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La moralité, fondement de l'humanité dans fondements de la métaphysique des murs d'Emmanuel Kant.

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par KRIMINATCHA KONE
UNIVERSITÉ FÉLIX HOUPHOUET-BOIGNY (ABIDJAN- COCODY)  - Master 2016
  

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PREMIÈRE PARTIE :

LE CONCEPT DE MORALITÉ

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Dans les Fondements de la métaphysique des moeurs, Emmanuel Kant présente le concept de moralité comme un bien universel19. Il s'adresse à chaque être raisonnable et sert par conséquent de loi dont la conscience sommeille en tous. Agir sans cette conscience, c'est agir sans valeur morale. Nonobstant, il n'est pas rare d'observer que dans les conduites humaines, la moralité semble perdre son universalité dans la mesure où les hommes la réduisent à leurs intérêts personnels et égoïstes. C'est dans cette perspective qu'Emmanuel Kant soutient que la moralité est la condition qui fait que l'homme est une fin en soi et en même temps membre législateur du règne des fins. Il incite alors l'homme à bien agir. Ce qui lui vaut de placer la moralité au fondement de toutes ses actions pour le triomphe de l'humanité.

En admettant l'existence humaine comme l'accomplissement du libre arbitre, les hommes se doivent d'être objectifs. Ce qui implique que leurs actions peuvent et doivent se soustraire des mobiles sensibles pratiquement constitués par l'hétéronomie. La volonté étant emportée par les désirs, les impulsions, les actions dont il témoigne ne portent aucune marque distinctive d'universalité de la moralité. Or les exemples sont censés porter la marque de maximes universalisables. C'est pourquoi, même dans l'imitation des choses, de la nature ou du monde, les hommes se doivent de privilégier la dimension morale et éthique qui les associe au règne des fins. Il en va de même pour l'habitude. N'est-ce pas cette façon de se conduire qui confère et justifie raisonnablement l'idée d'universalité de la moralité ? Si l'homme est doué de raison ne doit-il pas avoir une volonté plus ferme et déterminante pour des actions morales ?

19 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., pp. 138-141.

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CHAPITRE I : L'UNIVERSALITÉ DE LA MORALITÉ

En supposant l'universalité de la moralité, c'est comprendre qu'elle constitue un principe d'action digne de respect, susceptible d'échapper à toute contradiction, et pouvant être appliquée partout, et en toutes circonstances. En effet, l'universalité de la moralité s'explique aussi par le fait qu'elle ne consiste pas à décrire seulement les croyances communes au sujet des moeurs, mais qu'elle s'étend à tous les êtres raisonnables en général et surtout à tous les hommes en particulier.

De fait, nous avons la moralité qui suppose l'accomplissement du devoir. Elle revêt d'une certaine manière la spécificité qui confère à l'homme toute sa dignité et sa grandeur d'esprit. Par la raison, l'homme jouit d'une connaissance morale portée par un pur respect de la loi pratique. De cette manière, il est capable de comprendre, par celle-ci que la valeur morale de ses actions ne réside pas dans les effets que l'on voit. Bien au contraire, elle réside dans les principes intérieurs selon lesquels elles sont accomplies. Comme l'affirme Emmanuel Kant : « Et cependant, c'est dans cette volonté seule que le souverain bien, le bien inconditionné, peut se rencontrer »20.

Le fait de considérer la moralité et l'expression de la loi morale, constitue une manière de comprendre le caractère impératif de la moralité dans les conduites sociales. De fait, il importe pour les hommes de reconnaître l'importance de la moralité de toutes les actions, qui doit être le simple traitement des êtres raisonnables comme fin en soi21. Ce qui signifie que les conduites humaines doivent être absolument bienveillantes. Elles doivent témoigner de l'humanité en nous partout et en toutes circonstances. Dès lors, que comprendre humainement de la moralité et l'accomplissement du devoir ?

20 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., p. 101.

21 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., p. 150.

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1- La moralité et l'accomplissement du devoir

De toutes les espèces vivantes dans la nature, l'homme est le seul être vivant admis au stade d'humain. Ainsi, parler de la moralité et l'accomplissement du devoir, c'est reconnaître à l'homme la perspicacité des « lois de l'exercice de ses facultés »22. Par là, on peut entendre la bonne volonté qui lui permet de se laisser guider par la moralité assortie d'une « forme de vie », à teneur impérative. C'est dans ce type de vie que son existence s'illustre mieux et revêt tout son sens. Selon Jürgen Habermas par exemple « les sujets jugeant moralement ne peuvent normalement agir (...) que s'ils ont été formés, dans des contextes de vie éthique, à être des sujets moralement capables d'action »23.

De plus, la compréhension de la moralité et l'accomplissement du devoir signifierait que la raison pure pratique de l'homme en donne la possibilité. La capacité de représentation et d'action repose sur la liberté. Elle voudrait que la moralité soit au fondement des actions, desquelles l'on peut juger extérieurement de l'état actuel de moralité. Or les actions ne découlent que de la raison en nous. C'est ce qu'il y a de plus élevé pour élaborer la matière de l'intuition sensible et la ramener à l'unité la plus complète de la pensée. Cette dernière compréhension pousse Emmanuel Kant à noter ceci :

Il est tout à fait raisonnable de prescrire la moralité sous le nom de devoir ; car tous les hommes ne consentent pas volontiers à obéir à ses préceptes, lorsqu'ils sont en opposition avec leurs penchants, et, quand aux moyens de pratiquer cette loi ; ils n'ont pas besoin d'être appris, puisque chacun sous ce rapport, peut ce qu'il veut24.

Selon cette affirmation, l'homme en tant qu'être doué de raison, doit constamment accomplir son devoir puisqu'il implique la liberté. Il concerne aussi bien la moralité des actions, devant être capable de témoigner de l'accomplissement du devoir. Dès lors, qu'impliquerait l'accomplissement du

22 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., 190.

23 Jürgen Habermas, De l'éthique de la discussion, trad. de l'allemand par Mark Hunyadi, Paris, GF-Flammarion, 1991, p. 37.

24 Emmanuel Kant, Critique de la raison pratique, trad. de l'allemand par Jean-Pierre Fussler, Paris, GF-Flammarion, 2003, p. 186.

25 Emmanuel Kant, Doctrine de la vertu, trad. de l'allemand par Jules Barni, Paris, Garnier Flammarion, 1994, p. 144.

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devoir ? La raison, en tant que faculté propre à chaque être humain quel qu'il soit ; ou du moins en vertu de sa qualité d'être humain, nous démarque des animaux. La reconnaissance de l'accomplissement du devoir d'un point de vue kantien, impliquerait que l'homme doit cultiver sa propre perfection. Elle équivaut au devoir de développer ses aptitudes intellectuelles et morales, principalement, mais aussi physiques, sans lesquelles l'accomplissement du devoir serait hypothétique. Pour cela, Emmanuel Kant affirme que :

La perfection d'un autre homme en tant que personne consiste, précisément en ceci qu'il est lui-même de se proposer sa fin en vertu de son propre concept du devoir et il ya contradiction à exiger que je doive faire vis-à-vis de quelqu'un (à me l'imposer comme devoir) quelque chose que nul autre que nul autre que lui-même ne peut faire25.

La perfection de l'homme implique qu'il reconnaisse là où l'accomplissement du devoir s'impose. Ce qui signifie qu'il doit pouvoir user de sa bonne volonté, en se demandant si l'on peut vouloir que son semblable accomplisse des actions subordonnées à l'injustice. Mieux, l'accomplissent du devoir exige que le sujet moral admet des conduites capables de s'imposer à tous les êtres humains. Autrement, il y a contradiction à exiger des autres d'accomplir des actions portées par la subjectivité au détriment de l'objectivité. La conscience de l'accomplissement du devoir est libre.

De même, il est possible de noter que dans les sociétés modernes, les peuples oeuvrent pour la sauvegarde de leurs droits fondamentaux. Ce sont entre autres la liberté, la justice et l'égalité. Il en va de même pour la survie des sociétés, conditionnée par le respect du devoir. Dans cette optique, toutes les bonnes conduites des citoyens à l'échelle de la société sont ordonnées rationnellement par le pur accomplissement du devoir. C'est ainsi que la tendance à promouvoir l'humanité doit revêtir toute sa sacralité. La conscience de la moralité dont les hommes sont capables, implique l'accomplissement du devoir,

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pouvant permettre « la facilité dans les contacts, qui est une vertu »26. Elle nécessite « Devoir et obligation (...) qui conviennent pour exprimer notre rapport à la loi morale »27.

Par là, indiquer que la moralité est en rapport avec l'accomplissement du devoir, c'est reconnaître qu'elle est essentiellement humaine, et se nomme, par conséquent loi. Elle ne signifie pas au sens large du terme un ensemble de règles établies, mais qu'elle doit diriger nos actions en montrant les raisons d'agir : « C'est pourquoi, il faut qu'elle soit le fondement des valeurs »28. Elle doit, par conséquent, diriger les conduites humaines dans tous les domaines de l'existence humaine.

Dans le domaine politique, les actions découlant de la gestion du pouvoir politique incarner l'accomplissement devoir. Ce dernier doit faire l'objet d'examen moral par les gouvernés afin de décrypter et de dégager rationnellement la moralité qui en découle. Cet accomplissement n'étant pas nécessairement le résultat d'actions citoyennes concertées, se révèle souvent comme l'expression ou non d'un idéal préalablement passé à la lumière de la raison. Puisqu' « il est toujours du pouvoir de chacun d'obéir aux ordres catégoriques de la moralité »29. Il s'ensuit que la moralité en rapport à l'accomplissement du devoir au plan politique doit s'inscrire dans l'intérêt des peuples. L'accomplissement du devoir prend toute son importance.

De cette représentation, la moralité conduisant à l'accomplissement du devoir, il apparaît aussi compréhensible que la moralité, loin d'être un devoir qui s'impose à l'homme de l'extérieur ou d'une divinité, se présente à lui comme une raison suffisante d'agir. L'homme se soumet à un commandement en lequel il aperçoit une raison d'agir. Emmanuel Kant nous formule bien cette affirmation en ces termes : « Le devoir est la nécessité d'accomplir une action par respect pour la

26 Emmanuel Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique, Op. cit., p. 209.

27 Emmanuel Kant, Critique de la raison pratique, Op. cit., p. 263.

28 Ralph Walker, Kant, Op. cit., p. 25.

29 Emmanuel Kant, Critique de la raison pratique, Op. cit., p. 186.

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loi »30. En conséquence, la moralité conduit à l'accomplissement du devoir dans la mesure où c'est un principe universel valable pour tous les êtres raisonnables.

Selon Johann Goethe la liberté du devoir en lui-même, c'est d'« aimer ce qu'on s'ordonne à soi-même »31. Dans ce cas, il s'agit de comprendre que la raison est importante pour l'homme. Elle n'a pas pour objet d'ignorer que tout être humain peut choisir d'être mauvais face à son devoir, mais de l'exercer pour être en conformité avec l'humanité. Ce qui justifierait le fait que nous sommes soumis à la discipline de la raison. Elle doit, par conséquent, porter et diriger nos actions sans cesse. Pour cette raison, l'accomplissement d'actions dignes de respect et de considération de l'universalité de la moralité paraît nécessaire. C'est cette nécessité morale qui doit être considérée comme un devoir sur lequel se fonde l'universalité.

En effet, la moralité résidant uniquement dans une volonté indépendante de toute matière de la loi, exprime l'autonomie. Cette dernière est la condition formelle de toues les maximes. Dans cette logique précise, la raison pure pratique, caractérisée par la liberté donne la possibilité à l'individu d'agir moralement ou non32. C'est avec la plénitude et l'unité de la raison que l'homme décide d'accomplir toute action. Cette conception rationaliste implique que le pouvoir d'exécution de la raison humaine demeure très considérable. Ainsi, Hannah Arendt pense que l'homme possède toujours, par le biais de la raison la possibilité d'agir comme il l'entend. Rien en réalité n'influence l'accomplissement du devoir.

C'est ainsi qu'il est possible de comprendre que lorsque l'homme se trouve souvent dans une situation embarrassante, il peut laisser entendre ceci : « Je vais y penser », « Donnez-moi le temps d'y réfléchir ». Cette réflexion se révèle d'une importance capitale pour lui car la moralité portée par le devoir qui l'ordonne

30 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., p. 100.

31 Rudolf Steiner, Goethe et sa conception du monde, trad. de l'allemand par André Tanner, Genève, Éditions Anthroposophiques Romandes, 1985, p. 82.

32 Hannah Arendt, Considérations Morales, trad. de l'anglais par Marc Ducassou, Paris, Rivages, 1996, p. 34.

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prime. La représentation de la moralité et l'accomplissement postule une compréhension selon laquelle, il est du devoir de tout être raisonnable de se conduire avec dignité. Tout cela s'effectue indépendamment de toute influence extérieure. C'est pourquoi l'agent soucieux de moralité doit se donner le soin de murir ses actions avant de les exécuter. Elles passent l'examen de la raison par respect pour la loi morale. Puisque la raison est « la faculté cognitive, elle permet de savoir ce qui est bien et ce qui est mal ; la vérité et l'erreur sont considérées en premier comme des conditions de l'être humain »33.

Tout être humain est capable d'entretenir le pire et le meilleur. Ainsi, la conscience de l'accomplissement du devoir est librement suscitée en chaque individu car elle répond à une exigence morale ou à une absolue nécessité34. La moralité et l'accomplissement du devoir signifierait que l'homme trouve toujours en lui-même de bonnes raisons d'honorer l'humanité. C'est ainsi que dans la conscience de sa dignité35, il doit agir en faveur de ce qui l'édifie. C'est là précisément qu'on peut comprendre l'homme dans son élan de solidarité, d'assistance et même d'égal respect dont il témoigne à l'endroit d'autrui. Il porte haut des valeurs dont la validité est ordonnée à la lumière des attentes humaines.

De plus, l'homme est un être doué de raison. Par cette faculté en tant que « pouvoir des principes (Principien) »36, il trouve, pour ainsi dire une raison d'accomplir telle action et une autre de s'abstenir de telle autre. C'est ainsi qu'il peut être compris comme étant le seul être capable d'agir sous des lois morales dont il en est l'auteur37. Il est remarquable que la moralité qui préside aux maximes de ses actions ait acquis sa qualité morale que par le fait que chacun pourrait y consentir comme à des maximes valides pour tous. Autrement exprimé,

33 Herbert Marcuse, L'homme unidimensionnel, trad. de l'anglais par Monique Wittig, Paris, LES ÉDITIONS DE MINUIT, 1968, p. 149.

34 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., p. 116.

35 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., p. 120.

36 Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, trad. de l'allemand par André Tremesaygues, et Bernard Pacaud, Paris, PUF, 1986, p. 255.

37 Rudolf Steiner, Goethe et sa conception du monde, Op. cit., p. 82.

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l'accord des actions avec les principes de la moralité, suscite l'adhésion car l'accomplissement du devoir est parfait.

La reconnaissance de la moralité en rapport avec l'accomplissement du devoir nécessite une précision entre la moralité et la légalité. À ce niveau, Emmanuel Kant nous fait une distinction importante. Pour lui, la volonté morale doit se déterminer. Il s'en suit que le « devoir doit être une nécessité pratique inconditionnée de l'action (...), et c'est seulement à ce titre qu'il est aussi une loi pour toute volonté humaine »38. Ce qui revient à dire que la moralité est un dépassement de la légalité puisque, loin de s'opposer à elle, elle englobe quelque chose de plus. Cela n'entache en rien la complémentarité de la légalité et de la moralité car « l'acte moral accompli par devoir doit aussi a fortiori être légal, conforme à la loi du devoir »39. S'ils s'originent à la même source qu'est le respect d'une loi de la raison pratique et qu'ils ont en commun l'idée d'une obligation impérieuse qu'est le devoir, ils restent fondamentalement distincts quant à la motivation40 de cette obligation.

En définitive, la moralité et l'accomplissement du devoir suggèrent une compréhension selon laquelle tout être raisonnable est censé découvrir en lui-même la raison qui doit créer la nécessité morale. Le devoir en lequel réside la bonne volonté est exigé pour le bien de l'humanité. Cette dernière doit être élevée et honorée dans l'accomplissement du devoir. La conscience de la moralité dont l'homme est capable doit accompagner son existence pour des actions moralement acceptables. Le rapport entre la moralité et l'accomplissement du devoir impliquerait aussi la conformité à la légalité. De cette complémentarité, s'affirmerait dignement l'universalité de la moralité. Mais, n'est-ce pas cette liberté qui traduit la loi morale en chaque être humain ?

38 Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Op. cit., p. 144.

39 Mai Lequan, La philosophie morale de Kant, Op. cit., pp. 150-151.

40 Simonne Goyard-Fabre, Responsabilité morale et responsabilité juridique selon Kant, Paris, in Archives de Philosophie du Droit, 1975, p. 8.

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