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L'ONG AIDE et la question de la pérennisation des projets hydrauliques dans le district d'Abidjan


par Gnenefoli Mamadou OUATTARA
Chaire UNESCO - Master gestion de projets 2019
  

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6.3-GOUVERNANCE SOCIO-ECONOMIQUE DES ONG : SURVOLE EMPIRIQUE

L'intérêt accordé à la société civile dans la gouvernance économique est consécutif à la révision des théories et des pratiques de la gouvernance. La bonne gouvernance ou la gouvernance économique prônée par les institutions internationales d'aide au développement se fonde sur une gestion participative, transparente et responsable des intérêts, des droits, des obligations et des différends des citoyens. Elle favorise le respect de la légalité et veille à ce que les priorités politiques, sociales et économiques se fondent sur un large consensus au sein de la société et que la voix des plus démunis et des plus vulnérables soit entendue par ceux qui prennent les décisions en matière d'allocation de ressources. Dans cette perspective, les OSC constituent des acteurs à part entière de la gouvernance économique. A cet effet, Salomon et Helmut (1996) notent que suite au réexamen du rôle de l'Etat, ces Organisations sont des vecteurs de sociabilité et des instruments de transformation sociales comme elles sont également des acteurs économiques essentiels, capable de répondre aux besoins sociaux en émergence. Sur cette base, et partant, comme responsable de la bonne marche de la société, elles situent leurs actions d'abord et avant tout dans une logique d'interpellation. Cette interpellation se fait soit sous la forme de lobbying pour obtenir des modifications, soit sous la forme de critique ou d'une dénonciation. Quelle que soit la forme d'interpellation, celle-ci établit plusieurs niveaux de responsabilité ; en effet les pouvoirs publics peuvent être rendus partiellement ou entièrement responsables:

- a priori, de ne pas prendre des mesures nécessaires pour éviter les violations des principes de la bonne gouvernance ;

- a postériori, de ne pas dégager les moyens nécessaires pour intervenir en cas de non-respect et de violation de ces principes et pour mettre fin aux inégalités croissantes et à l'exclusion des populations ;

L'interpellation des OSC a pour objectif d'amener les politiques à prendre leurs « responsabilités », c'est-à-dire des décisions et des mesures concrètes ; la fonction des organisations de la société civile est donc de dénoncer des carences dans la gouvernance et d'exiger que l'Etat y remédie. Elles estiment que les politiques doivent assumer leurs responsabilités et fournir un cadre législatif et administratif favorisant la bonne gouvernance économique et sociale. Ainsi de l'avis de la littérature consultée, il existe deux tendances parmi les OSC concernant le rôle qu'elles pourraient jouer dans le processus de la gouvernance économique du pays. Ces divergences dépendent largement de l'idéologie dominante dans chaque organisation au sujet de la place respective de l'Etat et de la société civile dans la collectivité en générale, et dans la définition et l'application de politique et de développement en particulier. Elles conditionnent également les modes d'intervention et d'interpellation du pouvoir politique adoptés par les ONG ainsi que leur niveau de coopération avec l'Etat.

Il existe cependant une constance : l'Etat est un Etat de droit ; le pouvoir est considéré comme le garant du droit et la seule instance habilitée à changer le droit (par la loi) lorsque les droits des citoyens sont en danger ou lorsque les principes de gouvernance ne sont pas respectés. Par ailleurs, l'Etat doit être à même d'apporter aux populations un niveau de bien être par une bonne gestion et une répartition équitable des ressources nationales. Dans le cas contraire, le rôle des OSC est d'abord d'interpeller les politiques. Par exemple, en Côte d'Ivoire, ces dernières décennies, les ONG ont joué le rôle d'interpellation, notamment dans la situation de crise militaro-politique où l'on a assisté à de nombreuses violations des droits et de la dignité de la personne humaine ainsi qu'aux non-respects des principes démocratiques.

Le rôle des ONG ne se limite pas seulement à l'interpellation ou à la dénonciation. Elles sont aussi présentes sur le terrain à travers des actions concrètes visant à promouvoir la bonne gouvernance, la gestion saine de la richesse nationale.Ces actions concernent notamment l'organisation de campagne de sensibilisation et de conférences sur des sujets ayant trait à la bonne gouvernance, la démocratie, aux droits de l'Homme et la réalisation d'activités touchant à différentes composantes du développement. La contribution de la société civile dans la gouvernance économique du pays est également perçue à travers les fonds qu'elles sont capables de mobiliser. Par exemple, aux Etats Unis, les ONG mobilisent selon Ackermann (2002) 508,5 milliards de Dollars par an, ce qui représente 6,5% du revenu national. Ces fonds servent principalement à financer la santé et l'éducation Salomon and Anheir, (2003). Les fonds mobilisés par les ONG africaines sont relativement importants. Au Kenya, par exemple, ces fonds se situeraient entre 150 et 200 millions de Dollars US par an (Lekyo, 2000). Dans ce pays les ONG offrent 40% des services liés au planning familial.

En Côte d'Ivoire, ce sont environ trois (3) milliards de FCFA par an qui sont mobilisés par les ONG Sylla (2003). Ces fonds proviennent essentiellementde bailleurs de fond internationaux (78%), et servent principalement à financer le secteur de la santé dominé par les problèmes liés au VIH/SIDA. Ce dernier secteur est indépendant financièrement de la philanthropie internationale à hauteur de 81%. Boukhari (1994) affirme que « Le principe fondamental de la participation : c'est le partage de savoir et de pouvoir ». Il continue en disant que « Dans une approche participative la population n'est pas un gisement d'information mais un partenaire avec qui il faut échanger et partager l'information utile » « La participation, c'est penser et faire avec et non pour, c'est la responsabilisation, la concertation et la négociation ». Cette idée est confirmée à travers cette déclaration ?la plupart des cas, la conception des ONG locales de développement et les politiques reliées à leur implantation sont souvent excessivement centralisées, donc ne sont pas en mesure de répondre correctement aux besoins locaux ; le fait que les informations ne soient pas systématiquement collectées et analysées gêne le processus de conception et de programmation effective des réformes et des innovations » BAD (2006).

La pérennisation des acquis passe par l'appropriation par les populations du développement à eux apportés laquelle appropriation est conditionnée par leur implication dans tout le processus de l'intervention. Or par expérience, des ONG humanitaires déguisant leur volonté d'apporter ?un projet clé en main» laissent très souvent peu d'espoir au succès de l'appropriation. C'est d'ailleurs ce que pense Jean Pierre Olivier de Sardan lorsqu'il affirme : « Il ne s'agit pas d'amener le savoir là où règne l'ignorance (...). Les pays auxquels on s'adresse ont déjà des compétences et des savoir-faire dans les domaines concernés par le développement ». Par conséquent si les interventions extérieures apportent des solutions à certains problèmes, elles n'ont pas toujours la capacité de comprendre en profondeur les aspirations profondes des bénéficiaires.Brauman (2000) appréhende l'action humanitaire comme étant celle qui vise, sans aucune discrimination et avec des moyens pacifiques, la préservation de la vie dans le respect de la dignité et de la restauration de l'homme dans ses capacités de choix. C'est pourquoi, il s'avère nécessaire d'associer les bénéficiaires à toutes les étapes de déroulement des projets afin d'espérer une amélioration des conditions de vie et de travail des communautés locales dans une perspective de développement durable. Les résultats de la recherche insistent sur l'importance de la planification précoce des stratégies de retrait des bailleurs car cette démarche permet aux différents acteurs de connaitre leurs rôles et responsabilités ainsi que la contribution de chacun dans l'atteinte des objectifs du projet. Par ailleurs, l'efficacité d'une stratégie de retrait dépend de la participation et du niveau d'appropriation et de motivation des communautés ou de leurs représentants avec un accent mis sur la participation des acteurs qui mèneront les activités après le départ des initiateurs de l'intervention. De plus, la prise en compte rapide du renforcement des capacités dans la planification du projet et le partenariat local sont des aspects favorables à la durabilité des projets.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand