2.2.4. La première République (1960-1965)
L`annexion du Congo à la Belgique, reposait sur le
problème de contentieux territorial avec deux puissances
européennes : l`Angleterre et l`Allemagne. En effet, dès 1908,
les autres puissances reconnaitront la fin d`un Etat et l`avènement d`un
autre considéré comme une colonie sous le contrôle
tutélaire de la Belgique, un Etat constitutionnel. Les conflits avec
l`Allemagne au Kivu et avec l`Angleterre à Ufumbiro avaient
relancé la méfiance et retardé la reconnaissance. Il
était un fait que les limites du Congo avaient été
l`oeuvre de la diplomatie personnelle de Léopold II malgré des
divergences qui s`étaient produites sur les diverses cartes de l`EIC au
cours des négociations. Mais lors de la notification de la
neutralité adressée au gouvernement allemand le 25 Août
1885 par le souverain belge, devenu monarque absolu à titre personnel de
l`Etat Indépendant du Congo, le Comte de Hatzfeld, agissant au nom de
son pays, avait pris acte des limites du nouvel Etat. Lorsque les
résistances avaient eu lieu dans le rang des troupes commandées
par la Baron Dhanis, celui-ci était obligé de battre en retraite
et évacuer la région du Kivu en attendant des renforts. Ce fut
dans ces conditions que le capitaine allemand Bethe, en novembre 1898, prenait
possession le long de la Ruzizi-Kivu. Pour lui, il s`agissait d`une mesure de
sécurité provisoire. Cette position allait se transformer en une
occupation définitive qui nécessita des négociations.
Celles-ci aboutissaient à la signature
Par TAMBWE URBAIN Kaweza
du protocole du 10 avril 1910 qui fixa la frontière
à la ligne médiane du Kivu. Bien que des discussions eussent
surgi au sujet des îles du lac, malgré l`accord du 6 août
1906, le contentieux n`avait pas été complètement
vidé. Lors du partage anglo-allemand des zones d`influence mutuelle,
l`Allemagne reconnaissait que le Mont Ufumbiro appartenait à
l`Angleterre. Mais cet accord du 1er Juillet 1890 s`était trompé
sur l`emplacement exact de Ufumbiro. La carte publiée en 1885
appelée le pic extrême oriental de la chaine de Virunga du nom de
Ufumbiro alors qu=en réalité il s`agissait d`une pleine
située au pied du Mont Muhavusa comme l`avait établi la
commission géographique belgo-allemande. De 1907 à 1908, le
gouvernement anglais demanda à Bruxelles d`établir la
délimitation de Ufumbiro tout en sachant que sa réclamation n`a
rien de commun avec l`endroit désigné dans la convention de 1890.
Malgré la protestation du gouvernement belge, les britanniques usant de
la force, envahirent le territoire contesté en Juillet 1909.
Conformément aux stipulations du traité du 9 mai 1906 et de
l`Acte de Berlin, le gouvernement de Bruxelles réclame l`arbitrage. Il
fallait attendre 1910, lorsque l`Allemagne et l`Angleterre s`étaient
mises d`accord pour imposer leur point de vue à la Belgique qui perdit
ainsi l`équivalent de 8.000km2 au détriment du Congo
et au profit de l`Allemagne. A travers cet accord l`Angleterre recevait
l`accès aux trois pics les plus orientaux de massif de Virunga. Ce qui
fut confirmé par la convention du 3 février 1915 ratifiée
par un arrêté-loi belge de 1918. Aussi, le territoire
cédé à bail à l`EIC par la convention du 12 mai
1894 fut-il rétrocédé aux autorités
anglo-soudanaises, le 6 juin 1910, à la suite du décès de
Léopold II le 17 décembre 1909. De l`enclave de Lado, le Congo ne
gardera que la petite plage de Mahagi sur le Lac Albert. Après le
règlement de ces questions, les Etats-Unis et l`Angleterre reconnaitront
le Congo belge en 1913 (88). La période postcoloniale,
toujours des tensions, l`insécurité, l`occupation
étrangère ; l`ingéniosité de Léopold II,
nous a laissé des contentieux frontaliers loin de terminer ;
commençant par cette période.
(88) KALUBI, M. L., op cit, pp87,
88,89 Par TAMBWE URBAIN Kaweza
60 | P a g e Mémoire de Licence en Sciences
Politiques et Administratives, Option Sciences Politiques
Les élections de 1960 avaient consacré la
victoire de quelques partis régionaux, qui avaient fait un grand score,
chacun dans son bastion. A l`échelle nationale, seul le Mouvement
Nationaliste Congolais (MNC), de Patrice LUMUMBA avait remporté la
victoire sans toutefois constituer la majorité absolue. Les
négociations qui s`en suivirent révélèrent les
divergences profondes qui existaient au sein de la classe des «
évolués », devenus par la force des choses «
l`élite » politique appelée à négocier avec le
pourvoir colonial (89).
Il se fait observé un fait ici que, les partis
politiques sont nés des mutuelles communautaires de ressortissants de
l`intérieur vivant à Léopoldville. Ce que le Feu
Professeur SAMBA KAPUTO qualifié de F.D.A (Functionally Diffuse
Association), un groupement des tribalisés vivant dans un milieu urbain.
Cette tendance est visible dans le processus de formation des villes en Afrique
et pratiquement au Congo-Kinshasa, voir-même des partis politiques.
? Le premier cycle de la crise de la
décolonisation (1960-1963) : (90)
- 5-13/7/1960 : mutinerie de la Force publique pages
- 1/7/1960 : Proclamation sécession Katanga
- 14/7 : Rupture avec la Belgique, Appel à l`ONU
- 16/7 : Intervention Casques bleus
- 8/8/ : Sécession du Sud-Kasaï
- 5/9/ : Révocation réciproque Lumumba et
KASAVUBU
- 12/9 : Installation Gouvernement ILEO
- 14/9 : Coup d`Etat Colonel Mobutu, installation commissaires
généraux
- 14/10 : Retraite GIZENGA à Stanleyville
- 2/12/ : Arrestation de Lumumba à LODI
- 12/12 : Proclamation République populaire du Congo
Capitale : Stan`ville
- 17/1/1961 : Assassinat de Lumumba au Katanga
- 6-12/03 : Table ronde Tananarive
- 24-28/4 : Table ronde Coquillhativille
- 22/7 : Début conclave de Lovanium
- 2/8 : Mise en place Gouvernement ADOULA
(89) KANDA, K., A., L'interminable crise du
Congo-Kinshasa origines et conséquences, p92
(90) NDAYWEL, É. I., op
cit, p472
Par TAMBWE URBAIN Kaweza
-
61 | Page Mémoire de Licence en Sciences
Politiques et Administratives, Option Sciences Politiques
28/8 : Offensive contre Katanga
- 14/1/1962 : Arrestation d`Antoine Gizenga
- 17/1/1963 : Fin de la sécession kantagaise.
2.2.5. La deuxième République (1965-1997)
Après avoir pris le pouvoir par Cout-d`Etat, Mobutu
lança une opération de charme destinée à
séduire le peuple déjà lassé par les querelles des
hommes politiques, incapables de s`entendre sur l`essentiel, dans
l`intérêt de la population.
Cette opération consistait à faire semblant de
maintenir en place des institutions démocratiques, tout en bannissant
les partis politiques, et à lancer de « slogan » et autres
grands projets, pour soit disant améliorer les conditions sociales de la
population. La deuxième phase fut celle de la consolidation du pouvoir
personnel de celui qui se fit appeler plus tard « l`homme du 24 novembre
». Premièrement, cela se traduisit par la création du parti
Etat, le MPR qui devint non seulement l`unique institution politique et seule
source du pouvoir au pays, mais aussi l`Etat organisé politiquement
(91).
Vers le début des années quatre-vingt-dix, pris
de peur au vu des changements, parfois très violents qui
s`opéraient en Europe centrale et l`Europe de l`Est, les dictateurs
Africains furent contraints d`initier le processus de démocratisation,
Pour le Zaïre, c`est par un discours émouvant, prononcé le
24 avril 1990 par le Maréchal Mobutu, que la première
période de transition fut inaugurée. Sous une forte pression
extérieure, à laquelle s`étaient ajoutés des
troubles intérieurs, Mobutu accepta d`instaurer le multipartisme et
d`organiser une « conférence à caractère mondial
» pour essayer de mettre en place des « institutions de transition
» (92).
De 1960-1970 : l`économie dans le chaos politique et
administratif. L`histoire économique du Congo est étroitement
déterminée au cours de cette période par
l`éclatement des structures politiques et
(91) KANDA, K. A., op cit,
p119-120
(92) Idem, p20-21
Par TAMBWE URBAIN Kaweza
62 | P a g e Mémoire de Licence en Sciences
Politiques et Administratives, Option Sciences Politiques
Par TAMBWE URBAIN Kaweza
l`effondrement administratif survenus dès la
deuxième semaine d`indépendance, aboutissant dès 1961 au
paroxysme de l`anarchie et de la division, subissant ensuite un processus
spasmodique de décomposition pour aboutir vers 1967 aux premières
étapes du redressement.
En fait, la croissance de l`économie congolaise avait
été stoppée dès la fin de 1957. Cette
récession de nature conjoncturelle n`avait pas été suivie
en 1959, comme partout ailleurs, d`une reprise, à cause de
l`évolution politique. L`arrêt des investissements privés
et la fuite massive des capitaux, de même que la situation
précaire des budgets, préparent les difficultés de la
balance extérieure et des finances publiques que la République du
Congo connaitra très tôt. La colonisation lègue par contre
au jeune Etat une économie productive admirablement
équipés.
Le processus de dislocation politique est tel qu`en 1961 le
Congo se trouve morcelé en trois ou quatre zones politiques et par
conséquent en zones économiques distinctes. Cette situation prend
fin en 1962 mais la dégradation économique mais aussi
financière s`amplifie. L`année 1963 et le premier trimestre de
1964 semblent marquer un arrêt, grâce à une certaine
stabilisation politique, au redressement des marchés mondiaux et
à une réforme monétaire insuffisante et tardive mais qui
permet au début d`assainissement financier et ralenti un moment
l`inflation. Ce redressement précaire ne résolve cependant pas
les questions politiques fondamentales et n`est suivi d`aucune
réorganisation administrative ou financière véritable. A
la rébellion de 1964, tout est compromis à nouveau et les
conditions d`une nouvelle inflation sont réunies. Les séquelles
des troubles ne sont surmontés qu`en 1966 et en 1967. La réforme
monétaire du 24 Juin 1967 permet un ensemble de mesures de
réorganisation administrative et financière et de relance de la
production dans un climat de stabilité politique retrouvée.
Il convient de constater l`étonnante résistance
de l`économie congolaise au milieu de la décomposition politique
et administrative et en dépit d`une très profonde
dégradation financière et monétaire. Elle est la
63 | P a g e Mémoire de Licence en Sciences
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conséquence paradoxale du dualisme économique et
de la prédominance du secteur étranger, structure
caractéristique du sous-développement qui avait favorisé
la détérioration de la situation avant 1960. Mais c`est la
résistance des entreprises agricoles, minières et industrielles
européennes qui a sauvé l`économie de la ruine au milieu
de la crise politique et qui lui fournit un de ses meilleurs atouts pour
l`avenir.
? La situation des réseaux de
transport
La situation troublée du pays n`entraîne, au
début, que peu de destructions dans les entreprises de transport. Elles
prendront quelque ampleur à l`occasion de la réduction de la
sécession katangaise et des rébellions, surtout sur le C.F.L. le
manque d`entretien du matériel et la pénurie des pièces de
rechange ont eu dans doute des conséquences plus graves, de même
que la baisse de productivité du personnel dont l`encadrement
européen a été sensiblement réduite. La
dégradation du réseau routier est particulièrement
profonde et sa reconstitution et la reprise de l`entretien sont un des
problèmes les plus délicats de la relance économique. La
gestion déplorable de l`Otraco constitue également un
problème complexe.
Pendant toute la période, la situation
financière des réseaux se trouve évidement lourdement
grevée par la chute des trafics et la hausse des couts à laquelle
les tarifs ne s`adaptent, comme toujours, que très partiellement et avec
retard.
Un pas important a été fait en direction de la
nationalisation des réseaux. La convention du 6 février 1965,
entre la Compagnie C.F.L et la République Démocratique du Congo,
prévoit l`abandon par la Compagnie, en faveur de l`Etat congolais, de
ses concessions de transport et des immobilisations correspondantes (y compris
la moitié de la flottille du Lac Tanganyika). Cette Compagnie, devenue
« Compagnie des Grands Lacs », souscrit à part égale
avec l`Etat congolais les 50 millions de capital d`une société
d`économie mixte, la « Société Congolaise des Chemins
de Fer des Grands Lacs », créée le 3 septembre 1965 (et
devenue en 1967 l`Office
Par TAMBWE URBAIN Kaweza
64 | P a g e Mémoire de Licence en Sciences
Politiques et Administratives, Option Sciences Politiques
Congolais des Chemins de Fer des Grands Lacs », qui
assure la gestion du réseau pour compte de la République
Démocratique du Congo.
Une flotte marchande congolaise est créée,
à partir de l`ancienne Compagnie maritime congolaise. Une
société est établie sous ce même nom le 18
février 1967 ; son capital est souscrit par l`Etat congolais (60%),
l`Otraco (30%) et la C.M.B (10%). Elle dispose au départ de 3 navires
jaugeant ensemble 34.000 tonnes.
Un commissariat aux transports, créé en avril
1967 et dépendant directement du ministre des Transports et
Communications, est chargé des problèmes de transport. Le
Comité des transporteurs est dissout (93). Il faut
reconnaitre qu`au lendemain de la prise du pouvoir par Mobutu, une certaine
amélioration avait été enregistrée sur le plan
économique. Les investisseurs étrangers avaient vraisemblablement
été rassurés par l`installation au pouvoir (à tous
les niveaux) d`hommes jouissant de la confiance de l`occident. Malheureusement
cette reprise ne s`accompagna pas d`amélioration des conditions sociales
de la population et, ce en raison d`une gestion chaotique
caractérisée par une gabegie financière. La population
européenne coloniale avait en fait été remplacée
par une caste composée essentiellement des membres de la famille et des
« amis fidèles » du nouveau président de la
République (94). Une des axes de la zaïrianisation voir
le côté industriel.
Le pays est renommé République du Zaïre en
1971 d`après un mot local pour rivière, et portera ce
nom jusqu`en 1997. De même, le fleuve Congo est rebaptisé
Zaïre et une nouvelle monnaie, le zaïre, divisé en 100 makuta
(singulier likuta), remplace le franc. Les noms des personnes sont
africanisés. Le général Mobutu prend le nom de Mobutu Sese
Seko et oblige tous ses concitoyens à supprimer les prénoms
à connotation occidentale et à
(93) Bulletin du COMITRA, p9
(94) KABANDA, K., A., op cit, 120
Par TAMBWE URBAIN Kaweza
65 | Page Mémoire de Licence
en Sciences Politiques et Administratives, Option Sciences
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66 | P a g e Mémoire de Licence en Sciences
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rajouter un « post-nom ». L`abacost est
promulgué, interdisant le port de costumes occidentaux (95).
Et, les villes et provinces changes de nom.
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