II- LE TRAITEMENT A DOMICILE DU PALUDISME PAR LES
MENAGES
Les résultats contenus dans cette partie sont ceux
obtenus au moyen d'un questionnaire placé au près des
ménages à Babadjou et des consultations des registres de soins
des différents établissements de santé. Les questions
portent sur l'usage des mesures préventives, les recours
thérapeutiques et les motifs pour le non recours aux centres de
santé.
1- Le faible usage des mesures préventives
Source : enquête de terrain, décembre
2008
Figure 23: Usage des modes de prévention
contre le paludisme par les ménages à Babadjou
100
On peut lire de cette figure 23 que la prévention du
paludisme est très faible à Babadjou car 62% des ménages
enquêtés n'utilisent aucun mode de prévention, 20% font
recours aux médicaments traditionnels. Il s'agit en fait des
décoctions à base de plantes qui sont utilisées lorsque
l'on ressent une élévation de la température du corps et
une fatigue générale. Il faut noter ici que les personnes qui
utilisent ce mode ne sont en fait pas conscientes que ce soit une
prévention. Pour le reste 10% utilisent les moustiquaires, 5% et 3%
procèdent à l'usage des médicaments pharmaceutiques et aux
insecticides respectivement. Dans cette catégorie, on retrouve des
retraités et des jeunes gens qui ont vécu en ville, pour qui
l'usage de l'insecticide relève d'un effet de mode.
Cependant, ces moyens de prévention ne sont pas
efficaces. Par exemple les moustiquaires ne sont pas ré
imprégnés tous les 6 mois, les insecticides utilisés ne
sont pas efficaces surtout qu'ils ne sont pas pulvérisés tous les
jours.
2-Des recours thérapeutiques variés
Face au faible pouvoir d'achat des ménages, à
Babadjou on observe qu'en cas de paludisme ou de toute autre forme de maladie,
les ménages suivent plusieurs itinéraires thérapeutiques
résumés dans le tableau 25.
Tableau 27 : Itinéraires thérapeutiques
des malades de paludisme à Babadjou
Lieux de soins
|
Effectifs
|
Pourcentages (%)
|
Maison
|
34
|
19
|
Guérisseurs
|
38
|
21
|
Hôpitaux
|
40
|
22
|
Pharmacie de rue
|
68
|
38
|
Total
|
180
|
100
|
|
Source : Enquête de terrain décembre,
2008
On peut lire sur ce tableau 25 que les itinéraires
thérapeutiques des malades de paludisme à Babadjou sont nombreux
et varié :
- L'automédication est l'option thérapeutique
la plus pratiquée par les populations. Dès l'apparition des
premiers signes de la maladie, on se renseigne d'abord chez le voisin sur le
dernier médicament qu'il avait pris lorsqu'il souffrait. Il s'agit des
médicaments traditionnels (décoction à base de feuille de
papayer ou écorces, de goyavier, d'eucalyptus, de
101
citronnelle) ou modernes (constitué du
paracétamol, de la quinine 300 et vermos s'il s'agit d'un enfant) qui
permettent d'acquérir les premiers soins à la maison. L'usage de
cette stratégie concerne 19% des ménages que nous avons
enquêtés ;
- Lorsqu'ils ne sont pas satisfaits, 21% vont chez le
guérisseur pour qui la maladie a toujours une cause surnaturelle. Une
fois chez le guérisseur pour diagnostiquer le mal, il faut donner du sel
et 200 fcfa s'il s'agit d'une femme ou bien 500 fcfa si c'est un homme. Pour le
traitement du patient, ce dernier demande généralement une somme
comprise entre 2000 fcfa et 5000 fcfa, une assiette, deux poules, des pagnes,
des bougies, du parfum, environ deux litres d'huile de palme comme prix
à payer ;
- Si la maladie persiste, 38% se rendent à la
«pharmacie de rue» où le vendeur examine et
diagnostique le mal à sa manière et surtout prescrit le
médicament en fonction de ce dont il dispose. Lorsque la solution n'est
pas toujours trouvée, c'est en ce moment qu'on se rend dans un centre de
santé. Ici encore, le malade a le choix entre un centre
public ou privé « 16,45% des malades vont dans les centres
publics et 8,8% dans les centres privés »15 Ce qui est
généralement à l'origine de nombreux décès.
Ainsi, le CMA a enregistré 14 et 17 cas de décès des
suites de paludisme respectivement en 2007 et 2008. Ce faible nombre de
décès enregistré dans cette formation sanitaire est
certainement dû au fait que la plupart des personnes
décèdent même sans être arrivées à
l'hôpital. Comme nous l'avons dit plus haut, il s'est avéré
très difficile de connaître le nombre de décès
enregistrés dans les ménages, ceci à cause de la
perception que cette population a de la maladie. En général
lorsque le patient arrive à l'hôpital après avoir
tenté sans succès l'usage de plusieurs formes de traitement, sa
situation devient critique. Dès lors pour diagnostiquer le mal, on est
obligé de lui faire subir plusieurs examens. Ainsi, très souvent,
les différents tests concernent le test de la typhoïde, les selles,
les urines et la goutte épaisse. C'est ainsi, qu'après avoir
interrogé les populations sur le coût des soins contre le
paludisme dans un centre de santé, il ressort que les dépenses
moyennes se situent entre 30 000 FCFA et 40 000 FCFA.
Malgré cette diversification des itinéraires
thérapeutiques, les populations ne trouvent pas toujours de solution,
attestent, 68% des personnes enquêtées. La diversité des
itinéraires thérapeutiques pourrait entraîner une
résistance de la maladie à cause de l'usage des méthodes
inappropriées. Plusieurs motifs expliquent le non recours en premier
lieu aux hôpitaux en cas de maladie.
15 YEMELONG TEMGOUA (2007)
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