Remerciements
Nos profonds remerciements sont adressés en premier
lieu à l'équipe de la Chaire en Paysage et Environnement de
l'Université de Montréal (CPEUM) et tout particulièrement
Philippe POULLAOUEC-GONIDEC, Gérald
DOMON, François TREMBLAY et Marie-Rose
LYNDSAY pour leur hospitalité, leur collaboration et pour la
qualité de l'encadrement qu'ils ont aimablement réservé
à nos activités de stage et pour leur précieuses remarques
et orientations.
M. Oumar Cissé, Directeur de
l'Institut Africain de la Gestion Urbaine (IAGU), et Mme Caroline
GALLEZ Directrice du Département Environnement à
l'Université Senghor et Mme Caroline GAUTHIER-KURHAN,
Directrice du Département Gestion du Patrimoine à
l'Université Senghor, qui ont bien voulu accepter d'évaluer ce
travail malgré leurs charges, trouvent ici nos vifs remerciements pour
leur appui et leur patience.
Nous tenons également à exprimer à Mme
Caroline GALLEZ, directrice de Département Environnement de
l'Université Senghor, notre sincère gratitude et notre profonde
reconnaissance pour son influence bienfaisante dans la mise en place des
conditions qui nous ont permis d'entreprendre avec succès nos
études de Master.
Tous ceux qui ont contribué de près ou de loin
à la réalisation de ce travail trouvent ici également
l'expression de notre sincère gratitude.
Mots clés :
Paysage, Environnement, Réserve de
biosphère, Projet de territoire, Sud Marocain, Analyse SWOT, Palmeraie,
Oasis, Urbanisation.
Introduction :
Les oasis symbolisent la vie humaine dans les milieux arides.
Elles occupent une superficie de l'ordre de 30 % des terres
émergées le long de la grande écharpe aride qui relie
l'Afrique à l'Asie (du Sahara à la Mongolie) et abritent une
population d'environ 150 millions de personnes. Ce sont des
écosystèmes exemplaires patiemment élaborés sur une
gestion parcimonieuse des ressources naturelles et construites sur
l'optimisation des interactions entre les activités d'exploitation et la
préservation du potentiel écologique extrêmement fragile
dans un milieu hostile à la vie. En Afrique du nord, les oasis
remplissent une fonction de conservation capitale dans la mesure où
elles dressent une barrière écologique face au désert. En
ce sens elles font partie du patrimoine de l'humanité et
constituent des expériences vivantes du
développement durable.2Au sud
Marocain, une oasis est
toujours une palmeraie où poussent des cultures
vivrières étagées. Des céréales et des
cultures maraichères (oignons, carottes, navets, courges, piments,
tomates et pomme de terre), des cultures fourragères (luzerne), une
arboriculture variée (olives, abricots, figues, amandes, pommes), le
tout dominé par le palmier dattier. Culture de subsistance
extrêmement importante dans les oasis, les dattes représentent un
aliment de base pour les populations et jouent un rôle important dans
l'économie locale. Actuellement, du fait de l'introduction d'un
modèle de production inadapté, l'équilibre
écologique et socioéconomique établit dans les oasis
depuis environ 7000 ans est de plus
en plus rompu.3 La grande
ouverture des oasis sur le monde urbain amorcée, au Maroc, à
partir de
l'époque coloniale (1912-1956) s'est accompagnée
d'une détérioration du milieu naturel au point que
développement est vécu comme antinomique à
l'environnement. Les palmeraies concernées par cette étude sont
particulièrement affectée par l'expansion vertigineuse et
anarchique de l'urbanisation du style occidental. Par conséquent, le
milieu naturel et ses qualités paysagères se sont rapidement
détériorés. Aujourd'hui, la définition des oasis
doit prendre en compte des déformations, des ruptures et des tensions.
La rupture entre les référents du passé et les symboles de
la vie contemporaine altèrent le paysage, affectent le milieu naturel et
efface l'originalité des lieux. Ainsi, le territoire oasien est
tiraillé entre des volontés contradictoires et des
intérêts divergents. Il perd sa force, son fonctionnement, son
harmonie et son identité. L'ordonnancement particulier des paysages de
la palmeraie qui répondaient à des règles construites
ingénieusement et en parfaire symbiose avec le milieu environnant se
trouve actuellement souvent chamboulé jusqu'à
générer des paysages chaotiques dont on ne peut plus cerner les
origines et la cohérence. De plus, la rapidité des
2 Cf. « La voix des oasis au
sommet mondial du développement durable à Johannesburg »,
(Juin 2002), Réseau Associatif de Développement Durable des
Oasis (RADDO), Déclaration de Goulmim, Maroc.
3 Cf. « Développement
durable du tourisme dans les déserts : Lignes directrices à
l'intention des décideurs », (2006), Organisation Mondiale du
Tourisme, (OMT).
changements ne laisse plus au temps la capacité de
corriger les erreurs, et celles-ci engendrent toujours plus de
dégradations. Les références d'interventions sont de plus
en plus éloignées des réalités locales et les
modèles sont dictés par des normes et des intérêts
qui sont totalement externes aux territoires.
Au cours des 20 dernières années, l'intervention
de l'UNESCO traduit la volonté des pouvoirs publics marocains de
redonner vie aux oasis et de mettre en valeur leur potentiel local. En 1987,
l'inscription d'un chef-d'oeuvre de l'architecture oasienne en Afrique, Ksar
Aït Benhaddou à la province de Ouarzazate, sur la liste du
patrimoine mondial manifeste une première reconnaissance universelle de
la richesse des oasis et de la nécessité de préserver leur
héritage naturel et culturel. Une deuxième reconnaissance de
l'UNESCO intervient en novembre 2000 par la nomination des palmeraies de trois
provinces (Errachidia, Ouarzazate et Zagora) dans le réseau mondial des
réserves de biosphère. Les oasis ont toujours du mal à
saisir ces opportunités de grande envergure pour se lancer avec
succès dans des démarches du développement local sur la
base des richesses environnementales et patrimoniales si ce n'est pas quelques
références positives de réhabilitation de monuments de
l'architectures en terre où les préoccupations
environnementales et paysagères
commencent à se manifester surtout dans les projets
à vocation touristique.4
Conscient du fait que l'engagement pour la mise en oeuvre du
statut de la réserve de biosphère suppose une réflexion
d'ensemble sur la sauvegarde et la mise en valeur du potentiel environnemental
et paysager, ce travail se propose d'élucider les enjeux et les
opportunités que représente la reconnaissance de l'UNESCO pour le
développement local des oasis et insiste sur la pertinence de la
démarche du « Projet de territoire »
expérimentée avec succès dans plusieurs contextes
territoriaux à traves le monde. Dans le cadre de son « Programme de
lutte contre la désertification et lutte contre la pauvreté par
la sauvegarde et la valorisation des oasis dans la province de Tafilalet
», le bureau du PNUD au Maroc a notamment lancé en Mars 2006 un
projet de développement sur la base d'un projet de territoire pour le
«Pays des Oasis du Tafilalet» qui permet de « formaliser les
orientations stratégiques et les choix de développement
» et « engagera ainsi un processus de concertation et de
coopération local totalement inédit et porteur d'une
vision
d'avenir ».5
(Voir annexe 01). Dans l'ensemble, cette
étude propose une démarche du projet à
4 Quelques sites naturels et
culturels à forte vocation touristique ont
bénéficié ces dernières années des
opérations d'aménagement et de réhabilitation tels que
Ksar Ait Benhaddou site du patrimoine mondial à Ouarzazate, les dunes
de Merzouga, les lacs d'Imilchil et la palmeraie des Oulad Chaker à
Errachidia. Certains Ksour de la province d'Errachidia sont également
restaurés dans le cadre d'un projet de l'Agence Nationale de lutte
contre l'Habitat Insalubre (Groupe Al Omrane). Ces Ksour sont (Targa à
Errachidia, Abou'am et El Fida à Rissani, Jerana à Erfoud et
Igoulmimen à Goulmima). Ces opérations pilotes de conservation et
de mise en valeur génèrent un intérêt de plus en
plus grandissant pour la prise en compte du paysage et du milieu naturel dans
les projets d'aménagement et du développement local.
5 Cf. « Programme de lutte
contre la désertification et lutte contre la pauvreté par la
sauvegarde et la valorisation des oasis dans la province de Tafilalet »,
Unité Environnement et Énergie, Programme des Nations Unies pour
le Développement, PNUD - Maroc, Mars 2006.
mettre en oeuvre dans la zone de la réserve de
biosphère pour d'une part se rendre compte du rôle
déterminant de la protection de l'environnement et de la valorisation
des paysages dans la promotion du développement local et d'autre part
mobiliser les acteurs locaux autour de la notion du « projet de
territoire » dans l'objectif de leur motivation collective. L'exercice
auquel se livre ce travail se propose d'apporter des éléments de
réponse aux questions suivantes :
· Qu'est c'est qui fait la richesse des oasis ?
· Qu'est ce qui fait leur force aujourd'hui ?
· Comment s'opère leur évolution et leur
dynamique interne ?
· Comment souhaitons-nous les voir évoluer ?
· Comment faire des choix d'aménagement en
conformité avec les orientations du statut de la réserve de
biosphère de l'UNESCO en matière de l'environnement et du paysage
?
· Quels moyens avons-nous pour soulever ce défi
dans une région où les ressources économiques sont pauvres
?
Le travail se fixe alors pour objectif global
de :
· Contribuer à la mise en oeuvre du statut de la
Réserve de Biosphère des Oasis du Sud Marocain à traves
les objectifs spécifiques suivants :
· Mesurer les conséquences de la
dégradation de l'environnement et du paysage dans le contexte d'une
urbanisation croissante sur certains aspects de la vie des populations tels que
la qualité du milieu naturel, l'attractivité touristique et le
développement local;
· Comprendre les facteurs et les incidences de la
dégradation de l'environnement et du
· paysage dans les zones tampon (palmeraies) de la
réserve et proposer une stratégie de conservation et de mise en
valeur;
· Définir une démarche de projet faisant de
la préservation de l'environnement et de la valorisation du paysage un
vecteur du développement local;
· Proposer des itinéraires méthodologiques
d'élaboration du diagnostic territorial (environnemental et paysager)
sur la base de l'analyse SWOT,6
· Aider les collectivités locales et les acteurs
associatifs à structurer leur réflexion autour des enjeux du
statut de la réserve de biosphère et à saisir les
opportunités qu'il fournit pour définir en commun un projet du
développement local.
6 L'analyse (ou la matrice) SWOT
est l'acronyme des quatre mots anglais : (Strengths, Weaknesses, Opportunities,
Threats) équivalents de (Forces, Faiblesses, Opportunités et
Menaces). Certains auteurs francophones utilisent l'abréviation AFOM en
traduisant « Strenghts » par « Atouts » au lieu de Forces.
L'analyse SWOT fera l'objet d'une section à la troisième partie
de ce travail.
Hypothèse de travail :
Dans la continuité conceptuelle des travaux que nous
avons effectués pendant notre stage à la CPEUM,7
cette étude s'intéresse aux rapports entre le
développement territorial et la valorisation des ressources
environnementales et paysagères. Les palmeraies de la réserve de
biosphère recèlent bien évidement une pluralité
considérable de paysages de qualité associés à une
richesse écologique et patrimoniale reconnues mondialement. Elles sont
toutefois confrontées à des pressions humaines et physiques
grandissantes comme l'urbanisation et la désertification. À la
lumière de ce constat,
nous estimons qu'une meilleure prise en compte des
considérations environnementales et paysagères dans les pratiques
d'aménagement du territoire et de l'urbanisme est une véritable
clé d'entrée à la mise en oeuvre du statut de la
réserve de biosphère et que la recherche des nouvelles fonctions
économiques pour le potentiel environnemental et paysager en relation
avec les secteurs du développement local, notamment
l'écotourisme, en est une autre. Nous entendons par ces deux
conclusions, l'articulation entre deux exigences interdépendantes : la
préservation de la qualité du milieu naturel et de
l'identité territoriale des palmeraies à travers des programmes
de conservation et de mise en valeur tout en assurant à leurs
habitants un minimum de bien-être.
Approche méthodologique :
Au Maroc, l'essentiel des travaux de recherche
effectués sur la gestion de l'environnement sont presque exclusivement
consacrés aux problématiques de pollution dans le milieu urbain.
Les rares études menées sur les problèmes de
l'environnement dans les oasis ont le plus souvent un caractère
descriptif ou du diagnostic et manquent de vision intégrée du
phénomène. Sur le plan de la démarche, notre travail se
base sur l'analyse du rôle de la gestion de l'environnement dans la
dynamique du développement local en s'intéressant aux
phénomènes structurants qui renforcent la dépendance de
l'espace oasien vis à vis des grandes villes et qui sont responsable de
l'érosion du potentiel écologique et paysager local. Ce travail
de recherche n'a point l'ambition d'aborder l'ensemble des problèmes
posés par la dégradation de l'environnement dans les oasis, ni de
couvrir tout le territoire de la réserve de biosphère. À
cause de la similitude entre les palmeraies du sud Marocain quant aux facteurs
et aux conséquences de la dégradation de l'environnement et de la
modification des paysages, nous nous contenterons de présenter certains
aspects du problème à travers des exemples illustratifs
localisés dans l'une ou l'autre palmeraie de la réserve. Ce
travail est subdivisé en trois parties :
7 Un rapport de stage est
déposé à la CPEUM (juillet 2006) et au Département
Environnement de l'Université Senghor (septembre 2006).
- La première décrit les
caractères dominants du milieu naturel oasien, ses
spécificités environnementales et paysagères et sa
fragilité extrême. Elle traite ensuite le concept de la
« réserve de biosphère » et du «
programme Mab de l'Unesco » et les enjeux et les
opportunités liés à leur mise en oeuvre dans la zone
d'étude. Dans l'ensemble, cette première partie nous permettra de
saisir la richesse environnementale et la diversité paysagère des
palmeraies du sud Marocain et l'intérêt de les préserver
dans le cadre d'un projet territorial d'ensemble.
- La seconde, à caractère
analytique, se penche sur l'étude des facteurs et des formes de
dégradation de l'environnement et du paysage oasiens. Un accent
particulier sera porté sur la dynamique de l'urbanisation contemporaine
et les perturbations environnementales et paysagères qui s'en sont
suivies durant les dernières décennies. Cette analyse sera
illustrée par des phénomènes remarquables tels que la
perte des terres agricoles, les effets des voies de circulation automobile sur
la modification des paysages, l'abandon des villages traditionnels et la
fragmentation de l'habitat contemporain, etc.
- La troisième dresse les
modalités d'élaboration d'un projet de territoire intercommunal
et présente les lignes directrices pour l'intégration de
l'environnement et du paysage dans les pratiques d'aménagement et de
gestion de la réserve de biosphère.
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