b) La neutralité de la dette
extérieure et la croissance économique :
« l'équivalence ricardienne »
La Proposition d'Equivalence de Ricardo soutient
la thèse d'un effet neutre de l'endettement public sur les
agrégats macroéconomiques. En ce sens qu'un titre d'État
représente pour son détenteur certes, un avoir (un actif) mais
constitue pour le contribuable une créance (un passif). Ainsi, en
rendant son détenteur plus riche, tout titre d'État rend
simultanément le contribuable plus pauvre (Barro, 1974). En
conséquence, l'effet net de la détention de ce titre sur la
richesse est neutre puisque globalement les contribuables ne sont ni plus
riches ni plus pauvres.
La paternité du principe
d'équivalence Ricardienne, comme son nom l'indique, revient à
Ricardo mais est attribué à Barro (1974). Il approfondit la
thèse de Ricardo en combinant les thèmes d'évictions et
d'anticipations rationnelles. Selon lui, si le gouvernement finance un
accroissement des dépenses publiques en ayant recours à
l'emprunt, ou s'il abaisse les impôts en laissant la dépense
publique et la masse monétaire inchangées, les agents vont
anticiper les hausses d'impôts qui seront nécessaires
ultérieurement pour payer les intérêts de la dette et pour
rembourser le principal. De ce fait, les agents savent a priori que ces deux
modalités de financement sont un recours aux impôts; ils savent
aussi qu'il y aura alourdissement de la dette publique et usage de la taxe
inflationniste. L'accumulation de l'inflation à long terme et
l'augmentation des impôts finiront par rendre peu crédible
l'État. Les agents vont alors se préparer à la purge
fiscale future (Bernheim, 1987 ; Ricciuti, 2003). Ils vont accroître
leur épargne actuelle en prévision des alourdissements futurs des
impôts et ne se considéreront pas plus riches après la mise
en oeuvre de la politique de relance. Il en résultera que cette
politique suivie par le gouvernement n'aura aucun effet stimulant sur
l'économie, quelles que soient les modalités de financement des
déficits; les effets à long terme sont équivalents.
Cette proposition générale
défend donc l'idée de la neutralité de la dette publique
à long terme. L'idée de la neutralité de l'endettement
public peut paraître assez simple et plutôt intuitive : En effet,
étant donné que toute réduction des impôts courants
(ou encore un déficit budgétaire) implique forcément une
augmentation des impôts futurs, le financement de cette réduction
d'impôt par endettement, ne modifie pas la charge fiscale globale des
ménages. Elle ne fait que différer dans le temps une partie de
cette charge. Ainsi, si les ménages sont en mesure d'intégrer ce
report partiel de leur charge d'imposition de manière efficiente, ils
percevront l'endettement public courant, comme un prélèvement
fiscal futur.
Par ailleurs, et puisque leur charge
d'imposition globale n'a pas été modifiée, les
ménages ne réagissent pas à la politique du déficit
budgétaire financé par endettement public, par un accroissement
de leurs dépenses de consommation. Les ménages
préfèrent épargner la totalité de leur
économie d'impôt pour faire face aux prélèvements
fiscaux futurs engendrés par le remboursement de la dette. Par
conséquence, la diminution de l'épargne publique est
intégralement compensée par une augmentation de l'épargne
privée. L'épargne nationale étant inchangée, les
autres agrégats macroéconomiques le restent aussi.
En définitive, l'essence de
l'argumentation de l'équivalence ricardienne se résume dans les
deux idées fondamentales de la contrainte budgétaire inter
temporelle du gouvernement et de l'hypothèse du revenu permanent
(Elmendorf et Mankiw, 1998 ; Ricciuti, 2003). La contrainte
budgétaire intertemporelle du gouvernement suppose que pour des
dépenses gouvernementales inchangées, un niveau d'imposition
courant relativement bas implique des impôts futurs plus
élevés. En effet, la perception de la part des contribuables de
toute réduction de leur charge d'imposition courante comme étant
un report partiel de cette charge en découle. Par contre,
L'hypothèse du revenu permanent suppose que les ménages
déterminent leur niveau de consommation sur la base de leur revenu
permanent et non pas sur la base de leur revenu courant. Le revenu permanent
est fonction de la valeur actualisée de tous les revenus courants nets
d'impôt. Ainsi, étant donné qu'elle n'affecte pas la valeur
actualisée de la charge fiscale des ménages, une réduction
d'impôt financée par endettement n'a d'incidence ni sur le revenu
permanent ni sur la consommation courante.
Par ailleurs la revue des considérations
théoriques anciennes sur l'endettement, dans un second temps, montre une
grande diversité d'opinion sur les effets de l'endettement et sur son
intérêt de façon générale. Deux grandes
écoles traditionnelles ont dominé ce débat à un
certain moment. Il s'agit de l'école classique avec une vision
assimilant l'endettement à un impôt futur (anticipé par les
agents économiques) et des keynésiens qui voient l'endettement
comme favorisant l'accumulation du capital et la consommation des
générations futures ou présentes Par la suite,
l'idée de la neutralité de la dette publique à long terme,
a été largement étudiée à travers le
principe d'équivalence ricardienne.
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