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La communauté internationale dans le jeu politique togolais à  partir de 1990.


par Rodolphe Assataclouli BAKOUSSAM
Université de Kara - Master en Gouvernance internationale (Sciences politiques) 2018
  

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INTRODUCTION

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Dans son ouvrage portant sur les règles du jeu politique, F. G. Bailey invitait de façon prosaïque tout férue de l'analyse politique à considérer la politique comme « un jeu de compétition »1. Cet appel, nonobstant sa trivialité, permet de mieux appréhender la politique et d'en saisir son fonctionnement.

La politique comme jeu de compétition a repris au Togo au début des années 1990 avec la libéralisation de l'espace politique consacrant ainsi le pluralisme politique. Cette ouverture de l'espace politique au Togo - comme ce fut le cas dans la plupart des pays africains - a été fortement impulsée par l'atmosphère socioéconomique et politique du moment. Le triomphe du libéralisme ainsi que la réhabilitation de la protection des droits de l'homme rendent de facto la communauté internationale responsable de leur sauvegarde à travers le monde et surtout dans les pays qui ont connu un passé peu friand de la démocratie2. Elle s'illustre ainsi dans les processus de transition amorcée, comme arbitre du jeu 3 et gardienne des principes démocratiques auxquels les pays sont désormais conviés bon an mal an.

En Afrique francophone, c'est le discours prononcé à la Baule le 20 juin 1990, lors de la 16? conférence des chefs d'Etat d'Afrique et de France par le Président français François Mitterrand, qui sera proprement, le point de départ de l'implication de la communauté internationale dans le fonctionnement institutionnel des pays de cette zone à travers la conditionnalité démocratique de l'aide publique au développement4. Depuis lors, la communauté internationale est devenue permanente sur la scène politique togolaise à travers des actes multiformes mais concrets. En effet, à la suite des violentes manifestations du 05 octobre 1990, la communauté internationale, après avoir condamné la répression qui en a découlé, supervisera le tout premier accord politique5 de la démocratisation devant déboucher sur la tenue de la Conférence Nationale. Deux (2) ans plus tard, à la suite de la répression sanglante des mouvements de grève générale et autres manifestations, la Communauté Européenne suspend la coopération avec le Togo et fait

1 F. G. BAILEY, les règles du jeu politiques, Paris, PUF, 1971, p. 13.

2 Préambule de la Charte des Nations Unies.

3 La communauté internationale est en réalité arbitre et gardien du respect des valeurs démocratiques.

4 T. KPOBIE, Action internationale en faveur de la démocratie au Togo, mémoire de DEA, Université

de Lomé, Togo, 2012. p. 4.

5 Il s'agit des accords de Colmar signés le 12 juin 1990, https://letogolais.com/article.html?nid, consulté

le 23 décembre 2018.

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rapatrier plusieurs de ses fonctionnaires établis au Togo6. En 1998, l'Union Européenne dénonce les irrégularités de l'élection présidentielle qui sacre Gnassingbé Eyadema vainqueur au grand dam de l'opposition incarnée par Gilchrist Olympio. Dans son rapport intitulé « Le Règne de la terreur », Amnesty International dénonce des exécutions extrajudiciaires imputables au pouvoir de Lomé. A la mort d'Eyadema en 2005, l'armée en complicité avec le parlement érige Faure Gnassingbé, fils du Président défunt, à la tête du pays. La réaction une fois encore de la communauté internationale ne se fera pas attendre pour dénoncer ce qu'elle qualifie de « coup d'Etat constitutionnel ». Le 24 avril 2005, Faure Gnassingbé est élu à plus de 60,2 % des voix à l'issue d'un scrutin jugé « globalement satisfaisant » par la France et dénoncé par l'opposition togolaise. Dans la foulée des manifestations en contestation de cette élection, Amnesty International publie un rapport en juillet 2005 dénonçant « un scrutin entaché d'irrégularités et de graves violences » et reprochant les positions de la France de revêtir un caractère ambigu. Pour venir à bout de la crise née des faits sus-évoqués, la communauté internationale par le truchement du Président burkinabé Blaise Compaoré préside le dialogue inter-togolais qui débouche sur « l'accord politique global » le 26 août 20067. Aux législatives de 2007, la communauté internationale sera fortement représentée en vue d'authentifier ces élections qui étaient cruciales dans l'atmosphère délétère qui y régnait. Après un scrutin jugé unanimement, cette fois-ci, transparent par l'ensemble des observateurs présents, l'Union Européenne rétablit sa coopération avec le Togo, coopération suspendue en 1993 « en raison de l'incapacité de Lomé à mettre en oeuvre les réformes politiques souhaitées »8. Depuis ces épisodes jusqu'à la crise politique née le 19 août 2017, la communauté internationale s'est montrée au premier rang des évènements 9 ; en témoigne l'engagement de la CEDEAO par l'entremise des Présidents Alpha Condé et Nana Akoufo Ado, commis par l'organisation sous régionale pour la facilitation de ladite crise.

6 K. KOFFI, « Togo : les deux ruptures de la coopération (1993 et 1998) » in Afrique Contemporaine,

N° 189, 1er trimestre 1999, pp. 63-76.

7 Cet accord fixait les grandes lignes consensuellement adoptées pour une sortie définitive de la crise

notamment la mise en place d'un gouvernement d'union nationale devant organiser les élections législatives, ainsi que la réalisation des réformes constitutionnelles et institutionnelles.

8 L'Union Européenne reprend sa coopération avec le Togo, www.irinnews.org/fr/actualit%C3A9enne-

reprend-sa-cooperation-avec-le-togo, consulté le 30 décembre 2018.

9 Référence ici est faite aux différentes mesures d'accompagnement mis en place par le système des

Nations Unies, l'Allemagne et autres partenaires pour mettre en place les conditions optimales pour la tenue d'un scrutin transparent. Voir à cet effet François FARBEGAT, « Élection togolaises : falsification, rapport de forces et transition ? », https://blogs.mediapart.fr/François-farbegat/blog , consulté le 11 décembre 2018.

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1. Justification du choix du sujet

Près de trois décennies de démocratisation après, la communauté internationale est plus que jamais présente sur la scène politique togolaise, adoptant des positions qui font rarement l'unanimité10 et faisant d'elle, peu s'en faut, un acteur à part entière du jeu politique. Au regard de tout cela, mener une réflexion sur « la communauté internationale dans le jeu politique togolais » nous semble une entreprise scientifiquement pertinente dans le contexte actuel de la vie politique au Togo et pour la science politique.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon