B- Hétérogénéité de
l'économie Informelle
L'une des raisons de la complexité de l'économie
informelle est le foisonnement en son sein d'une multitude d'activités
allant du légal à l'illégal. Au sujet des villes
africaines, Ph. HUGON (1982) disait que la réalité
immédiatement perceptible par le photographe est celle des myriades de
petits métiers se trouvant au centre, tout comme à la
périphérie des villes. L'économie informelle, c'est le
domaine des activités multiformes et désordonnées (KINDA
1995 : 141). On y rencontre des artisans, de petits commerçants, de
petits transporteurs et les prestataires de services tels que les cireurs de
chaussure, les guides, les gardiens de voitures, etc...
Face au foisonnement anarchique des activités de
l'économie informelle, certains chercheurs ont tenté
théoriquement d'y mettre un semblant d'ordre en les classifiant.
Catherine COQUERY-VIDROVITCH (1991 : 184) distingue au sein du
secteur informel `' la petite production'' dans laquelle les moyens de
production sont faibles et fait d'outillage ancien, rudimentaire et
rafistolé. La main d'oeuvre est parfois familiale, gratuite ou mal
payée et la `'petite production capitaliste qui se réalise
lorsqu'un minimum de capital est accumulé. Ce stade de l'informel est
orienté exclusivement vers le marché.
Dijk VAN (1986), quant à lui scinde l'économie
informelle en deux parties : l'une étant moins développée
que l'autre. La partie la moins développée comprend les
entreprises à une personne utilisant une technologie dont le niveau est
le plus souvent très bas. La partie plus développée
regorge les entreprises à outils, le plus souvent, très
couteux.
Enfin, le Guide pratique de secteur informel au Burkina
Faso (Août 2004 :
6) distingue sept (07) grands domaines d'activités du
secteur informel :
- les activités de production regroupant les
travailleurs ayant pour tâche principale la transformation des
matières premières ou des produits semi-finis en produits de
consommations intermédiaires ou finales.
8
- les activités d'art
désignant la calligraphie, la peinture, la sculpture, la teinture, ...
etc.
- le petit transport désignant les propriétaires
de charrettes à traction humaines ou animale destinées au
ramassage du sable, du bois et d'autres marchandises.
- le petit commerce qui constitue le commerce de
micro-détails dont les acteurs sont soit ambulants ou installés
(boutique, étals, ... etc.)
- les activités de restauration qui concernent le commerce
des aliments de la rue (restaurants populaire).
C- Relation entre Etat et économie informelle
Selon Bruno LAUTIER (1994 : 99), « le rapport à
l'Etat est à la base de la définition même de
l'économie informelle puisque la forme absente est celle que l'Etat est
censé imposer. »11
Le problème qui se pose ici est l'absence de cette
imposition de la forme que ce soit au niveau de l'organisation interne des
activités économiques (respect du droit du travail,
comptabilité normalisée), de la visibilité de ces
activités (inscription dans les divers registres) ou de leur
contribution aux dépenses socialisées (impôts, taxes et
cotisations sociales).
En fait, trois courants d'auteurs accusent l'Etat d'être
directement ou indirectement responsable de la prolifération des
activités de l'économie informel.
Pour les premiers, l'informalisation de l'économie est
consécutive à une incapacité enregistrée dans la
couverture du contrôle par l'Etat (CHARMES 1991, LAUTIER 1994 : 100).
Cette situation est observable la plupart des cas dans les pays ayant
accédé récemment à leurs indépendances
où l'administration manque énormément de ressources
humaine en nombre et en qualité.
Le second groupe de chercheurs d'obédience
libérale, pensent surtout que l'excès d'intervention de l'Etat en
matière de fiscalité et réglementation bureaucratique est
à la base de la déviance de certains acteurs, des normes
formelles de l'économie (LAUTIER 1994 : 102).
11 LAUTIER Bruno : 1994, l'Economie informelle dans le
Tiers-Monde, Editions La Découverte, collection, Repères, Paris,
125 pages.
9
La dernière vague de chercheurs
soutient que la non-couverture des activités de l'économie
informelle n'est pas due à une faille, mais à une
tolérance de l'Etat pour des raisons beaucoup plus politiques et
sociales qu'économiques (LAUTIER 1994 : 100).
|