Vision africaine du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes( Télécharger le fichier original )par Wendeyida Jessie Josias OUEDRAOGO Université Privée de Ouagadougou - Licences es Sciences Juridiques; Option: Droit public 2012 |
Conclusion généraleAu fil des années, le droit des peuples à l'autodétermination a pris une place très importante dans le droit international tant au niveau universel qu'au niveau africain. Il s'agit, en réalité, d'un principe clé dont la réalisation est impérative pour le respect de nombreux autres droits de l'homme151(*). De nombreux instruments juridiques, organes quasi-juridictionnels et organes juridictionnels assurent la protection juridique dudit principe. Au niveau africain, on note essentiellement la Charte ADHP, la Commission ADHP et la Cour ADHP dont les missions seront bientôt exécutées par la Cour AJDH. Tout de même, l'on note que l'efficacité du contrôle africain est encore faible. En outre, l'étude du droit des peuples à l'autodétermination reste compliquée en raison de l'absence de définition unanime du principe qui d'ailleurs est dynamique. Les particularismes de ce droit au niveau africain résident d'abord dans le fait que le peuple renvoie à des concepts sociologiques très particuliers. En second lieu, l'on note que si le droit à l'autodétermination a été à la base de l'accession à l'indépendance de nombreux États sur le continent, les États africains ont très tôt limité ce droit par un autre principe : l'uti possidetis. Il était question pour ceux-ci de prévenir les risques d'instabilité pouvant naître d'un exercice non bien encadré du principe. Enfin, l'on note que les sécessions, bien qu'exclues en principe, semblent acceptables si elles interviennent dans le but de remédier à une violation massive et flagrante des droits de l'homme. Cela dit, même si certains auteurs ont voulu limiter le droit à l'autodétermination au contexte de la décolonisation, force est de reconnaître aujourd'hui qu'une telle tentative serait vaine dans la mesure où ce droit a été redéfini et comprend désormais un aspect externe et un aspect interne. Il s'agit d'un principe à « géométrie variable » qui prend en compte aussi bien le souci des États de préserver l'intégrité de leurs territoires que les aspirations et volontés des peuples152(*). Comme le dit Alain Pellet, « les peuples peuvent exister dans l'État, à condition que l'État reconnaisse effectivement cette existence et les droits qui en découlent »153(*). Pour ce il faudrait avoir une conception large de l'aspect interne de l'autodétermination, ce qui, sans doute, pourrait prévenir les risques de sécessions154(*). Ne serait-ce d'ailleurs pas là une solution pour la crise malienne dont ni la diplomatie, ni les élections n'ont su mettre un terme aux revendications du Mouvement national de libération de l'Azawad ? * 151 Comité des droits de l'homme, Observation générale n°12, Article premier (Droit à l'autodétermination), Vingt et huitième session, 13 mars 1984. « Ce droit revêt une importance particulière, parce que sa réalisation est une condition essentielle de la garantie et du respect effectif des droits individuels de l'homme ainsi que de la promotion et du renforcement de ces droits. C'est pour cette raison que les États ont fait du droit des peuples de disposer d'eux-mêmes, dans les deux Pactes, une disposition de droit positif, qu'ils ont placée, en tant qu'article premier, séparément et en tête de tous les autres droits énoncés dans ces Pactes ». * 152 Pierre-Christian LABEAU, « Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes : son application aux peuples autochtones », Les Cahiers de droit, vol. 37, n° 2, 1996, pp. 514-515. « Les juristes consultés par la Commission sur la souveraineté ont tracé une voie intéressante permettant la mutation du droit à l'autodétermination vers une définition nouvelle. Selon eux, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est « à géométrie variable » en ce sens qu'il signifie que tous les peuples ont le droit de participer aux choix politiques, économiques, sociaux et culturels les concernant, mais il entraîne fort rarement un droit à l'indépendance. En somme, pour les peuples coloniaux, il existe la possibilité de choisir l'indépendance ; pour les autres, il y a à la fois un droit à une identité propre, celui de choisir et de participer. Cette approche serait de nature à concilier les craintes légitimes des États de préserver l'intégrité de leur territoire avec la reconnaissance de leur droit à disposer d'eux-mêmes à tous les peuples. Il est possible de croire que cette approche saura rallier de nombreux États ». * 153 Alain PELLET, « Quel avenir pour le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ? », op. cit., p. 276. * 154 Commission européenne pour la démocratie par le droit, L'autodétermination et la sécession en droit constitutionnel, Rapport adopté par la Commission lors de sa 41e réunion, Venise, 10-11 décembre 1999. « L'autodétermination interne peut s'exprimer par l'affirmation de certains droits fondamentaux revêtant un caractère collectif, notamment en matière culturelle, ou encore par le fédéralisme, le régionalisme, ou d'autres formes d'autonomie locale. En particulier, la création de collectivités publiques - et notamment d'entités fédérées - et la modification de leurs limites peuvent constituer une forme d'autodétermination. Une telle compréhension large de l'aspect interne de l'autodétermination vise à éviter des conflits qui pourraient comporter un risque de sécession ». |
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