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La réglementation des opérations de transport routier de marchandises dans l'espace UEMOA.


par Néni Cyrille Ardenne OUAHOU
Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest / Unité Universitaire d'Abidjan - Master 2 Recherche Droit Economique et des Affaires 2019
  

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Deuxième partie

LES INSUFFISANCES DES REGLES ENCADRANT LE TRANSPORT
ROUTIER DE MARCHANDISES DANS L'ESPACE UEMOA

L'encadrement des opérations de transport routier de marchandises dans la zone UEMOA n'est pas sans défaut. Cet encadrement garni en normes et en institutions révèle des carences tant au niveau de la prévention des dommages aux dommages (Chapitre I) qu'au niveau des modalités de réparation des dommages aux marchandises (Chapitre II) auxquelles il convient de chercher des solutions.

Chapitre I

Les carences du droit du transport routier de marchandises en matière de
prévention des dommages

Les carences en matière de prévention des dommages aux marchandises sont perceptibles dans l'analyse des normes ce qui permet de relever des carences d'ordre normatif (Section I). Elles sont aussi perceptibles dans l'analyse de la pratique du transport routier de marchandises ce qui permet de relever des carences d'ordre pratique (Section II).

Section I : Les carences d'ordre normatif

A l'analyse des normes en matière de transport routier de marchandises, on peut aisément déceler des lacunes qui font obstacle à leur efficacité. Ces lacunes sont d'abord l'inexistence d'organe de contrôle communautaire (Paragraphe I) et ensuite la sanction à l'issue du contrôle qui est inadaptée (Paragraphe II).

Paragraphe I : L'inexistence d'organe de contrôle communautaire

L'inexistence d'organe de contrôle communautaire fait apparaitre une nécessité de création ou d'existence d'un tel organe (A). Mais cette inexistence qui ne demeure pas moins lacunaire, peut être justifiée (B).

A- La nécessité d'organe de contrôle communautaire

La nécessité d'organe de contrôle communautaire en matière de transport routier de marchandises se fait plus ressentir en raison du fait que les organes communautaires existants n'ont pas de pouvoir de sanction (1). Plutôt que de se borner à constater cette lacune, on pourrait essayer de combler cette lacune d'où la perspective de création d'organes de contrôle communautaires (2).

1- L'absence de pouvoir de sanction des organes communautaires

Les organes communautaires en matière de transport n'ont pas de pouvoir de sanction dans leur domaine. Les comités nationaux et le comité régional de

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facilitation ainsi que les comités de gestion des corridors sont des organes consultatifs. Le contrôle documentaire ou physique ainsi que la sanction des manquements ne figurent pas au titre de leurs missions79. Il en est de même du Département de l'aménagement du territoire communautaire, des transports et du tourisme (DATC) de la commission de l'UEMOA qui a un rôle de supervision, d'orientation et de coordination des politiques sectorielles. Le contrôle des marchandises est purement étatique et il est confié aux seules forces nationales80.Cela pose un problème dans la mesure où la participation des organes communautaires est assez passive et indirecte. La part active relève d'autorités étatiques.

Une conséquence de cette passivité est la difficulté pour les organes communautaires à réaliser l'objectif de coordination des politiques81 en matière de transport routier quant au contrôle effectif de marchandises. Un contrôle physique ou documentaire par des organes communautaire permettrait une exécution harmonisée de ce contrôle et contribuerait à une effectivité des règles en la matière.

Une autre défaillance est qu'il n'existe aucun recours contre les forces de contrôle étatique auprès d'organes communautaires. Les transporteurs voulant exercer de tels recours devront saisir l'agent effectuant le contrôle d'un recours gracieux ou le supérieur hiérarchique d'un recours hiérarchique. Un contrôle ou un recours auprès d'organes communautaires donnerait l'opportunité aux organes communautaires en matière de transport d'orienter convenablement les forces de contrôle au niveau du contrôle. Cela assurera une application plus uniforme des règles communautaires de contrôle. Pour pallier cette absence de pouvoir de sanction des organes communautaires, il convient de créer des organes de contrôle communautaires d'où la perspective de création d'organes de contrôle communautaires.

2- La perspective de création d'organes de contrôle communautaires L'UEMOA devrait mettre en place un organe de contrôle communautaire. Un tel organe devrait fonctionner de façon indépendante vis-à-vis des Etats membres de l'UEMOA. Il devrait comprendre des fonctionnaires ou agents communautaires82 ayant un statut offrant des garanties d'indépendance à l'égard des Etats membres à l'instar des fonctionnaires des communautés européennes83. Ceux-ci doivent accomplir leurs missions dans l'intérêt de l'UEMOA sans

79 Article 8 de la Décision n° 39/2009/CM/UEMOA ; Article 2 de l'arrêté primatoral n° 4799 en date du 15 juin 2007 portant institution du Comité national de Facilitation des Transports et Transit routiers inter-Etats au Sénégal.

80 Article 2 de la décision n°15/2005/CM/UEMOA portant modalités pratiques d'application du plan régional de contrôle sur les axes routiers inter-états de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA).

81 Article 4.d du Traite modifie de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) de 2003.

82 L'article 1 du statut des fonctionnaires des communautés européennes définit le fonctionnaire communautaire comme « toute personne qui a été nommée » « dans un emploi permanent d'une des institutions des communautés par un acte de l'autorité investie du pouvoir de nomination de cette institution ».

83 N. MAGGI-GERMAIN, « Les fonctionnaires communautaires et l'intérêt général communautaire », 2005, p.6

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accepter ni solliciter d'instruction d'aucun Etat membre et cela en vue d'une impartialité dans l'exercice de leurs fonctions.

Les missions à attribuer à de tels fonctionnaires en matière de transport routier de marchandises consisteraient à effectuer un contrôle physique et documentaire de conformité par rapport aux règles communautaires de transport. Ceux-ci devraient bénéficier de pouvoir de sanction. Dans le cadre du règlement n°14/2005/CM/UEMOA, ils pourront ordonner le délestage des surcharges, la correction de gabarit, l'immobilisation de véhicule et le transbordement des chargements non conformes84. Quant à l'étendue, ils opéreraient leurs contrôles aux différents corridors85. Mais leurs contrôles devraient aussi s'opérer à l'intérieur des Etats membres.

L'existence d'un tel organe permettrait une participation active de l'UEMOA au contrôle de marchandises et une application directe des règles en la matière. L'UEMOA aurait en plus d'organe consultatifs chargés de faciliter le transport, un organe de contrôle opérant sur l'ensemble du territoire de façon concrète. Ainsi l'avantage majeure est que l'application rigoureuse des normes communautaires en la matière serait assurée par l'UEMOA. L'indépendance des fonctionnaires communautaires conduira à une application des normes communautaires par préférence aux législations nationales. Bien que la nécessité d'organe de contrôle communautaire se fasse ressentir, cette inexistence d'organe de contrôle communautaire a une justification.

B- Une justification de l'inexistence d'organe de contrôle communautaire L'inexistence d'organe de contrôle communautaire se justifie par la prise en compte de la participation des Etats membres en matière de transport routier de marchandises (1). Mais une solution intermédiaire (2) permettant de concilier la participation des Etats membres et celle d'organes communautaires.

1- La prise en compte de la participation des Etats membres en matière de transport routier de marchandises

L'inexistence d'organe de contrôle communautaire se justifie par la volonté de faire participer les Etats membres à l'application des normes en matière de transport routier de marchandises. En effet si le contrôle routier de marchandises est retiré aux forces nationales, tout l'aspect institutionnel du droit de transport routier de marchandises serait composé d'organes communautaires en plus de l'édiction des normes qui relève d'un organe communautaire86. Cela aurait pour conséquence de créer une situation semblable à un Etat fédéral alors que les Etats sont regroupés en communauté87.

84 Article 14.1 et 14.2 du règlement n°14/2005/CM/UEMOA.

85 Article 1 de la décision n°08/2001/CM/UEMOA portant adoption et modalités de financement d'un programme communautaire de construction de postes de contrôle juxtaposés aux frontières entre les Etats membres de l'UEMOA.

86 Le règlement n°14/2005/CM/UEMOA., les décisions et directives en la matière ont été édictés par le conseil des ministres.

87 L'UEMOA est une communauté économique régionale à l'instar de la Communauté Économique Européenne remplacée par l'UE.

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En effet « à la différence de ce qui se passe dans les Etats fédéraux où la fédération et les Etats membres exercent une certaine plénitude de compétences à l'intérieur des domaines qui leur sont respectivement attribués » « dans les communautés, il y a lieu à une répartition des fonctions entre des institutions communes et les Etats membres en ce qui concerne les différents secteurs attribués à la compétence communautaire »88. Dans le cadre d'un Etat fédéral, le secteur du transport serait attribué exclusivement à la fédération ou exclusivement aux Etats membres. Alors que dans le cadre de la communauté, les attributions en matière de transport sont reparties. C'est le cas de l'UEMOA, il est nécessaire qu'en matière de transport routier de marchandise, les compétences soient départagées entre les Etats membres et les organes communautaires. L'UEMOA a donc attribué le contrôle physique et documentaire accompagné du pouvoir de sanction aux forces nationales89.

Cette participation des Etats quant au contrôle routier de marchandises se justifie par le fait que le transport, même inter Etats de l'UEMOA, se fait sur des territoires nationaux. Il est donc nécessaire d'impliquer les forces nationales qui sont les plus habilitées à effectuer des contrôles routiers. Bien que la prise en compte de la participation des Etats membres en matière de transport routier de marchandises justifie l'inexistence d'organe de contrôle au niveau communautaire, il convient d'adopter une solution intermédiaire et conciliante.

2- Une solution intermédiaire

Confier le contrôle routier de marchandise à un organe communautaire reviendrait à écarter la participation des Etats membres. Le contrôle routier exclusivement attribué aux Etats membres a pour conséquence une inexistence d'organe de contrôle de sanction. Ces deux positions révélant des défaillances, une solution serait de les combiner afin de rendre le contrôle routier plus efficace. Ainsi le contrôle serait effectué à la fois par des fonctionnaires communautaires90, à la fois par des forces nationales de contrôle91 .

Le champ du contrôle routier effectué par chaque type de contrôleur pourrait être départagé. Ainsi les contrôles routiers pour tout transport à l'intérieur d'un Etat membre relèveraient des forces nationales et ceux dont les itinéraires impliqueraient plusieurs Etats membres relèveraient des fonctionnaires communautaires agissant dans un intérêt communautaire. Une autre formule serait de confier tous les contrôles à l'intérieur d'un Etat membre aux forces nationales de contrôle et confier à des fonctionnaires communautaires les contrôles aux frontières. Une troisième formule serait de maintenir le contrôle routier au plan national par les forces nationales de contrôle et de combiner le contrôle de marchandises par les forces nationales et celui par des fonctionnaires communautaires aux frontières.

88 Voir Pierre Pescatore, Distribution de competencias y de poderes entre Estados mienbros y las Comunidades europas, Derecho de la Integracion, 1967, n°1, pp. 108-182 (p.2 et s. de la version française ronéotée)

89 Article 4 de la directive n°08/20005/CM/UEMOA.

90 Article 1 du statut des fonctionnaires des communautés européennes.

91 Article 4 de la directive n°08/20005/CM/UEMOA.

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En plus d'une efficacité infaillible, la dualité de contrôle permettra à l'UEMOA, à travers l'organe en charge du contrôle, d'avoir une part active à l'application des normes en matière de transport routier de marchandises plutôt que de se cantonner à une simple supervision ou à la construction d'infrastructures routières. Elle permettra, en parallèle, aux Etats d'apprécier la conformité aux règles communautaires de transport routier de marchandises. Tous les deux concourront de façon active au respect des normes communautaires de transport routier de marchandises. A côté du problème de l'inexistence d'organe de contrôle communautaire, il convient de résoudre le problème de l'inadaptation de la sanction à l'issue du contrôle routier.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand