II.3.4. COMMUNICATION INFORMELLE
Il serait illusoire de croire qu'une organisation peut ou doit
maîtriser toutes les formes de communication : la « communication
informelle », celle qui se
1 Mucchielli, Alex .La communication interne : les
clés d'un renouvellement. Paris. A. Colin, 2001
I S T A 2 0 1 4 - 2 0 1 5 Page | - 36 -
fait devant la machine à café, ou lors d'un
repas de service est inéluctable. Ni organisée, ni
structurée, elle émerge naturellement des interactions sociales
entre les membres d'une communauté. Le réseau formel ne parvient
pas, et c'est heureux, à satisfaire tous les besoins de communication et
d'information des individus. Le danger serait qu'au sein d'une organisation,
elle soit l'unique forme de communication et qu'elle se substitue à
toutes les autres.
II. 3.5. LES ENJEUX D'UNE BONNE COMMUNICATION
Au coeur des relations sociales, la communication est un
élément déterminant. Le cycle de formation à la
pratique des relations collectives de travail proposé par Agoria Academy
Social Relations l'a mis à plusieurs reprises en exergue. Quels sont les
aspects d'une communication efficace, qu'elle soit interne ou externe, en temps
de paix comme de turbulences sociales ? « On peut voir, dans les
enquêtes de satisfaction réalisées auprès du
personnel, au coeur de la plupart des entreprises, que la communication interne
ne satisfait que rarement. Il y a souvent un fossé important entre ce
qui se fait et ce qu'attendent réellement les membres du personnel en
terme de communication », a introduit Luc Janssens, administrateur
d'Agoria Academy Social Relations. Les besoins en la matière ne sont pas
les mêmes selon que l'entreprise soit grande ou petite, en fonction de la
nature des activités de la société. Mais, peu importe
l'environnement, pour bien faire, l'information doit faire l'objet d'une
stratégie claire pour servir les objectifs de l'entreprise. «
Aujourd'hui, les outils sont nombreux, les canaux d'information sont multiples,
de l'e-mail à la rencontre informelle en passant par le meeting, la
réunion de travail, l'Intranet, le journal d'entreprise. Encore faut-il
pouvoir les utiliser pour structurer la communication interne afin de
répondre aux attentes », assure Luc Janssens. «
Améliorer la communication interne exige de se demander, au
préalable, ce que les gens attendent, pour mieux cibler la
communication».
Un des enjeux est d'organiser au mieux la cascade de
l'information, pour que les informations essentielles arrivent et que les
messages ne laissent pas place à de mauvaises interprétations.
Gérer la communication, c'est aussi gérer la
rumeur. Plus qu'organiser la transmission de l'information du management vers
les opérateurs, il faut aussi trouver les moyens de faire remonter
l'information, celle qui circule au coeur de l'entreprise. Et, au besoin,
pouvoir démentir de fausses informations ou rassurer, motiver,
fédérer. Une bonne communication implique de pouvoir
écouter, dialoguer, en laissant place, par exemple, à des espaces
de libre expression, lors de réunions d'équipe. Les informations
ou besoins exprimés pourront alors être relayés par les
chefs d'équipes vers le middle et top-management.
Une bonne communication ainsi qu'une stratégie
d'information soignée doit être pensée pour être au
service de l'entreprise et favoriser les relations sociales en son sein. Une
communication claire, cohérente et transparente doit faciliter les
rapports avec les partenaires sociaux et faciliter les négociations
quand celles-ci doivent avoir lieu.
I S T A 2 0 1 4 - 2 0 1 5 Page | - 37 -
Le privilège de communiquer « Dans le cadre de
négociations, ou de tensions sociales, on a souvent l'impression que le
privilège de communiquer, à l'issue d'un conseil d'entreprise par
exemple, appartient aux représentants des travailleurs qui, de
manière générale transmettront l'information aux
travailleurs avec leur propre interprétation », explique Luc
Janssens. « Dans ce contexte, il est intéressant de pouvoir se
demander comment les dirigeants peuvent faire passer les messages comme ils
l'entendent. Car ce n'est pas forcément aux syndicats que revient le
privilège de communiquer. Ce à quoi ils ont effectivement le
droit, c'est d'être informés en priorité des projets et de
pouvoir en discuter en primeur».
Malgré tout, les travailleurs ont en la matière
un avantage sur les dirigeants. Bien organisés, ils ont souvent de bons
relais dans chaque recoin de l'entreprise. Alors que les forces syndicales ne
tergiversent pas et communiquent très volontiers, le management, lui, a
tendance à peser le pour et le contre, les opportunités de
communiquer ou non, à s'interroger sur la manière. L'information,
donc, arrive plus vite aux oreilles des travailleurs par le biais des
syndicats. Ce qui ne manque pas d'engendrer des problèmes, quand, par
exemple, les travailleurs arrivent avec des questions alors que le middle
management, lui, n'a pas encore les informations lui permettant d'apporter les
réponses adéquates.
« Tant que les managers en sauront moins que le conseil
d'entreprise dans son ensemble, et donc des représentants des
travailleurs, il y aura toujours un problème », assure Luc
Janssens. « Rien n'empêche les dirigeants, dans les minutes qui
suivent un conseil d'entreprise, d'envoyer un e-mail à l'ensemble du
personnel reprenant les grandes lignes et les motivations d'une
décision, un fact sheet. De s'organiser pour avertir le middle
management rapidement, afin qu'ils s'assurent que la communication passe bien,
et dans le bon sens, auprès de l'ensemble du personnel », poursuit
Luc Janssens. « Encore une fois, on soulignera l'importance d'une bonne
préparation avant même que le conseil d'entreprise ait lieu, de
l'enjeu de délivrer au sein de celui-ci une information claire,
cohérente et qui ne laisse pas la place à de multiples
interprétations. Pour cela aussi, il faut pouvoir anticiper les
questions des partenaires sociaux, s'y préparer ».
« Gérer » les médias Communiquer vers
l'extérieur est tout aussi complexe. Comment « gérer »
les médias ? C'est la question qu'a posée Benoît July,
journaliste indépendant, qui collabore notamment avec le journal Le
Soir. « De manière générale, suite à une
mauvaise nouvelle, les entreprises savent qu'elles risquent d'être
sollicitées par des journalistes. Dès lors, que fait-on ?
Doivent-elles subir ou anticiper cet état de fait ? Doivent-elles
laisser le terrain aux seuls représentants syndicaux ? »,
Interroge-t-il.
On a souvent l'impression que les représentants des
travailleurs sont souvent les principaux interlocuteurs des médias quand
un conflit social éclate. Il y a surtout que, la plupart du temps, ils
sont la seule source d'information des journalistes, les dirigeants ne
souhaitant que très rarement réagir. « Les journalistes qui
font bien leur travail prendront le temps d'interpeller les dirigeants. A ces
derniers d'être prêts à apporter des
I S T A 2 0 1 4 - 2 0 1 5 Page | - 38 -
réponses. Préparation et pro activité
sont deux mots clés qui doivent - permettre aux entreprises
d'évacuer la crainte des médias », explique Benoit July. Le
journaliste a avancé quelques clés à l'usage du
management, pour mieux « gérer » les médias. Pour
commencer, il a insisté sur la cohérence à maintenir entre
communication interne et communication externe. Il ne faudrait en effet pas
qu'une information vers l'extérieur, même en temps de paix social,
donne l'impression d'un décalage avec celle ressentie en interne. De
bons relais, il faut aussi pouvoir s'appuyer sur des relais de confiance vers
l'extérieur. « Pourquoi ne pas établir une relation durable
avec un certain nombre de journalistes, en les invitant à visiter les
infrastructures, en étant disponible, prêt à
répondre à tout type de demandes. Les sollicitations peuvent
être multiples, et n'interviennent pas forcément en temps de
crise. » De bonnes relations avec les médias pourront être
utiles, aussi bien en période de paix sociale que lorsque des
turbulences interviennent. Dans tous les cas de figure, quand on communique
vers l'extérieur, il faut pouvoir délivrer un message clair, une
information factuelle mise en contexte. « De manière
générale, il est déconseillé de sous-traiter en
totalité la communication. Il est important de garder la maitrise sur le
processus de communication, en se faisant conseiller ou aider. Mais le
communicateur, celui qui s'adresse aux médias, doit
impérativement être trouvé en interne », explique
Benoit July.
|