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La problématique de la fraude minière en République démocratique du Congo

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par Cédric KUMBATULU ANISA
Université de Kisangani - Graduat 2015
  

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Section 2. MODES OPERATOIRES DE LA FRAUDE MINIERE EN PROVINCE ORIENTALE

§1. Modes opératoires

La majeure partie de l'or volé en RDC passe entre les mains d'un petit nombre d'acteurs dont les modes opératoires sont relativement prévisibles. La production artisanale d'or en Province Orientale est estimée à plusieurs tonnes par an, alors que les exportations officielles ne dépassent pas quelques dizaines ou centaines de kilos par an. Le trafic de l'or est dominé par les exploitants artisanaux, les services de l'administration, les groupes armés et par certains éléments de FARDC, les puissances étrangères, etc. C'est tout un conglomérat des personnes qui se livrent au trafic de l'or en Province Orientale.

Ils usent des subterfuges les plus méprisables pour sortir, de manière illicite, de l'or de la Province Orientale. Ces subterfuges consistent notamment à la non déclaration au SAESSCAM des matières précieuses extraites du sol, au recours à la force et au paiement des forces de l'ordre contre protection.

§2. Mécanismes de lutte contre la fraude minière en Province Orientale

Le Gouvernement de la RDC a promulgué un Code minier en 2002 suivi d'un Règlement minier en 2003 définissant l'application du Code. Mais, comme bon nombre des lois congolaises, le Code minier n'est pas entièrement appliqué et encore moins respecté 31(*).

Un certain nombre d'autres entités étatiques sont responsables de différents aspects du suivi et de la réglementation du secteur minier. Le CEEC, agence autonome, a été créé pour mettre en oeuvre le processus de Kimberley, mais il est également chargé, depuis un décret récent, d'évaluer et d'apprécier les minerais avant leur exportation32(*).

L'Office Congolais de Contrôle (OCC) est responsable du suivi quantitatif et qualitatif de tous les produits importés et exportés. Étant donné la faible capacité de toutes ces agences étatiques à surveiller les échanges de manière efficace, les possibilités, pour les intérêts hostiles à tout changement, d'utiliser le processus de suivi pour leur propre bénéfice sont de plus en plus larges.

Le SAESSCAM (Service d'assistance et d'encadrement de l'artisanat minier) est une agence étatique créée pour apporter un soutien technique et des conseils aux mineurs artisanaux en matière de sensibilisation au droit, de formation aux techniques d'extraction, d'organisation de coopératives, de santé et de sécurité, etc.33(*) En principe, cette initiative devrait aider à réduire l'exploitation des mineurs artisanaux mais au-delà des problèmes causés par les financements insuffisants, le SAESSCAM a dû faire face à des accusations de corruption interne et de conflits d'intérêts concernant sa responsabilité de collecter les taxes portées par les mineurs artisanaux eux-mêmes34(*).

Un certain nombre d'initiatives nationales ont été mises en place pour examiner les aspects frauduleux ou abusifs des contrats miniers. L'accord de paix signé en 2003 appelait à la mise en place d'une commission parlementaire multipartite pour enquêter sur l'exploitation des ressources naturelles pendant la guerre, de 1996 à 2003. Menée par le parlementaire Christophe Lutundula, la «Commission Lutundula» a publié son rapport en 2005, indiquant les contrats miniers qui devaient être résiliés ou renégociés. La Commission recommandait également des procédures judiciaires à l'encontre de certains hommes politiques et hommes d'affaires35(*). À l'époque, certaines ONG ont critiqué l'Assemblée nationale et le gouvernement pour leur absence de réaction face aux recommandations du rapport.

En 2007, le gouvernement congolais a commencé l'examen de 61 contrats miniers, afin d'émettre des recommandations quant à la révision ou la résiliation des contrats. Le but était de corriger les «déséquilibres» en faveur des entreprises privées et au détriment de l'État36(*). Le rapport final de la commission d'enquête, publié en mars 2008, recommandait que 39 contrats soient renégociés et que 22 soient résiliés. L'entreprise australienne Anvil Mining, pour laquelle la résiliation a été recommandée, avait obtenu l'exemption totale des taxes pour elle-même et l'un de ses sous traitants pendant vingt ans, grâce à un contrat signé en 1998.

Étant donné la faible capacité de toutes les agences étatiques à surveiller les échanges de manière efficace, les possibilités, pour les intérêts hostiles à tout changement, d'utiliser le processus de suivi pour leur propre bénéfice sont de plus en plus larges. Il y a eu donc un accroissement de la fraude des substances minérales dans le pays.

Ainsi pour renforcer les mécanismes de lutte contre la fraude minière, il y a eu une initiative d'abord au niveau national et ensuite au niveau régional, celle de créer une Commission de lutte contre la fraude minière.

A. Initiative Nationale : la Commission Nationale de lutte contre la fraude minière « CNLFM »

Créée par l'arrêté interministériel n°0719/CAB.MIN/MINES/01/2010 et n°140/CAB.MIN/INT.SEC/2010 du 20/10/2010, la CNLFM a pour mission de concevoir, de mettre en oeuvre et d'assurer sur le terrain entre les services et organismes publics ayant dans leurs attributions la lutte contre la fraude et la contrebande dans le secteur des mines37(*).

L'article 5 de cet arrêté énumère les membres qui composent cette commission. Ils sont au nombre de 17 et ce sont des Délégués des services et organismes publics38(*) :

1. Cabinet du Président de la République ;

2. Cabinet du Premier Ministre ;

3. Cabinet du Ministre des Affaires intérieures ;

4. Cabinet du Ministre des Mines ;

5. Direction des Investigations du Secrétariat Général des Mines ;

6. Direction Générale des Migrations (DGM) ;

7. Direction Générale des Douanes et Accises (DGDA) ;

8. Office Congolais de Contrôle (OCC) ;

9. Cellule Technique de Coordination et de Planification Minière (CTCPM) ;

10. Centre d'Evaluation, d'Expertise et de Certification des Substances Minérales Précieuses et Semi-précieuses (CEEC) ;

11. Police Nationale Congolaise (PNC) ;

12. Service spécialisé du Ministère de l'Intérieur et Sécurité ;

13. Service spécialisé du Ministère de la Défense Nationale ;

14. Service d'Assistance et d'Encadrement du Small Scale Mining (SAESSCAM) ;

15. Parquet Général de la République ;

16. Parquet Général près la Haute Cour militaire.

17. La commission peut faire appel aux experts d'organismes publics ou privés chargés de la lutte contre la fraude dont l'apport est jugé nécessaire, pour certaines questions spéciales.

* 31 Décret N° 038/2003 du 26 /03/2003, portant règlement minier, in J.O. de la RDC, n°spécial du 15/04/2003.

* 32 Union Européenne, Op. Cit., p.58

* 33 N. Garrett , «Preliminary Observations from the Democratic republic of the Congo (DRC)». Extractive Industries Transparency Initiative (EITI) et Artisanal & Small-scale Mining (ASM), avant-projet, Octobre 2007

* 34 «Artisanal Cassiterite Mining and Trade in North Kivu», p.22

* 35 Global Witness (12 février 2006). «R.D. Congo : mettre fin à l'exploitation illégale des ressources naturelles», communiqué de presse. In http://www.globalwitness.org/media_library_detail.php/422/fr/r.d._congo_mettre_fin_a_lexploitation_illegale_des consulté le 25 avril 2015 à 19 h

* 36 IPIS (25 mars 2008). «République Démocratique du Congo : Contrats miniers - État des affaires», p.1. Anvers

* 37Art. 3, arrêté interministériel n°0719/CAB.MIN/MINES/01/2010 et n°140/CAB.MIN/INT.SEC/2010 du 20/10/2010, portant création, organisation et fonctionnement de la CNLFM.

* 38 Ibid., art. 5

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway