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Recherches sur l'état membre de la communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale.

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par Arsène Silvère EKO MENGUE
Université de Yaoundé II-Soa - Master II de recherche en droit public international et communautaire 2012
  

Disponible en mode multipage

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REPUBLIQUE DU CAMEROUN REPUBLIC OF CAMEROON

Paik-Travail-Patrie Peace-Work-fatherland

MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT MINISTRY OF HIGHER EDUCATION

SUPERIEUR

UNIVERSITE DE YAOUNDE II-SOA UNIVERSITY OF YAOUNDE II-SOA

FACULTES DES SCIENCES JURIDIQUES ET FACULTY OF LAW AND POLITICAL

POLITIQUES SCIENCES

DEPARTEMENT DE DROIT PUBLIC PUBLIC INTERNATIONAL LAW

INTERNATIONAL DEPARTEMENT

MEMOIRE DE MASTER II

EN DROIT PUBLIC INTERNATIONAL ET COMMUNAUTAIRE

THEME :
RECHERCHES SUR L'ETAT MEMBRE
DE LA
COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE

Mémoire

Présenté et soutenu par :

EKO MENGUE Arsène Silvère

Titulaire d'une Licence en droit et administration publique

Sous la direction du :

Pr. Alain ONDOUA

Agrégé des facultés de droit
Professeur titulaire à l'université de Yaoundé II

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère i

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

Avertissement sur les opinions

L`université de Yaoundé II n`entend donner aucune approbation, ni improbation, aux
opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être considérées comme propres à

leur auteur

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère ii

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

IN MEMORIAM

A mon feu petit frère Gérard Faguet,

Qui jamais ne partagera cette expérience avec moi

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère iii

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

DEDICACE

A mes parents Jean-Marc et Beatrice,
Pour leur soutien dans ma poursuite des études.

A Arnaud, Astride, Sandra, Rita et Marie-Pierre
Pour leurs encouragements et leurs affections.

A Mitspa

Pour son amour, sa compréhension et sa patience qui sont mes
meilleurs garde-fous

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère iv

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

REMERCIEMENTS

Je tiens d`abord à exprimer ma plus haute reconnaissance et ma profonde gratitude à mon directeur de mémoire, le Professeur Alain ONDOUA, qui a accepté de guider mes premiers pas dans la recherche et a permis au novice que je suis de découvrir le droit de la CEMAC dans son aspect le plus passionnant. La rigueur dont il a toujours fait preuve, les précieux conseils et les éclairantes observations qu`il m`a prodigué, ont été déterminants dans ma

volonté d`entreprendre ce travail et de le mener à bien.

Je remercie grandement mon père EKO ONDO Jean-Marc, ma mère EKO AVOMO Beatrice
et mon grand frère EKO EKO Arnaud pour leur dévouement avec qualité afin je fasse un
parcours de master sérieux, dans la plus grande insouciance matérielle, qu`ils voient dans ce
mémoire le fruit d`un lien familial admirable.

J`adresse également mes sincères remerciements à mon ainé académique MANDENG
NYOBE Jacques pour sa disponibilité, ses conseils et les relectures de notre tapuscrit. Et à
mon meilleur ami NDOUMBE NDONGO Rosier tout simplement.

Enfin je remercie tous ceux qui par leur confiance m`ont encouragés, et également à ceux qui
auraient pu empêcher l`existence de ce mémoire. Les uns m`ont entouré par-delà les
distances le temps d`une bienveillante affection qui a maintenu intacte la flamme de la
passion ; les autres ont constitués l`aiguillon qui pousse le néo chercheur à mettre en action sa
méditation contemplative. Qu`ils soient tous, pour ses raisons, remerciés.

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère V

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

RESUME

L`appartenance d`un Etat souverain à une organisation supranationale telle que la Communauté Economique et Monétaire de l`Afrique Centrale (CEMAC) - dont la construction tend à dépasser radicalement l`inter étatisme, pour une nouvelle forme d`organisation plus enclin dans ses relations avec ses membres à des rapports d`influence et de subordination - met en exergue les implications de la qualité de membre de la CEMAC. Les implications de la qualité de membre, soulève l`importance des injonctions de l`ordre juridique communautaire sur l`Etat souverain. Celui-ci subissant des implications normatives et institutionnelles. Faisant ainsi des Etats membres des instruments d`intégration sous régionale et inversement ceux-ci faisant de la communauté une plateforme de rapprochement des intérêts nationaux.

Abstract

A sovereign state`s membership to supranational organization such as Economic and Monetary Community of Central Africa (EMCCA), whose construction tends to radically out stand inter-etatism, for a new form of political organization inclined to subordinate links towards its members, puts forward the effects of the status of member of the Economic and Monetary Community of Central Africa (EMCCA). This status brings out the economic importance of the sovereign state`s new status, because the new cohesion implies or imposes a subordination, both legally prescribed by internal laws of member states, and the institutional structure of their state to community project rendering them sub regional integration instrument on one hand and the another hand making them instruments of national interests

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère vi

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

LISTE DES PRINCIPAUX SIGLES ET ABREVIATIONS

AEF Afrique Equatoriale Française

AFDC Association français de droit constitutionnel

aff. Affaire

AJDA Actualité juridique, droit administratif

BCEAEC Banque des Etats de l`Afrique équatoriale et du Cameroun

BDEAC Banque de développement des Etats de l`Afrique centrale

BEAC Banque des Etat de l`Afrique centrale

CE Communautés Européennes

CE Conseil d`Etat français

CEBEVIRH Commission économique du bétail, de la viande et des ressources

Halieutiques

CEMAC Communauté économique et monétaire de l`Afrique centrale

CICOS Commission internationale du bassin du Congo-Oubangui-sangha

CIJ Cour internationale de justice

CJCE Cour de justice des communautés européennes

COBAC Commission bancaire de l`Afrique centrale

Coll. Collection

Comm. Commentaire

CPJI Cour permanente de justice internationale

Dir. Sous la direction de

EIED Ecole inter Etats des douanes

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère vii

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

Fasc. Fascicule

ibid. ibidem ( au même endroit)

IEF Institut de l`économie et des finances

IHT-CEMAC Ecole d`hôtellerie et de tourisme de la CEMAC

ISSEA Institut sous régional de statistique et d`économie appliqué

ISTA Institut sous régional multisectoriel de technologie appliquée,

de planification et d`évaluation de projets

JO Journal officiel de la république du Cameroun

JOCE Journal officiel des Communautés européennes

JORF Journal officiel de la République française

LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence

N° Numéro

OCEAC Organe de coordination pour la lutte contre les endémies en

Afrique centrale

OHADA Organisation pour l`harmonisation en Afrique du droit des affaires

ONU Organisation des nations unies

op. cit. Opere citato (dans l`ouvrage cité)

p. Page

Par. Paragraphe

pp. de la page ... à la page ...

PUF Presses universitaires de France

RADSP Revue africaine de droit et de science politique

(devenu revue juridique des Etats d`Afrique francophone)

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère viii

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

RCADE Recueil des cours de l`académie Européenne

RCADI Recueil des cours de l`académie de droit international

Rec. Recueil

Rep Répertoire

RFDA Revue française de droit administratif

RFDC Revue française de droit constitutionnel

RJPIC Revue juridique et politique Indépendance et coopération

SDN Société des nations

Sect. Section

spéc. Spécialement

suiv. Suivantes

UCAD Université Cheik ANTA DIOP

UDE Union douanière équatoriale

UDEAC Union douanière et économique de l`Afrique centrale

UE Union Européenne

UEAC Union économique de l`Afrique centrale

UEMOA Union économique et monétaire ouest africain

UMAC Union monétaire de l`Afrique centrale

UMOA Union monétaire ouest africain

Vol. Volume

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère ix

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

SOMMAIRE

AVERTISSEMENT IN MEMORIAM DEDICACE

REMERCIEMENT RESUME/ ABSTRAT

INTRODUCTION GENERALE

I. La Notion d'Etat membre et la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique centrale

II. La communauté des Etats et les Etats de la communauté d'intégration

PREMIERE PARTIE LE STATUT D'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC

CHAPITRE I : LA CONSISTANCE DU STATUT D'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC

SECTION I . L'acquisition du statut d'Etat membre de la CEMAC

SECTION II . La caractérisation de l'Etat membre de la CEMAC

CHAPITRE II : LES POUVOIRS DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC

SECTION I : Le pouvoir « constituant » de l'Etat membre de la CEMAC

SECTION II . Les pouvoirs constitués de l'Etat membre de la CEMAC : législatif et exécutif.

DEUXIEME PARTIE LES IMPLICATIONS DE LA QUALITE DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR L'ETAT SOUVERAIN

CHAPITRE 3 : LES IMPLICATIONS NORMATIVES DE LA QUALITE DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR UN ETAT SOUVERAIN

SECTION 1 . La normalisation communautaire de l'ordre juridique interne de l'Etat membre de la CEMAC

SECTION 2 . L'hypothèse de la violation de la norme communautaire : la responsabilité de l'Etat membre de la CEMAC

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère X

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

CHAPITRE 4 : LES IMPLICATIONS INSTITUTIONNELLES DE LA QUALITE DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR L'ETAT SOUVERAIN

SECTION 1 : Les implications de la qualité d'Etat membre de la CEMAC sur les institutions nationales

SECTION 2 : L'évaluation des rapports entre les institutions symétriques communautaires et étatiques

CONCLUSION GENERALE BIBLIOGRAPHIE

TABLE DES MATIERES ANNEXES

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

INTRODUCTION GENERALE

Dans le contexte actuel de mondialisation, il n`est point surprenant de constater à quelle vitesse le monde s`organise selon les logiques régionales. Le regroupement plus ou moins formalisé au plan institutionnel de plusieurs Etats appartenant à une aire géographique délimitée, à des fins de coopération économique, monétaire et/ ou politique, intrigue et soulève des questions. Parce que dans ce jeu de rapports et de relations interétatiques imprégnés de consensualisme et de volonté souveraine, les implications et la force transformatrice du droit issu des projets intégratifs devraient être pris au sérieux, bien qu`elles semblent être confondues avec celles du droit international et de ce fait relativisée. L`impératif des projets intégratifs bouscule les normes préétablies dans les différents ordres juridiques des Etats membres, et du même coup les conceptions les plus absolutistes de la souveraineté. Ceci étant dû premièrement au fait de la spécificité de l`organisation d`intégration et deuxièmement au caractère contraignant de la norme communautaire. L`impact du processus d`intégration interpelle à plus d`un titre. Parce que de ce droit, matériellement distant du droit international, l`on relève des éléments de fonctionnement des Etats, des organisations internationales et même des fédérations d`Etats1. L`un des pères fondateurs des études sur l`intégration2 considérait la dynamique de l`intégration régionale comme un « processus par lequel les acteurs politiques dans plusieurs ensembles nationaux sont persuadés de modifier leur loyauté, leurs attentes, et leurs activités politiques vers un nouveau centre dont les institutions possèdent ou demandent autorité sur les Etats nationaux préexistants »3. Cette appréhension concerne autant le processus politique que social, dans la mesure où elle met en avant le transfert de loyauté, du processus décisionnel, et de négociation pour l`établissement de nouvelles institutions supranationales influençant les Etats, que ce soit sur un plan politique, institutionnel ou normatif. Grosso modo l`action corrosive du processus communautaire dans la majeure partie des projets d`intégration exerce une force qui met en exergue un triptyque :

? Une intégration verticale renvoyant à des interactions structurées qui émergent entre
acteurs au niveau communautaire, national et local.

? Une intégration sectorielle s`intéressant à la réglementation partielle ou totale des
différentes politiques publiques.

1 SAURUGGER (S), Théories et concepts de l'intégration européenne, sciences po. Les presses, 2009, p 1

2 Ernst Haas Bernard (1924 - 6 Mars 2003) était un politologue américain d'origine allemande qui a fait de nombreuses contributions à des discussions théoriques dans le domaine des relations internationales. Il est le fondateur du néo fonctionnalisme comme une approche à l'étude de l`intégration. Néo fonctionnalisme reconnaît l'importance des États nationaux, mais souligne également le rôle des groupes d'intérêts régionaux et la bureaucratie des organisations régionales.

3 . SAURUGGER (S), Théories et concepts de l'intégration européenne, op cit, p16.

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 1

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

? Et une intégration horizontale mettant en relief les rapports entre Etats membres.

Comme toutes les organisations d`intégration ayant pour but la création d`une communauté, la Communauté économique et monétaire de l`Afrique centrale (CEMAC) se conforme à ce triptyque suscité. Ses textes ne s`écartent pas du principe fondamental inhérent (la primauté) aux règles intégratives, comme mis en exergue par l`arrêt Costa contre Enel4. Tout au contraire ils mettent un point d`honneur sur l`action contraignante qu`exerce le projet intégratif sur l`Etat membre de la CEMAC (I). La dialectique des rapports entre l`Etat membre et le projet de construction communautaire apparaît ici nécessaire pour présenter les implications transformatrices du projet communautaire sur les Etats (II).

I) LA NOTION D'ETAT MEMBRE ET LA CEMAC.

Nous présenterons d`une part la notion d`Etat membre (A) comme acteur du projet communautaire, et d`autre part, l`organisation supranationale qu`est la CEMAC (B).

A/ L'ETAT MEMBRE.

Pour mieux appréhender la notion de l`Etat membre il faudra définir l`Etat (1) avant de présenter le qualificatif de membre à lui reconnu (2).

1) LA DEFINITION DE L'ETAT.

Tant au plan international que communautaire, l`Etat est l`acteur principal de la construction d`un nouvel ordre juridique supranational, tel que la communauté d`intégration. En droit international, il est rarement défini de manière conceptuelle5. Sa caractérisation univoque se borne à fournir, les éléments de son identification. Il s`agit là en particulier de son aspect organique (phénomène sociologique, de force ou de puissance). La définition la plus à même de renseigner sur la consistance internationale de l`Etat n`est autre que son appréhension juridique, parce qu`elle nous permet de cerner l`entité juridique, et les attributs qui lui sont reconnus, dans la perspective d`agir sur le plan international. C`est dans ce sens qu`il faut signaler que, la réception du phénomène communautaire au niveau des Etats, est la résultante de l`exercice d`un attribut juridique de l`Etat : la souveraineté. De même que le transfert de compétence de l`Etat à la communauté est la prérogative de l`exercice de la souveraineté par

4 CJCE 15 juil. 1964, Costa c/ Enel, Aff. 6/64, Rec. 1141. « Il découle de la jurisprudence de la cour de justice que la primauté du droit communautaire est un principe fondamental dudit droit. Selon la cour, ce principe est inhérent à la nature particulière de la communauté européenne » Cite par Joël MOLINIER dans son fascicule « Primauté du droit de l'union Européenne », Rep communautaire Dalloz, sept 2011. P2-3.

5 Kamto (M), La volonté de l'Etat en droit international, cours de l`Académie de droit international de la Haye, tome 310, 2004, p 24.

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 2

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

l`Etat. Ce rappel est nécessaire, pour comprendre le statut de sujet principal qui est le sien au niveau communautaire. On peut alors définir l`Etat «... comme une collectivité qui se compose d'un territoire et d'une population soumis à un pouvoir politique organisé » et qui « se caractérise par la souveraineté »6. Cette définition descriptive permet d`identifier cet être -Etat, mais elle n`est pas opératoire pour expliquer comment cet être juridique agit. La référence à l`aptitude à agir en droit renvoie à la capacité juridique qui est propre à la personnalité juridique d`un sujet de droit7. La personnalité juridique permet de reconnaître à une entité la capacité d`exercer le droit et de subir des obligations. En d`autres termes, la personnalité juridique est le prédicat de l`Etat, et le concept Etat n`aurait pas de sens sans cet élément fondamental qu`est la personnalité juridique qui l`institue comme être juridique8. Comme on l`a noté à juste titre « [l'] Etat existe en tant que personne morale et c'est à ce titre que [ses] attributs légaux lui sont attachés »9. C`est de cette aptitude d`être titulaire de droits et d`obligations, ou à se voir reconnaître ou attribuer des pouvoirs que l`Etat se trouve être le sujet principal des constructions communautaires. Dans le même sens et pour mieux cerner juridiquement l`Etat, le professeur Maurice KAMTO affirmera que « l'Etat est une personne morale c'est-à-dire un être juridique construit, mais reposant sur des éléments physiques constitutifs, apte à être titulaire de droits et des obligations ou à se voir reconnaître ou attribuer des pouvoirs lui permettant de participer, en tant que sujet de droit, à la formulation et à l'application des règles de droit dans l'ordre juridique international »10. La personnalité juridique est donc l`attribut, qui permet l`adhésion de l`Etat à un projet communautaire, tel que la CEMAC. Sauf que cet acte d`adhésion qui donne à l`Etat la qualité de membre d`une organisation supranationale telle que la CEMAC, implique bien plus que la personnalité juridique de l`Etat. Elle exige davantage un effort de limitation de sa souveraineté pour l`atteinte des objectifs de la communauté.

2) L'ETAT MEMBRE.

Parler de l`Etat membre revient vraisemblablement à analyser la qualité de membre et sa portée pour l`Etat. Le statut de membre implique l`appartenance et la participation de l`Etat à une association ou à un regroupement supranational ayant pour but la convergence de certains intérêts.

6 La commission d`arbitrage pour la Yougoslavie dans son avis N°1 du 29 novembre 1991, cité par NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P) ; PELLET (A) ; et FORTEAU (M), Droit international public, LGDJ, 2009, 8e édition p 450.

7 KAMTO (M), La volonté de l'Etat en droit international, cours de l`Académie de droit international de la Haye, tome 310, 2004, p 25.

8 Ibid. p 27.

9 COMBACAU (J) et SUR (S), Droit international public, 3e édition, Paris, Montchrestien, 2009, p 221.

10 KAMTO (M), La volonté de l'Etat en droit international, cours de l`académie de droit international de la Haye, tome 310, 2004, p 27.

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 3

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

La qualité de membre dans les projets intégratifs est reconnue généralement, et exclusivement aux Etats, dès lors qu`ils adhèrent à un traité établissant un ordre juridique11 supranational à l`instar de la CEMAC. Ce statut est précédé d`un certain nombre de conditions que l`Etat candidat à l`adhésion devra remplir pour accéder au traité institutif. Etre membre entraîne de facto certaines conséquences pour l`Etat : la reconnaissance d`un nouveau pole de décisions sur des domaines bien précis, et l`appartenance de la population nationale à une communauté d`intégration. De jure, le statut d`Etat membre implique une nouvelle identité juridique liée, à la réception au sein de l`ordre normatif interne des Etats des règles de droit communautaire. Des conséquences de la reconnaissance à l`Etat du statut de membre, l`on peut déceler des droits et des obligations, inhérents à la qualité de membre de la communauté d`intégration. Les obligations liées aux projets intégratifs sont généralement contraignantes, bien plus qu`au niveau international. Parce que le droit de l`intégration est plus un droit de subordination qu`un droit de coordination. C`est dans ce sens que la cour de justice, dans l`arrêt Costa contre Enel précisera que « [l'] intégration au droit de chaque pays membre, de dispositions qui proviennent de sources communautaires , et plus généralement, les termes et l'esprit du traité, ont pour corolaire l'impossibilité pour les Etats de faire prévaloir contre un ordre juridique accepté par eux sur une base de réciprocité, une mesure unilatérale ultérieure qui ne saurait lui être opposable[...] issue d'une source autonome, le droit né du traité ne pourrait donc en raison de sa nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte interne quel qu'il soit, sans perdre son caractère communautaire.... »12. Cet arrêt suscite des interrogations allant au-delà de la primauté de l`ordre juridique communautaire. Des interrogations sur ce qui reste de l`identité de l`Etat, membre de la Communauté d`intégration13. Autrement dit, que devient l`Etat nation souverain dès lors qu`il adhère à un projet communautaire ? La force juridique du droit communautaire impose une certaine réadaptation, non négligeable, transformant autant l`institutionnel que le normatif de l`Etat. Il nous revient alors, de prendre avec plus de sérieux l`article 44 du traité révisé de la CEMAC qui stipule que «les actes adoptés par les Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la Communauté pour la réalisation des objectifs du présent Traité sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale

11 L`on peut entendre par ordre juridique « l`organisation d`un système plus ou moins complexe de normes et d`institutions destinées à s`appliquer effectivement aux sujets constitutifs d`une communauté déterminée » cité par DUPUY (P-M), « L'unité de l'ordre juridique international », cours général de droit international public(2000), recueil des cours de l`Académie de droit international de la Haye, tome 297, 2002, P66.

12 Cité par PELLET (A), Les fondements juridiques internationaux du droit communautaire, cours de l`académie du droit européen, volume 5, livre 2, 1997, P193-271.

13 MARTIN (S), « L'identité de l'Etat dans l'union européenne : entre « identité nationale » et « identité constitutionnelle », RFDC, 2012/3 N°91, P 13-44.

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 4

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

contraire, antérieure ou postérieure »14. On aurait pu s`attendre à la modification des constitutions au sein des Etat membres de la CEMAC, pour recevoir la norme communautaire et aussi dans le but d`organiser les rapports qui naîtront entre certaines institutions étatiques et communautaires. De toute évidence, l`appartenance et la participation à la Communauté ouvrent la voie au questionnement classique sur la fin de l`Etat-nation et sur l`entrée à l`ère de l`Etat post-souverain15. Cependant obligation est faite à la communauté de respecter l`identité nationale des Etats membres.

De ce qui précède, l`on peut dire que l`Etat membre est une entité structuro-juridique souveraine, membre d`une organisation d`intégration. Cela ne signifie pas l`existence de deux ordres juridiques au sein de l`Etat, mais au contraire, une réception, une insertion et une accommodation des normes communautaires dans l`ordre juridique interne des Etats. Grosso modo, l`Etat membre est une entité juridique souveraine, une nation et un membre d`une organisation supranationale à l`instar de la CEMAC. Comment se présente alors la CEMAC ?

B/ LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L'AFRIQUE CENTRALE (CEMAC).

La CEMAC est l`héritière d`une histoire lointaine, et dans un espace géographique bien plus grand (1). C`est également une organisation qui se veut véritablement d`intégration sous régionale (2).

1) L'APERCU HISTORIQUE DU MOUVEMENT D'INTEGRATION EN AFRIQUE CENTRALE.

La recherche pour les Etats des conditions favorables au développement économique et politique, et à l`instauration d`une paix durable est identifiée comme une des causes de l`inflation des phénomènes d`intégration régionale. L`Afrique n`en est pas étrangère. Tout au contraire elle apparaît même selon l`histoire comme une des plus anciennes communautés d`intégration, mais paradoxalement la moins avancée de toutes. La CEMAC, communauté économique et monétaire de l`Afrique centrale regroupe en son sein six Etats (le Cameroun, le Tchad, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, et la république Centrafricaine). La CEMAC se trouve être l`héritière de l`UDEAC (Union Douanière des Etats de l`Afrique Centrale) créée en 1963, qui fait suite à l`UDE (Union Douanière Equatoriale) créée le 29 juin 1959. Et avant elle l`AEF (Afrique Equatoriale Française), entité géoéconomique intégrée créée dès 1910. Et à ce titre, le processus de la CEMAC a un enracinement plus lointain que la majorité des communautés

14 Le traité révisé de la CEMAC signé à Yaoundé au Cameroun le 25 juin 2008 et également révisé le 30 janvier 2009 a Libreville au Gabon.

15 NABLI (B), « L'union des Etats et les Etats de l'union », Revue pouvoirs-n°121 le rugby, 2007, P 113-120.

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 5

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

d`intégration régionale dans le monde. L`historique de la communauté (l`AEF en 1910 puis l`union Française en 1946 et la communauté française établie en 1958) atteste l`idée selon laquelle le processus remonte à la première moitié du siècle dernier16. L`élément de partage reste sans aucun doute, la proximité géographique, culturelle, et linguistique que la majorité de ses Etats partage ensemble, et qui contribue à solidifier leurs liens17. Le processus d`intégration régionale en Afrique centrale va être soumis à une double influence, tout d`abord celle de la France et enfin celle de la construction communautaire européenne.

L`influence de la France, puissance colonisatrice pour certains Etats va être importante. Parce que c`est elle qui organisera la gestion administrative et économique de ses possessions territoriales en Afrique à la manière d`une fédération18, et qui posera les bases d`une communauté intégrée. Enfin l`influence de la construction communautaire européenne, qui va se ressentir sur l`appellation des organes les plus importants de la CEMAC, et également sur les principes qui structurent son mode de fonctionnement. Toutes ces influences vont être reprises par les Etats africains de successions coloniales françaises lors de la mise en oeuvre des institutions communautaires telles que UDEAC, et la CEMAC ou encore UMOA et UEMOA19. Il faut aussi noter qu`au plan monétaire, l`évolution mise en exergue sur le plan économique a été suivi par la création du Franc CFA (francs des colonies françaises d`Afrique) devenue plus tard francs de la communauté financière d`Afrique. Sa gestion sera confiée le 14 avril 1959 à une institution nouvelle, la banque centrale des Etats de l`Afrique équatoriale et du Cameroun (BCEAEC)20. L`on peut donc dire que la CEMAC ou plutôt la communauté intégrative de l`Afrique centrale porte en elle, un lourd héritage et une expérience d`intégration qui aurait fait d`elle, l`une des communautés d`intégration régionale au monde la plus achevée. Malheureusement, la maturité de la CEMAC n`est pas égale à sa longue histoire sus présentée. Tout de même, celle-ci demeure selon l`esprit des textes institutifs, une organisation d`intégration sous régionale.

16 TCHUENTE (J), l'application effective du droit communautaire en Afrique centrale, thèse de doctorat en droit public, université de Cergy pontoise, 2011, P 9.

17 Ibid. P 12

18 Des 6 Etats qui constituent la CEMAC seule 4 étaient des colonies françaises (Congo ; Gabon ; Tchad ; et la Centrafrique). Le Cameroun était administré par la France par mandat de la SDN à partir de 1922 puis sous tutelle de l`ONU des 1946. Seule la Guinée équatoriale était une colonie espagnole.

19 UMOA : Union Monétaire Ouest Africaine, UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

20 Bien plus tard la banque centrale des Etats de l`Afrique équatoriale et du Cameroun (BCEAEC) sera remplacée par la Banque des Etats de l`Afrique centrale (BEAC).

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 6

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

2) LA CEMAC, UNE ORGANISATION D'INTEGRATION SOUS REGIONALE.

La création de la CEMAC correspond au passage d`une union douanière (UDEAC) vers un marché commun. Comme le traité institutif de la CEMAC l`indique si bien, il s`agit pour la CEMAC de parachever le processus d`intégration économique et monétaire21. La CEMAC est une organisation d`intégration sous régionale instituée par le traité du 16 mars 1994 à N`djamena au Tchad, révisé le 25 juin 2008 à Yaoundé au Cameroun et également le 30 janvier 2009 à Libreville au Gabon. Elle a pour mission « de promouvoir la paix et le développement harmonieux des Etats membres, dans le cadre de l'institution de deux unions : une union économique et une union monétaire »22. La finalité étant « dans chacun de ses deux domaines, les Etats membres entendent passer d'une situation de coopération qui existe déjà entre eux à une situation d'union susceptible de parachever le processus d'intégration économique et monétaire »23.

Les objectifs mis en exergue par le traité sont les suivants : Créer un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services ; assurer une gestion stable de la monnaie commune ; sécuriser l`environnement des activités économiques et des affaires en général et enfin harmoniser les réglementations des politiques sectorielles. Pour atteindre les objectifs visés, la CEMAC dispose des institutions telles que : L`Union économique de l`Afrique

centrale (UEAC) ; l`Union monétaire de l`Afrique centrale (UMAC) ; le Parlement
communautaire et la Cour de justice communautaire.

Les organes de la CEMAC sont au nombre de sept : la Conférence des Chefs d`Etat ; le Conseil des ministres (UEAC), le Comité des ministériel (UMAC), Commission de la CEMAC, Banques des Etats de l`Afrique Centrale (BEAC), Banque de développement des Etats de l`Afrique centrale (BDEAC), et la Commission Bancaire de l`Afrique Centrale (COBAC).

Les activités de la CEMAC s`articulent aujourd`hui autour du programme économique régional qui vise à « faire de la CEMAC un espace économique intégré émergent, ou règnent la sécurité, la solidarité et la bonne gouvernance, au service du développement humain ». À cet égard, la CEMAC est aussi constituée, des institutions spécialisées. l`on peut citer entre autres : la Carte rose CEMAC qui est un service d`assurance de responsabilité civile auto mobile, de la Commission économique du bétail , de la viande et des ressources halieutiques ( CEBEVIRHA), de la Commission internationale du bassin du Congo-Oubangui-sangha ( CICOS), de l`école inter Etats

21 Article 1 du traité révisé de la CEMAC du 25 juin 2008 à Yaoundé révisé également le 30 janvier 2009 à Libreville au Gabon « [...] les Etats membres entendent passer d'une situation de coopération qui existe déjà entre eux, à une situation susceptible de parachever le processus d'intégration économique et monétaire ».

22 Ibid.

23 Ibid.

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des douanes (EIED), de l`Institut de l`économie et des finances (IEF), de l`école d`hôtellerie et de tourisme de la CEMAC (IHT-CEMAC), de l`Institut sous régional de statistique et d`économie appliquée (ISSEA), de l`Institut sous régional multisectoriel de technologie appliquée, de planification et d`évaluation de projets (ISTA), de l`Organe de coordination pour la lutte contre les endémies en Afrique centrale (OCEAC) et enfin du Pôle régional de recherches appliquées. Comme l`a si bien indiqué le Professeur Alain Pellet, les communautés sont des organisations24. Et la CEMAC ne fait pas l`exception.

Les communautés sont des organisations d`un type particulier qui ne sont « ni un, ni des Etats »25, du moins pas pour le moment, bien que l`action et l`activité de celles-ci soient assez comparables à celle des Etats. Et l`exemple marquant est la nature « constitutionnelle » du traité institutif. Cette illustration emporte l`organisation de la primauté des normes primaires, vis-à-vis d`autres traités conclus soit par les Etats membres, soit par l`organisation elle-même26. Il s`en suit une obligation pour les Etats membres de recevoir l`intégralité du traité instituant la CEMAC, c`est dire que la technique de réserve est inacceptable en ce qui concerne la structuration et le fonctionnement de l`organisation27. Evidement, la révision de l`acte constitutif est opposable à tous. La communauté intégrative est particulière, de par le principe de primauté et de ses corollaires que sont l`effet direct et l`applicabilité immédiate, source de comparaison de la communauté intégrative à l`Etat. Dans ce sens le traité CEMAC révisé énonce dans son article 44 cité plus haut, le dit principe. Il implique que les normes communautaires doivent être appliquées dès leur entrée en vigueur, malgré l`éventuelle préexistence ou adoption ultérieure d`une loi nationale incompatible. Également cette primauté impose au juge national de situer le droit communautaire au premier rang des normes nationales applicables « en tant qu'elle fait partie intégrante avec rang de priorité, de l'ordre juridique applicable sur le territoire de chacun des Etats membres »28. Il importe tout de même de signaler que toutes les normes communautaires ne bénéficient pas cette primauté. Il s`agit principalement comme l`arrêt Costa l`indique si bien du « droit né du traité ». Plus explicitement des actes primaires et des actes dérivés (les règlements, les décisions et les directives)29. Sur ce point le traité révisé CEMAC stipule que « les actes additionnels sont annexés au traité de la CEMAC et complètent celui-ci, sans le modifier, leur respect s'impose aux institutions, aux organes et aux institutions spécialisées de la communauté ainsi qu'aux autorités des Etats

24 PELLET (A), « Les fondements internationaux du droit communautaire », collected course of the Academy of european law, Volume 5, Book 2, P 193-271.

25 Ibid.

26 NGUYEN QUOC DINH, PELLET (A), DAILLIER (P), et FORTEAU (M), Droit International Public, LGDJ, 8e éditions, 2009, P 647.

27 Ibid.

28 MOLINIER (J), « Primauté du droit de l'union européenne », Rep communautaire Dalloz, sept 2011.

29 Ibid.

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membres »30. Cela traduit la valeur et la force obligatoire des normes communautaires sur les ordres juridiques nationaux. Cette spécificité soulève de nombreuses interrogations dans la mesure où l`Etat détenteur de la compétence de la compétence est confronté à l`autorité de la norme communautaire.

II) LA COMMUNAUTE DES ETATS ET LES ETATS DE LA COMMUNAUTE D'INTEGRATION.

L`effet de subordination et la force contraignante de la norme communautaire appellent à s`interroger sur l`impact de celle-ci sur les Etats membres. Pour comprendre l`éventuelle conciliation entre les deux ordres juridiques qui semblent a priori différents, il est impératif de confronter la qualité de membre avec l`Etat. L`Etat comme précisé plus haut se trouve être à la fois, un Etat nation souverain et membre de la Communauté (A). Pour plus d`efficacité dans notre travail, la méthode d`appréhension du thème et la problématique doivent tenir compte de cette réalité (B), c`est-à-dire la difficile conciliation entre l`Etat nation souverain et la qualité de membre d`une organisation d`intégration.

A/ L'ETAT NATION SOUVERAIN ET LA QUALITE DE MEMBRE DE LA COMMUNAUTE.

On évoquera d`une part l`Etat nation et la qualité de membre de la Communauté (1) et de l`autre, la relation entre l`Etat souverain et la qualité de membre de la Communauté (2).

1) L'ETAT NATION ET LA QUALITE DE MEMBRE DE LA COMMUNAUTE.

Jacques Delors affirmait que la communauté « se constitue progressivement par l'intégration d'Etat nation qui se sont solidement constitués [...] et dont la permanence est têtue »31. Cette essence historique, culturelle et politique qu`est la nation est heurtée par les implications de l`appartenance de l`Etat à la CEMAC. Malgré la subjectivité et l`objectivité32 de l`appréhension de la nation, le concept d`Etat se conjugue avec elle. Bien que la symbiose de l`Etat

30 Article 41 traité révisé de la CEMAC en 2009.

31 DELORS (J), « Ou va l'union européenne ? », 9 mars 2001, cycle de conférence aux Etats unis, cité par NABLI (B), « L'union des Etats et les Etats de l'union », op cit.

32« De la nation il existe deux définitions principales, conçues à partir des expériences nationales françaises et allemandes, la première est issue de la philosophie allemande du début du 19e siècle, défendue par exemple par Johann Gottlieb Fichte, selon laquelle les membres d'une nation ont en commun des caractéristiques telles que la langue, la religion, la culture, l'histoire, voire les origines ethniques tout cela les différenciant de membres des autres nations. La seconde, liée à la révolution française provient de la philosophie française du 18e siècle et des lumières et insiste par contre sur la volonté du « vivre ensemble », la nation étant alors le résultat d'un acte d'autodéfinition. La première définition est parfois nommée « objective » et la deuxième « subjective ». Tiré à wikipedia : nation.

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et de la nation soit une source d`interrogation pour les pays africains, la nation est définie en 1789 par l`abbé Sieyès comme « un corps d'associés vivant sous une loi commune et représenté par la même législature »33. En Afrique, dans presque tous les instruments juridiques communautaires, l`expression de peuple est préférée à celle de nation ou d`Etat. Ainsi dans le traité révisé de la CEMAC de 2008, il est stipulé que les Etats membres sont: « désireux de renforcer la solidarité entre leurs peuples dans le respect de leurs identités nationales respectives »34. Par peuple, faut-il entendre l`Etat ou simplement un groupe, ou une population ayant une origine commune ? Le préambule du traité CEMAC fait également référence à l`identité nationale. Ce texte place l`identité nationale au coeur des rapports entre la communauté et l`Etat membre, et fait de celle-ci un principe constituant et garantissant la diversité des traditions culturelles nationales des Etats membres. L`identité nationale de l`Etat membre doit s`articuler avec l`identité communautaire de la sous région Afrique centrale. C`est-à-dire l`Etat nation, membre de la Communauté doit se considérer comme une composante de la communauté et de ce fait rajouter à la spécificité des éléments qui font d`elle une nation, l`identité communautaire. L`identité communautaire de l`Afrique centrale repose sur un héritage culturel, historique et ethnolinguistique commun. Et la réussite du processus communautaire doit passer impérativement par les populations des Etats, qui composent la CEMAC. Ce point est très important notamment pour l`évolution du projet communautaire parce que le peuple ou les populations doivent s`accaparer ce projet intégratif au point d`en former un peuple communautaire pour l`effectivité d`un réel marché commun propice à la réussite des politiques communautaires.

Au demeurant, et malgré la force de la communautarisation de l`Etat membre, celui-ci demeure un Etat « nations » ou plutôt selon les textes africains un peuple constitué en Etat dont l`obligation est faite à la communauté de respecter l`identité. Cela revient à sauvegarder l`identité constitutionnelle, également les fonctions régaliennes et politico-sociales de l`Etat. Alors, la reconnaissance de l`identité nationale de l`Etat permet de reconnaître les critères fondateurs de l`Etat que sont : la souveraineté nationale et les valeurs constitutionnelles35. Il serait permis d`affirmer que le rapport Etat nation et qualité de membre ne peut être réduit à « des configurations conflictuelles et simplistes » telle que la CEMAC contre les Etats souverains. Il faut y voir une logique utilitaire et instrumentale où les deux parties (Etat et la communauté) s=imbriquent et se complètent tout en respectant la particularité de chaque ordre juridique. En fin de compte, la

33 SIEYES (E), Qu'est ce que le tiers Etat ?, éd. R Zappeti, 1970, P126 cité par NABLI (B), « l'état membre : l'« hydre » du droit constitutionnel européen » contribution au 6eme congrès de l`AFDC, Atelier 3 : Europe et constitution, Juin 2005,p 8.

34 Préambule du traité CEMAC révisé le 25 juin 2008 à Yaoundé au Cameroun.

35 NABLI (B), « l'union des Etats et les Etats de l'union », op cit, pp 113-120.

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CEMAC est une communauté de nations ou de peuples souverains, libres et indépendants qui ont choisis de « regrouper » les souverainetés au service de leurs propres intérêts et de la cause commune36.

2) L'ETAT SOUVERAIN ET LA QUALITE DE MEMBRE DE LA COMMUNAUTE.

Dans la tradition de Max Webber, l`Etat se définit par l`autorité et le pouvoir qu`il exerce sur un territoire donné. Il dispose du monopole de la violence légitime. Depuis le traité de Westphalie en 1648 jusqu`à la charte des Nations Unies de 1945, la souveraineté des Etats et le principe de non ingérence à l`intérieur des frontières sont reconnus par le concert des Etats. En droit international et en droit communautaire, la souveraineté est d`une importance capitale pour la coexistence des Etats. De ce fait, l`Etat et la souveraineté sont indissociables.

La souveraineté a pour corolaire l`indépendance comme l`affirme Pierre Marie Dupuy « si l'indépendance est le critère de la souveraineté, la souveraineté est le garant de l'indépendance »37. La souveraineté s`apparente également à l`exclusivité d`une autorité étatique sur son territoire. Cette exclusivité, reconnue au niveau international est génératrice de droit et d`égalité. La souveraineté constitue alors du fait de son égale diffusion entre les Etats, la cause première du droit international38. Lui-même est engendré par la nécessité de la coexistence entre égale puissance. La souveraineté signifie le pouvoir de l`Etat de décider lui-même sans être soumis en droit à un pouvoir extérieur et supérieur. D`où le premier accrochage entre l`Etat souverain et la communauté. Parce que « toute les collectivités humaines ne peuvent se voir reconnaitre la souveraineté internationale. Seules celles d'entre elles qui sont indépendantes de toutes subordinations dans l'ordre international possèdent cette qualité ». De fait, il est reproché à la souveraineté sa qualité fictive. Face à cela, force est de reconnaitre que cette fiction juridique est un « procédé de technique juridique consistant à supposer un fait ou une situation différente de la réalité pour en déduire des conséquences »39. Autrement, ce procédé vise à amener ce qui est de fait une fiction à une réalité juridique, cela afin qu`on puisse en déduire des conséquences indispensables au commerce juridique entre ces sujets d`un ordre juridique déterminé40. De cette fiction juridique, l`on reconnaît à l`Etat une personnalité juridique. Cependant la souveraineté dote

36 Paraphrasant Tony Blair, in le nouveau débat sur le Europe, textes réunis et commentés par MARHOLD (H), Nice, presses d`Europe, 2002, P 263 et P 266. Cité par NABLI (B) dans « L'union des Etats et les Etats de l'union », op cit, p 120.

37 DUPUY (P-M), L'unité de l'ordre juridique international, cours général de droit international (2000), recueil des cours de l'académie de droit international de la Haye, tome 297, p 96.

38 Ibid. p 95

39 Ibid. p 98

40 Ibid. p 99

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l`Etat d`autres attributs à l`instar de celui de créer des sujets de droit (des organisations internationales), et de leurs reconnaître la capacité de participer à une organisation intégrative reposant sur la volonté souveraine c`est-à-dire sur un acte de souveraineté générateur de droits et d`obligations. A priori la qualité de membre étant la conséquence inéluctable de l`acte souverain d`adhésion de l`Etat à une organisation d`intégration, le statut de membre de la communauté n`est donc pas contraire à la souveraineté. En d`autres termes, l`appartenance à une communauté « ne signe pas la disparition de la souveraineté de l'Etat, mais conduit à l'aménagement, de la souveraineté de l'Etat selon sa qualité de membre »41. Il faut en effet reconnaître que, l`Etat membre de la communauté reste maître et souverain de ses actes tant au plan international qu`au niveau interne. Dans cette optique, les Etats membres des organisations d`intégration régionale gardent et préservent la capacité souveraine qui leur permet de dénoncer un traité et de se retirer d`une communauté. La particularité de la CEMAC est à soulever, parce que la souveraineté occupe une place importante dans cette organisation d`intégration. Cela est justement le fait de la jeunesse des Etats africains, très jaloux de leur souveraineté encore fraichement acquise. Bien qu`elle soit salutaire pour la bonne marche de la Communauté, la prééminence de l`Etat et de la souveraineté à la CEMAC s`avère, de plus en plus, être au coeur de l`inertie que décrient certains auteurs. Cette omniprésence de l`Etat est même inscrite dans les dispositions du traité instituant la CEMAC. Le rapport final à l`origine de la révision du traité constitutif de la CEMAC a tôt fait de le décrier42. Mais cela n`est point surprenant parce que le principe voudrait que l`action et l`évolution de la communauté soit l`oeuvre des Etats souverains. Comme l`a si bien dit Beligh NABLI, l`on ne peut penser une Communauté d`intégration sans faire allusion aux Etats qui la composent43. Par conséquent, la subordination des Etats à la norme communautaire n`est que le simple respect de la règle que les Etats se sont fixés. Et le transfert des compétences de l`Etat vers la Communauté n`est qu`une manière d`exercer sa souveraineté. De plus, ce transfert n`est pas une limitation mais un exercice et un exercice commun des dites compétences par les Etats au niveau de la Communauté. A cet effet, l`Etat qui transfère une partie de ses compétences au niveau de la Communauté accède également à la plénitude de celles-ci en les exerçant au niveau communautaire. Toute norme émanant d`une organisation supranationale ne devra donc souffrir d`aucune entorse à son application, parce que tout rejet ou refus d`application de la norme communautaire équivaut au rejet ou au refus d`appliquer sa propre volonté souveraine génératrice de cette règle. Tout le

41 NABLI (B), « L'état membre : l'« hydre » du droit constitutionnel européen » contribution au 6eme congrès de l`AFDC, Atelier 3 : Europe et constitution, Juin 2005, p 4.

42 Rapport final, diagnostic institutionnel, fonctionnel et organisationnel de la CEMAC, tome i, février 2007, P 140.

43 TROPER (M), « L'Europe politique et le concept de souveraineté » cité par NABLI (B) dans « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen » contribution au 6eme congrès de l`AFDC, Atelier 3 : Europe et constitution, Juin 2005.

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processus communautaire devrait alors être mis à l`initiative de la souveraineté des Etats membres. Alors, la qualité d`Etat membre n`est pas susceptible de remettre complètement en cause le caractère illimité et indivisible de la souveraineté. Et l`appartenance à une communauté n`est autre chose qu` « ... une limitation de l'exercice de certaines compétences (...) cette limitation est consentie par l'Etat et (...) le pouvoir d'y consentir est précisément la manifestation de la souveraineté »44.

Au demeurant l`on peut dire que l`Etat membre est une entité socio-juridique exerçant sa

souveraineté dans l`optique de défendre les intérêts de sa population au sein de la communauté et également dans la perspective de la construction d`un idéal commun d`intégration sous régionale.

B/ LA PROBLEMATIQUE, L'INTERET DE L'ETUDE, LA REVUE DE LITTERATURE ET LE CHOIX METHODOLOGIQUE.

Il sera mis en exergue la problématique que soulèvent notre étude et également l`intérêt que cela implique (1), et après nous présenterons la revue de littérature et le choix méthodologique (2).

1) LA PROBLEMATIQUE ET L'INTERET DE L'ETUDE.

« La problématique, c'est l'ensemble construit autour d'une question principale, des hypothèses de recherche et des lignes d'analyse qui permettront de traiter le sujet choisi »45. « Il n'ya pas de bonne thèse sans bonne problématique »46 et il est dit que la problématique « ne tombe pas du ciel, elle est l'aboutissement du double travail antérieur : choix du sujet et débroussaillage... »47. Il convient de présenter la question principale qui a retenu notre attention et dont la teneur suit : Quelles sont les implications de la qualité de membre de la CEMAC pour un Etat souverain ?

La problématique sur laquelle débouche tout travail de recherche, doit répondre à deux exigences fondamentales qui sont cumulatives et non alternatives. L`une porte sur la rigueur méthodologique et l`autre sur la restitution fidèle de la réalité du terrain. Sur ce dernier point, on peut dire que la problématique est « une manière d'interroger les phénomènes étudiés »48.

44 TROPER (M), « L'Europe politique et le concept de souveraineté » cité par NABLI (B) dans « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen » op cit.

45 BEAUD(M), l'art de la thèse, la découverte, nouvelle édition, 2001, p 38.

46 Ibid.

47 Ibid.

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L`approche définitionnelle aurait pu être exclusivement envisagée dans notre problématique. Elle semble même pour certains, la plus évidente et repose sur la question suivante : qu`est que l`Etat membre de la CEMAC ? Seulement, cette approche ne satisfait point à l`ensemble du champ de recherche et de travail que nous impose le sujet. Car pour épuiser notre étude, nous devons cerner de prime abord la complexité de la qualité d`Etat membre de la CEMAC, avant de présenter les conséquences qu`entraine ce statut de membre pour un Etat souverain.

Une étude du statut d`Etat membre est très importante, d`abord du fait de relever et de tenir compte des principes de droit communautaire (primauté, effet direct et applicabilité immédiate), ensuite du fait de l`action des organes chargés de mettre en oeuvre les normes communautaires et enfin par l`activité de la juridiction supranationale chargée de sanctionner la violation de ces normes. Cette spécificité fait de ce droit, un droit d`une communauté particulière d`Etats à la différence du droit international encore appelé droit de la communauté internationale. Et cela implique de prendre avec beaucoup de sérieux et d`attention les conséquences de la qualité de membre sur l`Etat. L`influence du droit communautaire n`est plus à démontrer mais le résultat de ses effets sur les principaux acteurs demeure sujet à caution. Car le droit commun est devenu un droit de subordination : subordination des normes nationales aux normes communes ayant le même objet (primauté), subordination des citoyens dont la situation est directement et régulièrement influencée par les règles communes ; et la subordination des Etats qui subissent une contrainte bien plus forte, en comparaison à la situation qui prévaut en droit international classique.

Les raisons sus évoquées amènent alors à asseoir et à dépasser l`approche définitionnelle pour scruter l`influence de la qualité d`Etat membre de la CEMAC pour l`Etat nation souverain.

A travers cette problématique, nous nous intéresserons à une communauté intégrative dont le travail de recherche n`est pas une sinécure, simplement parce que des recherches scientifiques sur la CEMAC sont moins disponibles que sur l`Union Européenne. Grâce à cette étude, nous soulèverons des questions dont les réponses apporteront une pierre à l`édifice de la recherche scientifique sur la CEMAC. La sous région Afrique centrale, en particulier la CEMAC, reste une communauté en gestation malgré l`ancienneté de son processus, qui date selon certains historiens communautaires de la période des colonies françaises49, en passant par l`UDEAC50.

49 Des six Etats qui constituent l`Afrique centrale, quatre étaient des colonies françaises : Gabon, Congo, Tchad, et la Centrafrique. Le Cameroun a été administré par la France à travers le mandat de la SDN (en 1922), et la tutelle de l`ONU (dès 1946 jusqu`à son indépendance le 1er janvier 1960). Seule la Guinée Equatoriale était une colonie espagnole. Dès 1946, la France, puissance colonisatrice, va organiser la gestion administrative et économique de ses possessions territoriales en Afrique à la manière d`une fédération d`Etats.

50 UDEAC : union douanière et économique des Etats d`Afrique centrale. Le traité UDEAC a été signé le 12 octobre 1964.

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2) LA REVUE DE LITTERATURE ET LES CHOIX METHODOLOGIQUES.

D`une manière générale, l`on peut rattacher les recherches sur l`Etat membre de la CEMAC au droit communautaire général, et plus spécifiquement à l`impact du phénomène communautaire sur les Etats souverains. Ce travail peut être reparti en deux points à savoir la qualité de membre de la CEMAC et l`influence de la CEMAC sur les Etats souverains. Sur ses deux pans, il nous reviendra de passer en revue les travaux existants ayant un rapport avec notre étude.

Dans la littérature consacrée au statut d`Etat membre en droit communautaire, la majorité des travaux ont un rapport avec la communauté européenne ou l`Union européenne. Toutefois quelques rares travaux soulèvent la relative spécificité de la CEMAC. C`est dans ce sens que l`on peut accorder une attention particulière à la thèse de doctorat de Joël TCHUINTE et les articles de Beligh NABLI.

Dans la thèse sus évoquée consacrée à « l'application effective du droit communautaire en Afrique centrale »51, il est question de mettre en exergue l`effectivité du droit communautaire CEMAC et OHADA, et le fonctionnement des institutions y relatives. Dans cette étude, l`on constate que le projet CEMAC s`est inspiré en grande partie de l`Union Européenne. Par conséquent des analogies peuvent être relevées dans les implications de l`application du droit communautaire CEMAC. C`est la raison pour laquelle que nos lectures ce sont aussi intéressées à la situation du droit de l`union européenne.

Dans les articles de Beligh NABLI, sur « l'union de Etats et les Etats de l'union »52 et « l'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen »53. L`auteur s`interroge sur la particularité dont fait preuve l`Etat membre européen. Il établira dans ses articles une forme de caractérisation univoque de la qualité de membre et de l`Etat membre européen. Il soulignera de la qualité membre de l`UE la particularité d`être « législateur », « exécutant » et « constituant ». Et caractérisera L`Etat, membre de l`Union Européenne comme un « Etat national européen » ; « un Etat libéral » et « un Etat souverain ». Toutefois, Il est nécessaire de reconnaître que ses deux travaux déblayent le chemin pour la compréhension du statut de membre d`une communauté intégrative. Et également à mieux cerner l`Etat membre en droit communautaire en général, mais pas nécessairement celui de la CEMAC, bien que des analogies puissent être faites. S`agissant des travaux sur l`impact de la qualité de membre sur l`Etat souverain, il convient de noter que la littérature y relative est négligeable en droit communautaire CEMAC. Ce qui ne permet pas d`en faire une présentation additionnelle à celles des articles de NABLI. Toutefois

51 TCHUINTE (J), L'application effective du droit communautaire en Afrique centrale, thèse de doctorat en droit public, université de Cergy Pontoise, 2011 P 698.

52 NABLI (B), « L'union des Etats et les Etats de l'union » op cit.

53 NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen » op cit.

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sur la base de ces articles, l`on peut dire que les relations entre l`Etat membre et la communauté sont sous le prisme d`une association réciproquement profitable entre l`Etat et la communauté. Toutefois on constate l`influence de ce dernier sur les fondements normativo-institutionnels de l`Etat. En d`autres termes, l`appartenance de l`Etat à la CEMAC implique des effets d`érosion du droit communautaire sur l`ordre normatif et sur l`appareil institutionnel de l`Etat. L`on pourrait même dire que l`Etat subit dans ses rapports avec la CEMAC une forme de communautarisation sur tous les pans déterminant son identité étatique et constitutionnelle54.

Il ne s`agit bien évidemment que d`un essai d`analyse, tant il est vrai que les difficultés de la recherche sont nombreuses. Et un des premiers facteurs déterminants de la difficulté de cette recherche reste et demeure l`absence d`étude de fond sur le membre du droit de la CEMAC, sans vouloir sous estimer la littérature somme toute abondante sur l`Union Européenne. La seconde difficulté à laquelle nous nous heurtons est l`insuffisance et l`absence de documentation au Cameroun, particulièrement à Yaoundé, concernant le droit communautaire. La troisième difficulté est la quasi inexistence des décisions de la cour de justice communautaire de la CEMAC. Ce qui fait preuve de l`inertie de cette illustre juridiction, la cour de justice communautaire. Il faut rajouter à cela le quasi silence des juridictions nationales sur les questions relatives à l`intégration régionale.

L`objet de cette recherche n`est pas de reprendre tous les débats doctrinaux sur le droit communautaire et le droit international, ni de présenter la CEMAC. Il s`agit, à la lumière des textes et des pratiques de la CEMAC et quelques fois de l`UE, de montrer et de présenter les aléas de l`appartenance de l`Etat à la CEMAC et de l`impact de celle-ci pour l`Etat souverain.

Ainsi, pour ne pas paraître partiel dans ce travail, nous devons garder une neutralité axiologique pour être objectif dans nos analyses. Ceci nous imposera premièrement un raisonnement critique incluant une méthode analytique qui décomposera et recomposera en mettant en évidence, les éléments distinctifs, les caractères, la nature de l`objet étudié à savoir l`Etat membre de la CEMAC. Et deuxièmement le rejet des jugements de valeur qui imposera l`exégèse et la méthode fonctionnelle qui nous permettra d`intégrer dans notre analyse juridique communautaire, des dimensions internationales, des pratiques de l`intégration en Europe et de l`exercice jurisprudentiel de la cour de justice de la CEMAC et de l`union européenne.

Alors, étudier la question de l`Etat dans son appartenance à une organisation supranationale implique pour nous une remise en question de la théorie générale de l`Etat. Parce qu`il nous

54 Martin (S), « l'identité de l'Etat dans l'union européenne : entre «identité nationale » et « identité constitutionnelle » RFDC, PUF, n°91, 2012, p 13-44.

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revient de constater qu`une entité juridique telle que l`Etat, dotée de l`indépendance et de la souveraineté, peut appartenir à une organisation supranationale caractérisée par un droit de subordination.

La question, quoique sujette à caution, monopolise l`attention. Car la réflexion sur la dialectique relative à l`Etat et son appartenance à la communauté révèle une remise en cause de beaucoup de ses fondements, du moins à l`évidence de l`implication de la qualité de membre. C`est la raison pour laquelle nous avons décidé de compléter nos analyses purement textuelles par des éléments des décisions de la cour de justice de l`union européenne et du fonctionnement des organes et des institutions de la CEMAC. Cela paraît plus adéquat, parce que la question situe l`Etat membre de la CEMAC dans son environnement et dans sa spécificité.

En effet le droit international, la pratique européenne de l`intégration et la jurisprudence de la cour de justice de l`union européenne permettront dans une approche logico-déductive de d`abord rendre compte de la nature et de l`essence de l`Etat membre de la CEMAC parce que l`organisation supranationale de l`Afrique centrale s`est largement inspirée de l`union européenne, ensuite de soulever sa spécificité parce que l`inspiration n`est pas synonyme de mimétisme et enfin de présenter le rapport de la qualité de membre de la CEMAC avec l`Etat souverain.

Dans ce cas notre tâche ne se réduira pas à « une connaissance de nombreuse règles de droit » CEMAC, règles dont la diversité, les trajectoires et le rythme de production peuvent échapper à notre vigilance. Nous dégagerons du droit produit ou entrain de l`être et mis en forme par les autorités établies la signification et la portée de l`appartenance d`un Etat à la CEMAC. Nous ferons souvent des intrusions dans le passé pour mesurer le niveau de communautarisation atteint par le projet CEMAC pour cerner l`Etat membre de la CEMAC.

L`empirisme nous imposera de décrire le droit communautaire non pas de manière idéale mais comme un ensemble de faits empiriquement observables dans l`objectif de produire des propositions descriptives. Ainsi on ne se limitera pas à l`étude de la norme pour la norme mais bien plus de la norme dans son rapport au système et à l`environnement dans lequel il doit s`insérer et doit agir.

Les développements qui précédent, témoignent de deux préoccupations constantes de notre travail : l`appréhension du statut ou de la qualité de membre de la CEMAC, et de la force transformatrice et influente que subit l`Etat dans son ensemble face au phénomène d`intégration.

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Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

Dans un premier temps, pour appréhender la qualité de membre de la CEMAC en passant par les prérogatives que cela entraine pour l`adhérant, nous analyserons le statut de l'Etat membre de la communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale. (Première partie)

Dans un deuxième temps, on se posera la question de savoir, si l`Etat souverain subit une adaptation, une influence modificatrice particulière du fait de la réception du droit et de la pratique de l`intégration sous régionale de l`Afrique centrale. C`est la question de l'implication de la qualité de membre pour un Etat souverain (deuxième partie). La réponse à cette question nous permettra d`analyser les conséquences ou les résultats de l`appartenance de l`Etat à la communauté économique et monétaire de l`Afrique centrale.

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PREMIERE PARTIE

LE STATUT D'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC

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La qualité de membre en droit communautaire est un statut reconnu à des entités juridiques étatique qui ont adhérés et partagent les droits et les obligations inhérentes à une communauté intégrative. La CEMAC ne fait pas l`exception, tout au contraire, elle s`arrime à la norme qui voudrait que l`acquisition de la qualité de membre soit au préalable conditionnée à l`exigence et au respect des conditions de forme et de fond. Cette qualité qui crée des droits et des obligations en faveur des entités juridiques, ayant accepté et reconnu le traité constitutif de la communauté intégrative, se traduit par la création de nouvelles entités membre, Etat fondateur ou pas, bien que dans notre étude la distinction ne soit pas opportune, pour la détermination de la consistance du statut d`Etat membre de la CEMAC (chapitre 1) et même pour dégager les pouvoirs inhérents à la qualité de membre (chapitre2).

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CHAPITRE I : LA CONSISTANCE DU STATUT D'ETAT MEMBRE DE

LA CEMAC.

Génératrice d`effets de droit, l`appréhension de la qualité de membre de la CEMAC permet une caractérisation univoque de l`Etat appartenant à la CEMAC (section2). L`acquisition de la qualité de membre de la CEMAC met en exergue un ensemble de conditions qui soulèvent dans le processus un certain nombre d`impératifs et de prise en compte des principes structurant la CEMAC. Cette procédure met ainsi l`accent sur un ensemble de choix et de sélections réciproques s`opérant entre d`une part, l`Etat désirant le statut de membre, ensuite la communauté, et enfin les Etats fondateurs, membres de la communauté (section1).

SECTION I : L'ACQUISITION DU STATUT D'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC

L`adhésion d`un Etat à la CEMAC nécessite au préalable le respect d`un certain nombre de conditions qui sont propres aux Etats (Paragraphe I) nécessitant le statut de membre. Même après l`adhésion, des conditions spécifiques sont prévues pour recevoir le nouvel Etat membre de la CEMAC (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : Les conditions préliminaire à l'acquisition du statut de membre de la CEMAC

Bien que le traité CEMAC55 ne soit pas exactement ordonné dans l`énoncé des conditions préalables à l`admission d`un Etat dans la communauté, nous avons trouvé opportun de présenter les éléments disponibles, en conditions de fond(A) et de forme(B).

A/ Les conditions de fond pour une éventuelle acquisition de la qualité de membre de la CEMAC

Compte tenu de la nature de l`entreprise communautaire, le traité CEMAC56 a réservé l`adhésion aux Etats appartenant à la région Afrique(1) et aussi aux candidats partageant les idéaux des Etats fondateurs(2).

55 Traité instituant la Communauté Economique et Monétaire de l`Afrique Central (CEMAC) Fait à Ndjamena au Tchad, le 16 Mars 1994, révisé le 25 Juin 2008 à Yaoundé au Cameroun et également revisé le 30 janvier 2009 à Libreville au Gabon.

56 Ibid.

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1) La condition ambigüe d'appartenance à la région Afrique

Il faut tout de suite dire que l`article 55 du traité CEMAC57 est plutôt laconique dans l`énoncé des conditions d`admission d`un nouvel Etat à la CEMAC. Et en plus, il n`existe aucune disposition qui prévoit comme dans le cas de l`UEAC58 ou de l`UMAC59, une convention additionnelle pour organiser l`adhésion de nouveaux membres de la CEMAC. Cependant quelques questions nécessitent des réponses que les dispositions du traité n`apportent pas. C`est la question de savoir : pourquoi étendre la possibilité d`adhésion à la CEMAC, aux Etats Africains en général, pour une entreprise qui se veut sous régionale60 ? De plus, dans l`hypothèse que cela soit véritablement possible n`aurons nous pas une organisation concurrente à l`Union Africaine61 ?

Il faut dire que la région Afrique est une certitude car nous pouvons délimiter l`aire géographique qui est reconnue comme Afrique. Il faut également dire qu`une telle initiative est novatrice. Il s`agit peut être pour la CEMAC de se vouloir avant tout non seulement africaine mais également panafricaine. Cependant le sigle CEMAC, restreint le champ d`Etats concernés par cette organisation supranationale. Il est paradoxal de créer une organisation sous régionale et en même temps qui se veut régionale. Soit le sigle de l`organisation intégrative, est en totale contradiction avec les objectifs que veut atteindre le traité CEMAC, soit c`est l`article 55 du traité constituant de la CEMAC révisé le 30 janvier 2009, qui trahit les termes du préambule Du même traité62. On constate que le projet intégratif est avant tout et uniquement destiné à l`Afrique Centrale, parce que la CEMAC n`est pas d`abord une vision commune économique et monétaire, mais c`est avant tout une histoire communautaire commune. L`on peut dire de ce qui suit que l`article 55 du traité révisé CEMAC, bien qu`ayant une perspective globalisante marque une contradiction avec l`esprit du texte

57 L`article 55 du traité révisé CEMAC stipule que « Tout autre Etat africain, partageant les mêmes idéaux que ceux auxquels les Etats fondateurs se déclarent solennellement attachés, pourra solliciter son adhésion à la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale ».

58 Union Economique de l`Afrique Centrale. Elle est régit par une convention signé a Yaoundé au Cameroun le 25 Juin 2008.

59 Union Monétaire de l`Afrique Centrale. Régit par la convention signée le 25 Juin 2008 à Yaoundé au Cameroun.

60 Voir a ce sujet l`article 55 du traité CEMAC qui stipule que « Tout autre Etat africain (...) pourra solliciter son adhésion à la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale »

61 Union Africaine (UA) est une organisation d`Etats africains créée en 2002 à Durban en Afrique du Sud, en application de la déclaration de Syrte du 9 septembre 1999. Elle remplace l`Organisation de l`Unité Africaine (OUA) créée 25 mai 1963 et dissoute le 9 Juillet 2002.

62 Le préambule du traité est clair la dessus la CEMAC « est une impulsion nouvelle et décisive au processus d'intégration en Afrique Centrale » de plus elle vient parachever une idée intégrative portée par l`Union Douanière et Economique de l`Afrique Centrale. Grosso modo le projet intégratif en Afrique centrale s`est toujours voulu sous régional et non régional.

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constitutif .Il est donc exagéré d`étendre le champ de possibilité de candidature à l`acquisition du statut de membre de la CEMAC à tout les Etats Africains. Car, ne peuvent véritablement être membre de cette organisation que les Etats de l`Afrique Centrale partageant tout au moins la proximité des frontières, comme le préconise les textes de l`UEMOA63. L`article 55 doit s`en tenir à l`appartenance à la sous région Afrique centrale. De plus une organisation sous régionale qui se veut africaine dans sa composition risquerait, si les Etats d`autres régions de l`Afrique adhèrent effectivement au projet, de créer une forme de concurrence à l`organisation panafricaine qu`est l`Union Africaine. Le risque serait de se trouver dans une hypothèse d`une organisation bis qui rivalisera avec l`Union Africaine. Alors même que la CEMAC tire relativement sa légitimité existentielle des textes de base de l`Union Africaine64.

En somme, le manque de logique conditionnant la qualité d`Etat Africain, pourrait à terme poser un quiproquo. Certainement l`on tiendra compte de la condition politique : le partage des idéaux des Etats fondateurs.

2) La condition politique : Le partage des idéaux des Etats fondateurs.

Toujours sous le prisme de l`article 55 du traité révisé, il est stipulé que : « tout autre Etat Africain partageant les même idéaux que ceux auxquels les Etats fondateurs se déclarent solennellement attachés, pourra solliciter son adhésion à la communauté économique et monétaire de l'Afrique Centrale... ».

De quels idéaux s`agit-il ? Dans un premier temps nous tiendrons aux idéaux énoncés dans le préambule du traité révisé de la CEMAC. C`est -à-dire «(...) de développer ensemble toutes les ressources humaines et naturelles de leurs Etats membres et de mettre celles-ci au service du bien être général de leurs peuples dans tous les domaines », «(...)de renforcer la solidarité entre leurs peuples dans le respect de leurs identités nationales respectives », et enfin le « (...) respect des principes de démocratie, des droits de l'homme, de l'Etat de droit, de la bonne gouvernance, du dialogue social et des questions de genre ». Ses idéaux sont clairement énoncés et l`idéal qu`est la démocratie représentative, le respect des droits de l`homme, des libertés politiques, et les principes inhérents à l`Etat de droit y sont également présents. Très convoités par les Etats des organisations intégratives sous régionales Africaines, ils sont brandis de plus en plus comme une carte de légitimation des

63 Article 103 du traité modifié de l`UEMOA du 29 Janvier 2003 à Dakar au Sénégal « Tout Etat ouest africain peut demander à devenir membre de l'Union »

64 Le préambule indique si bien le fondement de la CEMAC « approche d'intégration proposée en UDEAC telle qu'inspirée par les Chefs d'Etat de l'OUA lors de la Conférence d'Abuja en juillet 1991 ».

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gouvernements. Les principes de démocratie et de l`Etat de droit65 n`étant véritablement pas une préoccupation de la majorité des Etats Africains, il est surprenant qu`ils soient cités, parmi les idéaux que proclament les membres fondateurs dans le traité constitutif de la CEMAC. On peut même se demander si le partage de cet idéal ne parait pas déjà problématique ? On comprend aisément qu`il s`agit d`une proclamation sans valeur. La CEMAC n`a pas pris la pleine mesure de l`ampleur des conditions politiques à voir respecter par les candidats pour une éventuelle adhésion à la CEMAC. On peut même aller plus loin dans notre analyse en affirmant qu`il s`agit d`une condition qui accorde un pouvoir relativement discrétionnaire dans le choix des candidats à l`adhésion.

Après cette analyse systématique du partage des idéaux des Etats fondateurs, nous pouvons tirer la conclusion selon laquelle la première condition de fond paraît peu représentative de la réalité des textes CEMAC. Ensuite quant à la seconde condition sur le partage des idéaux des Etats fondateurs, si elle s`appuie sur l`esprit du préambule, celle-ci est très utopique et ne cadre pas avec la réalité politique des Etats fondateurs en question. Faut dire que ces conditions sont loin de la réalité sociale en Afrique centrale. Devons nous alors dire que la condition du partage des idéaux des Etats fondateurs n`est qu`une condition fictive ? La réalité est que la condition de fond relative au partage de l`idéal des Etats membres fondateurs établit un pouvoir discrétionnaire dans le choix des futurs membres de la CEMAC. Quid des conditions de forme ?

B/ Les conditions de forme : procédure d'attribution de la qualité de membre de la CEMAC

Le traité révisé CEMAC énonce une procédure spécifique en son article 55, « ...cette adhésion ne pourra intervenir qu'après accord unanime des membres fondateurs(1). Toute adhésion ultérieure d'un nouvel Etat sera subordonné à l'accord unanime des Etats membres de la communauté(2) ». Cette précision ou plutôt ce distinguo entre « membres fondateurs » et « Etats membres de la communauté » mérite une attention particulière.

1) L'accord unanime des membres fondateurs de la CEMAC : un accord veto.

On aurait pu s`attendre dans le texte constitutif de la CEMAC à ce que la procédure d`adhésion à la CEMAC soit détaillée, ou tout au plus qu`elle renvoie l`organisation des conditions et de la procédure d`adhésion d`un nouvel Etat dans la CEMAC

65 Voir CHEVALLIER (J), L'Etat de droit, Montchrestien, Paris, 4e édition, 2003, pp 160

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à une convention additionnelle. Mais ce n`est pas le cas, la procédure d`adhésion a été autant simplifiée que rendue ambigüe. On peut par analogie imaginer, à la lumière de sa soeur inspiratrice, l`Union Européenne, que la procédure d`adhésion de la CEMAC soit formulée et adressée comme suit : l`Etat qui souhaiterait devenir membre adresserait sa demande à la communauté. Et la décision finale d`adhésion reviendrait en dernier ressort aux membres originels c`est-à-dire des « membres fondateurs »66. A l`évidence, le traité CEMAC met en exergue premièrement les Etats membres fondateurs. Cela démontre la prééminence des membres fondateurs de la CEMAC. L`on peut aisément comprendre cette posture, dans le sens où ce sont les Etats dits « fondateurs » qui ont oeuvré à la mise sur pied de la CEMAC et en conséquence connaissent véritablement ce qui convient le mieux pour la communauté, y compris dans le choix des candidats à l`adhésion. En effet dans la procédure laconiquement énoncée par le traité révisé de la CEMAC, il n`est aucunement fait mention du rôle de la communauté dans le processus d`adhésion. Cela augure inéluctablement une procédure d`adhésion, essentiellement étatique. Il ne sera pas surprenant que la procédure de choix débouche sur des positions discrétionnaires. D`où l`importance pour le traité d`accorder aux Etats fondateurs une position prééminente dans la décision finale. Ainsi à la lecture du traité CEMAC, la sélection des potentiels membres de la CEMAC s`effectuera en deux phases. Premièrement, la phase de contrôle et de prise de décision des membres fondateurs et deuxièmement, le contrôle et la proposition d`avis de tous les membres de la CEMAC y compris les membres fondateurs. Le texte constitutif de la CEMAC aurait simplement pu stipuler que cette adhésion n`interviendrait qu`après un accord unanime des Etats membres de la CEMAC. Dans ce cas, on comprendrait qu`il s`agit au préalable d`un accord unanime des Etats membres fondateurs et éventuellement des membres non fondateurs. Cependant, la réalité est tout autre, le traité CEMAC instaure une inégalitaire représentation dans la prise de la décision finale lors de l`adhésion d`un nouvel Etat. On finit par comprendre que la qualité d`Etat membre fondateur est assimilable à la fonction de membre permanent du conseil de sécurité de l`ONU qui dispose du droit de veto67. Car on s`imagine difficilement une adhésion dans la CEMAC si les membres fondateurs n`approuvent pas. Dans le cas ou la décision des membres non fondateurs est en totale contradiction avec la décision des membres fondateurs, quelle serait l`issue ? C`est à ce moment que la qualité de membre fondateur prend tout son

66 Le terme est employé dans le traité CEMAC pour établir un distinguo entre les fondateurs et les membres qui ont adhéré plus tard. Un distinguo évidement pas anodin parce qu`elle traduit un classement par importance des membres de la CEMAC.

67 Le droit de veto du conseil de sécurité des Nations Unies est un droit accordé uniquement aux cinq membres permanents du conseil qui leur permet de bloquer toute résolution ou décision, quelle que soit l`opinion majoritaire au conseil.

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sens car on voit mal la balance pencher en faveur des membres non fondateurs. Toutefois, pour plus d`équité, Il serait judicieux pour la Communauté de revoir ses textes pour faire jouer un rôle à la commission dans le choix des nouveaux membres de la CEMAC, même si il s`agit d`un rôle d`arbitre ou de simple avis. Ainsi comme dans l`adhésion à l`UE, la négociation peut être menée « du côté des communautés par le conseil , le rôle de la commission consiste à présenter des propositions en vue d'établir , entre les Etats membres une base commune de négociations et ensuite, à jouer l' « honnête courtier » entre les membres et les candidats »68

De ce qui précède, l`on ne peut que se rendre compte que l`adhésion des nouveaux Etats membres est difficilement concevable parce que la législation communautaire en l`état actuel pose des difficultés d`application.

2) L'accord unanime des Etats membres de la communauté : une formalité

, en instituant deux phases dans la procédure d`adhésion d`un Etat au statut de membre de la CEMAC, et en commençant par les membres fondateurs, l`article 55 du traité révisé CEMAC de 2009 met en exergue l`importance des membres fondateurs et surtout le fait qu`on les retrouve encore parmi les Etats membres qui se prononceront à l`unanimité pour l`adhésion du nouvel Etat. Cela démontre la prééminence des membres fondateurs. Et nous laisse penser que la seconde phase relative aux Etats membres n`est qu`une formalité pour associer les autres membres non fondateurs à la décision d`adhésion. Tout de même quelques interrogations subsistent, à l`énoncé suivant « toute adhésion ultérieure ... ». A première vue l`article 55 s`adresse au premier Etat candidat à l`adhésion. Par conséquent, les autres Etats désirant la qualité de membre se verront appliquer la seconde phase qui subordonne l`acquisition du statut de membre de la CEMAC à l`accord unanime des deux groupes d`Etat membre. Cela est difficilement acceptable car il reviendrait à reconnaître qu`à un moment donné, une partie de l`article 55 est appelé à être désuète après la première adhésion. En d`autre terme, en cas d`adhésion d`autres Etats, les Etats membres non fondateurs se prononceront comme les Etats membres fondateurs. La qualité de membre de la CEMAC est subordonnée à un double accord unanime de ses membres à savoir les membres fondateurs et non fondateurs.

68 ISSAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, Sirey université, 9eme édition, 2006, p33.

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De l`article 55 du traité révisé de la CEMAC et de la pratique communautaire dans l`Union Européenne, il sera opportun de revoir la procédure d`adhésion à la CEMAC comme il suit : l`Etat demandeur doit adresser sa demande d`adhésion à la communauté c`est-à-dire à la commission CEMAC ou à l`Etat dépositaire du traité constituant la CEMAC, à charge pour lui de la transmettre à la commission. Une fois la commission saisie de la demande d`adhésion à la CEMAC, celle-ci vérifie sa conformité avec les conditions de fond à savoir la nature africaine de l`Etat demandeur, et le respect de certains idéaux proclamés par le traité révisé de la CEMAC. La demande d`adhésion sera notifiée aux Etats membres, à savoir membres fondateurs et éventuellement non fondateurs, et transmise lors de leur réunion, à charge pour eux de se prononcer définitivement sur l`adhésion de l`Etat demandeur, la priorité dans la décision finale revenant aux membres fondateurs en relation avec le parlement communautaire qui détient un droit de consultation obligatoire en ce qui concerne l`adhésion d`un nouvel Etat membre69. Après cette phase procédurale le traité révisé CEMAC prévoit un ensemble de conditions techniques relatives à l`acquisition par le nouvel Etat de la qualité de membre de la communauté.

PARAGRAPHE II : Les conditions ultérieures à l'acquisition du statut de membre de la CEMAC.

Il s`agit essentiellement des conditions liées au traité révisé de la CEMAC, à savoir des adaptations du traité constitutif (A) et de l`obligation d`association aux acquis communautaires(B) par le nouvel Etat membre de la CEMAC.

A / Les adaptations du traité instituant la CEMAC pour l'admission du nouvel Etat membre

On parlera de l`adaptation du traité CEMAC à la langue officielle du nouvel Etat membre (1) et des prérogatives inhérentes à sa qualité de membre telle que la dénonciation du traité institutif CEMAC c`est-à-dire le principe de non appartenance définitive à la CEMAC(2)

69 Article 25 de la convention régissant le parlement communautaire signé a Yaoundé au Cameroun le 25 Juin 2008 « le parlement peut être consulté sur les projets d'actes additionnels, de règlements et de directives. Cette consultation est obligatoire dans les domaines suivants :

- Adhésion de nouveaux Etats membres... »

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1) L'adaptation à l'adhésion : l'adaptation linguistique des instruments communautaires au nouvel Etat membre.

C`est généralement un aménagement communautaire consistant à insérer la langue ou les langues officielles du nouvel Etat ayant adhéré la communauté. Elle se manifeste par une insertion textuelle c`est-à-dire une reconnaissance solennelle de la langue du nouvel Etat membre de la communauté comme une langue parmi tant d`autres de travail de la communauté. Le traité révisé CEMAC est clair en son article 59 qui stipule que « les langues de travail dans la communauté sont le français, l'anglais, l'espagnol et l'arabe ». L`insertion de la nouvelle langue peut aussi être faite pour permettre que le traité instituant la CEMAC soit traduit dans la nouvelle langue. Cependant la reconnaissance et l`insertion de nouvelles langues officielles comme langues de travail dans la communauté soulèvent la question de l`éventuelle égalité des différentes langues manifestées comme langues de travail dans la communauté. Il est évident qu`aucun texte ne reconnaît explicitement une égalité entre les différentes langues de travail dans la communauté. Cependant, en reconnaissant dans l`article 59 du traité instituant la CEMAC le français, l`anglais, l`espagnol et l`arabe comme langues de travail dans la communauté, l`on peut tirer de cette disposition une proclamation implicite de l`égalité des différentes langues composant les langues d`exercice de la CEMAC. Mais il s`agit d`une proclamation rédhibitoire70 dans la mesure où l`article 64 en stipulant que « le présent traité est rédigé en exemplaire unique en langue française, espagnole, arabe, et anglaise ; le texte français faisant foi en cas de divergence d'interprétation » met explicitement le français en exergue par rapport aux autres langues de travail de la communauté et annule implicitement l`égalité entre les différentes langues d`exercice de la CEMAC. A cet effet on peut oser, à la lecture de cet article, affirmer que le français est en quelque sorte prééminente sur les autres langues de travail de la CEMAC. Cela est constaté dans l`énoncé de l`article 64.

L`adaptation linguistique du nouvel Etat à la communauté fait partie des prérogatives inhérentes à la qualité de membre, comme c`est le cas du droit de dénonciation du traité instituant la CEMAC.

70 « Le constitutionnalisme rédhibitoire...commence quand certaines dispositions d'une loi fondamentale réduisent a néant d'autres dispositions explicite ou implicite. » voir J. OWONA, « l'essor du constitutionnalisme rédhibitoire en Afrique noire : études de quelques « constitutions Janus », mélanges offerts à P-F GONIDEC, LGDJ, 1985, PP 235-243.

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2) L'adaptation au retrait : le droit de dénonciation du traité instituant la CEMAC : le principe de non appartenance définitive à la CEMAC.

Le principe de l`appartenance définitive à la communauté signifie, que le traité constitutif n`aborde pas dans ses dispositions des possibilités de retrait71de la communauté. Mais exceptionnellement la seule possibilité est l`exclusion de la communauté. Dans le cas de la CEMAC, l`article 58 du traité révisé stipule que « le traité de la CEMAC peut être dénoncé par tout Etat membre ». Le droit communautaire CEMAC reconnaît un droit de retrait à tout Etat membre désirant mettre fin à son appartenance à la communauté. Le traité constitutif de la CEMAC organise à la suite du retrait d`un Etat membre la cessation des prérogatives s`appliquant à sa qualité de membre. Et cet article 58 précise qu`il « cesse d'avoir effet à l'égard de celui-ci le dernier jour du sixième mois suivant la date de notification à la conférence des Chefs d'Etats. Ce délai peut cependant être abrégé d'un commun accord entre les Etats signataires ».

Le droit de dénonciation est reconnu à tout Etat membre désirant se retirer de la CEMAC. Pour que ce retrait soit effectif le traité constitutif de la CEMAC prévoit une procédure dite normale qui revient à ce que des normes communautaires cessent définitivement d`avoir effet sur celui-ci le dernier jour du sixième mois suivant la date de notification à la conférence des Chefs d`Etats. Cependant la procédure normale peut être abrégée d`un commun accord entre les Etats signataires. Il faut également signaler que le traité instituant la CEMAC ne prévoit pas dans ses dispositions une exclusion d`un Etat membre de la CEMAC. Par conséquent, une appartenance définitive est exclue dans le traité révisé de la CEMAC. Le droit de dénoncer le traité CEMAC est reconnu à tout Etat membre désirant se retirer de la communauté, Toutefois dans le strict respect de l`article 58 du traité révisé CEMAC72. Il est de notre intérêt de tirer la conclusion qui s`impose, à savoir que le traité constitutif CEMAC rend possible le retrait unilatéral pour tout Etat membre. Uniquement dans le but de permettre la continuité du projet intégratif. Cette précision est nécessaire par ce qu`auparavant au sein de l`union européenne, l`interdiction juridique du retrait unilatéral73 d`un Etat membre (principe d`appartenance définitif) était généralement

71 ISAAC (G) et BLANQUET, Droit général de l'union européenne, Sirey université, 9e édition, 2006, P 33.

72 L`article 58 du traité révisé CEMAC signé en 2008 stipule que : « Le Traité de la CEMAC peut être dénoncé par tout Etat membre. Il cesse d'avoir effet à l'égard de celui-ci le dernier jour du sixième mois suivant la date de notification à la Conférence des Chefs d'Etat. Ce délai peut cependant être abrégé d'un commun accord entre les Etats signataires ».

73 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'Union Européenne, Sirey Université, 9e édition, 2006, p34.

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source d`obstacle au fonctionnement des communautés européennes. Car, comme l`affirme Guy ISAAC et Marc BLANQUET, un Etat qui veut se retirer mais se trouve empêché, peut faire obstacle au fonctionnement de celles-ci par la pratique de la « politique de la chaise vide »74. La posture des textes constitutifs de l`union européenne peut se justifier, comme une envie d`éviter l`éternel retour à la case départ dans le processus d`intégration européenne. Ainsi pour résoudre le problème de l`éventuel blocage d`un Etat membre, l`Union Européenne a préfère une intégration différentielle. « Schématiquement ces dérogations correspondent aux concepts de l'Europe à plusieurs vitesses »75, ou de l` « Europe à géométrie variables »76. Et depuis l`entré en vigueur du traité de Lisbonne, il a été inséré une clause de retrait volontaire dans le TUE. L`intégration différentielle n`est pas reconnue au sein de la CEMAC. Il est mis en avant dans le processus de communautarisation les principes d`unanimité, c`est-à-dire le consensus dans la prise de décision. Mais cela entraine inéluctablement une évolution lente et subordonnée à l`humeur des Etats membres77. autrement dit un Etat membre, pas en phase avec la CEMAC, ralentira l`évolution significative du processus d`intégration ou pire, la bloquera. Il est louable l`initiative du traité CEMAC de permettre un retrait unilatéral de tout Etat membre désirant se retirer. Cela démontre la volonté des législateurs communautaires d`éviter des blocages dans le fonctionnement de la CEMAC. L`on peut tout de même reprocher au traité CEMAC de n`avoir pas prévu dans ses énoncés la possibilité d`exclure un membre de la communauté pour entrave au processus évolutif communautaire, ou bien la possibilité, comme dans l`Union Européenne, d`avoir une différenciation dérogatoire entre les Etats membres. quid de l`obligation de l`association du nouvel Etat aux acquis communautaire.

74 C`est la politique consistant à refuser de siéger dans les institutions et en particulier au conseil comme ca été le cas de l`Etat français entre juin 1965 et février 1966 qui entraina la communauté européenne dans une léthargie proche de l`asphyxie. Citez par ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit p34.

75 « Plusieurs vitesse » c`est-à-dire que la « dérogation est passagère et limitée, d'entré de jeu, dans le temps : ainsi des périodes de transition consenties dans les traités d'adhésion pour permettre aux nouveaux membres de reprendre progressivement l'acquis communautaire » ou encore du statut d` « Etats membres faisant l'objet d'une dérogation organisé » par les textes constitutifs de l`union européenne. Citer par ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit pp 35-36.

76 Il s`agit d`une volonté de certains Etats membres de bénéficier d`une réglementation dérogatoire qui leur permet de laisser inappliquée la règle commune.

77 Comme cela a été le cas lors de la mise en oeuvre de la libre circulation des personnes prévue normalement le 1er janvier 2014, qui fut rejeté sans véritable raison valable, par le Gabon et la Guinée Equatoriale.

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B/ L'obligation d'association du nouvel Etat membre aux acquis communautaires.

La CEMAC s`est construite sur les acquis d`une quarantaine d`années d`intégration en Afrique Centrale78. En outre de cette intégration héritée, et celle établie par la jeune expérience de la CEMAC, nous pourrons à la suite de cela, ressortir des acquis relevant des politiques économiques communes(1) et des politiques sectorielles(2).

1) L'obligation d'association aux acquis des politiques économiques communes.

Mise en oeuvre au niveau communautaire par l`Union Economique de l`Afrique Centrale (UEAC), il faut dire que les politiques économiques nationales manquent véritablement d`une harmonisation pour « établir en commun les conditions d'un développement économique et social harmonieux dans le cadre d'un marché ouvert... »79. Pour ainsi atteindre cet objectif, la CEMAC a dû se fixer des points bien précis que l`on peut citer comme suit : « renforcer la compétitivité des activités économiques et financières en harmonisant les règles qui contribuent à l'harmonisation des affaires et qui régissent leur fonctionnement ,
· assurer la convergence vers des performances soutenables par la coordination des politiques économiques et une mise en cohérence des politiques budgétaires nationales avec la politique monétaire commune ,
· créer un marché commun fondé sur la libre circulation des biens, des services, des capitaux, et des personnes »80
.

La réalisation de ces objectifs devrait ainsi se faire nonobstant les difficultés liées à la faiblesse des ressources, des avances réelles ont pu être obtenues et reconnues comme des acquis durant cette première étape. « Le dispositif institutionnel a été fortement renforcé : cour de justice, commissions interparlementaires, relance de la BDEAC, nouvelles institutions spécialisées. L'UEAC est officiellement une zone de libre échange(ZLE), depuis décembre 2000. Par ailleurs le règlement financier de toutes les institutions s'harmonise progressivement. L'union douanière a été mise en place, le tarif extérieur commun(TEC), adopté en juin 1993 a été révisé en 2001, puis en 2002. Les codes des douanes ont été révisés ; des règles communes ont été adoptées en matière d'investissement et de concurrence. Afin de faciliter la libre circulation un passeport communautaire a été adopté

78 L`UDEAC avait permis quelques avancées dans la marche vers l`intégration. Dès 1965 la naissance de la convention commune sur les investissements dans les pays de l`UDEAC (qui se trouve être le fondement des codes des investissements) ; l`harmonisation de plusieurs disposition fiscales à l`instar de l`impôt sur le chiffre d`affaire intérieur en 1969 ; l`impôt sur les sociétés en 1972 ; l`impôt sur les revenus des personnes physiques. Cité par le rapport final au diagnostic institutionnel et organisationnel de la CEMAC, tome 1, février 2006, pp 18-19.

79 Article 1 de la convention régissant l`Union Economique de l`Afrique Centrale signé en 2005.

80 Ibid. article 2.

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en 2000 et un règlement portant sur les facilités accordées aux voyageurs a été adoptés en 2003 et également depuis le 1er janvier 2014, il a été conclu à l'ouverture des frontières et par conséquent à la libre circulation des personnes »81

Cependant ce bilan marquant les acquis au plan économique de la CEMAC apparaît de nos jours comme mitigé « notamment du fait de la faible application des décisions et du retard pris dans la mise en oeuvre des projets communautaires »82. C`est dans ce sens que le secrétariat exécutif, aujourd`hui la commission affirmera que « les entorses à l'application des codes et règlements fiscalo-douaniers, les entraves tarifaires et non tarifaires au commerce intra régional, l'observation insuffisante des règles d'origine et des dispositions communautaires sur la réglementation de la concurrence constituent des dérives dangereuses qui, si l'on ne prend garde peuvent entrainer l'effondrement de tout l'édifice en construction »83. L`on peut citer quelques décisions non appliquées ou projets en retard : acte additionnel N°03/00-CEMAC 046-CM05 instituant un mécanisme autonome de financement de la communauté ; acte additionnel N°01/00-CEMAC-046-CE-03 portant modification de l`acte additionnel N°3/00/CEMAC-046-CE-03 du 14 décembre 2000 instituant un mécanisme autonome de financement de la communauté ; acte additionnel N°02/01-CEMAC-066-CE-03 portant création d`une compagnie communautaire de transports aériens en zone CEMAC84.

2) L'obligation d'association aux acquis des politiques sectorielles

La convergence des politiques sectorielles revient, selon la convention régissant l`Union Economique de l`Afrique centrale, à la coordination des politiques nationales. Il s`agit du quatrième objectif assigné à la commission par la convention à savoir, « instituer une coordination des politiques sectorielles nationales, mettre en oeuvre des actions communes et adopter des politiques communes, notamment dans les domaines suivants : l'agriculture, l'élevage, la pêche, l'industrie, le commerce, le tourisme, les transports, l'aménagement du territoire communautaire, et les grands projets d'infrastructures, les télécommunications, les technologies de l'information et de la communication, le dialogue social, les questions de genres, la bonne gouvernance et les droits de l'homme, l'énergie, l'environnement et les ressources naturelles, la recherche, l'enseignement et la formation

81 Voir le rapport final du diagnostic institutionnel et organisationnel de la CEMAC, op cit p20.

82Nous remarquons qu`il ressort que le champ des décisions non appliquées couvre un large spectre des instruments d`intégration dont se sont doté les Etats mettant en péril le processus

83 Affirmation du secrétaire exécutif de la CEMAC, Jean NKUETE, lors d`une interview, cité par le rapport final de diagnostic institutionnel et organisationnel, op cit p22.

84 Ibid. p22

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professionnelle »85. Ceci correspond à la seconde étape, qui comme sa devancière durera trois ans à compter de la fin de la première et celle-ci consistera : « mise en oeuvre d'un processus de coordination des politiques nationales dans les secteurs suivant : l'agriculture, l'élevage, la pêche, l'industrie, le commerce, le tourisme, les transports, les technologies de l'information et de la communication » ; l'engagement d'un processus de coordination des politiques sectorielles nationales en matière d'environnement et d'énergie ; renforcement et à l'amélioration en vue de leur inter connexion, les infrastructures de transport et de télécommunication des Etats membres »86.

De prime abord et du premier constat, la seconde étape est loin d`être mise en place. Car la première étape nécessitant encore un peu plus de temps pour atteindre son but, à cause essentiellement de la difficulté de mise en oeuvre de décisions d`application de la première étape. Ensuite pour éviter la stagnation du projet communautaire, la communauté a décidé de lancer la mise sur pied de la seconde étape par la coordination de quelques politiques nationales dans les secteurs tels que l`agriculture, l`élevage, la pêche, le tourisme, le transport par les institutions spécialisées telles que Carte Rose CEMAC qui est un service d`assurance responsabilité civile automobile ; CEBEVIRHA (commission économique du bétail, de la viande, et des ressources halieutiques), IHT-CEMAC (l`école de tourisme et d`hôtellerie de la CEMAC).

Au demeurant, se basant sur les acquis de l`UDEAC, en termes de structures et de politiques (y compris la réforme fiscalo-douanière de 1994), la CEMAC a connu plusieurs avancées significatives à savoir, la nouvelle impulsion politique visant à l`harmonisation des politiques et législations nationales et par la délégation d`une parcelle de souveraineté des Etats membres au niveau sous régional, notamment avec la création de nouvelles institutions communautaires, tels le parlement et la cour de justice communautaires. Avec l`immédiateté de l`acte communautaire et l`application directe des normes, pouvons-nous alors, à la lumière de ce qui précède, apporter une caractérisation de l`Etat membre ?

SECTION II : LA CARACTERISATION DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC.

Il serait manquer de discernement que de ne point voir que l`appartenance de l`Etat à une communauté, bien qu`étant subjective, permet de ressortir une spécification propre à la reconnaissance de l`Etat membre. Ainsi une analyse cohérente et rigoureuse nous permet de

85 Voir article 6 de la convention régissant l`Union des Etats de l`Afrique Centrale.

86 Ibid.

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ressortir les caractéristiques propres à l`entité juridique que nous nommons Etat membre. Par conséquent, une caractérisation univoque de l`Etat membre de la CEMAC reviendrait d`abord à présenter l`Etat membre comme une composante sociologique de la communauté (paragraphe I) et enfin de poser le problème de la conception juridique de l`Etat membre de la CEMAC (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : La caractérisation sociologique de l'Etat membre de la CEMAC.

L`Etat membre de la CEMAC peut se prévaloir d`un territoire(B), et d`une population ou d`un peuple(A). Ces éléments physiques marquent la matérialisation effective de l`Etat membre dans la sphère sociologique Communautaire, et nous amène après notre développement à une remise en question des fondamentaux de l`Etat et à une réadaptation de la théorie de l`Etat à la suite de l`avènement des communautés intégratives87.

A/ La consistance de la population communautaire.

On a généralement reproché à la colonisation, d`avoir morcelé le continent Africain en se basant beaucoup plus sur les caractéristiques géographiques tels que les fleuves, les montagnes, les tracés méridiens et des parallèles88, tout en minimisant tout ce qui était susceptible de les unir à savoir : la culture et la tradition des peuples africains89. En fait, il a toujours existé une intégration africaine malgré les barrières linguistiques et les frontières artificielles coloniales. Il aurait été bénéfique pour les organisations intégratives, d`user de cet état de choses pour que les nations héritées des colonisations forment au bout du compte une communauté humaine sous régionale que l`on peut appeler population communautaire(1). Et ceci est nécessaire pour la réussite du projet communautaire car la population communautaire, est le destinataire par excellence des normes communautaires(2).

1) Des peuples à une population communautaire identifiée.

Dans la nécessité d`une véritable intégration régionale, les peuples composant chaque Etat membre de la communauté doivent être impliqués dans le projet communautaire. Car la réussite véritable d`un processus intégratif se trouve dans l`accaparement et le brassage

87 Voir à ce sujet l`article de CHALTIEL (F), « Droit constitutionnel européen2004-2006 », RFDC, n° 69, 2007, p 161-173.

88 Seydou DIOUF, « Contribution à l'analyse historique de l'intégration africaine », revue de la faculté des sciences juridiques et politique de UCAD, Sénégal, nouvelles annales, tome 1, 27 et 28 Avril 2006, pp 10-17 spec. p 9.

89 Ibid. p 10.

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des peuples au point d`en créer une population commune susceptible d`être aussi appelé peuple communautaire.

Il faut préciser que la culture et la tradition des peuples africains constituent un ferment à l`intégration politique et économique du continent90, autrement dit « il a toujours existé une intégration africaine malgré les barrières linguistiques et les frontières artificielles»91

De ce fait, il apparaît essentiel dans le cadre de l`intégration de remettre en question «la forme moderne conventionnelle de l'organisation de la communauté politique qu'est l'Etat national territorialisé »92. Les Etats africains après les indépendances ont voulu se former à un peuple uni à l`intérieur de leurs frontières héritées de l`impérialisme occidental. On a tôt fait de parler en Afrique des Etats -nations. Parce que l`idée moderne de nation93 fournit un substrat normatif permettant de légitimer des frontières qui ne sont ni naturelles, ni justifiées normalement. A tous égards, « l'idée moderne de nation sert donc à la fois à la mobilisation politique et à la justification normative d'un découpage territorial délimitant des Etats souverains »94. De toute évidence, la formation des nations apparaît comme un frein au mouvement d`intégration, simplement parce qu`elle confine les nations dans un auto développement au sein de leurs frontières. Pourtant l`Etat membre d`une communauté implique un sentiment d`appartenance et d`identification à une communauté, sentiment qui fonde le postulat des obligations associatives des nations composant la communauté en question. A ce niveau, il s`agit d`une population communautaire identifiée, qui est un élément incontournable dans la mise en place d`un véritable marché commun et d`une union. Alors, il faut au préalable une formation d`un peuple capable de s`identifier à l`action entreprise au niveau de l`exécutif communautaire. Parce que la population communautaire traduit une homogénéité des peuples composant la communauté. Le peuple étant consubstantielle à l`idée de nation, le terme population convient le mieux ici parce qu`il

90 Ibid.

91 Ibid.

92 NOOTENS (G), « Etat et nations : fin d'un isomorphisme », politique et société, vol 21, n°1, 2002, p 2.

93 Au XIXe siècle deux conceptions vont justifiées l`identification de l`Etat et de la population.

- La dimension politique de la nation impliquant un ensemble indivisible de citoyens participant ensemble à la communauté politique à travers leurs représentants. Cette approche rejette l`approche éthique, religieuse ou idéologique de sa communauté pour privilégier. L`approche volontariste c`est également la conception française à partir de la révolution de 1789.

- La dimension éthique et ses composantes (l`espace, la langue, la religion, voire la race) pour proposer une vision déterministe de la nation qui sera utilisée par les courants nationaliste les plus radicaux et invoqués pour justifier un nationalisme expansionniste ou d`exclusion, conduisant aux génocides du XXe siècle. En paraphrasant PORTELLI (H), Droit constitutionnel, Dalloz, 5e édition, 2003, p 8.

94 Ibid. p 6.

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met en relief la convergence des intérêts et même des biens. De plus dans les Jus et coutumes africaines, « l'idée d'intégration est préparée et inscrite pour ainsi dire, dans la solidarité familiale et tribale, dans la culture du groupe et dans les organes religieux »95. Ainsi grâce à l`intégration, c`est-à-dire « au progrès spectaculaire des moyens de transports et d'informations, les africains ont découvert qu'ils sont tous des frères et qu'ils doivent se retrouver »96.

Le cas de la CEMAC est paradoxal et compréhensible de par le manque de volonté manifeste de ses dirigeants, qui malgré les flux transfrontaliers des populations de part et d`autre des Etats membres brandissent un refus catégorique de libéraliser la circulation des personnes. En plus de cela, l`on a l`impression que le projet intégratif CEMAC est une affaire qui concerne uniquement l`exécutif communautaire. Pourtant le projet CEMAC doit s`imposer « comme une évolution dictée par des besoins convergents, puisque les acteurs économiques demandent aux gouvernements de trouver des solutions aux défis qu'ils rencontrent. Elle entraine peu à peu une intégration politique. Les élites gouvernementales, les fonctionnaires des administrations nationales, les experts de toutes sortes, mais aussi les dirigeants des entreprises sont les instruments de cette mutation »97. Grosso modo l`intégration doit toucher et concerner toutes les couches sociales des Etats membres. Il est à cet effet, surprenant de constater l`ignorance des individus en ce qui concerne l`importance de la CEMAC. L`inertie de la CEMAC est de ce fait la résultante d`un esprit communautaire peu développé, traduit par une attitude marquée de suspicion et de méfiance, qui conduit à une faible application des décisions communautaires et à un manque d`appropriation de la communauté par les États membres et leurs citoyens98. Il serait peut être précoce au niveau de la CEMAC de parler d`une population communautaire au vu des difficultés d`intégration que rencontre cette sous région et au manque d`intérêt dont fait preuve les peuples. Toutefois si l`on prend en compte l`histoire des populations africaines et des flux migratoires qui l`ont composés, l`on peut affirmer sans hésitation que « l'idée d'intégration est bien d'origine africaine comme en atteste l'antériorité de l'empire ouest africain à celui de Charlemagne »99. L`esprit d`intégration communautaire étant un acquis consubstantiel au

95 Seydou DIOUF, « Contribution à l'analyse historique de l'intégration africaine », op cit p 11.

96 Ibid.

97 DE SENARCLENS (P), La mondialisation, théories, enjeux et débats, Armand colin, 4e édition, 2005, p 42.

98 Voir à ce sujet le rapport final du diagnostic institutionnel et organisationnel de la CEMAC, op cit, p 9.

99 Cheik ANTA DIOP, Les fondements économiques et culturels d'un Etat fédéral d'Afrique, 1974, p 15, cité par Seydou DIOUF, « Contribution à l'analyse historique de l'intégration africaine », op cit p 12.

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peuple africain, celui-ci doit également être le destinataire par excellence des normes communautaires.

2) La population communautaire: le destinataire par excellence des normes communautaires.

La CEMAC comme toute communauté d`intégration, du point de vue juridique est un ordre juridique autonome. C`est sans doute un projet politique menant à un marché commun, mais c`est d`abord un ensemble de règles juridiques assez complexes parce que touchant plusieurs disciplines. Même dans sa dimension économique, la communauté intégrative d`Afrique centrale se définit sous l`angle du droit moins par ses politiques communes que par les normes et procédures destinées à mettre en place et à garantir la libre circulation des personnes, des biens et des services. En une phrase, la communauté s`est bâtie en ayant comme instrument le droit100 . Pour l`effectivité de ce droit, il est impératif qu`il soit en vigueur et qu`il soit appliqué par les Etats membres à travers leurs populations. Et pour ce faire, il est urgent que les Etats appliquent les décisions, règlements et traités communautaires, dans leur quotidien. Et de plus, les populations destinataires prioritaires doivent être au courant de l`existence des dites lois et de leurs significations. Ce qui introduit le rôle de la cour de justice communautaire, pour une vulgarisation du droit communautaire. Toutefois, le droit communautaire demeure un instrument hermétique, connu seulement des spécialistes101. En plus, « le droit communautaire reste encore, pour une large part un droit caché (certain actes ne sont pas connu), [...] il n'y a pas de codification synthétique du droit. »102. La CEMAC ne se fera pas d`un coup, ni dans une construction d`ensemble. Elle se fera par des réalisations concrètes créant d`abord, une solidarité de fait. Pour cette raison les peuples composant la communauté doivent impérativement s`intéresser au projet et faire vivre le projet intégratif par l`application des normes communautaires. On ne niera pas que la volonté d`intégration moderne et originelle est née des dirigeants de l`Afrique Centrale, marquée certainement en 1994 par la crise économique et la dévaluation du francs CFA, et par l`échec de l`UDEAC. Cependant, pour être une véritable réussite, la CEMAC a besoin de renvoyer au peuple, une autre chose que l`image d`une organisation intergouvernementale,

100 En paraphrasant le conseil d`Etat français dans « les considérations générales sur le droit communautaire », rapport public 1992, la documentation française, 1993, cité par MATHIEU ( J-L), L'union Européenne, PUF, 4e édition, 2002, p 25.

101 Commentaire du président de la commission de l`UE en 1968, ibid. p 25.

102 Conseil d`Etat français dans « Les considération générales sur le droit communautaire », op cit

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dont les dirigeants ne semblent pas appréhender le bien fondée. Quid du territoire communautaire comme élément sociologique de l`Etat membre de la CEMAC ?

B/ Le territoire communautaire : l'Afrique Centrale

Le territoire de l`Etat est la sphère spatiale à l`intérieur de laquelle il exerce la plénitude de sa compétence et également sa souveraineté. Le territoire communautaire

apparaît alors comme la sphère de la validité territoriale de l`ordre juridique
communautaire103. Dans cette perspective, c`est l`espace à l`intérieur duquel l`organisation intégrative (c'est-à-dire ses organes) est autorisée par le droit communautaire à exécuter l`ordre juridique communautaire104. Le fait que l`ordre juridique soit valide sur le territoire communautaire marque un rapport relationnel entre l`Etat membre instrument de communautarisation et le territoire espace de validité de cet ordre juridique (2). Cependant, il importe bien avant, de délimiter le territoire communautaire sur lequel l`Etat membre exerce ses prérogatives(1).

1) la consistance du territoire communautaire : les différentes composantes et la délimitation du territoire communautaire

Il est de constat que le processus de création de marché commun avec pour corollaire le libre échange que cela entraîne, ne règle pas le problème de la délimitation des frontières étatiques post indépendance. Il est plutôt source, d`incertitude dans le tracé des frontières en Afrique. Surtout les tracés des frontières s`avèrent être une source des contentieux105. La délimitation et la démarcation du territoire communautaire106 nécessite au préalable un exercice similaire au niveau des Etats. Il est important de savoir que la création d`un marché commun commande une libéralisation des échanges entre les Etats membres. Une libéralisation synonyme d`ouverture de barrière tarifaire, autrement dit une disparition des frontières dans l`espace de validité de l`ordre juridique communautaire c`est-à-dire du territoire communautaire. La tâche devient plus ardue pour le projet communautaire tant que les Etats, membres de la communauté n`ont pas encore délimité, démarqué et aborné leurs territoires respectifs car, l`instauration d`une véritable union dans la sous région Afrique

103 En paraphrasant Hans KELSEN, théorie général du droit et de l'Etat, bruyant LGDJ, 1997, p 261.

104 Ibid. p 262.

105 Voir entre autres les contentieux Cameroun/Nigeria ; Burkina Faso/ Mali ; Tchad/ Libye ; Guinée Bissau/ Sénégal.

106 Selon le dictionnaire de la terminologie du droit international, la frontière est la « ligne déterminant, ou commence et ou finisse les territoires relevant respectivement de deux Etats voisins. Cité par NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, op cit p 516.

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Centrale, respectueuse de tous les principes inhérents au marché commun, rendra inéluctablement les frontières de ces Etats membres poreuses. Autrement dit à l`instar des Etats fédéré des Etats fédéraux, l`Etat membre de la CEMAC, dans la même configuration verra ses frontières considérées comme des délimitations administratives nécessaires pour une plus grande intégration. Aucune intégration de se nom ne peut être réalisée si le Cameroun et la Guinée Equatoriale n`ont pas résolu le problème de sa frontière maritime entravée par l`île de Bioko territoire équato-guinéen107. Il serait peut-être préjudiciable pour l`évolution du processus d`intégration que ces problèmes de frontières trouvent des solutions. Parce que les délimitations coloniales n`ont pas toujours été d`une grande précision, quelque fois elles étaient en contradiction avec les données géographiques et naturelles. Ou parfois, elles n`existaient même pas. Entrainant la résurgence des contentieux territoriaux. L`on constate la récurrence en Afrique des recours à l`arbitrage ou à une juridiction internationale à l`instar du différend Cameroun/Nigéria (arrêt du 10 octobre 2002). L`on peut paraphraser la Cour International de Justice (CIJ) en affirmant que définir le territoire communautaire revient à définir les frontières des Etats membres de la CEMAC108. Car comme l`avait si bien rappelé le tribunal arbitral sur la frontière maritime de la Guinée-Bissau et du Sénégal, « une frontière internationale est la ligne formée par la succession des points extrême du domaine de validité spatiale des normes de l'ordre juridique d'un Etat »109. De plus il est clair que l`union que devra parachever le processus d`intégration de l`Afrique Centrale s`affirmera vraisemblablement sur une disparition des frontières étatiques. Cela est d`autant plus important que la connaissance des frontières est fondamentale, puisque le territoire étatique est le domaine de compétence spatiale de validité de l`ordre juridique communautaire.

2) Le domaine de compétence spatiale de l'Etat membre de la CEMAC : le rapport Etat et son territoire.

Comme l`affirme si bien Dominique TURPIN110 « s'il peut exister des territoires sans Etats111, il n'y a pas d'Etats sans territoire ». Il s`agit d`une évidence, on ne peut parler

107 L'article 3 de la constitution de la Guinée Equatoriale dispose que : « Le territoire de la Guinée Équatoriale

se compose de la zone continentale dénommée Rio Muni et les îles de Bioko, Annobon, Corisco, Elobey Grande, Elobey Chico et les îlots adjacents, les eaux fluviales, la zone maritime, la plate-forme continentale que détermine la loi et l'espace aérien qu'elle couvre ».

108 Décision du 25 juillet 1991, Rec., p 91, cité par NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU ( M), Droit international public, op cit p 520.

109 Ibid.

110 TURPIN (D), Droit constitutionnel, PUF, 4e édition, 1999, p 29.

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d`Etat, qu`à l`appréhension d`une capacité d`exercer sa souveraineté sur un territoire. Autrement dit le territoire est un moyen de l`Etat d`exercer ses compétences et de mettre en pratique le principe d`exclusivité de la compétence territoriale. De ce fait, aussi petit que soit un Etat, le territoire demeure le point d`adjonction des deux autres éléments constitutifs de l`Etat à savoir le gouvernement et la population. Le territoire est alors comme l`affirmait le grand maître autrichien Hans KELSEN, la sphère de validité de l`ordre juridique étatique112. L`Etat membre de la CEMAC est avant tout un Etat, avant d`être membre de la CEMAC, par conséquent, dispose d`un territoire, domaine de compétence exclusif de son autorité. Le territoire détermine également les biens juridiques des populations y vivant. De ce fait, il en découle certains principes qui permettent l`exercice de la souveraineté de l`Etat sur son territoire. Il s`agit du principe sus cité d`exclusivité de compétence territoriale, avec pour corolaire le principe de l`interdiction de l`application extra territoriale du droit. En d`autres termes, un Etat n`est pas tenu en vertu de l`exclusivité législative, de faire exécuter des lois, règlements et dispositions étrangères. En retour, il est exclu à l`Etat toute compétence d`exécution extra territoriale forcée. Cette explication est d`autant plus importante qu`elle soulève la question de l`applicabilité du droit communautaire de source extra territoriale sur le territoire de l`Etat membre.

Il faut dire que la qualité de membre de la communauté remet en question le sacro saint principe de l`intangibilité des frontières. Remise en question à sans doute relativiser parce qu`elle ne modifie en rien les frontières des Etats membres de la CEMAC, ou bien n`en fait pas disparaître. Dans ce sens le conseil constitutionnel français avait précisé dans sa décision du 25 juillet 1991, relative à la loi autorisant la ratification de la convention de Schengen, que « le franchissement des frontières (à l'intérieur de cet espace sans contrôle douanier) n'est pas assimilable à une suppression des frontières, qui sur le plan juridique délimitent la compétence territoriale de l'Etat 113». Toutefois en transférant à la communauté une partie des compétences souveraines, l`Etat accepte selon les accords qui ont conduit au transfert de compétences de se voir appliquer des normes venant d`organes114 autres que les

111 Encore nommé « territoire sans maître » jadis terre vierge autarcique pour des raisons scientifiques, espace extra atmosphérique et corps célestes qui, en vertu de traités, ne peuvent pas faire l`objet d`une appropriation par un pays. Voir TURPIN (D), Droit constitutionnel, op cit p 43.

112 KELSEN (H), Théorie générale du droit et de l'Etat, op cit p 264.

113 Voir TURPIN (D), Droit constitutionnel, op cit p 43.

114 Les normes communautaires ont pour sources le traité constitutif de la CEMAC ; les conventions régissant les organes communautaires, les actes additionnels ; les règlements ; les règlements cadre ; les directives ; et les décisions.

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parlements nationaux. Le droit communautaire, avec ses principes fondamentaux115, limite le principe de droit international reconnaissant à l`Etat une interdiction de l`application directe des règles « venu d`ailleurs »116. Corrélativement, l`adhésion d`un Etat à une communauté, remet en question les caractères généraux des compétences exercées par l`Etat sur son territoire. De fait, l`Etat membre de la CEMAC n`est pas à même d`exercer « selon sa propre appréciation discrétionnaire, toutes les fonctions de commandement destinées à favoriser les activités117 ». Il devra dorénavant tenir compte des activités de la communauté intégrative et du regard sanction des Etats membres et de la commission de la CEMAC. La plénitude de compétence de l`Etat membre prend ainsi un coup et marque un frein au principe d`exclusivité reconnu à chaque Etat sur son territoire. Le principe d`exclusivité de la souveraineté territoriale confère à son titulaire le droit de s`opposer aux activités des autres Etats sur son territoire118. En revanche, lorsque l`on adhère à la communauté, l`exclusivité de souveraineté territoriale devient relative, parce que l`Etat membre partage avec la communauté cette exclusivité. On dira que « la souveraineté forteresse » a fait place à la « souveraineté partagée » au sein de la construction supranationale »119 Par conséquent, l`exclusivité dans le domaine de la répression est également relativisée parce que la cour de justice communautaire est compétente pour sanctionner tous les Etats membres qui vont à l`encontre des directives communautaires. Toutefois, « les exceptions à l'exclusivité de la souveraineté territoriale supposent l'accord préalable de l'Etat120 ».

Le rapport étroit Etat-territoire doit dorénavant être relativisé dans le but d`y introduire dans cette relation l`impact du statut de membre. En somme, toute détermination du domaine de compétence de l`Etat membre doit impérativement mettre en exergue le triptyque relationnel pour l`assise de la compétence de l`Etat. Le rapport Etat membre-territoire doit être établi sous le prisme de la théorie territoire-titre de compétence, parce que le territoire constitue un titre juridique essentiel de la compétence étatique et communautaire. Son acceptation n`exclut

115 Les principes fondamentaux du droit communautaire sont les principes qui servent à régler les rapports entre l`ordre juridique communautaire et les ordres juridiques nationaux. L`ensemble de ses principes créent des obligations à la charge des Etats membres et entrainent des conséquences pour les justiciables on en distingue trois principe à savoir : l`applicabilité immédiate ; l`effet direct ; et la primauté.

116 F. Mélin-Soucramanien, « La Constitution, le juge et le droit venu d`ailleurs? », Mélanges en l'honneur de Slobodan Milacic. Démocratie et liberté : tension, dialogue, confrontation, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 177 et s

117 NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, LGDJ, 9e édition, 2009, p 528.

118 Ibid. p 532.

119 Voir CHAMPAGNE (G), l'essentiel du droit constitutionnel, tome 1 : théorie générale du droit constitutionnel, gualino lextenso éditions, 10eme édition, 2011-2012, p 25.

120 . NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, op cit, p 534.

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pas la théorie du territoire limite121, car si le territoire communautaire confère à l`Etat membre et à la communauté un titre pour agir, il est impératif de présenter la place des éléments juridiques qui caractérisent l`Etat membre de la CEMAC.

PARAGRAPHE II : La caractérisation juridique de l'Etat membre de la CEMAC

L`Etat membre est avant toute chose un sujet de droit, suscitant un intérêt de recherche juridique. L`Etat membre de la CEMAC soulève de nombreuses questions, relatives à sa caractérisation juridique. Ainsi pour cerner juridiquement l`Etat membre, il est impératif de s`interroger sur sa personnalité juridique(A) et également sur l`état de sa souveraineté après l`acquisition du statut de membre de la CEMAC(B).

A/ La personnalité juridique de l'Etat membre de la CEMAC.

L`intitulé paraît être un faux débat ou bien une question sans intérêt. Car le membre de la CEMAC demeure après tout un Etat par conséquent doté de personnalité juridique. Pourtant, la question mérite d`être posée parce que le traité instituant la CEMAC n`affirme pas explicitement la personnalité juridique de l`Etat membre de la communauté(1). Mais tout compte fait, l`on peut implicitement reconnaitre à l`Etat membre, une personnalité juridique inhérente à sa posture au sein de la CEMAC(2).

1) La non reconnaissance textuelle et explicite de la personnalité juridique à l'Etat membre de la CEMAC

Aucune disposition du présent traité ne reconnaît à l`intérieur de la communauté, une autre personnalité juridique concurrente à celle de la CEMAC, à qui l`article 3 du traité révisé CEMAC122 admet explicitement la personnalité juridique.

Lors de son adhésion à la communauté, l`Etat par cet acte transfère à la communauté un certain nombre de compétences souveraines relatives à l`économie, à la monnaie, et à certains domaines de politique nationale. Dans la mesure où, « la souveraineté donne à l'Etat la plénitude de la personnalité juridique dans l'ordre juridique

121 Ibid. p 456

122 Article 3 du traité révisé CEMAC stipule que « La Communauté a la Personnalité Juridique. Elle possède dans chaque Etat membre la capacité juridique la plus large reconnue aux personnes morales par la législation nationale. Elle est représentée, à l'égard des tiers et en justice par le Président de la Commission, sans préjudice des dispositions des Conventions et Statuts particuliers. Sa responsabilité contractuelle est régie par la loi applicable au contrat en cause et mise en oeuvre devant les juridictions nationales compétentes ».

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international »123. Par analogie, le transfert de compétences souveraines de l`Etat vers la communauté entrainerait un transfert implicite de la personnalité juridique de l`Etat sur les domaines de compétences transférées. A cet effet sur les domaines de transfert de la compétence de l`Etat, il ne lui est plus reconnu une personnalité juridique internationale. L`on peut dire à la suite du traité instituant la CEMAC, qu`il n`est pas reconnu à l`Etat membre la personnalité juridique. Mais la communauté dispose de la personnalité juridique. Elle est créée par les Etats et dispose de pouvoirs et de compétences qui appartiennent habituellement à des Etats. Ainsi « possédant une personnalité distincte de celle des Etats, les communautés disposent d'un budget autonome, d'un patrimoine, d'organes distincts, et d'agents ». Plus généralement, « la personnalité juridique donne aux communautés vocation à devenir sujets de droit dans les différents ordres juridiques où elles sont amenées à intervenir »124. La communauté peut posséder un éventail de compétences autant que les Etats. Mais elle demeure limitée dans son objectif de par le principe de spécialité dont la CIJ a eu l`occasion de rappeler en 1996 toute l`importance125 . Cela dit, dans une analyse approfondie, l`on peut toutefois déduire du comportement de l`Etat membre dans la communauté et même hors de la communauté, une éventuelle existence de la personnalité juridique.

2) la déduction de l'exercice de la personnalité juridique pour l'Etat membre au sein de la CEMAC

Comme l`ont si bien précisé les Professeurs Nguyen Quoc Dinh, DAILLIER, PELLET et FORTEAU « la possession de la personnalité est une des principales caractéristiques de toutes institutions sociales. Elle trouve son fondement dans la convention constitutive dans son ensemble sans qu'il soit besoin d'une disposition l'attribuant expressément »126. Cependant tout fonctionnement de la communauté est dépendant de la volonté souveraine des Etats, même si les Etats membres des organisations d`intégration ont transférés leurs compétences. On peut appeler cela, la personnalité juridique communautaire des Etats membres c'est-à-dire « la fonctionnalité des organisations intégratives est dérivée de la volonté des Etats »127.

123 DUPUY (PM), « L'unité de l'ordre juridique international », cours général de droit international de la Haye, RCADI, tome 297, 2002, p 100.

124 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit, p 43.

125 Avis consultatif du 8 Juillet 1996, licéité de l`utilisation des armes nucléaires par un Etat dans un conflit, CIJ, recueil 1996, par 25.

126 NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, op cit p 658.

127 Ibid. p 659.

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Si l`on considère la personnalité juridique in concreto comme « l'exercice de toutes compétences y compris implicites, nécessaires à la réalisation des objectifs impliquées par la spécialité de l'organisation et seulement de ces compétences »128, on peut en déduire deux conclusions : premièrement l`Etat membre contrairement aux communautés intégratives dispose d`une personnalité juridique aussi large que sa souveraineté, ce qui englobe entre autre des domaines de compétences transférées à la communauté et également d`autres domaines de compétences lui restant liés. Deuxièmement, si la personnalité juridique est « l'exercice de toutes compétences y compris implicite » et étant entendu que « la fonctionnalité des organisations intégratives est dérivé de la volonté des Etats » par conséquent, l`on peut affirmer que la personnalité juridique de la communauté est assurée concurremment avec l`Etat membre. L`Etat est au centre de tout le processus intégratif, il est en amont et en aval de toute décision influente dans la communauté. Dans cette perspective l`on dira que malgré les énormes prérogatives reconnues à la communauté, elle n`est pas pour autant un Etat, toutefois son essence est (inter) étatique. Ainsi « Penser l'union c'est donc penser les Etats de l'union »129.

Bien que l`Etat membre soit le visage de l`intégration, il doit dans un but de convergence des politiques économiques, monétaires et sectorielles, mettre en avant la communauté dans les domaines de convergences de politiques. Mais la réalité est toute autre, dans le sens où chaque Etat membre de la CEMAC reste très jaloux de sa capacité de contracter avec d`autres entités juridiques. Cela conduit à ce que l`Etat membre d`une communauté intégrative demeure responsable de sa personnalité juridique. Même si la personnalité juridique internationale des organisations d`intégration donne à la communauté, une autonomie vis-à-vis des Etats membres. Évidement cela peut paraître dangereux, si au bout du compte, les organisations devenaient des entités concurrentes aux Etats130. Quid de la problématique de la souveraineté ?

B/ Le problème de la souveraineté des Etats membres de la CEMAC

Il est incroyable de constater à quel point la doctrine s`est intéressée à la notion de souveraineté131. Il est désormais unanime parmi Ces auteurs que la caractéristique

128 Ibid.

129 NABLI (B), « L'union des Etats et les Etats de l'union », op cit P 117.

130 NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, op cit, p 661.

131 La souveraineté est entendu premièrement comme le caractère d`une puissance (summa protestas) qui n`est soumise à aucune autre à l`instar de la souveraineté de l`Etat, de la loi (puissance suprême et inconditionnée dans

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propre de l`Etat c`est d`être souverain. La souveraineté est le critérium, le trait distinctif de l`Etat, car seul l`Etat peut être souverain132. Mais la notion de souveraineté est polysémique. « Rien que dans le domaine juridique, la souveraineté revêt une dizaine de significations différentes, ce qui fait qu'il y a autant de théories de la souveraineté que de disciplines et cela sans compter la diversité qui existe à ce sujet dans chaque branche du droit »133. Tout compte fait, il est impératif de présenter la conception de la souveraineté selon le droit international(1) avant de démontrer l`exercice de la souveraineté pour l`Etat membre de la CEMAC au sein de la communauté(2).

1) La conception de la souveraineté en droit international.

Il faut dire au préalable que le principe de souveraineté éclaire la distinction entre la sphère intérieure de l`Etat et celle des relations internationales. Dans ce sens, l`on distingue dans l`appréhension de la souveraineté, une conception interne de la souveraineté134 et externe135. La souveraineté désigne le caractère suprême d`une puissance pleinement indépendante. Elle désigne également la position qu`occupe dans l`Etat le titulaire suprême de la puissance étatique et ici la souveraineté est encore appelé souveraineté dans l`Etat136 , à ce sujet, Jean BODIN affirmera que « la souveraineté est ce pouvoir de commander et de contraindre sans être commandé ni contraint par qui que ce soit sur la terre »137. La souveraineté arbore dans ce sens une idée négative, dans la mesure où la souveraineté devient la négation de toute entrave ou subordination. Sur le plan interne la souveraineté de l`Etat fut

laquelle l`ordre international reconnait un attribut essentiel de l`Etat mais qui est aussi reconnue, par exception, à certaines entités). Deuxièmement c`est le caractère d`un organe qui n`est soumis au contrôle d`aucun autre et se trouve investi des compétences les plus élevées (la souveraineté dans l`Etat). Voir CORNU (G), Vocabulaire juridique, PUF, dernière édition mise à jour, 2006, p 121.

132 CARRE DE MALBERG (R), Contribution à la théorie générale de l'Etat, librairie de la société du recueil Sirey, tome premier, 1920, P 73.

133 Lider BAL, « Le mythe de la souveraineté en droit international, la souveraineté des Etats à l'épreuve des mutations de l'ordre juridique international », thèse de doctorat en droit international, université de Strasbourg, 2012, p 20.

134 Ici la notion de souveraineté désigne non pas une puissance mais bien une qualité une certaine façon d`être, un certain degré de puissance. La souveraineté est le caractère suprême d`un pouvoir : suprême en ce sens que le pouvoir n`en admet aucun autre ni au dessus de lui ni en concurrence avec lui. Quand donc on dit que l`Etat est souverain il faut entendre par la que dans la sphère ou son auto détermination est appelé à s`exercer, il détient une puissance qui ne relève d`aucun autre pouvoir et qui ne peut être égalée par aucun autre pouvoir. Voir CARRE DE MALBERG (R), Contribution à la théorie générale de l'Etat, op cit p 70.

135 La souveraineté externe se manifeste dans les rapports internationaux des Etats elle implique pour l`Etat souverain l`exclusion de toute subordination, de toute dépendance vis-à-vis des Etats étrangers. Dire les Etats sont souverains dans leurs relations réciproques, cela signifie aussi qu`ils sont respectivement égaux les uns aux autres, sans qu`aucun d`eux puisse prétendre juridiquement à une supériorité ou autorité quelconque sur aucun autre Etat. Voir CARRE DE MALBERG (R), Contribution à la théorie générale de l'Etat, op cit, p 71.

136 Ibid. p78.

137 BODIN (J), Les six livres de la république 1583, version numérique, les classiques des sciences sociales, la bibliothèque Paul-Emile-Boulet de l`université du Québec à Chicoutimi, 1993, p 76.

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considérée pendant longtemps comme absolue, beaucoup se refusant même de reconnaître l`hypothèse de l`existence d`une souveraineté au plan international. LE FUR l`affirmera lorsqu`il dit qu` « il n'existe pas à proprement parler de souveraineté extérieure138». Pourtant DESPAGNET relativisera en disant que le terme souveraineté devrait être réservé pour l`intérieur et remplacé à l`extérieur par celui d`indépendance. La souveraineté interne c`est une autorité suprême parce qu`elle ne possède pas une puissance inférieure au sein de l`Etat. Ici la souveraineté exprime la puissance étatique la plus haute existant à l`intérieur de l`Etat : elle est une summa potesta139. Dans ce cas on verra très mal une coexistence pacifique entre les Etats. Pourtant dans l`ordre juridique international la souveraineté dite externe n`est que la résultante de la souveraineté interne. En d`autres termes la souveraineté externe est l`expression de l`existence de l`Etat. Réciproquement la souveraineté interne n`est pas possible sans la souveraineté externe140. De toute évidence, l`Etat est le principal sujet du droit international parce qu`il est souverain. « L'Etat sans souveraineté c'est la situation d'un Etat dont les compétences internationales sont exercées par un autre Etat »141 . Pour le droit international, la souveraineté appartient à l`Etat et caractérise sa personnalité juridique internationale142 et la nature de son pouvoir. La souveraineté externe en droit international signifie indépendance. Le Professeur DUPUY dira même que « si l'indépendance est le critère de la souveraineté, la souveraineté est le garant de l'indépendance »143, la souveraineté, dans l`ordre juridique international équivaut à la plénitude des compétences susceptibles d`être dévolues à un sujet de droit international. La souveraineté de l`Etat, à la différence de la souveraineté dans l`Etat, dégage une idée positive. D`une part, à l`intérieur, la prérogative pour l`Etat d`édicter et d`imposer tout ce qu`il juge utile, d`autre part, puissance extérieure de faire les actes qui répondent à l`intérêt national144 . On peut aussi relever deux caractéristiques fondamentales de la souveraineté de l`Etat à savoir

138 LE FUR (L), Etat fédéral et confédération d'Etats, 1896, réédition, éditions panthéon amas, 2000, XVII-839P, cité par Lider BAL, « le mythe de la souveraineté en droit international, la souveraineté des Etats à l'épreuve des mutations de l'ordre juridique international », op cit, p 22.

139 CARRE DE MALBERG (R), contribution à la théorie générale de l'Etat, op cit p 72.

140 CHAUMONT (C), « recherche du contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de l'Etat », p 13, cité par Lider BAL, « le mythe de la souveraineté en droit international », op cit p 21.

141 Ibid. p 72.

142 Les attributions juridiques sont attachées à la possession de la personnalité juridique : capacité de produire des actes juridiques, de se voir imputer des faits illicites internationaux ;de devenir membre et de participer pleinement à la vie des organisations internationales ; d`ester en justice devant les juridictions et tribunaux arbitraux internationaux ; d`exercer la généralité des compétences territoriales et la plénitude des compétences personnelles ; d`apprécier librement ( mais de bonne foi) l`existence, le sens et la portée des droits et des obligations dont il est titulaire. Voir DUPUY (PM), « l'unité de l'ordre juridique international », op cit p 100.

143 Ibid. p 95.

144 CARRE DE MALBERG (R), contribution à la théorie de l'Etat, op cit p 80.

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- L`identique souveraineté ou l`égalité souveraine comme fiction juridique145. Le principe de l`égalité souveraine signifie que tous les Etats ont les mêmes obligations au sein de l`ordre juridique international. Il exprime également, le fait que les Etats, quelque soit leur situation naturelle, doivent recevoir de la part de cet ordre juridique, un traitement juridiquement identique, il s`agit bel et bien d`une fiction, cependant d`une fiction juridique c`est-à-dire un « procédé de technique juridique consistant à supposer un fait ou une situation différente de la réalité pour en déduire des conséquences juridiques »146

- La souveraineté donne à l`Etat la plénitude de la personnalité juridique dans l`ordre juridique international147. L`Etat dispose d`un ensemble de prérogatives inhérentes à sa qualité d`entité juridique souveraine. Il faut cependant signifier que l`on reconnaît à certaines organisations internationales la personnalité juridique internationale. Mais il s`agit d`une personnalité juridique fonctionnelle inhérente au principe de spécialité qui est reconnue à toute organisation internationale148.

Toutefois, la conception de la souveraineté dans l`ordre juridique international devient problématique lorsque l`Etat est obligé de la limiter, ou bien de la transférer pour coexister au niveau international. La véritable question est celle de savoir si l`Etat reste souverain après avoir contracté ou transféré des compétences souveraines à une entité juridiquement créée par lui et ses pairs?

Les solutions sont nuancées, dans la mesure où deux grandes thèses s`affrontent : la première affirme que l`on ne peut plus parler de souveraineté quand elle est limitée dans son exercice. Et la deuxième thèse voit dans la limitation de la souveraineté une manifestation de l`exercice du pouvoir souverain. Avant de présenter les différentes thèses, il nous est obligé de constater à quel point dans la littérature de droit public, il existe une confusion entre la limitation de la souveraineté et celle de l`exercice de la souveraineté ou plus exactement celle de l`exercice des compétences souveraines. Et ce niveau se joue l`opposition entre les deux thèses.

La Professeure CHALTIEL, tout au long de son étude portant spécifiquement sur le statut de l`Etat membre de l`union européenne, défend clairement l`idée selon laquelle un transfert

145 DUPUY (PM), « l'unité de l'ordre juridique international », op cit p 98.

146 Les présomptions et les fictions en droit, études publiées par ch. PERELMAN et P. FORIENS, Bruxelles, bruylant, 1974, notamment P.FORIENS, « présomptions et fictions », p 8 ss. Cité par DUPUY (PM), « l'unité de l'ordre juridique international », op cit p 98.

147 Ibid. p 100.

148 Voir à ce sujet l`arrêt de la C.I.J, Avis du 11 avril 1949, réparations des dommages subis au service des nations unies, Rec., p 178.

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définitif de certaines compétences étatiques signifie une limitation de la souveraineté de l`Etat149. Elle affirmera, qu`un Etat qui devient membre d`une organisation internationale comme l`Union Européenne et qui lui cède irréversiblement l`exercice de certaines compétences souveraines, ne peut plus être considéré comme un Etat souverain traditionnel150. C`est dans le même ordre d`idées, que le Professeur PELLET affirmera qu`une entité politique est souveraine ou elle ne l`est pas, mais en tout état de cause, elle ne peut pas l`être « un peu », « beaucoup » ou « en partie »151. Allant également dans le même sens, KRANZ affirmera que « parler à propos d'un Etat de l'abandon partiel de la souveraineté, du transfert de la souveraineté, de la souveraineté limitée ou de la nécessite de recouvrer la pleine souveraineté témoigne d'une fausse conception de la notion de souveraineté »152. Il est clair pour ces quelques auteurs que la limitation, le transfert de souveraineté, revient à un abandon par l`Etat de sa souveraineté. Sans doute, la thèse épouse les idées absolutistes des conceptions internistes de la souveraineté. Par conséquent proclament l`existence d`Etat sans souveraineté du seul fait de leur adhésion à des organisations supranationales telles que la CEMAC ou l`UEMOA.

Pourtant aucune limitation, ou transfert de souveraineté n`est faite sans « l'animus contrahendi » c'est-à-dire sans la volonté claire de l`Etat. Par conséquent, il agit moins d`une limitation, ou d`un abandon de souveraineté, mais au contraire, de l`exercice de compétences souveraines reconnues à l`Etat. La jurisprudence de la Cour Permanente de Justice Internationale, sur ce point soutient clairement dans l`affaire Vapeur Wimbledon que la cour « se refuse à voir dans la conclusion d'un traité quelconque dans lequel l'Etat s'engage à faire ou à ne pas faire quelque chose, un abandon de sa souveraineté » et elle continue en disant que « sans doute, toute convention engendrant une obligation de ce genre, apporte une restriction à l'exercice des droits souverains de l'Etat, en ce sens qu'elle imprime à cet exercice une direction déterminée. Mais la faculté de contracter des engagements internationaux est précisément un attribut de la souveraineté de l'Etat »153. La doctrine volontariste incarnée par cet arrêt a trouvé des adeptes à la personne d`ANZILOTTI qui dit : « les limitations de la liberté d'un Etat qu'elles viennent du droit international commun

149 CHALTIEL (F), la souveraineté de l'Etat et l'union européenne, l'exemple français. Recherche sur la souveraineté de l'Etat membre, LGDJ, 2000, p 96.

150 CHALTIEL (F), « contribution à la théorie juridique du statut de l`Etat membre de l`union européenne : l`exemple français » in démarche communautaire et construction européenne, F. HERVOUET (sous dir.), vol 1 : dynamique des objectifs, la documentation française, 2000, pp 163-178, spec. p 170.

151 PELLET (A), « cours général : le droit international entre souveraineté et communauté internationale », annuaro brasileiro de directo international, 2007, vol 2, p 28.

152 KRANZ (J), « notion de souveraineté et le droit international », archiv des völkerrechts, n° 30, 1992, p 440.

153 Arrêt Navire à vapeur de Wimbledon, 17 aout 1923, CPJI, série A n° 1, p 25.

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ou d'engagements contractés n'affectent aucunement en tant que telles son indépendance »154, synonyme en droit international de souveraineté. Il devient évident qu`au niveau international, l`Etat est une entité exceptionnelle « relevant du droit international »155. A la différence des organisations internationales, ils sont dotés de la souveraineté, faculté qui leur confère la capacité d`être titulaire direct des droits et obligations en vertu du droit international156. Cependant le système communautaire, qualifié de contraignant et d`autoritaire de par les principes fondamentaux qui le structurent, pose un problème particulier concernant la souveraineté. La communauté bénéficie des Etats lors de leur adhésion, d`un transfert de compétences souveraines dans le but d`atteindre un certain nombre d`objectifs. Peut- on dire à la suite de ce transfert de compétences que la souveraineté des Etats n`est pas limitée ?

2) La souveraineté des Etats membres de la CEMAC : adéquation entre exercice de la souveraineté et transfert des compétences souveraines.

Il est nécessaire pour mieux cerner la problématique de cette partie de présenter d`abord la notion de compétences, car elle est au centre du problème de la souveraineté en droit communautaire. Il faut dire que la compétence est une notion de droit public interne. Elle désigne en droit communautaire, un ensemble de prérogatives anciennes exercées par les Etats et confiées, grâce l`acte d`adhésion, à la communauté pour une coordination et une harmonisation des activités nationales pour un objectif commun. L`apparition de la notion de compétences juridiques dans son sens actuel est probablement liée au phénomène d`institutionnalisation du pouvoir politique. Au sens de Max WEBER, il s`agit d`un type de légitimité du pouvoir157. Autrement dit, la compétence relève de la légitimité légale rationnelle du pouvoir. C`est une constitutionnalisation du pouvoir, véritablement la naissance de la notion juridique de compétence. Pour A. LEVADE la notion de compétence d`une autorité publique n`acquiert sa pleine signification que dans l`optique d`une séparation fonctionnelle des autorités et prend concrètement un sens lorsque l`autorité politique se trouve limitée par un texte constitutionnel158. A cet effet, on peut appréhender la compétence dans une distinction avec le pouvoir comme « le titre juridique qui fonde un

154 Opinion dissidente d`ANZILOTTI dans l`affaire du régime douanier Austro-allemand, CPJI, série A/B, N°41, p 57 cité par DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), droit international public, op cit, p 467.

155 C.I.J dans son avis sur la réparation des dommages subis au service des Nations Unies, op cit

156 DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, op cit p 468.

157 WEBER (M), in winckelman (HRS9), wirtchaft und Gesellshaft, grundrissdes verstehenden soziologie, 1964, Kiepenheurer& witsch, p 157.

158 LEVADE (A), « souveraineté et compétences des Etats », thèse de doctorat, Paris XV, 1997, p 12.

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individu à exercer un pouvoir et donc indirectement une action »159. Dans la mesure où, « le pouvoir(ZUSTÄNDIGKEIT) est le droit ou le devoir d'exercer une action, tandis que la compétence(KOMPETENZ) est « le droit à ce pouvoir ». On pourrait dire que « la compétence est donc le titre du pouvoir, tandis que le pouvoir est l'attribution ou la somme d'attributions autorisées par le droit de la compétence »160. Cependant, il est difficilement envisageable de rencontrer dans les traités instituant les communautés d`intégration, des dispositions relatives aux compétences (transfert, modes d`exercice et consistance des compétences transférées). Toutefois, une étude plus minutieuse permet de manière implicite de soulever une grille de compétences au niveau communautaire. Si l`on prend en compte le fait que la communauté est mise en place pour exercer et instituer certaines politiques communes, mesures ou politiques d`intégration, afin d`atteindre les objectifs visés par les Etats fondateurs. Il est aussi clair que les Etats fondateurs mettront à la disposition de la communauté des compétences fonctionnelles. Il importe avant tout de remarquer à la lumière de ce qui suit que « les communautés [...] n'ont pas été établies selon la logique de l'attribution, répartition des compétences qui a prévalu dans la formation de la plupart des Etats fédéraux, mais selon une logique différente, celle de l'énonciation des objectifs à atteindre ». De plus, « les communautés n'ont pas été fondées sur une constitution adoptée selon les exigences du droit public interne, mais sur un traité international conclu conformément aux règles du droit international et ratifié selon les dispositions constitutionnelles pertinentes de chaque Etat partie »161. L`on ne peut trouver dans aucun traité constitutif des dispositions expresses mettant en exergue les compétences souveraines nationales transférées à la communauté. Serait-ce véritablement question des compétences souveraines ? La réponse à cette question ne peut qu`être qu`affirmative ; dans la mesure où, parmi les compétences à reconnaître à la souveraineté sans distinction d`appréhension de cette notion, les auteurs s`accordent à dire que certaines sont qualifiées de «régaliennes » ou de « souveraines » pour exprimer le fait qu`elles concernent de près l`existence même et les missions les plus fondamentales de l`Etat162. Cependant lorsque « certaines des compétences étatiques les plus importantes ont été dévolues à l'union -comme c'est le cas du fait des dispositions concernant l'union économique et monétaire- se pose alors, dans cette

159 CONTANTINESCO (V) et MICHEL (V), « compétences de l'Union Européenne », Répertoire communautaire, Dalloz, juin 2011, p 7.

160 Ibid. p7

161 Ibid. p 8. Cependant la cour de justice de la communauté européenne a eu à qualifier les traités constitutifs de « charte constitutionnelle d'une communauté de droit » Voir à cet effet CJCE 23 avril 1986, les verts c/ parlement, Aff. 294/83, Rec. 1339-Avis de la cour N°1/91, 14 décembre 1991, Rec. I. 6079.

162 Ibid. p 12.

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conception « quantitative » de la souveraineté, la question du maintien de la souveraineté des Etats membres et donc celle de la persistance de la qualité d'Etat »163, au sens du droit international. En d`autres termes, Peut-on encore parler de souveraineté de l`Etat membre de la CEMAC, suite à l`exercice de compétences souveraines des Etats par la communauté ?

Tout transfert de compétence à une entité quelconque constitue vraisemblablement une limitation de la souveraineté de l`Etat. Cependant au sein de la CEMAC la situation est tout autre. Certes les Etats membres ont dévolu certaines compétences importantes (économiques et monétaires) à la communauté, mais ils n`ont pas limité ou abandonné leurs compétences souveraines, tout au contraire, ils restent maîtres et souverains de leurs compétences transférées. On peut appeler cela un transfert « rédhibitoire »164. C`est à dire que les compétences transférées à la communauté pour son fonctionnement, sont récupérées et exercées au niveau de la communauté par ces Etats membres au sein des organes de la communauté par conséquent le transfert de compétence est rendu presque néant. Au sein de la CEMAC, la communauté est soumise au diktat et aux caprices des Etats membres. De ce fait, toute compétence nationale transférée par les Etats membres de la CEMAC est encore exercée par ceux-ci. Par conséquent, le transfert de compétences est une fiction juridique parce qu`en somme il s`agit d`un exercice partagé des compétences entre l`Etat et la communauté.

Selon la conception « qualitative », la souveraineté ne s`exprime pas dans une énumération additive des compétences, mais elle est quelque chose d`autre, ou d`une autre nature, d`une autre substance, ou d`une autre qualité165. A ce niveau la souveraineté est la source des compétences de l`Etat et non leur somme. Autrement dit, un Etat souverain jouit de ses compétences, et ce n`est pas parce qu`il détient un ensemble non dénombrable de compétences qu`il est souverain166. La souveraineté apparaît comme le titre ou la qualité qui permet à un Etat de définir l`étendue de sa propre compétence. Par conséquent la souveraineté peut être définie comme la compétence de la compétence167. Dès lors, les Etats membres sont

163 Ibid. p 12. « La mission essentielle de la communauté est de promouvoir la paix et le développement harmonieux des Etats membres, dans le cadre de l'institution de deux Unions : une Union économique et une union monétaire... ». Voir l`article 2 du traité révisé CEMAC signé le 25 juin 2008 à Yaoundé et le préambule de la convention régissant l`union économique de l`Afrique centrale « convaincus que l'intégration des Etat membres en une communauté économique et monétaire exige la mise en commun partielle et progressive de leur souveraineté nationale au profit de la communauté dans le cadre d'une volonté politique collective »

164 Voir OWONA (J), « l'essor du constitutionnalisme rédhibitoire en Afrique noire : études de quelques « constitutions Janus », op cit, p 235.

165 Vlat CONSTANTINESCO et Valérie MICHEL, « compétences de l'union européenne », op cit p 10.

166 Ibid.

167 Ibid. p 11.

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libres, de conférer ou de transférer certaines de leurs compétences à l`ordre juridique communautaire par eux créé, sans pour autant compromettre ou renoncer à leur souveraineté, laquelle constitue précisément leur titre à pouvoir le faire. Par analogie, l`Etat membre de la CEMAC, bien qu`ayant transféré quelques compétences à la communauté, n`a pas pour autant renoncé, perdu, ou abandonné sa souveraineté. De plus il ne faudrait pas oublier que « les compétences de l'union se développent à l'intérieur du champ d'application défini et donc limité, d'un point de vue territorial, personnel, matériel et fonctionnel, tandis que, puisque la souveraineté ne définit pas les compétences, elle ne peut donc pas être quantifiable, et demeure nécessairement indéterminé »168.

Au demeurant, on peut dire comme l`ont affirmé Vlad CONSTANTINESCO et Valérie MICHEL que « la souveraineté se présente aujourd'hui, dans le cadre [communautaire], sous une forme double : issue des gouvernements nationaux et exprimant la compétence de la compétence selon le droit international. Elle se combinerait avec celle des peuples des Etats membres, en tant que titulaires d'une souveraineté d'ordre interne et d'origine constitutionnelle »169.

CONCLUSION DU PREMIER CHAPITRE.

De ce qui précède, il convient de rappeler que l`acquisition de la qualité de membre de la CEMAC impose le respect d`un certain nombre de conditions de forme, fond et technique que l`Etat désireux d`adhérer, doit impérativement subir, bien que ce processus de choix mêlant tout ses conditions, soit confus et ambigüe. L`éventualité d`une adhésion respectant les énoncés des textes instituant la CEMAC demeure hypothétique. Toutefois l`étude de l`acquisition de la qualité de membre de la CEMAC nous a permis de caractériser l`Etat membre de la CEMAC. Ainsi nous avons successivement abordé la question de la caractérisation sociologique et juridique de l`Etat membre de la CEMAC, au point ou l`on en vient à se poser la question de savoir quels sont les pouvoirs ou prérogatives donc dispose que lui confèrent la communauté ?

168 Ibid.

169 Ibid.

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CHAPITRE II : LES POUVOIRS DE L'ETAT MEMBRE DE LA

CEMAC.

En droit interne, à l`évocation du mot pouvoir, l`on pense directement à la séparation des pouvoirs170. Le pouvoir est un ensemble d`attributions ou de prérogatives propres à une entité juridique qui la rend capable d`imposer ou de commander d`autres entités. Selon le dictionnaire hachette c`est la faculté, le droit, le moyen de faire quelque chose171. Dans l`ordre juridique interne des Etats, l`on distingue, un pouvoir exécutif incarné par le chef de l`Etat et du gouvernement, un pouvoir législatif ayant pour fonction de légiférer au nom du peuple et dans le respect de la constitution172, et enfin un pouvoir judiciaire ayant pour rôle de promouvoir et de mettre en oeuvre l`idée de justice dans la société, par le règlement des litiges. Il est évident que l`on reste jusqu`ici curieux sur le rapport des pouvoirs étatiques,-issus de la séparation des pouvoirs-, avec l`Etat membre de la CEMAC. L`on a constaté dans la marche des communautés intégratives, et dans l`étude des normes du droit communautaire, que certains pouvoirs peuvent être reconnus à l`Etat membre de la CEMAC, dans l`exercice de ses compétences et dans la portée des normes issues des organes communautaires. Le pouvoir peut s`entendre au niveau du droit communautaire comme les compétences reconnues aux organes de gestion de la communauté. Les compétences sont à cet effet des pouvoirs, des attributions et des prérogatives « nécessaires à la réalisation des objectifs des traites »173. Comme en droit interne, les pouvoirs reconnus aux Etats membres, tirent leurs bases juridiques des textes à l`instar du traité constituant la CEMAC et quelque fois des constitutions nationales174. De ce qui précède il convient de remarquer qu`il existe au sein de la CEMAC trois types de pouvoirs à savoir, le pouvoir « constituant » (section 1), comme prérogative de créer des actes juridiques normatifs du système intégratif économique et monétaire de la CEMAC, et également des pouvoirs législatif et exécutif (section 2).

170 Elaborée par LOCKE (1632-1704) et MONTESQUIEU (1689-1755), la séparation des pouvoirs est un principe de répartition des différentes fonctions de l`Etat, qui sont confiées à différents institutions.

171 Voir le dictionnaire Hachette

172 L`on est passé de la démocratie majoritaire ou la majorité au parlement faisait la loi d`où la phrase suivante « vous avez juridiquement tord parce que vous êtes politiquement minoritaire », à une démocratie constitutionnel c`est dire les lois voté par le parlement doivent respecter la constitution. D`où l`impératif d`un contrôle de constitutionnalité des lois.

173 Klaus-Dieter BORCHARDT, l'ABC du droit de l'union européenne, office des publications de l`Union européenne, 2010. P 40.

174 Certaine constitutions reconnaissent aux Etats la capacité juridique ou la faculté d`adhérer à une communauté. D`autre modifie leur constitution pour intégrer la dimension communautaire et la qualité de membre.

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SECTION I : LE POUVOIR « CONSTITUANT » DE L'ETAT MEMBRE DE LA

CEMAC

Le pouvoir « constituant »175 est généralement employé en droit public interne. Il désigne la faculté reconnue à un organe de mettre sur pied une constitution pour un Etat. Au niveau international ou communautaire, la question revêt une autre portée. L`Etat est avant tout souverain et cette souveraineté lui accorde un certain nombre de prérogatives, entre autres le pouvoir de « création subjective »176, c'est-à-dire, de créer lui-même d`autres sujets de droit international. Ce « treaty making power »177 propre aux sujets de droit international se confond avec une forme de pouvoir constituant. Bien que différent, du constituant en droit interne, où cette prérogative est l`oeuvre d`un pouvoir constituant originaire ou dérivé, la CEMAC, reconnait aux Etats membres un pouvoir constituant au sein d`un organe appelé conférence des chefs d`Etats (paragraphe I). C`est un organe constituant partiel ou « Co-constituant » de l`union178, à qui l`on peut reconnaître un certain nombre d`actes collectifs constitutionnels répondant à un régime juridique (paragraphe II) bien précis.

PARAGRAPHE I : Un « pouvoir constituant » reposant sur la conférence des chefs d'Etats

La volonté des Etats membres occupe une place fondamentale dans la structuration de l`ordre juridique communautaire. NABLI dira que l`on ne peut penser l`union sans les Etats179. L`organe chargé d`instituer la CEMAC est un organe inter étatique appelé conférence des chefs d`Etats. Il est constituant parce que, le traité instituant la CEMAC et ses institutions, base constitutionnelle180 de la communauté est l`oeuvre de cet organe. Ces traités peuvent être dénommés « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d`Etat(A). Ainsi pour les actes juridiques les plus importants la logique d`intégration cède le pas à l`inter

175 NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (P), PELLET (A) et FORTEAU (M), Droit international public, op cit, p 478.

176 NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit p 15.

177 Dans la théorie constitutionnelle classique seule la constitution est l`oeuvre du pouvoir constituant qui s`exerce dans les limites d`un Etat. Le caractère inconditionnel du pouvoir constituant originaire n`a de sens que dans l`Etat. Le cadre étatique permet un exercice unilatéral du pouvoir sans que soit exigé le consentement des autres Etats un pouvoir d`une telle nature ne se trouve pas dans l`ordre juridique international ou l`instrument conventionnelle est la règle.

178 MATHIEU (B), « Réflexions sur le pôle de l'Etat en tant qu'élément du pouvoir constituant de l'union européenne » in annuaire de droit européen, 2004, vol II, pp 105-118 spec. p 118.

179 NABLI (B), « L'union des Etats et les Etats de l'union », op cit, pp 113-120.

180 Dans son arrêt « les verts » la cour de justice a convoquée en termes clair la nature constitutionnelle des traités en considérant que « la communauté économique européenne est une communauté de droit en ce que ni ses Etats membres ni ses institutions n'échappent au contrôle de la conformité de leurs actes à la charte constitutionnelle de base qu'est le traité », voir l`arrêt du 23 avril 1986, affaire 294/83, Rec. P 1339.

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étatisme. C`est la raison pour laquelle ces actes à la différence de bien d`autres ont une portée particulière(B), et constitutive des principes fondamentaux du droit communautaire.

A/ Les « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d'Etats manifestant le

pouvoir constituant.

Disposant « du pouvoir et de la légitimité propre à établir une norme juridique qui fonde et organise un ordre juridique »181, pour ce faire l`Etat membre use des actes juridiques pour atteindre ses objectifs. Parmi ces actes, on distingue ceux considérés comme constitutionnels, à savoir le traité constitutif d`une organisation intégrative182 (1) et également les actes additionnels (2).

1) L'acte de validité de l'ordre juridique communautaire : le traité instituant la CEMAC.

Le traité est un engagement ou un accord entre sujets de droit international. Sa définition ne fait intervenir à aucun moment le caractère constitutionnel de cette source du droit communautaire. Le conseil constitutionnel français l`a même affirmé en ce qui concerne le traité établissant une constitution pour l`Europe en disant qu`elle « conserve le caractère d'un traité international souscrit par les Etats signataires du traite instituant la communauté européenne et du traité sur l'union européenne »183. Bien que la forme qui revient au mécanisme ayant conduit à son élaboration ne nous renseigne pas sur le caractère constitutionnel du traité instituant la CEMAC, son esprit démontre tout de même le caractère constitutif de celui-ci. Comme en droit interne, on distingue en définissant la constitution, une appréhension formelle liant le caractère solennel de la procédure de conception de la constitution. Et également matérielle, qui se borne à déterminer le caractère constitutionnel d`un texte dans son oeuvre consistant à organiser la vie institutionnelle et normative d`un Etat184. Alors dans cette deuxième acception de la constitution, l`on peut déduire du traité

181181 MATHIEU (B), « Réflexions sur le pôle de l'Etat en tant qu'élément du pouvoir constituant de l'union européenne in annuaire de droit européen », op cit, p 13.

182 « Le traité CEE, bien que conclu sous la forme d'un accord international, n'en constitue pas moins la charte constitutionnelle d'une communauté de droits ». Voir l`avis relatif au projet d`accord entre la communauté européenne et les Etats de l`association européenne de libre échange européen (EEE) du 14 décembre 1991, N°1/91, Rec., P I-6079.

183 Les dispositions du traité constitutionnel relatives aux modalités de son entrée en vigueur, de sa révision et la possibilité de le dénoncer, le range bien dans la catégorie générique des « engagements internationaux ». Voir Décision N° 2004-505 DC du 19 novembre 2004, traité établissant une constitution pour l`Europe, J.O.R.F du 24 novembre 2004, p 19885.

184 « Il est convenu que toutes les constitutions possèdent des traits communs. Elles fixent dans l'Etat le statut du pouvoir politique et des conditions d'exercice de l'autorité publique » voir MONJAL (P.Y), Les normes de droit communautaire, coll. « que sais je », PUF, 2000, p 15.

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instituant la CEMAC une base constitutionnelle de l`ordre juridique communautaire CEMAC. Il ne s`agit point de soutenir que la communauté intégrative forme un Etat et que le traité révisé de la CEMAC est une constitution. Une telle assimilation ne serait pas soutenable au regard du droit constitutionnel. Toutefois on ne saurait admettre que cette branche du droit public procède à une appropriation de la notion de constitution, et à une « absorption lexicale exclusive ». L`on peut, dans la perspective de ressortir le caractère constitutionnel du traité instituant la CEMAC, mettre en exergue les critères établissant la constitutionnalisation de l`acte primaire de la CEMAC. Le critère formel du caractère constitutionnel trouve sa source dans l`article 57185 relatif à la procédure de révision du traité constitutif. En vertu de l`article précité, les Etats membres forment le pouvoir constituant au sein de la communauté, sur leur initiative ou celle de la commission. Il est mis en exergue ici, le fondement démocratique nécessaire à toute constitution. Mais le caractère étatique ne doit pas occulter la réelle dimension démocratique car les « modifications entrent en vigueur après avoir été ratifiées par tous les Etats membres en conformité avec leurs règles constitutionnelles respectives »186. Bien que la ratification sonne comme une loi d`approbation du « droit venu d`ailleurs »187, elle revêt également une forme de légitimation populaire du texte soumis aux parlementaires. Par conséquent cette instance fondatrice qui est l`adhésion du peuple par les ratifications nationales prouve qu`il s`est indiscutablement produit un « moment constitutionnel »188. Dans une approche analogique, l`on peut affirmer comme dans le cas des constitutions nationales que, les autorités élues représentant le peuple, et agissant au niveau communautaire portent en elles une parcelle du pouvoir constituant dérivé. On peut dès lors raisonnablement soutenir qu`une fraction de la population communautaire CEMAC, le plus solennellement possible a donné une légitimité populaire ou démocratique au traité instituant la CEMAC.

En ce qui concerne le critère matériel, c'est-à-dire « tout ce qui dans le droit primaire est de nature ou d'origine constitutionnelle »189, on est dans l`obligation de constater

185 Article 57 du traité constitutif de la CEMAC « Tout Etat membre peut soumettre à la Conférence des Chefs

d'Etat des projets tendant à la révision du présent Traité ou des Conventions de l'UEAC et de l'UMAC. Les modifications sont adoptées à l'unanimité des Etats membres. Sur proposition du Président de la Commission, des premiers responsables des Institutions et Organes de la Communauté ou du premier responsable de toute Institution Spécialisée de la Communauté, le Conseil des Ministres ou le Comité Ministériel, peuvent également soumettre des projets de révision du présent Traité à la Conférence des Chefs d'Etat. Les modifications entrent en vigueur après avoir été ratifiées par tous les Etats membres en conformité avec leurs règles constitutionnelles respectives ».

186 Ibid.

187 F. Mélin-Soucramanien, « La Constitution, le juge et le droit venu d`ailleurs? », Mélanges en l'honneur de

Slobodan Milacic. Démocratie et liberté : tension, dialogue, confrontation, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 177 et s

188 MONJAL (P.Y), les normes de droit communautaire, op cit, p 18

189 Ibid.

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en fait un double processus de constitutionnalisation du droit primaire. Le premier est au niveau supranational, dans la prise de décisions au niveau supranational, on assiste au respect des traditions constitutionnelles des Etats membres, et du respect de la répartition des compétences dans le traité révisé CEMAC. Le respect des traditions constitutionnelles des Etats membres dans la prise de décision se manifeste au préambule par la réaffirmation de leur « attachement au respect des principes de démocratie, des droits de l'homme, de l'Etat de droit, de la bonne gouvernance, du dialogue social et des questions de genre »190. Il faut dire que la CEMAC est fondée sur l`ensemble de ces principes dont la nature constitutionnelle est difficilement réfutable. Et partant de cet énoncé, les institutions communautaires voient leur action décisionnelle prédéterminée ou encadrée par la norme primaire.

La constitutionnalisation au niveau supranational peut également être recherchée dans le mécanisme d`attribution des compétences communautaires. C`est par rapport à ce système de répartition des compétences que naît le principe de primauté ou de la suprématie du droit communautaire sur les droit nationaux , formulé dans l`arrêt COSTA, et repris en d`autre termes dans l`article 44 du traité révisé de la CEMAC « les actes adoptés par les institutions, organes et institutions spécialisées de la communauté pour la réalisation des objectifs du présent traité sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire antérieure ou postérieure ».

Le second processus de constitutionnalisation est national et renvoi véritablement à l`intégration progressive du droit communautaire dans les constitutions nationales. Lors de l`entrée en vigueur du traité révisé CEMAC, une modification substantielle du nombre de constitutions africaines191 montre une forme de

190 Voir le préambule du traité révisé CEMAC signé en 2008 à Yaoundé.

191 La constitution du Gabon du 26 mars 1991 consacre au titre XI « des accords de coopération et d`association » son unique article stipule : « la république gabonaise conclut souverainement des accords de coopération ou d'association avec d'autres Etats. Elle accepte de créer avec eux des organismes de gestion commune de coordination et de libre coopération ».

La constitution Tchadienne du 31 mars 1996 révisée en mai 2004 et le 6 juin 2005 en son article 217 dispose que « la république du Tchad peut conclure avec d'autres Etats des accords de coopération et d'association...elle peut créer avec d'autres Etats des organismes de gestion commune de coordination et de coopération... ».

Le titre V de la loi fondamentale centrafricaine reconnaît également à l`Etat la possibilité d`établir avec ses partenaires des relations très poussées pouvant entrainer « un abandon total ou partiel de la souveraineté [nationale] en vue de réaliser l'unité africaine ».

L`article 184 de la constitution congolaise stipule que « la république peut conclure des accords d'association...créé... des organismes inter gouvernementaux de gestion commune de coordination... et d'intégration ».

Le cas du Cameroun et de la Guinée Equatoriale est particulier. La constitution camerounaise du 18 janvier 1996 ne comporte pas de disposition spécifique au droit communautaire. Il en est de même de celle de Guinée Equatoriale.

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constitutionnalisation des lois fondamentales des Etats de l`Afrique centrale. En d`autre terme le traité révisé CEMAC exerce un effet normalisateur sur les constitutions nationales.

En ce qui concerne le critère fonctionnel caractéristique de la constitution, la cour de justice proclama « non seulement que le traité de Rome forme la charte constitutionnelle de la communauté, mais surtout que la construction européenne a atteint le stade d'une communauté de droit »192. Par analogie avec le concept d`Etat de droit, cette affirmation véhicule des principes fonctionnels qui sont d`une part juridiques et contentieux, et d`autre part politiques ou démocratiques.

« Juridiquement, tout d'abord le principe qu'exprime la notion de communauté de droit est que les actes des institutions ne peuvent échapper au contrôle de conformité avec le droit primaire »193. Cela traduit tout simplement comme dans la théorie de l`Etat de droit que les « institutions communautaires ne peuvent agir qu'en vertu d'une validation normative, étant entendu que leur action est susceptible de contrôle juridictionnel ». La communauté de droit et l`Etat de droit semblent être convergents. Éventuellement c`est bien le citoyen-justiciable national qui se trouve être au centre des enjeux de la communauté de droit. Il y a lieu de se demander si elle ne favorise pas l`émergence d`une conception différente de la démocratie traditionnelle194. Autrement dit, « la communauté de droit donne aux requérants-citoyens des Etats membres de nouvelles fonctions leurs permettant de compléter le contrôle politique traditionnel »195, de limiter ou d`encadrer l`action de l`Etat.

Ainsi avec la notion de constitution d`une communauté, on dispose d`un concept juridique et politique autonome qui reflète la constitutionnalisation du droit primaire. Cependant, il faut préciser que « les dispositions techniques réglementant les activités économiques, commerciales ou encore sectorielles, ne sont pas de nature constitutionnelle ». Le statut de constitution d`une communauté de droit reconnu au droit primaire est réservé exclusivement aux dispositions relatives aux droits fondamentaux ou aux principes que partagent les Etats membres de la CEMAC et qu`ils respectent, aux compétences des communautés et des institutions. Peut-on aussi reconnaître aux actes additionnels, aux traités institutifs le caractère de constitutionnel ?

192 Voir MONJAL (PY), les normes de droit communautaire, op cit p 22.

193 Ibid.

194 Ibid. p 23.

195 Ibid.

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2) Les actes additionnels : l'acte de validité de l'ordre juridique communautaire.

L`article 40 du traité révisé de la CEMAC stipule que : « la conférence des chefs d'Etats adopte des actes additionnels au traité (...) »196 et il s`en suit que « les actes additionnels sont annexés au traité de la CEMAC et complètent celui-ci sans le modifier. Leur respect s'impose aux institutions, aux organes et aux institutions spécialisées de la communauté, ainsi qu'aux autorités des Etats membres »197. Le traité révisé de la CEMAC est clair dans son énoncé. Par conséquent, il est évident qu`un acte additionnel est un acte juridique qui acquiert le même rang et la même force juridique que l`acte sur lequel il vient se greffer et bénéficie automatiquement du même respect que la norme sur laquelle il se greffe. A cet effet, les actes additionnels et le traité CEMAC constituent si tant on peut le dire, « le bloc de constitutionalité »198 instituant la communauté CEMAC bien que tous ses instruments juridiques communautaires ne soient pas ratifiés par tout les Etats membres. Ainsi, les actes additionnels et le traité révisé CEMAC, cet ensemble normatif forme « le droit originaire, tant d'un point de vue matériel que chronologique »199. On met dans le cadre des actes additionnels de la CEMAC, les conventions régissant l`UEAC, l`UMAC et la cour de justice de la CEMAC. Comme le traité constitutif, les actes additionnels ont force contraignante sur les autres normes communautaires qui leurs sont inférieures, et sur le droit national. Guy ISAAC affirmera même que « le droit communautaire n'est pas un droit étranger, ni même un droit extérieur : il est le droit propre de chacun des Etats membres applicable sur son territoire tout autant que son droit national, avec cette qualité supplémentaire qu'il couronne la hiérarchie des textes normatifs de chacun d'eux »200. L`on peut également dire avec GUY ISAAC que la règle des traités et actes additionnels se situent au sommet de la hiérarchie de l`ordre juridique communautaire. « Elles prévalent à l'égard de l'ensemble des autres sources du droit communautaire »201. Le traité institutif et les autres actes additionnels constituent à la fois le fondement, le cadre et les limites de la communauté. On peut en conclure que les normes de droit primaire ont une primauté presque absolue car elles s`exercent autant sur les autres normes communautaires que sur le droit national. Quels sont les effets juridiques ?

196 Chapitre IV : des actes juridiques et contrôle des activités de la communauté, section 1 des actes juridiques de la communauté, article 40 du traité révisé CEMAC.

197 Voir article 41 du traité révisé CEMAC.

198 En droit français on appelle « bloc de constitutionnalité » l`ensemble des principes et disposition que les lois doivent respecter et dont le conseil constitutionnel est le garant. Il n`est pas limité à la seule constitution. Elle les articles de la constitution de 1958, la déclaration des droits de l`homme et du citoyen de 1789, le préambule de la constitution de 1946, la charte de l`environnement depuis 2005.

199 MONJAL (PY), Les normes de droit communautaire, op cit p 16.

200 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européen, op cit p 261.

201 Ibid. p 197.

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B/ Les effets juridiques des « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d'Etats.

A la différence du système normatif international, où l`on peut exclure a priori certaines sources du champ de la normativité, les sources du droit communautaire se prêtent toutes à la création des droits et obligations. A une création spéciale des droits et obligations car du principe fondamental de la primauté du droit communautaire évoqué à l`article 44202 découlent les principes d`applicabilité immédiate(1) et d`effet direct(2) du droit issu des communautés intégratives en l`occurrence des actes juridiques collectifs à caractère constitutionnel.

1) L'applicabilité immédiate des « actes constitutionnels ».

Les principes fondamentaux du droit communautaire, servent à régler les rapports entre l`ordre communautaire et les ordres juridiques nationaux. Ces principes, à l`instar de l`applicabilité immédiate, sont les garants de l`application uniforme du droit communautaire au sein des Etats. Ainsi comme souligné plus haut, l`applicabilité immédiate crée les obligations envers les Etats membres et entraine des conséquences pour les justiciables qui bénéficient des droits engendrés à leur profit par le droit communautaire.

L`applicabilité immédiate est le principe de base de l`application du droit communautaire. A la différence du droit international ou autre droit extérieur à l`ordre juridique interne des Etats, le droit communautaire bénéficie d`une réception particulière dans le droit national. Automatiquement le droit communautaire est applicable ou devient du droit positif dans les Etats membres. « Le traité de la CEE a institué un ordre juridique propre, intégré au système juridique des Etats membres lors de l'entrée en vigueur du traité et qui s'impose à leurs juridictions. (Qu') En effet en instituant une communauté à durée illimitée, dotée d'institutions propres, de la personnalité, de la capacité juridique, d'une capacité de représentation internationale et (...) crée aussi un corps de droits applicables à leurs ressortissants et à eux mêmes »203. L`applicabilité immédiate des actes juridiques collectifs se présente en trois plans. Elle confère directement des droits et des obligations non seulement aux institutions de la communauté, aux Etats membres, mais aussi à leurs citoyens204. L`applicabilité immédiate du droit originaire de la communauté en comparaison à la

202 Article 44 du traité révisé CEMAC stipule que « Sous réserve des dispositions de l'article 43 du présent traité, les actes adoptés par les Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la Communauté pour la réalisation des objectifs du présent Traité sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure ».

203 Arrêt du 15 juillet 1964, Costa / ENEL Aff. 6/64, Rec., p1141.

204 En paraphrasant Klaus-Dieter BORCHARDT, l'ABC du droit de l'union européenne, op cit, p 124.

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constitution dans l`Etat implique l`effet direct pour les bénéficiaires de la norme communautaire.

2) L'effet direct des « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d'Etat.

L`effet direct peut être défini comme «l'aptitude d'une norme communautaire à créer par elle-même des droits ou des obligations au bénéfice ou à la charge des personnes privées, lesquelles jouissent de la faculté d'invoquer de telles dispositions, plus ou moins largement et toujours sans conditions, afin d'en obtenir à l'occasion d'un litige, l'application directe et effective »205. L`effet direct de ce point de vue ne devrait pas être confondu à l`applicabilité sus évoquée, qui a été consacrée par la jurisprudence de la cour de justice dans son arrêt Van Gend en Loos du 5 février 1963206. Il faut dire que l`effet direct a été dégagé dans l`arrêt SIMMENTHAL du 9 mars 1978207. C`est sur cette base que R. LECOURT, parlant de l`effet direct ou applicabilité directe affirmera que « c'est le droit pour toute personne de demander à son juge de lui appliquer traités, règlements, directives ou décisions communautaires. C'est l'obligation pour le juge de faire usage de ces textes quelque soit la législation du pays dont il relève »208. L`effet direct est assimilable à la capacité d`une norme communautaire à devenir un paramètre de la légalité. L`effet direct met en exergue l`instantanéité autant des droits et obligations des justiciables des Etats membres et également l`obligation pour les juridictions nationales d`appliquer les normes communautaires dans les litiges nationaux et cela dès l`entrée en vigueur de la règle communautaire, dès la publication de la norme communautaire. GUY ISAAC affirmera que l`effet direct « c'est tout simplement, mais rien de moins que la capacité à être une source de légalité en vigueur dans l'ordre juridique national, ou mieux, à être une source de droit sur le territoire national »209. Faut dire que l`intensité de l`effet direct peut varier dans la mesure où l`on distingue l`effet direct vertical, c`est-à-dire la norme peut être invoquée dans un litige opposant un particulier à un Etat membre ; L`effet direct horizontal c`est-à-dire la norme peut être invoquée dans un litige entre deux particulier ; et l`effet direct complet qui englobe l`effet direct vertical et horizontal.

205 MEHDI (R), « Ordre juridique communautaire, effet direct », jurisclasseur, Fasc. 195, 1er juillet 2007, p1.

206 Arrêt du 5 février 1963, Van Gend En Loos, Aff. 26/ 62, Rec., p 3.

207 « L'applicabilité directe (...) signifie que les règles du droit communautaire doivent déployer la plénitude de leurs effets d'une manière uniforme dans tous les Etats membres, à partir de leur entré en vigueur et pendant toute la durée de leur validité » et « ces dispositions sont une source immédiate de droit et d'obligation pour tous ceux qu'elles concernent qu'il s'agisse des Etats membres ou des particulières qui sont parties à des rapports juridiques relevant du droit communautaire ». Arrêt du 9 mars 1978, Simmental, Aff. 106/77, Rec., p 629.

208 LECOURT (R), L'Europe des juges, bruyant, coll. Droit de l`union européenne, 2007, p 248. Cité par MEHDI (R), « l`ordre juridique communautaire », l`effet direct, op cit, p 5.

209 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit, p 268.

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Les actes primaires instituant des communautés intégratives, apparaissent comme les seules normes de droit communautaires en général et droit communautaire CEMAC en particulier à pouvoir bénéficier selon les critères sus évoqués d`un effet direct absolu. A quoi correspondent leurs régimes juridiques ?

PARAGRAPHE II : Le régime juridique des « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d'Etat.

Des actes juridiques, ayant une force comparable à celle de la norme fondamentale en droit interne, soulèvent des interrogations sur les fondements de la légitimité de tels actes. On constate de fait que toute manifestation de la volonté souveraine, comme c`est le cas dans les actes primaires des communautés intégratives, tire leur autorité ou compétences de la législation nationale210, qui donne acte aux représentants des Etats de conclure traité et accord internationaux (A). Il s`en suit inéluctablement pour garantir le respect de l`acte primaire par les normes inferieures, un contrôle de validité des normes inferieures aux « actes constitutionnels » communautaires (B).

A/ Les fondements du « pouvoir constituant » des Etats membres de la CEMAC.

Il s`agit de mettre en exergue les sources ou les bases sur lesquelles s`appuient les Etats membres pour émettre des actes juridiques ayant force contraignante assimilable à la constitution nationale. Comme sus évoquée, toute manifestation de la volonté souveraine par un Etat tire son fondement de la norme fondamentale de chaque Etat (1) et également du traité instituant la communauté intégrative (2).

1) Le fondement national du « pouvoir constituant » de l'Etat membre.

La question de l`habilitation constitutionnelle de l`Etat membre s`est posée avec acuité lors de la découverte de la particularité des traités instituant les communautés intégratives. Le constat a été la modification des constitutions pour marquer la différence qui existe entre le droit international et le droit communautaire211. La majorité des représentants des Etats membres de communautés intégratives autorisées à émettre la volonté des Etats le font d`après des bases constitutionnelles et généralement des dispositions constitutionnelles

210 Voir KAMTO (M), « La volonté de l'Etat en droit international », recueil des cours de l'académie de droit international de la Haye, 2004, p 48.

211 La constitution Gabonaise du 26 mars 1991 consacre le titre X intitulé « traités et accords internationaux » au droit international classique alors que le titre XI « des accords de coopération et d`association » est réservé au droit communautaire.

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relatives au droit international212. Cependant le problème qui se pose est celui des dispositions constitutionnelles relatives à la réception du droit international, comme la majorité des constitutions d`Afrique Centrale ont emprunté des dispositions de la constitution française de 1958. Elle-même, comme le texte français, marque une défiance vis-à-vis du droit international dans la constitutionalité des engagements internationaux des Etats et « conditionne la valeur supra législative des normes issues de ces engagements internationaux à l'exigence de réciprocité »213. Ce qui du point de vue de la norme communautaire pose un problème d`habilitation constitutionnelle de la réception du droit communautaire en amont et de la compétence des autorités amenées à signer et ratifier les engagements communautaires en aval. Ceci pose le problème de la légalité constitutionnelle des engagements communautaires, particulièrement des actes primaires. Il faut dire que certains Etats d`Afrique Centrale, vont intégrer ces dispositions constitutionnelles favorables à un engagement de l`Etat dans le processus d`intégration régionale de type communautaire214, en omettant cette fois le principe de réciprocité et en mettant en avant sans même le savoir le principe de primauté du droit communautaire. En d`autres termes, les Etats comme le Cameroun et la Guinée Equatoriale qui n`ont pas trouvé important de réviser leurs constitutions pour réceptionner le droit communautaire, continuent à assimiler le droit communautaire au droit international, ce qui pose inéluctablement la question de la primauté du droit communautaire. Car contrairement au droit des gens qui, pour avoir une pleine efficacité, doit s`appuyer sur les ordres juridiques nationaux, le droit communautaire lui n`a nullement besoin d`une loi d`approbation ou d`application pour être effectif et produire des effets de droit. Il s`agit pour la règle de droit communautaire d`une intégration respectueuse de son statut originel et de l`identité primordiale du droit communautaire. Ceci fait de l`ordre juridique communautaire un ordre juridique spécifique et autonome. Le conseil constitutionnel français affirmera par la que l`article 88-1de la constitution « a (...) consacré l'existence d'un ordre juridique communautaire intégré à l'ordre juridique interne et distinct de l'ordre juridique international »215. La conséquence à en tirer au sein de la CEMAC est la suivante : toute mesure ou engagement communautaire signé par le Cameroun ou la Guinée Equatoriale ne trouve son fondement ou son habilitation dans aucune disposition constitutionnelle. Ces deux pays intègrent et appliquent une norme qui ne trouve

212 La constitution camerounaise du 18 janvier 1996 et la constitution de la Guinée Equatoriale.

213 Voir TCHUINTE (J), « l'application effective du droit communautaire en Afrique centrale », op cit, p 68.

214 Ibid. p 69.

215 Décision N°2004-505 DC du 19 novembre 2004 portant sur le traité établissant une constitution pour l`Europe, recueil des décisions du conseil constitutionnel, Dalloz, 2005. Cité par TCHUINTE (J), « l'application effective du droit communautaire en Afrique centrale », op cit, p 71.

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veritablement pas de fondement dans la constitution216. Alors l`organe de contrôle de la constitutionnalité doit se saisir car les normes communautaires signées ne trouvent pas leur validité dans la constitution. Toutefois, la seule existence dans le texte fondamental des Etats d`Afrique Centrale des dispositions spécifiques se rapportant au droit communautaire emporte habilitation constitutionnelle de mettre sur pied des actes primaires à caractère constitutionnel. Quid du fondement communautaire ?

2) Le fondement communautaire du pouvoir constituant de l'Etat membre

Le fondement communautaire revient à présenter la compétence expresse reconnue à l`Etat membre d`émettre des actes juridiques avec caractère constitutionnel. L`article 40 l`énonce très bien en ces termes : « la conférence des chefs adopte des actes additionnels au traité »217. Fort du pouvoir constituant à lui reconnu, l`Etat membre au sein de l`organe qu`il constitue possède également la capacité d`effectuer des révisions du « bloc de constitutionnalité » constituant la communauté intégrative. L`article 57 du traité révisé de la CEMAC l`a stipulé comme il suit : « tout Etat membre peut soumettre à la conférence des chefs d'Etats des projets tendant à la révision du présent traité ou des conventions de l'UEAC et de l'UMAC. Les modifications sont adoptées à l'unanimité des Etats membres». En résumé, l`habilitation communautaire comporte premièrement le pouvoir de créer des actes juridiques ayant rang de l`acte primaire, et devant être annexés au traité constitutif de la communauté, deuxièmement, le pouvoir de modification et de révision du traité constitutif de la communauté intégrative, et également de toutes conventions. Qu`en est-il du contrôle de la validité du droit communautaire ?

216 Nous notons que toute tentative de justifier la réception du droit communautaire dans ses pays s`appuie sur un énoncé du préambule, de surcroit implicite, mais qui semble plus être une habilitation constitutionnelle à l`intégration du droit international en droit interne. En tenant compte que le droit international n`est pas matériellement du droit communautaire. En plus, loin d`avoir une appréciation réductrice des intentions du constituant de 1996, précisément en ce qui concerne le cas du Cameroun, nous discutons de la vision futuriste de celui-ci, qui aurait pris en compte toute la complexité du droit communautaire, et nous mettons l`énoncé du préambule de la constitution camerounaise qui habiliterait implicitement l`intégration de la norme communautaire et l`engagement du Cameroun à la communauté, sous le prisme des mouvements politiques tendant à favoriser le rapprochement et l`union des pays, des peuples, et des cultures africaines. Et généralement ce type de regroupement donne naissance à des organisations internationales à caractère politique à l`instar de l`UA. Nous affirmons donc que l`énoncé du préambule de la constitution camerounaise ne restitue pas la spécificité et l`autonomie du droit communautaire. Par conséquent tous les engagements communautaires au Cameroun manquent de bases constitutionnelles, donc sont dans l`illégalité constitutionnelle, à distinguer de l`inconstitutionnalité qui est la résultante du non respect de la règle constitutionnelle. Dans le cas de l`illégalité constitutionnelle, la norme intégrée dite illégale constitutionnelle ne trouve pas un fondement ou une base lui permettant de justifiée sa légalité au sein de la norme fondamentale.

217 Voir l`article 40 du traité révisé CEMAC de 2008.

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B/ Le contrôle de la validité des normes inferieures aux « actes constitutionnels »

communautaire.

Les apparences sont nombreuses dans les relations de droit constitutionnel et droit communautaire. Le principe de primauté en droit communautaire exerce une pression indescriptible à la primauté constitutionnelle en droit interne, au point où on se demande quelle primauté prédomine ? Ou bien comment l`ordre juridique interne organise la coexistence des primautés ? Si l`on prend en compte la décision du 20 décembre 2007, du juge constitutionnel français sur l`interprétation de l`article 88-1 de la constitution française218 est sans surprise lorsqu`il affirme que « le constituant a ainsi consacré l'existence d'un code juridique communautaire intégré à l'ordre juridique interne et distinct de l'ordre juridique international ». De plus depuis cette décision, on a assisté à une « application renforcée de la primauté du droit communautaire par le juge constitutionnel »219. En 1998220, il opère un contrôle de conformité de la loi organique sur le droit de vote et d`éligibilité des citoyens européens aux élections municipales à la directive y relatives. La décision du 10 juin est plus décisive221 car elle marque la véritable constitutionnalisation du droit communautaire222. Dans le cas de la CEMAC, le contrôle de la validité de la loi aux actes communautaires est fait en deux volets : premièrement un contrôle de la communauté par la commission, les institutions communautaires comme le parlement communautaire et la cour de justice de la communauté(1), et deuxièmement par les juridictions nationales que sont les juridictions ordinaires(judiciaires et administratives) qui sont les juridictions de droit commun, du droit communautaire et la juridiction constitutionnelle(2).

218 L`article 88-1 de la constitution française dispose que « la république participe aux communautés européenne et à l'union constituée d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont institués, d'exercer en commun certaines de leurs compétences »

219 CHALTIEL (F), « Droit constitutionnel européen 2004-2006 », RFDC, 2007/1 N°69, pp 161-173.

220 Décision N° 98-400 du 20 mai 1998, loi organique déterminant les conditions d`application de l`article 88-3 de la constitution française JORF, 26 mai 1998, p 8003.

221 Le conseil constitutionnel pose un principe et une exception. Le principe est que la transposition d`une directive est une exigence constitutionnelle. L`exception étant que la disposition constitutionnelle expresse contraire. Voir décision N° 2004-496 DC du 10 juin 2004, loi sur l`économie numérique.

222En paraphrasant CHALTIEL (F), « Droit constitutionnel européen 2004-2006 », op cit, p 343. « Le terme de constitutionnalisation est à double tranche, signifiant à la fois l'inscription d'un texte dans la constitution, en l'espèce les traités communautaires et la nature constitutionnelle que les rédacteurs des traités entendent ou non donner à la communauté d'intégration »

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1) Le contrôle par la communauté de la validité des normes inferieures aux « actes constitutionnels ».

Comme sus évoqué, la primauté du droit primaire de la CEMAC se vérifie sur deux plans : au plan supranational et au plan national223. De plus, le principe de primauté du droit primaire et sa double mise en oeuvre met en exergue une forme de hiérarchie des normes communautaires224, dont il en découle une forme de hiérarchisation normative où la norme suprême avec valeur constitutionnelle se trouve être le droit primaire, et la norme inférieure se trouve être le droit dérivé. Ainsi par analogie, il est évident que si les normes dérivées ne respectent pas dans leurs énoncés l`esprit du traité instituant la communauté, il va de soi que, d`après l`esprit de la hiérarchie des normes selon KELSEN, ces normes dérivées sont illégales, simplement parce qu`elles ne tirent pas leur légalité du droit primaire. Par conséquent, le contrôle communautaire, devra s`atteler à les retirer de l`ordonnancement juridique communautaire. Il s`agit vraisemblablement dans ce cas d`un contrôle de la primauté du droit primaire par la communauté. Ce contrôle se manifeste par trois institutions, la commission, le parlement et la cour de justice. Le caractère constitutionnel225 du droit primaire impose à ses institutions de contrôler le respect du droit primaire par les actes dérivés ou le droit national. Ainsi au niveau supranational, lorsqu`il est dit que « les institutions, les organes, et les institutions spécialisées de la communauté agissent dans la limite des attributions et selon les modalités prévues par le présent traité, les conventions de l'UEAC, et de l'UMAC et par les statuts et autres textes respectifs de ceux-ci »226 ; cela signifie premièrement que, l`ordre juridique de la CEMAC constitue une hiérarchie de normes et que deuxièmement, le fonctionnement des institutions communautaires est encadré par les textes primaires d`où l`intérêt d`en tirer leur validité. En quelque sorte, cet article ouvre

223 Au niveau supranational les normes de droit communautaire forme un ordre juridique (c`est-à-dire un ensemble de règles de droit constituant un système, présentant un certain degré d`organisation et de cohérence) dans lequel la norme primaire exerce une primauté sur les normes dérivées. Alors qu`au niveau nationale, le droit primaire intègre un ordre juridique avec qui il forme un ordre juridique commun avec pour précision la reconnaissance par les constitutions nationale du principe de primauté de la norme communautaire.

224 La théorie de la pyramide de Kelsen, met en exergue une norme suprême (niveau constitutionnel) et des normes hiérarchiquement inferieures qui tirent de la norme suprême leur égalité, leur légitimité et leur existence. L`on peut également établir dans l`ordre juridique communautaire une telle hiérarchisation des normes communautaires en reconnaissant aux normes primaires (traités et actes additionnels) le statut de norme suprême parce que c`est elle qui organise la structure et le fonctionnement de la communauté et adopte la législation des actes dérivés dans le respect des textes constitutifs de la communauté intégrative.

225 La référence à la notion de constitution dans le contexte du droit communautaire n`a d`intérêt que si elle a un contenu non seulement institutionnel, mais également et surtout substantiel en ce sens qu`elle est l`incarnation de l` « officialisation d'une idée de droit » c`est-à-dire qu`elle exprime les fondements, les valeurs, les principes, bref l`identité de l`union européenne. Voir la formule de ROUSSEAU (D), Une résurrection, la notion de constitution, RDP, 1990, p 5. Cité par SIMON (D), rapport général, « les fondements de l'autonomie du droit communautaire », op cit, p 225.

226 Article 11 du traité révisé CEMAC de 2008 et en 2009.

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implicitement une voie à un éventuel contrôle. L`article 34 reconnaît à la commission « la mission de gardienne des traités de la CEMAC »227. Le rôle de gardien implique le contrôle du respect des traités de la CEMAC autant par les institutions communautaires que par les Etats membres de la communauté. Le traité révisé de la CEMAC reconnaît à la commission la mission de contrôle du respect du traité. Parmi les prérogatives de cette institution l`article 35 met l`accent sur la mission de veiller « au respect et à l'application par les Etats membres ou leurs ressortissants, des dispositions du présent traité et des actes pris par les organes de la communauté ». Disposition très porteuse parce que la notion de veille est une notion préventive et curative. Dans ce cas, le contrôle du respect et de l`application des normes communautaires est fait en amont, dans la création par exemple des actes dérivés ou dans l`élaboration par les Etats des lois de transposition du droit communautaire. Ce contrôle est également fait en aval, lors de l`exécution des normes communautaires par les citoyens et les Etats membres, elle veille à la stricte application par les parties du droit communautaire. Ce contrôle lui est recommandé et même réitéré par le même article en disant que la commission « veille à la mise en oeuvre du présent traité, des conventions et des décisions de la communauté »228.

La compétence la plus évidente du contrôle de la primauté du droit primaire revient à la cour de justice de la CEMAC, lorsqu`elle est saisie pour des procédures de renvoi préjudiciel et pour un recours en annulation. Cela se manifeste à l`article 48 qui stipule que « la cour de justice assume le respect du droit dans l'interprétation et dans l'application du présent traité et des conventions subséquentes »229. En ce qui concerne le parlement communautaire, il s`agit d`une représentation selon les textes de la CEMAC, de la population de la communauté. Le contrôle ne peut être effectué que sur l`action de l`exécutif communautaire. Toutefois le contrôle est purement relativisé du fait des sanctions presqu`inexistantes, inhérentes aux questions orales et écrites, également aux résultats des commissions d`enquête qui permet de contrôler l`action et les actes de l`exécutif communautaire230.

227 Article 34 du traité révisé CEMAC de 2008 et en 2009.

228 Ibid.

229 Article 48 du traité révisé CEMAC de 2008 et en 2009..

230 Voir l`article 5 du traité révisé CEMAC « le parlement contrôle l'action de l'exécutif par voie de questions orales ou écrites, par l'audition en commission et par la constitution des commissions d'enquêtes sur des objets déterminés »

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Concernant le parlement communautaire ces pouvoirs de contrôle de la primauté des actes primaires se limitent au contrôle sans sanctions de la conformité des actions de l`exécutif au droit primaire. Quid du contrôle national de la primauté du droit primaire ?

2) Le contrôle national de la validité des normes nationales aux « actes constitutionnels ».

Le contrôle du respect du droit primaire communautaire par les juridictions nationales a connu beaucoup de retards suite aux réticences, relatives à la portée du principe de primauté du droit communautaire qui se heurtent à celle de la constitution au niveau national. En France par exemple on a constaté, un long cheminement de la jurisprudence constitutionnelle européenne vers une reconnaissance tout au moins difficile de la primauté du droit communautaire par le droit national et concomitamment par les juridictions nationales. Les incidents de l`inscription du principe de primauté du droit communautaire nous ont montré une évolution d`une « primauté imposée à une primauté consentie »231. Ce passage tout de même difficile pour l`organe chargé de veiller à la constitution et à son respect, a marqué un réel changement dans les rapports ambigus qui existaient entre le droit primaire et les constitutions des Etats membres. Ainsi, en réaction à l`affirmation prétorienne de la primauté par la cour de justice dans le célèbre arrêt COSTA232, s`est organisée une « résistance » des cours nationales au moment de donner pleine portée à ce principe dans l`ordre interne233.on constate un décalage entre les prétentions de l`interprétation communautaire de la primauté et les restrictions de l`interprétation internes de la primauté234. Les lois communautaire n`ayant point les moyens d`assurer elles mêmes leur suprématie « auto proclamée », la cour de justice s`en remet aux juridictions internes en les habilitant à procéder à une hiérarchisation235. Le constituant se trouva dans l`obligation de constitutionnaliser le droit communautaire, tout au moins, cette obligation d`inscrire la primauté du droit communautaire dans les constitutions nationales nous fait penser à une communautarisation des constitutions nationales ou plutôt des droits constitutionnels. En

231 DUBOUT (E), « De la primauté « imposée » à la primauté « consentie », AFDC, contribution au congrès de Montpellier, atelier 3 : Europe et constitution, 2005, p 4.

232 CJCE, Juillet 1964, F. COSTA c/ ENEL, Aff. 6/64, Rec., P 1141, spec. p 1159 et s.

233 Voir notamment BURGORGNE-LARSER (L), « Les résistances des Etats de droit » in J RIDEAU (dir.) de la communauté de droit à l'union de droit, paris, LGDJ, 2000, spec. p 448 et s. cité par DUBOUT « de la primauté « imposée » à la primauté « consentie », op cit, p 2.

234 Ibid. p 3.

235 Voir à cet effet l`arrêt de la CJCE, 9 mars 1978, administration des finances de l`Etat c/ SA Simmental, Aff.106/77. Rec., p 629 spec. Point 21 : « tout juge national saisi dans le cadre de sa compétence, à l'obligation d'appliquer intégralement le droit communautaire et de protéger les droits que celui-ci confère aux particulier [...] » cité par DUBOUT (E), « De la primauté « imposée » à la primauté « consentie », op cit, p 5.

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effet, en introduisant le droit communautaire dans la constitution nationale, le constituant reconnaît la primauté communautaire au sein du droit national, mais en plus il met les textes primaires au même rang que les constitutions nationales. Par conséquent, le droit primaire, fait partie de la constitution nationale. Premièrement les normes originaires et dérivées de l`union acquièrent une valeur égale aux normes constitutionnelles nationales236. Deuxièmement et selon Edouard DUBOUT la « suprématie de la constitution nationale » est préservée et le conseil constitutionnel maintient ce que d`aucun ont appelé le « règne de la constitution »237, avec pour conséquence de sauvegarder la valeur du droit communautaire inférieure aux normes fondamentales. Bien plus encore, en constitutionnalisant le principe de primauté du droit communautaire, le juge constitutionnel pourrait devenir dans le même temps, le garant de celui-ci. Il lui incombera dès lors, de contrôler la validité des lois selon les normes communautaires. Dans ce cas, le contrôle de la validité des lois aux « actes constitutionnels » communautaire est reconnu au juge de droit commun et au juge constitutionnel lui se bornant qu`à contrôler la constitutionnalité des « actes constitutionnels » communautaires à la constitution nationale. Le traité révisé CEMAC aura une valeur plus égale à la constitution qu`a une convention. Ce qui ne semble pas être possible pour les juges constitutionnels. Premièrement, le constituant constitutionnalise le principe de primauté du droit primaire et dérivé de la communauté, mais pas directement la valeur des normes issues de ce droit, c'est-à-dire, «l'obligation négative de ne pas violer le principe de primauté constitutionnellement protégé et essentiellement plus directement justiciable, que celle positive de garantir aux traités une « autorité supérieure à celle des lois »238. La seconde nuance est relative à la valeur du droit primaire et dérivé matériel, qui a été formellement reconnue par la constitution. Il sera plus judicieux que le droit primaire et dérivé soit reconnu constitutionnellement comme supra législatif et infra constitutionnel

De ce qui précède, un constat découle de ce développement c`est davantage l`importance du droit primaire et du droit dérivé. Alors qu`en est-il des pouvoirs législatifs et exécutifs de l`Etat membre ?

236 « Tirant leur force en droit interne d'une disposition constitutionnelle posant le principe de primauté de l'ordre juridique de l'union européenne, les dispositions de celui-ci revêtent elle même une valeur constitutionnelle. En cas de conflit, il faudra alors opérer une conciliation in concreto au regard des circonstances de chaque espèce sans qu'il n'y ait de hiérarchie prédéterminée in abstracto entre normes de l'union européenne et normes constitutionnelles internes » voir DUBOUT (E), « de la primauté « imposée » à la primauté « consentie », op cit, p 14.

237 Ibid. p14.

238 Ibid. p 17.

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SECTION II : LES POUVOIRS CONSTITUES DE L'ETAT MEMBRE.

La manifestation du pouvoir législatif, se ressent dans les actes dérivés de la communauté. Ces actes à qui on peut reconnaitre un caractère législatif (paragraphe I), « revêtent un caractère obligatoire et normatif, c'est-à-dire général et abstrait »239. Et c`est justement en ce moment que se manifeste le pouvoir exécutif de l`Etat membre (paragraphe II), car il est appelé à mettre tous les moyens étatiques en oeuvre pour exécuter les actes communautaires.

PARAGRAPHE I : Le pouvoir législatif de l'Etat membre de la CEMAC.

La CEMAC ne connait pas d`acte juridique ayant la force ou le rayonnement symbolique de la loi. C`est-à-dire que, la mise en perspective de la notion de législateur et d`acte législatif est introuvable dans le traité révisé CEMAC et dans les actes additionnels au traité. Les actes communautaires de nature législative (B), qui mettent en oeuvre les traités de base n`échappent pas à la logique intergouvernementale (A). En cela, les Etats membres sont des «Etats législateurs»240.

A/ Les organes et les éléments manifestant la nature législative des actes communautaires.

Les organes et institutions de la CEMAC(1) ont la faculté de prendre des actes collectifs et unilatéraux dont la substance et la nature sont comparables aux actes législatifs étatiques(2).

1) Les organes « législateurs » de la CEMAC.

Il faut dire que la logique intergouvernementale n`est pas écartée des procédures de la production des « actes législatifs » communautaires. La volonté de l`Etat membre participe à la formation de la volonté propre de la communauté. En ce qu`elle « est un élément constitutif du code génétique » des actes communautaires241. La conférence des chefs d`Etats, le conseil des ministres de l`UEAC, et le comité ministériel de l`UMAC, sont des cadres institutionnels aménagés à l`expression de la puissance législative des Etats. Les Etats membres sont à cet effet les co-auteurs des actes législatifs communautaires. Cela est d`autant plus clair que la règle de l`unanimité est prédominante et offre précisément la faculté négative

239 NABLI (B), « l'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 17.

240 Ibid.

241 Ibid.

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à l`Etat membre c`est-à-dire un droit de veto. «Dans la logique des conférences diplomatiques, la règle de l'unanimité permet à l'Etat membre de bloquer l'adoption de l'acte et la fonction gouvernementale est obligatoirement prise en considération »242. Et ce mode de votation qui protège également la souveraineté de l`Etat est généralement utilisé par la conférence des chefs d`Etats. En ce qui concerne le conseil des ministres et le comité ministériel, ils dégagent trois modes de votation à savoir : la majorité simple243, la majorité qualifiée244, et l`unanimité245. En effet la notion de pouvoir législatif doit se conjuguer sur mode participatif. C`est l`action collective des organes dynamiques qui met en relief le législateur communautaire. C`est le propre de la méthode communautaire d`élaboration des actes communautaires législatifs. La procédure législative communautaire met en exergue une multitude d`actes selon le domaine réservé à l`acte communautaire législatif en question. Comme illustration de l`initiative de l`acte communautaire législatif, on peut citer : la conférence des chefs d`Etats, le président de la commission, le président du conseil des ministres, les directeurs des institutions communautaires. L`initiative des actes communautaires est aussi étendue que possible, le mode de votation et d`adoption des actes communautaires législatifs est restreint au consensus et à l`unanimité. Alors quels sont les éléments qui permettent de relever le caractère législatif des actes communautaires ?

2) Les éléments caractérisant la nature législative des actes communautaires.

Il faut dire que le critérium de détermination de la nature législative des actes communautaires est plus une tentative vaine de comparer la loi aux actes dérivés de la CEMAC. Pourtant, rien que le critère formel relatif à la formation de la loi, disqualifie automatiquement les actes dérivés du champ des actes législatifs. Cependant, lorsqu`on étudie de plus près les critères matériels des actes dérivés, on constate qu`ils sont à peu près assimilables aux lois, parce qu`ils détiennent le caractère général et impersonnel crucial dans la détermination de l`acte législatif246. Dans la caractérisation de la nature législative des actes communautaires, les actes dérivés sont d`abord des actes normatifs par excellence. En effet, il s`agit des actes dont la portée générale est expressément reconnue par le traité instituant la

242Ibid.

243 L`article 68 prévoit les modes de votation au sein de la convention. La première évoquée par cette disposition est la majorité simple, c`est-à-dire « ses délibérations sont acquises à la majorité des membres qui le composent dans le respect de l'article 67 » convention régissant l`UEAC.

244 La majorité qualifiée désigne « les délibérations acquises à la majorité des 5/6eme de ses membres dans le respect des dispositions de l'article 67... ». Voir l`article 68 de la convention régissant l`UEAC.

245 L`unanimité prévoit que « les abstentions des membres du conseil présents ne sont pas prises en compte ». Voir l`article 68 de la convention régissant l`UEAC.

246 NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 18.

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CEMAC247. Comparativement, la cour européenne de justice les a qualifiés d`actes « quasi législatifs » et ayant un effet erga omnes248. Le traité révisé de la CEMAC leur attribue un caractère obligatoire pour les destinataires qu`ils désignent. Et créant des droits et des obligations à l`égard de leurs destinataires. Suivant la conception largement répandue dans les systèmes romano-germaniques, un acte dépourvu de caractère général ne pourrait être qualifié d`acte normatif. Autant dire que le caractère contraignant et général renvoie par définition, au caractère de l`acte législatif ou de l`acte réglementaire. La norme communautaire est par essence et fonction, générale et abstraite. Par ailleurs, son caractère abstrait ainsi que sa généralité, renvoie l`observateur à cette image bien connue de l`acte législatif. Seuls les actes conjoints, en particulier les règlements, et les règlements cadres, peuvent être présentés actuellement comme des normes législatives communautaires. A cet effet, grâce aux actes dérivés et à leur nature législative, la communauté exerce sur le droit des Etats membres une double action : elle contraint et unifie249. Car en droit communautaire, les actes ne se conçoivent pas comme les attributs de pouvoirs étanches, qui s`équilibrent. Ce sont les instruments d`un projet d`intégration juridique, au service d`une union économique et monétaire. Par conséquent, la responsabilité comme la loi de poser toutes les règles générales et particulières nécessaires à la mise en oeuvre du traité, dont le caractère « constitutionnel », a été établi par la cour de justice européenne250. La nature législative des actes dérivés de la communauté ne fait plus aucun doute. La présentation de ses actes législatifs communautaires est donc impérative.

B/ Les actes juridiques communautaires manifestant le caractère législative.

Les actes dérivés constituent la grande catégorie normative du droit communautaire. Ils recouvrent une série d`actes fondés sur le traité, c'est-à-dire, adoptés par les organes et les institutions communautaires en application des dispositions du traité. Ils sont la conséquence du transfert de compétences, ce qui témoigne de l`existence d`un véritable « pouvoir législatif », complété par un pouvoir d`exécution. La nomenclature des actes de droit dérivés et leurs effets respectifs est aujourd`hui décrite par l`article 40 du traité

247 Article 41 du traité révisé de la CEMAC « Les règlements et les règlements cadres ont une portée générale. Les règlements sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tout Etat membre. Les règlements cadres ne sont directement applicables que pour certains de leurs éléments ».

248 CJCE, 20 mars 1959, Nolde c/ Haute autorité CECA, 18/57, Rec., p 89, spec. p 113. Cité par PICOD (F), « La normativité du droit communautaire », cahiers du conseil constitutionnel, N° 21, dossier : la normativité, janvier 2007, p 2.

249 AZOULAI (L), « La loi et le règlement vus du droit communautaire », cahiers du droit constitutionnel, N°19, Dossier : loi et règlement, janvier 2006, p 2.

250 CJCE, 23 Avril 1986, les verts c/ parlement, op cit.

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révisé CEMAC, qui dispose que, « pour l'application du présent traité [...] le conseil des ministres et le comité ministériel adoptent des règlements et des règlements cadres, des directives(...) ». Autrement dit, le pouvoir de décision énoncé dans cet article s`exprime à travers trois formes d`actes juridiques : le règlement(1), le règlement cadre et la directive(2).

1) La manifestation législative du règlement CEMAC.

Le règlement est « la principale source dérivée »251 du droit communautaire, parce que à travers lui s`exprime véritablement le pouvoir législatif des communautés252. Le règlement a surtout prévalu pendant les premières décennies de la construction communautaire européenne253. La raison en est simple, le règlement est l`acte normatif par excellence. Il permet d`intensifier le processus d`intégration normative au niveau des Etats. Il laisse très peu de marge de manoeuvre aux Etats. L`article 41 du traité révisé de la CEMAC lui confère des effets juridiques comparables à ceux de la loi, dans l`ordre juridique interne. C`est pour cela que la cour de justice européenne évoquera la « fonction législative du règlement »254. Il faut dire que le règlement est devenu, dans l`histoire des constructions communautaires, un instrument pertinent d`uniformisation des législations nationales et du pouvoir législatif communautaire. Il permet de mettre en oeuvre la politique communautaire immédiatement et intégralement, au gré des longues discussions au sein du conseil des ministres ou du comité ministériel, parce que les Etats membres savent pertinemment que si le règlement passe, ils n`ont plus de marge de manoeuvre par la suite. Dans la pratique communautaire CEMAC, l`on distingue les règlements de base, ceux pris directement sur la base des traités, et des règlements d`exécution qui constituent des mesures d`application des règlements de base. Certes il est vrai que cette distinction introduit une hiérarchie entre les règlements. Toutefois, il ressort clairement de l`article 41 du traité révisé CEMAC que, le règlement a une portée générale ; le règlement est obligatoire dans tous ses éléments. Il s`applique dans tous les Etats membres, aux personnes et situations qu`il définit. Il lie également les institutions de la CEMAC. Et toutes les dispositions du règlement qui

251 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit, p 203.

252 Ibid.

253 Il faut remarquer que pendant les premières décennies de la construction communautaire européenne, ou il fallait intensifier l`intégration européenne, le règlement sera largement utilisé par ce qu`il est performant dans ses applications. Tandis qu`a partir de 1980/ 1990, on a constaté un regain d`intérêt en ce qui concerne la directive parce que des critiques avaient émaillées la pratique des institutions communautaires en faisant valoir que les instances communautaires se concentraient trop sur le règlement et laissaient peu de marge de manoeuvre aux Etats membres.

254 Voir CJCE, 21 Janvier 1999, France c/ Comafrica. Cité par ISAAC (G), et BLANQUET (M), Droit général de l'union européen, op cit, p 203.

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peuvent être défaillantes, doivent être respectées et mises en oeuvre par les personnes qu`elles concernent, personnes publiques ou privées. Par le règlement, l`autorité communautaire dispose du pouvoir normatif complet. Elle prévoit non seulement le résultat à atteindre, et de manière précise, mais également les modalités d`application et d`exécution de l`acte jugé opportun pour l`autorité communautaire, qui seront intégrées par l`autorité nationale. Le règlement est doté de l`applicabilité directe reconnue d`emblée par les traités255. Le règlement est auto-exécutoire, il s`exécute par son existence même. C`est en cela que le règlement est une méthode d`intégration extrêmement puissante. Reconnaître l`applicabilité directe d`un règlement signifie que, non seulement l`acte, dès sa publication dans le bulletin officiel de la communauté, produit ses effets immédiatement et intégralement sur le territoire national des Etats membres mais aussi et surtout il ne doit faire l`objet d`aucune mesure de transposition.

2) La quasi manifestation législative du règlement cadre et de la directive.

Le règlement cadre représente dans le traité révisé une originalité certaine, qui pousse à la curiosité, parce qu`on ne retrouve pas dans l`organisation supranationale qui nous a inspiré à savoir l`UE, la trace d`un acte juridique intermédiaire entre le règlement et la directive. La particularité est qu`il n`est point le règlement, parce qu`ils sont différents sur le domaine de l`immédiateté des éléments qui les constituent. En d`autre termes, le règlement est applicable sur tous ces éléments, alors que le règlement cadre n`est applicable que sur certains de ses éléments. Il se distingue de la directive sur deux plans à savoir en premier lieu la portée générale, à la différence de la directive qui ne « lie » que les « Etats membres destinataires »256. En second lieu, un impératif est reconnu par le traité révisé CEMAC à ce que la directive soit transposée, alors qu`en ce qui concerne le règlement cadre, il est nullement imposé à celui-ci une transposition particulière. Le règlement cadre est certes une innovation dans le cadre communautaire, il se pose comme une synthèse du règlement et de la directive. Au premier contact sa dénomination évoque la loi cadre en droit constitutionnel, une loi complétée par des décrets d`application. En cela elle renverrait à une directive. Pourtant à la lecture de l`article 41, on se rend compte que le règlement cadre est différent de la directive de par sa portée générale. Et il n`est applicable et obligatoire que pour certains de ses éléments. Le constat est le suivant, le règlement cadre est un instrument de respect de l`autorité des Etats et de l`intégrité de leur ordre juridique. Il permet sans aucun doute une intégration différenciée parce que les éléments facultatifs seront laissés à

255 Voir l`article 44 du traité révisé CEMAC 2009.

256 Voir l`article 41 du traité révisé CEMAC 2009.

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l`appréciation des Etats membres. L`intérêt d`une réussite à tout prix du processus intégratif CEMAC est sans doute à l`origine du règlement cadre.

La directive quant à elle, constitue l`instrument le plus original de l`ordre juridique communautaire. Elle est fondée sur l`idée d`un partage des tâches et d`une collaboration entre deux entités : l`autorité communautaire et les autorités nationales. Aux niveaux communautaire, et national, il est mis en oeuvre une méthode de législation à deux étapes progressives et intimement liées. Au niveau communautaire il est « légiféré » la directive. Et au niveau national, il appartient aux Etats membres de traduire cette ligne politique et ce modèle législatif dans leur ordonnancement interne au travers de leurs catégories normatives propres. Il s`agit précisément et subtilement d`un instrument de rapprochement normatif de l`ordre juridique communautaire et national. Car il permet de dégager des solutions aux difficultés que rencontre l`intégration des Etats membres du fait de la résistance souveraine. Comme le disent Guy ISAAC et Marc BLANQUET, « son inscription à la nomenclature correspond sans doute à la volonté des rédacteurs des traités d'offrir aux institutions, à coté du règlement, un instrument d'uniformisation juridique, une formule fondée sur un partage des taches et une collaboration entre le niveau communautaire et le niveau national, donc plus souple et plus respectueuse des particularités nationales spécialement adaptées à la fonction du rapprochement des législations nationales »257. La logique de la directive semble consister en une réalisation optimale des objectifs visés, plutôt qu`en un quelconque équilibre entre ces objectifs et l`intérêt propre de chaque Etat258. Aux termes de l`article 41 du traité révisé de la CEMAC, « Les directives lient tout Etat membre destinataire, quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales leurs compétences en ce qui concerne la forme et les moyens ». La directive ne lie ses destinataires qu`au regard de l`objectif à mettre en oeuvre. En revanche, les moyens d`action, le choix de l`acte et sa forme, sont laissés à la discrétion des autorités nationales. La directive n`a pas de portée générale, elle ne concerne que ses destinataires qui sont, la plupart du temps, les Etats membres. La directive ne produit pas tous ses effets dans l`ordre juridique interne dès son entrée en vigueur. Elle implique donc une prise en charge au niveau national. Elle nécessite pour produire son plein effet, d`être transposée dans l`ordre juridique interne. Les Etats membres disposent d`une entière liberté dans le choix de l`acte de transposition de la directive. Il pourra s`agir d`une loi, d`un décret, d`un arrêté. En revanche, le droit communautaire s`oppose à une transposition par voie de

257 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit, p 205.

258 Ibid.

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circulaire, car elle ne dispose pas d`effet contraignant et n`offre pas les garanties de publicité propres à la loi, au décret ou à l`arrêté. La transposition est essentielle pour l`efficacité d`une directive. Le défaut de transposition, ou bien encore une transposition insuffisante ou incomplète expose l`Etat membre défaillant à une action en justice de la part de la commission européenne qui peut directement saisir la cour de justice, après une mise en demeure de l`autorité nationale. C`est une action en manquement259. Elle permet de faire constater la violation du droit de l`union par l`Etat membre. Peut-on parler d`un pouvoir exécutif de l`Etat membre de la CEMAC ?

PARAGRAPHE II : Le pouvoir « exécutif » de l'Etat membre de la CEMAC.

En s`inspirant du droit interne, le pouvoir exécutif est l`attribution que détiennent les autorités les plus hautes d`un Etat dont la fonction spécifique consiste généralement «de créer des normes individuelles (particulières) en se fondant sur les normes générales créées par la législation et la coutume, et d'appliquer les sanctions prévues par les normes générales et individuelles »260. En comparaison avec la communauté, on remarque premièrement que, le pouvoir d`assurer l`exécution des normes de droit communautaire est partagé entre la commission de la CEMAC et l`Etat membre de la CEMAC. Et deuxièmement, la manifestation du pouvoir exécutif de l`Etat membre varie selon les normes à exécuter. On distingue aussi une manifestation particulière du pouvoir exécutif quand il s`agit des actes primaires et additionnels (A) ou actes dérivés (règlements cadres et des directives) (B).

A/ La réduction significative du pouvoir « exécutif » de l'Etat membre face aux actes primaires, additionnels, et des règlements communautaires.

Les actes primaires et additionnels représentent généralement la manifestation de l`autorité des normes communautaires parce qu`ils mettent en exergue véritablement les trois principes fondamentaux de la norme communautaire que sont : la primauté, l`applicabilité immédiat, et l`effet direct. Par conséquent, le pouvoir exécutif qui a la faculté d`édicter des normes pour faire appliquer des règles générales, et les sanctions (veiller au respect et à l`application de ses normes), se voit soustraire une prérogative celle d`édicter des normes individuelles ou particulières. L`Etat membre face à cette situation se transforme en un « Etat

259 Voir l`article 4 du traité révisé de la CEMAC.

260 KELSEN (H), Théorie générale du droit et de l'Etat, suivi de la doctrine du positivisme juridique, bruyant LGDJ, 1997, p 307.

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exécutant »(1), dont la fonction exécutive se trouve limitée et partagée par la commission de la CEMAC(2).

1) Une réduction causée par prééminence du statut d'exécutant de l'Etat membre de la CEMAC : les bases juridiques de la qualité d' « exécutant »

L`Etat membre se caractérise par la manifestation de sa volonté dans la formation des normes de droit communautaire. Ces normes sont d`application quelque fois immédiate, en ce qui concerne les normes primaires de droit communautaire, et d`autres normes qui nécessitent l`action des Etats pour acquérir leur force juridique. Comme affirmé plus haut, le droit primaire est la véritable représentation de la force et de la spécificité de la norme communautaire, car l`on retrouve une manifestation véritable des principes fondamentaux du droit communautaire à savoir la primauté, l`application immédiate et l`effet direct. C`est la raison pour laquelle, lorsqu`elle se trouve en contact avec l`ordre juridique interne ou communautaire, la norme communautaire réduit le pouvoir exécutif de l`Etat membre au rôle d`exécutant. Non pas que l`Etat membre est cantonné à exécuter la norme de droit communautaire, mais bien plus, le pouvoir exécutif est inexistant parce que inutile dans la mise en application de la norme communautaire. Cependant la posture d`exécutant se manifeste et est prééminente lorsque l`Etat membre est au contact avec le droit primaire.

L`article 4 du traité révisé de la CEMAC, constitue la base juridique communautaire à cette qualité d` «exécutant ». Cette obligation, au delà de signifier l`obligation de coopération loyale ou de loyauté communautaire, pose une obligation négative dans la mesure où, « les Etats membres [...], s'abstiennent de prendre toute mesure susceptible de faire obstacle à l'application du présent traité et des actes pris pour son application »261. Et également, une obligation positive dans le sens où, « les Etats membres apportent leur concours à la réalisation des objectifs de la communauté en adoptant toutes mesures générales ou particulières propres à assumer l'exécution des obligations découlant du présent traité »262. Il faut signifier à la lecture du présent article du traité révisé de la CEMAC, que l`impératif de l`intégration relègue les Etats, dans l`application du droit primaire, à une posture d` « exécutant ». Par conséquent, il est interdit, « une application du droit communautaire ni coordonnée à la volonté discrétionnaire des Etats »263. Ainsi comme l`affirme NABLI, l`obligation d`exécution du droit communautaire transforme les Etats

261 Voir article 4 du traité révisé CEMAC.

262 Ibid.

263 NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 21

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membres du droit communautaire en sujets264, en « bras séculiers »265 de la communauté. Pour cette raison des auteurs comme lui évoquent dans le rapport de l`Etat membre au droit primaire, de compétences liées car « de jure la compétence laissée aux Etats membres pour compléter ou exécuter les actes communautaires, s'analyse en réalité comme une compétence liée »266.

L`action d`exécution revêt plusieurs formes. On distingue à la suite de NABLI, l`exécution normative ; administrative ; juridictionnelle et coercitive267.

L`exécution normative se caractérise par la prise des mesures nationales, selon les hypothèses visant à compléter la norme communautaire, à l`instar des directives communautaires. Grosso modo, « la portée et l'intensité de l'exécution varient selon l'effet direct de l'acte communautaire »268.

L`exécution administrative met en exergue l`administration oeuvrant pour la mise en oeuvre et à l`application du droit communautaire aux particuliers. Toutes les administrations sont mises à contribution pour faire de l`application quotidienne du droit communautaire une exigence. Toutefois, cette prééminence de la qualité d`Etat exécutant ne fait point disparaître la fonction exécutive de l`Etat membre de la CEMAC.

2) La réduction de la fonction exécutive de l'Etat membre de la CEMAC à une fonction de contrôle et de sanction.

La mise en oeuvre effective du droit communautaire fait l`objet de contrôle et de sanction lors de son non respect. La fonction exécutive en droit communautaire est une fonction partagée. Au niveau communautaire, c`est à la commission qu`est reconnu le rôle de veiller au respect de la norme communautaire par les Etat membres. Toutefois, la commission ne dispose pas de prérogatives de sanction en cas de violation. C`est à ce niveau que l`Etat membre acquiert une posture importante dans la fonction exécutive. La carence de la prérogative de sanction de la commission, place les autorités nationales dans la posture

264 Ibid.

265 KOVAR (R), « L`effectivité interne du droit communautaire », in la communauté et ses Etats membres, rapport du colloque de l'institut d'études juridiques européen, Nijhoff, la Haye, 1973, p 205. Cité par NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 21.

266 Voir FINES (F), « L'application uniforme du droit communautaire dans la jurisprudence de la cour de justices des communautés européennes », in études en l`honneur de Jean Claude GAUTRON, paris, pedone, 2004, pp 333-348.

267 NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 22.

268 Ibid.

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d`exercer le pouvoir exécutif, qui revient au contrôle et à la sanction, de nature administrative et pénale, en cas de violation du droit communautaire.

Avant d`évoquer les prérogatives liées au pouvoir exécutif reconnu à l`Etat membre de la CEMAC, il importe de mettre en exergue le fondement de la fonction exécutive de l`Etat membre. A ce sujet, deux hypothèses nous viennent à l`esprit : premièrement, soit la fonction exécutive est expressément reconnue à l`Etat membre de la CEMAC, soit l`Etat membre tire cette légitimité de l`obligation générale à lui imposée, de donner plein effet aux dispositions du droit communautaires. Pour ce faire, il est contraint de veiller au contrôle, au respect de la règle de droit communautaire, et éventuellement à la sanction de quiconque la violera.

Il faut dire que, lorsque l`article 4 du traité révisé de la CEMAC pose une obligation positive à l`Etat membre, il s`agit implicitement de lui confier la tâche du contrôle et de la sanction de la violation du droit communautaire. A cet effet, du même article est assortie d`une sanction aux Etats membres « en cas de manquement [...] aux obligations qui lui incombent, en vertu du droit communautaire... ». Cet article pose, l`obligation du résultat sous peine d`engager la responsabilité de l`Etat membre, pour manquement aux obligations communautaires. En somme cet article confie aussi implicitement, à l`Etat membre des prérogatives de contrôle et de sanction, pour « assurer l'exécution des obligations découlant du présent traité »269.

En ce qui concerne la fonction exécutive de l`Etat membre, elle s`étend au contrôle et à la sanction. Le contrôle est consécutif au stade d`application du droit communautaire reconnu à la commission de la CEMAC, ayant une représentation dans chaque Etat membre. Son rôle se limite à contrôler le respect par les Etats membres des obligations qui leur incombent. Cette tâche est partagée au niveau communautaire avec les Etats membres. Tout Etat membre de la CEMAC peut, dans la cadre de la violation des obligations du droit communautaire, saisir la commission pour rétablir la légalité communautaire.

Au niveau national, la tâche est de veiller à l`application des obligations. Cette tâche est conforme aux aspirations des constitutions nationales. Le contrôle de l`obligation du droit communautaire bénéficie de la même voie que celle du droit national, car les normes de droit communautaire et l`ordre juridique interne des Etats membres sont harmonisés, lorsque

269 Voir l`article 4 du traité révisé CEMAC.

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le droit communautaire entre en vigueur. Seulement, la primauté du droit communautaire sur le droit national impose le contrôle du droit communautaire sur le droit national, si ils partagent tous les deux un même domaine de législation.

Le pouvoir de sanction peut être administratif ou pénal. Les sanctions administratives correspondent, comme le dit BELIGH NABLI « un type de décisions unilatérales et sont l'une des manifestations les plus typiques de l'acte de puissance publique »270, et en exprime exactement « le jus prendi qui appartient à l'Etat »271. En plus le rôle primordial de l`administration se définit au niveau de l` « exécution matérielle qu'au niveau de contrôle des mesures prises »272.

Dans l`Etat, le pouvoir de sanction pénale est congénitalement sa prérogative et son monopole, de par son territoire et son monopole de la violence légitime. C`est un des attributs de la souveraineté de l`Etat. Ainsi de la jurisprudence de la cour de justice de l`UE, les sanctions pénales demeurent des prérogatives, relevant de la compétence des Etats membres273. Tout de même, le pouvoir exécutif de l`Etat membre, certes limité en ses actes primaires, se trouve mis en exergue, face aux directives communautaires.

B/ La restitution du pouvoir exécutif de l'Etat membre face aux directives communautaires.

Le pouvoir exécutif renvoie à la prise de mesures individuelles et particulières pour l`exécutant des règles de portée générale, et éventuellement la sanction de leur non respect et leur violation. La directive manifeste totalement le pouvoir exécutif de l`Etat membre de la CEMAC, du fait de l`obligation de transposition dans l`ordre juridique national(1). Cette transposition permet de mettre en relief une abondante législation nationale d`intégration communautaire(2).

270 MODERNE (F), « La sanction administrative (éléments d'analyses comparative) », RFDA, mai-juin 2002, pp 483-495. Cité par NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 24.

271 DENIZEAU (C), L'idée de puissance publique à l'épreuve de l'union européenne, paris, LGDJ, 2004, 684p

spec. 368. cité par NABLI (B), « L'Etat membre : l` « hydre » du droit constitutionnel européen », op cit, p 24.

272 Ibid.

273 CJCE, 16 janvier 1974, Rheinmühlen-Düsseldorf, Aff. 166-73, Rec., p 33.

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1) Une restitution inhérente à l'obligation de transposition de la directive : une compétence liée.

Pour NABLI, « la compétence laissée aux Etats membres pour compléter ou exécuter les actes communautaires, s'analyse en réalité comme une compétence liée »274. Le pouvoir de faire exécuter les normes communautaires reconnues aux Etats membres s`analyse alors comme une obligation, car elle peut engager la responsabilité de l`Etat membre. La directive ne produit pas tous ces effets de droit dans l`ordre juridique national. Pour cela elle doit d`être transposée dans l`ordre juridique national.

Cette transposition est « l'opération par laquelle un Etat membre destinataire d'une directive procède à l'adoption des mesures nécessaire à sa mise en oeuvre »275. Le choix du moyen reste libre pour l`Etat, le plus important étant l`objectif à atteindre. Car c`est la seule et unique obligation qui pèse sur les Etats membres.

Cette obligation paraît essentielle, car elle pose la solution de l`efficacité de la directive. Par conséquent, tout défaut de transposition, ou alors une transposition légère, insuffisante, ou incomplète expose l`Etat membre défaillant à une action en justice de la part de la commission qui peut directement saisir la cour de justice. Ainsi, dans le droit interne, la transposition d`une directive doit être impérativement complète. Dans le droit communautaire de l`Union Européenne, l`impératif d`atteindre les objectifs va plus loin parce que les Etats membres sont obligés de notifier à la commission, la conformité de leur droit à la directive. Cela peut créer une inégalité entre les ressortissants des Etats membres. L`objectif de la directive doit être la création des droits au profit du particulier ; le ou les droits conférés doivent avoir un contenu identifiable au regard des critères dégagés par la directive elle-même.

La transposition reste donc une manière communautaire de mettre véritablement en oeuvre, une norme de doit communautaire de portée générale, et de veiller, sous la contrainte de la communauté à son effectivité et son efficacité par les sanctions contre tout cas de sa violation. Dans un but d`uniformisation de l`intégration dans les différents Etats membres de la CEMAC, la transposition devient synonyme de création d`un droit national d`intégration, dans l`optique de rendre le droit communautaire un élément homogène de l`ordre juridique interne.

274 NABLI (B), « L'Etat membre : l' « hydre » du droit constitutionnel européen » op cit, p 29.

275 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit, p 207.

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2) Une restitution entrainant développement d'un droit national d'intégration communautaire.

Paraphrasant DUBOUT et NABLI, le droit national de l`intégration est un ensemble de règles, de principes, de techniques, de notions et de structures, destiné à traiter spécifiquement de la question de la participation nationale à la communauté d`intégration276. Il s`agit d`un « droit relationnel, dont l'objet est d'organiser et de réguler les rapports entre les organes et normes de droit interne et ceux découlant des traités... »277. De l`esprit de l`article 41 du traité révisé de la CEMAC, deux catégories de normes communautaires participent activement à la construction du droit national de l`intégration communautaire parce que accordant une marge de manoeuvre aux Etats membres pour rendre effectives les normes prescrites. Il s`agit des règlements cadres, de portée limitée, tout en étant directement applicables pour certains éléments (plus précisément les lignes directrices), accordent un champ de construction normative aux Etats. Il en va de même des directives, qui dans leur dynamique mettent en exergue deux phases à savoir : la phase de conception communautaire, et celle d`application nationale qui constitue une transposition des objectifs communautaires dans l`ordonnancement juridique des Etats membres. Dans le même sillage, l`article 4 du traité de la CEMAC stipule que « les Etats membres apportent leur concours à la réalisation des objectifs de la communauté en adoptant toute mesure générale ou particulière propre à assurer l'exécution des obligations découlant du présent traité ». Ceci signifie au fond, une possibilité explicite de développement d`un droit national d`intégration.

Dans son oeuvre de sanction des atteintes aux violations des obligations de droit communautaire, certaines règles de procédure civile des Etats membres sont présentées également comme un droit national d`intégration. L`article 45 du traité révisé de la CEMAC est clair là dessus, Il est aménagé un cadre de contrôle de l`exécution forcée par les juridictions nationales. A cet effet la mise en oeuvre du contrôle de la régularité de l`exécution forcée offre un champ de partition de la norme communautaire. Il en va de même du juge communautaire, qui, lorsque le droit communautaire est silencieux, peut se référer aux principes généraux du droit commun aux Etats. Ainsi au sein même de la catégorie générique « loi », il est désormais possible de dénombrer plusieurs sous catégories de lois mobilisées par le droit de l`intégration, et notamment celles portant « diverses dispositions

276 DUBOUT (E) et NABLI (B), « L'émergence d'un droit français de l'intégration européenne », RDFA, 2010,

p 1021, spec. p1.

277 Ibid.

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d'adaptation au droit communautaire », créées dans le seul objectif d`améliorer les conditions de transposition des directives. Les normes constitutionnelles des Etats membres disposent des articles propres à l`intégration régionale.

La participation des Etats à une organisation supra nationale comme la CEMAC, certes contraignante dans les faits, leur reconnaît un ensemble de prérogatives. Cela conduit à s`interroger sur les implications de la qualité de membre de la CEMAC sur l`Etat souverain.

CONCLUSION DU DEUXIEME CHAPITRE.

De ce qui précède, nous avons démontré l`existence dans les prérogatives de l`Etat membre de la CEMAC d`un certains nombres de pouvoirs qu`ils acquièrent après leur adhésion à la Communauté. Nous avons présenté le « pouvoir constituant » qui se manifeste par les actes primaires communautaires qui ont d`ailleurs les mêmes caractéristiques que la norme fondamentale en droit interne. Ensuite nous avons présenté le caractère législatif de certaine norme communautaire qui laisse présager un pouvoir législatif au sein de la Communauté. Et enfin nous avons démontré la conciliation de la fonction exécutive entre la communauté et l`Etat membre de la CEMAC. La présentation de la qualité de membre de la CEMAC nous a laissé voir la complexité structurale de la qualité de membre d`une organisation d`intégration tel que la CEMAC. On vient à se demander quels sont les conséquences pour l`Etat souverain ? D`où l`intérêt des implications de qualité de membre de la CEMAC pour un Etat souverain.

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CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE.

A ce stade de la recherche, un premier constat se dégage. L`appartenance à la Communauté Economique et Monétaire de l`Afrique centrale (CEMAC) diffère de celle d`une quelconque organisation internationale. Le statut de membre est la résultante d`un processus sélectif mêlant conditions de forme et de fond. Deuxièmement l`accession à la qualité de membre, confère un certain nombre de prérogatives à l`Etat. Ce double constat permet de caractériser l`Etat membre de la CEMAC. En somme toutes les manifestations du statut de membre de la CEMAC ou les conséquences de sa qualité, justifient son importance, sa complexité et la nécessité des membres de prendre conscience de cela. On est alors en droit d`attendre une réflexion approfondie des Etats sur les implications de ce statut en interne. Cependant, pour certains Etats, il n`en est rien. Même l`objectif de mettre en commun un domaine ne suffit pas à ses Etats de prendre conscience de la force subordonnante du projet intégratif. Toutefois d`autres Etats, soit dans un acte de conscience ou de mimétisme, accordent une attention à ce processus qui bouleverse tant bien que mal les habitudes en droit des relations internationales et dans la même occasion assumer pleinement, outres des fonctions étatique, mais également communautaire. De par les pouvoirs qui sont confiés aux membres, la communauté devient un lieu de prise des grandes décisions d`une partie de la politique nationale des Etats. Il serait temps de s`interroger sur les implications autant formelles que matérielles de la qualité de membre pour un Etat souverain. Autrement dit il s`agit de mettre en relief d`une part, la communautarisation normative et d`autre part institutionnelle de celui-ci.

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DEUXIEME PARTIE

LES IMPLICATIONS DE LA QUALITE DE MEMBRE

DE LA CEMAC POUR L'ETAT.

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La nature contraignante de l`ordre juridique communautaire, du fait de ses principes fondamentaux qui sont la primauté, l`applicabilité immédiate et l`effet direct, exerce une pression considérable sur l`Etat. L`adhésion à la qualité de membre de la CEMAC augure une remise en question des fondements normatifs et institutionnels des Etats membres, dans la mesure où l`intégration « rassemble un ensemble de règles, de principes, de techniques, de notions et de structures destinés....»278 à créer une intégration communautaire. C`est donc une reconnaissance d`un ordre juridique spécifique autonome et contraignant autant que le droit interne des Etats. Denys SIMON parlant du droit communautaire dira qu`en dépit de son fondement conventionnel, « l'édifice communautaire aurait développé un appareil institutionnel infiniment plus sophistiqué que celui des organisation intergouvernementales traditionnelles, un mécanisme de décision faisant une place sans précédent à la règle majoritaire et réduisant singulièrement la fonction du consensualisme, (...) de surcroît ce droit entretiendrait avec le droit national des Etats membres des rapports irréductibles aux relations du droit international et du droit interne, à raison du rôle joué par les principes de l'effet direct et de la primauté du droit communautaire ainsi que par le mécanisme de renvoi préjudiciel»279. Tout compte fait, la rencontre de l`édifice communautaire avec l`Etat n`augure rien de paisible dans les rapports de ces deux entités juridiques aux effets presque identique. Parce que l`apparente dimension pré-fédérale ou fédérale de la construction communautaire aboutit à l`assimilation plus ou moins explicite, de l`ordre juridique communautaire à un ordre juridique étatique280. Par conséquent l`unité ou l`autonomie281 de l`ordre juridique communautaire implique pour les Etats membres un ensemble de transformations dues à l`implication de la qualité de membre pour les Etats souverains. En d`autres termes, il convient de déterminer quelles sont les exigences du droit communautaire dans ses rapports avec l`Etat souverain, membre de la CEMAC. La tâche est d`autant plus ardue, dans la mesure où l`édifice communautaire impose une normalisation profonde de l`ordre juridique interne, car toute règle de droit est l`expression d`une pensée souterraine282. L`édifice communautaire nous impose une véritable normalisation de l`ordre juridique

278 DUBOUT (E) et NABLI (B), « L'émergence d'un droit français de l'intégration européenne », op cit, p 1.

279 SIMON (D), « les fondements de l`autonomie du droit communautaire », rapport général du colloque de

Bordeaux sur l'autonomie du droit communautaire, pp 208-249 spec. 210.

280 Ibid.

281 L`autonomie ne signifie pas que l`ordre juridique constitue, selon le pléonasme Leibnizien de P. Reuter, une « monade isolée » bien au contraire, quelque soit le degré d`autonomie qu`on pourrait être appelé à reconnaitre à

l`ordre juridique communautaire, il ne sera jamais imperméable à son environnement international. Voir SIMON (D), « Les fondements de l'autonomie du droit communautaire », op cit, p 215.

282 Voir BIPOUM WOUM (JM), « Recherches sur les aspects actuels de la réception du droit administratif dans

les Etats d'Afrique noire d'expression française : le cas du Cameroun », RJPIC, N°3, 1972, pp 398 et Ss.

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national pour atteindre l`objectif envisagé qui est celui de créer une véritable communauté intégrative dans la sous région CEMAC. Il s`agit de parler ici des implications normatives de la qualité de membre de la CEMAC pour un Etat souverain (chapitre3). A l`évidence le processus d`intégration met en exergue une inflation d`institutions communautaires symétrique à celle que l`on retrouve dans les Etats membres de la CEMAC. L`on constate également dans le cadre des Etats membres une mutation structurelle et institutionnelle à travers la réorganisation ou la création des institutions, des directions et des services destinés à s`occuper de l`intégration sous régionale. Cette observation révèle une sorte d'implication structuro-institutionnelle de la qualité de membre de la CEMAC pour l'Etat souverain (chapitre 4).

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CHAPITRE 3 : LES IMPLICATIONS NORMATIVES DE LA QUALITE DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR UN ETAT SOUVERAIN.

Par ordre juridique, on entend un ensemble de règles de droit, constituant un système, c`est-à-dire présentant un certain degré d`organisation et de cohérence. Cette caractéristique peut être plus ou moins accentuée. On qualifie souvent les communautés intégratives et leurs ordres juridiques de « sui generis ». Et on s`accorde généralement à reconnaître, en effet, que cet ordre juridique ne mérite ni la qualification d`ordre juridique international, ni celle d`ordre juridique interne y compris d`ordre juridique fédéral. A la différence de l`ordre international, l`ordre juridique des communautés intégratives est doté d`une force impérative toute particulière. De nombreuses normes présentent une force contraignante. Elles obligent les Etats membres, les acteurs économiques, les personnes physiques ou morales, à les mettre en oeuvre. L`ordre juridique communautaire est un « ordre juridique propre intégré au système juridique des Etats membres qui s'impose à leurs juridictions »283. Le droit communautaire crée des droits et obligations à l'égard des États mais aussi des particuliers, ce qui lui confère un attribut fondamental de la normativité284. La norme contraignante communautaire bénéficie au niveau national d`un traitement particulier. On assiste à une véritable normalisation communautaire de l`ordre juridique interne des Etats membres (Section 1) imposée du fait du principe de primauté de la norme communautaire. L`obligation de communautarisation des Etats implique, en cas de défaillance venant de celui-ci, l`engagement de la responsabilité de l`Etat membre (Section 2).

SECTION 1 : LA NORMALISATION COMMUNAUTAIRE DE L'ORDRE

JURIDIQUE INTERNE DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC.

Ce qui se dessine lors de l`entrée de la norme communautaire dans l`ordre juridique interne des Etats n`est autre chose que le résultat de la force contraignante que possède cette norme sur les Etats membres. L`on est donc en droit d`interroger la réception de ce droit spécifique et autonome qu`est le droit communautaire dans l`ordre juridique national. Une chose est certaine à la lumière du résultat attendu, l`aménagement normatif interne de la réception de la norme de droit communautaire (Paragraphe 1) est palpable dans les Etats. Et elle est à l`origine de la création d`un droit relationnel produit par l`impératif de la norme de droit communautaire d`organiser et de réguler les rapports entre les

283 Voir l`arrêt COSTA c/ ENEL du 15 juillet 1964.

284 Voir BERGEL (JL), Théorie général du droit, Paris, Dalloz, 3e édition, 1998, p 40 et 41.

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organes et les normes de droit interne et ceux découlant des actes primaires et dérivés du droit communautaire CEMAC285. Il s`agit d`un droit national d`intégration communautaire, qui n`est autre chose que la conséquence de l`aménagement normatif interne de la réception de la norme de droit communautaire (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : La manifestation de la normalisation de l'ordre juridique interne par le droit communautaire.

L`ordre juridique interne, comme dans l`ordre juridique communautaire repose, sur la hiérarchie des normes kelsenienne286. Ainsi pour qu`une norme entre dans l`ordonnancement juridique interne des Etats elle doit impérativement être conforme à la norme fondamentale du dit Etat, sous peine d`être inconstitutionnelle. Bien que dans l`ordre juridique communautaire, la norme de droit communautaire soit dotée de la primauté, de l`applicabilité immédiate, et de l`effet direct, tant qu`elle n`a pas reçu une habilitation explicite ou implicite d`intégration dans l`ordre juridique national par la constitution, elle demeure relativement hors de portée d`application du citoyen. Par conséquent une habilitation constitutionnelle intégrant la norme de droit communautaire (A) est impérative dans l`ordonnancement juridique interne des Etats. Car cela permettra d`établir les rapports de subordination qui peuvent exister entre la loi expression de la volonté du peuple dans le respect de la constitution287 et les normes de droit communautaire (B).

A/ la manifestation constitutionnelle de la normalisation : L'habilitation

constitutionnelle intégrant la norme communautaire.

Dans les systèmes juridiques romano germaniques comme ceux de la plupart des Etats membres de la CEMAC, l`ordre juridique interne respecte une organisation bien précise qui met en exergue une norme fondamentale, véritable acte de légitimation et de

285 En paraphrasant DUBOUT (E) et NABLI (B), « L'émergence d'un droit français de l'intégration européenne », op cit, p 2.

286 Selon l`épistémologie kelsenienne l`ordonnancement juridique interne forme une pyramide, capable lui même de régler sa propre création soit par la procédure en ce sens que certaines normes comme la constitution déterminent exclusivement la procédure selon laquelle d`autres normes devront être créées. Ainsi pour Kelsen « une norme est valable si et parce qu'elle a été créée d'une certaine façon, celle que détermine une autre norme. Cette dernière constitue ainsi le fondement immédiat de la validité de la première », « pour exprimer la relation en question on peut utiliser l'image spatiale de la hiérarchie de supériorité-subordination : la norme qui règle la création est la norme supérieure, la norme créée conformément à ses dispositions est la norme inférieure. L'ordre juridique n'est pas un système de normes juridiques placées toutes au même rang, mais un édifice à plusieurs étages superposés, une pyramide ou hiérarchie formée (pour ainsi dire) d'un certain nombre d'étages ou couches de normes juridiques ». Voir KELSEN (H), Théorie pure du droit, traduction française de la 2e édition par Charles EISENMAN, Dalloz, 1962, p 299.

287 La loi est l`expression de la volonté du peuple dans le respect de la constitution.

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validité de l`existence d`une norme dans l`ordonnancement juridique interne. Maurice GAILLARD parlera d` « acte juridique souverain » ou du « sommet de la hiérarchie des normes »288. Par conséquent, l`habilitation constitutionnelle devient une condition sine quanon à la bonne intégration de la norme communautaire dans l`ordre juridique interne (1). Cette intégration qui pourra peut être répondre à la question épineuse relative à la supériorité-subordination des normes de droit communautaire et de la norme fondamentale dans l`ordre juridique interne des Etats membres de la CEMAC (2).

1) L'habilitation constitutionnelle : la condition d'intégration de la norme de droit communautaire dans l'ordonnancement juridique des Etats membres de la CEMAC.

Il convient de dire comme Maurice GAILLARD que l`expression de « hiérarchie des lois » désigne l`ordonnancement des lois, au sens large, des règles produites par trois autorités : « le peuple souverain ; le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif »289. La hiérarchie des lois met en exergue un alignement des normes sous forme pyramidale ou, sous forme supériorité-subordination, destinée à mettre en lumière une norme supérieure, véritable moteur d`organisation et de légitimité de l`ordre juridique. De cette organisation naît l`unité de l`ordre juridique. « Le degré suprême de ces ordres est formé par leur constitution »290 que l`on qualifierait également de norme fondamentale. De cette norme fondamentale, les autres normes, quelles soient internes ou externes à l`ordre juridique national tirent leur validité. Le droit communautaire est un droit qui se caractérise par son autonomie sans doute relative, cependant celui-ci constitue un ordre juridique distinct de celui de l`Etat et du droit international, et impose aux Etats membres une attitude de respect bien encadré par les principes fondamentaux que soutient la norme communautaire. Le véritable problème lié à la reconnaissance du droit communautaire et qui sera abordé dans la sous partie suivante est celui du rapport de la primauté auto proclamée du droit communautaire et de celle de la constitution dans l`ordre juridique interne. Toutefois une reconnaissance et une habilitation à intégrer l`ordre juridique des Etats augurent une prééminence de la constitution sur le droit communautaire car la constitution donne, selon la théorie de la pyramide des normes, une existence nationale au droit communautaire bien qu`il bénéficie du principe d`applicabilité immédiate et d`effet direct. La constitution reste, malgré les grands principes qui encadrent la

288 GAILLARD (M), L'intelligence du droit, les éditions d`organisations université, 1992, p 118.

289 Ibid.

290 KELSEN (H), Théorie pure du droit, op cit, p 300.

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règle de droit communautaire, « le fondement de la validité des ordres normatifs »291. Ainsi l`obligation communautaire inhérente à toutes normes communautaires est sujette à caution. Faut-il affirmer la primeur de la constitution sur les normes communautaire ? Les ordres juridiques du système romano germanique ne le réfuteront pas. La norme fondamentale établit la validité des autres normes et de ce fait demeure supérieure dans l`échelle normative. L`habilitation constitutionnelle de l`intégration régionale est importante parce que le droit communautaire bien qu`étant de fondement conventionnel, se particularise par la force contraignante et l`obligation qui lui est « sui generis ». Ceci dit, dans son élaboration et sa mise en vigueur au niveau communautaire, le droit communautaire n`a nullement besoin d`une quelconque forme d`acte législatif pour produire tous ses effets de droit. L`arrêt Simmental est plus clair la dessus : « les dispositions du traité et les actes des institutions directement applicables [...] font partie intégrante, avec rang de priorité de l'ordre juridique applicable sur le territoire de chacun des Etats membres... »292. Le Professeur PESCATORE dira que la primauté est le fondement ou « la condition existentielle » du droit communautaire293. Face à un droit aussi imposant, la constitution a l`impérative obligation de l`habiliter à intégrer l`ordre juridique national et d`en déterminer sa force juridique au sein de l`Etat. Ce qui suppose la disparition des Etats nations tels qu`ils existent aujourd`hui. Bien qu`il s`agisse d`un voeu pieux, d`un slogan que d`une volonté ferme de réaliser cette ambition294. L`habilitation constitutionnelle est une condition importante pour intégrer le droit communautaire dans l`ordre juridique interne et en plus d`éclaircir la position du droit communautaire dans l`ordonnancement juridique interne et le rapport supériorité-subordination des normes communautaires face à la norme fondamentale.

2) Une habilitation soulevant un problème de conciliation de la primauté du droit communautaire et de celle de la constitution.

La reconnaissance d`un droit communautaire par les constitutions des Etats membres de la CEMAC bien qu`elle permet l`habilitation à intégrer ce droit dans les ordres juridiques nationaux, n`a pourtant pas dissipé les questions relationnelles entre cette norme et la loi fondamentale. Le problème véritable étant la corrélation des primautés que chaque norme se revendique dans son ordre juridique respectif et éventuellement la place que

291 Ibid. p 255.

292 Voir arrêt SIMMENTHAL, op cit.

293 PESCATORE, « L'ordre juridique des communautés européennes », op cit, p 21.

294 TCHUINTE (J), « L'effective du droit communautaire en Afrique centrale », op cit, p 66.

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chaque norme devra occuper dans l`ordonnancement juridique national. Autrement dit du droit communautaire et de la constitution quelle norme est supérieure à l`autre ?

Ce débat s`étant déjà déroulé sous d`autres cieux, il nous importera d`en faire une synthèse, d`autant plus que les Etats de la sous région Afrique centrale s`inspirent généralement des solutions des systèmes romano germanique à l`instar de la France. Ainsi, saisi par le Président de la République française sur le fondement de l`article 54 de la constitution295, le conseil constitutionnel français devait examiner la compatibilité du Traité Constitutionnel avec la constitution française. La solution que le conseil constitutionnel apporta à cette interrogation procède de l`affirmation de la constitution comme la seule norme suprême au sein de l`ordre juridique interne et de celle cantonnant le traité sur l`Union Européenne comme traité296. Le plus important à retenir de cette solution, est que le conseil constitutionnel considère le droit primaire communautaire avant tout comme un traité. « L'instrument - le traité - est privilégié au détriment du contenu que l'instrument instaure - la Constitution »297. Cela permet aussi facilement que cela puisse l`être, de classer le droit communautaire au rang de traité ou convention internationale. « La minoration sémantique se double d'une minoration hiérarchique sur le fond »298. Même si la norme communautaire mentionne la primauté du droit communautaire, la conclusion reste la même : le droit communautaire est un droit issu de la manifestation de deux ou plusieurs volontés, par conséquent, il est un traité ou une convention, telle est la décision du conseil constitutionnel français. La primauté du droit communautaire trouve ses limites face à celles de la constitution. Cette posture pose évidement des problèmes parce que cette approche n`est pas compatible avec les principes fondamentaux qui soutiennent le droit communautaire à savoir la primauté et l`effet direct. En reconnaissant et en consacrant le droit communautaire, la constitution a offert à ce droit une base constitutionnelle. Ce qui entraine cette autre question, celle de l`importance que la constitution accorde à la primauté du droit communautaire. Cela relève même de l`application effective et de l`efficacité de la norme intégrée par habilitation constitutionnelle. L`impératif de la qualité de la norme implique « sous peine de créer un

295 L`article 54 de la constitution française de 1958 stipule (Loi constitutionnelle n° 92-554 du 25 juin 1992) " Si le Conseil constitutionnel, saisi par le Président de la République, par le Premier ministre, par le président de l'une ou l'autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs, a déclaré qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver l'engagement international en cause ne peut intervenir qu'après la révision de la Constitution. "

296 MOSSLER (G), « le conseil constitutionnel est-il souverainiste », consulté à
WWW.droitconstitutionnel.org.congresdeparis consulté le 26 mai 2014 à 14H56, p 1.

297 CHALTIEL (F), « Droit constitutionnel européen 2004-2006 », op cit, p 166.

298 ABANE ENGOLO (PE), « La notion de qualité du droit », RADSP, édition le Kilimandjaro, vol 1, N°1, janv.-juin 2013, pp 87-108, spec. p 88.

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droit qui n'est pas de qualité, l'organe de création du droit est astreint de respecter plusieurs exigence. La validité de la norme ne suffit pas, il faut encore qu'elle réponde à une exigence tout au moins latente de qualité »299. Il s`agit vraisemblablement des exigences endogènes et exogènes à la norme en question. En ce qui concerne le droit communautaire, les exigences de sa qualité vont de son intégration dans l`ordonnancement juridique interne, une reconnaissance automatique de ses principes fondamentaux. Dans le but de lui permettre de développer toutes ses capacités juridiques nécessaires à sa sécurité juridique. Par conséquent, Pour atteindre un résultat prévu par les concepteurs de la norme, à savoir l`intégration par uniformisation, la norme de droit communautaire doit, dégager la primauté, l`applicabilité immédiate et l`effet direct. Il serait donc faux de considérer le droit communautaire comme le droit international, c`est-à-dire laissant au droit constitutionnel interne, la capacité de déterminer les conditions d`application du droit communautaire300. Le droit communautaire détient en lui sa propre capacité juridique, il n`a nullement besoin d`une quelconque mesure de mise en vigueur.

Si la reconnaissance par les constitutions des Etats membres de la CEMAC, est un acte de prise en compte du caractère sui generis de la nature juridique de la CEMAC, « le constituant a ainsi consacré l'existence d'un ordre juridique communautaire intégré à l'ordre interne et distinct de l'ordre juridique international »301. Il s`agit de reconnaître la spécificité du droit communautaire et du même coup le principe fondamental de primauté du droit communautaire. Toutefois, la reconnaissance de la particularité de l`ordre juridique communautaire et de sa primauté comme principe fondamental ne signifie pas la reconnaissance de la supériorité du droit communautaire sur la constitution en droit interne. Il est clair que la question de la conciliation des primautés constitutionnelles et communautaires posera plus tard un problème sérieux au sein des ordres juridiques internes. Il est toutefois décevant que ce débat très important pour l`harmonie normative au sein des Etats ne se soit pas encore produite. Tout de même ce manque ne soustrait pas la question de l`implication du droit communautaire sur les autres nomes étatiques.

299 Ibid.

300 SIMON (D), « les fondements de l'autonomie du droit communautaire », op cit, p 217.

301 PRETOT, « la cour de cassation, la constitution, les traités », RDP, 2000, pp 1037-1049, spec. Point 11.

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B/ La manifestation non constitutionnelle de la normalisation : la relation loi et droit

communautaire.

Il faut entendre par droit communautaire ici, le droit primaire, additionnel et le droit dérivé de la CEMAC. Leur primauté impose pour les normes du droit interne inferieur à la constitution une subordination de principe (1), conséquence de la primauté du droit communautaire et également des sanctions qu`implique le non respect des règles de droit communautaire. Cependant la subordination de la loi particulièrement et des autres normes inferieures à la norme fondamentale pose quelques problèmes relatifs à la place de la volonté générale dans l`élaboration des lois et des implications de la contrainte de la norme de droit communautaire sur les normes inferieure à la constitution (2).

1) La subordination de la loi et des normes infra-législatives au droit communautaire de la CEMAC.

La consécration constitutionnelle du droit communautaire CEMAC par certains Etats n`a pas seulement servi à introduire ce droit contraignant dans l`ordre juridique des Etats membres de la CEMAC, mais bien plus à reconnaître dans la spécificité du droit communautaire, la primauté de celui-ci. De fait, les règles de droit communautaire bénéficient d`une base constitutionnelle qui implique une exigence de leur respect par les normes inferieures. La base et les exigences constitutionnelles du droit communautaire imposent aux normes inferieures à la constitution une subordination absolue et une prévalence. Toutes les constitutions y consacrent même la prévalence du droit international sur la loi. Cela est d`autant plus clair que le juge constitutionnel se doit non plus seulement de contrôler la constitutionnalité d`une loi mais également la conventionalité communautaire de cette même loi. Car le droit communautaire étant un système normatif spécifique et autonome, il possède pour sa sécurité juridique et son efficacité302, un organe juridictionnel qui veille à son effectivité dont le juge de droit commun est le juge national. Le juge national exerçant ainsi, une double fonction : une fonction de juge national et une fonction de juge communautaire. La subordination est nécessaire pour l`unité de l`ordre normatif. Sans toutefois remettre en doute la pyramide des normes du maître de Vienne, l`ordre juridique étatique n`est plus uniquement fondé sur la constitution mais aussi sur le droit primaire communautaire. Car il ne

302 La sécurité juridique et l`effectivité sont les attributs d`une norme de qualité. « La sécurité juridique est le côté fiable de la norme tandis que l'effectivité normative correspond davantage à l'édiction de la norme à des fins utiles (...) effectivité, sans quoi la qualité de la norme et des droits créés serait mise à mal ». Voir à ce sujet ABANE ENGOLO (PE), « La notion de la qualité du droit », op cit, p 101.

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suffit plus seulement que la loi soit conforme à la constitution mais également au droit primaire communautaire. Ainsi l`imbrication hiérarchisée des normes juridiques dans le respect de la constitution et des normes de droit communautaire constitue ce que l`on peut appeler l`ordre juridique des Etats membres de la CEMAC.

A cet effet, peut-on encore parler de la constitution comme seule norme supérieur ou au sommet de la pyramide des normes en droit interne ?

Tout compte fait « l'ordre juridique est la représentation de normes hiérarchisées qui se superposent les unes sur les autres. Elles forment un tout cohérent parce qu'unies. La base de l'unité verticale est la validité des normes juridiques dont le moyen est la conformité. »303

L`exigence de conformité est la conséquence de la subordination et elle implique une logique de superposition des normes en forme pyramidale304. C`est aussi une implication tout au moins latente de la présupposition de la conformité des normes inferieures à celles supérieures305. La seule exception demeure le rapport constitution et droit primaire communautaire. Car l`on ne peut affirmer que le droit primaire communautaire nécessite d`être conforme à la constitution, bien que cela soit généralement le cas de la constitution pour réceptionner le droit communautaire en droit interne. C`est ce qu`impose l`article 4 du traité révisé de la CEMAC de 2008, qui pose une obligation négative aux Etats dans leurs rapports avec le droit primaire communautaire. Comme la constitution ne peut pas être inferieure au droit communautaire. Logiquement le droit communautaire serait pour l`effectivité de la primauté au même niveau que la constitution des Etats membres de la CEMAC. La seconde implication de la subordination des normes inferieures à la constitution est la garantie juridique de l`unité de l`ordre normatif des Etats membres de la CEMAC, qui est exercée par les juridictions nationale et communautaire. Cependant la contrainte qu`exerce le droit communautaire sur la loi pose des questions relatives à la volonté générale.

2) La volonté générale de la loi face à la contrainte de la norme communautaire.

Déjà dans l'obiter dictum du conseil constitutionnel français de 1985 dans lequel il affirma que « la loi votée... n'exprime la volonté générale que dans le respect de la

303 ABANE ENGOLO (PE), « La notion de qualité du droit », op cit, p 105.

304 Ibid. p 106.

305 Ibid.

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constitution »306, le conseil remettait déjà en question l`esprit même de la volonté générale émis par les révolutionnaires de 1789307. La contrainte communautaire n`est donc qu`une énième remise en cause de la volonté générale de la loi. L`effet du principe de primauté du droit communautaire nous permet d`admettre en paraphrasant Jean MAÏA308 que la loi est créée à la CEMAC. Parce que de plus en plus l`intégration du droit communautaire laisse moins de manoeuvre à l`Etat. Si ce n`est pour les directives ou les règlements cadres. De plus le droit communautaire dans sa politique sectorielle d`harmonisation élargit davantage son champ de compétence et d`action. Cela provoque des remises en cause de la volonté générale inhérente à la loi et affecte même les domaines de compétence de la loi tel que stipulés par les constitutions nationales. La loi nationale subit sérieusement la concurrence des normes communautaires. La contrainte du droit communautaire sur la loi nationale semble donc se matérialiser et se conforter dans les normes d`application et dans la création d`un droit national de l`intégration communautaire. Toutefois il ne faut pas voir uniquement l`influence du droit communautaire que sous le seul prisme de la contrainte, car si l`on considère l`affirmation de Pierre MAZEAUD que « la volonté générale se conforme à une volonté populaire plus générale et plus solennelle encore, la constitution »309. Ceci revient à dire que l`effet qu`exerce le droit communautaire sur la loi a évidement un fondement constitutionnel. Et qu`il s`agit d`un consentement constitutionnel de suivre le diktat de la norme communautaire. Notre regret est de constater la relative prise en compte du droit communautaire dans les décisions de justice des Etats membres. Pourtant l`effet contraignant du droit communautaire n`est que la résultante de ce processus. L`arrêt COSTA ENEL du 15 juillet 1964 est plus expressif sur ce point lorsqu`il affirme que «le droit communautaire né du traité ne pourrait [...] en raison de sa nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte interne quel qu'il soit sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la Communauté elle-même». Il en résulte des prescriptions très précises pour le juge national, juge de droit commun du droit communautaire : il « a l'obligation d'assurer le plein effet de ces normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à attendre l'élimination préalable

306 Décision 85-197 DC, 23 Août 1985, loi sur l`évolution de la nouvelle Calédonie.

307 BRUNET (P), « Que reste-t-il de la volonté générale ? Sur les nouvelles fictions du droit constitutionnel français », revue Pouvoirs, N°114, pp 5-19, spec. p 6.

308 MAÏA (J), « La contrainte européenne sur la loi » revue Pouvoirs, N°114, 2005, pp 53-71, spec. p 53.

309 Président du conseil constitutionnel lors de son discours prononcé le 3 janvier 2005 lors de la présentation des voeux au président de la république à l`Elysée, consulté le 7 juin 2014 sur http:/ www.conseil-constitutionnel.fr

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de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel »310. La volonté générale qui trouvait en la personne du juge son défenseur le plus fervent lors de l`application des lois dans les litiges, se voit remise en cause par le même juge qui officie en qualité de juge de droit commun du droit communautaire. La volonté générale est également dans l`ordre juridique national victime de la nature même de la norme de droit communautaire en ce sens ou les principes de primauté, d`applicabilité immédiate et de l`effet direct, font en sorte que la force contraignante de la loi, qui fut jadis de source populaire, soit dorénavant de source communautaire dans le respect de la constitution. La conséquence immédiate de cette oeuvre de déconstruction de la fiction juridique de la volonté générale dans l`essence même de la loi est la naissance d`un droit de fabrication nationale pour l`intégration communautaire.

PARAGRAPHE 2 : la conséquence nationale de la normalisation :Le développement d'une législation nationale de l'intégration communautaire.

Les implications normatives de la qualité de membre de CEMAC entraînent un développement d`une législation nationale de l`intégration communautaire. C`est donc un ensemble de règles de droit relationnel dont l'objet est d'organiser et de réguler les rapports entre les organes et normes de droit interne et ceux découlant des actes primaires, dérivés et sur le fonctionnement de la CEMAC311. Bien que ce droit diffère d`un Etat membre à un autre, cette législation partage tout de même des objectifs communs qui permettent de mettre en exergue un certain type de norme nationale d`intégration communautaire (A). Toutefois cette législation soulève un problème crucial à l`unité de l`ordre juridique national celui de la place de ce droit hybride dans la hiérarchie des normes en droit interne (B).

A/ La présentation des normes nationales de l'intégration communautaire.

La fonction principale du droit national de l'intégration est de mettre en relation des systèmes juridiques312, les ordres juridiques communautaire et interne. Et pour ce faire l`on retrouve en droit interne des normes nationales d`habilitation du droit communautaire et des normes nationales d`application du droit dérivé de la CEMAC(1). Autrement dit le droit national de l`intégration communautaire est formée premièrement d`un

310 CJCE, 9 mars 1978, 106\77, Rec., p 629. Cité par MAÏA (J), « La contrainte européenne sur la loi », op cit, pp 53-71 spec. p 57.

311 Ibid.

312 L`intégration juridique peut s`entendre comme « [le] phénomène qui consiste à incorporer dans l'ensemble

plus vaste de relations immédiates des rapports juridiques jusque là isolés dans leur encadrement étatique », selon la définition donnée par L.AZOULAI, « La constitution et l'intégration, les deux sources de l'union européenne en formation », RFDA, 2003, p 859.

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droit propre à « chaque Etat qui organise à la fois la projection des positions nationales liées à la construction »313 communautaire et deuxièmement d`un droit issu de la réception des normes communautaires dans l`ordre interne314. Toutefois ce droit se caractérise par des traits communs à toutes les législations nationales de l`intégration communautaire de chaque Etat membre (2).

1) Les types de législation nationale de l'intégration communautaire : la législation d'habilitation et d'application du droit communautaire.

Les transformations qu`impliquent ou qu`impliqueront les participations des Etats souverains à la communauté d`intégration, ne doivent pas être réduites au simple rapport du droit international au droit interne des Etats. Le constat est frappant de remarquer que la majorité des Etats membre de la CEMAC se sont préparés constitutionnellement à recevoir le droit communautaire dans leurs différents ordres juridiques. L`habilitation constitutionnelle d`association et de coopération à des projets intégratifs est aussi implicitement un aveu de reconnaissance de la particularité de ce droit, certes issu des conventions comme le droit international mais qui se distingue par la force contraignante de ses règles de droit. Les Etats souverains ont donc développé des habilitations constitutionnelles. Ces dispositions constitutionnelles sont généralement suivies par une abondante législation de procédure de réception du droit communautaire. Mais des décisions administratives et judiciaires nationales d`autant plus qu`avec l`acquisition de la qualité de membre de la CEMAC, l`Etat assume une forme de dédoublement lié à sa qualité d`Etat souverain et d`Etat membre. Les décisions administratives doivent prendre en considération la législation issue de la communauté comme cela doit être le cas également pour toute, les décisions judiciaires des juges nationaux. L`appartenance à la CEMAC forge dans l`Etat une forme d`identité hybride des Etats. Et c`est dans ce sens qu`intervient la législation d`habilitation, elle permet d`établir une cohérence entre les deux ordres normatifs dans l`Etat. Cette cohérence reste difficile à obtenir du fait des similitudes des deux ordres juridiques. Cela met en exergue une vision peut être inconsciente de l`Etat de développer « un système autonome au sein de l'ordre interne »315. Il s`agit de « débanaliser » le droit communautaire qui, est confondu avec le droit international. Dubout et Nabli diront que « L'adoption de règles propres à l'élaboration et à la réception du droit [communautaire] participe à la

313 DUBOUT (E) et NABLI (B), « L'émergence d'un droit français de l'intégration européenne », op cit, p

1024.

314 Ibid.

315 DUBOUT (E) et NABLI (B), op cit, p 1024.

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création d'une sorte de « régime exorbitant de droit commun » et fournit un fondement à la singularisation des régimes »316. La législation d`application quant à elle est la résultante du champ de législation reconnu par les dispositions des traités constituants de la CEMAC, aux Etats membres pour certaines normes dites dérivées. Elle s`apparente plus à un acte obligatoire plus que de volonté. C`est un acte obligatoire dans la mesure où la portée du résultat de transposition des actes dérivés peut éventuellement engager la responsabilité de l`Etat membre de la CEMAC. Eventuellement, les Etats membres n`ont pas encore pris pleinement en compte le phénomène juridique communautaire comme c`est le cas pour les pays de l`union européenne. A l`instar de la France, la conformité des normes nationales à l`union européenne a permis de développer une nouvelle qualité de normes particulièrement influencées par l`activité européenne. A titre d`exemple, il y a le développement des décisions de justice constitutionnelle relative à l`Europe, Florence CHALTIEL les nomment de droit constitutionnel européen.

2) Les traits caractéristiques communs de la législation nationale de l'intégration communautaire.

Découlant d`une participation de l`Etat souverain à la CEMAC, le droit national de l`intégration communautaire est une norme juridique à double identité parce qu`elle met en exergue deux dimensions : la dimension supranationale renvoyant à l`intégration sous régionale développée par la machine communautaire qu`est la CEMAC. Et également, la dimension nationale qui montre l`intérêt de l`Etat dans l`harmonisation des relations entre le droit communautaire et le droit nationale. De ce qui suit, l`on dira que le droit national de l`intégration de la CEMAC est « hybride »317. Hybride parce que la norme nationale de l`intégration vise un objectif communautaire celui de l`intégration communautaire de la CEMAC, mais elle est l`oeuvre de l`Etat indépendamment de l`initiative communautaire. La législation nationale de l`intégration communautaire n`obéit pas à la division du droit en droit public et droit privé. En d`autres termes le droit national de l`intégration communautaire est un droit transversal qui touche toutes les branches du droit dans l`Etat, car les normes nationales visent premièrement l`harmonisation des législations entre les Etats et deuxièmement la réception et l`intégration du droit communautaire au niveau national. La conséquence la plus immédiate est la naissance d`un droit éparse qui se retrouve dans tous les domaines du droit. Il faut remarquer que les législations nationales d`intégration « brouillent

316 Ibid.

317 DUBOUT (E) et NABLI (B), op cit, p 1025.

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la frontière entre le droit national et le droit dit « supranational »318, et également les différentes frontières entre diverses branches du droit. Il s`agit également d`un droit qui diffère d`un Etat membre à un autre, la différenciation étant uniquement sur les approches et les moyens de mise en place de l`intégration communautaire. La raison principale est la différenciation des moyens de mise en oeuvre et de coordination du droit communautaire avec le droit national. Cette singularité de la législation nationale de l`intégration communautaire montre à quel point l`intégration communautaire impacte sur l`Etat et précisément sur ses fondements normatifs. Toutes les règles de droit étatique sont influencées d`une manière considérable. L`exemple pris par Dubout et Nabli est l`influence que subissent les actes administratifs pris par les autorités administratives au point « d'entraîner un certain « brouillage » de la catégorie même d'acte administratif dans l'ordre interne »319, il en est de même de la difficile relation qu`entretiendrait la constitution avec le droit primaire communautaire au point où la constitution devient un document d`hébergement du droit communautaire. On assistera de plus en plus à des « constitutions duales » au sein des quelles coexistent : une conception traditionnelle de la souveraineté nationale et de son exercice indivisible par les représentants du peuple et un nouveau Titre ou article de la Constitution qui soutient l'idée d'un exercice commun de compétences transférées à un ensemble plus vaste320. Le droit national de l`intégration communautaire bénéficie également d`un contrôle renforcé, une garantie dictée par la nature étatique de sa création et également une garantie supranationale par l`esprit de la règle de droit qu`est le droit communautaire. Cependant ses normes nationales traitant de l`intégration communautaire de la CEMAC posent un véritable problème lié spécifiquement à la place qu`occuperait le droit national dans la pyramide des normes de l`Etat.

B/ La place de la législation nationale de l'intégration communautaire dans l'ordre normatif interne.

La question relative à la place du droit national de l`intégration communautaire dans l`ordonnancement juridique est très importante dans la mesure où elle répond automatiquement à la problématique du rapport relationnel que devrait entretenir la loi nationale et le droit national de l`intégration communautaire (1). De plus le droit national

318 Ibid, p 1026.

319 DUBOUT (E) et NABLI (B),op cit p 1032.

320 Ibid.

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peut-il, à la lumière du droit communautaire bénéficier des principes fondamentaux du droit communautaire? (2).

1) Une place controversée au sein de la hiérarchie des normes en droit interne.

Les principes structurant le droit communautaire présentent avant tout, une idée de suprématie une volonté des concepteurs du droit communautaire de constituer un ordre juridique unique constitué de l`ordre juridique interne et de l`ordre juridique de droit communautaire. Toutefois le caractère prééminent du droit communautaire et de la constitution des Etats membres de la CEMAC soulève d`autres soucis parce que L`intégration du droit communautaire dans l`Etat pose le problème de la place de cette norme supranationale dans l`ordonnancement interne de l`Etat. Il est clair qu`un droit tirant sa matière du droit communautaire et étant l`oeuvre d`un Etat membre, nous interpelle à plus d`un titre. Parce que la matière sur laquelle l`Etat légifère est une matière qui bénéficie de certains principes liés à sa nature même de règle de droit communautaire. Le droit national de l`intégration communautaire participe également à ce « régime exorbitant de droit commun » qu`est le droit communautaire d`où la raison d`être de la question de la place du droit national de l`intégration qui se pose avec acuité. Le droit national de l`intégration n`est pas seulement un droit de l`intégration communautaire mais également d`origine national. Devrons-nous alors le placer au même degré que la loi ou bien au même niveau que le droit communautaire ? Le droit national de l`intégration communautaire bien qu`il épouse la politique communautaire n`est point l`oeuvre de l`organisation supranationale. Peut-il être considéré au même titre qu`une loi nationale parce qu`élaboré selon la même procédure qu`une loi normale ? La réponse est négative dans la mesure où même si le droit national n`est point l`oeuvre de la communauté, il comprend tout de même dans ses énoncés l`esprit communautaires qui peuvent se prévaloir de la primauté sur la loi. Car l`objectif visé par la norme nationale de l`intégration est l`harmonisation du droit communautaire et du droit national, ou bien la réception du droit communautaire dans l`ordonnancement juridique interne des Etats. Evidemment les lois nationales de l`intégration communautaire bénéficient d`une forme de prééminence321 dans l`ordre juridique interne des Etats membres bien qu`elle soit l`oeuvre des Etats membres. Le droit communautaire ou les actes dérivés des communautés ne sont point contrôlées sur la logique du respect de la constitution bien qu`elle soit réceptionnée et intégrée dans l`ordre juridique avec le concours d`une reconnaissance et

321 DUBOUT (E) et NABLI (B), op cit, p 1032.

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d`une consécration constitutionnelle. La constitution française, dans l`application de l`article 88-1, précise que les normes nationales de transposition des directives se voient, en principe, insusceptibles d'être contrôlées au regard de la Constitution322, voire à l'aune des conventions internationales qui ne feraient pas partie intégrante, directement ou non, de l'ordre juridique de l'Union323. Autrement dit « l'immunité reconnue aux dispositions internes en cause suppose dans le même temps un contrôle juridictionnel du respect par les autorités nationales de leur obligation de bonne transposition internalisée dans la Constitution »324. Au sein de l`union européenne, on peut dire qu`il y a une tentative d`abandon progressif de la hiérarchie verticale. Pour l`instauration d`une nouvelle hiérarchie qui respecte la nouvelle donne dans l`ordre juridique interne des Etats membres. On assiste donc, non plus à un conflit de norme inter systémique325, mais plus à un conflit de normes intra systémiques. Car même au sein de la CEMAC la directive nécessite pour son application sur le territoire nationale un monopole des autorités étatique pour son application. Ce fût le cas de la directive CEMAC relative au système LMD (licence master doctorat) dans les universités de l`Afrique centrale. Assistons-nous alors à une de-verticalisation de la hiérarchie des normes en droit interne.

2) Une place questionnant la pertinence des rapports verticale de la pyramide des normes.

Le rapport de force entre le droit communautaire et droit national vient mettre en surface le problème de la hiérarchie des normes qui selon Kelsen est une hiérarchie verticale ou chaque norme tient une place dans la pyramide des normes et ou les normes inferieures tirent leur validité de la norme fondamentale. Se basant sur la pureté (Reinheit) de la norme juridique, c`est-à-dire une norme dégagée de toute considération sociale et économique, l`analyse des normes selon KELSEN repose sur « une exigence de non contradiction, située au plan abstrait de la valeur, et non à celui, concret, des faits empiriques. C'est-à-dire, Il importe peu de savoir si les individus appliquent ou non les règles de droit dans la réalité ; les violations de la loi, en tant que telles, sont impuissantes à fonder une valeur générale, même si telle est la volonté de leurs auteurs »326. Ceci dit une étude des normes doit se réaliser sans appréciation de leur contenu. « La théorie kelsénienne ne

322 Ibid.

323 CE, sect., 10 avril 2008, conseil national des barreaux et autres, req n° 312553, Lebon, AJDA 2008.

324 DUBOUT (E) et NABLI (B), « L'émergence d'un droit français de l'intégration européenne », op cit, p 1024.

325 C`est-à-dire entre les systèmes.

326 PINA (S), « La connaissance pure du droit et ses limites,
WWW.droitconstitutionnel.org/congrésmtp/textes4/PINA.4.pdf , VIe congres de l`AFDC, Montpellier, 9, 10, 11 juin 2005, Atelier N°4, quels outils théoriques pour comprendre le droit ?

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s'intéresse qu'au fondement de la validité de l'ordre juridique, lequel repose sur une norme suprême fondamentale. La seule question demeure celle de la compatibilité des normes entre elles, de leur fondement de validité dans la norme supérieure »327. Conformément à sa conception, le droit en tant qu`ensemble de normes ne peut pas trouver de fondement en dehors du droit. En gros la nécessité d`une pyramide normative328 est obligatoire pour Hans KELSEN. Et cette pyramide normative se fonde sur une norme fondamentale qui assure la pureté de la norme. Cependant la pureté, dans un contexte de mondialisation, est une utopie caractérisée parce que le mode d`émergence des normes est dorénavant conditionné par les espaces d`échange et de commerce plus grand que les Etats. D`où la naissance des marchés communs structurés autour d`une organisation supranationale. La pureté de la norme est de plus en plus relative, par les regroupements étatiques et également par l`existence dans la société internationale d`un critérium de règles de droit qui s`appui sur le respect et la garantie des droits de l`homme. La consécration de l`écran constitutionnel et sa confirmation dans la matière communautaire329 révèlent un conflit dont l`enjeu est l`ordonnancement des normes, une lutte des fondements de validité de l`ordre juridique. Une lutte des normes fondamentales « d'un côté, la Constitution nationale doit préserver sa position centrale de source ultime de la validité juridique. De l'autre, le droit communautaire originaire doit dominer l'ordre juridique sans obstacle possible330. De ce fait, la Constitution est en mesure de priver le droit communautaire de ses effets et le droit communautaire est susceptible de condamner un Etat du fait de sa Constitution »331. La norme fondamentale est le fruit de la conceptualisation d`une science du droit, c`est-à-dire de la conviction que la Constitution est la dernière norme formelle du système juridique hiérarchisé, la science du droit ne devant pas chercher ses éléments d`analyse en dehors de la pure sphère normative332. Le rapport et la logique kelsenienne des normes sont remis en cause. Le droit communautaire étant à lui même un système univoque structuré, cohérent selon la conception du grand maître autrichien, elle rencontre une véritable résistance dans l`ordre juridique interne symétrique à lui. Il y a lieu de concevoir une nouvelle approche de l`unité de l`ordre juridique interne intégrant le droit

327 Ibid.

328 Ibid. p 10.

329 CE, 3decembre 2001, SNIP, Rec. P 624 ; CE, 30 juillet 2003, assoc. Avenir de la langue française, Europe, 2004, comm. P 30. Cité par FAVRE (J), « Le juriste entre pathologie de la normalisation et normalité du pathologie : le cas des conflits de normes fondamentales, VIe congrès de l`AFDC, Montpellier, 9 ;10 ;11 juin 2005, Atelier N°4 : quels outils théoriques pour comprendre le droit ?

330 CJCE, 5 février 1963, VAN GEND EN LOOS c/ administration fiscale, Aff. 26/62, Rec. P 1. 15 Juillet 1964 COSTA c/ ENEL, Aff. 6/64, Rec. P 1141.

331 FAVRE (J), « Le juriste entre pathologie de la normalisation et normalité de la pathologie : le cas des conflits des normes fondamentales », op cit, p1.

332 PINA (S), « La connaissance pure du droit et ses limites », op cit, p 11.

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communautaire tirant sa substance de la force contraignante du droit de la CEMAC et des rapports qu`entretient les ordres juridiques nationaux et communautaire.

Dans la conception de la hiérarchie des normes en droit interne que nous mettons en exergue, l`unité de l`ordre juridique interne entretien une double hiérarchisation normative qui ne dédouble pas cet ordre juridique ; tout au contraire l`unité est plus consolidée et plus cohérente dans l`association d`une hiérarchisation qui soit autant verticale que horizontale de l`ordre interne. La hiérarchisation horizontale l`est au niveau de la norme fondamentale nationale et du droit primaire, en ce sens où, aucune des deux normes ne peut se prévaloir d`exercer un contrôle de conformité sur l`autre. La constitution intègre les normes primaires communautaires en garantissant leurs principes fondamentaux vis-à-vis des normes inferieures, et également en organisant l`intégration et le contrôle de la conformité des normes inferieures à la norme primaire communautaire. Il s`agit d`une hiérarchisation de courtoisie. La constitution nationale dans cette hypothèse garde son autorité sur les normes de droit interne en acceptant perdre son contrôle sur les normes de l`intégration d`origine nationale ou communautaire. Le sommet de la pyramide est toujours occupé par la constitution nationale jouant ainsi un double rôle : celui de norme fondamentale nationale et communautaire. Les normes inferieures doivent respecter une hiérarchie verticale à double validité c`est-à-dire autant elles doivent être conformes aux dispositions et principes constitutionnels, qu`elles se doivent également de respecter le droit primaire communautaire. Le contrôle de conformité a la norme fondamentale mettant plus l`accent au respect du droit communautaire sous peine de faire engager la responsabilité de l`Etat.

SECTION 2 : L'HYPOTHESE DE LA VIOLATION DE LA NORME COMMUNAUTAIRE: LA RESPONSABILITE DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC.

Pris à la lettre, l`article 4 du traité révisé CEMAC stipule que : « Les Etats membres apportent leur concours à la réalisation des objectifs de la Communauté en adoptant toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l'exécution des obligations découlant du présent Traité. A cet effet, ils s'abstiennent de prendre toute mesure susceptible de faire obstacle à l'application du présent Traité et des Actes pris pour son application. En cas de manquement par un Etat aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire, la Cour de Justice peut être saisie en vue de prononcer les sanctions dont le régime sera défini par des textes spécifiques ». L`objectif de sécurité juridique

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recherché par la CEMAC impose une structuration de la sanction en cas de violation de la règle de droit communautaire par le mécanisme de mise en oeuvre de la responsabilité de l`Etat membre défaillant (paragraphe I). En vertu du principe d`applicabilité immédiate et de l`effet direct du droit communautaire de la CEMAC, les juges nationaux sont appelés à connaitre des litiges ayant trait aux actes communautaire une fois que ceux entrent effectivement en vigueur dans l`ordre juridique interne, sans attendre une quelconque intervention de l`Etat, le juge national exerçant de ce fait l`office du juge communautaire (paragraphe II).

PARAGRAPHE 1 : Les hypothèses de mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat membre de la CEMAC.

Le droit de la CEMAC étant contraignant et impératif selon les termes de l`article 44 du traité CEMAC333 en vigueur, impose une obligation de respect de ce droit par les Etats membres, du seul fait de leur appartenance à la communauté et prévoit en cas de besoin de garantir la sécurité juridique communautaire, un régime de sanction de la violation du droit communautaire. Ce régime met en exergue, les normes susceptibles d`entrainer la responsabilité de l`Etat membre (A) et également les autorités potentiellement à l` origine de la violation du droit communautaire (B).

A/ Les normes communautaires susceptibles de mettre en oeuvre la responsabilité de l'Etat membre de la CEMAC en cas de violation.

Toute norme communautaire non respectée, pas appliquée ou violé par des particuliers ou par un Etat, est susceptible d`entrainer la responsabilité de celui qui est à l`origine de cette entrave. Le droit communautaire ne met pas un accent particulier sur une norme communautaire précise. Par conséquent, autant la violation des dispositions du droit communautaire primaire et dérivée (1) est sanctionnée par les juridictions de droit commun, autant les principes inhérents à la construction communautaire sont également protégés par les juridictions (2).

333 L`article 44 du traité révisé de la CEMAC stipule « Sous réserve des dispositions de l'article 43 du présent traité, les actes adoptés par les Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la Communauté pour la réalisation des objectifs du présent Traité sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure »

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1) La violation des dispositions du droit communautaire primaire et dérivé.

L`obligation de réparer les conséquences dommageables d`une violation étatique du droit communautaire découle directement du principe de primauté du droit communautaire tel que stipulé par l`article 44 du traité CEMAC en vigueur334. En effet l`exception de refuser la réparation liée aux conséquences relatives à la violation du droit communautaire n`est plus possible dans la mesure où la majorité des Etats ont consacré dans leurs lois fondamentales le principe de primauté en reconnaissant constitutionnellement le droit communautaire. Une consécration qui impliqua immédiatement la primauté du droit communautaire sur les réglementations et lois nationales. le principe de primauté dont découle le droit à réparation des violations étatiques du droit communautaire s`applique non seulement lorsque la norme communautaire en cause est une disposition des traités, mais aussi lorsqu`elle constitue un simple acte de droit dérivé, qu`il s`agisse d`un règlement. Car l`article 44 ne fait pas une distinction particulière sur la norme mise en cause, elle parle d` « actes adoptés par les institutions, organes et institutions spécialisés de la communauté ». Ceci revient à ne distinguer aucune norme de droit communautaire lors de la violation. Il n`est en revanche pas exclu que le juge de droit commun refuse d`engager la responsabilité de l`État au titre de violation d`actes communautaires innommés ou «hors nomenclature». Il s`agit en effet d`actes dont l`adoption n`est pas expressément prévue par l`article 40 du traité révisé CEMAC335. La question que l`on peut se poser est de savoir si la responsabilité de l`Etat peut être engagée pour la violation des dispositions communautaires comprises dans la constitution nationale ou du fait de la violation des lois nationales de l`intégration communautaire ? Si l`on s`inspire de la jurisprudence européenne, la réponse en principe devrait être affirmative « puisque le principe de primauté du droit communautaire, tel qu'interprété par la Cour de justice[européenne], s'exerce à l'encontre de toutes les normes nationales, même de nature constitutionnelle »336. En d`autres termes toute règle de nature communautaire ou nationale

334 Ibid.

335 Article 40 du traité révisé CEMAC stipule que « Pour l'application du présent Traité et sauf dérogations prévues par celui-ci ou par des dispositions particulières contenues dans les Conventions de l'UEAC et de l'UMAC :

- la Conférence des Chefs d'Etat adopte des actes additionnels au Traité et prend des décisions ;

- le Conseil des Ministres et le Comité Ministériel adoptent des règlements, règlements cadres, des directives, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des avis ;

- les premiers responsables des Institutions, Organes et Institutions Spécialisées de la Communauté arrêtent des règlements d'application, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des avis ».

336 Voir CJCE ord. , 22 juin 1965, San Michèle c/ Haute autorité, Aff. 9/65, Rec. 1967.35. Voir egal. CJCE, 11 juin 1991, commission c/ France, Aff. C.307/89, Rec. I.2903, dans lequel la cour de justice, a dénié à la France le droit d`invoquer ses règles constitutionnelles pour justifier ses manquements aux obligations communautaires.

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traitant dans sa lettre du droit communautaire bénéficie de l`exigence de la primauté de ce droit. Il semble donc logique d`admettre que le juge national juge du droit commun du droit communautaire soit habilité à engager la responsabilité de l`État pour toutes les violations du droit communautaire imputables à ce dernier, y compris celles qui résulteraient d`une norme constitutionnelle interne337.

2) La violation de l'esprit et des principes communautaires.

La question qui se pose est celle de savoir si les principes et l`esprit communautaire tels qu`énoncés par le traité de la CEMAC en vigueur, sont, comme ceux des dispositions du droit originaire ou dérivé, susceptibles d`engager la responsabilité de l`État membre de la CEMAC? La question mérite d`être élucidée parce que les principes en questions sont consacrés et défendus par les traités instituant la CEMAC. Son traité révisé reconnaît les « principes de démocratie, des droits de l'Homme, de l'Etat de droit, de la bonne gouvernance, du dialogue social et des questions de genre » la reconnaissance par le traité révisé de la CEMAC de ces principes impliquerait pour les juridictions de contrôler leur respect et de sanctionner leurs violations. Par conséquent, la reconnaissance par la constitution du droit communautaire implique également la reconnaissance et le respect des principes énoncés par le traité révisé de la CEMAC. Cela augure une possibilité d`engager la responsabilité de l`Etat membre pour violation des principes de droit communautaire. Il faut relever que le juge administratif français d`appel de bordeaux semble avoir admis l`obligation pour les autorités administratives françaises, « de respecter les principes généraux du droit dégagés par la Cour de justice, tout au moins lorsqu'elles interviennent dans une matière relevant de la compétence communautaire »338. Il faut dire, que dans le cas de la CEMAC, les principes généraux de son droit communautaire sont consubstantiels a son traité révisé habilité et intégré par la constitution dans le droit interne, De sorte que leur violation par l`État membre de la CEMAC est susceptible d`être sanctionnée comme celle d`une disposition du Traité de la CEMAC lui-même.

De ce qui précède, quels sont les auteurs de la violation du droit communautaire entrainant la responsabilité de l`Etat membre de la CEMAC ?

Voir a cet effet HINDRE-GUEGUEN (M), « Responsabilité (des Etats membres) », rep. Communautaire,

Dalloz, aout 2006, p 18.

337 Ibid.

338 HINDRE-GUEGUEN (M), « Responsabilité (des Etats membres) », op cit, p 18.

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B/ Les auteurs de la violation du droit communautaire susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat membre de la CEMAC.

Il faut signifier que les principes d`applicabilité immédiate et d`effet direct de la règle de droit communautaire exposent certaines institutions républicaines dans le viseur du juge de droit commun du droit communautaire en cas de violation. Il s`agit particulièrement, dans le contexte de la CEMAC, du pouvoir exécutif (1) et des juridictions nationales (2) des Etats membres.

1) La violation du droit communautaire imputable au pouvoir exécutif des Etats membres de la CEMAC.

Cette violation peut être vue sur le terrain de l`illégalité des actes pris par le pouvoir exécutif c`est-à-dire que les autorités exécutives chargées de prendre des actes exécutifs, en prennent des mesures qui ne respectent pas le droit communautaire en vigueur. Dans ce cas, le juge administratif national dans son rôle de juge de droit commun du droit communautaire, est dans l`obligation de réparer cette violation du droit communautaire par le pouvoir exécutif. La remarque faite, il faut établir quel type de responsabilité peut engager la procédure en réparation pour cause de violation du droit communautaire. Il faut dire que la CEMAC laisse généralement le libre choix aux Etats membres d`établir le mode de responsabilité qui peut engager la faute de l`Etat membre de la CEMAC. Toutefois le mécanisme d`établissement de la responsabilité de l`Etat membre pour cause de violation du droit communautaire par un acte illégal ne doit pas lui même soustraire le justiciable de ses droits.

La CEMAC étant en majorité formée des Etats de culture juridique francophone, la majorité de ses Etats reconnaissait dans la procédure judiciaire administrative la responsabilité pour faute. De ce fait pour établir la responsabilité de l`Etat pour cause d`acte illégal violant le droit communautaire, l`on doit se référer au mécanisme de responsabilité pour faute en droit administratif. On distingue dans la responsabilité pour faute en droit administratif, la responsabilité pour faute de service et pour faute personnelle. En générale en droit administratif toute illégalité d`une mesure administrative est présumée constituer une faute de personnelle. Ainsi, même la responsabilité de l`administration peut être engagée lorsqu`elle omet de modifier une réglementation devenue incompatible avec le droit communautaire. Faut-il aussi signaler que, l`absence de mesures administratives de transposition d`une directive pourrait d`ailleurs être assimilée au défaut d`adoption d`actes

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réglementaires d`exécution d`une loi interne, une situation qui constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l`État. Si, aujourd`hui, le principe de la responsabilité de l`État du fait d`une violation du droit communautaire commise par le pouvoir réglementaire ne fait aucun doute dans la théorie de droit communautaire européen, il n`en demeure pas moins que cette responsabilité trouvera bien plus qu`en droit interne une difficulté majeure au sein de la CEMAC, du fait la protection de l`autorité de l`Etat par les juges nationaux qui doivent généralement leur carrière à ce pouvoir exécutif. L`autre difficulté étant la rigueur ou la sévérité qui caractérise l`appréciation du juge administratif lorsqu`il veille au respect de principes procéduraux tels que celui de la distinction des contentieux ou qu`il détermine le montant du préjudice indemnisable, voire encore lorsqu`il vérifie l`existence du lien de causalité direct entre la faute et le préjudice allégué339. Toutefois on peut se poser la question de savoir si le dédommagement des préjudices causés par la violation du droit communautaire peut amener le juge à accorder des réparations plus onéreuses que celles issue du droit interne ? Une réponse affirmative nous fera aboutir à la création d`un « régime dual de responsabilité au sein des Etats membres, selon que la faute résulte ou non d'une violation du droit communautaire »340.

2) La violation du droit communautaire CEMAC du fait des juridictions nationales et du législateur.

Cela peut être perçu comme un tabou en droit interne dans la mesure où les juridictions nationales manifestent dans leur exercice la souveraineté nationale. Car les juges nationaux rendent la justice au nom du peuple, véritable propriétaire de la souveraineté de l`Etat. La réalité est tout autre parce qu`il s`agit ici de la mise en oeuvre de la responsabilité de l`Etat du fait des activités judiciaires. Certes elle est très théorique comme la mise en oeuvre même de la responsabilité de l`Etat membre en droit communautaire CEMAC. Il faut dire que la réparation des dommages qu`entraînent les faits judiciaires incombe au juge administratif ou au juge judiciaire, selon que le service public en cause est celui de la justice administrative ou de la justice judiciaire. Ainsi compte tenu de l`autonomie juridictionnelle des États membres qui a été affirmée par le droit communautaire pour la mise en oeuvre des règles et de la réparation des préjudices, c`est au regard de ces règles que pourra, le cas échéant, être retenue la responsabilité de l`État en raison des violations du droit communautaire qui seraient

339 HINDE-GUEGUEN, « Responsabilité (Etat membre) », op cit, p 21.

340 Ibid. p 21.

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commises par une juridiction, quelle que soit, y compris les juridictions suprêmes341. La responsabilité de l`État peut être engagée du fait du fonctionnement défectueux du service public de la justice suite par exemple au principe de durée raisonnable de la procédure. C`est dans cette perspective que le Conseil d`État français retiendra que « les justiciables ont droit à ce que leurs requêtes soient jugées dans un délai raisonnable [...] si la méconnaissance de cette obligation est sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure, les justiciables doivent néanmoins pouvoir en faire assurer le respect ; qu'ainsi lorsque la méconnaissance du droit à un délai raisonnable leur a causé un préjudice, ils peuvent obtenir la réparation du dommage ainsi causé par le fonctionnement défectueux de la justice »342. On remarque que le conseil d`Etat français considère le fonctionnement défectueux de la justice comme une responsabilité pour faute et ne fait nullement référence à la responsabilité sans faute entrainant deux régimes de responsabilité du fait de la justice, l`un subordonné à la démonstration de l`existence d`un refus d`appliquer par exemple le droit communautaire et l`autre fondé sur la violation, par les juridictions des principes de procédure de justice. En droit de l`union européenne, la cour de justice a affirmé un « principe de responsabilité des États membres du fait des violations du droit communautaire commises par les juridictions suprêmes nationales »343. Néanmoins l`application en droit interne de ce principe risque de ne pas se faire sans quelques difficultés que ce soit dans l`union européenne ou au sein de la CEMAC. La véritable difficulté est que la responsabilité ne peut, en vertu du principe de l`autorité de la chose jugée, être engagée lorsque la faute alléguée résulte du contenu même d`une décision de justice devenue définitive. Au niveau de l`union européenne la cour de justice a déjà évacué cet argument « visant à contester le principe de la responsabilité de l'État de ce fait au motif qu'il aurait pour effet de remettre en cause le principe de l'autorité de la chose jugée ». Ainsi avec l` appartenance à la communauté d`intégration de l`Etat, l`autorité de la chose jugée est remise en cause avec le principes de primauté qui implique également la reconnaissance de la justice communautaire comme dernière étape d`appel en cas d`insatisfaction de la décision rendu dans les juridictions nationales qu`elles soient de dernier ressort. En d`autre termes, les juridictions suprêmes des Etats membres de la CEMAC ne bénéficient plus de l`autorité de la chose jugée lors de l`adhésion de l`Etat à la CEMAC, entrainant ipso facto la reconnaissance de la cour de justice de la CEMAC. A la lumière de la conception européenne, on s`interroge sur la pérennité de la

341 Ibid.

342 CJCE, 9 mars 1978, administration des finances de l'Etats c/ SIMMENTHAL, Aff 106/77, Rec., I.629 p 31.

343 Ibid.

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cour de justice de la CEMAC qui trouve actuellement la difficulté à se faire une place au sein des organes judiciaires nationaux. En effet, la Cour de justice européenne, en rappelant que l`applicabilité directe du droit communautaire concerne également tout juge qui a, en tant qu`organe d`un État membre, pour mission de protéger les droits conférés aux particuliers par le droit communautaire, a de longue date, dans un arrêt SIMMENTHAL du 9 mars 1978344, affirmé que le juge national « chargé d'appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit communautaire, a l'obligation d'assurer le plein effet de ces normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à attendre l'élimination préalable de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel »345. En application de ces principes de la cour de justice de l`union européenne, il pourrait être soutenu que le juge national, à qui s`impose l`intégralité du droit communautaire en sa qualité d`organe national de l`Etat membre, est tenu d`appliquer la jurisprudence de la juridiction communautaire ou les dispositions du droit communautaire originaire et dérivé, à défaut, la violation de cette obligation pourrait être la source d`une action en responsabilité de l`État membre. Dès lors, peut-on à la suite de ce qui a été dit, affirmer de la réalité ou de la potentialité de l`office du juge nationale ?

PARAGRAPHE II : L'office réel ou potentiel du juge national en matière de violation du droit communautaire.

Il est souvent considéré que les juges qui appliquent le droit communautaire sont principalement -- sinon exclusivement -- ceux qui siègent au sein des juridictions communautaires, à savoir les membres de la cour de justice de la CEMAC. Toutefois dans son rôle de contrôle, et d`assurer le respect du système juridique communautaire, la Cour joue à cet égard le rôle de juridiction suprême dans l`interprétation et l`application des règles de l`ordre juridique communautaire. C`est donc une « responsabilité communautaire » du juge national que d`exprimer le plus clairement la notion d`invocation du droit communautaire parce qu`il est juge communautaire (A). L`office communautaire du juge national connait toutefois quelques difficultés au sein de la CEMAC, cela augure un caractère potentiel de l`office du juge national en matière de violation du droit communautaire (B).

344 Ibid.

345 Voir l`article 44 du traité révisé CEMAC de 2009 à Libreville au Gabon.

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A/ Le juge national : juge de droit commun de l'ordre juridique communautaire CEMAC.

L`office communautaire du juge national revient à lui reconnaître la capacité de sanctionner les violations du droit communautaire au niveau étatique. C`est ce que l`on appelle l`invocation du droit communautaire devant le juge national (1). Cependant au cas où il n`existe pas de législation communautaire à cet effet, l`office communautaire du juge national est exercé dans le cadre de ses règles nationales de procédure, en vertu d`un principe d`autonomie procédurale. Il faut toutefois mettre en lumière comment le droit communautaire CEMAC encadre cette autonomie (2) en obligeant le juge national à assurer l`effet utile du droit communautaire et, plus largement, une protection juridictionnelle effective des droits que les justiciables tirent du droit communautaire.

1) L'invocation du droit communautaire devant le juge national.

Invoquer le droit communautaire devant le juge national revient à confier à ce dernier la sanction du droit communautaire, en tant que juge de droit commun de l`ordre juridique communautaire CEMAC. C`est bien à ce titre que les justiciables peuvent faire valoir, devant le juge national, les droits que cet ordre juridique leur confère. Au-delà de sa primauté en droit interne, le droit communautaire doit se voir reconnaître une véritable effectivité. Et celle-ci ne se vérifie pas nécessairement par le prisme de l`effet direct, mais en termes d`invocation, la pierre angulaire de l`effectivité du droit. L`invocabilité du droit communautaire revêt plusieurs formes : « le juge national est tenu d'appliquer le droit communautaire (invocabilité d'application); le juge national doit écarter toute législation nationale contraire au droit communautaire (invocabilité d'exclusion) ; le juge national a l'obligation d'interpréter le droit national conformément au droit communautaire (invocabilité d'interprétation) ; le juge national peut, le cas échéant, condamner un État à réparer les dommages qui résulteraient d'une violation du droit communautaire (invocabilité de réparation) »346. Qu`implique véritablement l`invocabilité pour le justiciable devant une juridiction nationale ? L`invocabilité démontre véritablement l`appartenance de l`Etat et en particulier des nationaux, à un environnement juridique bien plus grand que celui étatique. De fait les juridictions nationales sont dans l`obligation d`écarter les législations nationales pour appliquer le droit d`origine communautaire. Au-delà de l`invocabilité d`application, d`exclusion et d`interprétation, il est évident toutefois que la manifestation indéniablement la

346 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit.

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plus patente de l`invocabilité du droit communautaire ressort de la responsabilité des États membres pour violation de ce droit. Selon une jurisprudence européenne désormais constante, les particuliers lésés par une violation du droit communautaire de la part d`un État membre ont droit à réparation dès lors que la règle de droit communautaire en cause a pour objet de leur conférer des droits, que la violation est suffisamment caractérisée et qu`il existe un lien de causalité direct entre cette violation et le préjudice subi par les particuliers347.

2) L'encadrement communautaire des règles nationales de procédures.

Le droit du procès -- devant les juridictions nationales -- relève de la compétence des États membres. Ainsi l`organisation juridictionnelle qu`elle soit judiciaire, des comptes ou administrative est régie par le droit interne des Etats membres en vertu de ce que l`on appelle l`autonomie procédurale. Loin du cas européen, où certains textes introduisent directement ou indirectement, de nouvelles procédures, au niveau des États membres, dans le procès civil, commercial348 ou pénal349, au sein de la CEMAC la mise en oeuvre du droit communautaire, devant le juge national, relève du droit national, en application du principe dit de « l'autonomie procédurale »350. Dans le contexte européen et même au sein de la CEMAC, le principe est que les traités n`imposent pas une organisation constitutionnelle, administrative ou juridictionnelle aux États membres, car le soin d`assurer la protection juridique découlant, pour les justiciables, de l`effet direct du droit communautaire est attribué au juge national en application du principe de coopération. Il revient donc pour l`intégration et l`application des dispositions du droit communautaire originaire et dérivé que l`Etat définisse les procédures à suivre dans les juridictions nationales, à savoir les juridictions compétentes et les règles et modalités de sanction des violations pour sauvegarder les droits des justiciables que protège le droit communautaire. Ainsi, les États membres demeurent libres de structurer comme ils l`entendent leur système juridictionnel et de déterminer la compétence interne de leurs juridictions pour les différends dans lesquels interviennent des droits conférés aux justiciables par le droit communautaire. Il s`agit d`une reconnaissance de l`autonomie d`organisation juridictionnelle. Au-delà de l`autonomie

347 Voir arrêt 5 mars 1996, brasserie du pécheur et factortame, C-46/93 et C-48/93, Rec. I-1029.

348 Voir règlement (CE) N°1896/2006 du parlement européen et du conseil du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d`injonction de payer (JO L 399, P.1), et règlement (CE) N°861/2007 du parlement européen et du conseil du 11 juillet 2007, instituant une procédure européenne de règlement de petits litiges (JO L 199, P.1)

349 Voir décision du conseil du 15 mars 2001, relative au statut des victimes dans le cadre de procédure pénale (JO L 82, P.1).

350 LE BAULT-FERRARESE (B), « La communauté européenne et l'autonomie institutionnelle et procédurale des Etats membres », thèse de doctorat, université de Lyon 3, 1996.

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d`organisation, il y a également autonomie des procédures : ce sont les voies de droit prévues en droit interne qui permettent la mise en oeuvre du droit communautaire devant les juridictions nationales, y compris les règles relatives aux délais, à la charge de la preuve, aux dépens. Par conséquent, afin que le droit processuel des États membres ne remette pas en cause la primauté et l`effet direct du droit communautaire, le principe de l`autonomie procédurale est nécessairement encadré, l`exercice de l`autonomie procédurale des États membres doit, en effet, satisfaire aux exigences d`équivalence et d`effectivité. Le principe d`équivalence exige que, pour les recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit communautaire, l`application de la loi de procédure nationale se fasse de façon non discriminatoire par rapport aux procédures visant à trancher des litiges du même type, mais fondées sur du droit purement national. Ce principe participe également à l`effectivité du droit communautaire dans l`Etat. Ainsi par exemple, les délais pour intenter une action en vue de faire valoir des droits tirés du droit communautaire ne sauraient-ils pas être plus courts que ceux d`actions intentées en vue de faire valoir des droits tirés du droit national. Le principe d`équivalence sanctionne les discriminations processuelles, c`est-à-dire les inégalités de traitement, sur un plan procédural, des situations communautaires et internes. Il n`en reste pas moins que le respect du principe d`équivalence ne saurait suffire pour garantir une protection juridictionnelle effective des droits que les justiciables tirent du droit communautaire. Les règles de procédure nationales doivent être conformes au principe d`effectivité du droit communautaire et le juge national doit ignorer, comme incompatible avec les exigences inhérentes à la nature même du droit communautaire, toute disposition nationale qui aurait pour effet de diminuer l`efficacité du droit communautaire par le fait de refuser au juge compétent, pour appliquer ce droit, le pouvoir de faire, au moment même de cette application, tout ce qui est nécessaire pour écarter les dispositions législatives nationales formant éventuellement obstacles à la pleine efficacité des normes communautaires351. Le principe de protection juridictionnelle effective requiert que la juridiction nationale puisse néanmoins octroyer les mesures provisoires nécessaires pour assurer le respect des droits des justiciables. Cependant au sein de la CEMAC l`office du juge national, juge de droit commun de l`ordre juridique communautaire rencontre de nombreuses difficultés dans sa mise en oeuvre. L`on pourrait même dire que l`office du juge sus-évoqué n`est que potentiel à la lumière des difficultés constatées dans la prise en compte du droit communautaire dans la CEMAC.

351 Voir arrêt SIMMENTHAL, op cit.

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B/ Le caractère potentiel de l'office du juge national en matière de droit communautaire.

L`une des raisons de la révision du traité de la CEMAC de 1994 a été le manque d`appropriation du projet intégratif par les Etats membres de la CEMAC. Poussant ainsi la régression du droit communautaire et du coup réduisant l`office du juge communautaire à une fonction potentielle. Ainsi le manque d`appropriation du projet Communauté par les Etats Membres se traduit, au niveau national par un relais institutionnel insuffisant pour traiter des questions communautaires. Les raisons principales au niveau de l`office du juge national juge de droit commun de l`ordre juridique communautaire sont, le caractère facultatif lié à l`application du droit communautaire par le juge national (1), et au niveau des justiciables, on mettra en exergue l`ignorance ou la méconnaissance de la législation communautaire (2).

1) le caractère facultatif lié à l'application du droit communautaire par le juge national.

Le procès communautaire au sein des juridictions nationales est différent du procès national, parce qu`il fait intervenir la nécessité de l`application du droit communautaire. Les exigences de la primauté obligent les juges à appliquer le droit issu de la CEMAC. Cependant, Les juges nationaux peuvent contourner les exigences communautaires en refusant d`appliquer le droit communautaire par simple mépris des lois issues des communautés intégratives ou par confusion du droit communautaire au droit international ou par simple ignorance ou par mauvaise foi. L`application du droit communautaire est ainsi mal menée par les juges nationaux ; bien que cela n`augure rien de positif pour l`effectivité du droit communautaire. Pour remédier à cela le législateur communautaire à donc imaginé une procédure de contrôle de l`activité des juges nationaux pour rendre l`application du droit communautaire uniforme dans tous les Etats membres de la CEMAC, à savoir le mécanisme de renvoi préjudiciel. Ce mécanisme qui limite l`autonomie de procédure des Etats membres, tient à la nécessaire application uniforme du droit communautaire par les juges nationaux. Il faut dire que l`efficience du droit commun serait compromise, si son interprétation était intégralement abandonnée aux juges nationaux. A la différence de sa réussite dans le contexte européen, l`exemple communautaire centrafricain est plus complexe parce qu`on ne peut valider l`importance d`un mécanisme s`il n`est pas appliqué pas les juridictions nationales. Il faut dire que pour aborder scientifiquement l`abandon de l`application du droit

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communautaire par les juges nationaux, nous devrions analyser les décisions de justice des différentes juridictions des Etats membres de la CEMAC pour comprendre les raisons de l`absence d`application du droit communautaire. Mais nous butons sur une difficulté particulière liée à toute recherche scientifique c`est-à-dire les moyens et le temps à notre disposition sont insuffisants. Mais les quelques éléments que nous avons à notre dispositions nous permettent de dire que l`autonomie procédurale de chaque Etat membre de la CEMAC créée une difficulté à engager la responsabilité de l`Etat membre et encourage le phénomène de non application du droit communautaire par les juridictions nationales. L`autre élément qui rend l`office du juge national en matière de droit communautaire potentiel est l`ignorance des règles de droit communautaire par les protagonistes.

2) L'ignorance de la règle de droit communautaire par les acteurs de la justice.

La société centrafricaine n`a eu cesse de considérer le projet intégratif et le droit y relatif comme « le droit d'une technocratie opaque ou d'une classe savante »352. Cela du coup a été accentué par le manque de publicité de la règle de droit communautaire. Bien que la mise en place de juridiction supranationale centralise davantage le rôle du juge interne, il lui est reconnu plus qu`a n`importe qu`elle autorité de faire introduire le droit communautaire dans la sphère interne, l`on ne doit point négliger l`ignorance même, par les acteurs de la justice, du droit communautaire lui même. Le juges ne peut donc pas appliquer dans ses décisions le droit communautaire si les justiciable n`en font pas référence dans les demandes de réparation, parce qu`étant peu enclin à la connaissance du droit communautaire. Jadis dans la formation du magistrat, il n`était nullement mis en exergue la prise en compte prioritaire du droit communautaire dans la prise des décisions judiciaires. De nos jours la nouvelle génération des auditeurs de justice des Etats membres de la CEMAC est imprégnée à l`intégration régionale et surtout au contentieux OHADA. Pourquoi donc une faible activité judiciaire des juridictions nationales en ce qui concerne le droit communautaire ? La réponse est à chercher au niveau également des justiciables et des avocats qui interviennent dans les procédures judiciaires. On peut invoquer l`analphabétisme, l`inculture et « la crainte révérencielle de l'Etat ou de toute forme d'autorité qui symbolisent le pouvoir et devant lesquels il faut se plier à tout prix »353. Quelque fois même c`est le coût des procédures (d`enquête et d`ouverture du dossier) qui est à l`origine. Les frais de déplacement à

352 Voir KENFACK (J), « Le juge camerounais à l'épreuve de l'intégration économique », OHADATA D-08-012005, p 1.

353 TCHUINTE (J), « L'application effective du droit communautaire en Afrique centrale », thèse de doctorat en droit public, op cit, p 419.

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N`djamena ne sont pas à la bourse de tout les justiciables et également les frais pour s`attacher les services d`un avocat. Et même les avocats constituent également un frein du droit communautaire. Il faut signaler que la majorité des affaires transmis aux juridictions sont jugées irrecevables par les juridictions nationales. De toute évidence la formation d`avocat en Afrique centrale est limitée en ce qui concerne le droit communautaire et ses exigences. A remarquer qu`au Cameroun par exemple la formation est au niveau master 1 en droit, ceci après un bref stage au sein d`un cabinet d`avocat. Et aucune formation n`est prévue après l`admission au barreau.

CONCLUSION DU TROISIEME CHAPITRE.

En somme il faut retenir que autant les normes nationales sont influencées dans leur matière autant tout l`ordonnancement juridique des Etats est dans l`obligation d`intégrer le droit communautaire dans leurs différents rapports et relations. Ceci entrainant une remise en question de la hiérarchie des normes existantes avant l`adhésion des Etats dans la CEMAC. Cet impact transformateur implique des conséquences pour les Etats, à savoir premièrement, le risque d`engager la responsabilité de l`Etat membre en cas de violations du droit communautaire par n`importe quel organe national de l`Etat, deuxièmement, la modification de l`office du juge national qui devient immédiatement juge de droit commun de l`ordre juridique communautaire. Toutefois, l`office du juge national dans cet exercice demeure malgré tout insuffisant dans le cas de la CEMAC, c`est-à-dire une fonction potentielle pour le juge national dans le cadre de l`évolution de ce droit. Mais l`effet contraignant du processus communautaire ne s`arrêt pas qu`aux normes, il va plus loin, au point de toucher les institutions étatiques.

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CHAPITRE 4 : LES IMPLICATIONS INSTITUTIONNELLES DE LA QUALITE DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR L'ETAT SOUVERAIN.

Dans l`objectif de respecter leurs engagements et obligations liés à leur appartenance, à la CEMAC, les Etats se doivent de prendre toutes mesures nécessaires générales ou personnelles relative à l`exécution des obligations inhérentes au traité de la CEMAC. C`est ce que stipule l`article 44 du traité révisé CEMAC, qui impose aux Etats membres une obligation d`atteindre l`objectif du traité au détriment de la législation nationale. Guy ISAAC et Marc BLANQUET le souligne également lorsqu`il affirme que : « la collaboration de l'État membre à l'application du droit communautaire prend des formes et des dimensions variables : son appareil administratif est mis à la disposition des Communautés pour l'exécution de leurs décisions, sa force publique et son organisation judiciaire en assurent le respect, au besoin par la contrainte... »354. Ainsi donc, l`application du droit communautaire n`impliquerait pas uniquement la réception normative dans l`ordre juridique interne, avec toutes les conséquences que cela a pu entrainer, mais aussi pour les Etats membres de préparer ou bien d`adapter les institutions nationales autant qu`ils le peuvent, tant sur le plan organisationnel que fonctionnel, dans le but d`atteindre les résultats, les objectifs envisagés et fixés par le traité constitutif de la CEMAC. Cela nous permet, de s`interroger sur l`incidence de la CEMAC sur les instituions nationales. On entend par institution nationale tout le dispositif institutionnel de l`appareil étatique national qui concours au fonctionnement de l`Etat que ce soit les institutions du pouvoir exécutif, législatif ou judiciaire. Il est donc indispensable de prendre en compte la complexité du projet communautaire et des exigences qu`il implique pour comprendre les conséquences que cela met en exergue. Il faut comprendre qu`une modification ou une adaptation institutionnelle nationale traduit un minimum d`acquis communautaire dans un Etat. Ces adaptations ont toujours été le fruit d`une bonne perception de la nature même de la communauté. C`est pourquoi, l`on assiste à une forme de communautarisation des institutions des Etats membres comme des politiques publiques spécifiquement en matière économique, monétaire et sectorielle. Naturellement comme dans le cas des implications des normes juridiques de l`Etat membre, le droit communautaire intègre le tissu institutionnel étatique, et crée aussi une forme de dédoublement organique et fonctionnel des instituions de l`Etat et également une adaptation surprenante d`autres institutions nationales dans leurs rapports qu`elles entretiennent ou non avec des institutions communautaires. Notre appareil politico-

354 ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit général de l'union européenne, op cit.

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administratif doit à la fois défendre correctement nos intérêts dans les instances communautaires, et également permettre une application satisfaisante des décisions comme des politiques communautaires355. Il serait donc impossible d`aborder le sujet des implications de la qualité de membre de la CEMAC sans parler de l`adaptation d`institutions nationales à la qualité de membre (SECTION 1) et également l`adaptation de certaines institutions dans les rapports avec les institutions communautaires (SECTION 2).

SECTION 1 : LES IMPLICATIONS DE LA QUALITE D'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC SUR LES INSTITUTIONS NATIONALES.

La CEMAC est avant tout une gestion commune de certains politiques publiques nationales transférées au niveau supranational par les Etats lors de leur adhésion. L`Etat assume ainsi une double fonctionnalité par ses instituions représentatives. Il s`agit de défendre les intérêts de la nation au sein de la communauté et de mener la gestion de la cité en tenant compte des décisions communes adoptées et consenties dans ses fonctions d`autorité communautaire. On assiste ainsi à la naissance d`un dualisme fonctionnel des institutions qui assument la fonction exécutive, comme des départements ministériels (paragraphe I), qui se trouve obligés de tenir compte de la communauté dans la gestion de leur portefeuille. Mais cette réception institutionnelle n`est pourtant pas au même degré d`influence pour toute les institutions nationales, parce que les parlements nationaux sont presque pas concernés par cette vague de communautarisation qui frappe les Etats membres de la CEMAC (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : la communautarisation des instituions exécutives de l'Etat membre

de la CEMAC.

Il s`agira ici de parler succinctement de la communautarisation de l`exécutif bicéphale des Etats membres de la CEMAC (A) et également le rôle des ministères qui se trouvent aussi dans l`obligation d`arrimer le développement de leur département ministériel au respect et à la prise en compte du droit communautaire (B).

A/ La communautarisation de l'exécutif bicéphale des Etats membres.

C`est surprenant peut être d`affirmer que les institutions nationales de l`exécutif sont influencés par leur appartenance à la CEMAC. En fait, le Président de la

355 OBERDORFF (H), « Les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », revues pouvoirs, N°69, pp 95-106, spec. p 99.

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république, autant que le Premier ministère c`est-à-dire la tête de l`exécutif subissent, du fait de leur participation aux organes de gestion commune de la CEMAC, le projet intégratif. Ainsi le président de la république(1) et le premier ministre(2) subissent quelques aménagements dû à l`appartenance de l`Etat à la CEMAC.

1) La communautarisation de la Présidence de la république.

A la différence de la politique internationale des Etats qui est généralement gérée essentiellement par le Président de la république et le ministère des affaires étrangères ou de relations extérieures, la politique communautaire mobilise bien plus qu`une institution de l`Etat. Il exige la participation des deux têtes de l`exécutif de chaque Etat membre de la CEMAC. Ceci participe à l`élaboration de la politique communautaire au sein de la conférence des chefs d`Etat. Comme son nom l`indique si bien il s`agit de l`un des organes de gestion de la CEMAC, le plus prééminent. Ne peuvent faire partie de cet organe que les chefs d`Etat des pays membres de la CEMAC. « La Conférence des Chefs d'Etat détermine la politique de la Communauté et oriente l'action du Conseil des Ministres de l'UEAC et du Comité Ministériel de l'UMAC. Elle fixe le siège des Institutions, des Organes et des Institutions Spécialisées de la Communauté. Elle nomme et révoque leurs dirigeants conformément aux dispositions »356. La prééminence de l`exécutif dans la conduite de la politique communautaire est éclatante. Une concordance presque parfaite apparaît entre la valorisation de l`exécutif, sur le plan national, et l`importance de ses représentants dans la conférence des chefs d`Etats conformément au texte constitutif de la CEMAC. Comme dans la majorité des Etats membres de la CEMAC, il existe un exécutif bicéphale. Cette dyarchie de l`Exécutif des Etats membres subit le processus communautaire différemment. Comme se passe la gestion de l`exécutif en droit interne des Etats. C`est-à-dire l`institution de Président de la république définit la politique générale de la nation et les grandes actions et le Premier ministre l`exécute. Par conséquent, même en ce qui concerne les implications de la qualité de membre sur l`exécutif, on remarque une prééminence du Président de la république sur le chef du gouvernement. Le Président, par sa participation constante à la conférence des chefs d`Etats, par sa présidence non moins régulière de la Communauté dans son ensemble, a la charge de définir les grandes orientations de la politique communautaire de son Etat. Autrement dit, il est astreint à définir cette politique en tenant compte de la politique

356 Article 12 du traité révisé CEMAC du 25 juin 2008 signé à Yaoundé révisé également le 30 Janvier 2009 à Libreville au Gabon «La Conférence des Chefs d'Etat détermine la politique de la Communauté et oriente l'action du Conseil des Ministres de l'UEAC et du Comité Ministériel de l'UMAC ».

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commune qu`il adopte avec ses compères au niveau supranationale. De cet effet, le Président de la république est à la fois la tête prééminente de l`exécutif nationale, et également au sein de la communauté. Ainsi donc l`appartenance à la CEMAC ajoute à la fonction présidentielle une autre à savoir celle de membre influent de l`exécutif communautaire. Le Président de la république devient le chef de l`exécutif national et membre de l`exécutif communautaire. Les deux casquettes n`étant pas opposables, le chef de l`Etat assume ses fonctions de chef de l`exécutif en tenant compte dans des décisions et des positions de la communauté telles que défendues par lui pour son Etat au sein de la communauté. Nous constatons que l`appartenance de l`Etat à la CEMAC amène les autorités nationales à s`adapter par une forme de gymnastique institutionnelle quelque fois touchant les relations entre les deux têtes de l`exécutif. Il faut dire que le Premier ministre ne bénéficie pas d`autant de majesté que le Président de la république avec qui il partage la tête de l`exécutif.

2) La communautarisation du Premier ministre.

Au sein de l`exécutif bicéphale, selon les dispositions constitutionnelles des Etats membres de la CEMAC, le Premier ministre, le chef du gouvernement est généralement chargé de mettre en oeuvre la politique de la nation telle que décidé par le Président de la république357 , seul ou avec le gouvernement358. L`appartenance des Etats de l`Afrique centrale à la CEMAC et la communautarisation de ceux-ci, ne change véritablement pas le rapport de force existant entre le Premier ministre et le président de la république. La communautarisation conduit le Premier ministre, d`une part à mettre en oeuvre les orientations présidentielles, d`autre part à veiller à la cohérence de la position de la nation dans la gestion quotidienne de sa politique communautaire359. C`est la situation normale de gestion de l`exécutif national qui demeure. Parce que le Premier ministre joue son rôle du fait de sa fonction en droit interne sauf qu`il devra maintenant tenir compte de la politique communautaire dans la mise en oeuvre des aspirations politiques du président de la république dans l`Etat. La situation restera-t-elle inchangée si nous assistons à un cas de cohabitation360 au sein de l`exécutif national ? Des Etats comme la guinée équatoriale peuvent connaitre des

357 C`est le cas du Cameroun, de la Guinée Equatoriale, du Gabon, du Congo et de la Centrafrique.

358 Comme c`est le cas du Tchad voire l`article 94 de sa constitution qui stipule « Le Gouvernement définit et exécute la politique de la Nation déterminée en Conseil des Ministres »

359 OBERDORFF (H), « les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », op cit, pp 95-106 spec. p 100.

360 La cohabitation en droit constitutionnel est la situation dans la quelle le parti politique du président de la république n`étant pas majoritaire au parlement, le président se trouve dans l`obligation de composer un gouvernement avec les membres du parti adverse pour pouvoir gouverner. Ce sont des scenarios que l`on a généralement coutume de voir en France.

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périodes de cohabitation361. Dans ce cas le tandem déséquilibré formé en période normale de gestion du pouvoir en faveur du président de la république, doit être revu parce que la cohabitation implique une gestion à égale prérogative entre le chef de l`Etat et le chef du gouvernement. Cependant il n`y a qu`une seule place et une seule voix pour chaque Etat membre au sein de la conférence des chefs d`Etats. Dans l`hypothèse ou le Premier ministre aspire alors naturellement à apparaître sur la scène communautaire, la crédibilité de l`Etat en question exigerait que ce pays parle d`une seule voix sans trop de dissonances. La CEMAC induirait alors une forme de cohabitation consensuelle362 aux niveaux des Etats. Quid du reste de l`équipe gouvernementale ?

B/ La communautarisation des ministères.

Dans l`équipe gouvernementale, le processus a poussé certains Etats comme la Guinée Equatoriale à la mise sur pied selon la directive communautaire un département ministériel qui ne s`occupe que des questions d`intégration et de coopération régionales, d`autres Etats par contre ont créés dans le département ministériel existant comme celui des relations extérieures ou des affaires étrangères ou de l`économie et des finances, des services techniques spécialisés sur l`intégration communautaire. Ce constat met en exergue des départements ministériels dont le portefeuille correspond avec les domaines de compétence de la communauté et qui doivent siéger au sein des organes d`élaboration et d`adoption des règles de droit communautaire (1). Toutefois, pour faire face à l`avènement du droit communautaire, les Etats membres ont dû spécialiser ou restructurer certains départements ministériels (2).

1) Les départements ministériels participant au fonctionnement de la CEMAC.

Parmi les organes qui participent au fonctionnement de la CEMAC, nous avons ceux qui font la part belle à la participation des ministères chargés soit de l`économie, soit des finances ou bien de l`intégration. Au sein de la CEMAC, il s`agit du « Conseil des Ministres de l'UEAC »363. C`est un organe chargé d`assurer « la direction de l'Union Economique »364 de la CEMAC. Cet organe permet aux ministères des Etats membres de la

361 Conformément à l`article 52 de la constitution de la Guinée Equatoriale du 17 janvier 1995 « Le Premier Ministre est issu du parti politique qui a obtenu la majorité des sièges à l'Assemblée nationale »

362 OBERDORFF (H), « Les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », op cit, p 104.

363 Article 18 du traité révisé CEMAC de 2008 stipule que « Le Conseil est composé des représentants des Etats membres, comprenant les Ministres en charge des finances, de l'intégration et des affaires économiques ».

364 Article 17 du traité révisé CEMAC stipule « Le Conseil des Ministres assure la direction de l'Union Economique par l'exercice des pouvoirs que la Convention de l'UEAC lui accorde »

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CEMAC, en charge des départements suscités de s`accorder sur une politique commune de l`économie. Comme autre organe communautaire regroupant les ministres des Etats membres, l`on peut citer le comité inter ministériel. Il s`agit d`un organe communautaire d`orientation des actions commune à entreprendre dans les Etats membres, sur le domaine monétaire. Il regroupe, comme le texte CEMAC l`indique si bien « ...deux Ministres, dont le Ministre chargé des finances... »365. Cet organe a pour fonction d`examiner « les grandes orientations des politiques économiques respectives des Etats membres de la Communauté et en assure la cohérence avec la politique monétaire commune »366. Le constat fait, les ministères participant de manière très active au développement de la communauté sont entre autres les ministères de l`Economie, des finances, des questions de l`intégration régionale et de coopération. Ces ministères se transforment par l`effet de la communauté, en des ministères de coordination de la politique économique et monétaire des Etats membres. Raison pour laquelle, ils ont une double feuille de route ministérielle à savoir : d`une part communautaire, c`est-à-dire ils doivent s`accorder sur une orientation de la politique économique et monétaire de la communauté dans le strict respect des directives développées par les chefs d`Etats au sein de la conférence des chefs d`Etat de la CEMAC. Il faut signifier que s`accorder pour Ces ministres revient à trouver un compromis, un consensus sur les grands axes de l`action économique et monétaire communautaire. D`autre part, la posture de ministre de l`Economie, des finances ou celui de l`intégration impose aussi une défense absolue des intérêts de leurs pays respectifs, un développement et une application d`une politique économique ou monétaire nationale respectant les mesures prises plus haut par le conseil des ministres ou le comité interministériel. Etant doté d`un rôle privilégié au sein de la communauté, Ces différents ministères se trouvent dans l`obligation de se restructurer pour respecter les exigences de la communauté. Il faudra par exemple du fait de l`augmentation dans ses départements des compétences communautaires, recycler le personnel ministériel aux affaires communautaires ou en former une nouvelle caste d`élite spécialisée sur les questions communautaires. C`est ce qui se passe dans les Etats comme la France, ou « l'augmentation des compétences européennes a multiplié les formations spécialisées du Conseil des ministres européens »367. Comme l`auteur l`affirme à la suite, « les agendas de nos ministres font une

365 Article 22 du traité révisé CEMAC de 2008 « Chaque Etat membre est représenté au Comité Ministériel par deux Ministres, dont le Ministre chargé des finances, et ne dispose que d'une voix exprimée par ce dernier »

366 Article 21 du traité révisé CEMAC de 2008 «Le Comité Ministériel examine les grandes orientations des politiques économiques respectives des Etats membres de la Communauté et en assure la cohérence avec la politique monétaire commune. Les attributions du Comité Ministériel sont précisées dans la Convention régissant l'UMAC »

367 OBERDORFF (H), « Les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », op cit, p 100.

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part de plus en plus importante aux affaires européennes. La participation au Conseil des ministres de la Communauté valorise le ministre national »368. Autrement dit la participation active des ministres nationaux augmente le prestige de ceux-ci parce que « prendre effectivement des décisions, négocier avec des collègues gérant le même type de département ministériel donnent aux ministres le sentiment d'une plus grande utilité fonctionnelle que lors des réunions formelles du Conseil des ministres »369. Bien plus encore, ce prestige double la responsabilité des ministres, Autant au niveau communautaire que national elle élève la fonction de ministre en charge de l`économie, des finances ou de l`intégration à un statut supranational parce que les ministres deviennent les concepteurs de l`action communautaire. Ils effectuent la grande partie de leur travail ministériel au sein de la communauté, Pour concevoir les actions à entreprendre dans la mise en oeuvre de la politique économique et monétaire de la CEMAC. Au niveau national, ils essayent de la mettre en place, selon les mesures prises plus haut. On peut dire que les ministres font un travail d`élaboration des actions communes économique ou monétaire nationales au sein des organes communautaires, la nation devient alors un champ d`application des mesures communautaires. Au sein des organes de la CEMAC, les ministres décident parfois, et au sein des conseils des ministres ils approuvent le plus souvent les décisions du président de la république ou du premier ministre. Cela démontre l`effectivité d`une communautarisation supranationale de la politique économique et monétaire nationale, et également de la fonction de ministre chargé de l`économie, des finances ou de l`intégration.

2) La spécialisation et la restructuration des autres ministères nationaux des Etats membres de la CEMAC.

Mis à part les ministères concernés par l`activité de la communauté, il faut dire que les autres ministères subissent comme la société nationale, les effets de la CEMAC. Dans certains Etats, comme la Guinée Equatoriale et le Congo370, ont respectés l`acte additionnel N°18/08-CEMAC-CCE-09371 en optant pour la création d`un département ministériel spécialement compétent pour connaitre des questions d`intégration et de coopération régionale, ou ont ajouté au ministère existant le porte feuille de l`intégration.

368 Ibid.

369 Ibid.

370 Le Congo a attribué au ministère de l`économie, la gestion des questions d`intégration il s`agit du ministère de l`économie, des finances, du plan, du porte feuille public et de l`intégration.

371 l`acte additionnel N°18/08-CEMAC-CCE-09 portant adoption du principe de la mise en place généralisée des ministères chargés de l`intégration régionale au sein des gouvernements des Etats membres de la CEMAC signé le 25 Juin 2008 à Yaoundé au Cameroun en son article 1 « les Etats membres de la CEMAC sont invités à mettre en place une structure nationale chargée des questions de l'intégration. »

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Cette prise au sérieux de la communautarisation manifeste encore plus les implications de la qualité de membre de la CEMAC sur l`Etat. Dans le même acte additionnel sus-évoqué l`article 2 stipule la création dans le département responsable de l`intégration une cellule interministérielle chargée du suivi des questions de l`intégration372 D`autres ont décidé de restructurer leurs ministères des questions diplomatiques, en créant par exemple des directions ou des services techniques responsables des questions d`intégration régionale373. Les départements ministériels qui n`ont pas de rapport direct avec la CEMAC ou des questions d`intégration adaptent simplement leurs directives et circulaires aux mesures et décisions communautaires. De plus la communauté n`élabore pas des normes communautaires relatives uniquement à l`économie et à la monnaie. Il existe également d`autres domaines de la politique nationale qui se trouvent être communautarisés par la CEMAC. Cela s`appelle les politiques sectorielles de la CEMAC qui concernent : l`agriculture, l`élevage, la pêche, l`industrie, le commerce, le tourisme, le transport, l`aménagement du territoire communautaire et les grands projets d`infrastructure, les télécommunications, les technologies de l`information et de la communication, les questions d`environnement et de d`énergie374. Il faut dire que ces domaines d`harmonisation des politiques nationales toucheront à coup sûr plusieurs départements ministériels. La conséquence directe serait l`obligation de Ces ministères de prendre en compte, dans leur organisation ou leur fonctionnement, les mesures décidées au niveau supranational. Ainsi l`élaboration de la feuille de route des ministères concernés se fera désormais au sein de la CEMAC et les ministres nationaux en charge de ces domaines seront que des exécutants des décisions et des mesures prises plus haut, du moins s`ils ne participent pas à l`élaboration de ces mesures. Le processus d`intégration risquerait à la longue, de toucher effectivement tous les pans de la société nationale. On assistera incapable, à la transformation de l`Etat souverain, en celui partageant sa souveraineté et ses compétences nationales. L`Etat ne sera plus que le terrain d`action et d`application des règles de droit communautaire. Une part importante étant réservée aux institutions exécutives qui développent et mettent en application la politique de la nation. Ils ne la développeront plus unilatéralement selon le principe international de l`indépendance inhérente à la souveraineté. Mais de manière commune avec les autres Etats, au niveau supranationale, l`Etat se cantonnera à devoir les appliquer selon les moyens qui lui conviennent, parce que c`est à ce

372 Ibid. article 2 « la structure nationale visée à l'article 1er du présent acte additionnel intégré en son sein une cellule interministérielle chargée du suivi des questions de l'intégration »

373 C`est le cas par exemple du Cameroun qui gère les questions d`intégration dans la direction des affaires africaines du ministère des relations extérieures.

374 Voir a cet effet l`article 6 de la convention régissant l`Union Economique de l`Afrique centrale.

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niveau que le principe sacro-saint d`indépendance sera à même de faire son effet. Dans le strict contrôle national et communautaire, par ce que la moindre application qui entrainera la violation des droits des citoyens, sera de nature à engager la responsabilité de l`Etat membre. L`Etat est donc phagocyté par le droit communautaire. Malgré cela, grande est notre surprise quant à l`impact mitigé de la communauté sur les parlements nationaux.

PARAGRAPHE II : la communautarisation relative de la qualité d'Etat membre sur les parlements nationaux.

Le Parlement dispose d`un rôle relativement modeste dans les affaires communautaires de la CEMAC. La raison principale se trouve dans le rôle même joué par les parlements nationaux dans les Etats membres de la CEMAC qui sont cantonnés généralement au rôle de chambre d`enregistrement. Bien qu`il existe des raisons autres que constitutionnelles qui expliquent celles du relatif impact de l`intégration communautaire sur les parlements nationaux (A). Toutefois avec le temps et l`influence de plus en plus grandissante de la CEMAC dans le fonctionnement des Etats membres, l`on constate, une forme de regain d`intérêt de la part des parlements nationaux pour les questions d`intégration communautaire. Les raisons étant généralement d`ordre interne (B).

A/ Les raisons du relatif impact de la CEMAC sur les parlements nationaux.

Les raisons du rôle relativement modeste des parlements nationaux, tiendraient peut être au statut de chambres d`enregistrement de la majorité des parlements africains. Mais cela signifiera que l`on soit superficiel dans notre recherche. Car le rôle de marionnette de l`exécutif n`explique pas véritablement pourquoi les parlements nationaux sont mis à l` écart dans le fonctionnement de la CEMAC. A l`évidence les véritables raisons sont liées, au caractère même de la règle de droit communautaire (1), et sont également en rapport avec les considérations tenant à l`appréhension du droit communautaire par les parlements nationaux (2).

1) Les raisons inhérentes aux principes fondamentaux de droit communautaires : l'applicabilité immédiate et l'effet direct.

Le désintéressement des parlements nationaux à la CEMAC est très visible. Et La vie politique nationale l`a confirmé à de multiples reprises. La communauté est venue mettre un accent particulier à cette mise à l`écart. Les principes d`applicabilité immédiate et de l`effet direct sont en grande partie les causes de cette absence des parlements

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nationaux dans les activités communautaires. La CEMAC ne développe pas véritablement dans la gestion de ses activités, les principes démocratiques inhérentes aux parlements, l`on peut même dire que si le déficit démocratique existe au niveau de la construction communautaire, il se trouve plutôt à ce niveau. Car le parlement est la manifestation de la volonté générale dans la gestion de la cité. Cette volonté étant au sein de la construction démocratique, toute réserve de l`Etat à la participation du peuple à la prise des décisions nationales est perçue comme un manque de principe démocratique dans la gestion. La question de l`applicabilité immédiate qui est un principe fondamental signifiant la mise à l`écart de toute mesure législative nationale d`entré en vigueur de la règle de droit communautaire, contourne de façon intelligente l`activité parlementaire des Etats. Le parlement devient spectateur de l`entrée des normes n`étant pas de sa propre initiative. Car ces normes communautaires ne sont pas issues de l`oeuvre du parlement communautaire. Les parlements se trouvent doublement exclus de la chose communautaire parce que ne pouvant ni intervenir à l`élaboration de cette norme, ni la contrôler. Les parlements sont déclarés implicitement inexistants dans le dispositif fonctionnel de la CEMAC. L`effet direct, confirme la posture adoptée par la CEMAC vis-à-vis des parlements nationaux à savoir l`inutilité de ceux-ci dans l`élaboration des règles de droit communautaire. La philosophie Rousseauiste qui voyait en la loi une manifestation de la volonté générale est caduque avec l`avènement de la communauté. La communautarisation rend les lois d`application des normes étatiques chère au souverainiste désuètes. Peut-on légitimement dire que les parlements nationaux comprennent effectivement ce qu`implique la CEMAC ? Arrivent-t-ils à faire la distinction entre les questions communautaires et les questions internationales ?

2) Les raisons tenant aux considérations parlementaires des questions communautaires.

Les Parlements nationaux ne se sont pas à l`instant intéressés aux

questions communautaires, car considérées, « d'une part comme des questions
internationales, d'autre part comme le domaine réservé de l'exécutif
»375. Et l`importance de l`exécutif dans le fonctionnement de la communauté ne le dément pas. La politique communautaire des Etats membres échappe en grande partie aux assemblées parlementaires. Les parlementaires ne s`intéressent qu`aux questions internationales parce qu`elles sont soumises au parlement pour autorisation de ratification dans l`optique de faire pénétrer la

375 OBERDORFF (H), « Les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », op cit, p 100.

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norme en question dans l`ordonnancement juridique des Etats. Cependant la norme de droit communautaire, à la différence de celle de droit international, n`a nullement besoin d`une loi d`habilitation pour entrer en vigueur dans un Etat. Il faut aussi signaler que, la Constitution donne au gouvernement des prérogatives en matière de relation extérieure qu`il ne partage véritablement pas avec les assemblées. Elles peuvent éventuellement s`informer, contrôler mais non gouverner les rapports de l`Etat avec les questions internationales encore moins des questions communautaires. Le parlement se sent concerné par les questions communautaires que dans le cas de la transposition des directives communautaires en droit interne. La marge de manoeuvre ou d`appréciation du parlement y est aussi restreinte. Les directives, lorsqu`elles concernent le domaine législatif, théoriquement lui permettent une adaptation nationale pour atteindre les objectifs qu`elles posent mais la loi de transposition de doit pas chercher à réduire l`esprit de la directive ce qui rend le travail parlementaire très stéréotypé et mécanisé, limitant encore plus l`intérêt du parlement pour le droit venu de la Communauté. Au sein de l`union européenne, les assemblées afin d`éviter une plus forte dépossession, ont souhaité être dotées des moyens d`améliorer leur connaissance et leur compétence européennes. Les délégations parlementaires pour les Communautés européennes créées en 1979, renforcées en 1990, ont incontestablement permis une meilleure appréhension de l`Europe communautaire par le parlement, mais restent des institutions modestes au sein même des assemblées. Au niveau de la CEMAC, la question des faiblesses des parlements nationaux en ce qui concerne la communauté, pose des problèmes de la distinction par les parlements nationaux des questions internationales et communautaires. Et les parlements nationaux doivent comprendre la différence qui existe entre les questions internationales et communautaires. Les parlements nationaux doivent aussi intervenir dans le processus d`intégration. Dans l`union européenne par exemple, le progrès de l'intégration a entraîné une modification du rôle des parlements nationaux. Divers instruments de coopération entre le parlement européen et les parlements nationaux ont été créés afin de garantir un contrôle démocratique efficace de la législation européenne à tous les niveaux. Cette tendance a été renforcée par les nouvelles dispositions introduites par le traité de Lisbonne376. En transférant à des institutions communes le pouvoir de décision, jusque-là détenus par les États, la construction communautaire entraîne en elle-même une diminution du rôle des parlements nationaux, à la fois comme législateurs, comme autorités budgétaires et comme contrôleurs des exécutifs. Le transfert des responsabilités de l'échelon national à l'échelon communautaire s'est effectué essentiellement en direction de la

376 Voir a cet effet l`article 12 du traité sur l`UE.

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conférence des chefs d`Etats, et le parlement communautaire lui même n'a pas acquis tous les pouvoirs qui lui auraient permis de jouer un rôle parlementaire complet dans les affaires communautaires. Il y a cet effet un "déficit démocratique"377 structurel. Au sein de l`union européenne, les parlements nationaux, de plus en plus préoccupés par leur perte d'influence, en sont venus à considérer un contrôle national plus efficace des activités européennes de leurs gouvernements ainsi que des relations plus étroites avec le parlement européen comme un moyen adéquat en vue de restaurer l'influence perdue en même temps que de s'assurer que l'Europe soit bâtie sur la base de principes démocratiques. Comme dans le cas de l`union européenne, les parlements nationaux des Etats membres de la CEMAC sont entrain de manifester un regain d`intérêt sur les activités communautaires.

B/ Les raisons du regain d'intérêt sur les activités communautaires par les parlements nationaux.

Comme au niveau de l`union européenne, la dépossession des compétences des législateurs nationaux a été perçue par ceux-ci comme un empiétement sur le domaine de compétence des assemblées. Il devient tout à fait légitime pour les parlements nationaux de s`intéresser à l`intégration sous régionale. Ce regain d`intérêts s`explique simplement par la perte et la réduction du domaine de compétence du parlement en ce qui concerne le domaine de la loi (1) et également celui du contrôle de l`action gouvernementale (2).

1) Les raisons liée à la perte et à la réduction du domaine de compétence législative des parlements nationaux.

La perte ou la réduction des compétences sur des domaines réservés à la loi par les constitutions aux parlements nationaux inquiète ceux-ci et éveille un regain d`intérêt sur les questions communautaires. Pour comprendre l`intérêt naissant des parlements nationaux sur les activités communautaires, il faut tenir compte des conflits qui existeraient sur les domaines dans lesquels la communauté a bénéficié du transfert de compétence. Pour en fin se rendre compte que, plusieurs domaines de compétences des parlements nationaux ont été perdus. Les parlements nationaux devenant, dans ce processus de communautarisation des Etats membres, au pire des cas, lésés par cette action, au meilleur des cas, ils deviennent des acteurs secondaires dans les domaines de la loi sur laquelle les parlements nationaux et la communauté sont en concurrence. L`initiative des lois nationales revenants désormais non

377 OBERDORFF (H), « les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », op cit, p 98.

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plus seulement aux parlements nationaux (la proposition de loi), ou à l`exécutif (projet de lois) mais également à la CEMAC, avec la particularité que les parlements nationaux n`ont même pas un droit de regard sur l`initiative communautaire. N`ayant pas déjà une posture qui devrait être la sienne au sein des Etats membres de la CEMAC, l`on constate un déclin, et les qualificatifs ne manquent pas pour stigmatiser la position qui serait celle des parlements nationaux sous l`effet de la CEMAC, devenant des obéissant d`une communauté dominante et surpuissante. L`on en vient à se demander qui fait la loi dans le contexte de communauté d`intégration ? La question mérite d`être posée, dans la mesure où les constitutions des Etats membres de la CEMAC sont claires en affirmant que la loi est votée par le parlement. L`appartenance à la CEMAC est venue réduire les pouvoirs des parlements nationaux en matière législative par l`autorité dont elle fait preuve lors de la conception et l`entrée en vigueur de la norme de droit communautaire dans l`ordre juridique national. Des lors, les parlements nationaux, dans le processus de communautarisation des Etats membres de la CEMAC, sont devenus de plus en plus lésés et également dépouillés d`une partie de leurs prérogatives dans ce processus d`intégration communautaire. Il devient nécessaire d`élaborer un compromis nécessaire pour rétablir un parlement en décadence autant sur le plan national que communautaire, d`où le regain d`intérêt des parlementaires sur les domaines de compétence de la loi transférée à la communauté. Il serait parfaitement logique de proposer que les règles de droit devant être légiférées au sein de la communauté, puissent être inscrites prioritairement à l`ordre du jour dans les parlements nationaux, surtout discutés et adoptés sans être fondamentalement modifiés, au risque de mettre en péril la politique communautaire voulue par les gouvernements et chefs d`Etats de la CEMAC. Dans ce cas les parlementaires seront associés d`une façon indirecte à la prise des décisions au sein de la CEMAC. Les parlements nationaux participeront de leur manière au processus de communautarisation des Etats membres de la CEMAC. En conséquence, étant généralement responsable devant l`assemblée nationale, le gouvernement y engagera éventuellement son existence sur le vote d`un texte qui exprime la politique communautaire telle qu`il l`a déterminée au sein de la communauté, le Parlement restant libre de refuser, non pas ce texte, mais la politique communautaire qu`il incarne et le gouvernement national qui la soutient378

378 En paraphrasant VANDENDRIESSCHE (X), « le parlement entre déclin et modernité », revue pouvoirs, N°99, pp 59-70, spec. p 62.

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2) La raison relative au contrôle de la politique communautaire du gouvernement par les parlements nationaux.

Les parlements nationaux bien qu`ils soient en marge du processus communautaire au sein de la CEMAC, détiennent un pouvoir limité concernant le contrôle de l`action communautaire des gouvernements nationaux. Semblant dans la mesure où cette action n`aura véritablement pas d`impact sur la politique communautaire telle qu`élaborée par les Etats membres. Tout de même, elle permet de faire passer un message aux dirigeants de la communauté, et éventuellement de faire entendre les aspirations des populations nationales qui constituent le peuple communautaire. Si les parlements nationaux renoncent à interférer dans l`action de légiférer de la communauté, il faudra se résoudre a ce que le rôle des parlements nationaux modernes au sein des Etats membres, n`est plus de légiférer en tant que tel, mais de porter une appréciation éclairée sur les conditions mêmes de mise en oeuvre des politiques communautaires déterminées par les gouvernements au sein des organes de gestion de la communauté. Le rôle essentiel du Parlement en matière communautaire, se situera au contrôle en cours d`exécution du droit communautaire, entraînant éventuellement la modification des objectifs et/ou des moyens déployés pour les atteindre. Mais plutôt, un contrôle a posteriori, le parlement ayant alors véritablement la faculté de porter un jugement éclairé sur la réalisation des politiques communautaires initiées par les membres des gouvernements réunis au sein des organes communautaires. Dans cette perspective, il sera important de renforcer les moyens et les pouvoirs des commissions parlementaires, C`est-à-dire des organes permanents au sein des chambres du parlement, qui disposent d`un véritable potentiel pour devenir des outils permanents de contrôle de l`action politique communautaire du gouvernement ; sans modifier leur action dans le domaine législatif, il conviendrait alors de renforcer leur capacité à informer le parlement tout entier des conditions de mise en oeuvre des politiques communautaires gouvernementales. Cependant, le constat actuel est relativement décevant : la responsabilité politique gouvernementale organisée par les constitutions des Etats membres de la CEMAC est une procédure parfaitement disproportionnée dans ses effets et très largement insusceptible d`être mise en oeuvre en raison de la force du fait majoritaire au parlement. Ainsi, sans remettre en cause le dogme de la responsabilité solidaire et collégiale du gouvernement, il est peut-être temps de permettre aux parlements nationaux (et surtout peut-être à leurs commissions) d`engager la responsabilité individuelle d`un ministre responsable au niveau communautaire. Il serait ainsi possible de mettre en place un mécanisme obligeant chaque année les ministres à rendre compte de leurs

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activités communautaires devant la commission parlementaire compétente ; il reviendrait ensuite au chef du gouvernement le soin d`évaluer si cette mise en cause doit affecter l`ensemble du gouvernement et entraîner sa démission. Cela entrainerait inéluctablement un souffle de démocratie au sein de la CEMAC, bien que cela soit au niveau national. Toutefois l`on constate qu`au niveau communautaire et national, des institutions joueraient a priori le même rôle. Alors comment est organisée la relation entre ses institutions symétriques.

SECTION 2 : L'EVALUATION DES RAPPORTS ENTRE LES INSTITUTIONS

SYMETRIQUE COMMUNAUTAIRE ET ETATIQUE.

Le constat est qu`il existe des institutions nationales que l`on retrouve également au niveau communautaire. Cela attire notre attention parce qu`il pourrait se poser plus tard un problème de coordination entre d`une part les parlements nationaux et le parlement communautaire, et d`autre part la cour de justice de la CEMAC et les juridictions nationales. Nous entendons montrer dans cette section les rapports qu`entretiendraient ces institutions entre elles. En mettant en évidence dans la relation cour de justice de la CEMAC et les juridictions nationales des rapports de collaboration (Paragraphe I). Cela n`est pas le cas entre le parlement communautaire et les parlements nationaux dont les prérogatives divergentes permettent de conclure à des rapports peu conciliants (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LES RAPPORTS DE COOPERATION ENTRE LA COUR DE

JUSTICE DE LA CEMAC ET LES JURIDICTIONS NATIONALES.

Créée par le traité CEMAC de 1994 révisé en 2008 et en 2009, la cour de justice de la CEMAC est régie par la convention de 2009. « La cour de justice veille au respect du droit quant à l'interprétation et à l'application du traité de la CEMAC et des textes subséquents »379. Elle partage ainsi avec les juridictions nationales cette compétence. Pour éviter des éventuels conflits de compétences entre la cour de justice de la CEMAC et les juridictions nationales, la procédure de renvoi préjudiciel a été développée en droit communautaire (A) pour harmoniser les rapports entre Ces deux institutions. Cependant persistent des difficultés dans sa mise en oeuvre au sein du système CEMAC (B).

379 Voir l`article 2 de la convention régissant la cour de justice de la CEMAC.

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A/ La présentation du mécanisme du renvoi préjudiciel en droit de la CEMAC.

La procédure dont l`importance n`est plus à démontrer au sein droit communautaire européen380, permet autant que cela soit possible, à harmoniser ce droit. Le renvoi préjudiciel a seulement certaines fonctions bien précises, et concerne des organes spécifiques (1). Mais aussi et surtout certaines normes de droit communautaire, et suit une procédure d`examen liée aux questions préjudicielles (2).

1) Les fonctions du renvoi préjudiciel et les organes concernés.

Comme l`indique si bien le juge Georges TATY de la cour de justice de la CEMAC, La procédure de renvoi préjudiciel en droit communautaire consiste en ce qu`une juridiction nationale, qu'elle soit judicaire, administrative ou financière, estimera qu'une question soulevée à l'occasion d'un litige de sa compétence met en cause l'interprétation d'une norme du traité ou d'un acte de droit dérivé, elle pourra surseoir à statuer et renvoyer la question à la chambre judiciaire381. La convention régissant la cour de justice de la CEMAC stipule que « la Chambre Judiciaire statue à titre préjudiciel sur l'interprétation du Traité de la C.E.M.A.C. et des Textes subséquents, sur la légalité et l'interprétation des Statuts et des Actes des organes de la C.E.M.A.C., quand une juridiction nationale ou un organisme à fonction juridictionnelle est appelé à en connaître à l'occasion d'un litige »382. Il faut dire que le mécanisme évoqué par l`article 17 de la convention régissant la cour de justice de la CEMAC soulève trois objectifs bien précis à savoir : « assurer une interprétation et une application uniforme du droit communautaire sur l'ensemble du territoire de la Communauté ; ensuite faciliter l'intégration de ce droit dans les systèmes juridiques nationaux et enfin assurer la protection des droits des justiciables et garantir les libertés fondamentales »383. La procédure de renvoi préjudiciel dégage premièrement une fonction d`unification du droit

380 Initier par le protocole du 3 juin 1971 porte sur l`interprétation par la cour de justice de la convention de Bruxelles de 1968 relative à la compétence judiciaire et l`exécution des décisions de justice en matière civile et commerciale. Le modèle de renvoi qu`il va initier sera repris par le système judiciaire européen. Cité par TCHUINTE (J), « L'application effective du droit communautaire en Afrique centrale », op cit, p 412.

381 TATY (G), « La procédure de renvoi préjudiciel en droit communautaire », revue de droit uniforme africain/ actualité trimestrielle de droit et de jurisprudence, N°004, 2011, pp 28-38, spec. p 29.

382 L`article 17 de la convention régissant la cour de justice de la CEMAC stipule : « La Chambre Judiciaire statue à titre préjudiciel sur l'interprétation du Traité de la C.E.M.A.C. et des Textes subséquents, sur la légalité et l'interprétation des Statuts et des Actes des organes de la C.E.M.A.C., quand une juridiction nationale ou un organisme à fonction juridictionnelle est appelé à en connaître à l'occasion d'un litige. En outre, chaque fois qu'une juridiction nationale ou un organisme à fonction juridictionnelle saisi de questions de droit ci-dessus doit statuer en dernier ressort, il est tenu de saisir préalablement la Chambre Judiciaire. Cette saisine devient facultative lorsque la juridiction nationale ou l'organisme à fonction juridictionnelle doit statuer à charge d'appel ».

383 TATY (G), « La procédure de renvoi préjudiciel en droit communautaire », op cit, p 29.

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communautaire, c`est-à-dire que dans le risque d`une application ou d`une interprétation divergente du droit communautaire dans les différentes juridictions nationales, et d`une aggravation de cette divergence à cause des systèmes juridictionnels différents « Ce qui pourra faire naître autant de droits communautaires qu'il y a d'ordres juridictionnels nationaux »384. Le renvoi préjudiciel permet une uniformisation de l`application et de l`interprétation du droit communautaire sur l`ensemble du territoire communautaire. C'est ce qu'exprime R. Lecourt dans cette formule: « Il n'est pas de droit communautaire sans une unité de jurisprudence »385.La question préjudicielle le soulève deuxièmement une fonction d'intégration du droit communautaire dans les systèmes juridiques nationaux. En ce sens où, le véritable but de l`harmonisation et de l`uniformisation du droit communautaire est principalement l`intégration du droit communautaire dans les ordres juridiques internes des Etats membres de la CEMAC. Il s`agit autrement dit d`un moyen efficace de la communautarisation de l`Etat membre de la CEMAC. La troisième fonction et l`une des plus importantes du renvoi préjudiciel est celle qui assure la sauvegarde des droits des justiciables et des libertés fondamentales. En effet, comme le droit européen, l`a illustré dans de nombreux cas tirés de la jurisprudence européenne, la question préjudicielle est préalablement posée devant la juridiction nationale et elle permettra de savoir si le droit communautaire a conféré aux justiciables des droits que le juge national est tenu de reconnaître et de protéger. C`est ce qui fut fait dans la célèbre affaire VAN GEND EN LOOS du 5 février 1963386.

Il faut dire que dans la procédure de renvoi préjudiciel, seul les organes juridictionnels nationaux sont reconnus comme pouvant soulever la question préjudicielle. Ainsi qu`elle soit civile, pénale ou administrative, il s`agit des juridictions ayant le pouvoir de juger. Toutefois l`article 17 de la convention régissant la cour de justice de la CEMAC reconnaît également la qualité à tout organe même s'il ne fait pas partie du système judiciaire d'un Etat membre, pour renvoyer à la Chambre judiciaire une question préjudicielle.

384 Voir MOLINIER (J) in « Droit du contentieux européen », LGDJ, p 34.

385 Voir Gazette du palais, 1964, I, doctrine, pp 49-54. Cité par TATY (G), « La procédure de renvoi préjudiciel en droit communautaire », op cit, p 29.

386 Aff. 26/62, Rec. P 31. Dans lequel l`entreprise du même nom avait introduit devant un tribunal des Pays Bas une action dirigée contre l`administration des douanes néerlandaises au motif que celle-ci avait perçu un droit de douane majoré à l`importation en provenance de l`Allemagne. L'entreprise estimait qu'il y avait là une violation de l'article 12 du traité CEE qui « interdit aux Etats membres d'introduire de nouveaux droits de douane ou d'augmenter ceux existants dans le marché commun ». La juridiction néerlandaise a suspendu la procédure et saisi la Cour de Justice de Luxembourg en lui demandant de clarifier la portée des dispositions de l'article invoqué, en disant notamment si celles-ci produisent des effets immédiats et engendrent des droits au profit des particuliers que les juridictions nationales doivent sauvegarder. Les gouvernements des Pays-Bas, de la Belgique et de l'Allemagne estimaient que l'article 12 ne constitue pas une règle de droit directement applicable dans les Etats membres. La cour a jugé dans son arrêt que l'article 12 devait être interprété en ce sens qu'il produit des effets immédiats et engendre des droits individuels que les juridictions nationales doivent sauvegarder.

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Malheureusement cet article n`apporte pas plus d`éclairage. Mais en ce qui concerne les organes ayant le pouvoir de juger, la convention régissant la cour de justice de la CEMAC parle premièrement, des juridictions des Etats membres qui statuent en première instance c'est-à-dire les juridictions du premier ressort. En ce qui les concerne, le recours préjudiciel est facultatif. Dans la mesure où, il existe des juridictions de second degré et des juridictions d`appel, ils ont également le choix de saisir pour interprétation de la norme communautaire. Deuxièmement, nous avons les juridictions des Etats membres qui statuent en dernier ressort, dont le recours pour question préjudicielle est obligatoire en ce sens ou l'article 17 précise que chaque fois qu'une juridiction nationale doit statuer en dernier ressort sur une question relative à l'interprétation ou la validité du droit communautaire soulevée dans un litige qui lui est soumis, elle est tenue de saisir préalablement la Chambre judiciaire. L`on peut donc penser que si la juridiction inférieure interprète de façon discutable le droit communautaire, sa décision sera frappée d'appel ou fera l'objet d'un pourvoi devant la juridiction supérieure, laquelle sera ainsi à même de renvoyer la question délicate à la Chambre judiciaire. Quelle est donc la procédure du renvoi préjudiciel ?

2) La procédure de renvoi préjudiciel en droit communautaire CEMAC.

Cette procédure du renvoi préjudiciel permet, comme signifié plus haut, aux juridictions nationales d'établir un lien de coopération avec la Chambre judiciaire en mettant en oeuvre la législation communautaire. Elle comporte trois phases : La première se déroule devant le juge national saisi d'un litige mettant en cause le droit communautaire. La deuxième se déroule devant la Chambre judiciaire interrogée par le juge. - La troisième se situe à nouveau devant le juge national qui, en possession des réponses de la chambre aux questions qui leurs ont été posées, reprend l'examen du litige en lui procurant une solution. La procédure d`examen de questions préjudicielles au niveau de la chambre judicaire est particulière. Le renvoi préjudiciel concerne un certain nombre de norme de droit communautaire à savoir : les normes de droit primaire c`est-à-dire le traité révisé de la CEMAC, les différentes conventions y afférentes. Il y a également les normes de droit dérivé à l`exception des recommandations et des avis. Parmi les normes susceptibles de soulever un renvoi préjudiciel, l'on peut ajouter dans la liste les principes généraux du droit communautaire constitués de règles non écrites comme les principes de coopération, de solidarité, de légitime confiance, et de proportionnalité. Toutefois le mécanisme de renvoi préjudiciel au sein de la CEMAC trouve de nombreuses difficultés de mise en oeuvre.

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B/ Les difficultés de mise en oeuvre du mécanisme de renvoi préjudiciel au sein de la CEMAC.

Le renvoi préjudiciel peut se présenter comme « la possibilité ou l'obligation de saisir la cour de justice communautaire, d'une demande en interprétation des traités et des actes pris par les institutions de la communauté »387. Comme indiqué plus haut, elle se fonde sur l`idée de coopération entre juridictions nationales et communautaire et ne « comporte ni hiérarchie abrupte au profit de la juridiction communautaire, ni mécanisme imposant un alignement automatique des jurisprudences nationales »388. En droit communautaire CEMAC, le constat est surprenant : on a enregistré un recours préjudiciel depuis la création de la cour de justice de la CEMAC389. Cela interpelle et soulève le problème des difficultés liées à la mise en oeuvre du renvoi préjudiciel au sein de la CEMAC. Et ces difficultés peuvent se résumer en général au niveau de l`Etat membre en deux volets à savoir : les insuffisances du contrôle par l`Etat et les organes communautaires de l`intégration CEMAC au sein de la communauté (1) et également la confusion par les protagonistes des procédures judiciaires nationales et celles du contentieux communautaire (2).

1) Les insuffisances du contrôle exercé par les Etats et les organes communautaires.

En général, le contrôle de l`interprétation et de l`application du droit communautaire est de la responsabilité autant des Etats membres que des organes de la communauté. La mise en oeuvre du droit communautaire met en jeu les particuliers, les organes communautaires et les Etats membres. La juridiction communautaire intervient, lorsque le litige soulève une question préjudicielle. La remarque d`une défaillance est faite au niveau des entités chargées de contrôler l`applicabilité et l`interprétation du droit communautaire. L`insuffisance du contrôle des institutions communautaires est perceptible dans la mesure où ce sont ses institutions qui sont en premier responsables de la bonne applicabilité du droit communautaire, ceci indépendamment des Etats membres. Ce contrôle met en exergue premièrement de l`action des institutions communautaires, il s`agit généralement du contrôle de la légalité des actes que certaines institutions communautaires conçoivent. Car ces actes doivent l`être selon les dispositions du traité constitutif de la CEMAC. Et ce contrôle de légalité peut être initié par les Etats membres et les organes

387 TCHUINTE (J), « L'effectivité du droit communautaire en Afrique centrale », op cit, p 413.

388 POT VIN-SOLIS (L), « Le concept de dialogue entre les juges en Europe », in le dialogue entre les juges européens et nationaux, incantation ou réalité ? Bruxelles, Bruyant, 2004, p34.

389 Voir l`affaire Ecole inter-états des douanes c/ Djeukam Michel, jugée le 25 novembre 2010.

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communautaires seuls justiciables à même de contester la validité des actes en question390. Ce contentieux montre véritablement les limites de l`action des citoyens sur ce plan et demeure très limité en droit communautaire CEMAC. Car les organes tels que la commission n`ont par exemple jamais saisi la cour pour un recours en annulation. C`est le cas également de l`action en manquement des Etats membres qui sont en défaillance dans l`application du droit communautaire. Pourtant ce sont premièrement les organes communautaires qui doivent mettre en oeuvre la procédure en manquement des Etats membres et deuxièmement les Etats membres. « D'une manière générale, les Etats rechignent souvent à l'idée d'engager des poursuites les uns contre les autres et la commission CEMAC n'a jamais critiqué de façon officielle l'action d'un Etat membre »391. Généralement la cour a été saisie par des personnes de droit privé. Cette carence montre comment il est vain de compter sur l`action des Etats membres et des organes de la communauté pour assurer l`effectivité du droit communautaire. Comme si les Etats membres toléraient entre eux les infractions au droit communautaire CEMAC. Le contrôle de l`applicabilité du droit communautaire ne peut reposer que sur les citoyens ou bien les particuliers.

2) La familiarisation des acteurs au contentieux communautaire aux procédures judiciaires nationales.

Généralement le citoyen reste mal informé de l`activité communautaire, de plus il est très peu enclin à la procédure communautaire. Il privilégie les procédures qui lui sont familières à savoir le recours à la diplomatie, c`est à dire que les usagers préfèrent les arrangements à l`amiable pour résoudre des différends qui peuvent intervenir, ceux qui sont sous le prisme du droit communautaire. Mis à part le justiciable, il faut également mettre en exergue les avocats dont la connaissance des questions communautaires est limité. De plus il n`y a pas au préalable une formation proprement dite des rouages du métier c`est-à-dire qu`il n`existe pas véritablement une école nationale de formation des avocats. Qui renforcera plus des stages, un apport considérable en connaissance particulière du droit, à l`instar du droit et des procédures communautaires. Surtout que l`application du droit communautaire implique une connaissance d`un très grand nombre de matières juridiques. Le constat est décevant au niveau de la cour de justice de la CEMAC, l`ignorance des procédures communautaire est flagrante. C`est la raison pour laquelle la majorité des requêtes transmises au greffe de la cour sont irrecevables, pour non respect de la procédure. Le frein au mécanisme de renvoi

390 Voir l`article 14 de la convention régissant la cour de justice de la CEMAC.

391 Voir TCHUINTE (J), « L'application effective du droit communautaire en Afrique Centrale », op cit, p 417.

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préjudiciel est aussi l`oeuvre des magistrats. Pourtant le rôle du juge national est central dans la diffusion du droit communautaire dans l`Etat. Les juges nationaux préfèrent le plus souvent régler les litiges ayant un rapport avec le droit communautaire en se référant au droit interne. De plus ils considèrent le plus souvent les règles de droit communautaire comme celle de droit international classique. La mise en oeuvre du renvoi préjudiciel étant conditionnée à la connaissance préalable de la distinction de la règle de droit communautaire en question.

Le parlement communautaire et les parlements nationaux ne partagent pas dans les faits des relations particulières ce qui rend la conciliation entre ces deux institutions difficile.

PARAGRAPHE II : Des rapports enclin au manque de conciliation entre le parlement communautaire et les parlements nationaux.

Le parlement communautaire et les parlements nationaux sont manifestement les institutions qui renvoient au premier constat à la démocratisation d`un système. Pourtant le parlement communautaire, loin d`être éminemment législateur, est l`une des institutions les plus faiblement pourvue en prérogatives au sein de la communauté. Son rôle dans le processus CEMAC est très réduit et reste insuffisant dans l`activité communautaire. Ses pouvoirs au sein de la CEMAC sont sans véritable impact392, au vue des prérogatives des autres organes communautaires. Contrairement aux parlements nationaux dans le système institutionnel étatique, le parlement communautaire est un nain au sein de la communauté. C`est peut être la raison pour laquelle, ne partageant relativement pas les même pouvoirs, et n`ayant pas la même prééminence au sein de leur système respectifs, ces deux institutions ont des raisons d`être en relation de coopération (B). Cependant la réalité semble être tout autre parce que les relations entre le parlement communautaire et les parlements nationaux sont enclin à la concurrence (A).

A/ Un rapport de concurrence entre le parlement communautaire et les parlements nationaux.

Avec le transfert des compétences des Etats vers la communauté, les parlements nationaux ont assisté à une réduction considérable de leur compétence, que se soit

392 L`article 4 de la convention régissant le parlement communautaire stipule que « 1. Le Parlement exerce les pouvoirs qui lui sont attribués par le Traité instituant la CEMAC, les textes organiques subséquents et la présente Convention. Il légifère par voie de directives. 2. Le Parlement peut être saisi pour émettre des avis sur des affaires intéressant la Communauté ».

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en matière législative ou bien du contrôle de l`action gouvernementale. Bien que ce transfert ne soit pas bénéfique au parlement communautaire, La création de celui-ci pose nécessairement un problème de conciliation, de collaboration et de coopération entre les parlements nationaux et l`institution soeur qui se trouve au niveau communautaire. Pourtant dans une atmosphère ou le législateur communautaire n`a pas organisé les rapports entre le parlement communautaire et les parlements nationaux, la tendance est à la concurrence entre ces institutions, le conflit étant en rapport à l`analogie organisationnelle entre le parlement communautaire et les parlements nationaux (1) et à la diminution du rôle des parlements nationaux (2), à cause du transfert de la compétence de contrôle de la politique communautaire des parlements nationaux au parlement communautaire.

1) Le fondement populaire du parlement communautaire et des parlements nationaux : une analogie source de conflit.

Le parlement communautaire est à l`image des parlements nationaux. Le parlement communautaire partage la même organisation que les parlements nationaux c`est ainsi que l`on rencontrera au sein du parlement communautaire un fondement populaire semblable aux parlements nationaux. « Le Parlement Communautaire est l'assemblée représentative des populations de la CEMAC »393 et en plus « les membres du Parlement sont chacun représentant de toutes les populations de la Communauté »394. Le parlement communautaire partage donc la même légitimité que les parlements nationaux, cela est un risque de conflit dans la mesure où des institutions peuvent se réclamer légitimement compétentes de représenter la volonté générale c`est-à-dire celle du peuple communautaire tout entier pour les parlementaires communautaires, et une partie de la légitimité du peuple communautaire pour les parlements nationaux respectifs, chacun en ce qui concerne son territoire. Cela est d`autant plus inquiétant que les parlementaires communautaires « les députés sont élus aux suffrages universels direct »395 comme les parlementaires nationaux. Ainsi comme la souveraineté nationale appartient au peuple qui l`exerce par l`intermédiaire des membres du parlement. De fait par les élections au suffrage universel direct du parlement communautaire, l`on peut dire que celui-ci bénéficie également de l`exercice exerce des souverainetés nationales autant que les parlements nationaux. Les membres du parlement communautaire sont dans leurs droits de se prévaloir l`exercice des souverainetés nationales

393 Voir l`article 3 (1) de la convention régissant le parlement communautaire.

394 Ibid. alinéa 2.

395 Voir l`article 5 de la convention régissant le parlement communautaire.

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parce que « tout mandat impératif est nul »396. La souveraineté nationale appartient effectivement au peuple avec cette particularité qu`elle est exercée par le parlement national, le président de la république mais également par le parlement communautaire. La revendication de la légitimité populaire des décisions et des lois émanant des parlements nationaux n`est plus la seule prérogative de ceux-ci. Le parlement communautaire pourrait éventuellement avoir le droit de réclamer une part des souverainetés nationales des Etats membres autant que les parlements nationaux. Il s`agit bien évidemment d`un éventuel conflit qui risquerait de surgir si le législateur communautaire ne règle pas les questions relatives à la coopération entre ses institutions. La situation est encore abordable parce qu`à ce jour, le parlement communautaire et les parlements nationaux ont encore des liens organiques puisque, les parlementaires communautaires sont désignés en leur sein par les parlements nationaux397

2) La diminution des prérogatives des parlements nationaux : l'effet du transfert des compétences nationales vers la communauté.

La construction communautaire CEMAC a entrainé en elle même une diminution du rôle des parlements nationaux, à la fois comme contrôleur de l`exécutif conformément au traité constitutif CEMAC qui dispose « Le contrôle du fonctionnement et des activités de la Communauté comprend un contrôle parlementaire assuré par le Parlement Communautaire... ». Ensuite « Il est chargé du contrôle démocratique des Institutions, Organes et Institutions Spécialisées participant au processus décisionnel de la Communauté »398. En plus, on remarque une diminution de son rôle de législateur d`autant plus que « le Parlement Communautaire (...) légifère par voie de directives » »399. Certes le transfert des responsabilités de l`échelle nationale à l`échelle communautaire s`est effectué essentiellement en direction de la conférence des chefs d`Etats. Et le parlement communautaire n`a pas acquis tous les pouvoirs qui lui auraient permis de jouer un rôle parlementaire complet dans les affaires communautaires. Ainsi donc, bien que l`on puisse dire qu`il y a un déficit démocratique structurel au niveau du parlement communautaire, il est tout de même admis que les pouvoirs attribués au parlement réduisent considérablement ceux des parlements nationaux. Premièrement parce que le parlement communautaire s`est vu attribuer

396 Ibid.

397 L`article 60 du traité révisé de la CEMAC stipule que « En attendant la création du Parlement Communautaire, il est institué une Commission Interparlementaire. Celle-ci est composée de cinq (5) membres par Etat désignés par l'organe législatif de chaque Etat membre ».

398 Voir à cet effet l`article 46 du traité révisé CEMAC.

399 Voir l`article 47 du traité révisé CEMAC.

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des domaines d`influence qui sont des domaines de compétence des parlements nationaux à savoir «l' intégration des voies de communication des Etats membres en vue d'assurer la libre circulation des personnes et des biens ; l' interconnexion des télécommunications pour constituer un réseau communautaire performant ; l' interconnexion des réseaux d'énergie , l' interconnexion des réseaux d'information , l' intégration sociale , la politique communautaire de la santé publique ,la politique communautaire de l'éducation , la politique communautaire de l'environnement , la politique communautaire de la recherche scientifique et technique ; la politique communautaire de l'agriculture , la jeunesse et sport , la citoyenneté de la communauté ; les droits de l'homme et libertés , la révision du Traité de la CEMAC »400. Cela correspond aux domaines attribués à la loi par les constitutions de certains Etats comme le Cameroun. En plus de cela, les domaines de compétences des directives émanant du parlement communautaire, empiéteront sur les domaines de compétence législative des parlements nationaux. Le parlement communautaire dispose comme les parlements nationaux du pouvoir de contrôler l`activité démocratique des organes et des institutions de la communauté. Bien qu`il s`agit d`une disposition ambigüe en ce sens où l`on n`appréhende pas sur quoi peut être basé un contrôle démocratique d`une institution ou d`un organe communautaire. Est-ce sur la légitimité des autorités y siégeant ?, ou est ce sur la légalité du processus de prise de décision ? Dans tous les cas le parlement communautaire s`est vu reconnaître une énorme prérogative, bien que paradoxale. De plus si le parlement communautaire devait véritablement contrôler démocratiquement les organes et les institutions de la communauté, s`agirait-il d`un contrôle qui aboutira à une action bien précise ? En revanche les parlements nationaux contrôlent l`action de l`exécutif dans l`Etat, le parlement communautaire également exerce le contrôle sur les organes et les institutions qui jouent le rôle d`exécutif au sein de la CEMAC, et qui se trouve généralement être à la tête de leurs Etats respectifs. Cela est certainement embêtant pour les parlements nationaux parce que le contrôle démocratique des organes et institutions communautaires, coïncidera avec le contrôle de l`activité communautaire des membres du gouvernement. Par conséquent, les parlements nationaux se trouvent en concurrence avec le parlement communautaire, en ce qui concerne le contrôle de l`action de l`exécutif communautaire ou nationale.

400 Voir L`article 4 (2) de la convention régissant le parlement communautaire.

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Pourtant le législateur communautaire a l`exemple de son homologue de l`Europe401a un intérêt urgent d`organiser la cohabitation des parlements nationaux avec le parlement communautaire.

B/ L'impératif d'un rapport coopération entre le parlement communautaire et les parlements nationaux : la garantie du contrôle démocratique de la législation communautaire à tous les niveaux.

Bien que certains points soient de nature à créer une forme de conflit entre le parlement communautaire et les parlements nationaux, l`évolution de l`intégration impose une coopération entre ses institutions. Cet impératif est important parce qu`il permettra une participation concertée des parlements nationaux aux activités communautaires (1) dans le but de réduire la portée du transfert de compétence vers les instances communautaires. L`autre impératif est lié à l`analogie des organes et de groupes politiques existant entre les parlements nationaux et le parlement communautaire qui constitue un véritable instrument de coopération (2).

1) Un impératif de coordination par la participation concertée des parlements nationaux et communautaire aux activités de la CEMAC.

Le véritable problème que rencontrent les parlements nationaux dans le processus communautaire est le manque d`informations sur l`élaboration des règles communautaires. Alors, une participation des parlements nationaux à l`élaboration des règles de droit ne fera que combler le déficit communautaire dont font preuve ceux-ci. Ainsi on peut par exemple mettre sur pied une forme de transmission des documents de consultation et des propositions législatives des organes communautaires. Pour que les parlements nationaux puissent examiner ces propositions avant qu`une décision soit prise par la conférence des chefs d`Etat ou par d`autres organes ou institutions communautaires. Au sein de l`union européenne c`est déjà le cas, la coopération se manifeste par l`intensification des contacts, l`échange d'informations, l`organisation de rencontres régulières, et éventuellement l`octroi de facilités réciproques. Ainsi, il est important d`instituer une étroite coopération et un échange permanent d`informations entre les parlements nationaux et le parlement communautaire.

401 Voir le protocole sur le rôle des parlements nationaux annexé au traité d`Amsterdam, ainsi que dans la déclaration annexe du traité de Nice de 2000 et aussi celle du conseil européen de Laeken de 2001. Le traité de Lisbonne instaure un système d`alerte précoce c`est-à-dire un nouveau mécanisme permettant aux parlements nationaux de veiller à ce que les nouvelles propositions législatives respectent les principes de subsidiarité (protocole N°1 sur le rôle des parlements nationaux dans l`union européenne, et le protocole N°2 sur l`application des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

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Cela entretiendra des rapports étroits entre les parlements. Et en plus entrainerait une implication à double niveau des parlements dans l`oeuvre de la vulgarisation du droit communautaire : une application autant nationale que communautaire du droit communautaire. Au sein de l`Europe ou le processus de coopération est déjà avancé, les parlements nationaux ont acquis un certain contrôle sur l'action communautaire de leurs gouvernements, soit à la suite de réformes constitutionnelles, soit en vertu d'engagements gouvernementaux, soit grâce à des modifications de leurs propres méthodes de fonctionnement. Leurs commissions spécialisées dans les affaires européennes ont joué un rôle majeur dans cette évolution, en coopération avec le parlement européen. C`est dans cette perspective que le protocole sur le rôle des parlements nationaux annexé au traité d'Amsterdam encourage une participation accrue des parlements nationaux aux activités de l'UE et prévoit à cette fin une transmission plus rapide des documents de consultation et des propositions législatives de la Commission, pour que les parlements nationaux puissent examiner ces propositions avant qu'une décision soit prise par le Conseil. Ainsi le contrôle de l`action communautaire par les gouvernants est coordonné autant au niveau national que communautaire. Alors la participation concertée des parlements à l`activité communautaire améliorera la coopération entre ses institutions. Peut-on établir la coopération des parlements sur la base d`autres instruments ?

2) Un impératif politique lié à la concertation des autorités et des groupes politiques des parlements nationaux et communautaire : autres possibles instruments de coopération.

L`on peut, au niveau de la communauté, mettre en place entre les

parlements, une plate forme de concertation entre les homologues nationaux et
communautaires pour une rencontre annuelle des autorités des parlements de la zone CEMAC. Cette initiative est déjà présente au sein de l`Europe. Après les rencontres organisées en 1963 et 1973, ces conférences de concertation communautaire et nationale ont été instituées à partir de 1981. Réunissant les présidents des parlements nationaux et celui du parlement Européen, elles ont eu lieu initialement tous les deux ans. Préparées par des réunions des secrétaires généraux, elles traitent de questions précises de coopération entre ces parlements nationaux et Européen402. Une telle initiative au sein de la CEMAC sera porteuse d`une création des liens de coopération entre les parlements nationaux et le parlement

402 OBERDOFF (H), « Les incidences de l'union européenne sur les institutions françaises », op cit, p 23.

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communautaire. L`on peut même également mettre sur pieds une rencontre entre les différentes commissions des parlements nationaux en charge de la question communautaire pour avoir des informations concertées sur l`activité communautaire des membres du gouvernement en vue de mieux contrôler l`action de leurs gouvernements respectifs, afin d`avoir un impact important sur l`activité communautaire. Dans l`union européenne cette idée a été proposée par le président de l'Assemblée nationale française, elle implique le parlement européen à la concertation. Elle est sous forme d`une conférence qui réunit tous les six mois, depuis 1989, les organes des parlements nationaux spécialisés dans les affaires communautaires, et six membres du parlement européen conduits par les deux vice-présidents chargés des relations avec les parlements nationaux. Cette réunion est convoquée par le parlement du pays qui a la présidence de l'Union et préparée en commun par le parlement européen et par les parlements, chaque conférence traite de thèmes majeurs de l'intégration européenne403. Pour également créer et renforcer les relations entre les parlements de la zone CEMAC, faudra promouvoir un contact entre groupes politiques du parlement communautaire et les groupes correspondants des parlements nationaux. Il s`agit d`une manière pour les parlementaires d`une même idéologie politique, d`harmoniser leurs aspirations communautaires pour constituer un front que ce soit au niveau national ou communautaire.

CONCLUSION DU QUATRIEME CHAPITRE.

De ce qui précède, il convient de rappeler, qu`il a été question dans ce chapitre de démontrer l`influence de la qualité de membre de la CEMAC sur certaines institutions chargées de gouverner. Nous avons dans cette oeuvre constatée une forme de dédoublement fonctionnel des institutions étatiques qui se produit de façon naturelle par le fonctionnement de la Communauté. Ses réadaptations de l`organigramme institutionnel de l`exécutif, du législatif et du judiciaire sont une exigence de la règle communautaire. Par la suite nous avons présenté les rapports qui existeraient entre les institutions symétriques communautaires et étatiques, à savoir le parlement et la juridiction communautaire avec les parlements et juridictions des Etats membres de la CEMAC. La tache a consistée à montrer entre les parlements communautaire et étatiques il existerait des relations difficiles. Toutefois, cela se présente d`une tout autre façon dans le rapport entre la cour de justice communautaire et les

403 Il faut signifier que la conférence des commissions des affaires communautaires et européennes des parlements de l`union européenne n`est pas un organe de prise de décision mais de consultation et de coordination parlementaire qui prend des positions par consensus. Le protocole sur le rôle des parlements nationaux du traité d`Amsterdam dispose que la COSAC peut soumettre toute contributions, toutes contributions soumises par la COSAC ne lient en rien les parlements, ni ne préjugent leur positions.

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juridictions nationales. L`élément permettant cette conciliation et cette collaboration étant la procédure de renvoi préjudiciel. Le constat a été de savoir que l`appartenance à la CEMAC implique pour les institutions de l`Etat une adaptation du dispositif institutionnel étatique, dans le but de répondre à l`exigence qu`imposent les objectifs des traités et conventions de la Communauté.

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CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE.

Nous avons vu que la qualité de membre de la CEMAC implique pour l`Etat souverain, une normalisation de son ordre juridique et institutionnel.

Il nous a été donné de constater que l`appartenance à la CEMAC entraîne inéluctablement une acceptation d`un certain nombre de principes fondamentaux liés à la nature juridique des règles de droit communautaire. Cette réception du droit communautaire impose aux normes de droit interne une attitude consistant soit à la disparition, soit à la métamorphose lors de l`intégration de l`aspect communautaire qu`assume dorénavant l`Etat souverain. On assiste incontestablement à une nouvelle architecture normative au sein de l`Etat. Ce qui entraîne une réadaptation de la hiérarchie des normes. Tant il est vrai, que l`appartenance de l`Etat à la CEMAC crée des conflits de compétences, des remises en question de la primauté de la norme fondamentale et de la complexification du rôle des juges nationaux. Les implications normatives de la qualité de membre de la CEMAC influencent considérablement la législation nationale au point de créer un droit national de l`intégration sous régionale.

Etre un Etat membre revient également à organiser le tissu institutionnel étatique pour accueillir et à assumer la nouvelle casquette de l`Etat. On remarque ainsi un dédoublement fonctionnel du rôle de certaines institutions centrales de gestions de la politique de la nation. Alors la politique nationale de chaque Etat membre se décide au sein de la CEMAC et elle est reprise et exécutée dans nos Etats membres. Cette perspective accordant aux institutions les fonctions communautaires et nationales. En ce qui concerne les départements ministériels dont le portefeuille n`exige pas une représentation au sein de la communauté, ceux-ci subissent en quelque sorte l`activité communautaire. Ils sont généralement réduits au rang d`exécutant des décisions communautaires relevant de leurs départements respectifs. Il n`en est pas de même des institutions symétriques à ce des Etats à savoir le parlement communautaire et la cour de justice de la CEMAC. Bien que cette dernière bénéficie d`une organisation de sa cohabitation avec les juridictions nationales par la procédure de renvoi préjudiciel, le parlement communautaire, en instance de mise en place devra bénéficier, de l`organisation de ses relations avec les parlements nationaux. Toutefois, il est de constat que l`appartenance à la CEMAC a des conséquences pour les Etats souverains.

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CONCLUSION GENERALE : LA NATURE JURIDIQUE DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC.

Il n'y a pas de véritable réflexion qui ne finisse par poser plus de questions qu'elle n'en résout. Notre analyse n'échappe pas à cette quasi-règle. Nous n'avons pas la prétention d'avoir épuisé le débat, au terme de ces quelques réflexions sur la dialectique de l'État membre de la CEMAC.

Nous avons au début de notre analyse posé la question des implications de la qualité de membre de la CEMAC pour un Etat souverain. Et afin de comprendre le problème soulevé par cette dialectique, nous avons d`abord présenté la complexité du statut de membre de la CEMAC - étape nécessaire pour appréhender les implications de celui-ci - en montrant succinctement l`acquisition de cette qualité, et sa caractérisation, au sein du chapeau intitulé la qualité de membre de la CEMAC. Ensuite nous avons dégagé les attributs et les prérogatives inhérentes à la qualité de membre au sein de la communauté, dans le chapitre intitulé les pouvoirs de l`Etat membre de la CEMAC. Enfin il nous a été permis de démontrer les implications de la qualité de membre de la CEMAC pour les Etats souverains. Implications qui nous ont amenées à les présenter autant sur le plan normatif qu`institutionnel.

À la fin de notre recherche, des questions fondamentales fusent et méritent d`être posées. Elles peuvent se formuler de la manière suivante : qu`est ce qui ressort de cette communautarisation de l`Etat à des fins d`intégration communautaire ? Que devient la forme de société la plus achevée depuis la fin du XVIIIème siècle ? Somme-nous toujours en présence d`un Etat au sens de la théorie générale du droit constitutionnel ? Ou bien à quelle entité juridique correspond actuellement l`Etat membre après nos développements ?

Sans glisser dans la manie qui voudrait que l`on qualifie un objet juridique que l`on n`appréhende pas de sui generis, nous essayerons de rechercher la nature juridique de l`Etat membre dans le domaine du droit constitutionnel et de la pratique communautaire , bien que cela puisse paraitre réducteur pour les communautaristes qui proclament la spécificité et l`autonomie de cette science. Il faut dire que la configuration structuro fonctionnelle de l`organisation supranationale qu`est la CEMAC, renvoi des éléments qui coïncident avec des formes d`Etat composé existantes dans la théorie du droit constitutionnel. Au point ou l`on se demanderait si l`Etat membre ne serait pas une entité juridique fédérée ou confédérée ? En effet si l`on s`attarde sur le traité révisé de la CEMAC il est énoncé que :

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« Dans chacun de ces deux domaines404, les Etats membres entendent passer d'une situation de coopération, qui existe déjà entre eux, à une situation d'Union susceptible de parachever le processus d'intégration économique et monétaire »405. En évoquant l`union en droit, concernant les Etats, il se dégage deux cas de figure possibles à savoir la fédération ou la confédération, bien que cette dernière soit surannée. Nous éviterons ainsi la pensée prosaïque, pour ne pas dire simpliste, qui voudrait que l`on qualifie les organisations intégratives de sui generis.

Pourtant toute organisation supranationale intégrative vise une union bien précise. Dans ce sens et au sein de l`union européenne, l`on s`accorde tant bien que mal à reconnaitre un cheminement progressif vers une fédération européenne, parce que les domaines de souverainetés unies, qui permettent de qualifier une union de fédérale, sont sur le point d`être atteint à savoir l`économie et la monnaie, la politique internationale et la défense commune. Au sein de l`Union Européenne, Il n`y a que la politique de défense commune qui n`est pas encore atteinte. De plus, « Le fédéralisme a de tous temps constitué une référence de base et une source d'inspiration pour la construction européenne. De Robert Schuman à Joschka Fischer, nombreux sont les responsables politiques qui ont appelé de leurs voeux une évolution vers une forme d'organisation fédérale de l'Europe »406. Ainsi l`on peut en tirer que toute organisation supranationale telle qui soit peut d`être classée selon l`esprit de ses fondateurs et de ses textes de base dans l`une des deux catégories des Etats composés suscités. Caractériser donc l`Etat membre de la CEMAC reviendrait d`abord à cerner la nature juridique de l`organisation elle même. Et ensuite partir de là, pour dire si l`Etat membre est une forme d`Etat pré-fédéré ou fédéré, pré-confédéré ou confédéré.

La fédération est la forme d`Etat composé qui se caractérise par l`abandon de la souveraineté des Etats fédérés au détriment d`un Etat supra étatique autrement appelé Etat fédéral, à qui revient l`exercice des compétences économiques, monétaires, de politique internationale et de défense commune. Elle se caractérise par les principes d`autonomie, de participation et de superposition. « Le fédéralisme évoque souvent les spectres d'une centralisation extrême, alors même que cette forme d'organisation politique doit avant tout

404 A savoir dans une union économique et une union monétaire.

405 Voir l`article 2 du traité révisé de la CEMAC en 2008.

406 Voir SIDJANSKI (D), « L'approche fédérative de l'union européenne ou la quête d'un fédéralisme européen inédit », groupe d`études et de recherches notre Europe, Etudes et Recherches n° 14, Juillet 2001, consulté à http://www.eurofederalism.com

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son existence à la volonté de préserver l'autonomie et la diversité des entités fédérées »407. L`illustration la plus appropriée est les Etats unis d`Amérique. Alors que la confédération est une union des Etats sur un certain nombre de domaines de gestion de la souveraineté, tout en se préservant la capacité souveraine de se retirer unilatéralement de la dite union408. De plus les Etats confédérés gardent leur indépendance et l`exercice de leur souveraineté. La confédération n`est pas très loin de l`idée d`une appartenance à une organisation internationale classique. De ce qui précède l`on peut déduire qu`une situation pré-fédérale serait la phase qui précède la fédération et une situation pré-confédérale renverrait à la posture précédant la confédération.

De fait, en s`accordant que la CEMAC est une coopération d`abord économique et monétaire avant d`être également une intégration des politiques sectorielles, mettant en exergue le transfert de compétences409, qui traduise une union relative sur les domaines de compétences sus évoqués. La dynamique de l`intégration de la CEMAC chemine vers une union, vraisemblablement une union qui remettra en question la forme actuelle de l`Etat. Parce que les domaines de transfert de compétences et de coopération de la CEMAC sont semblables à ceux d`une union fédérale. Cependant entre ce qui est inscrit dans les textes de base de la CEMAC, les actes additionnels et protocoles y afférents, et la pratique communautaire quotidienne, on relève une inadéquation qui traduit soit un refus des Etats membres de voir avancer le projet communautaire, soit une évolution lente, qui tient compte des difficultés des Etats d`appréhender un processus devant aboutir à une union. Que ce soit l`un ou l`autre, le constat demeure le même, le concept d`union évoqué dans les textes communautaires est mal connu et en plus, il suscite de la méfiance. C`est de toute évidence la raison de son évolution lente et également de l`hostilité des Etats de se voir communautariser. Face à cette situation qui démontre une réticence d`intégrer réellement le projet de la CEMAC dans les Etats, nous nous sentons relativement indécis sur la forme actuelle de l`Etat membre de la CEMAC. Toutefois plusieurs éléments nous permettent de cerner, en l`état actuel, l`Etat membre de la CEMAC. Les éléments en question étant d`abord l`extrême liberté dont bénéficient les Etats membres de la CEMAC dans l`application des décisions communautaires. Ensuite la fragilité des projets communautaires qui sont généralement voués à l`échec, à l`instar de la libre circulation de personnes qui aurait dû entrer en vigueur le 1er janvier 2014. Et enfin l`omniprésence de la volonté des Etats dans la prise de décisions et

407 Ibid.

408 Voir a cet égard la confédération Sénégalo-gambienne

409 Compétences renvoie ici aux compétences souveraines de l`Etat.

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dans la bonne marche de la CEMAC. Tous ses éléments permettent d`affirmer prudemment que l`Etat membre de la CEMAC est un Etat pré-confédéré c`est-à-dire une entité juridique qui chemine vers un Etat confédéré.

Toute fois, il ne suffit pas de dire que la nature juridique vers laquelle chemine la CEMAC ou l`Etat membre soit une fédération ou un Etat fédéré. Mais il s`agit d`affirmer à la lumière de la pratique réelle de l`intégration au sein de la CEMAC que les réticences de ses membres à intégrer l`esprit communautaire, fait en sorte que la CEMAC soit obliger dans son processus de passer par des étapes partant d`une pré-confédération, ensuite à une confédération, après aboutir à une pré-fédération, pour enfin chuter à une union fédérale, pour atteindre les objectifs fixés par le traité révisé CEMAC, si tant il est vrai que l`union donc il est question dans le traité constitutif soit la fédération. Et ces différents étapes sont nécessaire dans l`optique de permettre une évolution progressive et respectueuse de tous les Etats membres, permettant ainsi à ceux-ci de s`engager véritablement dans le projet communautaire qui devra aboutir à une union.

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· Acte additionnel N° 07/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02 portant statut de la chambre des comptes de la CEMAC du 14 décembre 2000.

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· Acte additionnel N°18/08-CEMAC-CCE-09 portant adoption du principe de la mise en place généralisée des ministères chargés de l`intégration régionale au sein des gouvernements des Etats membres de la CEMAC signé le 25 Juin 2008 à Yaoundé au Cameroun

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· Convention régissant la cour de justice de la CEMAC du 30 Janvier 2009 à

Libreville au Gabon.

· Convention régissant le parlement communautaire 30 Janvier 2009 à Libreville au Gabon.

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· Traité révisé de la CEMAC du 30 Janvier 2009 à Libreville au Gabon.

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· Constitution de la république centrafricaine

· Constitution de la république du Congo

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· Constitution de la République Gabonaise Loi N° 3/91 du 26 Mars 1991

· Constitution de la république du Cameroun 18 janvier 1996 modifié en 2008

· Constitution de la République du Tchad du 31 mars 1996 révisée

2. JURISPRUDENCES, AVIS ET DECISIONS.

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TABLE DES MATIERES

Pages

Avertissement i

Dédicaces ii

Remerciements . iii

Résumé/Abstract iv

Liste des principales abréviations v

Sommaire viii

INTRODUCTION GENERALE .. 1

I. La Notion d'Etat membre et la Communauté Economique et Monétaire

l'Afrique centrale

A. l'Etat membre

de

.

..

2

2

3) La Définition De l`Etat

 

2

4) L`Etat Membre

.

3

B. La Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)

5

 

3) L`aperçu historique du mouvement d`intégration en Afrique centrale

5

 

4) La CEMAC, une organisation d`intégration sous régionale ..

6

 

II. La communauté des Etats et les Etats de la communauté d'intégration

.

8

A. l'Etat nation souverain et la qualité de membre de la communauté

8

 

3) L`Etat nation et la qualité de membre de La communauté 8

4) L`Etat souverain et la qualité de membre de la communauté 11

B. La Problématique, l'intérêt de l'étude, la revue littéraire et le Choix

de la Méthodologie 13

3) La problématique et l`intérêt de l`étude . 13

4) La revue littéraire et le choix de la méthodologie 15

PREMIERE PARTIE LE STATUT D'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC .. 19

CHAPITRE I : LA CONSISTANCE DU STATUT D'ETAT MEMBRE

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 161

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 162

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DE LA CEMAC 21

SECTION I : L'ACQUISITION DU STATUT D'ETAT MEMBRE DE LA

CEMAC 21

PARAGRAPHE I . Les conditions préliminaire à l'acquisition du statut de membre de la

CEMAC 21

A. Les conditions de fond pour une éventuelle acquisition de la qualité de membre de la

.. 22

CEMAC 21
3) Conditions ambigüe d`appartenance à la région Afrique

4) La condition politique : le partage des idéaux des Etats fondateurs . 23

B. Les conditions de forme : procédure d`attribution de la qualité de membre de la

CEMAC

.

24

3) L`accord unanime des membres fondateurs de la CEMAC : un accord veto 24

4) L`accord unanime des Etats membres de la communauté : une formalité 26

PARAGRAPHE II . Les conditions ultérieure à l'adhésion du statut de membre de la

CEMAC .. 27

A. Les adaptations du traité instituant la CEMAC pour l`admission du nouvel Etat

27

3) L`adaptation à l`adhésion : l`adaptation linguistique des instruments communautaires au

nouvel Etat membre 28

4) L`adaptation au retrait : droit de dénonciation du traité instituant la CEMAC : le principe

de non appartenance définitif à la CEMAC

membre ..

.

29

B. L`obligation d`association du nouvel Etat membre aux acquis

communautaires 31

1. L`obligation d`association aux acquis des politiques économiques communes 31

2.

 

....

32

 

L`obligation d`association aux acquis des politiques
sectorielles

SECTION II : LA CARACTERISATION DE L'ETAT MEMBRE

DE LA CEMAC 33
PARAGRAPHE I . La caractérisation sociologique de l'Etat membre de la CEMAC ...... 34

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 163

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

A. La consistance de la population communautaire 34

3) Des peuples à une population communautaire identifiée 34

4) La population communautaire: le destinataire par excellence

des normes communautaires .. 37

B. Le territoire communautaire : l`Afrique Centrale 38

1) la consistance du territoire communautaire : les différentes composantes et

la délimitation du territoire communautaire 38

2) Le domaine de compétence spatiale de l`Etat membre de la CEMAC :

le rapport Etat et son territoire . 39

PARAGRAPHE II . La caractérisation juridique de l'Etat membre de la CEMAC

.42

A. La personnalité juridique de l`Etat membre de la CEMAC 42

1. La non reconnaissance textuelle et explicite de la personnalité juridique à

l`Etat membre de la CEMAC 42

2. la déduction de l`exercice de la personnalité juridique pour l`Etat membre au sein de la

CEMAC 43

B. Le problème de la souveraineté des Etats membres de la CEMAC 44

3) La conception de la souveraineté en droit international 45

4) La souveraineté des Etats membres de la CEMAC : adéquation entre

exercice de la souveraineté et transfert des compétences souveraines 49

CONCLUSION DU PREMIER CHAPITRE 52

CHAPITRE II : LES POUVOIRS DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC. 53

SECTION I : LE POUVOIR « CONSTITUANT » DE L'ETAT MEMBRE

DE LA CEMAC 54
PARAGRAPHE I . Un « pouvoir constituant » reposant sur la conférence des chefs

d'Etats . 54

A. Les « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d`Etats manifestant le pouvoir

constituant . 55
3) L`acte de validité de l`ordre juridique communautaire : le traité instituant la

CEMAC . .. 55

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 164

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

4) Les actes additionnels : acte de validité de l`ordre juridique

60

3) L`applicabilité immédiate des actes

constitutionnels

.

communautaire 59
B. Les effets juridiques des « actes constitutionnels » de la conférence des chefs d`Etat

.

60

4) L`effet direct des « actes constitutionnels » de la conférence des chefs

d`Etats 61

PARAGRAPHE II . Le régime juridique des actes constitutionnels de la conférence des chefs

d'Etat 62

A. Les fondements du « pouvoir constituant » de l`Etat membre 62

1. Le fondement national du « pouvoir constituant » de l`Etat

membre 62

2. Le fondement communautaire du « pouvoir constituant » de l`Etat membre

.64

B. Le contrôle de la validité des normes inferieures aux « actes constitutionnels »

communautaires 65

3) 66

1) Le contrôle national de la validité des normes inferieures aux « actes

constitutionnels » 68

..

Le contrôle par la communauté de la validité des normes inferieures aux « actes constitutionnels »

SECTION II : LES POUVOIRS CONSTITUES DE L'ETAT

MEMBRE 70

A. Les organes et les éléments manifestant la nature législative des actes

communautaires 70

3) Les organes législateurs de la CEMAC

PARAGRAPHE I . Le pouvoir « législatif » de l'Etat membre de la CEMAC 70

.

70

4) Les éléments caractérisant la nature législative des actes communautaires 71

B. Les actes juridiques communautaires manifestant le caractère législatif.... 72

3) La manifestation législative du règlement CEMAC 73

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 165

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

4) La quasi manifestation législative du règlement cadre et de la

directive 74

PARAGRAPHE II : Le pouvoir exécutif de l'Etat membre de la CEMAC 76

A. La réduction significative du pouvoir exécutif de l`Etat membre face aux actes primaires,

Additionnels et des règlements communautaires 76

3) La réduction causée par la prééminence du statut d`exécutant pour l`Etat membre de la

CEMAC : les bases juridiques de la qualité d` « exécutant » .. 77

4) La réduction de la fonction exécutive de l`Etat membre de la CEMAC à une fonction

de contrôle et de sanction 78

B. La restitution du pouvoir exécutif de l`Etat membre au contact des directives

communautaires 80

3) Une restitution inhérente à l`obligation de transposition de la directive : une compétence

liée 81

4) Une restitution entrainant un développement d`un droit national d`intégration

communautaire 82

CONCLUSION DU DEUXIEME CHAPITRE . 83

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE . 84

DEUXIEME PARTIE LES IMPLICATIONS DE LA QUALITE DE

MEMBRE DE LA CEMAC POUR L'ETAT SOUVERAIN 85
CHAPITRE 3 : LES IMPLICATIONS NORMATIVES DE LA QUALITE

DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR UN ETAT SOUVERAIN . 88
SECTION 1 : LA NORMALISATION COMMUNAUTAIRE DE

L'ORDRE JURIDIQUE INTERNE DE L'ETAT MEMBRE DE LA CEMAC. 88

PARAGRAPHE 1 : La manifestation de la normalisation de l'ordre juridique interne par le

droit communautaire . 89

A. La manifestation constitutionnelle de la normalisation : l`habilitation constitutionnelle

intégrant la norme communautaire . 89
3)
L`habilitation constitutionnelle : la condition d`intégration de la norme

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 166

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

de droit communautaire dans l`ordonnancement juridique

des Etats membres de la CEMAC 91
4)
Une habilitation soulevant le problème de conciliation de la primauté du droit

communautaire et de celle de la constitution 92
B. La manifestation non constitutionnelle de la normalisation : la relation loi et droit

communautaire 94

3) La subordination de la loi et des normes infra législative au droit communautaire de la

CEMAC 94

4) La volonté générale de la loi face à la contrainte de la norme communautaire. 95

PARAGRAPHE 2 . La conséquence nationale de la normalisation .le développement d'une

A. La présentation de la norme nationale de l`intégration communautaire..... 97

3) Les types de législation nationale de l`intégration communautaire : la législation

d`habilitation et d`application du droit

communautaire

législation nationale de l'intégration communautaire 97

. .

98

4) Les traits caractéristiques de la législation nationale de l`intégration

communautaire 99
B. La place de la législation nationale de l`intégration communautaire dans

101

4) Une place questionnant la pertinence du rapport vertical de la pyramide des

normes

.

l`ordre normatif interne 100
3)
Une place controversée au sein de la hiérarchie des normes en droit interne

. 102

SECTION 2 : L'HYPOTHESE DE LA VIOLATION DE LA NORME COMMUNAUTAIRE : LA RESPONSABILITE DE L'ETAT MENBRE DE LA

CEMAC 104

PARAGRAPHE 1 : Les hypothèses de mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat membre de

la CEMAC . 105

105

A. Les normes communautaires susceptibles de mettre en oeuvre la responsabilité

de l`Etat membre de la CEMAC en cas de violation .

3) La violation des dispositions du droit communautaire primaire et dérivé...... 106

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 167

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

4) La violation de l`esprit et des principes communautaires 107

B. Les auteurs de la violation du droit communautaire susceptible d`engager la

responsabilité de l`Etat membre de la CEMAC 108

3) La violation du droit communautaire imputable au pouvoir exécutif des Etats membres de

la CEMAC . 108

4) La violation du droit communautaire CEMAC du fait des juridictions nationales. 109

PARAGRAPHE II . L'office réel ou potentiel du juge national en matière de violation

du droit communautaire 111

A. Le juge national : juge de droit commun de l`ordre juridique

communautaire CEMAC 112

3) L`invocation du droit communautaire devant le juge national 112

4) L`encadrement communautaire des règles nationales de procédures . 113

B. Le caractère potentiel de l`office du juge national en matière

de droit communautaire 115

3) le caractère facultatif lié à l`application du droit communautaire

par le juge national 115

4) L`ignorance de la règle de droit communautaire des acteurs de la justice. 116

CONCLUSION DU TROISIEME CHAPITRE 117

CHAPITRE 4 : LES IMPLICATIONS INSTITUTIONNELLES DE LA

QUALITE DE MEMBRE DE LA CEMAC POUR L'ETAT SOUVERAIN 118
SECTION 1 : LES IMPLICATIONS DE LA QUALITE D'ETAT MEMBRE

DE LA CEMAC SUR LES INSTITUTIONS NATIONALES 119
PARAGRAPHE I . la communautarisation des instituions exécutives de l'Etat membre

de la CEMAC 119

A. La communautarisation de l`exécutif bicéphale de l`Etat membre 119

3) La communautarisation de la Présidence de la république 120

4) La communautarisation du Premier ministre 121

B. La communautarisation des Ministres 122

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 168

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

1. Les départements ministériels participant au fonctionnement

de la communauté CEMAC 122

2. La spécialisation et la restructuration des autres ministères nationaux

Des Etats membres de la CEMAC 124

PARAGRAPHE II : La communautarisation relative de la qualité d'Etat membre sur les

A. Les raisons du relatif impact de la CEMAC sur les parlements nationaux. 126

3) Les raisons inhérentes aux principes fondamentaux de

droit communautaires : l`applicabilité immédiate et l`effet direct

parlements nationaux 126

.

126

4) Les raisons tenant aux considérations parlementaires

des questions communautaires 127
B. Les raisons du regain d`intérêt sur les activités communautaires

par les parlements nationaux 129

3) Les raison tenant liées à la perte et à la réduction du domaine de compétence législative

des parlements nationaux 129

4)

... 131

La raison relative au contrôle de la politique communautaire du gouvernement par les parlements nationaux : le moyen parlementaire de participer à l`activité communautaire

SECTION 2 : L'EVALUATION DES RAPPORTS ENTRE LES INSTITUTIONS

SYMETRIQUES COMMUNAUTAIRES ET NATIONALES 132

Paragraphe I : les rapports de coopération entre la cour de justice de la CEMAC

et les juridictions nationales

A. La présentation du mécanisme du renvoi préjudiciel en droit

CEMAC

132

de la

133

3)

Les fonctions du renvoi préjudiciel et les organes concernés .

133

4)

La procédure de renvoi préjudiciel en droit communautaire CEMAC.

135

 

B.

Les difficultés de mise en oeuvre du mécanisme de renvoi préjudiciel

 
 

au sein de la CEMAC ..

136

3)

Les insuffisances du contrôle exercé par les Etats et les organes communautaires.

136

4)

La familiarisation des acteurs du contentieux communautaire

 
 
 

aux procédures judiciaires nationales

137

Mémoire présenté et soutenu par EKO MENGUE Arsène Silvère 169

Recherches sur l'Etat membre de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

PARAGRAPHE II : le manque de conciliation entre le parlement communautaire

et les parlements nationaux . 138

A. Un rapport de concurrence entre le parlement communautaire

et les parlements nationaux .. 138

3) Le fondement populaire du parlement communautaire

et des parlements nationaux : une analogie source de conflit . 139

4) La diminution des prérogatives des parlements nationaux :

l`effet du transfert des compétences nationales vers la communauté 140

B. L`impératif d`une coopération entre le parlement communautaire et les parlements nationaux : la garantie du contrôle démocratique de la législation

communautaire à tous les niveaux 142

3) La participation concertée des parlements nationaux et communautaire

aux activités de la CEMAC 142

4) La concertation des autorités et des groupes politiques des parlements nationaux et

communautaire : autres possibles instruments de coopération 143

CONCLUSION DE LA QUATRIEME PARTIE . 144

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 146
CONCLUSION GENERALE : LA NATURE JURIDIQUE DE L'ETAT MEMBRE DE

LA CEMAC 147

BIBLIOGRAPHIE 151

TABLE DES MATIERES . 161

ANNEXES 170

- Traite révisé de la Communauté Economique et Monétaire de l`Afrique Centrale(CEMAC).

- Convention régissant La cour de justice de la CEMAC

- Convention régissant le parlement communautaire






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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand