XCIII. IV-1-16. Parures après la
déforestation
La parure chez les Nkola/Ngyéli a longtemps
été basée sur les produits tirés de la forêt.
Mais de plus en plus avec le phénomène de la déforestation
et la rareté des essences et animaux utilisés dans le cadre des
décorations ce domaine est profonde mutation. De moins en moins l'on
trouve les peaux d'animaux comme les panthères, les antilopes, les gros
serpents car ceux-ci étant devenus rares suite aux multiples bruits
orchestrés dans la forêt, leur lieu de résidence. La
médecine moderne s'occupant des problèmes de santé des
bébés, il devient de plus en plus rare de trouver des enfants
avec des dents de serpents autour de leur cou ou des cordes spéciales
autour de leur taille. Les jeunes Nkola/Ngyéli quant à eux
arborent autour de leur cou des objets achetés dans les boutiques
frisant la modernité.
Photo
N°18 : Jeune Nkola de Nkuongio portant à son cou, un
collier en perle.
Source : Nzie, 2013.
Somme toute, cette partie nous a permis de revisiter quelques
éléments de la culture Nkola/Ngyéli avant et après
la déforestation. Il en ressort de celle-ci qu'un changement observable
se vit à plusieurs degrés. Pour mieux comprendre ce changement,
il est indiqué de le soumettre à l'écologie culturelle et
au fonctionnalisme que nous avons choisi comme grille théorique.
XCIV. IV-2.APPORT DE LA DEFORESTATION
DANS LE CHANGEMENT DES MODES DE VIE DES NKOLA/NGYELI
Il s'agit de soumettre le changement constaté à
la grille théorique anthropologique choisie dans le cadre de cette
étude. L'écologie culturelle et le fonctionnalisme vont donc nous
permettre de faire le constat de ce changement et ensuite de mener
uneinterprétation anthropologique de ce changement.
XCV. IV-2-1.
Constat du changement
Comme nous l'avons pu expliquer en détail, le massif
forestier de Lolodorf a longtemps présenté une richesse
énorme au niveau de sa biodiversité. Cet état physique a
fait de cette zone, un milieu de prédilection pour les activités
de déforestation. Dans ce même massif, vivent depuis des
décennies, les Nkola/Ngyéli auxquels la vie est fortement
dépendante. De façon progressive, la déforestation a
grandement dépouillé les forêts de ses richesses. De plus
en plus, elle devient pauvre et ne permet plus aux Nkola/Ngyélide
satisfaire leurs besoins de survie. De l'occupation de l'espace vers les autres
aspects socioculturels rien n'obéit plus aux modes de vie originels. De
plus en plus en tout est en train de changer parce que la forêt n'est
plus totalement cette mamelle nourricière qui offrait tout aux
Nkola/Ngyéli. La structure de l'occupation de l'espace a
cédé place aux formes et constructions modernes inspirées
des Bantu voisins.
Les lieux de résidence ce sont multipliés pour
faire face aux récurrentes difficultés de survie. Les nouveaux
campements sur les abords de route matérialisent cette volonté
de recherche des espaces de bien-être. L'alimentation longtemps
basée sur la consommation des ignames, du gibier, du poisson et du miel
est menacée suite à leur rareté liée à la
déforestation. Aujourd'hui, les échoppes et autres petits
boutiques sont fréquentées par les Nkola/Ngyéli pour
l'achat des produits alimentaires comme du riz, du poisson, de l'huile
raffinée, de l'alcool frelaté et des cigarettes modernes. La
médecine moderne est en train de ravir la médaille à
l'ethnomédecine Bakola/Bagyéli parce que l'efficacité de
cette dernière est remise en jeu suite au manque des essences de leur
pharmacopée.Il va sans dire que la pharmacopée
Bakola/Bagyéli se trouve dans une situation très délicate
face au mode d'exploitation anarchique de l'écosystème forestier
à Lolodorf. Il n'y a pas qu'un mode de soins qui soit en péril,
c'est aussi un mode de vie et tout ce qui est lié autour.Au niveau de la
maladie, sa perception a considérablement changé. De plus en plus
les sorts des maladies ne sont plus le seul aspect mystique mais font
intervenir l'existence des maladies pathologiques pouvant influencer la
santé du corps. Aussi les rapports sexuels entretenus avec les Bantu
sont sujet aux transmissions des maladies.
Le système de croyance a fortement
changé à cause de la fréquentation des
Nkola/Ngyéliauprès des Bantu. Cette fréquentation est due
à la recherche de bien-être hors des forêts suite à
sa dégradation. Le volet relatif aux rapports avec les autres a
grandement changé. Les Nkola/Ngyéli très fréquents
aux cotés des Bantu à cause de la recherche du
développement, commencent à désocialiser les relations
anciennes. Le fait de voir comment la vie se passe dans la
société Bantu les pousse à redéfinir ces relations
jadis basées sur la domination du grand maître Bantu.
Sur le plan économique, les
Nkola/Ngyéli sont pleinement entrés dans l'économie
monétarisée. Le besoin d'argent est devenu une
préoccupation importante. Tuer du gibier pour vendre, extraire les
écorces d'un arbre pour vendre, administrer les soins de
santépour se procurer de l'argent, défricher un champ pour avoir
de l'argent chez les Nkola/Ngyélisemblent être de nos jours un des
moyens efficaces pour se procurer des revenus. Partant dufait qui
établit que l'environnement façonne et influence les modes de vie
de chaque communauté, il en ressort que l'état actuel de la
forêt liée à sa dégradation ne répond plus
suffisamment, aux besoins des Nkola/Ngyéli. Par conséquent, les
nouveaux modes de vie apparaissent afin de faire face à cenouvel
environnement hostile. De nos jours, ces changements progressifs
observés à plusieurs niveaux de leur vie, attestent le
caractère dynamique de chaque société humaine. Autant
d'illustrations qui prouvent combien de fois les modes de vie des
Nkola/Ngyéli de Lolodorf sont inhérentes à leur
environnement naturel. Cependant,cet environnement devenu dégradé
suite la déforestation, subit un changement et par conséquent
crée une influence sur la cultureBakola/Bagyéli qui en
dépendent. De ce changement sont tributaires, les dynamiques
socioculturelles observées de nos jours chez les Nkola/Ngyéli.
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