Le devoir de diligence du transporteur maritime de marchandises en droit CEMAC( Télécharger le fichier original )par OUSMANOU HADIDJATOU FSJP UNIVERSITE DE NGAOUNDERE - MASTER EN DROIT PRIVE GENERAL 2014 |
PARAGRAPHE II- LE MONTANT DE LA REPARATIONS'agissant du montant de la réparation il y a lieu de relever que les techniques d'évaluation diffèrent selon qu'il s'agit des pertes ou avaries et du retard. Cet aspect sera envisagé plus loin (B). Mais avant il paraît important de revenir sur les bases de calcul (A). A- SUR LES BASES DE CALCUL : COLIS, UNITE OU KILOGRAMME Le colis est un élément de la cargaison reconnu par les marques distinctives et portées sur le type de transport. C'est en fait l'élément spécifique pris en charge par le transporteur ou plus exactement toute charge individualisée prise spécifiquement en charge par le transporteur et ce quel que soit le poids ou le volume118(*). Il s'agit en principe d'une charge individualisée portant des marques. L'unité pour la jurisprudence s'applique aux marchandises qui, dans le langage courant ne reçoivent pas le nom de colis parce qu'ils sont conditionnés dans les emballages portant des noms différents : balles, fûts paquets..., soit parce qu'il s'agit des objets qui, en raison de leur dimension ou de leur nature propre, ne sont pas remis au transporteur dans un emballage spécifié119(*) : la plus part du temps, il s'agit des cas des marchandises transportées en vrac. Le Kilogramme dont le symbole est kg est l'unité de base de masse dans le système international d'unité. Il est défini comme étant égale à la masse du prototype international du kilogramme120(*). Cette notion a été consacrée pour pallier aux difficultés nées dans l'application des Règles de la Haye s'agissant de la détermination du colis ou de l'unité. Une profonde controverse a surgi sur la question de savoir, si l'on devait considérer comme colis un conteneur de marchandises ou lesdites marchandises individualisées. Autrement dit, le montant de la limitation devait-il s'appliquer à l'engin du groupement seul (conteneur) ou à chacun des colis individualisés ? Avant la loi, la jurisprudence majoritaire a eu à préciser que pour que l'on considère les colis individuellement à l'intérieur d'un conteneur, ceci devait être porté à la connaissance du transporteur, mais surtout, figurer dans le connaissement121(*). Pour le Professeur NGNINTEDEM, le connaissement se doit d'être explicite et contenir les marchandises du conteneur considérées individuellement en plus du conteneur122(*). Telle est l'option consacrée d'abord par l'ancienne version du Code de la Marine marchande qui s'est inspirée des Règles de Hambourg. Cette approche a également survécu à la révision de 2012 à travers l'article 552 al. 2 du CMM qui dispose : « Lorsque les marchandises sont transportées dans ou sur un conteneur, une palette ou un engin de transport similaire utilisé pour grouper des marchandises, ou dans ou sur un véhicule, les colis ou les unités de chargement énumérés dans les données du contrat comme ayant été placés dans ou sur cet engin de transport ou véhicule sont considérés comme des colis ou unités de chargement. En l'absence d'une telle énumération, les marchandises placées dans ou sur cet engin de transport ou véhicule sont considérées comme une unité de chargement ». Dans cette lancée, l'article 519 CMM prévoit d'ailleurs que devrait figurer dans le contrat, « le nombre de colis ou de pièces, ou la quantité de marchandises ; ets'il est fourni par le chargeur, le poids des marchandises. ». Par ailleurs, c'est dans l'optique d'aider à résorber cette controverse que le législateur a prévu à côté du colis ou l'unité, le kilogramme123(*). Après avoir appréhendé les notions de colis et d'unité, il y a lieu de mettre en exergue les techniques d'évaluation. B- SUR LES TECHNIQUES D'EVALUATION Il faut au préalable relever que les techniques d'évaluation s'appréhendent en faisant une discrimination entre les dommages subis s'analysant en pertes et avaries et ceux nés du retard à la livraison. Les plafonds prévus ont été améliorés au fil du temps au gré des conventions. Alors que la convention de Bruxelles de 1924 parlait d'une limitation à hauteur de 100 livres Sterling par colis ou unité, et qu'il a fallu attendre 1979 pour tenir compte de la réforme du système monétaire internationale survenue le 1er avril 1978 ayant écarté toute référence à l'or, le Droit de tirage spécial vient se substituer à l'unité de compte d'origine à savoir, la livre-or dans la convention de 1924 et le franc Poincaré dans le protocole de 1968124(*). Les Règles de la Haye Visby ont fixé le montant du plafonnement à 666,67 DTS par colis ou unité, et 2 DTS par Kilo125(*). Les Règles de Hambourg à l'article 6 paragraphe 1 (a) envisageant l'hypothèse de pertes ou avaries prévoit que le plafonnement appliqué est de 835 unités de compte par colis ou autre unité de chargement ou 2,5 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou endommagées, la limite la plus favorable à l'ayant droit à la cargaison étant applicable. S'agissant de l'hypothèse du retard, toujours à l'article 6, un mécanisme obligatoire à double degré est prévu. Celle-ci est égale à deux fois et demi le fret payable pour la marchandise ayant subi un retard. La somme obtenue ne doit pas excéder le montant total du fret obtenu en vertu du contrat de transport de marchandises par mer. Par ailleurs en cas de réparation due au titre des pertes ou dommages subis par les marchandises et au titre du préjudice résultant du retard, la somme due par le transporteur ne doit jamais dépasser le plafond fixé pour les seules pertes et avaries, soit précisément 835 DTS (environ 1002 euro) par colis ou 2,5 DTS (environ 3 euro) par kilo. Dans les Règles de Rotterdam, le plafond de la réparation est fixé à 875 DTS, soit environ 1050 euro par colis ou unité ou 3 DTS, soit environ 3,6 euro. Ce sont ces plafonds prévus par les Règles de Rotterdam qui ont été reproduites par le CMM de 2012 qui dispose : « Sous réserve des articles 553 et 555, paragraphe 1, la responsabilité du transporteur pour manquement aux obligations lui incombant en vertu du présent chapitre est limitée à 875 droits de tirage spéciaux par colis ou autre unité de chargement, ou à 3 droits de tirage spéciaux par kilogramme de poids brut des marchandises objet de la réclamation ou du litige, la limite la plus élevée étant applicable, sauf lorsque la valeur des marchandises a été déclarée par le chargeur et figure dans les données du contrat, ou lorsqu'un montant supérieur à la limite de responsabilité fixée dans le présent article a été convenu entre le transporteur et le chargeur ». L'alinéa 3 de cette disposition prévoit : « Les montants mentionnés dans le présent article sont convertis en francs CFA suivant la valeur de cette monnaie à la date du jugement ou de la sentence ou à une date convenue par les parties. La valeur, en droits de tirage spéciaux, du francs CFA est calculée selon la méthode d'évaluation appliquée par le FMI (Fonds Monétaire International) à la date en question pour ses propres opérations et transactions ». La même logique est appliquée en référence aux règles de Hambourg126(*). Enfin, il y a lieu de préciser que parler de la limitation légale n'exclut pas la prise en compte du préjudice subi par l'ayant droit à la marchandise. Il a l'obligation d'établir son préjudice. C'est le montant estimé et prouvé qui sera appliqué. Sauf à préciser que si ce montant dépasse le plafond légal, c'est ce plafond qui est pris en compte127(*). Il en est autrement lorsque la gravité de la faute du transporteur est pris en compte. * 118 NGNINTEDEM (J.-C.), op. cit., p. 282. * 119Aff. Sté protectrice C/ Sté des cargos algériens, DMF, 195A, p. 444 ; cité par NGNINTEDEM (J.-C.), op. cit., 282 ; Paris, 24 octobre 1966, DMF 1967.23 ; sur la thèse contraire militant pour la considération de l'unité du fret sur la notion de colis : Le Havre, 18 septembre 1970, DMF.1971.293. * 120Dictionnaire Wikipédia. * 121Cass Com. 12 octobre 1964, DMF, 1965, cité par POURCELET (M.), op. cit., p. 141. * 122 NGNINTEDEM (J.-C.), op. cit., p. 283. * 123 BONASSIES (P.) & SCAPEL (C.), op. cit., p. 762, n° 1108. * 124KENGUEP (E.), Droit des transports OHADA et CEMAC, op. cit., 61. * 125Ibidem. p. 296. * 126 L'article 553 CMM dispose en effet : « : Sous réserve de l'article 555, paragraphe 2, le montant de la réparation en cas de perte ou de dommage subi par les marchandises en raison d'un retard est calculé conformément à l'article 554 et la responsabilité pour le préjudice économique résultant d'un retard est limitée à un montant équivalent à deux fois et demie le fret payable pour les marchandises ayant subi le retard. Le montant total payable en vertu du présent article et de l'article 552, paragraphe 1, ne peut pas dépasser la limite qui serait fixée conformément à l'article 552, paragraphe 1, pour la perte totale des marchandises concernées ». * 127 NGNINTEDEM (J.-C.), op. cit., p. 287. |
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