De la qualification et de la répression de l'infraction d'adultère en droit congolais.par Alain TSHINYAMA KAJINA Université de Lubumbashi - Licence en droit privé et judiciaire 2017 |
SECTION 2 : CONSIDERATION DE L'ADULTERE§1 DE L'ADULTERE EN DROIT COUTUMIERAvant tout, ANTOINE SOHIER, définit le Droit coutumier comme « un droit de l'incrimination, du châtiment et de la réparation; il est à la fois le Droit sacré et de l'indivisible »29(*) Ainsi, la protection de la foi conjugale par l'incrimination de l'adultère remontedans le temps les plus anciens ; elle est aussi ancienne que toute organisation sociale et constitue l'une des plus vielles coutumes de l'espèce humaine. Dans nos sociétés traditionnelles, l'adultère constituait une offense au lien conjugal mais aussi à une atteinte grave à l'honneur et à la cohésion de toute la famille, il était considéré comme un crime le plus grave à tout le clan. A part quelques rares coutumes ;tout adultère qui était commis avec la femme du chef était toujours regardé comme une circonstance aggravante, c'est comme chez les bayombe, bambala, baluba etc... chez les bayombe, les tètes des personnes convaincues d'adultère étaient plantées sur des poteaux à l'entrée du village. La coutume luba elle, autorise que quiconque surpris en flagrant délit d'adultère soit percé de lance. Dans les unions polygamiques, les relations charnelles entre le mari et l'une de ses épouses n'étaient pas infractionnelles. Certaines coutumes pratiquant la coutume de purification notamment chez les bayombe imposaient à un mari lors de certains évènements d'avoir impunément des relations extraconjugales avec une femme d'autrui »30(*) Pour les Nkundo, l'adultère est une relation illicite entre un homme et une femme dont l'un ou l'autre est engagé dans le lien du mariage. Le mariage nkundo est une union théoriquement définitive entre un homme et une femme en vue de l'activité procréatrice. Dans la définition, le mot illicite ne constitue pas un pléonasme. Certains actes sexuels complets avec une personne mariée ne sont pas qualifiés d'adultère par les nkundo. Le mari peut céder son droit ou permettre des relations passagères ».31(*) L'adultère est communément appelé tshibindi au Kasaï ; Il constitue la honte et le déshonneur sublime et ses conséquences sont incommensurables et incalculables. §2 DE L'ADULTERE EN DROIT ECRITAvant de définir l'adultère, nous envisageons à titre liminaire préciser un point très rarement abordé ; il s'agit de la différence entre l'infidélité et l'adultère. Selon le résultat de nos recherches, L'infidélité s'apparente plus à une injure pour l'autre époux, elle constitue un manquement à la foi et à la dignité du mariage même en l'absence de relation sexuelle. Il en résulte qu'un conjoint qui ne pourrait établir l'adultère de l'autre époux peut se contenter d'invoquer les relations outrageantes de cet époux avec des tiers. JEAN CARBONNIER « qualifie la conduite injurieuse d'un époux qui n'a pas été jusqu'à la réalisation des relations sexuelles avec un tiers de « petit adultère » ; on pourrait aussi parler d'adultère virtuel dans une espèce où l'un des époux trompait l'autre assidument sur l'internet »32(*) « Ainsi, il a été jugé que s'il ne s'agit pas au sens propre d'un adultère, les relations suivies de la femme avec un tiers ont un caractère injurieux pour le mari et violent le devoir de fidélité qui subsiste jusqu'à la dissolution du mariage »33(*) Pour ce qui est de l'adultère; contrairement à l'infidélité MALAURIE P. et AYNES L. estiment « qu'il est une violation du devoir de fidélité tenant à des rapports sexuels avec un tiers »34(*) A partir de la différence évoquée ci-haut, nous estimons que l'infidélité c'est le fait de tromper son partenaire d'une manière générale, même sans relation sexuelle tandis que l'adultère c'est le fait de tromper son mari ou sa femme; cette notion est liée au mariage. A ces deux notions, nous pouvons aussi évoquer de l'extraconjugale qui est le faitd'avoir une situation dans laquelle deux partenaires sont d'accord pour avoir des relations sexuelles avec d'autres personnes, cette pratique est devenue courante estime ANTHONY BEM. La dernière notion voisine de notre sujet, est l'union libre. DESCHENAUX estime qu' « on parle de l'union libre lorsqu'un homme et une femme vivent maritalement sans être unis par le lien du mariage et ils font une communauté de lit, de table et de toit »35(*) L'union libre se distingue du mariage par le fait que le mariage implique une vie totale et que le mariage a été célébré suivant les formes prescrites par la loi et dans le respect des conditions imposées par elle. Généralement, les gens utilisent le terme union libre pour présenter le phénomène d'union en dehors du mariage présentant une certaine stabilité. Une union libre est plus intellectuelle car elle met l'accent sur l'élément intellectuel de vouloir vivre ensemble sans toutefois passer dans les procédures de Droit. Elle n'est soumise à aucune formalité et est surtout susceptible d'être librement rompu ».36(*) Pour comprendre la notion de l'adultère, on doit procéder à le définir : Ainsi en Droit congolais, l'adultère est prévu et réprimé par deux textes à savoir : le décret du 25 juin 1948 relatif à la répression de l'adultère et de la bigamie en cas de mariage civil ou assimilé ; et le décret du 5 juillet 1948 relatif au mariage coutumier monogamique indigène et ses mesures d'exécution ; mais c'est surtout par le code de la famille de 1987 tel que modifié à ce jour. L'adultère n'étant pas défini par la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant le code de la famille de 1987 ; c'est l'article 1er du décret du 25 juin 1948 relatif à la répression de l'adultère et de la bigamie en cas de mariage civil ou assimilé qui définit l'adultère comme étant « l'union sexuelle d'une personne mariée selon les règles du Droit écrit et dont le mariage n'est pas encore dissout avec une autre personne que son conjoint »37(*) Pour LIKULIA BOLONGO, « l'adultère est une violation de la foi conjugale commise par une personne mariée qui a des relations intimes ou sexuelles avec une autre personne que son conjoint »38(*) L'adultère peut également être compris comme « une violation de la foi conjugale commise par une personne mariée qui a des relations intimes ou sexuelles avec une autre personne que son conjoint »39(*) Au regard de toutes ces définitions, nous définissons à notre tour l'adultère comme étant le fait pour une personne mariée d'avoir des relations sexuelles avec une personne qui n'est pas son conjoint. L'existence de l'adultère nécessite : un mariage non dissout, une consommation de l'acte sexuel, et cet acte doit se passer avec une autre personne que son partenaire. Voilà les trois éléments clés de l'adultère que nous allons voir dans la suite de ce travail. * 29 SOHIER A. La dot en Droit coutumier congolais, éd.de la revue juridique du Congo belge, Bruxelles, 1936, P.36 * 30 LIKULIA B. Op cit, P.276 * 31 HULSTAERT G. Les sanctions coutumières contre l'adultère, éd B.J.IDC ; Bruxelles, 1936, P.229 * 32 CARBONNIER J. Droit civil, la famille : l'enfant, le couple, 20eme édition, refondue, éd PUF, Paris,1999 P.53 * 33 Cour d'appel de Lyon, arrêt du 12 décembre 2000, inédit * 34 MALAURIE P. et AYNES L. Droit civil, la famille, 2eme édition, éd. Cujas, Paris, 1989, P.199 * 35 DESCHENAUX H. Le mariage et le divorce, iribourg, éd staerfli et Cie, saberne, 1974, P.145 * 36 BENABENT A. Droit civil : la famille, 6e édition, éd. Litec, Paris, 1994, P.25 * 37 Article 1er du Décret du 25 juin 1948 relatif à la répression de l'adultère et de la bigamie en cas de mariage de Droit civil ou assimilé * 38 LIKULIA B. Op cit, P.278 * 39 MALAURIE P. Op cit, P. 199 |
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