Le régime répressif du blanchiment de capitaux en droit positif congolais.( Télécharger le fichier original )par William KALOMBO MISHIBA Université officielle de Mbujimayi - Licencié en Droit, option Droit economique et social 2015 |
§2. DE LA DETECTION1. De la CENAREF en RDC La Cellule Nationale des Renseignements Financiers, CENAREF en sigle est un service public à caractère administratif et technique doté de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. Elle est indépendante dans l'accomplissement de sa mission. Cette Cellule est instituée par la loi sous examen. Elle a pour mission de recueillir et de traiter les renseignements financiers sur les circuits de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. La CENAREF est chargée de :51(*) Ø Recevoir, analyser et traiter les déclarations auxquelles sont tenues les personnes et organismes visés à l'article 4 de la loi N°04/016 du 19 Juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment de capitaux et financement du terrorisme ; Ø Recevoir aussi toutes autres informations utiles, notamment celles communiquées par les autorités judiciaires ; Ø Faire poursuivre, le cas échéant, les personnes présumées coupables de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme ; Ø Réaliser ou faire réaliser des études périodiques sur l'évolution des techniques utilisées aux fins de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme, et sur sa mise en oeuvre. A ce titre, elle propose les reformes appropriées au renforcement de l'efficacité de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Cette Cellule comporte en son sein deux organes : · Le Conseil ; · Le Secrétariat exécutif. Le Conseil est composé de neuf membres jouissant d'une intégrité morale reconnue et ayant des compétences en matière de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme. Ses membres sont : · Un Magistrat près la Cour des Comptes ; · Un Magistrat ayant exercé au moins au niveau de la Cour d'Appel ; · Quatre Hauts fonctionnaires provenant respectivement de la Banque Centrale du Congo, de la DGDA, de la DGI et de l'inspection générale des finances ; · Un Officier supérieur de Police nationale ; · Un fonctionnaire de la police des frontières ; · Une personnalité indépendante désignée en raison de ses compétences et provenant d'une association des reviseurs comptables reconnus. Le Secrétariat exécutif est composé du secrétaire exécutif et de son Adjoint. L e Magistrat de l'ordre judiciaire est de droit Secrétaire exécutif de la CENAREF. Le Secrétaire exécutif dirige et surveille l'ensemble des services de la CENAREF. Il veille à l'exécution des décisions du conseil et assure la gestion courante de la Cellule. Selon l'article 16 du même Décret, le Secrétaire exécutif peut déléguer les pouvoirs qui lui sont conférés à son Adjoint ainsi qu'à un ou plusieurs fonctionnaires de la CENAREF. Pour ce qui de secret professionnel et de l'échange d'informations, l'article 21 du Décret n°O8/20 que les membres des organes de la CENAREF et le personnel sont tenus au secret des informations recueillies dans le cadre de leurs fonctions. Ils ne peuvent utiliser ces informations à d'autres fins que celles prévues par la loi n°04/016 instituant cette Cellule. A l'article 22 il est dit ceci : « la CENAREF peut, sous réserve de réciprocité, échanger des informations avec les Cellules des renseignements financiers étrangères chargées de la même mission. Lorsque celles-ci sont soumises à des obligations de secret analogues et quelle que soit la nature de ces services. A cet effet, elle peut conclure des accords de coopérations avec ces Cellules. Lorsqu'elle est saisie d'une demande des renseignements ou de transmission par une Cellule étrangère homologue traitant une déclaration de soupçon, elle y donne suite dans le cadre des pouvoirs qui lui sont reconnus pour traiter de telles déclarations »52(*) La CENAREF est placée sous la tutelle du ministre ayant le Finances dans ses attributions. Il sied de signaler qu'après l'entrée en vigueur de la loin°04/016 du 19 Juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment de capitaux et financement du terrorisme, il devrait s'écouler 6 mois pour instituer cette Cellule, mais il a fallu attendre encore 5 ans après pour voir enfin de compte l'installation effective de la CENAREF le 30 Octobre 2009 dans les locaux de l'Hôtel des monnaies suivant la loi édictée en la matière. Résolument engagée dans la lutte, la RDC va se conformer aux exigences des programmes avec la banque mondiale et le FMI qui évaluent les pays membres notamment sur le volet anti-blanchiment. Vous conviendrez avec nous que la RDC ne s'n'y était pas mise à volonté mais dans le but de garder confiance auprès des bailleurs de fonds. L'occasion était bonne pour le n°1 da la BCC de brosser l'historique de la lutte anti-blanchiment et financement du terrorisme enclenchée en Novembre 2002. Disons que c'était en ce moment là qu'une stratégie nationale avait été mise en oeuvre et la BCC fut chargée de piloter cette stratégie. Cela s'est opéré suivant deux axes à savoir : l'élaboration d'un cadre légal et juridique ainsi que la mise en place du dispositif opérationnel. Pour ce faire, la BCC avait tout d'abord mis en place un Groupe de réflexion et d'études contre le blanchiment de capitaux et financement du terrorisme (GREB). Ce groupe s'est attelé à l'élaboration des Avant projets de loi. Dans la foulée en Novembre 2004, il ya eu trois projets de décret portant organisation et fonctionnement de la Cellule Nationale des Renseignements Financiers ; création du Fonds de Lutte contre le Crime Organisé et de l'autre du Comité de Lutte contre le Blanchiment. 5 ans après, il intervient la mise en place sur terrain de la CENAREF mais les deux autres ne sont pas encore mis en place. Quelle psychose ? La CENAREF qui est l'ombre d'elle-même face au regain de dynamisme dans le secteur de l'immobilier, ignorant que c'est l'économie Congolaise qui en subit indirectement le contrecoup. N'est-ce pas vouloir quelque chose et son contraire !!! Malgré la non installation de ces deux autres structures, nous allons tout de même retracer leurs buts et mission dans la lutte anti-blanchiment. Le Comité consultatif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, COLUB en sigle devrait être chargé de : · Proposer au Gouvernement les mesures adéquates à prendre pour l'amélioration de la stratégie et du dispositif national de lutte... · Examiner, à la demande du Gouvernement, les modalités et conditions de mise en oeuvre en RDC des recommandations de la communauté internationale relatives à la lutte... · Assurer une meilleure information des services publics et des professions impliquées dans la lutte... Ce Comité devrait avoir pour mission d'assister le Gouvernement dans la définition et la mise en oeuvre de la politique nationale de lutte...53(*) Et le fonds de lutte contre le crime organisé, FOLUCCO devrait être chargé aussi de : · L'organisation et le fonctionnement des structures chargées de lutte contre le crime organisé ; · La formation des agents des services publics et autres institutions de l'Etat impliquées dans la lutte contre ce type de criminalité ; · Les études sur l'évolution des techniques utilisées aux fins notamment de blanchiment de capitaux sur le territoire national.54(*) Plusieurs années s'écoulent, la mise en oeuvre de ces structures n'est pas effective. N'est-ce pas de la bouillabaisse dans la lutte ? Voilà pourquoi la RDC devient de plus en plus attractif au blanchiment des fonds provenant des origines illicites. La CENAREF n'est qu'une goute dans l'océan Il va falloir changer la donne en mettant en place ces deux autres structures encore dans des oubliettes, faire pression à l'Etat Congolais par des mesures assez coercitives afin d'éveiller sa conscience et faire de cette lutte une volonté manifeste dans le chef des toutes les parties prenantes pourvu que la lutte et l'éradication de ce fléau soient constatées partout en mettant aussi en oeuvre les recommandations du GAFI (Groupe d'Action Financière). 2. DE LA DECLARATION DE SOUPCON Le principe consiste, pour les professions assujetties à ces obligations, à déclarer à TRACFIN les opérations ou les sommes qui pourraient provenir de certains délits. Le principe Français de déclaration de soupçon tranche avec les mécanismes de déclaration automatique en vigueur notamment aux Etats-Unis d'Amérique où toutes les opérations répondant à certains critères sont systématiquement signalées `seuils, types, origine, fréquence, etc.) A contrario, le système Français confère à l'intermédiaire financier, la responsabilité d'analyser les transactions qu'il est amené à gérer et de décider si elles couvrent des opérations de blanchiment. Si les opérations de blanchiment signalées à TRACFIN sont de bonne foi, les banques, leurs dirigeants et leurs employés sont exonérés de responsabilité pénale.55(*) En droit positif Congolais, toute personne physique ou morale visée à l'article 4 de la loi sur le blanchiment de capitaux, est tenue de déclarer à la Cellule, avant leurs réalisations, les opérations reprises à l'article 4 alinéa 1èr dont les dépôts, des échanges, des placements, des conversions ou tous autres mouvements de capitaux, lorsqu'elles portent sur des fonds suspectes de provenir de l'accomplissement d'une ou de plusieurs infractions, ou d'être liés au financement du terrorisme. L'article 20 alinéa 3è accuse une certaine faiblesse quant à ce. Il donne l'occasion aux mêmes personnes visées à l'article 4 de déclarer sans délai, toute information tendant à l'infirmer. A notre humble avis, lorsque les cas suspects sont constatés puis déclarés, c'est censé que les éléments probants à l'établissement du blanchiment d'argent existent. Le législateur devrait juste se limiter à donner l'occasion aux personnes de l'article 4 al.2 de déclarer sans délai, toute information tendant à renforcer le soupçon. Les déclarations de soupçon sont transmises à la Cellule par tout moyen écrit ou par téléphone. S'il s'agit d'une télécopie, celle-ci doit être confirmée dans le plus bref délai par le dépôt ou l'envoi de l'original. S'il s'agit d'une déclaration faite téléphoniquement, elle doit être confirmée par écrit dans les formes précises ci-haut. Que doit contenir ces déclarations ? Il faille préciser que les déclarations de soupçon indiquent les cas suivants : a. La description de l'opération ; b. Toute indication utile sur les personnes y participant ; c. Les raisons pour lesquelles l'opération a déjà été ou doit être exécutée ; d. Le délai dans lequel l'opération suspecte doit être exécutée. L'article 22 al.2 précise qu' « à la requête de la Cellule, le ministère public peut, sur Ordonnance motivée et susceptible de recours endéans 48 heures, saisir les fonds comptes ou titres pour une durée supplémentaire qui ne peut excéder huit jours »56(*) Dès qu'apparaissent des indices sérieux de nature à constituer l'infraction de blanchiment, la Cellule transmet un rapport sur les faits, accompagné de son avis, au ministère public qui apprécie la suite à donner. Ce rapport est accompagné de toutes pièces utiles, à l'exception de la déclaration de soupçon elle-même. L'identité de l'auteur de la déclaration et celle de l'agent de la Cellule en charge du dossier ne doivent, en aucun cas, figurer dans le rapport.57(*) 3. DE L'EXEMPTION DE RESPONSABILITE58(*) Selon le législateur, aucune poursuite pour violation de secret professionnel ne peut être engagée contre les personnes ou les dirigeants et préposés des organismes désignés à l'article 4 qui, de bonne foi, ont transmis les informations ou effectué les déclarations prévues par les dispositions de la loi sous examen. L'article 24 al.2è dit : « aucune action en responsabilité civile, pénale ou disciplinaire ne peut être intentée, ni aucune sanction professionnelle prononcée contre les personnes ou les dirigeants et préposés des organismes désignés à l'article 4 qui, de bonne foi, sont transmis les informations ou effectué les déclarations prévues par les dispositions de la présente loi, même si les enquêtes ou les décisions judiciaires n'ont donné lieu à aucune condamnation. En cas de préjudice résultant directement d'une déclaration de soupçon de bonne foi non fondée, l'Etat répond du dommage subi aux conditions et dans les limites de la loi (article 24 al.4). L'article 26 requiert ceci : « sont pénalement irresponsables, les fonctionnaires compétents pour constater les infractions d'origine et de blanchiment qui, dans le seul but d'obtenir des éléments de preuve relatifs aux infractions visées par la présente loi et dans les conditions définies par la loi. »59(*) Donc, la loi offre des garanties de sécurité aux personnes visées à l'article 4 pourvu que les criminels ne trouvent pas du répit. 4. DE LA LEVEE DU SECRET PROFESSIONNEL60(*) Il va falloir préciser que le secret professionnel ne peut être invoqué pour refuser d'une part, de fournir les informations telles que : les documents liés à l'identité de clients et ceux relatifs aux opérations effectuées par les clients et enfin un rapport confidentiel écrit comportant tous renseignements utiles sur ses modalités, ainsi que sur l'objet de l'opération et sur l'identité du donneur d'ordre, requises dans le cadre d'une enquête portant sur des faits de blanchiment ou de financement du terrorisme ordonnée par, ou effectuée sous le contrôle de l'autorité judiciaire et d'autre part, de procéder aux déclarations prévues par la loi. * 51 Article 3 du Décret N°O8/20 du 24 Septembre 2008 portant organisation et fonctionnement d'une Cellule Nationale des Renseignements Financiers, CENAREF en sigle, In, J.O de la RDC, N° spécial, 51e année, 2010 * 52 Article 22 du décret n°08/20 et 18 de la loi sur le blanchiment de capitaux * 53 Article 2 du Décret n°08/21 du 24 Septembre 2008 portant création du comité consultatif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme * 54 Article 2 du Décret n°O8/22 du 24 Septembre 2008 portant création du FOLUCCO * 55 VERNIE E., Op. Cit, p121 * 56 Article 22 al.2 de la loi n°04/016 du 19 Juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme * 57 Article 23, idem * 58 Article 24, 26, idem * 59 Article 26 de la loi n°04/016 du 19 Juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment de capitaux et financement de terrorisme * 60 Article 27, idem |
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