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Déforestation et dynamiques socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf: contribution à  une anthropologie du développement

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par Gilbert Aboushow NZIE
Université de Yaoundé I - Master recherche anthropologie 2015
  

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LXV. III-4-2. Usages des essences exploitées

Les essences exploitées dans le cadre de la déforestation sont soumises à des utilisations variées. Le tableau ci-dessus fait une description de l'utilisation des différentes essences exploitées dans le massif forestier de Lolodorf.

Noms scientifiques

Noms commerciaux

Usages

Enantiachlorantha

Enantia, moambe jaune

Médecine (écorce)

Entandrophragmacylindricum

Sapelli

Meuble menuiserie et sculpture

Entandrophragma utile

Sipo

Meuble menuiserie et sculpture

Baillonellatoxisperma

Moabi

Meuble, menuiserie, sculpture et Médecine

Guirbourtiatesmanii

Bubinga

Médecine/industrie du bois

Naucléadiderrichi

Bilinga

Médecine/Industrie du bois

Pterocarpussoyauxii

Padouk

Médecine/Industrie du bois

Miliciaexcelsa

Iroko

Industrie du bois

Terminaliasuperba

Fraké

Bois de coffrage

Triploclitonscleroxylon

Ayous

Bois de coffrage

Irvingiagabonensis

Mangue de brousse

PNFL (fruit et culinaire)

Coula edulis

Arbre à noisette

PNFL (fruit)

Rincinodendronheudoltii

 

PNFL (culinaire)

Garcinia cola

Bitter cola

PNFL (aphrodisiaque)

Tableau N° 2 : Quelques types d'essences et leurs utilisations

Source : Nzie, 2013.

LXVI. III-5. DEFORESTATION ILLEGALE ET TECHNOLOGIES MOBILISEES

Il s'agit de décrire la déforestation pratiquée dans l'ignorance totale de l'ensemble des prérogatives légales prévues par le gouvernement camerounais. Mais, notre attention sera focalisée sur notre site d'étude.

LXVII. III-5-1. Déforestation illégale

La corruption largement répandue et les rares contrôles sur le terrain favorisent les activités illégales dans le domaine de la foresterie.C'est un grave problème pour les autorités camerounaises car il génère d'importantes pertes de revenus. Ces pratiques constituent en même temps un grand obstacle pour le passage à des méthodes de foresterie durable. Le respect strict de la législation dans de telles circonstances est considéré comme un désavantage concurrentiel. Et il ne semble malheureusement pas que la situation soit près de changer.

En effet, la déforestation comme nous l'avons dit plus haute est conditionnée dans un cadre légal. Celui-ci impose la conduite à tenir pour être en commun accord avec l'administration. Cette légalité sous-entend, la possession des titres d'exploitation délivrée par l'administration centrale, les titres de coupe, et les autorisations d'exploitation dans le cas des forêts communautaires. Vient s'ajouter ici, le respect du payement des taxes fiscales auprès des services financiers de tutelle.

Cependant, une autre forme de déforestation dite illégale se produit dans l'ignorance totale de ces normes. Depuis quelques décennies, elle est en vue au Cameroun en général et à Lolodorf en particulier. Devant le silence conditionné des autorités administratives, et la pauvreté qui ruine les populations locales, l'accélération de cette pratique est le quotidien que subissent les forêts de Lolodorf de nos jours.

D'après MBPILE Moise, notable à la chefferie de groupement Ngoumba centre, « la coupe frauduleuse du bois a commencé au niveau de Mougué dans la grande forêt de Nkouambpoer I il y'a plus de dix ans. Le Chef de groupement a pris une décision relative à l'arrêt de cette exploitation mais celle-ci n'a pas connu grand effet compte tenu de la misère, la corruption et la pauvreté qui sévissent dans sa zone de compétence. Les populations autochtones font entrer dans leur forêts, des gens venant de tous les horizons. Ces exploitants sont en majoritaires composés des Anglophones avec leurs équipes de scieurs et de transporteurs. Le processus consiste d'aller camper en brousse en bande et puis passer à la prospection des essences importantes comme le Bubinga, le Moabi et d'autres essences forestières économiquement rentables. Après avoir localisé un arbre le Bantu à qui revient la parcelle de forêt vend cet arbre à une valeur très négligeable. Les produits issus de cette exploitation sont transportés ensuite par camion vers Lolodorf.

Un autre modèle est lié au prélèvement d'écorce de certains arbres. Celui-ci est effectuée en général par les populations Bantu et les jeunes Nkola/Ngyéli. Le principe consiste à localiser un arbre en pleine forêt à l'abattre et puis à le débarrasser de ses écorces.

Plusieurs exemples peuvent être ici énumérés. A Nkouambpoer I, un certain MAFANG Simon aurait bradé aux exploitants, un Bubinga qui servait à toute la communauté pour des besoins thérapeutiques. A titre compensatif, il aurait reçu une somme de 100000 F CFA. Convoqué par le chef du village, ce dernier déclara que l'arbre en question lui appartenait et qu'il était libre de le vendre afin de résoudre ses multiples problèmes. L'absence de cet arbre cause de nos jours, des sérieux problèmes aux populations Bantu et Nkola qui y vivent.

Au campement de Mougué situé à une dizaine de kilomètres de Nkouambpoer I, le même scénario s'était déroulé. Un exploitant serait venu corrompre les Nkola en leur proposant d'acheter le Bubinga qui leur servait de culte des ancêtres, de lieu de rites de purification et de consultations diverses. Ceux-ci après consommation d'alcool frelaté auraient accepté la transaction contre en plus de l'alcool, du tabac,d'un sac de riz, une somme de 50000 F CFA. L'arbre fut coupé alors que les Nkola étaient ivres. Le lendemain matin surpris par cet acte, ils durent s'exposer à ce que l'arbre soit débité. La situation entraina des conflits d'une ampleur inquiétante. Une fois l'administration consultée, l'arbre avait été débité et transporté vers la route. Mais face aux multiples évènements malheureux qui suivirent l'exploitant en question, celui-ci serait revenu présenter ses regrets aux Nkola. Peine perdue dans la mesure où l'arbre avait causé plusieurs accidents mortels avant d'atteindre sa destination finale.

Toutefois, il revient de souligner que Lolodorf devient de plus en plus une cible pour des multiples exploitants forestiers illégaux. Plusieurs agissent sous le couvert de certaines autorités administratives et politiques. Cependant, cette exploitation qui sévit sur les forêts sans aucune éthique des normes environnementales est loin de respecter les prérogatives inhérentes à la Loi N° 94 du 20 Janvier 1994 portant régime des forêts et de la faune au Cameroun.

Interrogé sur cette question, MABANG, un exploitant sous-traitant nous a livré ces informations : « Le Cameroun c'est le Cameroun qu'est-ce que tu appelles documents administratifs liés à l'exploitation forestière ? Toute cette paperasse ne nous sert à rien on sait comment ça se passe. Avant de lancer ton chantier dans un village, tu vas d'abord causer avec le Chef de terre, le Commandant de brigade, le Commissaire de sécurité publique, le Commissaire spécial et le Chef de poste forestier. Une fois l'arrangement passé avec ces autorités, le reste tu négocies sur place avec les villageois qui sont lessivés par la misère et les problèmes de toute sorte. Pour les Pygmées tu leur donnes juste un peu à manger, à boire et à fumer même s'ils se plaindront plus tard. Toutes les promesses que tu leurs feras ne seront totalement jamais tenues parce que tu sais que l'administration est à tes cotés. Et pour convoyer mes planches par camion vers Douala ou Yaoundé, je cause avec les autorités qui intiment l'ordre à leurs subalternes de ne pas déranger mon camion dans leur zone de compétence. Le reste se gère avec des arrangements sur les barrières de contrôles en route.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand