Analyse des mariages coutumiers. Du droit comorien au droit malgache.( Télécharger le fichier original )par Oumar IBRAZA Université de Toamasina - Maà®trise en droit privé 2013 |
§2.Le MWAFAKA et ses effetsLeMWAFAKA (27(*)) peut simplement se définir comme la demande officielle en mariage par la famille du mari à l'endroit de la famille de la future mariée(A) mais signalons que celui-ci produit des effetsjuridiques (B). A- Le MwafakaPour parvenir à ce stade, il y a de nombreux dialogues et de recherches d'informations entreprises par la famille du mari, car aux Comores comme à Foumbouni, la demande incombe toujours à la famille du conjoint. Pour commencer, une information sur la future belle-fille doit être ouverte secrètement par les parents du conjoint. Elle vise surtout à s'assurer de la conduite de la conjointe à l'égard de sa famille et de son entourage. Parfois, l'enquête peut également concerner son niveau de scolarisation et l'état financier de sa famille. Si les informations répondent aux aspirations de la famille du conjoint, alors les parents donnent leur agrément. Nous tenons surtout à préciser que le mariage aux Comores est une affaire de famille. Cette dernière rend complexe la procédure du grand mariage, car elle ne tient pas compte du sentiment du couple. A cet effet, CHOUZOUR affirme, « compte tenu de la grande complexité d'éléments entrant en jeu dans le choix de la fiancée, l'affaire ne peut être laissée à une seule personne. Le père, la mère, les grands parents et surtout l'oncle maternel entrent dans une longue période de conciliabules dont sont exclus les futurs conjoints » (28(*)). Après d'être sérieusement informée sur la future belle-fille, la famille va ensuite consulter le devin (mwalimu) car aucune action ne peut être entreprise sans l'avis de ce dernier. Cela veut dire que les deux familles respectent scrupuleusement la décision du mwalimu. Dans ce sens, on attend l'accord de deux familles sur le projet du mariage. b-ConfirmationLorsque le jour indiqué arrive, la famille du mari, accompagnée d'un certain nombre de notables, se présente auprès de la famille de la mariée. Après les échanges de salutations habituelles, le représentant de la famille du conjoint prend la parole. Il va tout de suite annoncer l'objectif de leur visite. Ainsi, au cours de cette demande, il n'y a pas d'échanges de paroles entre le couple .A propos de cette intervention CHOUZOUR dit : « Dans un discours sobre et émouvant, le représentant des notables mandaté présente la demande officielle. La famille de la fille doit répondre par la bouche d'un notable du même rang, appartenant autant que possible à la maison. On brûle de l'encens, on appelle la bénédiction d'Allah sur le mariage à venir et on se quitte » (29(*)). De nos jours, lemwafaka constitue l'une des phases les plus attendues du grand mariage, car elle entraîne les deux familles dans un cycle d'échanges et de contre-prestations que auparavant chose qui était rare (30(*)). En effet, une fois que le représentant de la famille du conjoint a terminé son intervention, il remet aux membres de la famille de la mariée, des bijoux, des pièces d'or (appelées pawuni).Ce dernier fait partie de la dote de la jeune mariée.A cela s'ajoute aussi 2 valises offertes à la jeune a titre de gloire. Ces deux valises ne font pas partie de la dote. Dans ce cas, il ne faut pas faire confusion. Mais avant l'étape finale de la formation du mariage, les parents des futures époux doivent se mettre d'accord sur la dot qui sera reçu par la future conjointe. 1-La dotL'offrande de la dot ou Mahary (31(*)) se présente comme étant une obligation coutumière voire religieuse (32(*)). La dot peut être représentée sous forme d'or, de boeufs, d'argent, de terrain, etc.A ce sujet, CHOUZOUR, écrivait « la dot proprement dite le mahari c'est ce que donne le mari en échange de la femme qu'il reçoit. Selon l'islam la dot est obligatoirement, et peut consister en n'importe quel objet : or, argent, animal, terrain, meuble, maison, vêtement tout ce qui est en principe monnayable. Une tradition prophétique révèle que Mahomet suggéra à un individu d'une extrême pauvreté, qui n'avait strictement rien à donner, à réciter quelques versets du Coran en mettant dans cette récitation l'intention de l'utiliser comme mahari. Aux yeux de la religion musulmane, la véritable dot c'est l'or ou l'argent, de valeur plutôt symbolique donné par le fiancé lors d'une cérémonie très discrète, exécutée en présence d'un cadi (l'umbiziwa). C'est là la véritable consécration du mariage » (33(*)). Mais de nos jours, on utilise des pièces d'or accompagnées d'une sommetrès importante plié dans une enveloppe. Dans le mariage traditionnel, il existe une répétition de dotation, mais elle est énoncée globalement dans le rite précédent. Il y a des offrandes faites à titre de dotation lors de la cérémonie religieuse (umbiza). Celle-ci est aussi nécessaire, car elle permet à la personne concernée de vivre en couple en attendant la célébration du grand mariage. En tout cas, « l'umbiza suffit pour un couple qui n'a pas l'intention de se marier en conformité aux normes et principes coutumiers, et participer ainsi aux différentes catégories sociales » (34(*)). L'argent qui accompagne le pawuni symbolise une enveloppe déchiffrée par le notable à qui l'on a confié la dot tout entière. Il distribuera cet argent en passant par les habits des parents de la mariée, les rangs sociaux, l'orchestre de la mère et d'autres aux villes et villages de la Grande Comores : c'est l'arrondissement coutumier(35(*)). A partir de toutes ces pratiques, notamment de la distribution de cette somme à toutes ces catégories et instances sociales, la nouvelle retentit partout, et les parents ont l'honneur d'avoir marié (uloza) (36(*)) leur fille. De même, le fait que le mari ait envoyé le troupeau de boeufs pendant les préparations constitue une autre forme de dotation. Celui-ci est distribué aussi à toute un chacun du village en particulier les notables et les familles. La réalisation du rite (ntswashenda), littéralement (le neuvième jour) marque la fin des festivités. Cette journée se caractérise spécialement par un cortège féminin. Les femmes portent des plateaux sur leur tête avec « toutes sortes de tissus (soit traditionnels ou modernes), des paires de chaussures de toutes qualités, des ensembles, des trousseaux de toilette lesquels représentent encore une toute autre forme de dotation » (37(*)). Dans cette optique, quel rôle joue la virginité dans le mariage coutumier de Foumbouni ? * (27) Ahmed Chamanga MOHAMED et Gueunier NOËL JACQUES, Le dictionnaire comorien-français et français-comorien du R.P. Sableux, 1979, Paris, MWAFAKA signifie les fiançailles, P.321. * (28) Chouzour SULTAN, op.cit. P.12 ; * (29) Chouzour SULTAN, Pouvoir de l'honneur, P.173 ; * (30) DAMIR Ya Mkobe, confirme cela : les relations entre les membres, du réseau de parenté de chaque fiancé sont réactivées par un processus d'échange de don et contre dons qui consacrent leur alliance, P. 83. * (31) Mahary c'est un mot arabe, techniquement, plutôt le « douaire » de l'époux, mais terme est traduit localement en français par le mot « dot » ; * (32) Art 3, Katiba La Aanda ; * (33) Chouzour SULTAN,Pouvoir de l'honneur, P. 192. * (34) Chouzour SULTAN, op.cit. P.173 ; * (35) Art 2, Katiba La Aanda ; * (36) Uloza désigne l'action des marieurs que sont les parents et les germains des mariés, ces derniers étant mariés (ulozewa) par les premiers. * (37) Art 5Katiba La Aanda ; |
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