6.1) Dette extérieure et
croissance économique
Il existe de nombreux travaux sur la relation
liant dette extérieure et croissance économique, parmi lesquels
on peut citer la théorie du surendettement. Il y a surendettement
lorsque l'encours de la dette extérieure d'un pays dépasse sa
capacité de remboursement avec une certaine probabilité future,
de sorte que le service de la dette attendu dépend de plus en plus du
niveau de production du pays (Atangana Ondoa, 2017). Cela signifie qu'une
partie du rendement des investissements est utilisée pour le service de
la dette(Fonchamnyo, 2009). Ainsi, on estime que l'annulation de la dette
extérieure encouragera la croissance économique et
l'investissement (Rajan et Subramanian, 2008). Le service de la dette est donc
considéré comme une taxe implicite, ce qui décourage
l'investissement et étouffe la croissance économique -(Sachs et
Williamson, 1985 ; Krugman, 1988 ; Grossman et Helpman, 1989 ;
-Borensztein, 1990).
Le fardeau de la dette extérieure est la
préoccupation de l'école de pensée seuil qui met l'accent
sur la relation non linéaire entre dette et croissance (Calvo, 1998b).
Il établit un lien entre la dette ; la croissance et le
problème de la fuite des capitaux, où la croissance diminue
lorsque le niveau d'endettement est élevé -(Saheed, Sani et
Idakwoji, 2015). En ce sens, que la baisse de la croissance est due à
l'augmentation de la charge fiscale distorsive sur le capital nécessaire
pour assurer le service de la dette. Fait, conduisant à un taux de
rendement du capital plus faible, des investissements plus faibles et une
croissance plus faible. Ainsi, les régimes à faibleendettement
ont un taux de croissance plus élevé et un niveau d'endettement
moins élevé ; le lien de croissance considère la
dette extérieure comme un afflux de capitaux ayant un effet positif sur
l'épargne et l'investissement intérieurs et donc sur la
croissance qui conduit à la réduction de la pauvreté par
un ciblage approprié de l'épargne et des investissements
intérieurs (Calvo, 1998a ; Calvo, 1998b ; Calvo et Reinhart, 2002).
Un des points qui suscitent le plus de débat,
concernant l'impact de la dette extérieure sur la croissance
économique est l'épargne intérieure. A cet effet, une
première approche consiste à concevoir, que l'endettement
extérieur permet de réaliser les investissements que
l'épargne intérieure ne peut financer (Oliveira Martins et
Plihon, 1990). Hors, le recours à l'épargne intérieure
aurait tendance à fléchir, en ce sens que l'effet sur la
croissance serait nul et les influences à long terme négatives,
puisque les comportements d'épargne auraient été
affecté de façon défavorables -(Griffin et Enos, 1970). A
contrario, Sachs et Williamson (1985) ; -Deshpande (1997) ; -Krugman
(1988) ; Grossman et Helpman (1989) affirment qu'au-delà d'un
certain point, un niveau élevé de dette extérieure agit
comme une taxe marginale sur l'investissement, réduisant ainsi le taux
de rendement anticipé du capital après taxe.
Un autre aspect par lequel la dette
extérieure est susceptible d'influencer la croissance économique
dans un pays, est les contraintes de liquidité. En ce sens que, les
contraintes de liquidité résultant des paiements du service de la
dette peuvent également affecter la croissance, car les paiements du
service de la dette peuvent évincer l'investissement et entraîner
des hausses des taux d'imposition et d'intérêt (Cohen, 1995 ;
Fosu, 1996 ; Pattillo et al, 2011). En outre, les paiements au titre du service
de la dette réduisent les montants disponibles pour le
développement de l'infrastructure, la formation de capital humain et les
importations qui sont essentiels pour la production, ce qui réduit
encore la croissance (Aizenman et Lee, 2007 ; Soydan et Bedir, 2015). Pour les
pays à faible revenu, les paiements au titre du service de la dette
peuvent avoir des effets négatifs sur la capacité des
gouvernements à financer des programmes de dépenses sociales
(santé, éducation et programmes sociaux) tandis que pour les pays
qui dépendent des minéraux et des produits agricoles, le service
de la dette peut entraîner un taux croissant d'épuisement des
ressources naturelles (Ebi, Abu et Clemant, 2003).
Un autre élément fondamental
lorsqu'on veut analyser l'influence de la dette extérieure sur la
croissance économique concerne l'incertitude du régime politique.
L'incertitude quant aux politiques et aux perspectives peut décourager
les entrées de capitaux tout en favorisant la fuite des capitaux et
affecter négativement la production (Allesina et Tabellini, 1989). En
outre, Soydan et Bedir (2015) soutiennent que l'incertitude fausse les choix
d'investissement, ce qui conduit à une mauvaise répartition et au
retrait des investissements. Dans un environnement incertain, les
décisions d'investissement sont susceptibles d'être à court
terme et à faible risque. Cette mauvaise répartition se traduit
par une baisse de l'efficacité et de la productivité globales du
capital, ce qui entraîne un ralentissement de la croissance (Serven et
Solimano, 1993).
Des études empiriques ont
été menées pour déterminer la pertinence de la
dette extérieure comme facteur explicatif de la croissance
économique. Utilisant des données annuelles sur un panel de 17
pays à revenu intermédiaire sur une période de 1980-2011
avec le GMM comme modelé d'estimation, Pattillo, Poirson et Ricci (2002)
parviennent à la conclusion selon laquelle la dette extérieure
est efficace sur la croissance économique jusqu'à un seuil
évalué à 40% du PIB. Un résultat similaire avait
déjà été obtenu par Nguyen, Clements et
Bhattacharya (2003) lorsqu'ils analysaient l'impact de la dette
extérieure sur la croissance de 55 pays à faible revenu sur une
période de 1970 à 1999. Utilisant un modèle GMM, ils
parviennent au résultat selon lequel le surplomb de la dette est compris
entre 30 à 37% du PIB et 115 à 120% de l'exportation
au-delà de ce seuil, la dette extérieure constitue un frein pour
la croissance économique ; par contre une augmentation de 1 point
de l'investissement public agit en sorte pour accroître le PIB de 0,2
point. A partir d'un modèle à effets fixes sur un panel constitue
de 92 pays à faible revenu sur la période 1990-2007, -Panizza et
Presbitero (2014) révèlent que l'impact économique d'une
augmentation de niveau de la dette au-delà de 30% de PIB, entraine une
réduction de croissance de l'ordre de 1,6%. Résultat, obtenu en
utilisant un modelé GMM sur 20 économies avancées sur la
période 1946-2009. C'est toujours en ce sens que, Cecchetti, Mohanty et
Zampolli (2011) qui à partir d'un modèle en coupe transversale
sur un panel de 18 pays de OCDE, ont montré sur une période de
1980-2005, que si la dette extérieure n'est pas très
élevée, elle encourage la croissance économique et
stabilise le secteur financier mais au-delà d'un certain seuil,
l'augmentation de la dette privée peut avoir des impacts
négatifs.
Sans parvenir à mettre en évidence
une influence positive de la dette extérieure sur la croissance
économique, Eichengreen et Portes (1985) révèlent qu'un
endettement excessif et le défaut de paiement tendent à
réduire le taux de croissance réelle et la
crédibilité de l'Etat. Ce résultat est obtenu, en
utilisant un GMM sur un panel de 30 pays en voie de développement sur
une période allant de 1923 à 1930. Ce résultat est
similaire à celui de Cunningham (1993), qui a étudié la
relation entre le fardeau de la dette extérieure et la croissance
économique de 16 pays pour la période 1971-2007. Il montre que la
croissance du fardeau de la dette d'un pays a un effet négatif sur la
croissance économique. Ainsi, lorsqu'un pays est important pour les
étrangers, cela affecte négativementà la fois la
productivité du travail et du capital.Utilisant l'estimateur GMM, -Kumar
et Woo (2010) ont cherché à déterminer l'effet de la dette
extérieure sur la croissance économique. Leurs résultats
suggèrent, qu'une augmentation de 10 points du niveau de dette initiale
sera associée à un ralentissement de la croissance en terme
réel de 0,26% par an. Ce résultat est obtenu sur un panel de 38
pays en voie de développement sur une période allant de
1970-2007.
|