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Cour pénale internationale face au défi de la coopération des états dans la répression des crimes de guerre et crimes contre l'humanité: cas ntaganda et cas nkunda

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par Mussa Arsène Mbenge Luliba
Université de Goma "UNIGOM" - Licence 2015
  

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§3. IMPACT DU STATUT DE ROME ET DE LA CPI EN RDC

La situation de la République Démocratique du Congo (RDC) représente un véritable défi pour la Cour Pénale Internationale (CPI). Tous les accusés des procès qui ont commis des crimes en RDC et qui se trouvent à la CPI sont soit originaires de la RDC ou des pays voisins. Le présent point met en exergue l'impact de la Cour en RDC. L'analyse porte sur les questions de la complémentarité, de la paix, de la justice, des victimes et des communautés affectées.

L'impact des activités de la CPI en RDC a été limitée par un certain nombre de facteurs notamment une poignée des personnes poursuivies, leur qualité à savoir les seigneurs de guerre de l'Ituri ainsi que la nature des charges retenues à leur personne. Néanmoins, l'expérience prouve que le Statut de Rome avec son principe de complémentarité demeurent des outils importants susceptibles d'aider efficacement à briser le cycle de l'impunité en RDC58(*). Pour ce faire, des efforts doivent être déployés pour achever la réforme du secteur judiciaire, notamment l'adoption d'une loi de mise en oeuvre du Statut de Rome. Par ailleurs, les poursuites engagées par la CPI à l'encontre de l'ancien candidat aux élections présidentielles et leader de l'opposition Jean-Pierre Bemba constituent un signal fort pour la lutte contre l'impunité dans la région des Grands Lacs en particulier et en Afrique en général. Cependant, le fait qu'il est accusé seulement pour des crimes commis par ses troupes en République centrafricaine (RCA), suscite de nombreuses controverses au sein des populations congolaises. De même, malgré l'absence de coopération de la RDC dans l'arrestation et le transfert de Jean Bosco Ntaganda, ancien seigneur de guerre, qui depuis, a été intégré comme commandant des Forces Armées congolaises, le Gouvernement congolais a fini par coopérer avec la CPI pour l'arrestation de NTAGANDA. En raison de ces différentes perceptions, les communautés des victimes ont apporté un soutien mitigé à la Cour. Ceci nécessite davantage de sensibilisation de ces communautés pour accroître ce soutien et obtenir un meilleur impact des activités de la Cour sur les victimes et leurs communautés. Ainsi, la Cour est appelée à affiner sans cesse sa stratégie de sensibilisation afin de mieux canaliser les attentes des victimes et gérer les diverses perceptions qu'elles se forgent sur ces activités. En outre, davantage de poursuites aussi bien au niveau de la Cour que des juridictions nationales sont nécessaires pour lutter efficacement encore l'impunité en RDC.

La complexité du conflit congolais interdit toute analyse précipitée quant aux succès de la CPI. Les élections de 2006 se sont tenues après une décennie de guerre qui a commencé avec la campagne de Laurent Désiré Kabila (1996-1997) pour la libération du pays (Zaïre à l'époque) du règne répressif du président Mobutu Sese Seko. Au cours de cette campagne et par la suite lors du conflit armé de 1998 à 2003, de nombreuses violations des droits de l'homme ont été commises par toutes les parties en conflit. Cependant de nombreux crimes de cette époque échappent à la compétence temporelle de la CPI. Cette période reste la plus sanglante de l'histoire de la RDC même si par la suite et malgré l'accord de paix de Sun City signé en 2002, les combats ont continué entre les différentes milices et les forces gouvernementales. Ces combats ont aussi été caractérisés par des crimes commis à l'endroit des populations civiles59(*).

Ainsi, les conflits armés successifs à l'Est du Congo sont les plus meurtriers depuis la deuxième guerre mondiale à considérer le nombre des victimes décédées directement ou indirectement soit 5.4 millions des personnes mortes entre août 1998 et avril 2007. Tous les belligérants sans exception sont accusés d'avoir commis des graves exactions en violation du droit international humanitaire notamment des tueries des populations civiles, des viols et d'autres formes de violence sexuelle, des déplacements forcés des populations, le recrutement des enfants soldats et les enlèvements des populations civiles. Il est important de noter qu'il s'agit ici d'un conflit armé à double facette revêtant aussi bien le caractère d'un conflit armé national et d'un conflit armé international au regard de l'implication de nombreux pays à une certaine période. Plusieurs dignitaires actuels aussi bien en RDC que dans les pays voisins dont certains occupent de hautes fonctions dans les différentes sphères de la vie nationale dans leurs pays respectifs sont des présumés auteurs, co-auteurs ou complices de ces différentes violations.

Rappelons que la RDC a ratifié le Statut de Rome le 30 mars 2002, et renvoyé les crimes commis sur son territoire pour les enquêtes et les poursuites devant la CPI le 19 avril 2004. Aujourd'hui on compte cinq ressortissants de la RDC qui se trouvent à la cour pénale internationale.

L'intervention de la CPI en RDC n'a pas encore permis à ce vaste pays de recouvrer totalement la paix et la justice. La CPI est appelée à affiner sa politique des poursuites en ciblant davantage des hauts responsables des crimes. Ses détracteurs jugent son action actuelle comme éminemment sélective et limitée, servant les intérêts du régime en place. Ils évoquent les circonstances d'arrestation des Lubanga, Katanga, Ngudjolo, Bemba et le cas de Bosco Ntaganda. Le bilan de la coopération de la RDC avec la CPI reste dès lors assez mitigé. Il est à analyser au cas par cas. Ainsi, aux débuts des enquêtes ouvertes par le Procureur, la coopération des autorités congolaises paraît avoir été exemplaire et conforme aux obligations internationales60(*). Mais le conflit en Ituri a impliqué des milices ethniques soutenues par l'Ouganda pour en réalité servir d'arrière base à l'occupation de ce district par ses propres forces. Après que la RDC ait ratifié le Statut de Rome, l'Ouganda, qui occupait illégalement le nord du pays, a signé l'Accord de Luanda le 6 Septembre 2002 aux termes duquel il a accepté de retirer ses troupes de la RDC. Mais les pires combats en Ituri se sont poursuivis en 2003 entre milices ethniques rivaux soutenus par l'Ouganda en vue de continuer à contrôler et à avoir accès aux ressources naturelles de l'Ituri. C'est alors que la CPI, a commencé ses enquêtes en Ituri en se focalisant sur les atrocités commises durant la période de 2002 et 2003. Les autorités de la justice militaire, les Casques bleus (MONUC) et les intermédiaires congolais ont coopéré avec la Cour dans les enquêtes sur les affaires Thomas Lubanga, Germain Katanga et Matthieu Ngudjolo. Dans ce sens, il y a lieu de souligner l'apport substantiel de la RDC et de la MONUC en ce qui est de l'arrestation et du transfert de ces suspects à la Haye.

En ce qui concerne l'impact de la CPI sur les victimes et les communautés affectées, la RDC a connu des conflits armés successifs sur son vaste territoire et plusieurs communautés en ont subi des affres. Cela pose inévitablement des défis pour que les enquêtes de la CPI qui portent seulement sur un nombre limité des crimes permettent à l'ensemble des communautés affectées d'avoir le sentiment que la justice a été rendue pour des atrocités qu'elles ont dû subir durant les différents conflits armés.

Toutefois, davantage d'efforts de sensibilisation demeurent nécessaires. En particulier, la CPI devrait adapter d'une manière souple sa stratégie de communication pour répondre efficacement aux perceptions divergentes du déroulement des procès que se forgent non seulement chaque communauté ethnique en Ituri mais aussi les autres personnes au plan régional et national à travers la RDC. Le conflit en Ituri a principalement impliqué les ethnies rivales Hema et Lendu. Lubanga, un Hema, est jugé pour le recrutement et l'utilisation d'enfants soldats, alors que Katanga et Ngudjolo, qui sont des Lendu, sont jugés pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis durant le massacre des Hema à Bogoro en 2003. Il est vraisemblable qu'en poursuivant les auteurs des crimes de part et d'autre de ces deux ethnies, le Procureur s'est efforcé de trouver un équilibre. Mais les Lendu restent sceptiques sur la neutralité de la Cour puisque les victimes dans le procès Lubanga sont les enfants Hema comme l'accusé lui-même. Et dans le procès Katanga et Ngudjolo, c'est encore des Hema qui sont des victimes. Par ailleurs, la CPI semble ne pas revêtir un impact certain en dehors de l'Ituri. Alors que le conflit armé a persisté en RDC notamment dans les deux Kivu jusqu'à une époque récente, La CPI n'a émis aucun mandat à l'encontre des auteurs des atrocités qui s'y commettaient. Ce qui lui aurait permis d'avoir un impact direct sur les victimes dans le Nord et le Sud-Kivu. Ces victimes s'interrogent sur le bien-fondé de la limitation jusqu'alors du champ des enquêtes de la CPI au seul district de l'Ituri. Certes, la CPI a ouvert une troisième enquête dans les années 2010 sur les crimes commis dans les Kivu, mais de nombreuses organisations des droits de l'homme estiment que la Cour a manqué là une occasion de démontrer la contribution de la justice à la paix par la lutte contre l'impunité. Elles pensent en effet que la CPI n'est pas disposée à enquêter dans les conflits en cours, alors que c'est justement dans de telles circonstances que la justice a un rôle fondamental à jouer en accélérant la fin de la commission des atrocités.

* 58Impacte du statut de Rome et de la cour pénale internationale en République Démocratique du Congo, publié par Mirna Adjami Guy Mushiata. Le Centre international pour la Justice Transitionnelle « ICTJ » travaille à remédier aux violations des droits de l'homme les plus graves et à les prévenir en affrontant les séquelles causées par les atrocités commises dans le passé. L'ICTJ recherche des solutions globales pour favoriser l'attribution des responsabilités, et créer ainsi des sociétés justes et pacifiées, Mai 2010, p.6

* 59Impacte du statut de Rome et de la cour pénale internationale en République Démocratique du Congo, op.cit, p.9

* 60Impacte du statut de Rome et de la cour pénale internationale en République Démocratique du Congo. Op.cit, p.10

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand