La participation politique dans les bidonvilles. Les cas de Newton-aéroport et de New-bell Douala.( Télécharger le fichier original )par Raouto Crazzilli NANTCHA Université de Douala - MASTER II- DEA Sociologie 2015 |
1.2. LA REVUE CRITIQUE DE LA LITTERATURELa revue critique de la littérature joue un grand rôle dans la conception d'une recherche, car elle permet de faire l'économie de ce qui a déjà été dit sur la question, de ne pas refaire ce que les autres ont déjà fait, afin d'avoir son originalité et de préparer son cadre théorique9(*). Ainsi, nous avons axé la notre autour de : participation politique, bidonvilles et participation politique dans les bidonvilles. 1-2-1- travaux relatifs à la participation politiqueAvant de parler de la participation politique dans les bidonvilles, il est important de faire l'économie des travaux des uns et des autres sur la participation politique elle-même, en passant par le comportement politique et l'espace public. B. Flasher 10(*)(2012) dans ses travaux sur le sujet, nous rappelait d'abord le fait que l'idéal démocratique était ou est l'implication du peuple qui peut se faire à travers de nombreuses activités et aux travers de divers groupes ou associations ; rendant ainsi le citoyen actif et non plus passif. Il met également l'accent sur le fait que la participation pour qu'elle soit effective, certaines conditions doivent être remplies. Pour lui, la participation politique a ceci d'important qu'elle permet de responsabiliser politiquement le citoyen et le met en contact avec les hommes politiques pour la résolution des problèmes d'intérêt collectif il soulignait également qu'on avait comme dimension la participation conventionnelle et la participation non conventionnelle. Il n'évoquait déjà que le champ de la participation politique s'analysait à trois nivaux, géographique, économique et social, administratif. Flasher ressort déjà ici le fait que la participation politique pour quelle soit effective, doit être sous-tendue par certaines conditions à savoir : un sentiment d'appartenance, un sentiment d'être pris en compte, une indépendance matérielle, une inclusion de toutes les composantes, catégories sociales, une recherche d'intérêt général et la prise en compte de toutes les dimensions de la citoyenneté. A la question du pourquoi d'une faible participation des citoyens, il essaie de faire le rapprochement avec la démocratie représentative en faisant remarquer que celle-ci a ses limites dans le sens ou selon la problématique d'Hirschman(1991) qui s'appuie sur trois thèses : celle de l'inanité, des effets pervers et le vecteur du sentiment d'égalitarisme qui contribue en la mise en péril des libertés individuelles et du progrès économique tout cecis'expliquant par le fait qu'intrinsèquement, la représentation dans son mécanisme crée un décalage entre la volonté du peuple et les délibérations de ses représentants. De plus, elle remet au devant de la scène la volonté ancienne de tenir le pouvoir éloigné de la pression populaire ; comme le soulignait déjà Hamilton11(*) (1757-1804): «Toute communauté se repartit entre l'élite et la multitude, entre les gens riches et bien nées, et la masse du peuple... turbulent, et inconscient, le peuple juge rarement avec raison. Donner donc dans le gouvernement une place distincte et permanente à cette première classe... » Comme pour dire qu'il y a toujours cette intention permanente de discriminer ou de distinguer relativement à la position sociale ceux qui peuvent être impliqués dans la gestion de la cité. Flasher(2012) postule que pour une effectivité de la participation politique, il faut que le concept de la citoyenneté (juridiquement renvoie à la jouissance des droits civiques attachés à la nationalité. Aujourd'hui, c'est le droit de vote aux consultations politiques, l'éligibilité, l'exercice des libertés publiques qui donne sens à la participation politique, enfin, l'accès aux fonctions d'autorité dans l'appareil de l'Etat.)12(*),soit rempli dans tous les sens afin qu'il n'yait pas une certaine exclusion. Ainsi, que cela passerait par la construction d'un espace public qui est un lieu abstrait où un ensemble d'interlocuteurs exercent sur les affaires collectives leur « raison pratique ».Raison conduisant les individus à se concevoir membres d'une communauté politique et subsumant ainsi les particularismes. Habermas (1929)soutient cela en soulignant que l'espace public est le lieu de production et d'échange publics d'arguments sur les affaires de la cité ; il est le lieu de communication entre les divers interlocuteurs qui sont les hommes politiques et les citoyens « ordinaires ». Renchérit-il : « le caractère public des échanges produit les effets de disqualification des « mauvais » arguments ». Cependant, pour l'auteur, l'espace public a pour effet négatif que le citoyen au niveau du quartier lorsqu'il sera confronté à des espaces publics plus grand pourra développer un complexe d'infériorité.Ceci renvoyant au «cens caché » de D. Gaxie(1978). Il relève que le local est un niveau valorisé de la citoyenneté parce que, étant au plus près de leur préoccupation, il s'intéresse à la chose publique et que c'est à travers cela que la municipalité peut toucher du doigt les aspiration des populations et bénéficier de leurs énergies pour les satisfaire. La critique que l'on pourrait apporter ici est premièrement au niveau des conditions de la participation politique, car ce qui fait problème c'est que certains habitants quand bien même ils les remplissent ne s'impliquent pas parce que la situation l'arrange relativement à ses affaires. Aussi, parce que parfois lorsque plusieurs personnes s'impliquent, cela génère souvent les conflits, alors ils préfèrent se mettre à l'écart. De plus, concernant les effets négatifs de l'espace public à savoir le niveau du quartier si les élites amènent les populations ou le citoyen ordinaire à s'en tenir aux préoccupations de son quartier et à tenir compte du fait qu'il est un citoyen à part entière, il éviterait tout complexe et ainsi, serait au-dessus de toute considération d'ordre distinctif. A la suite de B Flacher, D. Gaxie13(*) a effectué des travaux sur la participation politique à travers sa théorie du « sens caché » de la participation. Théorie dans laquelle il pense que comme la démocratie suppose que le citoyen possède une capacité à apprécier les enjeux et la symbolique du champ politique, cette capacité n'est pas donnée à tous dans les mêmes proportions. Il y a un inégal accès à la compréhension de la « chose politique » qui dépend en définitive, d'un habitus de classe. Dans un système démocratique ; cette inégalité conduit à une division entre d'une part les professionnels de la politique et d'autres part, les spectateurs et les indifférents doublement marqués par une faible maîtrise des schèmes de classification et d'évolution en rapport avec l'organisation politique et par une capacité réduite d'appréciation de la compétence politique. Jacques T. Godbout14(*)(1983) pour sa part soutient que la participation est un élément essentiel de la vie politique, car que ce soit dans la démocratie ou autre système politique, le citoyen n'est jamais entièrement extérieur à « son » gouvernement. Cette participation permet au citoyen de compenser une faible possibilité de retrait au sens d'Hirschman(1991). Cependant il souligne que cette participation est effective dans la démocratie directe, tous les membres étant ici actifs et décisionnels, contrairement à la démocratie représentative ou la relation entre gouvernement et gouvernés échappe en partie au principe de la participation. Pour lui, participer politiquement renvoie à toute manifestation des citoyens « ordinaires » de ceux qui n'ont pas de pouvoir. Cette participation se faisant à travers un vote, l'appartenance à un comité au niveau du quartier, une manifestation. Il souligne en s'appuyant sur la description des nouvelles structures d'O'Neill, qu'il y a comme une diminution du pouvoir des citoyens, dont le rôle est déplacé en amont de la décision, au stade de son élaboration. Philippe Braud15(*)(2008) en considérant la participation politique comme l'exercice d'une citoyenneté dynamique et réfléchie, fait également ressortir qu'une partie insignifiante se mobilise activement pour la politique. Cette faible participation peut être sous-tendue par le coût inhérent à la mobilisation, le coût en temps, le coût en termes d'information, puisque l'implication politique demande une compréhension de ses enjeux. Allant dans la même lancée que lui, Dominique Chagnallaud16(*)(2010) souligne que seule une minorité politique participe activement à la vie politique. Dominique Memmi17(*)(1985) leur emboitant déjà le pas avait souligné que l'activité politique était en réalité pratiquée par une fraction de la population à savoir les militants et les professionnels de la politique qui cumulent plusieurs postes à la fois et composent18(*)une sphère restreinte d'initiés qui vivent par et pour la politique. Voici pour ce qui est de la participation politique en elle-même, qu'en est-il de cette participation en rapport avec les bidonvilles ? Mais bien avant, que pouvons nous relever sur les bidonvilles ? * 9Gerard d'Ambrile, le Projet de Recherche de l'Administration, University Law, 1996 * 10 B Flasher, « la Participation Politique », PUL, article 2012 * 11 HAMILTON un des pères fondateurs de la constitution américaine * 12 Armand colins, Guy Hermet, Pierre birnbaum, Philippe braud, Bertrand badie, Dictionnaire de Science Politique et des Institutions Politiques, paris, 1994, P 49 * 13 D Gaxie, le Cens Caché, le seuil, 1978 * 14Jacques T. Godbout, La Participation Politique : Leçons des Dernières Décennies, Collection Question de Culture, 1991, P 11-31 * 15Philippe Braud, Sociologie du Politique, 2008 * 16Dominique chagnollaud, « Science Politique », 2010 * 17Dominique memmi, Engagement Politique, 1985 |
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