Environnement, paysage et projet de territoire. Vers une approche territoriale pour la sauvegarde et la mise en valeur de la réserve de biosphère des oasis du sud marocain.( Télécharger le fichier original )par SADKI Aba Université Internationale de langue française au service du développement Africain (Université Senghor d'Alexandrie) - Master en Gestion de l'environnement 2007 |
CHAPITRE II : LE CADRE CONCEPTUEL
Le programme sur l'Homme et la biosphère (Man and Biosphere) a été lancé par l'UNESCO en 197015 au départ dans 14 aires de projets couvrant différents types d'écosystèmes.16 Ce programme a pour principale mission de réduire la perte de la biodiversité à travers la promotion de la gestion durable de l'environnement et des ressources naturelles au niveau mondial. (Voir encadré n° 01) Dans l'objectif de mettre en place des conditions favorisant la réconciliation entre les êtres humains et leur environnement global dans un système de biosphère, le travail du Mab s'est concentré depuis son lancement sur le développement d'un réseau mondial de réserves de biosphère.17 Outil de mise en oeuvre du programme Mab, ce réseau est conçu comme instrument de coopération internationale, 15 Voir dates et événements clés sur l'évolution de la nation de réserve de biosphère et de leur réseau mondial dans « Réserves de biosphère : des lieux privilégiés pour les hommes et la nature », UNESCO, 2003, page 19. 16 Pour plus de détails voir le site web du programme MAB : http://www.unesco.org/mab/mabProg_fr.shtml 17 Cf. « A guide to Biosphere Reserve Management: A methodology applied to French biosphere reserves », UNESCO, 1998. d'échange de connaissances, de recherche scientifique, d'éducation et de surveillance environnementale. Sur le plan institutionnel, l'organe principal du programme Mab, le Conseil International de Coordination, habituellement appelé Conseil du Mab ou le CIC,18 est composé de 34 États membres élus par la Conférence générale (biennale) de l'UNESCO est représenté au niveau de chaque pays membre (ayant une réserve de biosphère sur son territoire) par un Conseil National du Mab.19 Le réseau mondial des réserves de biosphère compte actuellement 411 réserves dans 102 pays dont 2 au Maroc : la Réserve de biosphère de l'arganier (décembre 1989) et la Réserve de biosphère des oasis du sud Marocain (novembre 2000). L'adhésion du Maroc au programme Mab date de 1975, une année seulement après son lancement, et un comité national fût constitué sous la présidence du Directeur de l'Institut Agronomique et Vétérinaire.
Le concept de « Réserve de biosphère » (RB) est un statut international d'aire protégée développé par l'UNESCO à partir de 1974.20 Les réserves de biosphère sont des aires terrestres ou aquatiques portant sur des écosystèmes naturels ou des paysages reconnus au niveau mondial. Elles couvrent la vaste gamme des zones naturelles de la biosphère (hautes montagnes, plaines fortement affectées par l'action de l'homme, régions côtières et insulaires, forêts tropicales, déserts, régions polaires, etc.). Pour répondre aux critères requis pour la désignation au titre du statut de la réserve de biosphère, l'aire candidate doit en principe :
18 Pour plus de détails voir le site web du CIC : http://www.unesco.org/mab/icc.shtm 19 Les conseils nationaux du Mab ont la charge de préparer les dossiers de proposition de réserves de biosphère et de s'assurer le concours des organisations gouvernementales, des institutions et des autorités locales concernées pour la constitution du dossier. Chaque proposition est évaluée par le Comité consultatif sur les réserves de biosphère établi par l'UNESCO. Ce comité formule des recommandations à l'attention de CIC qui prend la décision de la désignation. Celle-ci est communiquée par le Directeur général de l'UNESCO à l'État concerné. 20 Voir questions sur les réserves de biosphère : http://www.futura-sciences.com/comprendre/d/dossier257-1.php Par ailleurs, le développement territorial durable doit se traduire dans une réserve de biosphère par des pratiques portant fondamentalement sur la compatibilité entre les impératifs de conservation de la biodiversité dans son sens large (biologique, écologique, paysagère et culturelle) et l'amélioration des conditions d'existence des populations. Contrairement à une époque où la conservation de la nature « était trop souvent pensée comme devant fonctionner en circuit fermé, isolant une aire naturelle de l'univers humain environnant »,21 les réserves de biosphère sont conçues pour mettre en pratique un « concept ouvert » de la gestion de l'environnement. Considérées comme étant « des lieux privilégiés pour les hommes et la nature»,22 les réserves de biosphère préconisent ainsi une approche communautaire de gestion qui s'appui sur la convergence de l'ensemble des intérêts présents dans l'aire protégée et l'ouverture de celle-ci sur son environnement humain et son interaction avec la région géographique élargie à laquelle elle appartient.23 De ce fait, une réserve de biosphère est un terrain d'expérimentation de modalités participatives de prise de décision en matière de la gestion de l'environnement et de l'aménagement du territoire dans l'objectif de leur protection à long terme. Pour qu'une RB atteigne ses objectifs, le Conseil International de Coordination du MAB recommande que les efforts de gestion de l'environnement soient focalisés sur cinq domaines d'activités24 : § Le maintien des systèmes écologiques et la préservation de la diversité biologique, paysagère et culturelle ; § L'exploration des approches innovantes pour l'aménagement du territoire et la gestion durable des ressources naturelles surtout au niveau des paysages ruraux. § La formulation et la diffusion des informations sur la gestion durable des ressources naturelles et la promotion des comportements correspondants ; § Le renforcement des capacités humaines et institutionnelles de gestion de l'environnement § La contribution au système mondial d'observation de l'environnement.
Le statut de la RB est destiné à assurer trois fonctions complémentaires représentées par le schéma suivant : 21 Cf. « Réserves de biosphère : des lieux privilégiés... » op.cit, page 17. 22 Inspiré du titre de la publication de l'UNESCO « Les réserves de biosphère : des lieux privilégiés pour les hommes et la nature», Paris, UNESCO, Mars 2003. 23 Idem, page 17 24 Cf. www.unwsco.org/mab/icc/shtml Source : http://www.agirpourlabiodiversite.fr/spip.php?article388 Figure 11 : Les trois fonctions des réserves de biosphère
Par ailleurs, les réserves de biosphère sont des territoires représentatifs de paysages naturels et culturels bénéficiant pour leur plus grande partie d'une protection réglementaire. Contrairement à tout autre catégorie d'aires protégées, les réserves de biosphère englobent des habitats à intensités d'usages différentes (Forêts, terrains cultivés, zones résidentielles, parcours, milieux aquatiques, patrimoine culturel...), chacun de ces habitats peut se présenter en trois états (i) état naturel peu ou pas perturbé, (ii) état d'exploitation plus ou moins équilibré au plan économique, culturel et écologique, et (iii) état dégradé. Chaque habitat peut éventuellement évoluer d'un état à l'autre selon l'effet des facteurs naturels et humains qu'il subit.
Une réserve de biosphère est caractérisé par un schéma de zonage en trois aires délimitée chacune en fonction des composantes humaines, environnementales et paysagères et de leur contribution au développement de l'aire protégée. On distingue entre des aires centrales ou de conservation, des zones tampon ou d'entretien et des aires de transition ou de coopération : (voir schéma ci-dessous) : Copyright UNESCO / www.unesco.org/mab Figure 12 : le schéma de zonage d'une réserve de biosphère Un plan de gestion est élaboré dans chaque réserve de biosphère pour les trois zones pour la mise en oeuvre de statut et en conciliant les trois fonctions. En 1995, le concept de la réserve de biosphère a été considérablement révisé avec l'adoption par la Conférence générale de l'UNESCO de la «Stratégie de Séville » pour les réserves de biosphère.25
Déclarée par la Conférence internationale de l'UNESCO réunie à Séville (Espagne) en mars 1995,26 il s'agit d'une stratégie prospective du programme Mab consistant en une réflexion sur les RB au 21ème siècle. C'est un plan d'action commun qui met en exergue le rôle que peuvent jouer les RB Voir dates et événements clés sur l'évolution de la notion de réserve de biosphère et du réseau mondial dans la préservation de la diversité biologique au niveau mondial et la protection des valeurs paysagères et culturelles grâce à des pratiques durables d'aménagement du territoire. La stratégie de Séville déclare que : « les réserves de biosphère pourront devenir le théâtre de la réconciliation de l'homme avec la nature. Elles peuvent permettre de mettre en valeur les connaissances accumulées du passé pour répondre aux besoins des générations futures » et «servir à surmonter les difficultés induites par le caractère sectoriel de nos institutions ».27 Cette nouvelle vision laisse comprendre que les réserves de biosphère se situent dans un cadre intégrant leur fonction de conservation aux défis du développement local au mieux des intérêts des communautés locales présentes et futures. Inscrite dans la logique du développement durable, la stratégie de Séville renforce effectivement le principe de gestion communautaire des ressources naturelles et de la participation active et équitable de tous les acteurs présents au sein d'une RB. En 25 Voir dates et événements clés sur l'évolution de la notion de réserve de biosphère et du réseau mondial dans « Les réserves de biosphère : des lieux privilégiés pour les hommes et la nature », op. cit, page 19. 26 Cette Conférence a rassemblé 387 participants de 102 pays et de 15 organisations régionales et internationales. 27 « Les réserves de biosphère : des lieux privilégiés pour les hommes et la nature », op. cit, page 24. raison de l'extrême diversité des situations locales dans le monde, la stratégie de Séville est conçue sous forme de recommandations générales et énumère pas moins de 90 tâches devant être entreprises au niveau mondial, national ou à celui de chaque RB, et donne les grandes lignes d'une série d'indicateurs de performance. Ces tâches visent toutefois à atteindre quatre objectifs bien définis. (Voir encadré n° 02). Plus que des simples aires protégées, les réserves de biosphère sont aujourd'hui devenues des véritables territoires d'expérimentation des approches de développement durable en alliant connaissances scientifiques et modalités de gouvernance. Elles favorisent l'étude des interactions entres les populations d'un territoire et leur milieu de vie et l'analyse des dynamiques spatiotemporelles de la formation/déformation des paysages.28 28 Cf. le troisième axe d'action du « Projet de programme 2006-2007 de l'UNESCO sur les réserves de biosphère » mettant l'accent sur les liens entre diversité biologique et diversité culturelle. www.unesco.org/mab |
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