retraité,
entretiens effectués en Mai, 2016) « pendant les
périodes de conflit à Sinfra, les acteurs ruraux sont plus
occupés aux confrontations physiques, mystiques plutôt qu'aux
activités champêtres. Le sarclage des différentes cultures
ne s'effectue pas au moment opportun et les plantes ou cultures restent
submergées par les mauvaises herbes ». En d'autres termes, ces
plantes restent submergées en raison du climat
d'insécurité. Les ruraux ne pouvant courir le risque de se rendre
dans leurs plantations individuellement pour couper les fruits à
maturité, restent dans la patience d'une solution au litige.
Par ailleurs, vu la lenteur et la lourdeur administrative
locale, caractéristique de l'administration ivoirienne, les
procédures de gestion lassantes et amollissantes, engagées par
les autorités de Sinfra s'éternisent, clouant de ce fait ces
ruraux dans une attente interminable et exaspérante avant de vaquer
à leurs occupations
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champêtres. Les plantes non submergées par les
mauvaises herbes produisent des fruits qui se décomposent et se
putréfient dans les plantations pendant ces moments de conflit ou
d'attente solutionniste. Les conséquences qui en résultent
s'articulent principalement autour de la réduction production agricole
individuelle, communautaire et locale ; ce qui, par ricochet impacte sur la
production nationale en raison de la position géographique de Sinfra
(zone cacaoyère, caféière et désormais
anacardière). Pour un enquêté(T., 33 ans, planteur à
Kouêtinfla ; entretien de Juillet 2016) « les conflits fonciers
à Sinfra ont un impact sur la production des cultures de rentes
nationales. Pendant les périodes de conflit et de résolution, les
paysans ne peuvent se rendre au champ pour récolter les cultures
à cause de l'insécurité relative au conflit. Ainsi, la
production locale et nationale baisse puisqu'au moment indiqué, les
paysans ne sont pas partis couper les fruits de cacao et de café qui
sont pourris sur les arbres. La récolte devient faible avec tout
l'impact négatif sur la sécurité alimentaire des ruraux et
la production agricole nationale ».
Selon le chef de Béliata, J. (72 ans, retraité,
entretiens effectués en Avril, 2016) « les conflits fonciers
observés à Sinfra ont toujours eu une influence directe ou
indirecte sur la production agricole de Sinfra. Ainsi, vu la position
géographique du département, il est évident que cette
influence remonte à l'échelle nationale ».
Avant d'aborder la question des modes de gestion des conflits
fonciers, il est important de rappeler que la plupart des conflits fonciers
à Sinfra naissent du processus d'acquisition des terres (transmission
par héritage, transmission par distribution utérine des terres
familiales, tutorat, arrangements par compensation, prêt, vente, mise en
gage et métayage ou « zépa »)et des
conventions y afférents. Ces conflits observés autant à
l'intérieur de la structure familiale, au niveau extrafamiliale que
communautaire ne répond pas à un enchainement fixé
d'étapes mais plutôt à des actions non prévisibles
liées à ce que la terre représente pour ces acteurs. De ce
fait, différents moyens sont dégagés par les acteurs
(physiques, mystiques et relationnels) qui, fréquemment s'affrontent sur
l'ensemble de l'espace
géographique départemental (plantations, milieu
rural et milieu urbain). Les conséquences qui en résultent
concernent respectivement les impacts internes au département (violences
physiques, matérielles,....) et ceux, externes au département
(exode rural et difficultés d'insertion professionnelle dans les
agglomérations, baissede la production agricole locale en termes de
cultures d'exportation).
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IV. MODES DE GESTION DES CONFLITS FONCIERS A
SINFRA
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