2.2. Règles et conditions de la
convertibilité
La convertibilité s'articule autour de trois règles
fondamentales52 : ? La première est la levée de toutes
restrictions sur les paiements internationaux courants.
51 Comité intérimaire du FMI, Avril
1997, Tentative d'amendement des statuts du FMI pour tenir compte des
mouvements de capitaux.
52 Perrault. J. F, Revue de la Banque du Canada,
Art. Les flux de capitaux privés vers les économies de
marché émergentes, Printemps 2002, p. 37.
+ La deuxième règle est le non recours à
des mesures monétaires discriminatoires comme les accords de paiements
ou à la pratique du taux de change multiple.
+ La troisième règle est l'obligation d'assurer la
convertibilité des avoirs détenus par l'étranger. Cette
obligation signifie que l'Etat devra racheter sa propre monnaie détenue
par un autre Etat si celui-ci en exprime la demande. Certaines conditions
essentielles doivent être remplies si l'on veut assurer le succès
de la convertibilité :
+ Grâce à des politiques budgétaire et
monétaire saines, il faut réaliser l'équilibre financier
interne afin d'éviter les pressions inflationnistes excessives qui
pourraient affaiblir la compétitivité du pays et
déséquilibrer la balance des paiements globale, compte tenu du
taux de change.
+ Pendant la période d'ajustement de la politique
intérieure, ou du taux de change, il faut maintenir un niveau suffisant
de réserves de change pour faire face au déficit temporaire de la
balance des paiements causé par un niveau élevé
d'investissement à l'étranger ou une sortie spéculative de
capitaux pour ne citer que deux exemples.
+ Il importe que le pays ait un taux de change réaliste
résultant d'un équilibre entre les paiements à destination
et en provenance de l'étranger sans avoir recours aux restrictions de
change, compte tenu de l'orientation de la politique
macro-économique.
+ Il faut libéraliser le système des incitations
afin que l'effet bénéfique de la convertibilité sur
l'allocation des ressources s'étende au reste de
l'économie53.
2.3. Les avantages et les limites de la
convertibilité
Il est largement admis que la libre circulation des capitaux
permet de lisser la courbe de consommation (moins de volatilité de la
consommation). Et contribue, dans une perspective théorique
libérale, à une meilleure répartition des ressources,
celles-ci ayant plus de chances d'être allouées aux coûts
les plus faibles aux demandeurs de
53 La libéralisation externe doit être
coordonnée avec une libéralisation interne
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crédits les plus productifs, lesquels sont aussi, sous
certaines conditions, les plus créateurs de croissance et d'emploi.
Dans ce même contexte, on notera aussi que la
convertibilité totale permet un alignement des prix domestiques aux prix
internationaux et il en va de même en ce qui concerne le taux
d'intérêt.
En outre, on attend également de l'ouverture
financière internationale une meilleure diversification du
risque54, une meilleure répartition de l'épargne, un
financement plus rapide et plus efficace des activités de production et
d'investissement, ainsi que des taux de rendement corrigés du risque le
plus élevés.
Cette affirmation repose essentiellement sur un constat
théorique affirmant que la libéralisation financière
externe permet d'atteindre une situation de bien être Pareto-optimale.
D'un point de vue théorique, dans la mesure où
les marchés de capitaux évoluent, le marché d'actions
domestique devient plus liquide, ce qui pourrait à long terme de
réduire la prime de risque des capitaux propres, diminuant par
conséquent le coût du capital et générant un effet
du prix positif.
La convertibilité monétaire permettra le
développement du marché obligataire et donc du financement
privé et public. Ceci permettra d'obtenir une courbe de rendements qui
pourra servir de référence pour une tarification du risque. Il
s'agit d'un développement plus que nécessaire pour
l'économie tunisienne où le crédit est universellement
indexé sur le taux du marché monétaire, ce qui rend
l'évaluation du risque quelques fois difficile.
Par la suite, on reconnaît de plus en plus que la
convertibilité totale exerce un effet positif à l'échelle
internationale et un effet disciplinaire sur la politique économique.
En effet, faire partie du «club » des monnaies
totalement convertibles et stable peut s'avérer utile dans la mesure
où cela indique aux acteurs de marché que le pays tient à
mettre en place sa crédibilité externe sans recourir uniquement
aux instruments qu'il peut contrôler55.
Afin de profiter pleinement des bénéfices de la
convertibilité totale, les pays en développement doivent
bénéficier d'une bonne crédibilité. L'instauration
de celle-ci
54 Rapport n° 14 du CAE « Instabilité
du système financier international »
55 Tytell et Wei (2004), Does Financial Globalization
Induce Better Macroeconomic Policies?
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passe par la sélection de réformes
fondamentales. Il s'agit alors de donner un signal clair aux différents
marchés.
Par ailleurs, la convertibilité totale exerce
également un effet disciplinaire sur la politique
macroéconomique. Elle rend nécessaire la mise en oeuvre de
réformes visant à améliorer le fonctionnement du
marché : au fur et à mesure que sont levées les
restrictions de change, le coût de tout manquement à la
crédibilité augmente.
A cet égard, toute incohérence dans la mise en
oeuvre des politiques économiques est sanctionnée et impliquera
un prix à payer. En effet, la mise en oeuvre de politiques
macroéconomiques et structurelles inadaptées, comme cela a
été le cas dans quelques pays d'Amérique Latine depuis les
années 1970-1980 et en 1997 avec la crise asiatique, qui a
déclenché une fuite de capitaux et une crise de la balance des
paiements ce qui a conduit ces pays à reculer en abandonnant l'ouverture
aux marchés de capitaux internationaux ainsi que la
convertibilité.
La convertibilité totale d'une telle monnaie nationale
signifie que cette monnaie pourra être échangée contre
n'importe quelle autre monnaie étrangère sans aucun obstacle.
Cependant, cette convertibilité peut se traduire par la présence
de plusieurs avantages pour l'économie du pays qui a fait la
convertibilité de sa monnaie.
Généralement et selon la plupart des travaux,
les avantages de la convertibilité sont les suivants :
+ La protection contre le risque de change.
+ La diversification des portefeuilles des agents
économiques.
+ L'amélioration de la compétitivité de
l'économie nationale.
+ L'intégration de l'économie nationale dans les
économies mondiales.
+ Le rendement accru de l'épargne.
+ La meilleure efficacité de l'intermédiation
financière nationale.
Tandis que, la présence de ses avantages ne signifie pas
l'absence des limites
de la convertibilité d'une monnaie nationale. Ainsi, la
convertibilité d'une monnaie nationale présente certaines limites
à savoir :
+ La volatilité du taux de change : Les
différentiels des taux d'intérêts et de
l'inflation entre une monnaie nationale et le reste du monde
risquent de se traduire par une fuite de capitaux. Cet effet pourra conduire
à une dépréciation de la monnaie nationale par rapport aux
autres monnaies étrangères. Dans le cas où la balance des
paiements est déficitaire, on peut
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observer une dépréciation de la monnaie
nationale par rapport à la monnaie étrangère et
l'existence d'une énorme fuite de capitaux.
? Effets négatifs sur la politique monétaire :
Généralement, les fluctuations des taux d'intérêts
et des taux de change sur les marchés financiers et sur les
marchés de change internationaux peuvent amener les autorités
monétaires à augmenter les taux d'intérêts pour
prévenir et dépasser la fuite des capitaux. Cette augmentation
des taux d'intérêts est faite même si elle n'est pas
compatible avec les impératifs du développement économique
interne d'un pays.
? Risque de substitution des devises à la monnaie
nationale : Dans les périodes inflationnistes, les agents
économiques préfèrent substituer les devises fortes
à leurs monnaies nationales.
? Risques liés à la situation de
l'économie : Ces risques proviennent du déficit des comptes
extérieurs. Par exemple, le taux de couverture des importations par les
exportations est très faible ou insuffisant.
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