2.2.1.2. Les outils de pilotage de la performance
financière
Une fois les standards définis et les prévisions
fixées, il devient impérieux de mettre en place des instruments
permettant au gestionnaire de connaitre l'état de son système
avant de prendre la décision. Concrètement, il s'agit de
concevoir et mettre en oeuvre un système d'information permettant de
mesurer le degré d'atteinte des objectifs de l'entreprise. Par exemple,
-une gestion des dépenses par le suivi des engagements
budgétaires sera assurée par le « contrôle
budgétaire » ; -une gestion de patrimoine et de résultat par
le suivi de la solvabilité et de la rentabilité sera
assurée par « l'analyse
4 On distingue le plan stratégique
(définition à long terme des objectifs de l'entreprise, ses
métiers, ses stratégies vis-à-vis des concurrents) du plan
opérationnel (chiffrage des actions à conduire à moyen
terme pour réaliser le plan stratégique). Le budget étant
le chiffrage des actions à accomplir annuellement
(décomposées mensuellement) afin de réaliser le plan
opérationnel.
23
La pratique des outils de gestion financière
dans les PME de la ville de Matadi. Marc YOVOKA MAMVEMBA K.
financière » ; -une gestion des dépenses
par le suivi des éléments qui les génèrent
(inducteurs des coûts ou unités d'oeuvre) sera rendue possible par
la « comptabilité analytique » ; enfin, une gestion des
dépenses et des recettes à partir d'un nombre limité
d'indicateurs sera assurée par le « tableau de bord ». Tous
ces instruments d'analyse et de suivi s'appuient largement sur les
données (les réalisations budgétaires) de la
comptabilité générale. Qu'en est-il alors de leur pratique
en contexte de la PME ?
a. Les pratiques de la comptabilité
générale dans les PME
L'examen des recherches empiriques traitant des pratiques
comptables au sein des PME révèle des conclusions
nuancées. Les résultats souvent partiels, parfois
contradictoires, n'aboutissent pas à des
généralisations.
Certains auteurs avancent que les systèmes
d'informations comptables sont orientés principalement vers la
production des documents obligatoires, dans les délais opportuns et dans
le but de satisfaire aux autorités fiscales. C'est le cas par exemple de
HOLMES et NICHOLLS (1989) qui affirment que la production des données
comptables non obligatoires est assez restreinte ou de MARCHESNAY(1982) qui
montre que les documents comptables restent destinés en priorité
à l'inspecteur des impôts.
Par ailleurs, si la plupart des PME ont un comportement
passif en matière de comptabilité financière, on ne peut
pas négliger certaines PME qui utilisent les données comptables
de manière puissante. Dans ce sens, LAVIGNE (1996) montre que les
états financiers des PME ne sont pas seulement produits pour des fins
fiscales.
Outre l'objectif obligatoire de reddition des comptes aux
autorités fiscales, les états financiers d'une
comptabilité générale orientée gestion
(comptabilité financière) doivent viser trois principaux
objectifs (LAVIGNE, 2000) : -contribuer à la fixation des objectifs de
l'entreprise, - suivre leur réalisation et prendre, si
nécessaire, des mesures correctives ; -prendre des décisions
d'investissement et ; - gérer la trésorerie et le fonds de
roulent. L'enquête de BAJAN- BANASZAK (1993) illustre mieux cette
situation. L'auteur rapporte que 48? des entreprises qu'il a
étudiées utilisent une comptabilité générale
orientée gestion.
b. Les pratiques de la comptabilité
analytique
Les entreprises doivent faire face aujourd'hui à un
environnement de plus en plus hostile, complexe, incertain et en
perpétuelle mutation : les concurrents sont plus nombreux, les clients
plus exigeants. Face à la mondialisation et à la concurrence qui
se durcit, les entreprises doivent développer leurs outils de
contrôle de gestion. Plus particulièrement, elles doivent
développer leur comptabilité analytique pour établir un
système de mesure et constituer un outil de prise de décision.
Le calcul des couts joue un rôle fondamental dans tout
système de contrôle de gestion. Il assure la cohérence de
l'action par rapport aux objectifs globaux, et l'allocation des moyens au sein
de l'entreprise pour atteindre ses objectifs par un langage simple, commun et
clair. Le calcul des couts permet de quantifier les objectifs, de valoriser les
moyens mis en oeuvres, et de montrer les résultats obtenus ou
prévus par produit. En fin, c'est un outil pour la prise de
décision que le manager ne doit pas sous-estimer (YOVOKA MAMVEMBA,
2012-2013, p. 22).
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La pratique des outils de gestion financière
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Malgré son caractère non obligatoire, la
comptabilité analytique reste un outil important pour garder la
maîtrise d'une entreprise. Elle complète la comptabilité
générale en lui dotant des éléments qui permettent
une prise des décisions sur des périodes plus courtes que
l'exercice (exemple le mois) : les coûts, les prix de vente, les bases
d'évaluation de certains éléments du patrimoine, les
prévisions des charges et des produits. Dans l'optique de pilotage,
cette comptabilité, à travers ses approches des coûts,
permet de quantifier les objectifs de l'entreprise, de valoriser les moyens mis
en oeuvres pour les atteindre, et de chiffrer les résultats obtenus ou
prévus par produit.
Les recherches empiriques en matière de pratiques de
comptabilité analytique en contexte des PME ne sont pas encore unanimes.
BAJAN-BANASZAK (1993) note que les comptabilités analytiques ne sont pas
les outils les plus implantés dans les PME et il met l'accent sur leur
diffusion restreinte puisqu'elles sont présentes seulement dans 40 % des
entreprises outillées.
De même, il souligne le caractère rudimentaire ou
encore embryonnaire d'une partie des comptabilités analytiques qui se
passent de tout logiciel c'est-à-dire de l'informatique. Dans leur
étude, ROWE, FERNANDEZ et PICORY (1994) montrent que dans les PME, c'est
la méthode des coûts complets qui est utilisée alors
qu'elle est de plus en plus remise en cause par les chercheurs. De plus, le
calcul des coûts est utilisé pour remplir ses rôles
traditionnels de fixation des prix et de calcul de la marge.
Dans un autre registre, Yvon GASSE. (1989), dans son
étude sur les techniques et pratiques de gestion en PME, affirme que
dans un échantillon de 51 PME qu'il a analysé, 88%
réalisent des calculs des coûts. De même, CHAPELLIER (1994)
démontre que 77 % des dirigeants interrogés réalisent des
calculs des coûts. Cependant, ce résultat est à discuter
puisque 19 % de l'échantillon disposent d'un système de calcul de
coût en phase de développement, 34 % moyennement complexes et 23 %
seulement de l'échantillon présentent un système
complexe.
Un système de comptabilité analytique doit
être approprié aux spécificités de la PME. Bien que
la majorité des PME débutent leur activité sans avoir un
système de comptabilité analytique, son utilité
apparaît au propriétaire-dirigeant, au fur et à mesure que
l'activité se développe. Toutes les entreprises qui
opèrent dans un même secteur n'ont pas les attentes identiques
vis-à-vis de la comptabilité analytique. Selon la taille les
moyennes entreprises ont besoin d'un système plus complexe qui leur
permet de prendre des décisions sur le coût et les prix de leurs
produits. Quel que soit la taille de l'entreprise un système de
comptabilité analytique, simple, efficace, flexible et adapté
à l'activité est fondamental pour la planification, le
contrôle et la prise de décision dans l'entreprise.
c. Les pratiques d'analyse financière
L'analyse financière d'une entreprise ne peut
être dissociée d'un diagnostic stratégique la concernant.
En effet l'environnement dans lequel se trouve l'entreprise (marché,
concurrence...) ainsi que ses caractéristiques propres (forces et
faiblesses) permettront de préciser l'analyse qui sera faite à
partir des comptes. Parfois même c'est le diagnostic stratégique
qui expliquera certaines informations du bilan ou du compte de
résultat.
Ce diagnostic pourra également servir en termes de
prospective. En effet, dans le cadre d'évaluation de
sociétés, l'analyse stratégique permettra de mieux
apprécier les
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La pratique des outils de gestion financière
dans les PME de la ville de Matadi. Marc YOVOKA MAMVEMBA K.
évolutions du marché sur lequel évolue
l'entreprise ainsi que les meilleurs choix en termes de financement, de
diversification...Pour cela il est donc essentiel de commencer toute analyse
financière par un diagnostic stratégique (YOVOKA MAMVEMBA K.,
2012-2013, p.24).
Les analyses effectuées à partir des comptes
annuels publiés par la comptabilité générale (les
états financiers) renseignent le gestionnaire sur la santé
financière de son entreprise. Quatre familles de critères sont
généralement utilisées pour forger une telle opinion
(MORA, 2010) : -la croissance (critère traduisant la garantie de la
survie à LT de l'entreprise mesurée par l'évolution du CA,
du nombre de clients ou d'employés, des capitaux propres...) ; - la
rentabilité (taux de rentabilité des capitaux propres, taux de
distribution de dividendes, les soldes intermédiaires de gestion) ; - la
liquidité (mesurée par la trésorerie saine) ;
-l'endettement (par le rapport entre dettes financières et fonds
propres, ...).
En matière de pratiques d'analyse financière
dans les PME, les recherches empiriques sont peu nombreuses et les
résultats convergent. CHAPELLIER (1994) démontre que l'analyse
financière constitue une pratique très répandue dans les
PME. Les résultats de son étude révèlent que
seulement 2 dirigeants sur 113 ne disposent d'aucune donnée d'analyse
financière. Cependant, ces pratiques financières ne sont pas
totalement homogènes, en fait, 26? des PME disposent de systèmes
d'analyse financière sophistiqués, 24? de systèmes
faiblement complexes et près de 48? de systèmes moyennement
complexes. De même, Yvon GASSE (1989) dans son étude menée
auprès de 51 PME manufacturières québécoises
remarque que 94? des PME consultées procèdent à une
analyse de la situation financière.
d. Les pratiques du tableau de bord
Le tableau de bord constitue un outil essentiel afin de
maitriser, au sens large, la gestion d'une entreprise. Cette maitrise passe,
par la fixation d'objectifs précis et par la définition de plans
d'actions adaptés à ces objectifs. Afin de contrôler le bon
déroulement des plans d'actions et d'assurer de leur pertinence, il est
nécessaire de disposer d'un système d'indicateurs de pilotage. Ce
système permet d'être averti en cas de dérives et
d'échafauder le cas échéant des solutions palliatives.
L'objectif d'un tableau de bord est de donner les moyens de gestion pour
contrôler l'atteinte des objectifs que le manager s'est fixé
(YOVOKA MAMVEMBA, 2012-2013, p 25).
Afin de mesurer l'impact d'un projet de bord sur le
système d'information, il faut rappeler les caractéristiques d'un
tableau de bord. Tout tableau de bord contrairement aux autres outils de
pilotage traditionnels5 qui utilisent un langage et des
données essentiellement comptables et financiers, le tableau de bord
utilise des informations de nature distincte6. D'autre part, la
critique que l'on adressait souvent aux « anciens » outils de
pilotage portait sur leur lenteur. L'autre caractéristique d'un bon
système de pilotage et de la capacité de réalité
qu'il confère au manager.
La complexité du système budgétaire et sa
lenteur dans la prise de décision (30 jours au moins pour faire le suivi
des budgets) ont conduit à la création de l'outil « tableau
de bord ». Il s'agit d'un dispositif plus réactif, permettant de
disposer en temps réel et en
5 Comptabilité de
gestion, Outil budgétaire.
6 C'est d'ailleurs la
diversité des perspectives qui rend apte à piloter correctement
la performance d'une organisation.
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La pratique des outils de gestion financière
dans les PME de la ville de Matadi. Marc YOVOKA MAMVEMBA K.
permanence des informations (financières et non
financières) essentielles pour garder la maîtrise des actions
opérationnelles d'une entreprise.
Dans les entreprises de petite taille, les tableaux de bord
sont constitués essentiellement des informations comptables
(prévisionnelles et actuelles). Ils forment une présentation
synthétique des prévisions et des situations
intermédiaires et ils peuvent être classés en tableaux de
bord stratégique (indicateurs de résultat, mesurant la
performance des unités sous la responsabilité du manager) et
tableaux de bord de gestion (indicateurs mesurant les actions d'un service ou
d'une fonction de l'entreprise).
Peu de recherches sont réalisées dans ce domaine
en contexte des PME. Toutefois, BAJAN-BANASZAK (1993) souligne que les tableaux
de bord de gestion sont considérés parmi les outils de gestion
les plus implantés dans les PME, ils représentent 71% des
entreprises outillées et semblent suffire à la gestion
quotidienne de petites entreprises.
CHAPELLIER s'interrogeant sur la tenue des tableaux de bord
dans les PME et sur les principales informations contenues dans ce document a
obtenu les résultats qui attestent que 23% des PME disposent de tableaux
de bord moyennement complexes et 48,5% de tableaux de bord assez complexes et
que les données retrouvées dans ce document concernent :
l'activité, les marges, les charges de personnels, les charges
financières et surtout la trésorerie.
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