Cour pénale internationale face au défi de la coopération des états dans la répression des crimes de guerre et crimes contre l'humanité: cas ntaganda et cas nkunda( Télécharger le fichier original )par Mussa Arsène Mbenge Luliba Université de Goma "UNIGOM" - Licence 2015 |
§2. LA COUR PENALE INTERNATIONALE ET LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGOLe principe de coopération entre la Cour pénale internationale (CPI) et la République Démocratique du Congo (RDC) a été mis en exergue et se manifeste au travers de la situation de la RDC pendante devant la CPI. Il en est de même du principe de complémentarité qui s'exerce par le biais de la répression des crimes internationaux aussi bien devant la CPI que devant les juridictions congolaises. Celles-ci ont produit une jurisprudence prolifique digne d'attention pouvant s'inscrire dans la contribution des juridictions congolaises au développement du droit international pénal et humanitaire55(*). Cette année marque le quatorzième anniversaire de l'entrée en vigueur du Statut de Rome de la Cour pénale internationale le 1er juillet 2002. Le sort a voulu que le dépôt de l'instrument de ratification dudit Statut par la République Démocratique du Congo (RDC), le 11 avril 2002, soit déterminant pour son entrée en vigueur. C'est encore grâce à la RDC que la Cour pénale internationale (CPI) connaît ses premières affaires et expérimente le principe de complémentarité. Ce n'est pas le fait du hasard si le premier jugement de la CPI portant condamnation (rendu le 14 mars 2012) et celui fixant la peine (rendu le 10 juillet 2012) concernent la situation en RDC, plus précisément l'affaire de Thomas Lubanga Dyilo. C'est aussi probablement en RDC que se recensent les premières décisions de juridictions nationales appliquant le Statut de Rome, pour le meilleur et pour le pire. Au niveau de l'organe compétent pour déférer une situation devant la CPI, la réception du statut de la CPI en droit congolais dit que la proposition de loi confère cette prérogative au président de la République sur pied d'une décision délibérée en Conseil des ministres. Il défère ainsi à la CPI une situation dans laquelle un ou plusieurs crimes relevant de la compétence de cette dernière semblent avoir été commis sur le territoire national, ou par des ressortissants congolais, et demande au procureur de la CPI d'enquêter sur cette situation en vue de déterminer si une ou plusieurs personnes identifiées doivent être inculpées de ces crimes. La contribution du procureur général auprès de la Cour de cassation est requise pour indiquer, dans la mesure du possible, les circonstances de l'affaire et procéder à la production des pièces. Dans la coopération avec la CPI (Bureau du procureur), le 3 mars 2004, le président de la RDC a déféré à la CPI la situation qui prévalait en RDC la justifiant au regard de l'incapacité dans laquelle versaient les autorités congolaises à mener des enquêtes sur les crimes de la compétence de la CPI et à poursuivre les auteurs présumés. Cet acte de saisine a pu déclencher la procédure à l'encontre de certains inculpés encore pendante au niveau de la CPI. Des accords de coopération ont été signés entre la RDC et la CPI, notamment l'Accord de coopération judiciaire intérimaire du 6 octobre 2004 par lequel la RDC s'engageait à coopérer pleinement avec la CPI en établissant des mécanismes pratiques d'assistance nécessaires à la conduite efficace et rapide des enquêtes et des poursuites menées par le Bureau du procureur56(*), l'Accord sur les Privilèges et immunités des membres de la Cour.57(*) La coopération entre la RDC et la CPI a permis notamment d'expérimenter le principe de complémentarité. La preuve est constituée d'une part par les affaires pendantes devant la CPI pour la situation en RDC et, d'autre part, par la répression des crimes internationaux par les juridictions congolaises. La jurisprudence sécrétée par ces dernières constitue la jurisprudence de droit international la plus étoffée dans l'ordre juridique congolais. Quatorze ans après l'entrée en vigueur du Statut de Rome, le chemin à parcourir demeure encore longue. Beaucoup d'obstacles se sont érigés sur la voie de la lutte contre l'impunité. Le mécanisme judiciaire de lutte contre l'impunité demeure insatisfaisant s'il n'est pas intégré et complété par un large consensus national faisant de la lutte contre l'impunité son cheval de bataille. La récurrence des conflits armés en RDC, l'activisme des groupes armés et les conséquences sur les populations civiles, la propension des gouvernements congolais à signer des accords avec des groupes armés aux termes desquels l'amnistie, quoique théoriquement exclue pour les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le génocide, est accordée en échange de paix, attestent que le chemin à parcourir est encore long et requiert un engagement renouvelé quatorze ans après l'entrée en vigueur du Statut. * 55KAZADI MPIANA.J., la cour pénale internationale et la république démocratique du Congo : Etude de l'impact du statut de Rome dans le droit interne congolais, s.e, s.l, 2012, p.58 * 56 Accord de coopération, supra note 45. Le 1er article du 1erchapitre dispose : « Le présent Accord vise à faciliter la coopération entre la République Démocratique du Congo et le Bureau du Procureur dans le cadre de coopération générale prévue par le Statut de Rome et à établir les mécanismes pratiques de coopération et d'assistance nécessaires à la conduite efficace et rapide des enquêtes et des poursuites menées par le Bureau du Procureur ainsi qu'à son bon fonctionnement sur le territoire de la République Démocratique du Congo » * 57Coalition Nationale pour la Cour pénale internationale, communiqué, « La République démocratique du Congo ratifie l'Accord sur les privilèges et immunités de la CPI » (3 juillet 2007), en ligne : CCPI |
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