CHAPITRE III : UN PROCESSUS D'INTEGRATION A
L'EPREUVE
Après plus de cinquante ans d'indépendance,
l'Afrique de l'Ouest, à l'instar des autres régions du continent,
demeure fortement divisée. Seuls quelques pays des seize Etats qui
composent cette région ont une population supérieure à dix
millions d'habitants. Ce qui fait que les marchés nationaux de ces Etats
restent très étroits pour accueillir de gros investissements. Ce
découpage de la région par les puissances coloniales est
aujourd'hui renforcé par les barrières culturelles,
linguistiques, administratives, commerciales et économiques.
Cependant, « Le besoin de surmonter ces obstacles est
évident, dans un monde de plus en plus interdépendant et on
constate chez les penseurs et les responsables du développement dans la
région, un engouement sincère pour l'intégration
régionale et la coopération régionale
».32Mais la première étape qui doit servir
de socle aux organisations régionales et à l'Union Africaine(UA)
passe nécessairement par une parfaite intégration
régionale entre pays voisins immédiats33. C'est dans
ce contexte que les Etats du Sénégal et de la Mauritanie doivent
concrétiser de manière officielle une « intégration
» que vivent les peuples
I. Les freins à l'intégration :
1.1. Des velléités souverainistes encore
vivaces :
Malgré les souhaits des populations et des Etats,
l'intégration entre le Sénégal et la Mauritanie bute sur
plusieurs obstacles. La souveraineté des Etats dans les espaces
frontaliers, se traduit par les contrôles des mouvements frontaliers.
Ainsi les candidats à l'émigration sont soumis aux contraintes et
aux exigences des Etats. Pour les partisans du contrôle territorial, la
libre circulation au niveau des frontières a comme conséquence
une baisse des recettes douanières et le développement de la
contrebande.
32 CRDI, 1995, l'intégration régionale
en Afrique de L'Ouest.
33 Sy (S.H), 2002.Les relations entre le
Sénégal et la Mauritanie à travers le poste frontalier de
Rosso Sénégal de
1960à 2002, mémoire de maitrise .
UCAD - Département de géographie, Mémoire de
maîtrise de Géographie présenté par M. Barka BA 2010
49
« Les relations transfrontalières entre deux
villes jumelles du fleuve Sénégal : Matam Réo et Matam
Sénégal »
En outre, la réserve de certains Etats vis-à-vis
de la libre circulation est fondée dans l'absence de soubassement
historique des entités politiques et sur le manque de la culture
démocratique qui exclut toute participation des migrants au débat
politique34. L'intégration en Afrique reste très
souvent une affaire des gouvernants, les avis des populations
frontalières ne sont jamais recueillis lors des dialogues visant
à rapprocher ces peuples. A cet effet, les populations ne se sentent
presque pas concernés par les accords bilatéraux signés
entre les deux pays, tant sur le plan économique que sur le plan social.
L'orientation du débat vers la dimension économique de
l'intégration a relégué au second plan la libre
circulation des personnes.
L'intégration entre le Sénégal et la
Mauritanie sera difficile à réaliser tant que la Mauritanie ne
rejoindra pas l'UEMOA et continuera à lorgner du coté de la Ligue
Arabe. Sans une réelle liberté de circulation des personnes et
des biens, l'intégration entre les deux pays ne sera qu'un voeu
pieux35.
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