Depuis plusieurs années déjà, le pouls
économique de l'Afrique s'est accéléré, impulsant
au continent une nouvelle dynamique de croissance. Parmi les mutations les plus
spectaculaires observées, le secteur bancaire est sans doute l'un de
ceux qui ont connu les plus importantes transformations. Pourtant, la majeure
partie des africains ne possède toujours pas de comptes bancaires
classiques et doit encore trop souvent compter sur des paiements en
espèces ou passer par des services informels, afin de réaliser
quotidiennement leurs transactions et autres paiements. Face à ce faible
niveau d'inclusion financière, une opportunité a vu le jour pour
les oubliés du système bancaire : le mobile money ou l'argent
mobile. Lancé pour la première fois au Kenya en 2007 par
l'opérateur Safaricom (filiale du groupe britannique de
télécommunication Vodafone), le mobile money est aujourd'hui un
franc succès, dont le modèle est désormais reproduit dans
89 pays à travers le monde. L'Afrique, qui a vu naitre cette solution en
reste cependant le fer de lance avec plus de 80% du continent couvert par des
services d'argent mobile.
C'est sous la forme d'un projet pilote initié en 2005
au Kenya que l'idée de l'argent mobile voit le jour. À l'origine,
ce projet qui a rassemblé 500 personnes avait pour objectif de faciliter
le remboursement de microcrédits, octroyés par l'institution de
microfinance Faulu Kenya, à l'aide du réseau de revendeurs de
crédits de communication de Safaricom. Durant six mois, les deux
organisations ont
32 http://www.innogenceulse.com/ la
révolution du paiement mobile en Afrique.
La monnaie électronique remonte en 2004 avec la
création par la Société de télécommunication
CELTEL, d'une banque appelée « Banque CELPAY ».
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réalisé un test pilote au cours duquel, les
clients de l'institution de microcrédits ont utilisé les services
de l'opérateur mobile pour rembourser leurs prêts. Pourtant, alors
que le projet est encore à l'essai, sa simplicité pousse
rapidement les clients à se détourner de l'usage originel,
effectuant des opérations qui n'avaient pas été
prévues au départ comme des paiements de biens et services entre
participants du test pilote ou des reconversions de la monnaie
électronique en temps de communication envoyé à des
membres de leur famille.
À l'issue du test, Safaricom décide alors de
modifier entièrement sa stratégie et de recentrer le service sur
la fonction qui est sienne aujourd'hui : le paiement mobile.
M-Pesa (M pour « mobile », PESA pour «
argent » en langue swahili) est ainsi officiellement lancé en mars
2007 par Safaricom, premier opérateur mobile au Kenya.
L'opération connait un succès immédiat et M-Pesa capta
rapidement une part significative du marché des transferts d'argent au
Kenya. Aujourd'hui le service compte plus de 18 millions d'utilisateurs qui
effectuent près de 8 millions de transactions par jour.
Cette « success story » de l'opération
kenyane eût un écho retentissant et les plus importants
opérateurs mobiles du continent, accompagnés
d'établissements bancaires se sont successivement lancés sur ce
qui est considéré aujourd'hui comme l'une des plus importantes
innovations africaines de l'histoire. Ainsi, un an après sa cousine
kenyane, l'opérateur mobile français Orange lance lui aussi son
service « Orange money » présent aujourd'hui dans 14
pays dans le monde dont 11 en Afrique. Comme elle, une liste très longue
de groupes de télécommunications propose désormais des
services similaires à travers le continent. C'est le cas notamment de
l'indien Airtel, de l'Emirati Etisalat, du Sud-Africain MTN et de plusieurs
autres opérateurs nationaux et internationaux.