Page I of 63
UNIVERSITE DE LIMOGES
FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES AGENCE
UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE
(AUF)
MASTER 2 DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE
L'ENVIRONNEMENT
Formation à distance, Campus Numérique
« ENVIDROIT»
La gouvernance forestière : étude
comparative
entre le droit français et le droit
congolais
Mémoire présenté par FRANCIS KAZADI
MBENGA
Sous la direction de EMILIE CHEVALIER
Juillet 2018
Page 2 of 63
INTRODUCTION
« S'il est une ressource dont la gestion est soumise
au respect des lois de la nature, c'est la forêt avec ses rythmes de
croissance souvent centenaires. Les générations actuelles l'ont
reçue en héritage et doivent veiller à ce que celles qui
nous suivront puissent en bénéficier de la même
façon que nous. Lorsqu'il s'intéresse à la forêt, le
droit doit à la fois réglementer ses utilisations et assurer sa
conservation. Il est donc le point de convergence de l'écologie et de
l'économie. »
Michel Prieur1
1 Michel PRIEUR, Forêts et environnement,
actes du Séminaire international organisé par le centre
international de droit comparé de l'Environnement à Limoges du 25
au 29 avril 1983, Presses universitaires de France 1984, page 291.
Page 3 of 63
En juin 1992, à Rio de Janeiro (Brésil), la
Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le
développement, connue sous le nom de Sommet « planète Terre
», a adopté une déclaration qui a fait progresser le concept
des droits et des responsabilités des pays dans le domaine de
l'environnement2, cela en vue de limiter la
détérioration de l'environnement et mettre sur pied des
mécanismes fiables de protection de l'environnement.
Ladite conférence a également été
le cadre d'adoption du programme d'action pour le XXIe siècle,
appelé Agenda 213, qui formula des recommandations dans
divers domaines parmi lesquels se trouve la gestion des forêts. Lors de
la phase préparatoire dudit Sommet « Planète Terre »,
il y eut espoir qu'une convention juridiquement contraignante sur les
forêts allait être négociée, mais cela n'a pas
été possible compte tenu de certaines divergences d'opinions
entre les parties à la conférence, et seule une série de
principes sur la gestion écologique des forêts fut
arrêtée et adoptée audit Sommet.
De nos jours, la « gestion durable des forêts
»4 revêt une importance capitale aussi bien pour les
populations rurales que pour les gouvernements et la communauté
internationale.
Il faut noter que les forêts ont plusieurs fonctions
telles que la fourniture de la matière première renouvelable
qu'est le bois comme moyen de subsistance (fonction économique), les
forêts sont des réservoirs de la biodiversité, qui est la
base même de notre existence, englobant aussi bien les différentes
espèces animales que végétales (fonction environnementale)
; enfin la forêt est vécue comme un espace récréatif
(fonction sociale).
2
http://www.un.org/french/events/rio92/rio-fp.htm
Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement,
principes de gestion des forêts.
3 L'Agenda 21 est un plan d'action pour le XXIe
siècle adopté par 173 chefs d'Etat lors du sommet de la Terre
à Rio de Janeiro en juin 1992. Il concerne les collectivités
territoriales .Ce programme définit les principes qui permettraient de
concilier les trois piliers du développement durable : la protection de
l'environnement, l'efficacité économique, l'équité
sociale.
4 Gestion Durable des Forêts :
« concept dynamique et en évolution, qui vise à maintenir et
à renforcer les valeurs économiques, sociales et
écologiques de tous types de forêts, pour le bien des
générations présentes et futures ».Assemblée
générale des Nations Unies (2008).instrument non juridiquement
contraignant mais faisant autorité sur tous les types de forêts.
Assemblée générale des N.U. Soixante-deuxième
session. Deuxième comité point 54 de l'ordre du jour
.A/RES/62/98.31 Janvier 2008.
Page 4 of 63
Aujourd'hui, avec l'augmentation des températures et
des populations, les forêts et les arbres sont au coeur de nombreux
défis majeurs : soutenir la production agricole, atténuer les
effets des sécheresses, des inondations et des tempêtes,
réguler le climat et les ressources en eau, protéger les
infrastructures, produire du bois et enfin préserver la
biodiversité5.
La France, par son expérience et ses performances dans
la gestion forestière6, s'est également engagée
dans l'initiative Forêt de l'Afrique Centrale,7 comme
pays bailleur afin d'aider les pays de l'Afrique Centrale à assurer une
meilleure coordination et harmonisation, à mobiliser des ressources pour
la mise en oeuvre des cadres nationaux de gestion des forêts.
C'est pourquoi, la République Démocratique du
Congo, l'un des pays couverts par la deuxième plus grande forêt
tropicale du monde, considère que cette forêt est un outil
précieux de développement pour les populations qui y vivent ou
qui l'avoisinent. Elle est un élément indispensable dans la lutte
contre le changement climatique, surtout qu'à l'heure actuelle, elle
subit d'énormes pressions ou perturbations. Ces perturbations peuvent
être d'origine naturelle et faire partie du cycle normal de la vie des
forêts, tandis que d'autres résultent des activités
humaines et sont dites « perturbations anthropiques » à savoir
: l'agriculture sur brûlis, le feu utilisé pour la capture du
gibier, la pyromanie, l'abattage excessif des arbres , l'exploitation
forestière industrielle, l'urbanisation, l'affectation des terres
boisées à l'agriculture, l'exploitation minière et
pétrolière, les cultures de subsistance, la guerre,
déplacements massifs forcés des populations suite aux conflits
armés, etc.
Les changements climatiques attribués aux
activités humaines risquent, eux, d'intensifier des
événements climatiques naturels (sécheresse, ouragan,
tornade, etc.). Qu'il s'agisse de
5 Plan d'action forestier pour la période
2016-20 (synthèse), Groupe de la Banque mondiale, avril 2016, p1.
http://www.worldbank.org/en
/topic/forests
6 L'université de Yale a dévoilé
son classement bi-annuel de l'indice de performance environnementale,
basé sur 24 critères .la France est deuxième
derrière la Suisse.
https://news.yale.edu/2018/01/23/2018-environmental-performance-index-air-quality-top-public-health-threat
7
http://www.fao.org/redd/initiatives/cafi/fr/
L'initiative pour les forêts de l'Afrique centrale (CAFI),
lancée lors du Sommet des Nations Unies pour le développement
durable en septembre 2015, vise à aider les gouvernements de la
région à mettre en oeuvre des réformes et à
renforcer les investissements pour relever les défis tels que la
pauvreté, l'insécurité alimentaire et le changement
climatique qui exercent une pression sur les forêts tropicales.
Page 5 of 63
perturbations naturelles ou anthropiques, l'humain peut aussi
jouer un rôle dans la gestion et le contrôle des effets sur la
forêt8.
Il est donc pertinent de s'intéresser aux aspects
juridiques de la gouvernance forestière en France et en
République Démocratique du Congo dans une étude
comparative articulée autour des questions suivantes :
- La gouvernance forestière est-elle un moyen efficace
de protection ou de préservation de la nature ?
-Le Gouvernement de la République Démocratique
du Congo ainsi que celui de la France mènent-ils des actions
concrètes pour améliorer la gouvernance des forêts ?
-En quoi cette étude comparative entre le Droit
français et le Droit congolais sur la gouvernance forestière
est-elle nécessaire pour une bonne gestion des forêts?
-Comment la Gouvernance forestière peut-elle renforcer la
protection des forêts ?
Au vu des préoccupations soulevées dans la
problématique, nous émettons les hypothèses selon
lesquelles la gouvernance forestière serait un moyen efficace de
protection et de préservation de la nature, et qu'une étude
comparative entre les deux législations apporterait des
améliorations dans la gestion des forêts, ce qui permettrait de
lutter efficacement contre la déforestation. Compte tenu des enjeux de
l'heure sur la question et vu son potentiel environnemental, la
République Démocratique du Congo, par le biais de son
gouvernement, a l'obligation de mener des actions concrètes pour
améliorer sa gouvernance forestière et mettre fin à
l'illégalité.
En effet, la forme la plus flagrante
d'illégalité concernant l'exploitation forestière
industrielle en RDC au cours de ces dernières années est l'usage
abusif répandu des permis d'exploitation forestière artisanale.
Ces permis sont censés être délivrés aux
ressortissants de la RDC, pour l'exploitation à petite échelle au
moyen de technologies simples.
Or, depuis 2010, ils sont délivrés
illégalement à des compagnies forestières
(étrangères en général), pour une exploitation
industrielle, contournant ainsi le moratoire sur la délivrance de
licences d'exploitation industrielle en place depuis 20029.
8
http://www.evb.lacsq.org/fileadmin/user
upload/microsites/eav-evb
internet/documents/trousses-et-activites/forets-du-monde/fiche42.pdf Les
Perturbations de la Forêt, Etablissement Vert Brundtland. 9 Dr
MENIKO TO HULU Jean Pierre (PhD), Etats des lieux de l'exploitation
forestière illégale en RDC et dans la province de la Tshopo,
Journée Internationale de l'Environnement, Yangambi, Institut Facultaire
des Sciences Agronomiques, 2016, p.10
Page 6 of 63
L'Intérêt de notre sujet procède du souci
d'établir un panorama, le plus exhaustif possible du droit applicable
à la forêt française et du droit applicable à la
forêt de la République Démocratique du Congo, tout en
faisant une comparaison entre les différents outils de la Gouvernance
forestière des deux pays permettant de préserver au mieux la
nature.
A priori, l'appartenance des deux droits à la famille
romano-germanique fait que les deux aient pratiquement la même origine et
la même philosophie du droit. L'actualité ou la mobilisation sur
les changements climatiques met en exergue le rôle que devraient jouer
certains états de l'Afrique centrale dont notamment la République
Démocratique du Congo. Cela justifie l'intérêt pour la RDC
de disposer d'une législation interne lui permettant de jouer un
rôle éminent au regard des enjeux du moment, vue l'étendue
de sa forêt. C'est dans ce sens que la comparaison avec le Droit
Français moderne en matière de gestion de forêt apparait
comme une référence pour atteindre cet objectif.
Nous mènerons cette étude en trois parties : la
première partie sera axée sur les instruments internationaux
relatifs à la législation forestière ; la deuxième
partie traitera de la réception dans les ordres juridiques internes ;
enfin la troisième et dernière partie sera centrée sur
l'effectivité de la gouvernance forestière.
Page 7 of 63
Sommaire
Première Partie : Les Sources Internationales
relatives à la législation forestière
Chapitre I : Les Conventions multilatérales
pertinentes pour les forêts
Chapitre II : Les directives et règlements
régionaux d'aménagement durable des forêts
Deuxième Partie : La Réception dans les
ordres Juridiques Internes
Chapitre I : Les modalités d'introduction des conventions
internationales dans les ordres juridiques nationaux
Chapitre II : Le niveau d'intégration juridique
Troisième Partie : L'effectivité de la
gouvernance forestière
Chapitre I : La gestion durable des forêts
Chapitre II : Le poids des acteurs locaux sur les questions
relatives à la gouvernance forestière
Page 8 of 63
LISTE DES SIGLES
AFD : Agence Française de Développement
AGEDUFOR : Appui à la gestion durable des
forêts
AIBT : Accords Internationaux sur les Bois Tropicaux
APV. : Accords de Partenariat Volontaires
CAFI : Central African Forest Initiative
CCNUCC : Convention-Cadre des Nations Unies sur les
Changements Climatiques
CDB : Convention sur la Diversité Biologique
CFC : Chlorofluorocarbones
CNUED : Conférence Mondiale sur l'Environnement et le
Développement
COP : Conférence des Parties
CO2. : Dioxyde de Carbone
DIAF. : Direction Inventaire et Aménagement
Forestiers
DRA. : Directives Régionales d'Aménagement
FEM : Fonds pour l'Environnement Mondial
FLEGT. : Forest Law Enforcement, Governance and Trade
FONAREDD: Fonds National REDD+
GATT. : General Agreement on Tariffs and Trade
GDF. : Gestion Durable des Forêts
IFF: Intergovernmental Forum on Forests
IPF: Intergovernmental Panel on Forests
LULUCF: Land use, Land-use change and forestry
MRV: Measuring, Reporting and Verification
No: Numéro
Page 9 of 63
OIBT : Organisation Mondiale du Commerce
OIT. : Organisation International du Travail
OMC. : Organisation Mondiale du Commerce
ONATRA. : Office national des transports
ONF. : Office National des Forêts
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
PIB : Produit Intérieur Brut
PNUE : Programme des Nations Unies pour l'Environnement
UE. : Union Européenne
UNCCD: United Nations Convention to Combat Desertification
UNFCCC : United Nations Framework Convention on Climate
Change
UV-B. : Ultraviolet-B
RDC : République Démocratique du Congo
WWF : World Wildlife Fund
Page 10 of 63
Première Partie : Les Sources Internationales
relatives à la législation forestière
Aujourd'hui, environ 30 p. cent de la superficie terrestre non
couverte de glace consistent en forêts ou en terres boisées. Il
convient de souligner le rôle essentiel que jouent les forêts dans
les grands équilibres écologiques à l'échelle des
grandes régions du monde et même de la planète
entière. Tout d'abord, en absorbant le gaz carbonique et en
dégageant de l'oxygène au cours du processus de
photosynthèse, elles aident à contrôler la teneur en gaz
responsable de l'effet de serre et créent l'atmosphère
indispensable au maintien de la vie. Les forêts des bassins versants sont
particulièrement importantes, car le couvert forestier réduit
aussi l'érosion des sols en ralentissant le ruissellement des eaux, et
en réduisant les risques d'inondations et d'envasement des
réservoirs et des voies d'eau.
Les forêts fournissent des produits alimentaires, du
fourrage et des médicaments, du bois d'oeuvre, des poteaux et du bois de
combustible, ainsi que des matières premières pour l'industrie.
Les forêts tropicales sont de surcroît l'habitat d'à peu
près 50-80 p. cent de la totalité des espèces existant sur
la Terre.
Elles sont hélas aussi soumises à la plus grave
menace de destruction. Elles sont déboisées à des fins
agricoles ou à d'autres fins telles que l'utilisation de bois de feu et
de charbon de bois, l'expansion des zones urbaines et industrielles, le
surpâturage et la récolte de fourrage. A cela s'ajoute la
pollution atmosphérique et le rétrécissement de la base
génétique des essences forestières, qui est une
conséquence de la foresterie commerciale. L'appauvrissement et le
dépérissement des forêts ont également pour
conséquence la perte de la biodiversité du fait des dommages
causés à l'habitat de la faune et de la flore et en
définitive, la détérioration de la qualité de la
vie des humains et la réduction des possibilités de
développement.
Cependant, le problème de la déforestation, tout
en étant l'objet de nombreux débats internationaux, est
resté en dehors de tout document international visant
spécifiquement la conservation et la gestion rationnelle des
forêts. En effet, depuis 1983 et l'Accord international sur les bois
tropicaux, les forêts ont été protégées
seulement indirectement à travers les documents internationaux
concernant les ressources naturelles.
Page 11 of 63
La Conférence mondiale sur l'Environnement et le
Développement (la CNUED)10, qui s'est tenue à Rio du 4
au 14 juin 1992, aurait pu être le cadre idéal pour l'adoption
d'un document contraignant sur les forêts. Cependant, sous la pression
des pays en voie de développement dotés d'un important couvert
forestier, mais qui manquent des ressources financières et techniques
nécessaires pour sa protection adéquate, les négociations
ont conduit à un compromis politique non contraignant. Il convient donc
tout d'abord de présenter les instruments internationaux pertinents pour
les forêts et d'illustrer les directives qui constituent le cadre
référentiel national pour l'élaboration des plans
d'aménagement des concessions forestières.11
Chapitre I : Les Conventions multilatérales
pertinentes pour les forêts12
Bon nombre des traités internationaux existants
contiennent des dispositions visant la réglementation des
activités liées aux forêts. Toutefois, il n'existe aucun
instrument juridique mondial dont les forêts soient le sujet central, de
même qu'il n'existe pas de traité international qui aborde tous
les aspects environnementaux, sociaux et économiques des
écosystèmes forestiers, et si l'on en croit la tendance, un tel
traité n'est pas près de voir le jour. Dans ce chapitre, nous
allons donner un aperçu général du traitement
réservé aux forêts dans quelques instruments
multilatéraux pertinents pour ce secteur, et conclure que la
stratégie actuelle, visant le renforcement des synergies entre ces
instruments, ne sera probablement pas suffisante pour garantir un
aménagement durable des forêts.
Section 1. Les Instruments
Juridiques internationaux les plus importants pour les forêts
1.1 Convention-cadre des Nations Unies sur les
changements climatiques (CCNUCC) 13
La CCNUCC a été adoptée pour
répondre à la préoccupation mondiale suscitée par
le réchauffement de la planète. L'objectif ultime de la
Convention est de limiter les perturbations anthropiques14 du
système climatique mondial, en cherchant à stabiliser les
concentrations de
10 Aussi appelée Sommet planète Terre
11 Alexandre CHARLES KISS et Dubravka BOJIC, «
Aspects institutionnels et financiers de la protection des forêts en
droit international » pp. 433-434
http://www.bibliotheque.auf.org/doc_num.php?explnum_id=415
12
http://www.fao.org/docrep/003/y1237f/y1237f02.htm
Barbara M.G.S. Ruis
13
http://www.un.org/fr/climatechange/kyoto.shtml
14 Perturbations écologiques non-naturelles
; quand la perturbation n'est pas naturelle mais causée par l'Homme, on
parle de « perturbation anthropique».
Page 12 of 63
gaz à effet de serre15 dans
l'atmosphère. En 1997, la Conférence des parties a adopté
un engagement juridiquement contraignant supplémentaire, le Protocole de
Kyoto qui énonce les objectifs et les méthodes de
réduction des émissions. Ce protocole a été
signé par 84 États, et 35 d'entre eux l'ont ratifié le 25
juin 2001, il est entré en vigueur le 16 février 2005.
Trente-neuf pays développés et en transition vers une
économie de marché s'engagent à réduire entre 2008
et 2012 les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 5 p.
cent par rapport aux niveaux de 1990. Toutefois, le Protocole de Kyoto ne
contient pas d'autres détails opérationnels définissant
les moyens à adopter pour obtenir ces réductions ou pour mesurer
et évaluer les efforts des pays.
Il existe un lien étroit entre le climat et les
forêts. Les forêts font office de réservoirs en stockant du
carbone dans la biomasse et dans les sols, et de puits de carbone lorsque leur
superficie ou leur productivité est augmentée ; ce qui se traduit
par une absorption accrue de dioxyde de carbone atmosphérique (CO2), le
principal gaz à effet de serre. Diverses pratiques sylvicoles
contribuent considérablement à ralentir l'accumulation de CO2
dans l'atmosphère. À l'inverse, les forêts deviennent une
source de gaz à effet de serre lorsque la biomasse brûle ou se
décompose. Certaines pratiques utilisées dans la création
de plantations, l'aménagement des forêts et l'agroforesterie,
comme le travail du sol et l'emploi d'engrais naturels peuvent libérer
des gaz à effet de serre.
Si la CCNUCC ne mentionne que brièvement les
forêts, le Protocole de Kyoto est plus explicite notamment dans son
Article 2 qui stipule que les parties industrialisées «
appliquent ou élaborent plus avant des politiques et des mesures...
par exemple les suivantes... promotion de méthodes durables de gestion
forestière, de boisement et de reboisement ». En vertu du
Protocole, certaines activités humaines touchant à l'utilisation
des terres, au changement d'affectation des terres et à la foresterie
(activités LULUCF)16, qui réduisent les concentrations
de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, à savoir le
boisement, le reboisement et la lutte contre le déboisement, peuvent
être utilisées par les pays industrialisés pour compenser
leurs engagements de réduction des émissions. À l'inverse,
les variations d'activités qui épuisent les
15 Composant gazeux absorbant le rayonnement
infrarouge émis par la surface terrestre et contribuant à l'effet
de serre. L'augmentation dans l'atmosphère terrestre est l'un des
facteurs à l'origine du réchauffement climatique.
16 LULUCF acronyme anglais pour Land use, Land use
change and forestry. Ce mot se prononce LULUC en français. Il est un
mécanisme qui vise à comptabiliser les émissions de CO2
responsables du réchauffement séquestrées par les
forêts, les sols et les autres activités qui utilisent les
sols.
Page 13 of 63
puits de carbone, comme le déboisement, seront
soustraites de la quantité d'émissions autorisées. Cette
question est entourée de multiples incertitudes et difficultés et
doit être mieux définie. Les activités LULUCF ont
constitué l'un des principaux points de rupture à la
Conférence des parties (Conference of the parties : COP) de novembre
2000, où l'absence de consensus a obligé à ajourner la
session jusqu'à une date ultérieure.
1.2 Convention sur la diversité
biologique
La Convention sur la diversité biologique (CDB) fait
partie des trois traités internationaux conclus à Rio de Janeiro,
lors du Sommet de la Terre de 1992.
La CDB a trois objectifs:
? la conservation de la diversité
biologique17;
? l'utilisation durable de ses éléments;
? le partage juste et équitable des avantages
découlant de l'exploitation des ressources génétiques.
Son objectif est de développer des stratégies
nationales pour la conservation et l'utilisation de la diversité
biologique. Une grande partie de la diversité biologique terrestre du
globe est concentrée dans les forêts; on estime que les
écosystèmes18 forestiers contiennent 70 pour cent des
espèces végétales et animales existant dans le
monde19. Depuis son adoption, la CDB a considérablement
élargi son horizon, qui a été étendu aux
forêts.
En 1995, la COP-2 a adopté une déclaration sur
la diversité biologique et les forêts, et a souligné que
les forêts jouent un rôle crucial dans le maintien de la
diversité biologique mondiale. Par la suite, un Programme de travail
pour la diversité biologique forestière a été
adopté à la COP-3 en 1996. Le Programme de travail se concentre
sur la recherche, la coopération et la mise au point des technologies
nécessaires pour la conservation et l'utilisation durable de la
diversité biologique de tous les types de forêts. En 1998, la
COP-4 a décidé que les forêts seraient l'un
17 Article 2. De la CDB, Diversité
biologique : « Variable des organismes vivants de toute origine y
compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et
autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques
dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des
espèces et entre espèces ainsi que celle des
écosystèmes ».
18 Complexe dynamique formé de
communautés de plantes, d'animaux et de micro-organismes et de leur
environnement non vivant qui par leur interaction, forment une unité
fonctionnelle.
19 Barbara M.G.S. Ruis,
op.cit,p.2
Page 14 of 63
des trois thèmes prioritaires de la COP-6 en 2002. Elle
a également établi un Groupe d'experts techniques spécial
sur la diversité biologique des forêts. Ce groupe a pour mandat de
donner des avis sur la recherche scientifique et le développement,
d'examiner les informations disponibles sur l'état de la
diversité biologique des forêts, son évolution et les
menaces qui pèsent sur elle, et de proposer des mesures pour la
conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique
forestière. Le groupe s'est réuni deux fois et peut devenir une
tribune intéressante pour l'élaboration d'un cadre de politiques
incluant la diversité biologique des forêts.
La COP de la CDB est soutenue par un organe subsidiaire
chargé de fournir des avis scientifiques, techniques et technologiques,
qui s'occupe de toute une série de problèmes en rapport avec la
diversité biologique, dont font partie les feux de forêt et
l'exploitation des ressources forestières autres que le bois.
La CDB a influencé le dialogue mondial sur les
forêts, notamment en prenant l'initiative de militer pour la
reconnaissance des connaissances traditionnelles des populations autochtones et
des communautés tributaires des forêts dans le processus
IPF/IFF20. La CDB contient certes des articles sur les connaissances
forestières indigènes et traditionnelles, mais elle comporte
aussi un risque que les populations autochtones soient
considérées comme une «ressource» pour la
diversité biologique, c'est-à-dire comme des personnes qui
peuvent fournir des connaissances sur les composantes de la diversité
biologique, plutôt que comme des individus qui ont tout aussi des droits
légaux, sociaux, culturels et économiques.
L'autre mécanisme qui fait que la CDB a une influence
sur les forêts est le Fonds pour l'environnement mondial (FEM), qui
finance des projets au titre de la CDB, en faveur d'activités
20 IPF/IFF : la période de «
l'après-Rio »(1992-1995) s'est caractérisée par le
renforcement de la confiance et l'apparition de partenariats Nord-Sud ,dans une
atmosphère qui a permis à la Commission du développement
durable des Nations Unies de constituer le Groupe intergouvernemental
spécial sur les forêts (IPF) lors de sa troisième session ,
en avril 1995 . L'IPF, doté d'un mandat de deux ans, a été
chargé de promouvoir les initiatives lancées lors de la CNUED et
d'encourager le consensus international sur les principales questions touchant
aux forêts. Au moment de la conclusion de ses travaux, en février
1997, l'IPF avait élaboré et négocié plus d'une
centaine de propositions d'action sur des questions ayant trait à la
gestion durable des forêts ; les critères et les indicateurs ; les
connaissances traditionnelles dans le domaine des forêts ; enfin les
causes sous-jacentes de la déforestation. Le point sur le processus
ipf/iff-FAO
www.fao.org
L'UNCCD peut être fondamentale pour les forêts,
mais la non-application et le non-respect de la convention, et les incertitudes
persistantes quant au financement, font qu'il est bien difficile
Page 15 of 63
liées à la diversité biologique,
notamment la diversité biologique forestière. De plus, la CDB a
établi en 2000 la Global Taxonomy Initiative, qui
intéresse aussi les forêts.
1.3 Convention des Nations Unies sur la lutte contre
la désertification (UNCCD) dans les pays gravement touchés par la
sécheresse et/ou par la désertification, en particulier en
Afrique
L'UNCCD vise à combattre la désertification,
à atténuer les effets de la sécheresse et à
contribuer au développement durable. Cela implique des stratégies
à long terme focalisées sur l'amélioration de la
productivité des terres et sur la remise en état, la conservation
et la gestion durable des ressources en terres et en eau, et conduisant
à une amélioration des conditions de vie des populations. La
protection et l'expansion des forêts tiennent une place importante dans
l'UNCCD, car elles ont d'importantes fonctions écologiques qui
atténuent les effets de la sécheresse et préviennent la
désertification. Les stratégies de lutte contre la
désertification et de réduction du recul de la forêt, sont
généralement interdépendantes. Les
écosystèmes forestiers intacts contribuent à stabiliser le
sol; il s'ensuit que le déboisement accélère à la
fois la désertification et la dégradation des terres. Le
déboisement a de graves conséquences, en termes de ruissellement
de surface, d'érosion et d'appauvrissement des sols.
Outre ces interactions écologiques, les conditions
socioéconomiques et les causes profondes du recul des forêts et de
la désertification sont très similaires. La déforestation
et d'autres pratiques forestières non durables qu'adoptent les
communautés rurales pauvres pour des raisons économiques,
commerciales ou de survie, ont contribué à la dégradation
des terres et à l'appauvrissement des sols dans bon nombre de pays en
développement. L'aménagement durable des forêts
représente une part importante des mesures correctives envisagées
au titre de l'UNCCD pour lutter contre la dégradation des sols,
promouvoir l'agriculture et le développement rural durables et
réduire la pauvreté rurale.
Page 16 of 63
à l'UNCCD de définir avec plus de
précision son programme de travail en ce qui concerne l'inclusion des
forêts.
Section 2. Autres instruments juridiques internationaux
pertinents sur les forêts
2.1 Convention relative aux zones humides d'importance
internationale, particulièrement comme habitats des oiseaux d'eau
(Convention de Ramsar)
L'objectif de la Convention de Ramsar est d'assurer la
conservation et l'utilisation prudente des terres humides, grâce à
des mesures prises au niveau national et à une coopération
internationale. Plus d'un millier de sites, couvrant au total plus de 80
millions d'hectares, sont classés comme zones humides d'importance
internationale. Quelques-uns de ces sites contiennent des
écosystèmes forestiers, par exemple des mangroves, mais il est
impossible de déterminer leur nombre exact car les forêts en tant
que telles ne sont pas identifiées dans le cadre de la convention.
À l'origine, la Convention de Ramsar visait uniquement
la préservation des zones humides comme habitats des oiseaux d'eau, mais
sa portée s'est considérablement élargie au fil du temps
jusqu'à englober les implications plus larges de la destruction des
zones humides. Sa COP a pris plusieurs décisions en vue de
reconnaître l'importance des zones humides, non seulement pour leurs
oiseaux d'eau, mais aussi pour leur diversité biologique et leurs autres
fonctions écologiques et environnementales. Une attention plus grande a
été accordée au concept de développement durable,
notamment à la participation des communautés locales et des
populations indigènes. Depuis 1999, les critères pour qu'une zone
humide soit déclarée d'importance internationale sont les
suivants:
? abriter des espèces vulnérables,
menacées ou gravement menacées d'extinction, ou des
communautés écologiques menacées;
? abriter des populations d'espèces de faune et/ou de
flore importantes pour la conservation de la diversité biologique d'une
région biogéographique particulière.
21 Jim THORSELL & Todd SIGATY, «
Utilisation humaine des sites naturels du patrimoine mondial un
aperçu global », UICN, septembre 1998.
Page 17 of 63
2.2 Convention concernant la protection du patrimoine
mondial, culturel et naturel (Convention du patrimoine mondial)
La Convention du patrimoine mondial vise
l'établissement d'un système de protection collective du
patrimoine culturel et naturel, ayant une valeur universelle exceptionnelle.
Les États reconnaissent leur obligation de garantir la protection, la
conservation et la transmission aux générations futures de leur
patrimoine culturel et naturel. Les forêts peuvent être
considérées comme un patrimoine naturel, répondant
à la définition suivante: «les sites naturels ou les
zones naturelles strictement délimitées, qui ont une valeur
universelle exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation ou
de la beauté naturelle» (Article 2).
La Convention du patrimoine mondial établit la Liste du
patrimoine mondial qui recense les sites qui en font partie. Les Directives
opérationnelles de la convention, qui servent de guide pour
l'établissement de la liste, sont un mécanisme flexible
permettant de prendre en considération de nouveaux concepts. La
dernière version révisée (Comité
intergouvernemental pour la protection du patrimoine mondial naturel et
culturel, 1999) stipule que les sites naturels inscrits sur la liste du
patrimoine mondial devraient «être des exemples éminemment
représentatifs de processus écologiques et biologiques en cours
dans l'évolution et le développement des
écosystèmes et communautés des plantes et d'animaux»,
ou «contenir les habitats naturels les plus représentatifs et
les plus importants pour la conservation in situ de la diversité
biologique...» (Paragraphe 44).
À l'heure actuelle, près de 700 sites sont
inscrits sur la Liste du patrimoine mondial. Parmi ceux-ci, 41 rentrent dans la
catégorie des forêts tropicales couvrant 30,6 millions d'hectares.
D'autres types de forêts ont aussi été inscrits sur la
Liste du patrimoine mondial par Thorsell et Sigaty (1998)21 qui ont
dénombré 61 sites contenant d'importantes réserves
forestières. D'autres sites forestiers ont été
identifiés en vue d'être déclarés «patrimoine
mondial». Toutefois, la majorité des sites désignés
occupent une surface relativement modeste.
Page 18 of 63
2.3 Convention sur le commerce international des
espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction
(CITES)
La CITES vise à protéger certaines
espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction
contre la surexploitation pour les besoins du commerce international, par un
système de permis d'importation et d'exportation. La Convention se
concentre exclusivement sur le commerce et repose sur la conviction que le
contrôle des marchés internationaux aidera à
préserver les espèces menacées d'extinction. La CITES
inscrit les espèces menacées d'extinction sur l'une de ses trois
annexes, correspondant à des niveaux différents de contrôle
du commerce international. Alors que de nombreuses espèces animales des
forêts sont inscrites dans les annexes, seules 16 espèces
d'arbres, principalement utilisées pour leur bois, figurent actuellement
sur les listes. L'inclusion dans la liste d'essences forestières
d'importance commerciale majeure est de plus en plus controversée depuis
quelques années, car certaines parties craignent que cette pratique ne
favorise l'introduction de restrictions commerciales déloyales. Les
listes des annexes de la CITES contribueront à attirer l'attention sur
la nécessité de prendre des mesures pour mieux gérer et
conserver certaines espèces, mais ne constituent certes pas en
elles-mêmes une protection.
La COP-10 de la CITES a reconnu en 1997 que «le commerce
peut être bénéfique pour la conservation des espèces
et des écosystèmes quand ses niveaux ne nuisent pas à la
survie des espèces en question»; toutefois, la COP a aussi
noté «que certaines essences forestières peuvent être
menacées en raison des niveaux préjudiciables de leur
exploitation et du commerce international».
En 1994, la CITES a constitué le Groupe de travail sur
le bois, en vue d'examiner les problèmes de mise en oeuvre
résultant de l'inscription d'essences forestières sur les listes
de la CITES, et d'examiner la définition des termes et des unités
utilisés dans le commerce pour décrire les parties et les
dérivés des arbres des forêts. La CITES a aussi
institué un Groupe d'experts sur l'acajou et un Comité pour les
plantes.
La Convention OIT, que l'on peut aussi appeler Convention
concernant les peuples indigènes et tribaux, vise aussi la protection
des droits sociaux, économiques et culturels des peuples
Page 19 of 63
2.4 Convention pour la protection de la couche d'ozone
(Convention de Vienne)
Les émissions anthropiques de certains gaz - en
particulier les chlorofluorocarbones (CFC) et halons (hydrocarbures
halogénés, utilisés pour l'extinction des feux)
entraînent un appauvrissement de la couche d'ozone, qui provoque une
augmentation de la concentration de rayons ultraviolets pouvant être
nocifs pour la santé humaine et l'environnement. Par le canal de la
Convention de Vienne, les États s'engagent à protéger la
couche d'ozone contre ces gaz destructeurs et à coopérer entre
eux à des recherches, pour mieux comprendre les processus scientifiques
en cause. La Convention de Vienne est un accord-cadre, sans objectifs ni
calendrier d'action définis. Le Protocole de Montréal relatif
à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone a été
adoptée en 1987 et amendé à quatre reprises depuis.
De nombreux États n'ont pas encore ratifié ces
amendements. Le protocole contient des normes internationales
détaillées régissant la production et la consommation des
substances chimiques qui appauvrissent la couche d'ozone, et vise la
réduction, puis l'élimination des émissions de ces
substances, dues à l'activité de l'homme.
La Convention établit un cadre pour l'adoption de
mesures visant à «protéger la santé humaine et
l'environnement contre les effets néfastes résultant... des
activités humaines qui modifient... la couche d'ozone» (Article 2).
Le régime de l'ozone intéresse le secteur des forêts, dans
la mesure où l'appauvrissement de la couche d'ozone peut avoir des
effets négatifs sur les forêts (Article 1.2). Pour les
forêts commerciales, on peut avoir recours à des techniques
d'amélioration des arbres et au génie génétique
pour améliorer la tolérance au rayonnement ultraviolet-B (UV-B),
mais pour les forêts naturelles ou non soumises à un
aménagement, ces méthodes ne sont pas envisageables. Si de
nombreuses espèces forestières semblent tolérer les UV-B,
certains indices montrent que les effets nocifs des UV-B peuvent s'accumuler
lentement dans les arbres au fil des années (PNUE, 1998). L'application
du régime de l'ozone peut être bénéfique pour les
forêts, mais les forêts ne sont pas expressément
visées.
2.5 Convention concernant les peuples indigènes
et tribaux dans les pays indépendants (Convention OIT no
169)
Page 20 of 63
indigènes. Les parties s'engagent, avec la
participation des peuples intéressés, à développer
une action en vue de protéger leurs droits et de garantir le respect de
leur intégrité.
Les populations indigènes vivent souvent en association
étroite avec les forêts, qui leur fournissent un habitat et
remplissent d'importantes fonctions économiques, sociales et
culturelles. Se préoccuper de la conservation et de la gestion des
forêts revient souvent à se préoccuper de la survie et
l'intégrité des cultures et des connaissances des peuples
indigènes.
C'est dans la section sur les droits à la terre que
l'on trouve les articles pertinents de la Convention (Articles 13 à 19),
par exemple:
? L'article 14, qui stipule que «les droits de
propriété et de possession sur les terres qu'ils occupent
traditionnellement doivent être reconnus aux peuples
intéressés»;
? L'article 15, qui stipule que les droits des peuples
«sur les ressources naturelles dont sont dotées leurs terres
doivent être spécialement sauvegardés», y compris
le droit pour ces peuples «de participer à l'utilisation, à
la gestion et à la conservation de ces ressources», notamment de
partager les avantages qui en dérivent et de recevoir une juste
compensation en cas de dommages.
Sont également pertinents:
? L'article 2, qui stipule qu'il «incombe aux
gouvernements, avec les peuples intéressés, de développer
une action coordonnée et systématique en vue de protéger
les droits de ces peuples et de garantir le respect de leur
intégrité»;
? L'Article 7, qui déclare que les gouvernements
«doivent prendre des mesures, en coopération avec les peuples
intéressés, pour protéger et préserver
l'environnement dans les territoires qu'ils habitent».
Quoique la Convention OIT ne contienne pas de disposition
visant spécifiquement les forêts, son programme d'application
inclut des activités comme la gestion des domaines ancestraux et la
gestion de l'environnement et des ressources naturelles. Bien qu'elle ait
été ratifiée par 14 États seulement, il est
incontestable que la convention influence les politiques nationales et est
considérée comme un instrument important pour les peuples
indigènes, en droit international.
Page 21 of 63
2.6 Accord international sur les bois tropicaux
(AIBT)
L'AIBT est un accord sur les produits qui vise à
faciliter le commerce des bois tropicaux et à garantir des exportations
provenant de sources durables22. L'adhésion à
l'Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT)23, qui
administre l'AIBT, est limitée aux États producteurs ou
consommateurs de bois tropicaux. L'accord est entré en vigueur pour la
première fois en 1985, mais il a été
renégocié, et la version révisée a pris effet en
1997. Durant les renégociations, les positions des États
producteurs et consommateurs étaient parfois opposées: les
producteurs souhaitaient élargir son champ d'application au bois
provenant de toutes les sources, afin que toutes les forêts soient
assujetties aux directives rigoureuses convenues pour les forêts
tropicales, tandis que les pays consommateurs soutenaient que
l'élargissement de la convention pour lui donner une portée
mondiale dépassait les limites de son mandat.
L'OIBT ne s'occupe pas seulement de promouvoir le commerce,
elle cherche aussi à atténuer les problèmes
environnementaux, d'où des conflits d'intérêts entravant la
réalisation de certains objectifs de l'AIBT. Le Conseil de l'OIBT se
compose de 56 membres représentant 75 pour cent des forêts
tropicales du monde et 90 pour cent du commerce international de bois
tropicaux. Au sein du conseil, les voix sont également réparties
entre les États producteurs et consommateurs. Le pourcentage des voix
dans chaque groupe est principalement déterminé par la part des
États respectifs dans le commerce des bois tropicaux, même si le
pourcentage des voix des pays producteurs reflète aussi leur couvert
forestier. Avec cette structure des votes, l'OIBT n'est pas
nécessairement bien placée pour sauvegarder l'environnement,
étant donné que ceux qui bénéficient le plus du
commerce international et qui, par conséquent, ont le plus de poids sont
généralement les moins enthousiastes sur les
réglementations environnementales qui risquent de restreindre les
échanges (Hunter, Salzman et Zaelke, 1998)24. Les producteurs
de l'OIBT ont généralement fait preuve d'une certaine
réticence à promulguer des décisions qui pouvaient
être
22 Cela signifie que les activités relatives
aux forêts ne doivent pas causer de dommages susceptibles de
réduire sensiblement la capacité des forêts à
fournir des produits et services -tels que bois, l'eau et la conservation de la
biodiversité.
http://www.itto.int/fr/sustainable_forest_management/
23 L'Organisation Internationale des Bois Tropicaux
est la seule institution qui s'occupe exclusivement des forêts,
établie en 1983 pour 52 pays par l'Accord international sur les bois
tropicaux.
24 David HUNTER, James SALZMAN & Durwood
ZAELKE, International Environmental Law and Policy, Foundation
Press,1998,1567p.
Page 22 of 63
considérées comme une restriction du commerce,
qu'il s'agisse d'incitations, d'étiquetage ou de mesures de restriction
du commerce des espèces menacées d'extinction (Humphreys,
1996)25.
Un événement parallèle, à l'OIBT,
a été l'adoption en 1991 de l'«Objectif an 2000»,
visant à parvenir, d'ici l'an 2000, à une gestion durable des
forêts tropicales et du commerce des bois tropicaux provenant de
ressources gérées de manière durable. Il s'agissait d'un
objectif non contraignant ou, selon certains, simplement d'un processus (voir
Poore et Thang, 2000). L'Objectif 26an 2000 n'a été
accepté qu'après que les États consommateurs aient promis
d'appliquer à leurs propres forêts les normes d'aménagement
forestier durable élaborées par l'OIBT pour les bois
commercialisés au niveau international. La mise en oeuvre de l'Objectif
an 2000 dans les pays avance à un rythme plutôt lent.
2.7 Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce
(OMC)
L'OMC constitue le cadre administratif et institutionnel de
l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)
de 1994 (version révisée), et des instruments connexes. Le
régime GATT/OMC a pour objet de faciliter le libre-échange et de
garantir son bon fonctionnement, tout en tenant compte de la
nécessité de protéger l'environnement. La principale
disposition à cet égard est l'Article XX du GATT, qui inclut des
exceptions à toutes les règles commerciales, à certaines
fins telles que la protection de la santé et de la vie des personnes ou
des animaux et la conservation des ressources naturelles épuisables,
sous réserve que ces mesures ne «soient pas appliquées de
façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou
injustifiable... soit une restriction déguisée au commerce
international».
Le régime GATT/OMC intéresse les forêts
dans la mesure où il réglemente le commerce de tous les produits,
notamment des bois tropicaux et de leurs dérivés, et où la
libéralisation du commerce peut avoir des effets tant positifs que
négatifs sur l'exploitation des ressources naturelles. Diverses
dispositions de l'OMC peuvent inclure le recours à des mesures
commerciales nécessaires pour protéger l'environnement, comme
celles qui sont souvent incluses dans d'autres traités environnementaux.
Par exemple, une prohibition à l'exportation de bois
d'oeuvre27, à des fins de conservation, pourrait être
compatible avec l'Article XX. En
25 HUMPREYS, D. Forests politics, Earthscan, 1998,
Londres.
26 POOR & THANG, Evaluation des ressources
forestières mondiales 2000, Rapport principal, FAO, 2002.
27 Nom donné aux bois propres à tous
emplois autres que le chauffage. Les bois d'oeuvre se divisent en bois de
service et bois de travail. Les bois de service sont ceux qui servent aux
constructions civiles et navales ; les bois
Page 23 of 63
1998, il a été établi une base de
données sur l'environnement contenant toutes les notifications faites
à l'OMC et liées à l'environnement.
L'établissement du Comité du commerce et de
l'environnement de l'OMC, en 1995, est une tentative visant à
intégrer de manière plus systématique les problèmes
environnementaux et le développement durable dans les travaux de l'OMC
mais, jusqu'à présent, les progrès ont été
assez lents dans ce domaine. Toutefois, le comité a commencé ou
s'apprête à examiner plusieurs questions applicables aux
forêts, telles que l'écoétiquetage28,
l'amélioration de l'accès aux marchés des produits et des
services procurés par les forêts, la transformation et la
commercialisation communautaires des produits forestiers ligneux et non
ligneux, l'internalisation intégrale des coûts et son application
à l'aménagement durable des forêts, et la certification des
produits forestiers.
Après ce passage en revue des instruments juridiques
internationaux pertinents sur la gestion de forêt, il est
nécessaire de faire une étude sur les directives et les
règlements régionaux d'aménagement durable des
forêts parce qu'elles évoquent au niveau local les engagements
internationaux des Etats.
Chapitre II : Les directives et règlements
régionaux d'aménagement durable des forêts
(DRA)
Les directives et les règlements régionaux
d'aménagement constituent le cadre référentiel national
pour l'élaboration des plans d'aménagement des concessions
forestières dans l'objectif d'une gestion et d'une conservation durables
des ressources forestières.
Les directives et les Règlements sur
l'aménagement durable des forêts édictent les normes que
tous les acteurs du milieu doivent respecter lorsqu'ils font des
activités d'aménagement forestier dans les forêts du
domaine de l'Etat. Ces normes ont notamment pour objet d'assurer la protection
du milieu forestier, de même que le maintien ou la reconstitution du
couvert forestier.
de travail ou d'industrie comprennent les bois employés
par les différents métiers, tels que la menuiserie,
l'ébénisterie, le charronnage, la tonnellerie,
etc. puymorybois.com
28 Certification environnementale d'un organisme
agréé
Page 24 of 63
En France, le code forestier définit le contenu des
directives régionales d'aménagement (articles R.133.1et suivants)
auquel chaque aménagement se réfère. Elles font l'objet
d'un rapport environnemental conformément à l'article R.133.1.1
et d'une consultation publique engagée par la préfecture de
région. Le rapport environnemental inclut une évaluation
explicite des directives régionales d'aménagement sur les
habitats et espèces des sites.
Les directives régionales d'aménagement des
forêts domaniales déclinent :
- les engagements internationaux et nationaux de la France en
matière de gestion durable des forêts ;
- les présentes directives nationales d'aménagement
et de gestion ;
- les documents directeurs de l'État à
l'échelle de chaque région administrative (Orientations
régionales forestières applicables, Orientations
régionales de gestion et de conservation de la faune sauvage et de ses
habitats).
Elles constituent également un cadre de
référence qui précise les principaux objectifs et
critères de choix permettant de mettre en oeuvre une gestion durable des
forêts domaniales et d'assurer leur bonne intégration dans
l'aménagement du territoire. Leur portée est donc à la
fois politique et technique.
Les engagements contractuels locaux pris pour la forêt
domaniale en matière de gestion et de développement durable
(certification, chartes forestières de territoire) doivent être
compatibles avec les directives régionales d'aménagement.
Afin d'assurer leur cohérence territoriale, les
directives régionales d'aménagement sont élaborées
de préférence à une échelle régionale.
Lorsqu'elles concernent de grands ensembles sylvo-géographiques à
caractéristiques proches et comportant des orientations communes, elles
doivent être présentées dans chaque région
administrative pour la part qui les concerne. Les directives régionales
d'aménagement sont rédigées par l'Office National des
Forêts (ONF)29.
L'ensemble du territoire métropolitain doit disposer de
tels documents approuvés avant le 31 décembre 2011.
Les directives régionales d'aménagement doivent
faire l'objet dans leur phase d'élaboration d'une consultation
auprès des services de l'État en région chargés de
la forêt et de l'environnement pour recueillir leurs attentes et les
informations utiles qu'ils détiennent.
Page 25 of 63
L'ONF consulte à ce stade tout autre acteur jugé
utile : parc national, parc naturel régional, autre service de
l'État....
Afin d'être consultables par le public auprès des
services de l'État (préfecture, sous-préfecture ; article
133-6 du code forestier), les directives régionales d'aménagement
doivent être synthétiques, claires et aisément
compréhensibles.
Il s'agit de documents officiels approuvés par le ministre
en charge des forêts.
En RDC, c'est l'Arrêté du 03 juillet 2015 du
ministre ayant en charge l'Environnement et le Développement Durable qui
fixe les directives d'élaboration, de vérification,
d'approbation, de mise en oeuvre et de suivi du plan d'aménagement d'une
concession forestière de production de bois d'oeuvre.30
Section 1. Les aménagements forestiers
L'aménagement forestier consiste à
définir les moyens à mettre en oeuvre pour adapter la forêt
aux besoins de l'homme31 ; ainsi les forêts qui
bénéficient d'un aménagement forestier en vigueur sont
considérées comme présentant des garanties de gestion
durable (article L.8 du code forestier français). En France, le terme
aménagement forestier désigne un document d'aménagement.
Ce document constitue la clé de voûte du dispositif de gestion
forestière durable des forêts des collectivités. Il est
élaboré par l'ONF sur la base des objectifs retenus par la
collectivité propriétaire, conformément au schéma
régional d'aménagement approuvé dont relève la
forêt concernée et aux guides techniques de
référence. Il fait l'objet d'une délibération
d'approbation de la part de la collectivité et est approuvé par
arrêté du préfet de région sur proposition du
directeur territorial de l'ONF.
Lors de son élaboration, l'aménagement forestier
fait l'objet de trois étapes de validation au cours desquelles la
collectivité propriétaire exprime ses attentes et valide les
choix proposés :
30 Article 1 et 2 Arrêté
Ministériel N°034/CAB/MIN/EDD/03/03 /BLN2015 du 03 juillet 2015
fixant la procédure d'élaboration , de vérification,
d'approbation, de mise en oeuvre et de suivi du plan d'aménagement d'une
concession forestière de production de bois d'oeuvre.
31 André MORMICHE, « La notion
d'aménagement forestier », Revue géographique des
Pyrénées et du Sud-ouest Européen, Forêts, 1984,
p.
Page 26 of 63
- en début d'étude d'aménagement ; cette
première réunion permet de s'accorder sur les enjeux de la
forêt sur la base des classements issus de l'analyse objective et des
objectifs de la collectivité pour sa forêt et pour les
démarches territoriales auxquelles elle participe ;
- lors de la validation des grands choix (objectifs, choix
techniques) ; cette étape peut faire l'objet d'une
délibération de la collectivité propriétaire ;
- à la présentation du projet de document
d'aménagement.
Le document d'aménagement est un document d'objectifs
et non de moyens. Aussi, son contenu doit-il être centré sur
l'essentiel et exprimer clairement les choix stratégiques faits par la
collectivité propriétaire. Il doit permettre une gestion
multifonctionnelle de la forêt considérée. D'une
manière générale, la fonction de production doit
être optimisée dans l'esprit du Grenelle32 de
l'environnement (« Dynamiser la filière bois en protégeant
la biodiversité forestière ordinaire et remarquable »), afin
de :
- participer aux objectifs de la stratégie nationale de
mobilisation des produits ligneux ; - participer aux objectifs de la
stratégie nationale de biodiversité ;
- répondre aux démarches locales de
développement territorial.
Chaque forêt de collectivité a vocation à
être dotée d'un aménagement approuvé et applicable.
Le taux objectif de surface d'aménagements applicables est de 90 %
à échéance de l'année 2011. En fin de
période d'application, les études pour la révision de
l'aménagement sont à engager par anticipation, de manière
à permettre la continuité de la mise en oeuvre de la gestion
forestière durable. Le plus souvent, les aménagements sont
à réaliser pour une période d'application de l'ordre de 20
ans. La période retenue peut toutefois s'écarter de cette
durée :
- elle est d'autant plus longue que les enjeux sont faibles,
que la stabilité des peuplements ou la maîtrise de la dynamique
des peuplements par la sylviculture sont jugées bonnes ;
32 Grenelle de l'environnement est ensemble de
rencontres politiques organisées en France , visant à prendre des
décisions à long terme en matière d'environnement et de
développement durable, en particulier pour restaurer la
biodiversité par la mise en place de schémas régionaux de
cohérence écologique , tout en diminuant les émissions de
gaz à effet de serre et en améliorant l'efficience
énergétique.
Page 27 of 63
- inversement, en cas de forte incertitude concernant
l'évolution des peuplements ou en cas de forte évolution du
contexte externe, une période plus courte peut être
adoptée33.
Section 2. Etat de l'aménagement forestier en
République Démocratique du Congo34
Depuis son accession à l'indépendance, la RDC
n'a jamais disposé de véritables instruments/outils de
planification et de gestion durable de ses forêts. Ainsi, des nombreux
conflits fonciers et d'intérêts ont été
enregistrés dans le secteur forestier, principalement entre les
différents groupes d'acteurs (populations locales, peuples autochtones,
agriculteurs, forestiers, conservateurs, miniers, etc.). Par ailleurs, les
forêts ont été soumises à une gestion
aléatoire sans plan d'affectation des terres ni plan
d'aménagement forestier.
2.1. Contexte général
La RDC possède un potentiel forestier important
évalué à 145 millions d'hectares, soit 60 p. cent des
forêts denses humides d'Afrique Centrale ,38 p. cent des forêts
tropicales d'Afrique et
10 p. cent du monde. Ces forêt ont un fort potentiel en
bois d'oeuvre estimé à plus de 10 millions de mètres cubes
par an. Cependant la production annuelle en bois d'oeuvre demeure très
faible, ne dépassant pas 500 000 mètres cubes par an. D'où
la faible contribution du secteur au PIB (1%).
Malgré ces faibles performances, la RDC reste
convaincue que cet important capital forestier doit remplir durablement ses
fonctions (économiques, sociales & culturelles et
écologiques) en faveur du pays et de ses communautés.
La volonté politique de gérer durablement les
forêts en RDC se traduit par la mise en place d'un ensemble de
dispositions législatives, réglementaires et d'actions. La
promulgation de la loi N°011/2002 portant code forestier le 29 août
2002, la revue légale de tous les anciens titres forestiers (65 anciens
titres jugés convertibles sur 156. Ils représentent 9.7 millions
d'hectares contre 22 M.), la mise en place d'un arsenal de textes
réglementaires et le développement des outils d'ADF en sont des
exemples éloquents.
33 Office Nationale des Forêts : orientations
nationales d'Aménagements et de gestion pour les forêts des
collectivités .
http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/pdf/onag_vdef_3_mai.pdf
34 Sébastien MALELE MBALA, Congrès
Forestier Mondial, Buenos Aires, Argentine, 19 au 23 octobre 2009.
Page 28 of 63
2.2. L'aménagement forestier en RDC
Le code forestier pose les bases de l'aménagement
forestier durable en RDC en ces termes :
« Ce régime vise à promouvoir une
gestion rationnelle et durable des ressources forestières de nature
à accroître leur contribution au développement
économique, social et culturel des
générations présentes, tout en préservant les
écosystèmes forestiers et la biodiversité
forestière au profit des générations futures
».
« Il introduit à cet effet deux concepts,
celui d'inventaire forestier et celui d'aménagement forestier pour
assurer le développement durable des ressources naturelles. »
(Article2)
Toute activité de gestion et d'exploitation
forestière est soumise à l'élaboration préalable
d'un plan d'aménagement forestier. (Article
71).
Trois textes réglementaires ont déjà
été pris en faveur de l'aménagement durable des
forêts :
1. l'arrêté n°036 du 05 octobre 2006
, fixant les procédures d'élaboration, d'approbation et de mise
en oeuvre des plans d'aménagement des concessions forestières de
production de bois d'oeuvre.
2. l'arrêté n°035 du 05 octobre 2006
relatif à l'exploitation forestière.
3 .l'arrêté n°034 du 03 juillet 2015,
fixant la procédure d'élaboration, de vérification,
d'approbation, de mise en oeuvre et de suivi du plan d'aménagement d'une
concession forestière de production de bois d'oeuvre. Cet
arrêté vient lutter contre la faiblesse de l'expertise technique
des administrations provinciales en matière d'inventaire et
d'aménagement forestiers et la mise en oeuvre du programme de
renforcement des capacités à l'échelle de la province.
En vue de faciliter l'application de ces arrêtés,
le Ministère en charge des forêts, à travers sa Direction
Inventaire et Aménagement Forestiers (DIAF), et avec l'appui technique
et financier de WWF-RDC, a produit, suivant une approche participative
qui implique toutes les parties prenantes, des guides opérationnels
portant normes d'aménagement durable des forêts de la RDC. Parmi
les guides opérationnels nous retrouvons les normes c'est-à-dire
les règles strictes ou directives (normes de stratification
forestière, normes d'affectation des terres, normes
Page 29 of 63
d'élaboration du plan de sondage de l'inventaire
forestier d'aménagement, normes d'inventaires forestier
d'aménagement, normes d'inventaire d'exploitation forestière
etc.).
Page 30 of 63
Deuxième Partie : La Réception dans les
ordres Juridiques Internes
Les instruments juridiques internationaux ou les normes
internationales se multiplient et entraînent un phénomène
d'internationalisation des droits nationaux, il est intéressant de
découvrir la manière dont les ordres juridiques internes
accueillent le droit international. En effet, bien que la
supériorité de ce droit soit intégralement reconnue au
niveau international, celle-ci est susceptible de demeurer théorique
dans sa mise en oeuvre étatique. La diversité des solutions
nationales rendent impossible une analyse générale. Nous
limiterons, comme évoqué dans le titre de notre mémoire,
à une comparaison entre le Droit Congolais et le Droit
Français.35
Chapitre I : Les modalités d'introduction des
conventions internationales dans les ordres juridiques nationaux
Les normes internationales sont des règles de droit qui
procèdent des accords entre états ou organisations
internationales. Concrètement, elles recouvrent les traités,
conventions ou accords internationaux que l'on qualifie de droits primaires ou
de droits originaires, elles comprennent en deuxième lieu, des actes
dits dérivés qui émanent d'Organisation internationales
que leurs statut investit du pouvoir d'adopter des normes qui s'imposent aux
états.
Section 1.Transposition des normes environnementales
Internationales
L'application d'un traité par un Etat dépend
avant tout de sa ratification, sa transposition et l'efficacité du
contrôle juridictionnel mise en place. En Afrique, la ratification des
conventions est une démarche de longue haleine. De nombreux
traités et conventions traînent à entrer en vigueur faute
de ratification suffisante. La Convention de Bamako de 1991 n'est entrée
en vigueur que le 22 avril 1998 soit sept ans après sa signature alors
que dix ratifications seulement étaient requises. Vingt-deux Etats
seulement sur 53 l'on ratifiée. La convention d'Alger, entrée en
vigueur en 1969, ne comptait au moment de sa révision que 30 parties. Le
Protocole à la Charte africaine des droits de l'Homme et des Peuples
signé à Ouagadougou en juin 1998 n'est
35 Hélène ORBAN, « La
réception du droit international aux Etats-Unis, en France et Belgique :
Etude comparative, Université de Liège, 2007, p1.
Page 31 of 63
entré en vigueur que le 25 janvier 2004. 23 Etats l'on
ratifié. Près de quatre ans après sa signature, la
convention de Maputo ne compte que sept des quinze ratifications requises par
l'article XXXVIII pour son entrée en vigueur. Atteindre cet objectif,
d'après le constat d'Ali Mekouar,36 sera d'autant plus
difficile que le texte révisé n'a pas formellement
été signé à Maputo faute pour les Etats d'avoir
convoqué une conférence diplomatique à cet effet.
D'où la pertinence de sa proposition en faveur d'une démarche
rapide en vue de la signature de cette convention, suivie d'une intensification
de « la campagne de ratification visant à susciter un vaste
mouvement d'adhésion de la part des Etats africains ».
Un des traits les plus marquants des instruments juridiques
internationaux relatifs à la protection de l'environnement est leur
caractère rarement auto-exécutoire, dont la conséquence
est la difficulté pour les tribunaux d'en sanctionner la violation
lorsqu'ils sont mal transposés. Intégrées dans l'ordre
juridique africain, puis national, les normes du droit international de
l'environnement doivent être appliquées à
l'intérieur des Etats. Les juridictions nationales sont censées
jouer un rôle capital qui n'en est qu'à ses balbutiements en
Afrique, pour des raisons plus politiques et économiques que juridiques.
La protection de l'environnement fait figure de parent pauvre des
procédures judicaires dans la plupart des Etats africains comme la
République Démocratiques du Congo.
Il est donc important de créer les conditions
juridiques et législatives qui permettront au droit interne
d'intégrer les obligations internationales auxquelles l'Etat a souscrit.
Ces obligations découlent de normes mais aussi de grands principes qui
fondent les règles du droit international de
l'environnement.37
Si le respect des prescriptions nationales appartient aux
Etats, le souci de la mise en oeuvre du droit international implique
qu'à leur tour les Etats soient soumis à des contrôles et
vérifications. Les « trois fonctions d'injonction, de
contrôle et de sanction » que l'Etat doit assumer pour mettre en
oeuvre une convention internationale doivent être elles-mêmes
sanctionnées puisque l'Etat lui-même peut-être sujet
à des défaillances dans ces trois cas.
La question du contrôle international est
particulièrement délicate.
36 A.M.Mekouar, Le texte révisé de
la convention sur la conservation de la nature et des ressources naturelles :
petite histoire d'une grande rénovation, Études juridiques
de la FAO en ligne, Avril 2006.
37 L.Granier ,V. Zakane ,S.Nguiffo ,R. N. SIME et all.
« Aspects contemporains du droit de l'environnement en Afrique de
l'ouest et centrale », L'intégration et l'harmonisation des
normes de droit international de l'environnement dans le droit
africain,UICN,Droit et politique de l'environnement n 69,2008 pp. 162
- 164
38
Page 32 of 63
Les Etats sont, en effet, « jaloux de leur
souveraineté38 » et n'apprécient guère
l'intervention de tiers. Par ailleurs, l'organisation de contrôles
internationaux peut vite se révéler fort coûteuse, pour une
efficacité pas toujours garantie.
La sanction des manquements constitue également un
sujet complexe concernant aussi bien la réparation que la
répression. Concernant une personne privée, il importe que la
victime du dommage puisse disposer de voies de droit efficaces, ce qui laisse
un rôle primordial à cet égard aux Etats. La
réparation des manquements d'un Etat obéit quant à elle
aux règles générales de la responsabilité
internationale, qui n'offrent pas toujours des procédures
suffisantes.
En France, l'article 55 de la Constitution française,
établit que les traités sont intégrés dans l'ordre
interne du simple fait de leur régulière ratification ou
approbation et de leur publication au journal officiel. En outre, pour certains
traités, l'article 53 rend nécessaire une loi préalable
à la ratification ou l'approbation. Il revient aux juges de
vérifier les conditions cumulatives de l'article 55. Le contrôle
par les juges administratifs et judiciaires de l'existence matérielle de
la publication et de sa régularité est acquis depuis longtemps.
Par contre, en ce qui concerne la procédure de conclusion des
traités, l'examen par les juges se limitait, jusqu'il y a peu, à
l'existence de celle-ci.
En 2001, la chambre civile de la Cour de cassation s'aligne
sur une jurisprudence enclenchée par le Conseil d'Etat quelques
années plus tôt ; celle-ci affirme qu'il appartient au juge de
vérifier également sa régularité. Il convient
également de préciser qu'un grand rôle est confié au
Conseil Constitutionnel. L'article 54 prévoit son éventuelle
intervention préalable pour contrôler, notamment, les conditions
d'applicabilité des traités.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel consacre, sur base de
l'article 55 in fine, une réserve de réciprocité
et celle-ci atténue le caractère internationaliste de la France.
Cette condition stipule qu'un traité n'est pas applicable dans l'ordre
juridique interne si l'autre partie ne l'exécute pas. Les juges se
refusent de contrôler cette exigence, mais les réactions sont
différentes. Alors que la chambre civile de la Cour de Cassation
considère qu'il y a une présomption de réciprocité
quand le gouvernement s'abstient de dénoncer une convention ou de
suspendre son application, sa chambre criminelle et le Conseil d'Etat renvoient
systématiquement l'appréciation de cette condition au Ministre
des affaires étrangères. Cette dernière méthode est
condamnée par la Cour
Page 33 of 63
de Strasbourg en ce que s'en remettre automatiquement à
l'avis du ministre sans le soumettre à la critique ou à un
débat contradictoire viole l'article de la Cour Européenne des
Droits de l'Homme (CEDH)39.
Section 2. Application des normes internationales dans
l'ordre juridique interne
Elles tiennent tout d'abord à la nature juridique
variable des normes internationales. Car, si la positivité d'une
obligation d'origine conventionnelle ou même coutumière est
accueillie par le droit, ce n'est pas le cas de toutes les sources de
réglementation.
L'exemple d'Agenda 21, ambitieux programme d'action de la
conférence de Rio, est frappant, puisque l'on considère
généralement que l'ONU est liée par ce programme et doit
donc intégrer ses principes d'action dans ses propres programmes
sectoriels, sans pour autant que l'on puisse affirmer que l'agenda 21 engendre
des obligations positives pour les Etats.
Pourtant, les Etats le mettent volontiers en oeuvre par
l'adoption de programmes au niveau régional et local, ainsi que par la
participation à des arrangements financiers internationaux pour le
transfert de fond ou de technologies. Néanmoins, on ne peut pas dire
qu'un Etat qui se refuserait à accompagner ce mouvement violerait le
droit.
Ensuite, les obligations internationales disposent d'un
degré de précision pour le moins variable.
« Les conventions internationales ratifiées par
les Etats lient les autorités publiques, mais le plus souvent ne
produisent pas d'effets directs vis-à-vis des ressortissants de ces
Etats ». Pour ce faire, elles doivent être introduites dans l'ordre
interne des Etats parties (accompagnées des décrets
d'applications nécessaires, et de l'action administrative
adéquate).
Il s'agira également d'assurer la recherche
indispensable au principe de précaution, notamment par la surveillance
continue (ou monitoring, imposé par plusieurs conventions
internationales) visant à observer de manière systématique
et régulière l'état de l'environnement et ses
altérations à l'intérieur des différents Etats.
Ainsi, la récolte d'informations et la comparaison des données
entre Etats mais également avant et après la mise en place de
mesures de protection sont envisagées, cette évaluation ex post
pouvant déboucher sur la reformulation de politiques pertinentes.
39 Cour Européenne des Droits de l'Homme,
Chevrol c. France ,13 mai 2003, requête n°49636,
§§78-84
Page 34 of 63
Enfin, les textes et les conventions internationales ont admis
depuis longtemps l'information et la participation du public à la mise
en oeuvre des décisions environnementales comme moyen indispensable
d'effectivité. Il incombera donc aux pouvoirs publics d'organiser cette
transmission d'information (dont le contenu est souvent précisé
dans l'accord lui-même) et cette participation.
Chapitre II : Le niveau d'intégration
juridique
Dans le monde, divers modèles d'intégration dans
la gestion des forêts existent. Ces modèles sont encadrés
par les lois nationales et leurs textes d'application qui offrent des
possibilités, plus ou moins importantes, aux communautés locales
et peuples autochtones d'exercer des pouvoirs décisionnels concernant la
gestion des ressources forestières situées sur les terres qu'ils
utilisent et/ou occupent traditionnellement.
En considérant les particularités liées
au niveau d'intégration des législations forestières
internationales, il est préférable de répartir notre
étude en deux points : l'encadrement juridique des forêts (section
1) et en second lieu, la faiblesse de la mise en oeuvre du Droit forestier en
République Démocratique du Congo (section 2).
Section 1.L'encadrement juridique des forêts ou
Droit de la gestion des forêts
L'encadrement juridique des forêts régit les
bois, les forêts et les biens assimilés.40 En France,
l'encadrement juridique forestier est contenu dans sa quasi-totalité
dans le Code forestier. Le droit forestier étant fondé sur le
droit de propriété, le droit français connait une
distinction en matière forestière entre la
propriété publique et la propriété privée.
Cette distinction est à l'origine de la structure du droit forestier
français. La propriété forestière publique
relève du « régime forestier » tandis que la
propriété forestière privée relève d'un
droit de gestion de la forêt privée.41
« Le Régime forestier est l'ensemble des
règles de gestion définies par le Code forestier et mises en
oeuvre par l'Office national des forêts (ONF). Il est applicable au
forêts appartenant à l'Etat, aux collectivités
territoriales ou à des établissements publics et d'utilité
publique ». Il est un ensemble de garanties permettant de
préserver la forêt sur le long terme forestier : il constitue
40 Ils peuvent être des terrains à
boiser ou d'autres biens précisés par le Code forestier
(législations spéciales pour la lutte contre les incendies, le
défrichement, la restauration des terrains de montagne, etc.)
41 Lionel DORVEAUX, Le régime juridique
de la forêt : état du droit applicable à la forêt en
France et état du droit forestier luxembourgeois, Université
de Lorraine, Juillet 2014.
Page 35 of 63
un véritable statut de protection du patrimoine
forestier contre les aliénations, les défrichements, les
dégradations, les surexploitations et les abus de jouissance. C'est
aussi un régime de gestion , avec un souci de renouvellement des
ressources en bois , des autres produits et services fournis par les
forêts , et de transmission aux générations futures de ces
ressources .Ces objectifs se matérialisent au travers de «
l'aménagement forestier. » 42
Plus concrètement le Régime forestier se traduit
par43 :
? des responsabilités :
préserver le patrimoine forestier, appliquer
l'aménagement forestier, vendre les bois conformément aux
récoltes programmées, réaliser les travaux d'entretien et
de renouvellement...
? des obligations : approuver un plan de
gestion "l'aménagement forestier", donner une importance
particulière à l'accueil du public, prendre les décisions
nécessaires pour assurer un équilibre entre la faune et la flore
;
? un partenariat avec l'ONF, gestionnaire
unique, qui assure la mise en oeuvre du Régime
forestier aux côtés de la Municipalité.
L'ONF peut aussi, au-delà du Régime forestier, proposer ses
services pour tous travaux et prestations en faveur de la forêt communale
;
? une aide financière de l'Etat : le
financement du Régime forestier est assuré à 85% par le
"versement compensateur" de l'Etat, versé à l'ONF en
complément des "frais de garderie" (15% environ) payés par les
communes (sur la base des recettes tirées de leur forêt).
La gestion des forêts privées se fait de deux
manières : soit le propriétaire forestier privé fait
approuver un régime de Plan Simple de Gestion, soit il est soumis
à la réglementation des coupes.
42 Office national des forêts, Un seul
régime pour toutes les forêts publiques : le Régime
forestier,
http://www.onf.fr/communes_forestieres/sommaire/reperes/regime_forestier/20080924-130648-696132/@@index.html
43 Idem
Page 36 of 63
En outre, un privé peut confier la gestion de sa
forêt à l'Office national des forêts, sous conditions
fixées contractuellement. Le Plan Simple de Gestion est un outil
pratique permettant de mieux connaitre son bois ou sa forêt, de
définir des objectifs et faciliter les choix et décisions
à prendre, de prévoir un programme précis de coupes et
travaux, d'établir un bilan périodique etc.44. Quant
à la Réglementation des coupes, il y a lieu de noter une
observation : que cela soit pour l'autoconsommation (bois de chauffage), pour
exploiter du bois d'oeuvre, pour des raisons sanitaires, ou encore pour ouvrir
une emprise..., une coupe de bois n'est pas un acte anodin.
La réglementation en la matière n'est pas
simple, bien que relevant principalement du code forestier, d'autres
légalisations viennent s'y greffer comme le code de l'environnement, le
code du patrimoine, le code de l'urbanisme etc.
En République Démocratique du Congo,
l'encadrement juridique de la forêt date de l'époque coloniale,
sous l'administration belge45. Au départ, il s'agissait
d'organiser les prélèvements de bois par firmes coloniales, dans
le but de satisfaire la consommation de la métropole. Le droit forestier
était alors fortement marqué du sceau de sa finalité
économique, que seules tempéraient les variantes dans la
politique des puissances de l'époque. Après son accession
à l'indépendance, à l'instar des autres pays de l'Afrique
francophone, le nouvel Etat s'est doté d'une législation
reproduisant le schéma colonial, insistant sur l'exploitation
industrielle du bois, l'encadrement strict des usages locaux, et la protection
de la faune.
A partir de la fin de la décennie 80, la
République Démocratique du Congo, à l'instar des autres
pays forestiers d'Afrique centrale, a connu une crise financière
sévère accentuée par la baisse des cours des principales
matières premières agricoles46. Elle n'a dès
lors eu d'autres choix que de se soumettre aux programmes d'ajustement
structurel, qui ont déterminé les dynamiques de réforme de
l'ensemble des secteurs productifs. L'euphorie créée par le
contexte du Sommet de Rio a servi de toile de fond aux réformes, en les
adaptant aux préoccupations environnementales véhiculées
par les textes politiques et juridiques issus du sommet. Il en est
résulté des réaménagements institutionnels et
normatifs importants dans le pays, notamment la création du
ministère de l'Environnement, l'adoption d'un plan national de gestion
de l'environnement, et la réforme des textes relatifs à la
gestion des ressources naturelles. Les législations
forestières
44 Le portail de la Forêt privée,
https://www.foretpriveefrancaise.com/n/le-plan-simple-de-gestion/n:147
45 Arbo centre : réseau des professionnels du
bois
http://www.arbocentre.asso.fr/uploads/foret/Fiches%20des%20bonnes%20pratiques/Fiche%201%20-%20Reglementation%20des%20coupes.pdf
46
Page 37 of 63
des pays francophones ont également été
révisées dans le cadre de ce mouvement général,
réalisé avec l'appui financier et technique d'institutions
internationales.47
Section 2.Faiblesse de la mise en oeuvre du droit
forestier en République Démocratique du CONGO
La faiblesse de mise en oeuvre des textes est l'une des
principales leçons de la décennie postérieure à la
réforme du droit forestier en Afrique centrale en général
et en RDC en particulier. Elle a fortement entravé la contribution du
droit à la promotion de la durabilité dans la gestion des
écosystèmes forestiers du Bassin du Congo. Les forêts sont
ainsi devenues, dans tous les pays d'Afrique centrale,
l'écosystème bénéficiant du meilleur encadrement
juridique, en termes quantitatifs48. Cette abondance des textes ne
s'est cependant pas traduite par une meilleure gestion des forêts, en
raison, à la fois de l'applicabilité de la norme, et du contexte
de son application.
Les difficultés d'application des textes de droit
forestier dans les pays d'Afrique francophone sont dues à trois raisons
essentielles : leur déficit de légitimité, leur
caractère incomplet, et l'imprécision des normes.
La réforme intervient dans un contexte de crise
financière et politique dans les Etats d'Afrique centrale, marqué
par un net recul de l'Etat, qui se désengage de nombreux secteurs non
productifs, et limite ses investissements sociaux dans les zones rurales. Le
recours des populations aux produits de la forêt comme source alternative
ou principale de revenue s'est alors accru, et la répression des
services compétents de l'Etat a été d'autant plus mal
acceptée que les normes du nouveau droit sont en décalage total
avec les normes coutumières, sur des questions centrales telles que la
propriété, la gestion etc.
Si l'on constate une amélioration au niveau du discours
et des textes, cela n'a pour ainsi dire aucun impact sur les
réalités que vivent les femmes ou les peuples autochtones.
Certes, le nouveau cadre légal et régulateur offre des occasions
d'améliorer le bien-être des populations locales dans un esprit de
gestion durable, mais il reste des obstacles majeurs. En effet, du moins pour
le moment, ces mécanismes de contrôle n'empêchent pas les
exploitants de poursuivre les
47 Ces processus de réforme ont
été conduits sous l'impulsion ou avec l'appui d'institutions
telles que la Banque mondiale, le Programme des Nations Unies pour
l'Environnement (PNUE) et le Programme des Nations Unies pour le
Développement (PNUD), auxquels se sont parfois associés de
nombreuses agences de coopération bilatérale.
Page 38 of 63
pratiques de corruption qui caractérisaient le secteur
dans le passé (Greenpeace, 2007). Les mécanismes de
contrôle administratif, logistique et institutionnel sont largement
insuffisants. Comme l'ont notamment montré les rapports des experts
chargés par le Conseil de sécurité d'enquêter sur
l'exploitation illégale des ressources congolaises, élites
politiques et exploitants se partagent les profits sans se soucier ni des
populations, ni de l'environnement. 49D'autre part, ces
mécanismes représentent certes une avancée, mais leur
rôle réel n'est pas évident. Même s'ils jouissent
d'une visibilité et d'une crédibilité internationale, ils
n'émettent que des recommandations, dont l'application n'est pas
obligatoire. Sans doute est-il soucieux de se conformer à des normes
élevées en matière de respect des procédures et de
transparence, mais la décision d'octroyer des concessions reviendra
à une commission interministérielle congolaise, laquelle sera
constituée de membres issus de divers ministères, de la
société civile, des communautés locales et du secteur
privé. Cette diversité pourrait parvenir à limiter les
risques de corruption mais, compte tenu des enjeux, elle n'y parviendra sans
doute pas.
La gestion forestière participative des ressources
forestières en Afrique Centrale se heurte, en fait, à
d'énormes difficultés, qu'elles soient d'ordre technique,
organisationnel, financier ou politique. Au niveau du dispositif technique la
gestion doit faire face à l'absence d'un plan de zonage forestier, ce
qui constitue un défi considérable car cet outil
d'aménagement du territoire a comme objectif la définition d'une
stratégie qui distingue les espaces voués à
l'aménagement forestier durable sous le régime des concessions ,
le développement rural et la conservation de la nature via un
réseau d'aires protégées national . L'application du Code
forestier est sérieusement handicapée par les faiblesses de la
société civile congolaise. Certes, le nombre d'associations
issues de la société civile a explosé au Congo au
début des années 1990, et les ONG locales et internationales et
des réseaux de solidarité communautaires sont devenus des
composantes vitales des stratégies de mise en oeuvre par les populations
pour remplacer l'Etat dans de nombreux domaines de la vie
publique50. Mais cette inflation de la société civile
remet en cause la réforme foncière elle-même : ce pilier
fondamental n'a finalement pas encore été sérieusement
abordé. La lutte pour le pourvoir et l'accès aux ressources se
déroule entre autorités traditionnelles et agents de l'Etat, et
prend souvent la forme de conflits concernant les droits sur des territoires et
de marchandages dans et aux alentours des concessions forestières.
49 Th. TREFON, « La Réforme du
secteur forestier en République Démocratique du Congo :
Défis sociaux et Faiblesses institutionnelles », De Boeck
Supérieur, Afrique contemporaine, 2008/3 n° 227, pp.85-89
50 Le phénomène de remplacement de
l'Etat par la société civile et les ONG a pris de l'ampleur en
raison de la crise du pays, obligeant la population à inventer de
nouveaux mécanismes de survie en dehors de l'Etat (Trefon, 2004)
Page 39 of 63
Le processus de négociation est d'autant plus
compliqué que d'autres acteurs de la société civile
représentants des Eglises de tous bords, membres d'ONG et experts
internationaux en développement, sont devenus omniprésents sans
devenir des acteurs de poids.51
Même localement, les communautés sont
traversées par des tensions, des méfiances, des jalousies, des
conflits et des trahisons qui rendent, aujourd'hui du moins, une gestion
participative utopique.52
Le contexte institutionnel actuel, par son foisonnement d'acteurs
et par la tension permanente entre l'Etat central et les communautés
locales, continue d'être un système hybride, aggravé par la
situation d'un Etat en faillite et d'une crise économique.
51 Selon la législation de la RDC, le sol et
le sous-sol appartient à l'Etat et la loi Bakajika de 1966 autorise
à l'Etat à revendiquer l'entière souveraineté sur
les questions foncières, y compris l'octroi des concessions agricoles
forestières et minières .Mais une autre logique est
revendiquée par les populations rurales, qui considèrent
être les vrais propriétaires fonciers sur la base de leurs droits
ancestraux. Ces populations affirment être les gardiennes de la Terre,
créant ainsi un lien cosmique entre leurs ancêtres et les
générations futures .A leurs, la loi Bakajika n'est rien d'autre
qu'une fiction conçue par les autorités politiques.
52 Arnoldussen et al. , Projet GEPAC (Gestion
participative en Afrique centrale)
2008.www.ulb.ac.be
/socio/anthropo/Gepac/
Page 40 of 63
Troisième Partie : L'effectivité de la
gouvernance forestière
L'effectivité des accords internationaux sur
l'environnement demeure un des principaux défis posés à la
gouvernance mondiale. S'ils se conformaient aux processus classiques de
régulation, fondés sur la somme des intérêts
particuliers d'Etats souverains, les accords internationaux sur l'environnement
seraient peu nombreux et surtout très peu efficaces53.
Pour être effective au sens anglais, les normes
du droit international de l'environnement doivent répondre à une
double condition d'efficacité et d'effectivité. Mais
l'effectiveness du droit international de l'environnement rencontre
des difficultés : les unes, d'ordre général, tiennent aux
spécificités du droit international ; les autres, d'ordre
particulier, tiennent au champ de l'environnement54.
Si l'on s'en tient au seul plan conventionnel, pour que les
normes posées soient concrètement réalisées, encore
faut-il que les conventions répondent à une double condition :
être efficaces et effectives.
Avec C. de Visscher, on peut tenir pour efficaces les
dispositions d'un acte international (...) quand, considérées en
elles-mêmes, elles sont en adéquation aux fins proposées
». Cette première condition n'est pas aisément remplie dans
le domaine de l'environnement. Par manque de connaissance ou par défaut
de consensus, les objectifs environnementaux à atteindre ou les
méthodes à suivre sont peu clairement formulés. Ce niveau
de réflexion mène hors des frontières du droit, dès
lors qu'il s'agit de répondre, à partir d'une analyse
substantielle, à la question : la qualité de l'environnement ou
l'état de la ressource peuvent-ils être améliorés
grâce au régime ou au traité ? Encore faut-il
connaître les besoins de l'environnement ou de la ressource et être
en mesure de les combler, ce qui s'avère plus ou moins facile selon les
cas.
Ensuite, les normes doivent être effectives, car
l'efficacité d'un instrument international ne préjuge pas de son
effectivité.
Avec C.de Vischer, on peut tenir pour effectives les
dispositions d'un traité « selon qu'elles se seront
révélées capables ou non de déterminer chez les
intéressées les comportements
53 S.MALJEAN-Dubois, La mise en oeuvre du droit
international de l'environnement, IDDRI, Analyse de la Gouvernance,
n°3, 2003, p 5.
54 Idem P 22.
Page 41 of 63
recherchés ». Or, la remarque d'ordre
général de cet auteur selon laquelle « trop (de
traités) dotés d'une efficacité certaine et pourvus
d'adhésion nominales nombreuses restent démunis
d'effectivité » s'applique bien au droit international de
l'environnement. Si les progrès de la coopération internationale
sont notables (encore faut-il que les instruments entrent en vigueur rapidement
et reçoivent une participation large et adaptée à leur
objet), l'application nationale, notamment par la transcription des normes
internationales dans les droits internes, demeure insuffisante. La plupart des
obligations ne sont pas auto-exécutoires ; de plus les mécanismes
classiques de réaction à la violation substantielle d'une
obligation conventionnelle sont mal adaptés lorsque l'obligation
constitue un engagement unilatéral, exempt de réciprocité.
Cela contribue à rendre difficile la mise en oeuvre des règles
posées.55
A priori, si ces deux conditions -efficacité et
effectivité-sont remplies, in fine la qualité de
l'environnement ou l'état de la ressource sera amélioré
grâce au régime ou traité
(problem-solving56).Le régime ou traité est
alors effective au sens anglais ; l'effectiveness couvrant
ces deux aspects57. L'effectiveness of est analysée
comme l' «impact of a given international institutional terms of
problem-solving or achieving its policy objectives58».
Outre le caractère polysémique du terme, l'évaluation
de l'effectiveness n'est toutefois pas aisée en raison de la
complexité de systèmes sociaux et de systèmes
écologiques en perpétuelle évolution, mais aussi de la
difficulté d'établir un lien de causalité entre la mesure
de politique internationale et le résultat observé59.
La chaîne d'action reliant les régimes, les politiques, les
personnes à l'environnement naturel est complexe et incertaine,
discontinue. Certains succès politiques ne sont pas conjugués
avec des réussites sur le plan environnemental. Des indicateurs
adéquats de cette effectivité font encore défaut.
55 Idem P23.
56 Kehoane Robert O. et al. 1993. The effectiveness of
International Environmental Institutions. In Institutions for the Earth-Sources
of effective international environmental protection, Peter M. Haas et al. Eds.,
Cambridge, MIT Press, p. 7.
57 Selon la définition de Hasenclever et al.
« A regime is effective to the extent that it achieves the objectives or
purposes for which it was intended and to the extent that its members abide by
its norms and rules ». Interests, power, knowledge: the study of
international regimes. International Studies Review, 1996, 40, pp. 177-228.
58 A distinguer de implementation of « process
of putting international rules into legal and administrative practice i.e.
incorporating them into domestic law, providing administrative infrastructure
and resources necessary to put the rule into practice, and instituting
effective monitoring and enforcement mechanisms, both internationally and
domestically » et de compliance with « rule-consistent behavior, i.e.
`state of conformity or identity between an actor's behavior and a specified
rule' », selon T. Risse, Rational choice, constructivism and the study of
international institutions, précité.
59 Konrad Von Moltke, 2000. Research on the
effectiveness of international environmental agreements: lessons for policy
makers. Paper prepared for the Final Conference of the EU Concerted Action on
Regime Effectiveness, IDEC, 9-12 novembre, Barcelona, pp. 4-5.
Page 42 of 63
L'effectiveness est multidimensionnelle. Le
régime pourra être jugé effective s'il :
? assure la protection de l'environnement ;
? conduit au respect des règles et standards posés
;
? conduit à la modification souhaitée du
comportement humain ;
? est transposé aux différents niveaux
institutionnels (régional, national, local) par
l'adoption de lois, règlements et la conduite de certaines
activités administratives ;
? a un impact à travers sa seule existence,
indépendamment de l'adoption de mesures
spécifiques.
Or, rares sont les régimes qui réunissent toutes
ces dimensions. Cela n'est possible que lorsque les problèmes
environnementaux sont bien délimités et bien compris, et que les
changements économiques et sociaux requis sont réduits. Le plus
souvent, un régime n'est effective qu'au regard de l'une ou l'autre de
ces dimensions.
Page 43 of 63
Chapitre I : La gestion durable des forêts
L'Assemblée générale des Nations Unies
définit la gestion durable des forêts (GDF) comme un «
concept dynamique et en évolution, qui vise à maintenir et
à renforcer les valeurs économiques, sociales et
écologiques de tous les types de forêts, pour le bien des
générations présentes et futures »60.
Le concept de GDF englobe à la fois les forêts naturelles et
plantées dans toutes les régions géographiques et les
zones climatiques, et toutes les fonctions des forêts,
gérées en vue de leur préservation, de leur production ou
d'objectifs multiples afin d'offrir un éventail de biens et services que
fournissent les écosystèmes forestiers au niveau local, national,
régional et mondial.
La gouvernance influe largement sur l'utilisation durable,
efficace et équitable des ressources forestières et la
réalisation des objectifs de développement. Améliorer la
gouvernance forestière requiert une approche globale permettant
d'identifier des défaillances, de concevoir et de mettre en oeuvre des
réponses adéquates. La gestion durable des ressources
forestières revêt une importance cruciale aussi bien pour les
populations rurales que le pour le gouvernement et la communauté
internationale .Elle est importante pour la promotion du bien-être
socio-économique et la protection de la biodiversité et
essentielle pour lutter contre le changement climatique. Elle pourrait
également représenter une source potentielle non
négligeable des recettes nationales.
Section 1. Coopération entre la France et la
République Démocratique du Congo sur la gestion durable des
forêts
Comme évoqué au début de ce chapitre, la
gestion durable de la forêt vise à assurer un équilibre
vertueux entre trois piliers fondamentaux : l'économie, le social et
l'environnement. Ainsi, l'aménagement forestier permet de concilier la
mise en valeur économique de la forêt, le développement
socio-économique des populations riveraines, la protection des
ressources naturelles renouvelables mais fragiles et la conservation d'espaces
ou espèces à haute valeur de conservation. Si la RDC a su
profiter de l'expérience des autres pays de la sous-région qui se
sont lancés depuis les années 90 dans l'aménagement
forestier, elle enregistre encore un certain retard, du fait d'un
démarrage plus tardif de ce processus mais aussi des difficultés
que connait
60 Assemblée générale des
Nations Unies (2008). Instrument non juridiquement contraignant mais faisant
autorité sur tous les types de forêts. Assemblée
générale des N .U. Soixante-deuxième session,
Deuxième comité point 54 de l'ordre du jour. A /RES/62/98.31
janvier 2008.
Page 44 of 63
la filière.61 Ce n'est qu'en 2001 , que la
RDC s'est engagée dans une redéfinition de sa politique
forestière qui vise notamment la gestion durable des forêts de
production à travers la mise en oeuvre des plans d'aménagement
des concessions exploitées de manières industrielle et la
diffusion de la certification. Deux documents fondateurs ont été
produits à cet effet :
? L'agenda prioritaire pour la relance du secteur forestier
destiné à assainir l'héritage du passé et à
réguler la relance de la filière bois ;
? La loi de 2002 portant code forestier pour la promotion
d'une gestion rationnelle et durable des ressources forestières de
nature à accroitre leur contribution au développement
économique et social, tout en préservant les
écosystèmes forestiers et la biodiversité .
La RDC a également profité de
l'expérience de la France dans la gestion durable des forêts, elle
a avec l'aide de l'Agence Française de Développement (AFD) mis en
place le projet d'Appui à la Gestion Durable des Forêts
(AGEDUFOR). Ce projet vise à apporter une contribution à la
gestion durable des forêts de production de bois d'oeuvre, à
travers l'appui à la mise en place de l'aménagement forestier. Il
bénéficie de l'assistance technique d'un groupement de bureaux
d'études français regroupant des compétences en
ingénierie forestière, en certification et en formation
professionnelle. Ce projet intervient, entre autres, en appui au
Ministère de l'Environnement et Développement Durable et
principalement, au cours de sa première phase, à la Direction des
Inventaires et Aménagement Forestiers et aux coordinations provinciales
de l'environnement des trois principales provinces forestières :
Orientale, Equateur et Bandundu. Les objectifs spécifiques et les
principaux résultats atteints par le projet au cours de sa
première phase ont été :
? Le renforcement des capacités de l'administration
forestière,
? Le renforcement des capacités des sociétés
forestières,
? L'amélioration du cadre institutionnel de gestion
durable des forêts.
En conclusion, le projet a accompagné l'administration
forestière dans le processus de conversion des 81 titres forestiers
jugés convertibles jusqu'à la signature de 57 contrats de
61 Ministère de l'Environnement
Développement Durable, Vers une gestion durable des forêts de
la RDC, AGEDUFOR, Mai 2015 www .oeade-breche.fr
Page 45 of 63
concession forestière. Il a mis à la disposition
des outils techniques et le savoir-faire leur permettant de mener à bien
leurs tâches respectives dans le cadre du processus de conversion et de
démarrage de la phase d'élaboration et de mise en oeuvre des
plans d'aménagement.
Section 2. FLEGT (forest law enforcement, governance
and trade)62
FLEGT signifie application des réglementations
forestières, gouvernance et échanges commerciaux. Le FLEGT est
une initiative lancée par l'UE pour répondre à
l'inquiétude suscitée dans le monde par les impacts
négatifs de l'exploitation forestière et du commerce de bois
illégaux.
L'Union européenne a adopté le Plan d'action
FLEGT en 2003. Sa finalité est d'améliorer la gouvernance et de
réduire l'exploitation forestière illégale en
renforçant la gestion légale des forêts, en
améliorant la gouvernance et en favorisant le commerce de bois d'origine
légale. Les mesures du Plan d'action sont destinées à
augmenter tant la demande que l'offre de bois légal.
2.1 Mesures liées à la consommation
Les mesures suivantes du Plan d'action FLEGT visent à
augmenter la demande des consommateurs en bois produit de manière
légale et vérifié comme tel:
· encourager l'adoption par les entreprises
privées de l'UE de politiques d'achat visant à garantir que seul
du bois légal n'entre dans les chaînes d'approvisionnement ;
· encourager les pays de l'UE à adopter des
politiques des marchés publics exigeant que tous les achats de bois
soient vérifiés comme légaux ;
· empêcher le bois illégal d'être mis
en marché dans l'UE par l'application du Règlement de l'UE dans
le domaine du bois ;
· prendre des mesures pour empêcher les
investissements dans des activités favorisant l'exploitation
forestière illégale.
2.2 Mesures liées à la consommation
Le Plan d'action contient les mesures suivantes qui sont
destinées à aider les pays en développement à
renforcer leurs capacités de fournir du bois produit de manière
légale:
62
https://ec.europa.eu
Page 46 of 63
· apporter un soutien technique et financier de la part
de l'UE en vue d'améliorer la gouvernance et de renforcer les
capacités des acteurs publics et non gouvernementaux;
· soutenir les pays producteurs de bois qui s'emploient
à lutter contre l'exploitation forestière illégale, en
empêchant la mise en marché dans l'UE de bois illégal
grâce à des accords commerciaux bilatéraux appelés
Accords de partenariat volontaires (APV)63. Les APV sont un
élément clé du Plan d'action de l'UE de 2003 relatif
à l'application des réglementations forestières, à
la gouvernance et aux échanges commerciaux (FLEGT) visant à
enrayer l'exploitation forestière illégale. Chaque APV est un
accord commercial bilatéral négocié entre l'UE et un pays
exportateur de bois situé en dehors de l'UE. Si les parties de l'APV
nouent cet accord de leur plein gré, celui-ci devient juridiquement
contraignant dès sa ratification par chacune des parties. Le but d'un
APV est de faire en sorte que les bois et produit bois en provenance d'un pays
partenaire, qui sont importés par l'UE soient conformes aux lois de ce
pays.
Pour ce faire, les pays partenaires doivent déterminer
en premier lieu les éléments du cadre juridique national qui
serviront à définir la légalité au sein de l'APV.
Ils doivent également disposer d'un système visant à
garantir la conformité légale et à délivrer les
autorisations FLEGT qui accompagneront les produits légaux, ce
système devant être décrit dans le texte et les annexes de
l'APV.
Le système de vérification de la
légalité du bois lié à un APV doit aussi faire
l'objet d'une vérification indépendante pour s'assurer qu'il
fonctionne conformément à la description qui en est
donnée. En vertu du Règlement sur le bois de l'UE, les produits
accompagnés d'autorisations FLEGT peuvent accéder de plein droit
au marché de l'UE. En revanche, les importateurs doivent faire preuve de
diligence raisonnée pour prouver le caractère légal des
produits bois non pourvus d'autorisations FLEGT.
63 Les APV sont des accords commerciaux bilatéraux
entre l'UE et un pays exportateur de bois. Un pays ayant conclu APV avec l'UE
est appelé pays partenaire. Les APV sont un mécanisme de
marché destiné à favoriser l'amélioration de la
gouvernance forestière. Les parties s'engagent dans l'accord à
entreprendre des actions visant à mettre un terme au commerce de bois
illégal. L'élément essentiel de l'APV est
l'élaboration et la mise en place par le pays partenaire d'un
régime d'autorisation relatif au bois .Toutes les exportations de bois
vers l'UE doivent être conformes aux exigences de ce régime.
64 Simon COUNSELL, « Gouvernance
Forestière en République Démocratique du Congo
», le point de vue d'une ONG, FERN, mai 2006, pp 22-25.
Page 47 of 63
Chapitre II : Conservation des Forêts : poids
des acteurs locaux sur les questions relatives à la gouvernance
forestière
En Droit International de l'Environnement, différents
sujets ou acteurs interagissent sur les questions relatives à la
conservation et la gouvernance forestière au niveau local. Au niveau
local ou national, ces acteurs peuvent être les collectivités
territoriales, l'administration nationale, les ONG ainsi que les juridictions
nationales à travers en particulier l'application du droit.
Dans cette étude nous allons nous limiter à
l'étude du poids des autorités locales ainsi qu'à ceux des
ONG sur la question.
Section 1. Le rôle des acteurs locaux sur les
questions relatives à la gouvernance forestière64
En RDC, le secteur privé semble avoir eu peu
d'influence sur l'élaboration du Code, et n'avait probablement pas
connaissance de son existence jusqu'à une époque relativement
récente. L'industrie forestière s'oppose à certains
éléments du Code et réclame actuellement qu'il soit revu
et corrigé. On sait toutefois que le secteur privé a joué
un rôle plus proactif dans l'élaboration et la mise en oeuvre des
décrets d'application. Tous les projets de décrets sont
censés être revus et approuvés par un « Comité
de pilotage » formé de fonctionnaires gouvernementaux, de
représentants du secteur privé, d'ONG et de conseillers
spéciaux, pour ensuite être envoyés au ministre ou au
président pour leur approbation finale. Cependant, après avoir
approuvé quelques-uns des décrets de base nécessaires
à l'attribution de concessions industrielles jusqu'au début de
2004, le Comité a pratiquement cessé de se réunir et les
membres du secteur privé refusent de continuer à examiner les
textes des projets de décret. L'élaboration de politiques a ainsi
été littéralement bloquée pendant la majeure partie
des deux dernières années.
Bien que l'élaboration de politiques soit
entravée ou carrément bloquée, le secteur privé
réussit de toute évidence à convaincre le gouvernement
d'attribuer des parties de forêts aux fins d'exploitation. La Banque
mondiale a constaté les « demandes pressantes »
adressées au gouvernement par des investisseurs étrangers qui
sont prêts à commencer à opérer en RDC.
Page 48 of 63
Cette obstruction et ces pressions semblent avoir
été provoquées pour la plupart par les changements
apportés avec l'appui de la Banque mondiale au régime fiscal
forestier, lequel est en soi une partie importante de la politique
forestière du gouvernement, Par exemple, en 2002, la taxe de superficie
était de 0.00143 $ par hectare, ce qui signifie qu'une « concession
» de 200,000 hectares n'apporterait au gouvernement que 286 $ par
année en revenus provenant des taxes de superficie.50 La Banque a fait
pression sur le gouvernement congolais pour qu'il augmente substantiellement
ces taxes, recommandant vivement de les porter à 0.50 $ par hectare par
an (ce qui est encore bas par rapport au reste de la région et
très bas par rapport au reste du monde).
Bien que le gouvernement y ait d'abord consenti, l'industrie
forestière s'est farouchement opposée à ces changements et
a réussi à convaincre le gouvernement d'introduire graduellement
les taxes de superficie, et de faire en sorte qu'elles ne s'appliquent
qu'à un quart de la zone de « concession ». La taxe est
actuellement de 0.20 $ par hectare.
De la même façon, l'Office national des
transports, ONATRA, s'est vivement opposé à tout changement dans
les systèmes (para)fiscaux par lesquels il perçoit une partie
substantielle du total des revenus forestiers grâce à une taxe sur
le transport fluvial du bois. Pour ce qui est de l'ensemble des réformes
fiscales proposées par la Banque mondiale, celle-ci signale que,
à la suite d'un décret publié en mars 2004, le
gouvernement congolais a « commencé à appliquer la nouvelle
taxe forestière, mais aucune des mesures visant à réduire
le fardeau fiscal n'a été mise à exécution. ONATRA
n'a pas non plus réduit ses tarifs de transit. » Toutes ces
oppositions ont eu pour effet de bloquer littéralement la réforme
de la politique fiscale du secteur forestier.
La société civile n'a eu jusqu'à
maintenant qu'une influence extrêmement limitée sur les politique
forestière. Il n'y a eu aucune consultation auprès des ONG
nationales pendant la préparation du Code forestier, quoiqu'il y ait pu
y avoir une consultation restreinte auprès de groupes de conservation
internationaux, tel que WWF et la Wildlife Conservation au sein du
Comité de pilotage qui examine les projets de décret, le
Comité ne s'est pas vraiment réuni depuis que d'autres ONG s'y
sont intégrées. On peut déduire de ce qui
précède que le gouvernement s'était appuyé presque
entièrement sur les « conseils », le soutien et les
encouragements apportés par des organismes de l'extérieur,
particulièrement la Banque mondiale, pour la modernisation de sa
structure de politique forestière. La Banque, la FAO et,
Page 49 of 63
dans une moindre mesure, des ONG telles que WWF ont
apporté un « soutien technique » à l'élaboration
du Code et des quelques décrets d'applications qui ont suivi. Ceux-ci
n'auraient presque certainement jamais vu le jour n'eût été
des interventions internationales.
Ceci s'inscrit dans un contexte historique ou l'exploitation
du bois d'oeuvre, de même que tous les autres secteurs
économiques, était essentiellement utilisée par les
élites politiques pour accumuler des richesses et du prestige personnels
et comme une « unité monétaire » importante dans les
systèmes de clientélisme politique.
Comme il est mentionné dans un rapport produit pour
USAID :
« Ce n'est pas un hasard si aucun effort n'a
été fait pour jeter les fondements d'un système de lutte
contre la corruption et les procédés de financement illicites en
RDC .L'histoire de la RDC est marquée par les aspirations des dirigeants
à détenir et conserver le monopole du pouvoir. Dans la pratique,
les revenus provenant de pots-de-vin sont venus arrondir de façon
régulière et substantielle les salaires des fonctionnaires de la
RDC .Actuellement, l'administration présidentielle, le Conseil des
ministres, les gouverneurs provinciaux, ainsi que l'administration locale et
régionale sont quelques-unes des entités gouvernementales
corrompues65. »
L'étude signale également que :
« Le danger qui plane actuellement sur les
forêts de la RDC réside dans la faible gouvernance,
c'est-à-dire, la probabilité que le gouvernement soit incapable
de bien réglementer l'accès aux ressources forestières et,
une fois les concessions octroyées, de contrôler l'exploitation
à l'intérieur de celles-ci afin de s'assurer que les limites des
concessions sont respectées. Le fait que le gouvernement n'ait
pas la capacité ou la volonté de contrôler les
concessionnaires forestiers locaux ou étrangers pourrait marquer le
début d'une expansion de l'exploitation forestière qui risquerait
d'épuiser rapidement les ressources ligneuses du pays. Cela pourrait
à la fois entraîner une série de conséquences
négatives sur l'environnement66.
Dans son enquête sur l'exploitation illégale des
ressources naturelles de la RDC, un Groupe d'experts du Conseil de
sécurité de l'ONU reconnaît les dangers que poserait la
relance des
65Debroux, Laurent, Hart, Kaimmwitz, Karsenty &
Topa, « Forests and post-conflict Democratic Republic of Congo:
analysis of a priority agenda». Washington ,2007
http://documents.worldbank.org/curated/en/918971468770
66 Ibidem.
Page 50 of 63
secteurs des ressources naturelles en RDC. En janvier 2003,
le Conseil de sécurité a adopté à
l'unanimité la résolution 1457, encourageant « les
Etats, les institutions financières et les autres organisations à
aider ...à faire en sorte de mette en place les structures et
institutions nationales nécessaires pour exercer un contrôle sur
l'exploitation des ressources en RDC »67.
Cela ne s'est pas fait jusqu'à maintenant ; en fait,
la capacité et la volonté de l'administration forestière
de véritablement administrer le secteur forestier sont devenues
pratiquement nulles. Cela va des échelons les plus élevés
vers les plus bas - comme nous l'avons mentionné plus tôt, le
Ministère de l'Environnement, tout en étant responsable du
moratoire interdisant l'attribution de « concessions forestières
» a systématiquement octroyé, sur une période de plus
de 3 ans, près 150 de ces « concessions » couvrant une
superficie d'environ 15 millions d'hectares.
D'une part, le ministère a un problème de
sureffectif, qui a entraîné la prolifération des services
spéciaux et la répétition des tâches ; même
l'effectif réel du ministère de l'Environnement n'est que
vaguement connu, le nombre d'employés basés à
l'extérieur de Kinshasa se situant quelque part « entre 2000 et
4000 » selon les estimations de la Banque mondiale. D'autre part, les
compétences techniques de base, notamment en matière de
planification de la gestion forestière, de cartographie
géographique et de recensement forestier, font largement défaut.
D'après la Banque mondiale, le pays « n'a produit aucun nouveau
forestier professionnel depuis dix ans. » Les agents forestiers locaux ne
disposent d'aucune information même sur les lois et politiques
forestières actuelles, ni d'aucun des outils de base, tels que des
véhicules, ordinateurs ou téléphones, nécessaires
à la réalisation de leur travail.68
67 Résolution du Conseil de
Sécurité 2003
68 Greenpeace 2005 Annual Report DRC
Page 51 of 63
Section 2 : Opportunité du
mécanisme REDD (Réduction des Emissions dues à la
Déforestation et à la Dégradation
forestière)
2.1 Notions
Au cours des dernières décennies, la
déforestation et la dégradation des forêts ont
été très marquées, particulièrement sous les
tropiques ou est localisée la République Démocratique du
Congo. C'est le résultat de nombreux facteurs, dont l'exploitation
(légale et illégale), la conversion pour une agriculture à
grande échelle, l'agriculture de subsistance par les populations rurales
pauvres, l'activité minière et la collecte de bois de chauffage.
La disparition des forêts soulève des inquiétudes pour de
nombreuses raisons (perte de biodiversité, impacts sur la vie rurale,
dégradation des services des écosystèmes tels que
l'approvisionnement en eau.
Le REDD est un mécanisme international
créé lors de la conférence des Parties
UNFCCC69, pour inciter économiquement les grands pays
forestiers tropicaux à éviter la déforestation et la
dégradation des forêts. Dans ce cadre, une valeur
financière au carbone stocké dans les forêts, offrant une
incitation économique pour les pays en développement afin qu'ils
diminuent la déforestation et investissent dans les alternatives plus
sobres en carbone pour le développement durable. Le programme «
REDD+ » va au-delà de la déforestation et de la
dégradation des forêts uniquement, et inclut une gestion durable
et la conservation des forêts ainsi que le renforcement des stocks de
carbone liés à la forêt.
A cet effet, la France s'est engagée en 2009, lors du
sommet de Copenhague70 sur le climat, à consacrer 20 p. cent
de ses financements précoces pour le climat (soit 150 millions d'euros
par an) à la lutte contre la déforestation des pays en
développement71. Ainsi, afin d'assurer le suivi permanent de
ses engagements sur la question, la France avait mis sur pied le projet «
Gret72 » qui est présent en République
Démocratique du Congo depuis 1998, avec des interventions dans
69 UNFCCC : United Nations Framework Convention on
Climate Change : Convention cadre des Nations sur les changements climatiques,
adoptée au cours du Sommet de la Terre en 1992 par 154 Etats.
70 La conférence de Copenhague de 2009 a
été la 15e conférence des parties de la
Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Du 7 au 18
décembre 2009
71 Suivi des engagements de la France sur Redd,
https://www.gret.org
72 Le Gret est une ONG internationale de
développement, de droit français, qui agit du terrain au
politique, pour lutter contre la pauvreté et les
inégalités.
Page 52 of 63
trois domaines : agriculture ; eau potable, assainissement et
déchets ; gestion des ressources naturelles et énergie.
Du côté de la République
Démocratique du Congo, la mise en place du mécanisme REDD dans la
lutte contre le déboisement et la dégradation des forêts
est une opportunité pour l'aménagement de son couvert forestier.
La RDC s'est fortement engagée dans le processus de préparation
du REDD, elle se prépare à recevoir des fonds importants dans le
cadre des financements de la réduction des émissions. Ce
processus comprend l'établissement d'un cadre institutionnel et
légal pour la mise en oeuvre de la REDD.73Le Fonds National
REDD+ a pour ambition de constituer un point d'entrée
privilégié pour le financement de la stratégie REDD+ du
pays. Il facilite l'utilisation stratégique des contributions au travers
d'une coordination renforcée des différentes sources de finance
climatique, d'une appropriation nationale accrue et d'allocations efficaces
axées sur les résultats, dans le respect des sauvegardes sociales
et environnementales.
Du Programme REDD+ découle des projets REDD+ qui
mettent en place des activités qui aident à la réduction
de la déforestation et de la dégradation des forêts .Les
communautés qui dépendent de ces forêts sont les acteurs
gestionnaires principaux de ces activités74.
Comme illustré avec la RDC, les crédits carbone
sont utilisés par les communautés locales pour développer
une série d'activités économiques durables, tels que des
produits issus de la forêt, l'agroforesterie, des infrastructures
d'éco-tourisme, du micro-crédit et des moyens de communication
locaux ainsi que d'autres activités socio-économiques,
culturelles et environnementales.
En effet, les projets de conservation REDD+ aident les
communautés de producteurs les plus défavorisés à
protéger leur forêt et à développer des
activités rentables et durables en valorisant les services
écosystémiques rendus par les forêts. Les activités
développées pour la conservation des forêts sont de 4 types
:
73 Partenariat pour les forêts du Bassin du
Congo, Mécanisme de gestion des financements REDD+ en RDC, https :
pfbc-cbfp.org
74 Projet REDD+ : Conservation de la Forêt,
https://www.purprojet .com
Page 53 of 63
? Mesures coercitives : enregistrement de la zone au niveau
de protection le plus élevé, délimitation de la zone,
contrôle et surveillance, actions pour éviter l'immigration non
contrôlée, etc.
? Activités d'incitation pour augmenter la valeur de
la forêt vivante : par exemples extraction des graines,
éco-tourisme, utilisation des plantes, production apicole, etc.
L'objectif est de réduire le besoin pour les communautés de
déboiser plus.
? Régénération naturelle assistée
: renforcement des stocks de carbone forestier grâce à des
pratiques de gestion durable des forêts75.
Il est apparu critique pour la RDC de mettre en place un
cadre de gouvernance multipartites et multisectoriel afin que les politiques et
mesures REDD+ soient impulsées au plus haut niveau décisionnel,
et fasse l'objet d'une coordination efficace. La structure de gouvernance du
Fonds, instaurée par Décret du Premier Ministère, est
assurée par trois organes principaux :
Le Comité de pilotage,
présidé par le Ministère des Finances (en tant
qu'Entité de Coordination Nationale), est l'organe d'orientation, de
décision et de supervision des activités du Fonds ; il fixe les
orientations stratégiques, approuve les propositions de programme REDD+
et s'assure de la performance globale du Fonds. Il est composé de six
membres du Gouvernement au niveau ministériel, et de partenaires au
nombre desquels CAFI, le représentant du système des Nations
Unies, la société civile et le secteur privé.
Le Comité Technique, piloté
par le ministre de l'environnement, garantit le contrôle qualité
et le respect des critères REDD+ fixes. Il évalue l'ensemble des
orientations stratégiques et propositions de programme REDD+ soumis au
Fonds et propose ses recommandations au comité de pilotage.
Le Secrétariat Exécutif est le
gestionnaire national du Fonds au nom du Comité de Pilotage. Il assure
la coordination quotidienne des activités du Fonds et veille au respect
des règles et procédures76.
2.2 Obstacles à la mise en oeuvre du REDD+
En RDC, le problème de la gouvernance n'est pas tant
de disposer d'un cadre juridique adéquat car, malgré leurs
lacunes, les outils juridiques existants peuvent produire des résultats,
s'ils
75 Ibidem
76 The DRC REDD+ National Fund,
www.cafi.org
Page 54 of 63
étaient appliqués, respectés et
opposables à tous. Le problème est surtout de faire appliquer la
loi et de développer des compétences pour ce faire. Or, on
observe qu'à tous les niveaux, les autorités forestières
cultivent l'irrespect des normes, leur laisser-faire et laisser-aller
produisant de surcroît un déficit de transparence qui favorise
toutes les formes de corruption. Nous relèverons ces déficits de
gouvernance et de transparence aux niveaux national, provincial et local.
Page 55 of 63
CONCLUSION
Il est aujourd'hui évident que la République
Démocratique du Congo, de par son fort potentiel en termes de ressources
forestières, devrait prendre une part active dans les efforts
menés face aux préoccupations planétaires relatives aux
problèmes liés aux changements climatiques, et y apporter
significativement sa contribution. Ses forêts constituent aussi un
réservoir de ressources à même d'améliorer
l'alimentation des peuples autochtones, d'augmenter les flux commerciaux de ses
produits forestiers aussi bien à l'intérieur qu'en dehors de ses
frontières, notamment avec l'amélioration de la transformation du
bois. Cependant, ses capacités sont encore très limitées
en termes de moyens financiers, de suivi de l'aménagement forestier et
de commercialisation licite des produits forestiers, de gestion des
forêts et des pratiques associées; tous, facteurs qui concourent
à des taux élevés de déforestation et de perte de
la biodiversité. Ces lacunes et insuffisances étant bien
identifiées, la situation pourrait être, au moins en partie,
améliorée grâce à l'adoption de certaines mesures de
gouvernance intégrée dans le cadre des communautés
économiques régionales en cours de formalisation en Afrique,
ainsi qu'à travers la conception de la mise en oeuvre des APV/FLEGT et
des mécanismes de la REDD+.
Par ailleurs, la France par son expérience en
matière de gestion forestière contribue efficacement à la
gouvernance forestière par ses excellentes politiques et directives
d'aménagement forestier, par son implication dans différents
processus et mécanismes de la lutte contre la déforestation et la
dégradation de l`environnement. La France, il y a lieu de le noter, est
un partenaire efficace dans la lutte contre la déforestation, une
référence de par ses politiques publiques dans la lutte contre le
réchauffement climatique ainsi que ses structures de gestion
forestière comme l'Office National des Forêts.
Une comparaison entre les deux législations
paraît pertinente afin de permettre à chaque état de tirer
profit des expériences partagées pour un aboutissement
amélioré d'une gestion durable des forêts. Aussi,
avons-nous mené une étude comparative entre le droit congolais et
le droit français sur le sujet relatif à la gouvernance
forestière. A la lumière de cette étude, il apparaît
nettement qu'il y a encore énormément de difficultés
à surmonter pour
Page 56 of 63
parvenir à une gestion durable des forêts. Ces
difficultés concernent en particulier la RDC; elles sont liées
d'une part à l'insuffisance de la législation, et d'autre part au
déficit d'application rigoureuse des textes en vigueur. A ces facteurs,
il faut en ajouter d'autres comme la pauvreté, l'inexistence
d'infrastructures de gestion forestière, l'absence de volonté
politique.
Par cette étude comparative, il y a lieu d'affirmer
que la gouvernance forestière est un moyen efficace de protection ou de
préservation de la nature, et de confirmer que le gouvernement de la
République Démocratique du Congo ainsi que celui de la France
mènent, autant que faire se peut, des actions concrètes pour
améliorer la gouvernance forestière ?
Afin de surmonter les problèmes ci-dessus
identifiés dans la situation actuelle de la gouvernance
forestière et du commerce du bois et produits forestiers non ligneux, et
vu la liaison de ces problèmes à la déforestation et au
changement climatique, la République Démocratique du Congo
à l'instar de la France, devrait prendre les mesures suivantes :
· ? Administration forestière publique nationale et
changement climatique :
Mettre en place un plan de recrutement pour les années
à venir afin de pallier à l'insuffisance d'experts nationaux dans
son administration forestière. Cependant, à court terme, le
manque de compétences appropriées pour le MRV afin de mieux faire
face aux problèmes d'atténuation du changement climatique peut
être résolu en participant à des sessions de formation et
de renforcement de capacités de courte durée sur les techniques
de surveillance des forêts nationales. Ces formations peuvent être
fournies et prises en charge par des organisations certifiées ;
· ? Gouvernance des forêts et développement
socio-économique :
La gouvernance forestière et commerciale doit
être améliorée à travers une
rémunération adéquate et des mesures disciplinaires
strictes afin de réduire la corruption des fonctionnaires de douanes,
des agents forestiers, de l'administration et la police locale ;
Page 57 of 63
Le développement économique et social devra
être encouragé, en particulier dans les zones frontalières
éloignées et isolées.
Satisfaire aux attentes des marchés européens
en vérifiant la légalité du bois importé en
initiant ou en mettant en oeuvre des politiques strictes dans le commerce du
bois.
. Commerce des produits forestiers et services :
Accroitre les taux de conversion de la transformation locale
du bois. Cela pourrait davantage diversifier les produits transformés
à travers l'industrialisation de la transformation et l'encouragement
à l'utilisation du bois.
Fournir un appui technique et un système d'information
sur le marché adéquat de même que la mise en place de
plates-formes pour les petites /moyennes entreprises au niveau du pays et dans
les régions transfrontalières.
· ? Efficacité de la chaîne de valeur du bois
:
La République Démocratique du Congo devrait
accroître l'efficacité de la chaîne de valeur des produits
forestiers en prenant des mesures strictes pour réduire l'exportation de
matières premières et promouvoir davantage la production des
produits ligneux transformés et produits finis tels que les panneaux de
bois, les cartons, les panneaux de fibres , les meubles et les armoires en
bois
Page 58 of 63
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES
· COUNSELL S., « Gouvernance Forestière
en République Démocratique du Congo », le point de vue
d'une ONG, FERN, mai 2006, p.36
· GRANIER L., ZAKANA V., NGUIFFO S., SIME R. N. et all.
« Aspects contemporains du droit de l'environnement en Afrique de
l'ouest et centrale », L'intégration et l'harmonisation des
normes de droit international de l'environnement dans le droit
africain,UICN, Droit et politique de l'environnement n
69,2008,p.223
· TREFON Th., « La Réforme du secteur
forestier en République Démocratique du Congo : Défis
sociaux et Faiblesses institutionnelles », De Boeck Supérieur,
Afrique contemporaine, 2008/3 n° 22, p.192
THESES, MEMOIRES, RAPPORTS
· DORVEAUX Lionel, Le régime juridique de la
forêt : état du droit applicable à la forêt en France
et état du droit forestier luxembourgeois, Université de
Lorraine, Juillet 2014, p.668
· HUNTER D., SALZMAN J. & ZAELKE D; international
Environnemental Law and Policy, Foundation Press.
· KISS Alexandre Charles & BOJIC Dubravka, «
Aspects institutionnels et financiers de la protection des forêts en
droit international », France, p.513
· MALELE MBALA Sébastien, Congrès Forestier
Mondial, Buenos Aires, Argentite, 19 au 23 octobre 2009.
· MORMICHE André, « La notion
d'aménagement forestier », Revue géographique des
Pyrénées et du Sud-ouest Européen, Forêts, 1984,
p.140
· ORBAN, Hélène « La réception du
droit international aux Etats-Unis, en France et Belgique : Etude comparative,
Université de Liège, 2007, p.40
ARTICLES ET ETUDES
· CHEVROL, Cour Européenne des Droits de
l'Homme, France ,13 mai 2003, requête n°49636.
· DEBROUX, LAURENT, HART, KAIMMWITZ, KARSENTY &
Topa, « Forests and post-conflict Democratic Republic of Congo:
analysis of a priority agenda». Washington ,2007
· HUMPHREYS D., Forests politics, Earthscan, 1998,
Londres.
Page 59 of 63
· KEHOANE Robert O. et al. 1993. The effectiveness of
International Environmental Institutions. In Institutions for the Earth-Sources
of effective international environmental protection, Peter M. Haas et al. Eds.,
Cambridge, MIT Press.
· KONRAD Von Moltke, Research on the effectiveness
of international environmental agreements: lessons for policy makers. Paper
prepared for the Final Conference of the EU Concerted Action on Regime
Effectiveness, IDEC, novembre, Barcelona, 2000.
· MALJEAN-Dubois S., La mise en oeuvre du droit
international de l'environnement, IDDRI, Analyse de la Gouvernance,
n°3, 2003, p.64
· MEKOUAR A., Le texte révisé de la
convention sur la conservation de la nature et des ressources naturelles :
petite histoire d'une grande rénovation, Études juridiques
de la FAO en ligne, Avril 2006.
· MENIKO TO HULU Jean Pierre, Etats des lieux de
l'exploitation forestière illégale en RDC et dans la province de
la TSHOPO, Journée Internationale de L'Environnement, Yangambi,
Institut Facultaire des Sciences Agronomiques, 2016, p.10
· PRIEUR Michel, Forêts et environnement,
actes du séminaire international organisé par le centre
international de droit comparé de l'Environnement à Limoges du 25
au 29 avril 1983, Presses universitaires de France 1984, p.291
· POOR&THANG, Evaluation des ressources
forestières mondiales 2000, Rapport principal, FAO, 2002.
· THORSELL Jim & SIGATY Todd, « Utilisation
humaine des sites naturels du patrimoine mondial un aperçu global
», UICN, septembre 1998.
LEGISLATIONS FORESTIERES NATIONALES France
· Code Forestier Français
· Constitution du 04 octobre 1958 (Version mise à
jour en janvier 2015)
République Démocratique du Congo
· Loi n°011/2002 du 29 Août 2002 portant code
forestier
· L'arrêté n°034 du 03 juillet 2015
fixant la procédure d'élaboration et de vérification,
d'approbation, de mise en d'oeuvre et de suivi du plan d'aménagement
d'une concession forestière de bois d'oeuvre.
· L'arrêté n°035 du 05 Octobre 2006
relatif à l'exploitation forestière.
· L'arrêté n°036 du 03 Octobre 2006
fixant les procédures d'élaboration, d'approbation, de mise en
d'oeuvre des plans d'aménagement des concessions forestières et
de production de bois d'oeuvre.
Page 60 of 63
WEBOGRAPHIE
· Déclaration de Rio sur l'environnement et le
développement , principes de gestion des forêts. (s.d.).
Récupéré sur
http://www.un.org/french/events/rio92/rio-fp.htm
· Plan d'action forestier. (2016, avril). Consulté
le juin 2018, sur
www.worldbank.org:
http://www.worldbank.org/en/topic/forests
· Yale, u. d. (s.d.). indice de performance
environnementale. Récupéré sur
https://news.yale.edu/2018/01/23/2018-environnemental-performance-index-air-quality-top-public-health-threat
· (2015, septembre). Récupéré sur
http:www.fao.org/redd/inititives/cafi/fr/l'initiative pour les forêts de
l'Afrique centrale
· Brundtland, E. V. (s.d.). Les perturbations de la
Forêt. Récupéré sur
http://www.evb.lacsq.org/fileadmin/userupload/microsites/eav-evb
internet/documents/trouses-et-activites/forest-du-monde/fche42
· M.G.S.Ruis, B. (s.d.). les Instruments Internationaux
relatifs aux forêts. Récupéré sur
http://www.fao.org/docrep/003/y1237f02.htm
· Protocole de KYOTO. (s.d.).
Récupéré sur
http://www.un.org/fr/climatechange/kyoto.shtml
· Office Nationale des Forêts. (s.d.).
Récupéré sur
agriculture.gouv.fr:
http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/pdf/onag_dvf_3_mai.pdf
·
http://www.itto.int/fr/sustainable
forest management/
· Office Nationale des Forêts : orientations
nationales d'Aménagements et de gestion pour les forêts des
collectivités .
http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/pdf/onag_vdef_3_mai.pdf
·
https://ec.europa.eu
·
http://documents.worldbank.org/curated/en/918971468770
· Suivi des engagements de la France sur Redd,
https://www.gret.org
2.1. Contexte général 26
Page 61 of 63
Table des matières
Introduction 1
Sommaire .7
Liste des Abréviations 8
Première Partie :
Les Sources Internationales relatives à la
législation forestière 10
Chapitre I : Les Conventions
multilatérales pertinentes pour les forêts 11
Section 1 : Les instruments Juridiques internationaux les plus
importants pour les forêts 11
1.1. Convention-cadre des Nations Unies sur les changements
climatiques ...11
1.2. Convention sur la diversité biologique 13
1.3. Convention des Nations sur la lutte contre la
désertification dans les pays gravement
touchés par la sécheresse et/ou par la
désertification, en particulier en Afrique 15
Section 2 : Autre instruments Juridiques internationaux
pertinents sur les forêts ..16
2.1. Convention relative aux zones humides d'importance
internationale, particulière
Comme habitats des oiseaux d'eau (Convention de Ramsar)
16 2.2. Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel
et naturel
(Convention du patrimoine mondial) 16 2.3. Convention sur le
commerce international des espèces de faune et de flore sauvages
menacées d'extinction (CITES) ..17
2.4. Convention pour la protection de la couche d'ozone
(Convention de Vienne) 18
2.5. Convention concernant les peuples indigène et tribaux
dans les pays indépendant
(Convention OIT n°169) .19
2.6. Accord international sur les bois tropicaux (AIBT) .20
2.7. Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce (OMC)
..21
Chapitre II : Les directives et
règlements régionaux d'aménagement durable des
forêts 23
Section 1 : Les aménagements forestiers 24
Section 2 : Etat de l'aménagement forestier en
République Démocratique du Congo ..26
Page 62 of 63
2.2. L'aménagement forestier en RDC ..27
Deuxième Partie :
La réception dans l'ordre juridique interne
..29 Chapitre I : Les modalités
d'introduction des conventions internationales dans les ordres
Juridiques nationaux .29
Section 1 : Transposition des normes environnementales
internationales 29
Section 2 : Application des normes internationales dans l'ordre
juridique interne 32
Chapitre II : Le niveau d'intégration
juridique 33
Section I : L'encadrement juridique des forêts ou Droit de
la gestion des forêts .33
Section II : Faiblesse de la mise en oeuvre du droit forestier
en
République Démocratique du Congo
36 Troisième Partie :
L'effectivité de la forestière
.39
Chapitre I : La gestion durable des forêts
41
Section 1 : Coopération entre la France et la
République Démocratique Congo sur la
Gestion durable des forêts 41
Section 2: FLEGT (forest low enforcement, governance and trade)
43
2.1 Mesures liées à la consommation 43
2.2 Mesures liées à la production 44
Chapitre II : Convention des Forêts :
poids des acteurs locaux sur les questions relatives
à la gouvernance forestière ..45 Section 1 : Le
rôle des acteurs locaux sur les questions relatives à
gouvernance
forestière 45 Section 2 : Opportunité du
mécanisme REDD (Réduction des Emissions dues à la
Déforestation et à la Dégradation
forestière) 49
Conclusion ..54
Page 63 of 63
|