Le présent travail
s'intitule « déforestation et dynamiques
socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf : contribution
à une anthropologie du développement » Cette
partie introductive, fait ressortirla procédure scientifique qui nous a
permis de collecter, d'analyser et d'interpréter nos données.
Elle est structurée par les éléments
développés dans l'ordre chronologique suivant : le contexte
de la recherche, la justification du choix du sujet, le problème, la
problématique, les questions de recherche, les hypothèses, les
objectifs, la méthodologie, l'interprétation,
l'intérêt, les limites de la recherche et les difficultés
rencontrées.
1. CONTEXTE DE LA RECHERCHE
La question relative à la déforestation,
à l'érosion de la biodiversité, à la
dégradation de l'environnement, au développement durable,
à l'éthique environnementale et à la survie de des peuples
autochtones, semblent constituer de nos jours, une préoccupation
majeure pour les pouvoirs publics et la communauté scientifique. Elle
s'inscrit dans les nouvelles politiques gouvernementales auxquelles, les
cahiers de charge imposent une nouvelle vigilance. Déforestation,
changement climatique, pollution industrielle, érosion de la
biodiversité, matérialisent la manifestation des dangers et
alertes résultant d'une action anthropique insoucieuse de l'avenir
auxquels notre planète fait face. NKE-NDIH (2008), soutien d'ailleurs
que la protection de l'environnement est devenue depuis quelques
décennies, une préoccupation majeure pour la communauté
internationale.
Au Cameroun, le problème de développement que
tente de résoudre les pouvoirs publics depuis des décennies,
passe par l'exploitation des nombreuses richesses qu'offre l'environnement.
D'ailleurs, WILKIE et LAPORTE (2001), soutiennent que la couverture
forestière au Cameroun est considérée comme la meilleure
d'Afrique centrale. Cette exploitation implique alors la
déforestation et le déboisement dans un cadre légal
c'est-à-dire régie par des actes juridiques bien définis
par le gouvernement central. Cependant, les zones forestières du Sud et
de l'Est, qui ont deux types de populations que sont les Bantu et les
Pygmées, sont les deux espaces environnementaux qui couvrent la majeure
partie du massif forestier camerounais. Cet état des choses fait de ces
deux régions l'un des foyers où la déforestation aux
causes multiples s'est installée depuis plusieurs décennies et
s'accélère à un rythme très
inquiétant. DE WASSEIGE et al.,(2009), pensent
que les causes de cette déforestation sont multiples et incluent
l'augmentation de la pression démographique, l'intensification des
pratiques agropastorales, l'expansion de l'industrie minière ou encore
la multiplication des pratiques illégales. Pour certains, la
tentation est grande de compter l'ensemble des sociétés
forestières.
Comme certaines localités qui disposent d'une richesse
forestière considérable, la zone de Lolodorf est une cible de la
déforestation. Naturellement dans ce site vivent certaines
sociocultures qui ont défini des rapports très liés avec
la forêt : Les Nkola/Ngyéli. Pour BAHUCHET, S. et al.,(1999),
Des milliers d'êtres humains y vivent et entretiennent avec ces
forêts, des relations culturelles, sociales et symboliques, anciennes,
intenses et profondes. Ces forêts et ces hommes ont évolué
et continuent à évoluer ensemble. Leurs histoires et leurs
destins sont étroitement liés.
Dans cette localité, la déforestation est
pratiquée de façon légale et illégale par plusieurs
acteurs. Qu'il s'agisse des firmes forestières, des acteurs
isolés ou des bandes des populations locales et
étrangères, les torts causés à la forêt sont
énormes. Cependant, les communautés locales qui vivent dans ces
forêts comme les Nkola/Ngyéli ou hors de ces forêts comme
les Bantu, subissent les effets de cette érosion de la
biodiversité sur plusieurs aspects. Mais les plus touchés par ce
phénomène sont lesNkola/Ngyéli. Il en ressort dont de
cette situation, des changements socioculturels liés à la
dégradation de leur cadre naturel de vie. La destruction de la
forêt n'étant pas exclusivement une disparition physique, à
conséquence environnementale, est aussi une disparition culturelle et
humaine et par conséquent, a un effet socioculturel direct sur les
communautés qui en dépendent.
Progressivement, des multiples problèmes de survie
auxquels les Nkola/Ngyéli font face se font ressentir à vue
d'oeil et interpellent tant la communauté scientifique, les organismes
d'aides que les pouvoirs publics. L'érosion de la biodiversité
qui s'accélère de façon terrifiante dans leur milieu
naturel semble ne plus favoriser efficacement leur système de vie.
Inévitablement, leur culture est contrainte à des dynamiques de
plusieurs ordres afin de s'accommoder aux réalités
environnementales devenues hostiles et appauvries. Au regard de tout ce qui
précède, nous voulons inscrire notre recherche, dans une
approche socioculturelle afin d'évaluer l'impact de la
déforestation sur la culture des Nkola/Ngyéli de Lolodorf.
2. JUSTIFICATION DU CHOIX
DU SUJET
Deux raisons majeures justifient le choix de notre
sujet. La première est personnelle et la seconde est scientifique.
1. 2-1. Raison
personnelle
Nous avons passé notre enfance à
Nkouambpoer I, un des villages de l'arrondissement de Lolodorf qui abrite dans
ses forêts, des campements Nkola/Ngyéli. Nous avons presque
vécu au quotidien en voyant de moins en moins les activités
intenses de déforestation et en percevant les modes de vie des
Nkola/Ngyéli s'arrimer à l'abondance des richesses que leur
procurait ce cadre naturel de vie. Mais au fur et à mesure où
l'exploitation de la forêt va grandissante et par conséquent
dégrade progressivement la forêt de ses ressources animales et
végétales, les modes de vie des Nkola/Ngyéli changent
également. Ces peuples qui vivaient de la chasse, la cueillette et du
ramassage le font de moins en moins. De nos jours où ce
phénomène a atteint sa vitesse de croisière, les
Nkola/Ngyéli sont méconnaissables dans plusieurs aspects de
leurs modes de vie longtemps connus. Il naît donc progressivement
auprès de nous une réelle motivation à comprendre ce que
deviendront les Nkola/Ngyéli de Lolodorf aux lendemains de la
déforestation.
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