DEUXIÈME PARTIE :
ENVIRONNEMENT ET PAYSAGE: ASPECTS DE DÉGRADATION
ET PERSPECTIVES DE SAUVEGARDE ET DE MISE EN VALEUR.
CHAPITRE I : LE DIAGNOSTIC ENVIRONNEMENTAL ET PAYSAGER
DES PALMERAIES DE LA RBOSM :
Les facteurs naturels :
De nos jours, de lourdes menaces pèsent sur les
palmeraies du sud Marocain à tous les niveaux. Elles réunissent
des contraintes environnementales de taille et des facteurs de
dégradation y sont à l'oeuvre sous l'effet d'un modèle du
développement urbain inapproprié. Partout le constat de crise est
presque le même : la rareté des ressources en eau,
l'érosion des terres agricoles, la dégradation des paysages
naturels et culturels, la disparition des systèmes traditionnels
d'irrigation, le dessèchement des palmiers dattiers, la
désertification quasi-constante, la perte de la biodiversité, le
déclin des productions locales et l'exode rural en sont quelques signes
avant-coureurs. De bout à l'autre du territoire de la RBOSM, les
ressources naturelles sont soumises à de multiples formes de pression
menaçant des équilibres écologiques fragiles. Les facteurs
de dégradation sont physiques, liées essentiellement à la
sécheresse et à la désertification, et anthropiques
à cause des modes inadaptés de l'exploitation de l'environnement
et de l'occupation du sol.
L'eau : patrimoine et source de vie :
La situation hydrique des oasis de la réserve de
biosphère est aujourd'hui alarmante. Une nouvelle gestion de l'eau dans
les pratiques d'irrigation est aujourd'hui nécessaire. Devant la
gravité de ce problème, accentué par le contexte de la
désertification dans lequel évolue le sud Marocain en
général et les palmeraies de la réserve de
biosphère en particulier, une prise en main par les pouvoirs publics de
la crise de l'eau semble nécessaire. Si l'on se situe à
l'échelle de la RBOSM, les oasis par leur situation au piémont
du Haut Atlas Oriental, constituent le dernier rempart pour protéger ce
château d'eau contre l'avancé du désert. Il est essentiel
d'y garder une activité agricole soutenue pour assurer la
pérennité de cette région guetté par la
désertification. Le problème dépasse les palmeraies
proprement dites; il concerne l'ensemble du territoire national, voire du
bassin méditerranéen, dans la mesure où les oasis
constituent une barrière écologique de défense contre le
désert. La sauvegarde des oasis doit se faire non pas seulement dans le
seul souci de maintien des paysages verdoyants, mais aussi en vue de renforcer
leur fonction écologique protectrice.
L'agriculture : une activité en déclin
:
L'écosystème oasien tire ses
spécificités majeures dans les pratiques de l'agriculture
irriguée en étages (les cultures légumineuse et
fourragères, les arbres fruitiers et le palmier dattier). Agriculture
paysagère par excellence, cette activité se
trouve actuellement en déclin suite aux mutations
socioéconomiques et spatiales engendrées par l'ouverture des
oasis sur les grandes villes. Aujourd'hui, les choses prennent une tournure
préoccupante avec des conséquences écologiques,
socioéconomiques et politiques fort inquiétantes. Partout le
travail de la terre est en crise. Dans la seule région de Draa
(Province de Ouarzazate) les superficies cultivables ont baissé de
plus de
20%, les productions de 16%, les niveaux d'intensification de
45%, et le palmier dattier a vu sa production chuter de 34%.36
La crise du secteur agricole est particulièrement
accompagnée d'une crise dans les paysages ruraux. Malgré leur
éloignement de l'influence directe des grandes métropoles
urbaines comme Meknès, Fès et Marrakech, les espaces ruraux
de la réserve sont en retrait. La dégradation des paysages
suite à la sécheresse et l'abandon de l'agriculture
étagée et l'un des principaux aspects de la crise
écologique des palmeraies. Dans ce contexte, les
événements s'enchaînent rapidement; le
déclin de l'agriculture traditionnelle entraine la perte des emplois et
la faible diversification du tissu économique qui aboutissent à
terme à une marginalisation des oasis qui se dépeuplent
progressivement.
L'aridité du climat :
L'ouverture de la réserve de biosphère sur le
désert saharien fait de l'aridité un phénomène
structurel entrainant une désertification quasi-constante. Le climat
caractérisé par une longue période estivale très
chaude (mai - octobre) associé à une pluviométrie faible
et très irrégulière amplifient ce phénomène.
Les pluies, qui tombent souvent à la fin de l'automne et au début
de l'hiver, sont inefficaces pour la régénération de la
végétation qui pousse essentiellement au printemps. Elles sont
aussi souvent torrentielles favorisant le ruissellement et l'érosion des
terres cultivables. De ce fait, l'aridité du climat est un handicap
majeur au développement économique des oasis et à leur
intégrité écologique. La situation s'aggrave d'une
année à l'autre et aucun projet environnemental ou agricole
ne pourra aboutir sans prise en compte de cette contrainte climatique
majeure.
L'érosion hydrique et éolienne
:
Parallèlement à l'appauvrissement du couvert
végétal sous l'effet de la sécheresse, l'érosion
hydrique et éolienne s'élargit très rapidement. Dans les
communes limitrophes au domaine saharien, ce phénomène a
déjà atteint un seuil critique comme cela est illustré
dans la figure suivante :
36 Stratégie
d'aménagement et de développement des oasis au Maroc, rapport de
deuxième phase, MATEE-DAT/DIRASSET 2003, page 149
Figure 15 : La disparation du périmètre
agricole et le desséchement de la palmeraie de Rissani à
Errachidia entre 1987 et 2007 sous l'effet combiné de la
sécheresse et l'érosion éolienne.
Associées à des orages en période
d'été, les pluies brutales et aléatoires entraînent
des écoulements violents facteurs essentiels d'érosion hydrique
observée particulièrement sur les berges des oueds. En cas de
crues, les oueds gonflent en quelques minutes et ravagent sur leurs parcours
des terrains de culture, des habitations en terre et des infrastructures.
L'accident du relief aggrave l'effet érosif et les terrasses des
palmeraies perdent annuellement une grande quantité d'alluvions
drainées par l'eau. Aussi en période d'été, des
vents très chauds et violents pouvant atteindre une vitesse maximale de
65 km/h sont fréquents. Ils amplifient la sécheresse et
entrainent une érosion éolienne phénoménale.
À l'extrême Est et Sud-est du territoire de la réserve, le
vent conduit à la formation d'importantes dunes du sable.
Figure 16: Sapement des berges dans la palmeraie de
Goulmima (Errachidia)
Figure 17 : Desséchement des palmiers dattiers
à cause de tarissement des eaux de la nappe dans la palmeraie de Tinjdad
(Errachidia).
Dans cette zone, l'érosion éolienne se manifeste
par des aires gigantesques de drainage et de dépôts du sable et
agit principalement par l'envahissement des terroirs villageois et leurs
périmètres agricoles.
La désertification :
Les zones frontalières de la réserve ouvertes
sur le désert sont en majorité touchées par la
désertification à cause de l'ensablement. Ce
phénomène a existé de tout temps dans les oasis, mais
ses effets sur l'environnement et le paysage ont particulièrement
été accentués ces dernières
décennies.37 Ce n'est qu'à partir des années
1970 que ce problème est devenu une menace majeure au
développement local des oasis se traduisant en particulier par
l'envahissement des canaux d'irrigation et par les coupures fréquentes
de la circulation sur les principaux axes routiers par des
accumulations gigantesques du sable. Les techniques
traditionnelles développées par les populations locales pour la
lutte contre l'avancé du désert ne sont plus en mesure de
maitriser la situation. Les paysans en particulier se plaignent de ce
fléau qui les empêche de cultiver des superficies de plus en plus
importantes de leurs terres. Dans la seule palmeraie de Boudnib (à l'Est
de la province d'Errachidia) la superficie ensablée en 2004 est
estimée à 110 ha de terrains agricoles. L'encadrement technique
et l'engagement des associations dans des projets de lutte
contre l'ensablement doivent être
renforcés.38
Les facteurs humains :
La dégradation du couvert
végétal :
Aux conditions climatiques très sévères
s'ajoutent une série de facteurs humains. En ce qui concerne la
dégradation du couvert végétal sous l'effet de la pression
anthropique, le surpâturage est un exemple spectaculaire.
37 Au cours du 20ème
siècle, les oasis du sud Marocain ont connu plusieurs cycles de
sécheresse : 1913-1918; 1927-1931; 1933-1939; 1945-1947; 1955-1957;
1973-1976; 1979-1984 et 1987, et plus récemment la sécheresse de
1993-1995.
38 Dans la province d'Errachidia,
le phénomène d'ensablement prend une ampleur de plus en plus
grande. Parmi les zones les plus touchées, on peut citer : Jorf, Hanabou
et Fezna. Cette situation a donné naissance à un travail
associatif très important; l'exemple de l'Association de Lutte Contre
la
Désertification et la Protection de l'Environnement
crée en 1998. Un autre projet illustre ce rôle associatif dans la
réalisation et la réussite des projets de lutte contre
l'ensablement. Il s'agit de l'Association Al Amal, créée en 2000.
Le projet est financé par l'Agence de Développement Social et le
Ministère de l'Environnement pour un montant de 15 millions de DH. Il
consiste à protéger la palmeraie de Hanabou par une fixation
mécanique des dunes (5 ha) et un reboisement avec l'utilisation du
système d'irrigation goutte à goutte.
Figure 18 : Le surpâturage exerce une forte
pression sur le couvert végétal dans les zones de montagne
(Imilchil, Errachidia)
L'élevage qui occupe une place importante dans
l'économie locale participe à la dégradation des
ressources naturelles. Les effectifs du cheptel montrent notamment une charge
remarquablement élevée par rapport aux superficies des parcours
lesquels sont en dégradation grandissante par les effets de
sécheresse et de désertification susmentionnés. Aussi,
pour répondre aux besoins domestiques en énergie, les habitants
s'attaquent aux espèces ligneuses qui composent la steppe des parcours
environnants les villages et les palmeraies. L'absence d'alternatives
énergétiques entraine l'arrachage anarchique du bois de chauffe
particulièrement dans les zones de montagne.
Figure 19 : L'arrachage anarchique du bois de chauffe
menace les espèces ligneuses (Imilchil, Errachidia)
Le risque de salinité des sols :
La salinité des sols est un autre aspect
inquiétant de la crise écologique dans la réserve. Les
taux de salinisation des terres ont augmenté ces dernières
années suite à la multiplication des dispositifs du pompage des
eaux souterraines. Actuellement, dans les zones où la nappe
phréatique est de faible profondeur (7 à 10 m), l'eau remonte par
capillarité et crée des dépôts de sels en surface.
L'étalement périodique des eaux d'irrigation favorise
l'évaporation et la concentration des sels dissous dans le sol. Aussi,
la multiplication des barrages collinaires et l'extension des surfaces
irriguées en amont ont réduit la progression des crues vers les
zones avales. Les sels fossiles des
structures géologiques des oueds sont progressivement
remis en solution puis redistribués et fortement concentrés en
certains endroits.39 Dans la région de
Figuig, pour minimiser les effets de la salinité des eaux et permettre
aux agriculteurs la mise en valeur de leurs terrains, les responsables locaux
ont eu l'idée de ramener l'eau douce d'une source située à
4 km du village. L'eau arrive dans un grand bassin puis est distribuée
aux 250 bénéficiaires à un prix de 25 DH/heure.
Après sa réalisation, ce projet est géré
actuellement par les paysans eux même.
Les risques liés aux aménagements
hydrauliques :
Pour éviter les effets dévastateurs des grandes
crues, les pouvoirs publics ont construit après les inondations de 1965
le barrage Al-Hassan Eddakhil sur l'Oued Ziz à Errachidia et Al-Mansour
Eddahbi sur l'Oued Draa à Ouarzazate. Les risques liés à
ces aménagements concernent particulièrement :
· Le tarissement de nombreuses sources d'eau et
l'irrégularité des régimes des oueds;
· L'accroissement de la salinité des sols, la
limitation des apports en limons fertilisants et la réduction des
recharges naturelles des nappes phréatiques;
· Des perturbations énormes dans la dynamique des
nappes qui assuraient auparavant l'humidification des sables et leur fixation
(une humidité de 2 à 3% des sables est suffisante pour soustraire
les dunes du sable de la prise des vents);
· Avant la construction de ces deux grands barrages, les
écoulements étaient plus continus dans les oueds, ils
permettaient l'évacuation plus en aval d'une partie des sables
piégés dans les canaux d'irrigation, et d'autre part
assuraient une humidité dans les lits d'oueds, même ceux
en aval, humidité qui les retenait sur place grâce à la
végétation
39 Dans la région de
Figuig, pour minimiser les effets de la salinité des eaux et permettre
aux agriculteurs la mise en valeur de leurs terrains, les responsables locaux
ont eu l'idée de ramener l'eau douce d'une source située à
4 km du village. L'eau arrive dans un grand bassin puis est distribuée
aux 250 bénéficiaires à un prix de 25 DH/heure.
Après sa réalisation, ce projet est géré
actuellement par les paysans eux même.
qui s'y développait. Or depuis l'édification des
barrages, les écoulements ne se font plus que par lâchers (deux
à trois par an).
· La perturbation des anciens systèmes
hydrauliques et l'exclusion des communautés paysannes locales dans la
gestion des eaux centralisée par l'État de manière
à répondre aux besoins des cultures stratégiques (les
céréales). Alors que les populations souhaitent des lâchers
de barrages favorables aux cultures maraîchères et donc plus
nombreuses et plus rapprochées dans le temps. Pour les
communautés oasiennes habituées à l'autogestion ces
mutations sont pour beaucoup dans la dégradation des traditions
communautaires.
Un des résultats les plus dramatiques de ces
aménagements est le tarissement des systèmes traditionnels de
drainage des eaux souterraines (Khettaras). Avec l'augmentation des besoins en
eau, le recours aux puits profonds et leur équipement en motopompes fait
actuellement l'unanimité du choix de la majeure partie des agriculteurs.
Il est vrai que les techniques modernes de pompage ont conduit à la
régénération des terrains agricoles abandonnés
à cause de la sécheresse, voire même, dans certains cas,
à l'apparition de nouvelles petites oasis sur des terrains nouveaux,
mais ces techniques sont loin d'être une réponse durable à
la crise d'irrigation dans les palmeraies. Ces techniques ont par exemple
provoqué une baisse spectaculaire du niveau piézométrique
des nappes, des débits de sources et des oueds ainsi que le
desséchements des puits peu profonds. La substitution de la motopompe
familiale à la Khettara communautaire n'est pas seulement une
mutation technologique, mais elle est aussi l'expression d'une mutation
sociologique qui fait prévaloir l'individu sur les structures
lignagères traditionnelles fondées sur l'entraide et la
solidarité du groupe. Les risques environnementaux qui viennent
d'être cité sont connus depuis longtemps dans les oasis du sud
Marocain, mais avec beaucoup moins de gravité qu'actuellement. Des
risques sérieux liées à l'urbanisation sont apparus et
commencent à prendre de l'ampleur.
Les risques liés à l'aménagement
urbain :
a. Les problèmes d'assainissement :
Les palmeraies de la réserve connaissent depuis
quelques décennies une urbanisation vertigineuse. Ce
phénomène est toutefois accompagné d'une infrastructure
urbaine très modeste et parfois absente dans certaines communes. C'est
ainsi que la quasi-totalité des secteurs urbains ne sont pas
raccordées aux réseaux d'assainissement. Dans les zones
résidentielles en prolifération à l'intérieur des
palmeraies, le recours aux fosses septiques et aux puits perdus constitue un
danger majeur de contamination des eaux des nappes qui sont à
une profondeur moyenne de 15 à 20 m.
L'assainissement autonome qui est le choix le plus courant
dans ces secteurs d'habitat à haut potentiel environnemental
représente un danger majeur pour la santé et pour
l'environnement. En milieu urbain, les réseaux d'égout sont
majoritairement de type unitaire et se trouvent généralement dans
un mauvais état à cause de manque d'entretien. Dans certaines
zones, ces réseaux n'assurent plus leur rôle de collecte et de
drainage, et les eaux usées sont déversées directement et
sans traitement préalable dans les oueds ou, parfois, utilisées
comme eau d'irrigation sur des périmètres agricoles ou
maraîchers. Leur utilisation en maraîchage constitue
également un risque bactériologique grandissant à la fois
sur la santé publique, le milieu naturel et la qualité des
paysages.
b. Les déchets solides :
Le traitement des déchets ménagers solides se
limite essentiellement à leur mise en décharge où ils se
décomposent par aérobie (en plain air). Dans les trois villes
chef-lieu de province et les municipalités, une
récupération des plastiques se fait sur certaines
décharges, mais les réductions qu'elle entraîne est
relativement minime. L'inadéquation des sites des décharges
provoque des nuisances olfactives considérables et des impacts paysagers
très importants. Cela favorise l'infiltration des lixiviats dans le sol
et plus particulièrement vers les aquifères souterrains et les
cours d'eau. Ce processus entraine la prolifération des poches de
dégradation écologique et paysagère dont l'ampleur est
liée à la taille, à la nature et à l'emplacement
des dépôts des rejets. Dans la majorité des cas, ces
dépôts sont situés à l'entrée des villes et
des communes le long des routes offrant un spectacle déplorable. Le vent
éparpille les sachets plastiques, constituant une pollution
paysagère manifeste.
1.2. L'incidence paysagère de l'urbanisation
:
Les nouvelles tendances de l'occupation de l'espace,
particulièrement, l'expansion de l'urbanisation contemporaine
accélèrent le processus de dégradation du milieu naturel
ce qui n'est pas sans conséquences sur l'appauvrissement des paysages.
La perte de la biodiversité ne ressort elle pas de la banalisation des
paysages ?
Figure 20 : Occupation typique de l'espace d'une zone
tampon (palmeraie) de la réserve. (Goulmima, Errachidia)
Il y a lieu donc de s'interroger sur la qualité du
cadre de vie; une préoccupation qui intéresse à la fois
les acteurs du développement local, les professionnels de
l'aménagement du territoire, les services chargés de la
gestionnaire de la réserve et les associations actives dans le domaine
de la protection de l'environnement. On parle de l'abandon de l'habitat
traditionnel et de sa mise à distance par rapport aux nouveaux centres
urbains. L'affrontement entre les Ksour et le nouvel espace urbain modifie les
paysages des palmeraies et tend à bouleverser le fonctionnement des
systèmes naturels et les valeurs de l'organisation sociale. On est en
face à un chaos de formes qui entraîne banalisation et perte de
repères. Quelque soit l'endroit où l'on se trouve dans le
territoire de la réserve de biosphère, l'urbanisation est
destructrice, le mitage se développe avec une multiplication le plus
souvent désordonnée et donne un parfait exemple de banalisation
et de dépaysement. Les entrées des communes rurales et des
municipalités avec des ronds points maigres et banals sont une typologie
de falsifications. Les nouveaux quartiers qui se développent aux
alentours de l'habitat historique des Ksour garnis d'une fausse empreinte
citadine intègrent dans le milieu oasien une dépersonnalisation
flagrante.
1.3.1. La banalisation du paysage par les voies de
circulation automobile :
En principe, chaque mode de transport produit un paysage qui
se dégradé. Dans les palmeraies de la réserve, les voies
goudronnées qui lient les centres urbains et les communes rurales
traversent les
périmètres agricoles et les terroirs villageois.
Ses voies de circulation des hommes et des biens s'avèrent être
une infrastructure génératrice de dégradations multiples
des villages et des paysages naturels et culturels qui les entourent. Tout le
long de ces routes, l'urbanisation se prolonge, les terres agricoles
disparaissent, la forêt du palmier dattier se rétrécisse,
le réseau d'irrigation se détruit et le paysage s'enfuit. Les
architectures traditionnelles qui longent la route étaient les premiers
éléments du paysage à perdre leurs qualités
pittoresques et de plus on s'éloigne de la voie de circulation de plus
la palmeraie conserve son potentiel écologique et ses
caractéristiques paysagères authentiques.
13.2. La route : facteur accélérateur de
l'éclatement et de la dégradation des villages :
Le passage d'une route à proximité d'un village
ou à travers son terroir accélère l'éclatement et
la dégradation de celui-ci. Dans la plupart des cas, la route a
était le facteur incitant les Ksouriens à abandonner leur habitat
traditionnel pour bénéficier des avantages de proximité
que leur offre la route. Pour cette raison, les Ksour les mieux
conservés sont ceux éloignés des voies d'accès.
Figure 21 : La route principale n° 21 (Errachidia -
Erfoud) traverse la zone de concentration des Ksour dans la vallée de
Ziz à Errachidia.
Figure 22 : La RP n° 21 longeant les Ksour de la
vallée.
Figure 23: La route accélère l'abandon et
l'éclatement des villages et entraîne un développement
linéaire de l'habitat extramuros.
Le gain de proximité dont les riverains d'une route
prétendent bénéficier se trouve concrètement
annulé de point de vue de la dégradation du cadre de vie et de la
banalisation du paysage engendré par l'abandon de leur milieu d'habitat
livré à la ruine. Les constructions nouvelles qui le remplacent
contredisent les lignes de force du développement local car elles
effacent l'originalité du village et intègrent des mises en
scène architecturales hostiles au paysage et à la qualité
de l'environnement.40
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