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Etude de la dynamique des populations d?anopheles et de la transmission du paludisme dans le district sanitaire de nioro (Kaolack, Sénégal) après la campagne d'aspersion intra-domiciliaire d'insecticide de 2015

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par Assane Yade Ndiaye
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 2016
  

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III.2 : Variations des densités anophèliennes

III.2.1 : Variations de la densité agressive et du taux d'endophagie

Le tableau 2 rapporte les résultats des densités agressives des espèces en fonction du statut des villages. L'agressivité des femelles d'An. gambiae s.l. et d'An. funestus a connu des variations entre les zones traitées et celle non traitée.

Avec respectivement 2,04 Piqûre par Homme et par Nuit (PHN) et 1 PHN, An. gambiae s.l. a été plus agressive aussi bien à l'intérieur des habitations qu'à l'extérieur dans le village non traité comparé à ceux traités où l'agressivité a été estimée à 0,87 et 0,70 PHN, respectivement à l'intérieur et à l'extérieur.

Pour An. funestus, la même tendance a été observée avec des densités agressives plus faibles dans les villages, comparé à An. gambiae s.l. Toutefois, il est important de noter que dans tous les villages suivis, An. funestus a été plus exophage comparé à An. gambiae s.l.

Tableau 2 : Agressivité des populations d'An. funestus et d'An. gambiae s.l. à l'intérieur et à l'extérieur dans les zones traitées et témoins

Capture sur homme

 

An. funestus

An. gambiae s.l.

Statut des zones

Extérieur

Intérieur

Extérieur

Intérieur

Zones traitées Zone non traitée

0,93

1,04

0,43

0,79

0,70

1,00

0,87

2,04

Les taux d'endophagie (figure 12) ont été significativement plus élevés (p = 0,03) pour An. gambiae s.l. dans le village témoin (41,53%) que dans ceux traités (26,26%). Par contre, pour An. funestus aucune différence significative n'a été observée (p = 0,67).

22

100,00

Pourcentage

75,00

50,00

25,00

T NT

0,00

An. funestus An. gambiae s.l

Statut

Figure 12 : Taux d'endophagie (en %) en fonction du statut des villages

III.2.2 : Variations de la densité au repos

Le tableau 3 présente les densités au repos à l'intérieur des habitations selon le statut de la zone. Les résultats montrent que les populations d'An. gambiae s.l. ont été 9 fois plus importantes dans la zone témoin comparé à la zone AID. La même tendance a été observée pour An. funestus dont les densités au repos ont toutefois été moindre comparé à An. gambiae s.l.

Tableau 3 : Variations de la densité au repos selon le statut de la zone

Faune matinale résiduelle

Statut de la zone An. funestus An. gambiae s.l.

Traitées 0,60 1,04

Non traitée 2,15 9,23

III.3 : Préférences trophiques

23

L'origine des repas sang a été déterminée sur 62 femelles gorgées (19 An. funestus et 43 An. gambiae s.l.), collectées au repos dans les habitations au niveau des 3 villages. La typologie des repas montre que, de manière globale, 38 étaient des repas mono spécifique, 23 des repas

mixtes pris sur deux hôtes différents et 1 seul repas triple pris sur homme, boeuf et cheval. Ainsi, 87 repas ont été identifiés.

Quelle que soit la zone d'étude considérée, les populations d'An. gambiae s.l., et d'An. funestus ont montré un profil plus zoophile qu'anthropophile (figure 13). En effet, dans la zone témoin An. gambiae s.l. s'est principalement gorgé sur cheval (65,96%), tandis que dans celles traitées, des proportions égales de repas pris sur cheval et boeuf (41,67%) ont été notées. Dans ces dernières, le pourcentage de repas pris sur homme a été faible (16,67%). Le scénario contraire est noté dans la zone témoin où le second hôte préférentiel était l'Homme (25,53%). Les repas sur bovins n'ont compté que pour environ 8% du total identifié (figure 13).

En ce qui concerne An. funestus, des proportions comparables sur l'anthropophilie ont été notées aussi bien dans les zones traitées que dans celle témoin. Cependant, il est important de noter que le spectre d'hôtes est élargi aux ovins (figure 13). Dans les villages traités, les femelles de cette espèce se sont gorgées dans les mêmes proportions (~33%) sur homme, boeuf et cheval. Le taux d'anthrophilie a été de 26,43% pour l'ensemble des 3 villages.

De manière spécifique, les villages traités ont présenté un taux d'anthropophilie faible de 22,2%, comparé à celui du village non traité (27,5%). Cette différence n'est cependant pas significative (p-value=0,87).

24

Figure 13 : Spectres d'hôtes des populations d'An. gambiae s.l. et d'An. funestus en fonction du statut de traitement des zones d'étude

25

An. funestus

homme boeuf mouton cheval poule

Hôtes

NT T

homme boeuf mouton cheval poule

Hôtes

100

An. gambiae s.l.

Proportion (%)

75

50

25

0

III.4 : Taux de parturité

Au total 113 femelles à jeun capturées sur appât humain ont été disséquées pour la détermination de l'âge physiologique. Les résultats sont présentés dans le tableau 4. L'analyse montre que la proportion de femelles pares pour An. gambiae s.l. et An. funestus varie entre zones traitées (55% et 66,67% respectivement) et zone témoin (52,27% et 35,71% respectivement). Cependant, les différences observées entre les zones n'ont pas été significatives. Il en est de même pour la parturité entre les populations d'An. gambiae s.l. et d'An. funestus.

Tableau 4 : Taux de parturité selon les zones

 

An. gambiae s.l.

An. funestus

 

Statut

Total disséqué

Parturité (n)

Total disséqué

Parturité (n)

P

Zones traitées

20

55,00% (11)

21

66,67% (14)

0,65

Zone non traitée

44

52,27% (23)

28

35,71% (10)

0,25

p 0,94 0,06

(n) = effectif testé ; p = Valeur de p

III.5 : Indice Circumsporozoïtique : ICS

Au total, 120 femelles dont 99 dans les deux villages traités et 21 dans celui non traité (témoin) ont été testées pour la recherche d'infection à Plasmodium falciparum par la méthode d'ELISA CSP. Aucune infection à Plasmodium falciparum n'a été détectée.

III.6 : Sensibilité des populations d'An. gambiae s.l. aux insecticides

Parallèlement à l'étude de dynamique des populations de vecteurs, celle de sensibilité des populations d'An. gambiae s.l. vis-à-vis des Carbamates (Bendiocarb) et des Organophosphorés (Pyrimiphos-méthyl, Malathion et Fénitrothion) a été également évaluée dans le district de Nioro.

Au total, 443 spécimens ont été exposés aux 4 molécules d'insecticides appartenant à deux familles susmentionnées. Les résultats, enregistrés dans le tableau 5, montrent que les populations d'An. gambiae s.l. ont été totalement sensibles aux Organophosphorés et aux Carbamates.

26

L'identification spécifique d'un sous-échantillon de la population testée, par PCR, a révélé la présence d'An. arabiensis (67,6%) et d'An. gambiae (32,84%).

Tableau 5 : Sensibilité d'An. gambiae s.l. aux Carbamates et aux Organophosphorés dans le district de Nioro

Carbamates Organophosphorés

Bendiocarb Pyrimiphos-méthyl Malathion Fénitrothion

100***

100***

100***

100***

(114)

(109)

(116)

(104)

() = effectifs testés ; *** = Susceptible

27

III.7 : Discussion

Au cours de cette étude, 5 des 20 espèces déjà décrites au Sénégal (Diagne et al., 1994) ont été collectées. Il s'agit d'An. gambiae s.l., An. funestus, An. pharoensis, An. ziemanni et An. squamosus. Parmi celles-ci, An. gambiae s.l., et An. funestus, ont été les plus abondantes quelle que soit la méthode de collecte ou la zone considérée.

Pour An. gambiae s.l, sa prédominance pourrait s'expliquer par la présence de ses gîtes préférentiels, constitués par des collections d'eau temporaires peu profondes et ensoleillées liées aux pluies (Gillies et De Meillon, 1968). Quant à An. funestus, l'abondance notée dans les différents villages suivis, principalement à Ndramé ndimbe, pourrait être liée à la présence de cours d'eau permanents à végétation dressée, favorable au développement de ses larves. Cette même observation a été rapportée par Gueye (1969) au cours de ses travaux dans le bassin du Saloum.

Le comportement exophage, moins endophile et zoophile observé au cours de cette étude chez les populations d'An. funestus dans les villages traités, pourrait trouver son explication par l'effet des aspersions intra-domiciliaires, combiné à l'utilisation des moustiquaires imprégnées d'insecticides, rendant difficile l'accès à l'homme. En effet, l'utilisation des insecticides à effet rémanent conduit à suspecter une hétérogénéité au sein des populations d'An. funestus. D'autant plus que des études réalisées au Burkina Faso mettaient en évidence l'existence de deux unités taxonomiques à capacité vectorielle et à indice d'anthropophilie différents (Boccolini et al., 1994); alors qu'à Madagascar des études simi1aires soulignaient des variations liées à l'anthropophilie (Boccolini et al., 1992). Au Mali et au Burkina Faso des observations comparables faisaient état d'un important polymorphisme (Boccolini et al., 1998). D'autre part, la cohabitation des populations humaines avec les animaux domestiques pourrait offrir une large gamme d'hôtes alternatifs, d'où la déviation trophique notée à travers les repas pris fréquemment sur cheval, boeuf et dans une moindre mesure sur mouton.

Commentaire [EN1]:

A l'image d'An. funestus, le même comportement a été également observée chez les populations d'An. gambiae s.l. Ceci pourrait laisser penser que les espèces du complexe sont en majorité représentées par An. arabiensis, dont le comportement exophage, moins endophile et zoophile est bien connu (Gillies et De Meillon, 1968 ; Niang et al., 2016). Ceci lui permet de se soustraire aux interventions de LAV et a pour conséquence un changement de la composition spécifique de la population d'An. gambiae s.l. comme suggéré dans d'autres contrées (Derua et al., 2012 ; Kitau et al., 2012).

Au cours de cette étude, aucune infection à Plasmodium falciparum n'a été détectée sur les spécimens testés dans les différents sites. Ceci pourrait être mis en relation avec les comportements de piqûre et de repos. En effet, le faible contact homme-vecteur ne permettrait pas aux espèces de s'infecter.

Commentaire [EN2]:

Nos travaux ont rapporté des taux de parturité faibles à modérés et similaires entre les deux espèces vectrices retrouvées dans les deux zones. Pour les deux taxa, ces taux pourraient être expliqués par l'AID, dont l'objectif premier est de réduire la longévité des populations vectrices (Najera et Zaim, 2002).

L'étude a également révélé une sensibilité totale des populations d'An. gambiae s.l aux Carbamates et aux Organophosphorés, à l'instar d'autres zones du pays (Faye et al., 2011). Toutefois, une étude récente dans le Sénégal Oriental a confirmé la résistance des populations d'An. gambiae s.l. au Fénitrothion (Niang et al., 2016).

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe